République et canton de Genève
Grand Conseil
Séance du vendredi 28 juin 2013 à 10h
57e législature - 4e année - 10e session - 59e séance
PL 11162-A
Premier débat
Le président. Nous passons maintenant au point 173 de notre ordre du jour, qui est classé en catégorie II - trois minutes par groupe. Madame la rapporteure de majorité, vous avez la parole.
Mme Anne Marie von Arx-Vernon (PDC), rapporteuse de majorité. Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, formellement, les comptes des entités faisant partie du périmètre de consolidation font l'objet d'une approbation séparée de celles qui constituent le coeur de l'Etat. Pour des raisons pratiques, seules certaines de ces entités annexes ont fait l'objet d'auditions par la commission des finances, cela dans le cadre de l'examen des différentes politiques publiques par les paires de commissaires concernées. Les propos sur ces diverses entités sont principalement évoqués dans le rapport sur le PL 11161 qui traite de la gestion pour l'année 2012 et qui a été rigoureusement étudié. La commission des finances a attiré l'attention du Conseil d'Etat sur la difficulté et l'ampleur de la tâche consistant à valider les comptes d'autant d'entités, qu'elle ne connaît parfois guère. Elle privilégierait donc à l'avenir une autre façon de procéder. La majorité de la commission des finances vous remercie toutefois de bien vouloir voter le PL 11162 approuvant les états financiers consolidés de l'Etat de Genève pour l'année 2012.
M. Renaud Gautier (L), rapporteur de minorité. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, afin d'éviter quelques fâcheries inutiles, j'aimerais dire à titre préalable que le quatrième tome sur les comptes est probablement le plus intéressant et qu'il est admirablement bien fait. C'est une source de renseignements que chacun devrait lire avec la plus grande des attentions.
Pour revenir au fond du problème, Monsieur le président, j'aimerais vous dire ici, en singeant certains jeunes, mon total respect vis-à-vis de celles et ceux qui, sur la base du rapport de majorité, adopteront les comptes consolidés. Total respect, car ils créeront chez moi un sentiment d'une infinie perplexité quant à la question de savoir comment on peut adopter des comptes consolidés sur la base de ce rapport. Mais soyons un peu plus spécifiques. Dans les normes comptables traditionnelles, de même que dans les normes IPSAS, le principe des comptes consolidés veut que celui qui adopte ces comptes ait par définition le pouvoir d'amender ou de changer ceux-ci. Or, surprise, ce n'est pas le cas pour un certain nombre d'entités du compte consolidé de l'Etat, comme les SI, les TPG ou l'Aéroport. J'ouvre une petite parenthèse en disant que le principe voudrait que, lorsqu'on adopte des comptes consolidés, les entités qui elles-mêmes ont des entités auxquelles elles participent présentent des comptes consolidés, or aucun ni personne dans cette salle n'a jamais vu par exemple les comptes consolidés de l'Université.
Pour expliquer le sens de cette impossibilité que nous avons aujourd'hui à adopter les comptes consolidés, permettez-moi, Monsieur le président, d'utiliser une petite métaphore pâtissière. Dans le cadre du gâteau de mariage que vous allez offrir tout bientôt à Mme la présidente des Verts, vous vous rappelez que ledit gâteau est composé d'un certain nombre d'étages. Alors, par analogie, nous allons dire que l'étage du bas, le plus grand, ce sont les comptes du petit Etat, dont chacun d'entre vous a pu goûter la pâte, voire mettre ses doigts dans la crème pâtissière pour savoir si elle était bonne. Quant au deuxième étage, qui pourrait être par exemple celui des TPG, vous pouvez tout au plus le regarder, mais si vous aviez une quelconque suspicion que la pâte n'est pas bonne ou que la crème pâtissière n'est pas fraîche, eh bien vous n'auriez aucun moyen de corriger cet état de fait. Il en va de même pour les deux autres étages supérieurs. Il ne vous restera plus donc, Monsieur le président, qu'à mettre d'un côté une petite statue vous représentant et de l'autre celle de Mme le sautier du Grand Conseil, mais la question de fond est la suivante: allez-vous offrir un gâteau de mariage à la présidente des Verts lorsque vous savez que celui-ci est somme toute indigeste ? Dans la mesure où vous êtes un homme de qualité, je sais que vous ne le ferez pas. Par analogie, c'est ce à quoi nous sommes confrontés aujourd'hui: nous n'avons aucun moyen, tant par rapport aux SI ou aux TPG qu'à l'Aéroport, d'émettre un quelconque avis, et on nous demande pourtant d'adopter ces comptes. C'est donc une impossibilité matérielle que j'évoque ici pour vous recommander aux uns et aux autres de ne pas, en l'état, accepter les comptes consolidés avant que le Conseil d'Etat, par le biais peut-être de la révision de la LGAF, arrive avec une solution qui, effectivement, si l'on nous demande d'adopter les comptes, nous permette d'avoir la maîtrise de l'ensemble des entités.
M. Christian Bavarel (Ve). Mesdames et Messieurs les députés, nous les Verts voyons la situation de manière un petit peu différente. Il y a quelques années, il n'y avait pas de comptes consolidés: nous avions le petit Etat et puis après des sommes qui étaient réparties dans d'autres entités. Nous ne voyions pas très bien quel était l'engagement du canton de Genève, et l'on s'est rendu compte au moment des difficultés de la Banque cantonale que nous étions engagés ailleurs, et lourdement ! A présent, nous sommes donc informés, et ce que nous faisons aujourd'hui, c'est de dire que nous avons bien lu et bien vu l'ensemble des engagements et des différents endroits où se trouve l'Etat de Genève. En ce sens-là, pour nous, les comptes consolidés sont extrêmement importants et il est essentiel que le parlement dise qu'il les a lus. Bien évidemment, nous pourrions aller beaucoup plus loin dans les détails, nous pourrions vouloir disposer de plus de précisions, mais ces comptes ont aussi été approuvés par les organes respectifs de ces différentes entités et nous regardons que ce processus ait bien eu lieu.
Je suis d'accord avec M. le député Gautier lorsqu'il dit qu'il y aurait des choses à améliorer. En revanche, je ne peux pas me rallier à sa conclusion: nous, les Verts, approuverons ces comptes consolidés, en disant qu'il y a un progrès de l'information financière de ce parlement qui est extrêmement important. Nous entendons continuer à disposer de cette information, et il convient que ce soit bien devant nous que finalement ces comptes arrivent sous la forme de comptes consolidés et que l'on définisse quel est le périmètre de consolidation de l'Etat. Tout cela est en train d'être fait, et c'est notre travail en commission des finances. Mesdames et Messieurs les députés, je vous invite donc simplement à approuver ces comptes.
M. Eric Leyvraz (UDC). L'UDC est évidemment satisfaite d'avoir des comptes consolidés, car c'est quand même un élément indispensable pour la gestion d'un Etat, et puis ce sont les chiffres que les banques ou les offices de notation prennent en compte pour accorder leurs prêts ou mettre leurs notations.
Les remarques de M. Gautier sont tout à fait justifiées: il est quand même un petit peu problématique de devoir accepter des comptes consolidés quand on a des entreprises comme les TPG, les SIG ou l'Aéroport car, s'agissant des comptes consolidés de ces entités-là, eh bien nous n'avons aucun contrôle sur ces autres consolidations. Dans le fond, c'est une question de confiance: on vote sans savoir exactement ce qu'on va voter, parce qu'il y a quand même des points qui restent pour nous un peu mystérieux et auxquels on ne comprend rien, et ça pose toujours le problème de se dire que, si on a donné notre accord et qu'ensuite quelque chose de mal se produit, on va nous le reprocher. C'est donc pour cette raison que l'UDC s'abstiendra de voter, en espérant qu'on arrivera à rectifier un peu ces problèmes qui ne paraissent pas trop graves à première vue, mais le jour où la situation se dégradera, par exemple pour les Services industriels, car des entités dans lesquelles ils ont des actions perdent de l'argent, eh bien on nous reprochera d'avoir accepté les comptes consolidés en quelque sorte les yeux fermés.
Présidence de M. Antoine Droin, premier vice-président
M. Roger Deneys (S). Je remercie M. Gautier pour son rapport de minorité, parce que je pense qu'il soulève de très bonnes questions et qu'il évoque aussi la perplexité de la commission des finances, en tout cas dans sa grande majorité, même si elle a majoritairement accepté ces comptes consolidés.
En réalité, la façon dont on doit traiter les comptes consolidés de l'Etat est complexe. C'est vrai que d'une certaine façon on pourrait penser que, en adoptant les comptes du petit Etat d'un côté et ceux des entités séparément, les comptes consolidés en résultant devraient automatiquement être considérés comme adoptés par le Conseil d'Etat, puisque c'est une sorte de synthèse des différents comptes individuels, et que le Grand Conseil ne devrait pas se prononcer sur l'ensemble. Je dis ça parce qu'on pourrait aussi imaginer que les uns ou les autres s'opposent tout à coup aux comptes d'une des entités concernées et soient donc assez embarrassés face à la question de savoir ce qu'il faut faire avec l'ensemble quand on n'est pas d'accord avec une partie. M. Gautier évoquait la question de la qualité de la crème, mais peut-être que d'autres auraient préféré de la crème végétale plutôt que de la crème de Gruyère ! Moi je préfère la crème de Gruyère, mais chacun ses goûts ! On pourrait donc dire que, parce qu'on ne partage pas le point de vue sur l'un des aspects, l'ensemble est évidemment problématique. C'est pour cela qu'on devrait peut-être plutôt se contenter d'adopter chaque compte séparément et faire en sorte que le travail de la consolidation et de son adoption soit du ressort du Conseil d'Etat. Ainsi, vu cette perplexité aussi liée au temps consacré à cette étude, j'aurais tendance à partager la position de M. Leyvraz et donc à suggérer l'abstention constructive, parce que c'est en attendant une meilleure méthode.
Et puis j'aimerais quand même relever une éminente vérité scientifique que ce projet de loi nous donne l'occasion d'observer: en sciences, en mathématiques et aussi en informatique, bien entendu, on signale qu'il est important de commettre les erreurs en nombre pair, parce que lorsque les erreurs sont commises en nombre pair, la deuxième erreur peut, avec un peu de chance, compenser la première. Eh bien ici on a exactement ça avec la fameuse histoire du prélèvement de l'argent dans les comptes des SIG: cela a induit une erreur de 60 millions dans les comptes de l'Etat de Genève, mais comme il en a résulté une erreur dans l'autre sens de 60 millions dans les comptes des SIG...
Le président. Il vous reste quinze secondes, Monsieur le député !
M. Roger Deneys. ...eh bien les erreurs se sont annulées et les comptes consolidés sont donc, eux, exacts, parce qu'il y a eu deux erreurs.
M. Yvan Zweifel (L). J'aimerais ici parler non seulement en tant que député, mais aussi en tant qu'expert-comptable. Il m'a été souvent donné, dans ma carrière d'expert-comptable, de voir des états financiers consolidés, et j'approuve les propos de notre collègue Bavarel, qui a extrêmement raison: il faut remercier l'Etat pour l'énorme travail qui a été réalisé, parce que l'on peut avoir une vraie source d'informations complètes avec ces états financiers consolidés. Néanmoins, je suis obligé de partager l'avis de notre rapporteur de minorité, parce que lorsqu'on veut faire des états financiers consolidés, il faut d'abord définir un périmètre de consolidation, afin de savoir ce qu'on consolide et ce qu'on ne consolide pas, et pour cela il existe des règles extrêmement strictes, que l'on retrouve dans IPSAS 6: pour les entreprises, il s'agit de l'article 963 du code des obligations, mais il y a bien d'autres normes encore. Or les deux principales conditions à la consolidation, c'est d'abord le contrôle, et là on a bien compris - le rapporteur de minorité l'a très bien expliqué - qu'il y a des entités sur lesquelles on n'a tout simplement pas le contrôle effectif, ne serait-ce que parce que l'on ne vote pas les comptes de ces entités-là, en conséquence de quoi il n'est pas possible de les consolider.
Vous avez alors une deuxième condition, qui pourrait fonctionner pour les TPG, les SIG et d'autres, c'est celle des avantages. Si ces entités-là fournissent des avantages, des prestations de service public que devrait donner l'Etat, alors on peut les consolider, mais là aussi sous certaines conditions. Mais alors on a un autre problème, c'est qu'il y a des entités qui devraient être consolidées mais qui ne le sont pas. On se retrouve donc avec des états financiers où il y a des entités qu'on contrôle mais qu'on ne consolide pas et on ne sait pas pourquoi, et vous avez des entités, selon le deuxième critère, qu'on devrait consolider mais qu'on ne consolide pas.
Nous sommes par conséquent face à des états financiers qui sont soit incomplets, puisqu'il y a des entités qu'on devrait consolider mais qui n'y figurent pas, soit faux, puisqu'on consolide des choses qu'on ne devrait pas consolider, vu que l'on n'a pas le contrôle direct dessus. Que devrait-on dire d'ailleurs de la BCGe, pour laquelle on a rajouté un critère qui n'existe dans aucune norme comptable pour faire en sorte qu'on ne la consolide pas, alors que l'Etat la maîtrise à 53% ! Et là je reviens sur les propos de notre collègue Bavarel, qui lui-même disait que c'est très bien d'avoir des états financiers consolidés, puisque justement avec la BCGe on s'est rendu compte de ce qui se passait. Or que fait-on ? On l'exclut de facto. Je ne comprends donc pas tellement quel est l'intérêt de l'exclure !
En conclusion, les états financiers consolidés, oui, mais ils doivent être complets et justes. Ici ils sont soit incomplets, soit faux, en conséquence de quoi il faut rejoindre le rapport de minorité et les refuser.
M. Roger Golay (MCG). Mesdames et Messieurs les députés, on peut effectivement s'associer au rapporteur de minorité au sujet de ces comptes consolidés: nous n'avons pas le contrôle absolu au niveau de diverses entités, et il est évident que l'on peut constater que, par rapport à cela, la commission des finances navigue à vue et pas aux instruments, ce qui est regrettable, car cela crée un flou. Notre groupe ne pourra par conséquent pas se prononcer favorablement au sujet de ces comptes et donc s'abstiendra, car nous n'irons tout de même pas jusqu'à voter négativement ces comptes. Toutefois, nous nous rallions à ce qui a été dit par le rapporteur de minorité: il faut revoir ce système pour que l'on ait en tout cas une vue d'ensemble et surtout toute la documentation nécessaire afin de pouvoir se prononcer sur certaines entités au niveau des comptes, puisqu'il n'est pas normal de voter un paquet sans avoir pu contrôler certaines de ces institutions de droit public.
Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à M. Bernhard Riedweg, à qui il reste une minute quarante.
M. Bernhard Riedweg (UDC). Merci, Monsieur le vice-président. Pas plus tard qu'il y a une heure, nous avons voté le rapport de gestion, le compte de profits et pertes et le bilan des Services industriels de Genève pour l'année 2012. Le Grand Conseil a tout de même reçu les informations financières, ce qui nous rassure, mais nous nous abstiendrons aussi lors de ce vote sur ce projet de loi.
M. Renaud Gautier (L), rapporteur de minorité. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, je vois que l'élève Bavarel est un tout petit peu dissipé. Monsieur Bavarel, vous avez raison: la somme d'informations qui figure dans ce document est extrêmement intéressante et utile pour ce parlement, mais le débat n'est pas là ! Ce que l'on nous demande aujourd'hui, c'est d'adopter des comptes consolidés, et le problème est probablement là, dans le sens où ce n'est pas à nous de les adopter, puisque ce sont des comptes consolidés sur lesquels...
Le président. Il vous reste trente secondes, Monsieur le rapporteur !
M. Renaud Gautier. ...nous n'avons pas la maîtrise. La problématique est donc posée: dans la mesure où l'on ne peut pas adopter ces comptes, nous pouvons accepter - comme je l'ai dit préalablement - l'intérêt que ceux-ci représentent pour le parlement et les députés d'une manière générale, mais il nous faut admettre aussi que l'on ne peut pas, quand ça nous arrange, tordre le cou aux règles comptables, alors qu'effectivement nous n'avons pas la maîtrise sur un certain nombre de problèmes. En conclusion, c'est oui à ces comptes à titre informatif, mais non à leur adoption.
Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à M. Christian Bavarel, puis je la passerai à Mme la rapporteure de majorité.
M. Christian Bavarel (Ve). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, le seul point à relever, c'est que l'objet parlementaire à titre informatif n'existe pas. Nous avons trois objets parlementaires possibles, et avec un projet de loi on va être coincé, il va donc bien falloir qu'on reste dans le cadre des objets parlementaires et de ce que l'on sait faire. Aujourd'hui, on nous propose une information qui est de qualité, vous le reconnaissez. Les objets parlementaires et ce que sait faire un parlement, c'est toujours un peu compliqué, et si vous demandez à un parlement de faire autre chose que ce pour quoi il a été créé, il n'arrivera pas à fonctionner, et on va donc se retrouver sans l'information. Je préfère avoir de l'information et adopter ce projet de loi avec l'information à disposition plutôt que de voter la tête dans le sac sans savoir et donc sans avoir l'information du tout. D'ailleurs je remercie le gouvernement de nous avoir fourni ces informations ! C'est la commission des finances qui avait pourtant demandé de manière extrêmement insistante que l'on finisse par avoir des comptes consolidés, et maintenant qu'on les a, on dit que c'est trop compliqué et qu'on n'en veut pas ! C'est un peu classique de la part de notre commission, où l'on a souvent cette tendance à exiger des choses, puis, quand on les obtient, à vouloir faire autrement. (Exclamations.)
Le président. Merci, Monsieur le député. Monsieur Gautier, je crois qu'il ne vous reste plus de temps de parole.
M. Renaud Gautier (L), rapporteur de minorité. En l'occurrence, j'ai été mis en cause ! Je n'ai jamais dit... (Remarque.) Non, vous avez dit que la commission... C'est absolument faux ! (Commentaires.)
Le président. S'il vous plaît ! Monsieur Gautier, je vous donne dix secondes. (Exclamations.)
M. Renaud Gautier. On ne peut pas dire ici que les gens demandent quelque chose qu'ils ne veulent pas ! Le débat n'est pas là ! Le problème qui se pose, c'est qu'il s'agit d'un projet de loi qui demande une acceptation, alors que nous n'avons pas la capacité légale de l'adopter. C'est tout !
Le président. Merci, Monsieur le député, vous avez terminé. Madame la rapporteure de majorité von Arx-Vernon, vous avez la parole pour une minute quarante-cinq.
Mme Anne Marie von Arx-Vernon (PDC), rapporteuse de majorité. Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, M. le rapporteur de minorité Renaud Gautier n'a pas tort, mais il n'a pas raison non plus ! Pour un seul motif, c'est que refuser ce rapport serait un mauvais message, notamment pour les agences de notation, or nous avons besoin d'un signal fort, dans un climat de confiance nécessaire pour Genève, et c'est à ce titre-là que je vous recommande, comme la majorité de la commission, d'accepter de voter les comptes consolidés.
M. David Hiler, conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, en réalité ce qui se passe au niveau de ce problème, c'est que l'application des normes IPSAS met en lumière deux choses. D'abord, la remarquable complexité du système étatique. Au fur et à mesure de l'histoire, et pour d'excellentes raisons, l'Etat a clairement spécialisé un certain nombre d'institutions dans des tâches publiques. Je pense par exemple à la FIPOI ou à la FTI, qui ont été respectivement la base de notre politique pour la Genève internationale et de notre politique industrielle. Le problème, c'est que ces fondations, ces régies autonomes, ces divers établissements publics, ces institutions de droit public - vous les appellerez comme vous voudrez - sont nombreux et que leur périmètre d'action est extrêmement étendu. Le régime d'approbation qui existe avant les comptes consolidés est clairement incohérent. Dans un certain nombre de cas, vous êtes amenés à vous prononcer sur les comptes de l'entité, et dans un cas, je crois, sur le budget - il s'agit des SIG. Dans d'autres cas, vous vous prononcez sur le contrat de prestations, c'est vous qui le décidez, mais au fond vous ne vous prononcez pas sur les comptes.
La question que vous posez ne doit pas être réglée dans un vote d'humeur: il faudra la résoudre ces prochains jours au sein de la commission de contrôle de gestion, c'est-à-dire lors de l'adoption du projet définitif - on est à bout touchant - de la LGAF. Il y a clairement deux voies qui s'offrent à vous. Il faut que quelqu'un de l'Etat approuve les comptes individuels, puisque le conseil d'administration de chacune de ces entités est un conseil d'administration et non pas une assemblée d'actionnaires, si je puis faire ce parallèle. Il faut donc que quelqu'un approuve. Alors soit vous donnez par la LGAF une délégation au Conseil d'Etat pour approuver l'ensemble de ces comptes individuellement, les uns après les autres, soit vous souhaitez reprendre cette capacité. C'est à vous de décider, Mesdames et Messieurs les députés ! Voulez-vous vous prononcer sur l'ensemble de ces comptes individuellement, l'un après l'autre, et assumer ce rôle ? C'est la première question à laquelle vous devez répondre. Si vous souhaitez déléguer au Conseil d'Etat ce rôle d'approbation des comptes individuels de chaque entité du consolidé, je ne vous conseille toutefois pas de renoncer à votre compétence d'approbation des comptes consolidés. Pourquoi ? Parce que, s'agissant de ces comptes consolidés, en admettant que vous nous déléguiez l'approbation de l'ensemble des comptes individuels, le système démocratique - que ce soit dans le droit des actionnaires ou dans le droit public - exige que, tout à la fin, quelqu'un se prononce. Il y a donc deux questions ! D'abord à quel niveau souhaitez-vous intervenir ? Est-ce au niveau de l'approbation des comptes individuels de chaque entité ou est-ce sur le tout ? Et quels sont les moyens d'action dont vous pouvez disposer pour, de façon sélective, aller mettre votre nez là où vous avez l'impression que ça ne sent pas forcément bon ? Je ne vous recommande pas de vous priver de cette possibilité; à mon avis c'est une question d'organisation, d'approche plus sélective, peut-être, ou par tournus, mais je pense qu'il est mauvais que, sur des politiques publiques déterminantes pour notre canton - qu'il s'agisse d'énergie, de traitement des déchets, de mobilité, de politique industrielle ou de politique de la Genève internationale, pour ne prendre que ces exemples - vous disiez que c'est trop compliqué pour vous et que vous ne voulez pas regarder. De même que lorsque vous approuvez les comptes individuels sur 8 milliards, vous avez avant vous une série de couches de contrôle et vous vous concentrez à essayer de montrer qu'elles n'ont pas été suffisantes - ce qui est bien sûr votre rôle - ou à contester un certain nombre de choses qui sont non conformes à ce que vous aviez décidé dans le cadre du budget ou des contrats de prestations.
Le problème, c'est que ce n'est pas maintenant que nous allons décider: c'est lors du débat de cet automne sur l'adoption de la nouvelle LGAF que vous devrez trancher entre un certain nombre de voies. Il y a des avantages et des inconvénients, et vous n'êtes pas dans un débat simple. La meilleure solution n'est pas forcément facile à trouver, mais je pense que, institutionnellement, il serait malsain que votre Conseil se dessaisisse totalement de ce qui n'est pas loin, en réalité, de représenter le tiers de l'Etat, car ce sont toutes les tâches déléguées, et dans un avenir qui s'annonce un peu plus restrictif que ce que nous avons pu connaître à d'autres périodes, notamment lors de la dernière décennie, plus que jamais vous aurez besoin d'exercer un contrôle, parce que l'expérience a montré que le seul contrôle d'un conseil d'administration, dans lequel vos partis ne sont soi-disant pas assez richement représentés, ne suffit pas. La question se pose en amont pour le Conseil d'Etat. Aujourd'hui, c'est une tâche qui est déléguée assez largement au département dit de tutelle, mais vous savez bien ce que c'est qu'un Etat: il faut veiller à ce que ce ne soit pas l'établissement public autonome qui devienne la tutelle du département, et parfois il y a une certaine inégalité des forces.
Ces questions sont des questions institutionnelles centrales, et je vous recommande donc d'accepter ces comptes consolidés, parce que c'est ce que vous devez faire par rapport à la loi actuelle. Et simplement dire que vous n'avez pas envie d'assumer la responsabilité qui est la vôtre parce qu'en l'état vous n'êtes pas capables de le faire me paraît quand même un peu léger, puisque les lois précisent que vous devez le faire. Mais je dis aussi qu'il faudra prendre, vraisemblablement au mois d'octobre, la bonne décision, celle qui permette que les comptes consolidés et toutes ces entités n'échappent pas à la haute surveillance du parlement - ils ne doivent pas échapper à la haute surveillance du parlement ! - mais que d'autre part la tâche que vous vous donnez soit supportable et qu'il y ait une clarté quant au travail qu'on attend de vous. Et, à mon avis, le travail d'un parlement consiste à chercher les failles sur la base d'informations qui ont été données, de sorte à empêcher que par habitude, par complaisance, par veulerie ou par faveur on arrive à des dérapages dans certaines institutions dont vous seriez informés beaucoup trop tard, c'est-à-dire au moment où le scandale éclate d'une manière ou d'une autre. Merci de votre attention.
Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Nous sommes en procédure de vote concernant la prise en considération de ce projet de loi.
Mis aux voix, le projet de loi 11162 est adopté en premier débat par 36 oui contre 13 non et 25 abstentions.
La loi 11162 est adoptée article par article en deuxième débat et en troisième débat.
Mise aux voix, la loi 11162 est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 22 oui contre 19 non et 32 abstentions.
Le président. Nous avons donc fini notre débat sur les comptes 2012.