République et canton de Genève
Grand Conseil
Séance du jeudi 21 février 2013 à 20h30
57e législature - 4e année - 5e session - 23e séance -autres séances de la session
La séance est ouverte à 20h30, sous la présidence de M. Gabriel Barrillier, président.
Assistent à la séance: Mmes et MM. Charles Beer, président du Conseil d'Etat, Pierre-François Unger, François Longchamp, Isabel Rochat, Michèle Künzler et Pierre Maudet, conseillers d'Etat.
Exhortation
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, prenons la résolution de remplir consciencieusement notre mandat et de faire servir nos travaux au bien de la patrie qui nous a confié ses destinées.
Personnes excusées
Le président. Ont fait excuser leur absence à cette séance: M. David Hiler, conseiller d'Etat, ainsi que MM. Roberto Broggini, Pierre Losio, Ivan Slatkine et Pierre Weiss, députés.
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, l'ordre du jour appelle la prestation de serment d'un procureur. Je prie Mme le sautier de le faire entrer et l'assistance de bien vouloir se lever. (M. Philippe Knupfer entre dans la salle du Grand Conseil et se tient debout, face à l'estrade.)
Monsieur Knupfer, vous êtes appelé à prêter serment. Je vais vous donner lecture de la formule du serment. Pendant ce temps, vous tiendrez la main droite levée et, lorsque cette lecture sera terminée, à l'appel de votre nom, vous répondrez soit «je le jure», soit «je le promets». Veuillez lever la main droite.
«Je jure ou je promets solennellement:
- d'être fidèle à la République et canton de Genève, comme citoyen et comme magistrat du Ministère public;
- de constater avec exactitude les infractions, d'en rechercher activement les auteurs et de poursuivre ces derniers sans aucune acception de personne, le riche comme le pauvre, le puissant comme le faible, le Suisse comme l'étranger;
- de me conformer strictement aux lois;
- de remplir ma charge avec dignité, rigueur, assiduité, diligence et humanité;
- de ne point fléchir dans l'exercice de mes fonctions, ni par intérêt, ni par faiblesse, ni par espérance, ni par crainte, ni par faveur, ni par haine pour l'une ou l'autre des parties;
- de n'écouter, enfin, aucune sollicitation et de ne recevoir, ni directement ni indirectement, aucun présent, aucune faveur, aucune promesse à l'occasion de mes fonctions.»
A prêté serment:
M. Philippe Knupfer.
Veuillez baisser la main. Le Grand Conseil prend acte de votre serment et vous souhaite une heureuse carrière. La cérémonie est terminée. Vous pouvez vous retirer. (Applaudissements.)
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, l'ordre du jour appelle la prestation de serment de magistrats du pouvoir judiciaire. Je prie Mme le sautier de les faire entrer et l'assistance de bien vouloir rester debout. (Les magistrats entrent dans la salle du Grand Conseil et se tiennent debout, face à l'estrade.)
Mesdames et Messieurs, vous êtes appelés à prêter serment. Je vais vous donner lecture de la formule du serment. Pendant ce temps, vous tiendrez la main droite levée et, lorsque cette lecture sera terminée, à l'appel de votre nom, vous répondrez soit «je le jure», soit «je le promets». Veuillez lever la main droite.
«Je jure ou je promets solennellement:
- d'être fidèle à la République et canton de Genève, comme citoyen et comme juge;
- de rendre la justice à tous également, au pauvre comme au riche, au faible comme au puissant, au Suisse comme à l'étranger;
- de me conformer strictement aux lois;
- de remplir ma charge avec dignité, rigueur, assiduité, diligence et humanité;
- de ne point fléchir dans l'exercice de mes fonctions, ni par intérêt, ni par faiblesse, ni par espérance, ni par crainte, ni par faveur, ni par haine pour l'une ou l'autre des parties;
- de n'écouter, enfin, aucune sollicitation et de ne recevoir, ni directement ni indirectement, aucun présent, aucune faveur, aucune promesse à l'occasion de mes fonctions.»
Ont prêté serment:
M. Cédric-Laurent Michel, élu juge à la Cour de Justice (entrée en fonction: 1er juillet 2013);
M. Pierre-Yves Mauron, élu juge au Tribunal civil (entrée en fonction immédiate);
M. Ronald Asmar, élu juge suppléant au Tribunal civil (entrée en fonction immédiate);
M. Jean-Marc Siegrist, élu juge assesseur au Tribunal administratif de première instance, spécialisé en matière immobilière pour statuer en matière d'estimation et d'indemnisation en cas d'expropriation (entrée en fonction immédiate);
Mme Alexandra Hamdan-Leru, élue juge assesseur à la Chambre pénale d'appel et de révision (entrée en fonction immédiate);
Mme Evelyne Kolatte, élue juge assesseur psychiatre au Tribunal de protection de l'adulte et de l'enfant (entrée en fonction immédiate).
Veuillez baisser la main. Le Grand Conseil prend acte de votre serment et vous souhaite une heureuse carrière. La cérémonie est terminée. Vous pouvez vous retirer. (Applaudissements.)
Je rappelle aux personnes à la tribune qu'elles n'ont pas le droit de filmer ni de photographier, je suis désolé.
Discussion et approbation de l'ordre du jour
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, nous poursuivons notre séance. La parole est à M. le député Eric Stauffer.
M. Eric Stauffer (MCG). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, comme nous allons traiter de deux sujets qui concernent la police et la sécurité, le MCG a l'honneur de vous demander l'ajout et l'urgence pour la discussion - en même temps que les points 61 et 62 - du PL 11128, projet de loi que vous avez trouvé sur vos places, modifiant la loi sur les agents de la police municipale, les contrôleurs municipaux du stationnement et les gardes auxiliaires des communes, LAPM F 1 07.
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, je vous fais voter l'ajout de ce projet de loi, qui requiert la majorité des deux tiers.
M. Eric Stauffer. Je demande le vote nominal !
Le président. Le vote nominal est demandé. Est-il appuyé ? (Plusieurs mains se lèvent.) Il est appuyé !
Mis aux voix à l'appel nominal, l'ajout à l'ordre du jour du projet de loi 11128 est rejeté par 51 non contre 19 oui.
Le président. Cette demande d'ajout est refusée, la majorité des deux tiers n'étant pas atteinte.
Annonces et dépôts
Néant.
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, nous passons aux urgences. La parole n'étant pas demandée, je vous fais voter cette proposition de résolution.
Mise aux voix, la résolution 722 est adoptée par 59 oui (unanimité des votants).
Premier débat
Le président. Nous sommes en catégorie II: trente minutes de débat. Madame la rapporteure, prenez-vous la parole ? (Mme Nathalie Schneuwly acquiesce.) Très bien.
Mme Nathalie Schneuwly (R), rapporteuse. Mesdames et Messieurs les députés, la réforme de la police est un projet de longue haleine. Pierre Maudet est en train de terminer la préparation de la révision totale de la loi sur la police dans le cadre du projet Phénix initié par Isabel Rochat, en concertation avec les divers acteurs, notamment les communes.
Le projet de loi qui vous est proposé aujourd'hui s'inscrit dans le cadre du nouveau concept de police de proximité. Il s'agit d'une modification de la loi d'application du code pénal, qui consiste à pouvoir étendre les prérogatives conférées aux agents des polices municipales pour le traitement d'infractions simples, de même que pour le corps de police des gardes-frontières, indispensable dans le cadre de la criminalité transfrontalière. (Brouhaha. Le président agite la cloche.)
Ce projet a pour but de reconnaître les capacités de ces deux corps de police à mener des processus judiciaires jusqu'à leur terme. Par exemple, il permettra à un garde-frontière qui arrête une voiture transportant de la drogue de mener à terme le dossier. Dans ce cas, les gardes-frontières seront satisfaits de pouvoir terminer leur travail, d'être valorisés, et la gendarmerie, par exemple celle de Chêne, qui est proche de la frontière, se trouvera déchargée des tâches administratives occasionnées par ce genre d'affaires.
De même, pour les polices municipales, cela leur permettra, dans des cas simples, d'assurer le suivi administratif d'une interpellation, en procédant à une audition et en établissant le rapport. Cela déchargera la gendarmerie de la partie administrative lourde qui l'empoisonne et cela lui permettra d'être davantage présente sur le terrain. Pour la police municipale, c'est un plus et une valorisation de son travail. Enfin, pour tous, on gagne en efficience.
A ce stade, il est important de souligner qu'il ne s'agit pas de retirer des compétences aux gendarmes, mais de compléter les compétences des APM et des gardes-frontières, afin d'effectuer un judicieux partage des tâches; de plus, il y a une adhésion large de la part des communes.
En dernier lieu, cette révision est technique. En ce qui concerne les gardes-frontières, le catalogue des infractions pouvant leur être attribuées en vue d'un traitement ne fera pas l'objet d'un changement légal, mais celui d'une modification de la convention tripartite entre le ministère public, le département de la sécurité et le corps des gardes-frontières.
Par contre, en ce qui concerne la police municipale, notre Grand Conseil sera appelé à se prononcer sur ses tâches par le biais d'une modification ultérieure de la loi sur les agents de police municipaux. Je dis tout cela pour ceux qui auraient quelques réticences aujourd'hui encore. Attention, cette loi est appelée à rester lettre morte si l'on ne modifie pas la loi sur les agents de police municipaux; le débat sera certainement plus nourri à ce moment-là - c'est d'ailleurs pour cela qu'il n'avait pas été prévu que je m'exprime sur ce sujet, qui, je le précise, a été accepté à l'unanimité en commission.
C'est toutefois avec plaisir que je vous présente ces modifications proposées par notre conseiller d'Etat, et je vous encourage tous à voter ce projet de loi qui va dans le sens d'une plus grande efficacité de notre police, efficacité voulue par tous, et particulièrement par le PLR. Je vous remercie de votre attention.
M. Eric Stauffer (MCG). Monsieur le président, vous confirmez que c'est quatre minutes par groupe ? (Commentaires.) Trois minutes par groupe ! Très bien. C'est vrai que, la sécurité, la bâcler en trois minutes par groupe... C'est toujours un peu la même chose dans ce parlement. (Commentaires.)
C'est sûr que ça va dans un sens positif, le projet de loi déposé par M. Pierre Maudet, mais cela ne va de loin pas assez en profondeur. Pourquoi ? Parce qu'aujourd'hui on voit bien, déjà, que certains policiers municipaux, notamment au poste de Lancy-Onex... Je vous rappelle que ce poste est ouvert 24h sur 24, avec dix-huit policiers pour faire de l'administratif. Il n'y a plus aucune patrouille préventive sur onze communes, qui s'étendent de Lancy, Onex et Bardonnex, jusqu'à Chancy. Donc aujourd'hui, c'est le libre champ pour les criminels en tous genres !
Mesdames et Messieurs, je vous le dis, le canton de Genève est l'un des rares cantons en Suisse où la police municipale n'est pas armée ! Où la police municipale n'a pas de vraies compétences de police ! Aujourd'hui, le MCG se refuse à prendre le moindre risque, Mesdames et Messieurs, avec des gardiens de la paix qui arborent sur leurs voitures et uniformes le mot «Police» et qui ne sont pas armés !
Nous avons des problèmes, je vous en donne un exemple récent. (Brouhaha. Le président agite la cloche.) Dans le parking de la mairie d'Onex - qui est devenu une zone de deal pour la drogue, cela à des niveaux de grossistes - il y avait une voiture immatriculée à l'étranger; la police municipale ne veut et ne peut pas intervenir, parce que, quand elle va faire un banal contrôle d'identité, eh bien elle découvre que ce sont des criminels ! Et pas des petits dealers de boules de shit à 20 F, mais des gens qui sont armés ! Aujourd'hui, nous envoyons ces policiers municipaux au casse-pipe ! Car, s'il y a un problème, les criminels tirent d'abord ! Et peut-être s'apercevront-ils ensuite que ces pauvres gardiens de la paix n'étaient pas armés !...
J'interviendrai plus tard dans la soirée et je laisse la parole à mon collègue. Mais, trois minutes pour la sécurité... De qui se moque-t-on, dans cette république ! (Commentaires.)
Le président. Voyons, Monsieur le député, il y a des règles ! Il y a des règles, et tout le monde s'y soumet ! La parole est à M. Roger Deneys.
M. Roger Deneys (S). Mesdames et Messieurs les députés, comme l'a dit M. Stauffer, ce projet de loi ne va pas assez loin, et c'est pour cela que les socialistes ont déposé un amendement qui est un nouvel article 2 souligné, lequel vise à modifier la loi sur les transports publics de la façon suivante à l'article 11, alinéa 3: «Les membres du conseil d'administration ne peuvent siéger dans un exécutif cantonal.» (Brouhaha.) C'est une nouvelle formulation de l'article 11, alinéa 3, de la loi sur les TPG. Donc, afin de compléter ce projet de loi de façon intelligente, je vous invite à soutenir cet amendement. (Commentaires.)
Une voix. Pagani armé! Pagani armé !
Le président. La parole est à Mme Loly Bolay.
Mme Loly Bolay (S). Mesdames et Messieurs les députés, Monsieur le président, le groupe socialiste a voté ce projet de loi, parce que nous sommes conscients qu'il faut aider la police dans certaines tâches. C'est vrai qu'aujourd'hui il y a une certaine frustration de la part tant des APM que des gardes-frontières qui doivent, en arrêtant quelqu'un, appeler la police pour ensuite faire des auditions et des rapports. Et, le projet de loi le dit, c'est pour des infractions simples. Evidemment. Il ne peut pas en être autrement.
Maintenant, notre souci - et nous verrons ensuite de quelle manière le projet de loi sur les APM va changer les dispositions actuelles - est de savoir où l'on place le curseur. Les APM réalisent un travail de proximité, et il ne faudrait pas que ce travail de proximité pratiqué dans les communes soit, quelque part, modifié parce qu'il y aurait trop de travail à effectuer pour la police. Je mets ça au conditionnel, bien entendu.
L'autre souci, et nous l'avons dit en commission, concerne les auditions. Les auditions par les APM, où vont-elles se dérouler ? Vont-elles se dérouler dans les communes ? Si oui, est-ce que les communes ont les locaux nécessaires ? On ne le croit pas - avec la commission des visiteurs, nous sommes allés dans certaines communes, et ces lieux n'existent pas, donc il faudra les constituer. Et cela, c'est très important ! Ainsi, tout cela nous amène à beaucoup d'interrogations.
Alors, sur le fond, nous ne sommes pas opposés; sur le fond, nous pensons qu'aujourd'hui la police doit effectivement être délestée de certaines tâches. Il est vrai que les APM font un travail extrêmement important, mais où doit-on placer le curseur par rapport à cette délégation des tâches ? C'est important de le savoir; il est important qu'on nous le dise et, surtout, de quelle manière ce travail va être fait. Cela dit - nous avons aussi posé la question - bien entendu que tout cela se passe sous la compétence ou sous l'autorité d'un officier de police. Il ne peut pas en être autrement ! Car, quand on arrête quelqu'un et qu'on doit en informer le ministère public, il faut que ce soit un officier de police qui contrôle le travail, tant des APM que celui des services de douane.
Nous voterons donc ce projet de loi, mais, naturellement, nous serons extrêmement attentifs à la suite, c'est-à-dire aux prochaines dispositions qui suivront dans le cadre de la loi sur les APM.
M. Fabiano Forte (PDC). Mesdames et Messieurs les députés, le groupe démocrate-chrétien votera des deux mains ce projet de loi qui vise au renforcement de l'ensemble des maillons de la chaîne sécuritaire à Genève. On a parlé du corps des gardes-frontières, nous parlons de la gendarmerie, nous parlons de la police municipale, et cela nous semble un axe très important de la politique qui est proposée par le conseiller d'Etat en charge de ce département. C'est la raison pour laquelle, comme je l'ai dit, nous voterons ce projet de loi.
Il est vrai que nous attendrons de voir comment, pratiquement, cela pourra se dérouler dans les communes. On a parlé de lieux d'audition et nous serons également attentifs à ce que les conditions qui mèneront à ces auditions et à ces «enquêtes» - entre guillemets - soient de bonnes conditions et respectent la dignité humaine, comme veille à cela la commission des visiteurs officiels. Nous vous enjoignons donc, Mesdames et Messieurs les députés, de voter ce projet de loi.
Une voix. Bravo !
M. Miguel Limpo (Ve). Autant le dire tout de suite, les Verts voteront ce projet de loi de manière assez convaincue. En effet, pour nous, la police municipale est un outil extrêmement important dans la logique de la sécurité à Genève. C'est un outil complémentaire et cette loi permet une certaine reconnaissance à l'encontre de cette fonction. Il faut également souligner, comme l'a dit la rapporteure de majorité, que cette loi est souhaitée par les communes et il nous semble qu'elle répond à des besoins effectifs dans un certain nombre de communes suburbaines qui connaissent également les problèmes que peuvent rencontrer les grands centres urbains où la présence policière est plus forte.
Néanmoins, j'aimerais ici rendre attentif le Grand Conseil sur le fait que, pour les Verts, dire qu'il faut armer les policiers parce que ce sont des policiers, n'est pas un argument valable. Nous nous opposerons jusqu'au bout au fait d'armer les policiers municipaux ! Premièrement, parce que nous ne voulions pas appeler ce corps une police municipale, justement parce qu'elle n'était pas armée ! Et parce qu'elle risquait de provoquer des attentes auprès de la population, alors qu'elle n'est pas armée. Donc, nous nous opposerons à cela, également parce que la police municipale n'a pas forcément la formation pour être armée.
Et il me semble illusoire que le MCG crie à tort et à travers vouloir de la sécurité, en parler dix minutes, et penser que c'est cela qui va donner la sécurité ! Non ! Nous, nous voulons une politique de sécurité cohérente, laquelle ne s'effectue pas uniquement en s'exprimant ici dix minutes en faisant du populisme sur la sécurité ! Non, ça ne marchera pas !
Tout ça pour dire que nous voterons cette loi de manière convaincue... (Brouhaha. Le président agite la cloche.) ...que nous n'irons pas jusqu'à armer les policiers municipaux, et nous espérons que nous n'en arriverons jamais là. Si cela devait être le cas, nous ne suivrions pas le Conseil d'Etat dans cette proposition. Nous attendons donc avec impatience la loi sur les agents municipaux et nous serons très attentifs à toutes les dispositions qui y figureront. (Applaudissements.)
M. Patrick Lussi (UDC). Mesdames et Messieurs les députés, à titre de préambule, nous serons très clairs: l'UDC acceptera bien entendu ce projet de loi. Je fais choeur avec certains pour dire que ce projet de loi ne vas pas assez loin. Toutefois, était-ce vraiment l'objet de ce projet de loi ? Rappelons quand même que, dans sa présentation, le conseiller d'Etat a clairement dit qu'il s'agissait d'insérer dans la loi le processus légal permettant à un agent de police municipale, face à une infraction, si cette dernière est de son ressort, de la traiter jusqu'à la fin, et non pas d'avoir à attendre sur les lieux en appelant une patrouille de gendarmerie pour faire le travail à sa place. Il en est de même pour certaines dispositions du corps des gardes-frontières.
Je dirai en plus, Mesdames et Messieurs les députés, que pour notre parti, l'Union démocratique du centre, il était très important que le procureur général donne aussi un accord plus que favorable sur ces dispositions, étant donné que ce texte énonce la réalisation d'un travail administratif et judiciaire, et non pas de prévoir une nouvelle stratégie d'intervention anti-holdup de la part des APM. Eh bien, il était évident et nécessaire qu'il donne son aval, ce qui a été fait. (Brouhaha.)
Un dernier point, Monsieur le président: je ne peux pas rester sans réagir face à des choses qui sont insultantes pour les gens qui risquent leur vie... (Brouhaha.)
Le président. Monsieur le député...
M. Patrick Lussi. Alors, certes, les APM n'ont peut-être pas encore la formation, mais la formation, ça s'acquiert. Et dire qu'on ne peut pas leur donner une arme parce que ceci ou parce que cela, c'est d'un angélisme coupable qui peut causer des décès parmi ceux qui, tous les jours, ne sont pas dans leur fauteuil, mais sont dans la rue, face à des délinquants qui - eux ! - n'ont pas besoin d'un permis de port d'arme !
Le président. Merci, Monsieur le député. Je voulais vous interrompre, non pas quant à votre fougue, mais pour m'adresser aux groupuscules, qu'on trouve un peu partout - parmi les bancs - qui discutent entre eux. Alors, un peu de respect pour vos collègues ! Voilà ! La parole est à Mme la députée Nathalie Fontanet.
Mme Nathalie Fontanet (L). Mesdames et Messieurs les députés, le groupe libéral acceptera évidemment ce projet avec une très grande satisfaction, pour plusieurs raisons. (Brouhaha.) La première, c'est que cette meilleure collaboration entre tous les organes de sécurité va effectivement permettre une plus grande sécurité pour la population, nous en sommes convaincus. (Brouhaha.)
De même, nous remercions M. Maudet, qui a réussi à déposer ce projet de loi extrêmement rapidement, et avec l'accord de tous ! Tant l'accord du corps de police que l'accord des APM et celui des gardes-frontières. Les communes ont elles-mêmes aussi accepté ce projet de loi.
Ensuite, j'aimerais rappeler que ce projet de loi est un principe de déléguer certaines compétences plus importantes aux agents de police municipaux et aux gardes-frontières.
Il n'est évidemment pas envisageable dans la loi d'application du code pénal de prévoir si oui ou non un agent de police municipale peut être armé. Et de dire aujourd'hui que ce projet de loi ne va pas assez loin, c'est simplement ignorer le processus législatif, ignorer le contenu des lois et tenter de se faire mousser, voire d'en faire mousser certains !
Ainsi, nous nous réjouissons d'avoir à traiter en commission judiciaire la loi sur la police municipale, c'est dans le cadre de cette loi que nous pourrons déterminer de façon plus précise quelles seront les compétences qui seront déléguées à la police municipale, et nous espérons que nous pourrons traiter ce sujet dans la sérénité - de façon que le résultat final soit une plus grande sécurité - et non pas de se monter les uns contre les autres.
M. Frédéric Hohl (R). Mesdames et Messieurs les députés, nous aurions pu traiter ce projet de loi dans les extraits, parce qu'il constitue une première étape, cela a été rappelé. C'est une étape importante qui va aider la police, les APM et les gardes-frontières. Toutes les communes sont attachées à leurs polices municipales, et il faut que ça reste ainsi.
Alors, la question des armes, bien sûr qu'on peut l'évoquer, mais c'est beaucoup trop tôt pour l'aborder. N'oubliez pas un exemple: parmi les policiers les plus respectés au monde, les «bobbies», en Angleterre, 90% d'entre eux ne sont pas armés ! C'est donc quelque chose d'important, toujours aujourd'hui.
Mesdames et Messieurs les députés, nous nous réjouissons de travailler sur ce projet de loi en commission, et, bien évidemment, le groupe radical accepte ce projet de loi avec plaisir.
Une voix. Bravo !
M. Jean-Marie Voumard (MCG). Il est bien clair que le MCG applaudit ce projet de loi tant qu'il peut décharger le travail de la police cantonale. C'est le vrai problème, et ce projet de loi a tout de même été fait pour décharger la police cantonale du travail administratif supplémentaire occasionné par les gardes-frontières et les APM. Ce qui est surprenant, c'est qu'on donne des compétences pénales supplémentaires aux APM, mais que les policiers cantonaux ne sont pas tout à fait déchargés du travail administratif à effectuer.
J'ai aussi entendu que «police municipale équivaut à police de proximité»... Oui, Mesdames et Messieurs, je suis entièrement d'accord avec vous ! La police de proximité connaît les citoyens - on sait où trouver telle ou telle personne à telle heure, où elle va boire son apéro - voici le vrai travail, on peut décharger la police cantonale par les mandats de poursuite, les mandats de conduite délivrés par le procureur ou l'office des poursuites aux APM, et là on décharge vraiment la police d'une grande surcharge de travail !
M. Roger Deneys (S). Mesdames et Messieurs les députés, je vais revenir brièvement sur l'amendement que les socialistes ont déposé. Effectivement, ce projet de loi est incomplet et, même si nous le soutenons, nous pensons qu'il doit être complété par d'autres dispositions.
Tout à l'heure, les libéraux ont commis un acte de flibuste parlementaire qui est totalement inadmissible ! Les socialistes avaient déposé un projet de loi qui vise à rétablir l'autonomie de la Ville de Genève en matière de désignation de son représentant au sein du conseil d'administration des TPG. (Commentaires.)
Le président. Monsieur le député, je demande votre attention ! Premièrement, vous avez dépassé votre temps de parole !
M. Roger Deneys. Mais ça, je l'apprends maintenant !
Le président. Deuxièmement, en tant que président, je vous le dis très honnêtement et entre nous: je crois que vous êtes en dehors du sujet. Complètement en dehors du sujet ! Et le Bureau, que j'ai consulté, considère que cet amendement est irrecevable !
M. Roger Deneys. Je ne crois pas, Monsieur le président !
Le président. Et je ne peux pas vous laisser continuer, vous avez épuisé votre temps de parole.
M. Roger Deneys. Monsieur le président, j'ai peut-être épuisé mon temps de parole, mais l'amendement est recevable ! N'importe quelle modification à une loi peut être adoptée, il n'y a pas de problème avec cet amendement !
Le président. La parole est à M. Eric Leyvraz.
M. Roger Deneys. A partir du moment...
Le président. La parole est à M. Eric Leyvraz ! (M. Roger Deneys continue de s'exprimer hors micro.)
M. Eric Leyvraz (UDC). Merci, Monsieur le président. (Remarque de M. Roger Deneys. Le président agite la cloche.) Je voudrais rappeler que les «bobbies», aujourd'hui, sont armés. Simplement, leur arme n'est pas visible. Je voudrais rappeler aussi que nous avons une armée de milice et que la plupart des APM ont effectué leur service militaire - et, durant ce service de quatre mois, plus les cours de répétition, nous avons appris à manier des armes bien plus dangereuses que des pistolets. Alors dire qu'on ne peut pas donner une arme à des APM me semble bizarre, et une formation pourrait combler le vide.
Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à M. le conseiller d'Etat Pierre Maudet.
M. Pierre Maudet, conseiller d'Etat. Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, merci d'abord de ce soutien, certes contrasté, mais tout de même affirmé par tous les groupes, soutien ici émaillé de quelque amendement, là de quelques remarques. Ce soutien est important, parce qu'en réalité le projet de loi sur lequel vous vous prononcez ce soir est un projet qui devrait faire l'unanimité. L'unanimité, parce qu'aujourd'hui il s'agit de rétablir une situation normale. On ne parle pas encore des réformes en profondeur qui vont passer devant ce parlement au cours des prochains mois; il s'agit de corriger des aberrations qui résultent pour une part du nouveau code de procédure pénale et, pour l'autre part, de l'inflation administrative qui a frappé la police - les polices - ces dernières années.
Et j'aimerais dire ici à quel point il était urgent - pour ce projet de loi, comme pour le suivant - d'agir ! Non pas de parler, mais d'agir ! Pour que, par exemple, les gendarmes qui, chaque jour, oeuvrent au poste de Chêne et qui sont encombrés de procédures générées par les gardes-frontières - qui font aussi leur travail - eh bien que ces gardes-frontières puissent accomplir les procédures de A à Z.
Il aura un impact très concret, ce projet de loi, Mesdames et Messieurs ! C'est très concret, parce que, réellement, cela désengorge le travail de la police, le travail des gendarmes. Et cela procède d'une volonté que j'affiche depuis le début de mon mandat, il y a huit mois, dans la continuité de ma prédécesseure, qui est de restituer à chacun ses compétences, de faire en sorte que les policiers municipaux et les gardes-frontières puissent agir pleinement en fonction de ce pour quoi ils ont été formés. Il s'agit aussi de faire en sorte que la marge de manoeuvre qu'on a aujourd'hui, avant même de parler des nécessaires augmentations d'effectifs qui vous seront proposées, soit utilisée à plein. En un mot, Mesdames et Messieurs, ce projet de loi caractérise une forme de responsabilité dans l'action, pas dans la parole. Il doit permettre à la police d'être reconnue pour son travail, à chacun de retrouver sa place et de rétablir une situation normale.
Quant à la suite, le débat sur les armes, le débat sur l'extension des prérogatives des APM, le débat sur l'organisation générale de la police, rassurez-vous, il va arriver. Il va arriver dans les semaines et les mois à venir, mais nous avons ici un préalable très concret et nous allons voir ce soir qui soutient la politique que j'impulse, à savoir une politique concrète pour la sécurité de chacune et de chacun, tous les jours, dans la rue ! (Applaudissements.)
Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. La parole n'étant plus demandée, nous allons voter l'entrée en matière de ce projet de loi.
Mis aux voix, le projet de loi 11052 est adopté en premier débat par 84 oui (unanimité des votants).
Deuxième débat
Mis aux voix, le titre et le préambule sont adoptés, de même que l'article 10A (nouveau, à insérer dans le chapitre I du titre III).
Le président. Nous sommes saisis d'un amendement de M. Roger Deneys... (Remarque.) Attendez ! Motion d'ordre ! Monsieur Stauffer, vous avez la parole !
M. Eric Stauffer (MCG). Je trouve qu'on ne devrait pas accepter cet amendement qui n'a rien à voir avec ce projet de loi.
Le président. Merci, Monsieur le député. J'allais signifier à son auteur et à l'assemblée que le Bureau, unanime, considère cet amendement comme étant irrecevable. Nous poursuivons.
Mis aux voix, l'article 1 (souligné) est adopté, de même que l'article 2 (souligné).
Le président. Nous allons maintenant... (Brouhaha.) Le troisième débat est demandé.
Troisième débat
La loi 11052 est adoptée article par article en troisième débat.
Le président. Nous passons au vote final. Celles et ceux... (Commentaires.) Celles est ceux qui acceptent le PL 11052 votent oui, les autres votent non ou s'abstiennent. (Brouhaha.) (Le président est interpellé par M. Roger Deneys.) Monsieur le député, ça suffit ! (Commentaires. Exclamations.) Le vote est lancé !
Des voix. Carton rouge ! (Chahut.)
Mise aux voix, la loi 11052 est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 64 oui (unanimité des votants).
Le président. Nous passons maintenant... (Remarque de M. Roger Deneys. Brouhaha.) ...aux urgentes suivantes !
Premier débat
Le président. Il s'agit d'un objet classé en catégorie II et qui prévoit quarante minutes de débat. Madame la rapporteure de majorité, vous avez la parole.
Mme Nathalie Schneuwly (R), rapporteuse de majorité. Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés... (M. Roger Deneys interpelle le président. Commentaires. Brouhaha.)
Le président. Madame la rapporteure de majorité, vous avez la parole ! Vous pouvez y aller.
Mme Nathalie Schneuwly. Ce projet de loi n'apporte rien de nouveau. Il prévoit, au niveau cantonal, la situation qui prévalait avant l'introduction du code de procédure pénale, entré en vigueur le 1er janvier 2011. Il devrait donc être adopté sans discussion, puisqu'il ne fait que revenir à un état de droit admis par tous à l'époque et qui a échappé à l'oeil avisé des juristes.
Le législateur fédéral, en légiférant, a réglementé les procédures pénales et toute l'activité liée aux infractions commises. La conséquence est que le code de procédure pénale inclut des dispositions sur les moyens mis en oeuvre pour découvrir des personnes ayant commis des infractions, mais pas pour empêcher des infractions. (Brouhaha. Le président agite la cloche.)
Or, une des missions fondamentales de la police consiste à veiller au maintien de la sécurité publique et à empêcher la commission d'actes criminels. Il est donc important que la police puisse agir en amont, par des actions préventives, notamment dans la lutte contre le trafic de stupéfiants, contre la pédophilie sur les réseaux sociaux, la pornographie enfantine, ou encore pour prévenir des cas de tireurs fous qui commencent à apparaître en Europe.
Ce projet de loi prévoit d'ajouter trois articles à la loi sur la police: l'article 21A sur l'observation préventive, l'article 21B sur les recherches préventives secrètes et l'article 22 sur l'enquête sous couverture.
L'observation préventive constitue une forme spécifique de recherches préliminaires secrètes. Elle consiste notamment à permettre à la police d'observer des personnes ou des choses dans des lieux publics. Elle peut avoir recours à des enregistrements audio ou vidéo et à d'autres moyens techniques, comme une balise posée sur un véhicule lors d'une filature.
Les recherches préventives secrètes qui supposent un contact passif, et non pas la mise en place d'un piège, visent le flagrant délit. C'est très utile pour interpeller les dealers sans avoir à se légitimer - lorsqu'un policier doit révéler son identité à un vendeur de cocaïne, celui-ci n'a qu'à avaler sa marchandise et il est ensuite difficile de prouver son trafic... La Task force drogue a dû renoncer à ce type d'interventions ponctuelles depuis deux ans, et il est indispensable de redonner à la police les moyens de ses actions.
L'enquête sous couverture sert à infiltrer des réseaux, notamment les réseaux sociaux, dans la lutte contre la pédophilie ou encore pour pénétrer dans certains milieux sous une fausse identité. Ces mesures sont prises pour des infractions graves ou particulières.
A ce stade, il est bon de préciser qu'il ne s'agit pas de ficher des personnes, mais de pouvoir mener des enquêtes bien cadrées. Il faut préciser aussi que ces mesures sont subsidiaires: elles ne seront mises en place qu'après que toutes les autres mesures ont été tentées. Et vu les coûts engendrés par des telles mesures, elles ne seront certainement pas utilisées à la légère.
Les débats en commission ont essentiellement porté sur la gravité de l'infraction. Le projet de loi parle de crimes et délits, qui sont par définition des infractions graves, puisque punies par des peines allant jusqu'à trois ans pour les délits et plus pour les crimes. Cela ne concerne pas les contraventions.
Enfin, il convient encore de souligner que Vaud et Schwyz ont déjà légiféré; ce projet se base sur celui de nos voisins. La Confédération a même placé une antenne dans le canton de Schwyz, afin de traquer les pédophiles en attendant de modifier la législation fédérale.
Pour toutes ces raisons, la majorité de la commission vous demande d'entrer en matière sur ce projet de loi et de le voter tel qu'il est ressorti de la commission.
Le président. Merci, Madame la rapporteure de majorité. La parole est à Mme Buche, rapporteure de minorité.
Mme Irène Buche (S), rapporteuse de minorité. Mesdames et Messieurs les députés, la minorité n'est pas en soi opposée à l'instauration de mesures préalables: il faut que la police ait les moyens de faire son travail et, dans certains cas, d'enquêter à titre préventif avant la commission d'une infraction. Il faut toutefois que ces mesures préalables ciblent des infractions bien précises. Il faut qu'elles soient limitées à des infractions graves, par exemple la pédophilie ou des actes de terrorisme. Or, le projet de loi qui vous est soumis ce soir vise tous les délits et crimes - soit la plupart des infractions listées dans le code pénal suisse et dans d'autres lois pénales ! C'est la raison de trois des amendements que nous avons déposés ce soir. J'y reviendrai durant le deuxième débat.
D'autre part, il faut reconnaître que ce projet de loi a été traité au pas de charge par la commission judiciaire et de la police, on peut même dire qu'il a été bâclé ! (Commentaires.) Nous n'avons reçu aucune information convaincante sur la compatibilité de ce projet de loi avec le droit fédéral, aspect qui était pourtant mis en doute par une partie de la doctrine, et la majorité de la commission a refusé l'audition du professeur Sträuli, qui aurait pourtant pu nous éclairer sur cette question. De même, nous n'avons eu aucune réponse sur la législation du canton de Schwyz, qui est pourtant citée en exemple par le département de la sécurité. Ça a été la même chose pour la législation vaudoise.
La seule audition effectuée a été celle de notre procureur général, M. Jornot, qui a exprimé d'importantes réserves sur ce projet de loi - vous retrouverez cela dans le rapport de majorité. Il a notamment dit que ce projet de loi ne serait pas applicable dans le domaine des stupéfiants. Il vous suffit de lire le rapport de majorité pour le voir !
Donc, après ce passage en commission, il est resté beaucoup de doutes et de questions sur la table - en tout cas beaucoup plus que de réponses ! C'est dans ces conditions que ce projet de loi a été voté. Ce n'est vraiment pas très sérieux, car ce projet de loi implique un risque important de violation des libertés fondamentales, et ce n'est pas une question qu'on peut traiter en deux séances.
D'autre part, quand on avance dans l'examen de cette problématique on découvre des choses assez étonnantes. Par exemple, le Conseil d'Etat dit avoir repris la loi schwyzoise; mais il ne l'a pas reprise intégralement, puisque cette loi prévoit que de telles mesures doivent être autorisées par le Tribunal des mesures de contrainte. C'est la même chose dans le canton de Vaud. Pourtant, le projet de loi qui vous est soumis prévoit que c'est le chef de département qui, pour une seule des trois mesures, doit autoriser la poursuite d'une enquête au bout de trente jours. Or, curieusement, j'ai pu constater que l'exposé des motifs du projet de loi genevois est quasiment le même que celui du projet de loi vaudois ! Je regrette donc que le Conseil d'Etat ne soit pas allé jusqu'au bout de la démarche.
Nous avons ainsi déposé des amendements qui demandent que ce soit le Tribunal des mesures de contrainte qui soit compétent pour autoriser toutes les mesures prévues par ce projet de loi.
De plus, il y a un autre problème sérieux qui n'a trouvé aucune réponse lors du travail en commission, c'est l'incertitude sur la limite autorisée du délai de conservation des données recueillies dans le cadre de telles mesures.
Le président. Il vous reste trente secondes, Madame le rapporteur.
Mme Irène Buche. Merci, Monsieur le président. Personne n'a pu répondre à cette question pourtant essentielle, des réponses différentes ayant été données par les divers représentants du département de la sécurité. Il n'y a aucune disposition dans la loi; et même si on nous dit que c'est la LIPAD qui s'applique, cela ne nous a pas été démontré. Aujourd'hui, on n'en sait effectivement pas plus !
La minorité vous invite donc à refuser ce projet de loi, qui touche aux libertés fondamentales, qui ne prévoit aucun contrôle judiciaire de l'activité de la police...
Le président. Il vous faut conclure, Madame !
Mme Irène Buche. J'y arrive, Monsieur le président. Ce projet de loi ne prévoit aucune règle sur la durée de conservation des données personnelles recueillies et risque tout simplement de provoquer à terme, peut-être, un nouveau scandale des fiches, qu'on aimerait pourtant bien prévenir ! (Applaudissements.)
Le président. Merci, Madame la rapporteure de minorité. La parole est à M. le député Roger Deneys.
M. Roger Deneys (S). Mesdames et Messieurs les députés, j'aimerais revenir sur l'amendement que j'ai déposé tout à l'heure... (Exclamations.) ... et que vous avez refusé de soumettre au vote !
Le président. Monsieur le député, je suis désolé !
M. Roger Deneys. Je parle, vous parlez après !
Le président. Vous êtes hors sujet, je dois vous priver de parole !
M. Roger Deneys. Non, je ne suis pas hors sujet ! (Le micro est coupé.)
Le président. Je passe la parole à... (M. Roger Deneys continue de s'exprimer hors micro.) ...M. Roger Golay !
M. Roger Deneys. J'aimerais juste dire que c'est illégal, ce que vous avez fait ! Je contesterai la loi devant la Chancellerie, parce que vous ne pouvez pas interdire un amendement de la sorte ! Vous suspendez la séance !
Le président. Monsieur le député Golay, vous avez la parole. (M. Roger Deneys continue de s'exprimer hors micro. Brouhaha.)
M. Roger Golay (MCG). Non, non, stop ! Je ne peux pas intervenir !
Le président. Vous avez la parole, Monsieur Golay.
M. Roger Golay. Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, comme nous avons beaucoup de choses à dire, nous souhaitons que soient déduites les secondes perdues à cause des élucubrations de M. Deneys.
Je voudrais simplement dire que le groupe MCG soutiendra... (Brouhaha. Le président agite la cloche.) ...ce projet de loi 11056 concernant la modification de la loi sur la police et les mesures préalables.
Effectivement, aujourd'hui il y a un vide juridique, il manque un instrument avec les dispositions légales nécessaires pour que la police puisse mener ses investigations secrètes. Il était temps d'agir et l'on peut féliciter M. Maudet d'avoir pris en main ce dossier pour nous le soumettre.
Cela n'a pas été, comme il a été prétendu, traité au galop en commission judiciaire - vous avez eu tout le temps de pouvoir vous exprimer et demander les auditions nécessaires pour aller de l'avant. Simplement, en ce qui concerne le groupe MCG, nous avons déposé un amendement à l'article 21A, alinéa 3, qui mentionne que le chef du département peut prolonger les investigations secrètes par rapport à tout ce qui concerne les écoutes et les enregistrements vidéo. Nous estimons que ce n'est pas le rôle d'un conseiller d'Etat de donner cette prérogative à la police - on mélange les rôles ! Il faut savoir - et vous le savez tous - que le rôle du Conseil d'Etat est de donner sa mission générale à la police, mais pas de se mêler d'enquêtes et de procédures pénales en cours, même si elles sont préalables.
Nous allons donc déposer un amendement à ce sujet, afin que cette compétence revienne au procureur de permanence, et non pas - comme cela a été proposé par les socialistes, dans un amendement - au Tribunal des mesures de contrainte. Car cela serait beaucoup trop long ! Il faut savoir qu'une prolongation doit éventuellement pouvoir être reportée à 2h du matin si des indices sérieux indiquent qu'il faut continuer une enquête, mais il ne faut pas que cela dépende d'un tribunal qui pourrait faire perdre plusieurs jours ou plusieurs semaines avant l'obtention du feu vert pour continuer des investigations secrètes.
Le MCG souhaite donc que l'ensemble du parlement le suive sur cet amendement. Et, ainsi que je l'ai dit, nous soutiendrons bien sûr ce projet de loi.
M. Eric Stauffer (MCG). Mesdames et Messieurs les députés, je dois simplement intervenir sur l'amendement socialiste, pour relever que c'est le même angélisme qui a frappé les Verts... De temps en temps, on vous retrouve alliés - avant de vous retrouver ennemis. On vient dire qu'il ne faut pas armer la police municipale, que ce doit être le rôle de la police, etc. Eh bien, le drame, aujourd'hui à Genève, c'est que la criminalité a pris une telle avance et est devenue tellement plus violente qu'il y a vingt ans, que, à Genève, nous sommes toujours en train de courir après le train, à force de prendre du retard ! Et ça, c'est notre responsabilité, chers collègues, puisqu'il nous appartient de voter les lois pour que l'exécutif puisse les appliquer.
Alors nous saluons les efforts du conseiller d'Etat - qui, à tout le moins, a l'énergie de faire les choses - ce que nous suivrons évidemment avec beaucoup d'intérêt. Ce serait bien pour vous, Mesdames et Messieurs les députés, que vous puissiez partager, une fois, une nuit avec une patrouille de gendarmerie. (Commentaires.) Cela vous donnerait juste une idée de ce qui se passe dans votre ville, Mesdames et Messieurs les députés ! (Brouhaha.) Et j'encourage M. le conseiller d'Etat à autoriser les cent députés à passer une nuit avec la gendarmerie et la nouvelle brigade anti-criminalité...
Le président. Il vous faut conclure, Monsieur le député.
M. Eric Stauffer. ...pour voir ce qu'est devenue Genève, c'est-à-dire un supermarché de la drogue !
Le président. Je vous remercie. La parole est à M. Christian Bavarel.
M. Christian Bavarel (Ve). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, les Verts pensent qu'en termes de criminalité il faut abandonner toute naïveté. Nous estimons qu'il est raisonnable que la police essaie d'intervenir en amont de problèmes de pédophilie. Nous sommes aussi d'avis, lorsque quelqu'un annonce sur les médias sociaux qu'il veut faire exploser une école ou faire preuve d'autres comportements dangereux - et souvent, cela a été annoncé - eh bien, nous sommes d'avis que la police doit essayer d'intervenir en amont. Effectivement, nous estimons qu'il y a un besoin.
Néanmoins, nous pensons que quelqu'un qui, à 20 ans, aurait annoncé sur Facebook qu'il voulait tuer son enseignante d'allemand parce qu'il la déteste, et que, bien des années plus tard, il se retrouve à vouloir postuler à un poste ou à un autre... (M. Christian Bavarel est interpellé.) Monsieur le député, je vous en prie, il ne s'agit pas forcément d'un prof d'allemand. Ce pourrait être, parfois, des professeurs de mathématiques... (Rires.) ...qui sont insupportables, et... (Commentaires.) ...d'autres fois, ce pourrait être ceux de français ! Et même, d'autres fois encore, c'est le cours de gymnastique qui est insupportable pour certains élèves ! Je le reconnais volontiers. Mais ce n'était qu'un exemple parmi d'autres !
Nous considérons simplement que ce n'est pas parce que quelqu'un a eu un délire d'un soir sur un média social qu'il faut que cela le poursuive vingt ans après, que cela figure sur sa fiche de police durant tout ce temps et que ce soit conservé. Donc nous pensons que cette loi qui nous est proposée ne donne pas assez de garanties par rapport au délai: on nous parle d'un délai nécessaire, et pas d'autres types de délais ! Nous sommes extrêmement inquiets, car nous pensons qu'il y a là le vrai risque d'une dérive, qui est à prévoir. Imaginez qu'un parti politique - prenons par exemple un parti politique célèbre et extrêmement important à Genève, comme le MCG - soit considéré par les policiers comme étant infiltré par des islamistes... (Commentaires.) Une enquête secrète serait menée, un policier se pointerait gentiment pour dire qu'il veut adhérer. Ce serait facile, vu qu'il est relativement simple pour un policier d'adhérer au MCG ! Ce policier commencerait son enquête et ferait des fiches sur tout le monde... Et ça non plus, ce n'est absolument pas défini correctement dans la loi.
Nous avons cette chance d'avoir - presque tous les partis - des élus fédéraux, et nous discutons avec eux. Nos élus fédéraux nous ont dit que, d'ici à avril, au niveau fédéral, nous allons avoir des réponses; une loi est prévue. Elle est faite et elle est du droit supérieur, de niveau fédéral. Donc nous avons estimé que nous sommes, en commission, allés trop vite, considérant que certains éléments se produire très rapidement au niveau fédéral.
Nous voyons aussi que d'autres cantons ont résolu deux ou trois problèmes, entre autres celui de l'autorisation des enquêtes préliminaires, laquelle a été attribué à la justice, dans les cantons de Vaud, de Fribourg, et ailleurs. Des réponses ont été données; nous n'avons pas la même notion, et ce que nous vous proposons, c'est de renvoyer ce projet de loi en commission, de l'étudier plus à fond au vu des dernières informations dont nous avons pu disposer entre le dépôt du projet de loi et aujourd'hui. Nous voyons que le droit avance au niveau supérieur et que les autres cantons ont résolu ce problème de manière différente, nous pensons que ce projet doit retourner à la commission de justice et de la police.
Le président. Merci, Monsieur le député. Une demande de renvoi formelle est faite, Mmes les rapporteures vont s'exprimer. Madame la rapporteure de majorité, vous avez la parole.
Mme Nathalie Schneuwly (R), rapporteuse de majorité. Monsieur le président, nous nous opposons au renvoi en commission. Ce projet de loi a été traité correctement: il est mûr, il convient de le voter !
Mme Irène Buche (S), rapporteuse de minorité. Monsieur le président, je suis exactement de l'avis contraire de la rapporteure de majorité: ce projet n'est pas mûr, il a été traité trop vite et pas sérieusement ! Donc oui, je pense qu'il faut renvoyer ce projet en commission. (Brouhaha.)
Le président. Merci, Madame la rapporteure. Monsieur le conseiller d'Etat, vous pouvez vous exprimer sur le renvoi.
M. Pierre Maudet, conseiller d'Etat. Je m'exprimerai très rapidement, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, nous parlons d'un sujet extrêmement grave; j'aurai l'occasion, j'espère, de développer tout à l'heure le contenu. Ce projet de loi ne peut pas attendre, il s'agit ici de rétablir une situation qui est normale !
J'insiste par ailleurs, Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, sur le fait que, comme je l'ai énoncé tout à l'heure, la LPol en général sera amenée à être révisée prochainement, et, si d'aventure nous voulions revenir sur ce point à la faveur de cette révision, il serait naturellement possible aux députés, dans le cadre de la commission judiciaire et de la police, d'apporter des modifications ou de demander des compléments. Mais j'insiste, il s'agit ici de sécurité publique et de rendre la capacité aux policiers de faire leur travail: cela ne saurait souffrir de délai ! (Applaudissements.)
Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Je vous soumets, Mesdames et Messieurs, la proposition de renvoi à la commission judiciaire et de la police.
Mis aux voix, le renvoi du rapport sur le projet de loi 11056 à la commission judiciaire et de la police est rejeté par 56 non contre 30 oui.
Le président. Nous poursuivons notre débat. La parole est à Mme la députée Christiane Favre.
Mme Christiane Favre (L). Mesdames et Messieurs les députés, alors que nous nous plaignons des cambriolages, de la violence de certaines attaques à main armée, de l'existence de réseaux pédophiles, je peine un peu à comprendre que l'on soit aussi frileux avec cette modification de loi. Lorsque, par malheur, il se produit en effet un événement violent, on tombe à bras raccourcis sur le magistrat qui n'a pas su prévoir l'événement ou sur la police qui n'a rien vu venir. Nos concitoyens leur demandent d'être quasiment sur place avant les cambrioleurs ou de coffrer les pédophiles avant qu'ils n'aient eu le temps de récidiver, mais d'un autre côté, quand il s'agit de donner une base légale à l'observation, aux recherches d'informations ou aux enquêtes sous couverture, on imagine immédiatement que notre police se mue en je ne sais quelle «Stasi» !
Alors je peux comprendre les craintes de dérapage, je les trouve même salutaires, il faut que les bonnes questions soient posées et que le débat se fasse ! Or ce débat a eu lieu en commission et nous avons eu l'assurance qu'il existe des garde-fous. D'abord, on nous a rappelé, comme M. Maudet vient de le faire, que ces dispositions n'étaient pas nouvelles; elles rétablissent la situation précédente, modifiée par le nouveau code de procédure pénale. Nous avons donc déjà vécu avec elles !
Ensuite, contrairement à ce qu'affirme le rapport de minorité, il est hors de question que ces mesures soient appliquées sans la moindre surveillance. Non seulement elles doivent être autorisées par le chef de la police, mais encore - si elles se prolongent au-delà de trente jours - par le chef du département lui-même. Enfin, la conservation de ces données et l'accès aux informations sont soumis à la LIPAD.
Nous exigeons beaucoup de la police, Mesdames et Messieurs les députés, alors je vous en prie, lorsqu'on nous le demande, offrons-lui autre chose que des chaussures à clous pour débusquer des sprinters en baskets ! (Rires.) Le groupe libéral acceptera ce projet de loi tel qu'il est présenté, et je vous remercie de faire de même.
Des voix. Bravo ! (Applaudissements.)
M. Vincent Maitre (PDC). Non seulement ma préopinante, Mme Favre, a parfaitement décrit la situation, mais M. Maudet également, au sujet du statut urgent que présente ce projet de loi. Pendant que nous débattons ici, pendant que certains estiment que les travaux en commission ont été bâclés, des crimes et des délits continuent à être perpétrés à Genève ! Contre cela, il faut agir rapidement; les citoyens nous le demandent suffisamment comme ça au quotidien !
Ce projet de loi a le mérite de redonner à la police les outils dont elle a besoin, et a fortiori de façon préventive, puisqu'on est en phase de préprocédure, pénalement. J'ai l'impression que le mot «prévention» devrait résonner correctement à l'oreille de nos amis de la gauche qui revendiquent souvent la prévention comme motif !
Pour ce qui est des amendements, malheureusement, le PDC ne pourra pas accepter l'amendement du MCG, qui prétend donner des compétences au procureur général. Cela n'est tout simplement pas possible, puisque nous sommes en phase préprocédurale et que, à ce stade, le procureur général n'est par définition pas encore saisi et seule la police est munie de ces compétences. Or, le responsable de la police, c'est bien l'autorité politique détenue par M. le conseiller d'Etat en charge du département de la sécurité. Il lui revient donc, à lui, d'en assumer la responsabilité, raison pour laquelle nous refuserons ce premier amendement.
Il en sera ainsi du deuxième amendement, celui des socialistes, en ce qu'il entend attribuer cette compétence - la surveillance de ce que prévoit ce projet de loi - au Tribunal des mesures de contrainte. Cela aussi n'est tout simplement pas possible. Non seulement parce que le code de procédure pénale - qui est donc une loi de rang fédéral - attribue des compétences au Tribunal des mesures de contrainte de façon exhaustive et qu'il n'est pas de la compétence de ce parlement d'en décider autrement, mais également parce que, en précision de ce code de procédure pénale fédéral, la loi d'organisation judiciaire - qui, elle, est genevoise - y renvoie expressément et n'offre pas plus de possibilités que cela en termes de compétence.
Le Tribunal des mesures de contrainte, avec toute la bonne volonté du monde - toute la meilleure volonté du monde - est, comme son nom l'indique, un tribunal des mesures de contrainte, c'est-à-dire qu'il statue sur les détentions: sur la détention préventive, sur la détention pour des motifs de sûreté. Il n'a absolument aucune compétence en matière de mesures préprocédurales telles que celles qui sont prévues dans ce projet de loi, à savoir l'observation, la recherche préventive et l'enquête sous couverture.
Voilà pourquoi, Mesdames et Messieurs les députés, nous refuserons ces deux amendements et vous encourageons, comme les autres groupes de la majorité, à soutenir des deux mains ce projet de loi.
M. Patrick Lussi (UDC). Mesdames et Messieurs les députés, un premier mot: l'Union démocratique du centre, au même titre que le MCG, remercie le conseiller d'Etat Pierre Maudet, parce que ça, c'est un projet de loi courageux politiquement, courage dont vous, les bancs d'en face, vous ne ferez jamais preuve ! Jamais, jamais, jamais ! (Brouhaha.) Qu'en est-il, en définitive ? Comme l'a dit M. le conseiller d'Etat, on revient à une situation ante.
Et je prendrai l'exemple de mon préopinant M. Bavarel. Oui, en tant qu'élu de l'Union démocratique du centre, je n'ai aucune crainte à ce que la police puisse venir enquêter dans nos bureaux, sous couverture et secrètement, pour voir si quelque nazillon s'y cacherait: il n'y en a pas ! Et même si c'était le cas, vous vous seriez trompés d'exemple, parce que ceci est du ressort fédéral, et la police n'aurait rien à voir dans les agissements politiques. (Brouhaha. Le président agite la cloche.)
Ma préopinante l'a clairement dit, nous sommes sans arrêt en train de nous plaindre - «Vous n'en faites pas assez !», «Vous ne surveillez pas assez !»... Or, là, qu'est-ce qui peut mieux garantir la sécurité des gens, que tout ce qui peut être fait préalablement avec un contrôle strict ! Et ce contrôle strict, il est garanti, il est indiqué ! C'est la raison pour laquelle, pour peut-être donner un peu plus et pour vous dire que nous allons aussi parfois dans votre sens, l'Union démocratique du centre soutiendra le très bon amendement du MCG. Ce qu'il faut, c'est une permanence ! Il faut parfois qu'une décision d'enquêter soit prise dans l'heure, ce qu'un magistrat de permanence pourra faire.
En résumé, Mesdames et Messieurs les députés, oui, c'est un projet de loi intermédiaire et on sait qu'on devra revoir la loi - on revient à une situation ante et ce projet de loi est nécessaire. Pour une fois, on fait preuve de courage politique et, si vous me le permettez - vous ne me le permettrez pas, mais je vous le dis quand même ! - ce genre de projet de loi modifie les erreurs de ce qu'on appelle le code de procédure pénale qui est, pour moi, le code de protection du prévenu ! Je vous remercie.
M. Frédéric Hohl (R). Mesdames et Messieurs les députés, ce projet de loi permettra à la police de se faire passer pour des «dealers», afin de signaler les flagrants délits; la police pourra «chatter» sur internet pour débusquer des pédophiles; elle pourra prendre une fausse identité pour débusquer des criminels.
Mesdames et Messieurs les députés, la population réclame ce projet de loi ! Tout comme le groupe radical, bien évidemment ! Nous avons pleinement confiance en la police ! Elle a d'autres chats à fouetter que de coller des puces GPS ou effectuer des écoutes téléphoniques pour des vols de bicyclettes, Mesdames et Messieurs ! Soyons sérieux ! Je vous encourage à voter ce projet de loi. (Applaudissements.)
Le président. Vingt secondes au député Golay, qui s'estime mis en cause !
M. Roger Golay (MCG). Oui, Monsieur le président, j'ai été mis en cause - gravement - par M. Vincent Maitre, qui doute de ce que j'ai pu dire avant ! (Commentaires.)
Une voix. Ça va !
M. Roger Golay. Il faut simplement savoir que, par rapport à l'amendement, quand M. Maitre dit que ça ne pourrait pas être un procureur de permanence qui décide dans le cas d'une enquête préalable, c'est faux, Monsieur le président ! On n'a qu'à prendre exemple sur la disposition légale des Vaudois, qui ont octroyé cette compétence au Tribunal des mesures de contrainte.
Le président. Voilà, vos vingt secondes sont épuisées.
M. Roger Golay. Je m'étonne que M. Maitre, qui est un juriste, puisse se tromper de la sorte !
Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à Mme la députée Loly Bolay, à qui il reste... (Remarque.) Trois minutes ! Ah oui !...
M. Roger Deneys. Cinq minutes ! Parce qu'on ne m'a pas laissé parler avant ! (Commentaires.)
Le président. S'il vous plaît, Mesdames et Messieurs !... Allez-y, Madame la députée. (Remarque.) S'il vous plaît ! C'est le président qui préside, cher collègue !
Mme Loly Bolay (S). Merci beaucoup, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, tout d'abord, le parti socialiste regrette que ce projet de loi ait été traité en commission avec beaucoup de dextérité - beaucoup trop ! - car ce projet de loi a énormément d'incidences. Nous le regrettons, et nous l'avons dit. Nous avons proposé des auditions, elles ont toutes été balayées !
Alors, je voudrais vous signaler que, sous l'ancienne loi - la LFIS, loi fédérale sur l'investigation secrète - des investigations préalables étaient prévues, mais qu'aujourd'hui le nouveau code de procédure pénale ne les prévoit plus. Moi, j'ai entendu M. Hohl nous dire que ce projet de loi ferait en sorte qu'on puisse lutter contre la loi sur les stupéfiants. M. Jornot - j'ai pris le procès-verbal - nous a dit très clairement - alors qu'il vient de vos bancs ! - qu'il était très sceptique sur ce projet de loi !... Il vous l'a dit ! Il nous l'a dit ! Et qu'est-ce qu'il nous a dit ? Il nous a dit que, concernant les stupéfiants, cette loi ne serait pas applicable. Pourquoi cette loi ne serait-elle pas applicable en matière de stupéfiants ? Parce que - le CPP l'indique - l'agent doté d'une identité d'emprunt ne pourra donc pas effectuer des recherches préalables. C'est le code de procédure pénale qui le dit !
Ensuite, vous vous êtes vantés, pendant les auditions, de la loi vaudoise... Seulement, Monsieur le conseiller d'Etat, vous ne nous avez pas donné la loi vaudoise. Et la loi vaudoise, elle, a le mérite de cadrer avec, véritablement, les dispositions ! Parce que «La mise en oeuvre des recherches préliminaires entreprises par la police cantonale repose sur l'autorité du Tribunal des mesures de contrainte, sollicitée par le ministère public.»
Or, ici, vous vous octroyez un droit, un droit que vous n'avez pas à avoir, je regrette ! Et, pourtant, j'ai souvent défendu en ce lieu les chefs de départements qui se sont succédé ici et qui n'étaient pas forcément de gauche ! Mais, je regrette, l'autorité que vous voulez vous donner n'est pas acceptable et n'est pas reconnue par le code de procédure pénale ! Parce que le CPP dit qu'il faut l'autorité d'un juge ! Et non pas d'un politique, qui viendrait dire qu'il faut renouveler pour trente jours encore...
Une voix. Bravo !
Mme Loly Bolay. ...la dénonciation ! Ce n'est pas acceptable ! Lisez le code de procédure pénale !
Le président. Il vous reste trente secondes, chère Madame !
Mme Loly Bolay. Si vous voulez que cette loi soit applicable, attendez que les Chambres fédérales modifient l'article 283 CPP, ce que la loi vaudoise stipule d'ailleurs dans son projet de loi. Alors, là, on pourra faire quelque chose.
Aujourd'hui, en l'état, ce projet de loi n'est pas du tout autorisé par le code de procédure pénale, et vous le savez ! La loi vaudoise l'autorise, mais parce qu'elle le cadre ! Mais votre loi à vous ne le cadre pas, et c'est un abus qui s'attaque aux droits fondamentaux ! Monsieur le conseiller d'Etat, le groupe socialiste réfléchira à lancer le référendum contre une loi qui est inique... (Exclamations.) ...parce qu'elle va beaucoup trop loin !
Des voix. Bravo ! (Applaudissements.)
Le président. La parole est à M. le député Vincent Maitre, pour cinquante-cinq secondes. (Brouhaha.) S'il vous plaît ! (Le président agite la cloche.) On écoute le député Maitre !
M. Vincent Maitre (PDC). J'aurai besoin de moins de temps que ça, Monsieur le président. Je voulais juste répondre à l'argument de Mme Loly Bolay quant à la loi sur les stupéfiants et que ce projet ne s'appliquerait pas en matière de stupéfiants. C'est vrai, cela n'a tout simplement aucune incidence, puisque l'acte préparatoire qui consiste à se faire offrir de la drogue rentre déjà dans le cadre d'une infraction pénale que la loi sur les stupéfiants réprime expressément. Par définition, les conséquences sont rigoureusement les mêmes.
Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est maintenant à M. le conseiller d'Etat Pierre Maudet.
M. Pierre Maudet, conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, je n'avais pas prévu d'intervenir durant le premier débat, mais vu ce qui vient d'être dit, je ne peux pas m'empêcher d'apporter ici quelques éclairages sur les propos, à mon sens excessifs, de la préopinante socialiste qui, dans une inversion totalement surprenante, nous qualifie d'abuseurs, nous qui défendons ce projet de loi qui, précisément, devrait permettre de lutter contre les abus actuels générés par ce vide juridique. Et je me plais ici à souligner la contradiction qui consiste d'un côté à se référer à la loi vaudoise quand ça arrange, mais, de l'autre côté, de ne pas aller jusqu'à pousser la comparaison plus loin, lorsque précisément cette loi genevoise - qui est l'exacte copie de la loi vaudoise - est dénoncée de son côté.
Quant à la référence au droit supérieur, s'il vous plaît, depuis combien d'années attend-t-on que Berne légifère contre le système des jours-amende, pour revenir en arrière ? Depuis six ans ! Alors, à force d'attendre que la loi fédérale ne change, à force d'espérer que les Chambres fédérales ne puissent éventuellement songer à modifier une législation inopérante, Mesdames et Messieurs les députés, pour une fois qu'on a la possibilité - au niveau cantonal - d'agir, eh bien agissons !
J'aimerais ici souligner, Mesdames et Messieurs, à quel point on essaie de nous faire croire par des subterfuges de langage que ce projet de loi toucherait une matière qui, en réalité, est fédérale. On ne parle pas ici de terrorisme, c'est d'une compétence fédérale ! Et vous le savez, sauf à n'avoir pas écouté en commission. On ne parle pas non plus de lutte contre les islamistes. C'est une compétence fédérale; c'est la police fédérale; ce sont les lois fédérales qui s'appliquent, et non pas cette loi cantonale ! Et, pour ça, on est déjà couverts. On parle de quoi ici ? On parle d'actes préparatoires dans des braquages ! On parle ici de lutte contre la pédophilie ! On parle très concrètement de choses qui, dans les compétences cantonales, aujourd'hui, chaque jour, représentent des menaces ! Et l'on fait ici un débat quand même légèrement surprenant, pour ne pas dire franchement hallucinant, s'agissant de savoir si l'on va se donner les moyens d'agir en amont des infractions ! Et se donner la capacité, véritablement, de déjouer des réseaux criminels qui, aujourd'hui, sont de plus en plus puissants !
Alors, j'aimerais, Mesdames et Messieurs, dans ce débat d'entrée en matière, insister sur l'importance de faire preuve d'un peu de pragmatisme. Il faut se dire que d'autres cantons l'ont fait, certes avec de subtils détails qui peuvent différer, mais je vous prie d'être honnêtes et de les prendre tous dans leur globalité. Si l'on ne peut entrer en matière là-dessus et, pour une fois, de façon si possible unanime - comme pour le projet de loi précédent - soutenir cette démarche qui est une reconnaissance de la police, alors franchement je me demande ce qu'il faut faire comme efforts dans le domaine de la sécurité ! (Exclamations. Applaudissements.)
Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, la parole n'étant plus demandée, je vais vous soumettre l'entrée en matière de ce projet de loi.
Mis aux voix, le projet de loi 11056 est adopté en premier débat par 59 oui contre 29 non.
Deuxième débat
Mis aux voix, le titre et le préambule sont adoptés.
Le président. Madame la rapporteure de minorité, vous avez appuyé sur le bouton ?
Mme Irène Buche (S), rapporteuse de minorité. Oui, merci, Monsieur le président. J'aimerais m'exprimer sur l'ensemble des amendements que nous avons déposés. Il y a trois catégories d'amendements. D'une part, nous proposons d'ajouter le terme «grave», après «infraction», dans les trois articles. Car, comme je l'ai dit tout à l'heure, si l'on parle de délit et de crime, on parle quasiment de tout le code pénal et de toutes les lois pénales. Or, il serait raisonnable de dire qu'une infraction doit être grave pour qu'il y ait des mesures préalables. Cela, ce sont donc les trois premiers amendements. (Brouhaha. Le président agite la cloche.)
Ensuite, il y a la question de l'autorité judiciaire qui doit contrôler l'activité de la police. Enfin, il y a la question de l'autorité qui doit contrôler. Pourquoi ne pourrait-on pas faire la même chose que les Vaudois ? Vous n'avez pas le texte vaudois sous les yeux, mais moi je l'ai et je peux vous dire que le texte vaudois - la loi vaudoise - prévoit bel et bien que toute mesure préalable doit être soumise à l'approbation du Tribunal des mesures de contrainte.
Une voix. Non !
Mme Irène Buche. Donc, contrairement à ce qui a été dit, ce n'est non seulement pas impossible en raison du droit fédéral, mais c'est même pratiqué ! Ce que nous demandons, c'est que toutes les mesures préalables soient soumises à l'approbation du Tribunal des mesures de contrainte qui, comme vous le savez, siège avec un juge unique et à huis clos. Il n'y a ainsi aucun risque qu'il y ait des indiscrétions sur une enquête secrète. Ce sont donc les trois autres amendements qui sont semblables.
Et il y a un septième amendement, il concerne plus particulièrement les enregistrements audio et vidéo que nous aimerions également faire soumettre à l'autorisation du Tribunal des mesures de contrainte.
Le président. Merci, Madame la rapporteure de minorité.
M. Miguel Limpo (Ve). Merci, Monsieur le président. Nous soutiendrons les amendements socialistes, notamment ceux qui précisent qu'il s'agit d'infractions graves. Une chose est de dire ici, au parlement, que ça ne concernera pas les vols de vélos, une autre est de l'inscrire dans la loi ! Je crois que cet amendement est nécessaire et qu'il peut remporter l'accord de ce parlement, pour autant que tout le monde soit en adéquation par rapport à son discours et par rapport à ce qui est inscrit dans cette loi !
Deuxièmement, nous voterons évidemment aussi l'amendement demandant que ce soit le Tribunal des mesures de contrainte qui décide après trente jours. En effet, cette solution nous semble meilleure que celle qui prévoit que ce soit le chef du département qui le fasse. Ça, c'est le premier point.
Bien évidemment, au-delà de ça, nous demandons de renvoyer cet objet une nouvelle fois en commission, afin de le discuter de manière plus approfondie, car il n'est pas mûr!
Le président. Merci, Monsieur le député. Nous sommes saisis d'une nouvelle demande de renvoi en commission. Peuvent s'exprimer Mmes les rapporteures et le Conseil d'Etat. (Un instant s'écoule.) Personne ne souhaitant s'exprimer, je vais donc, Mesdames et Messieurs les députés, vous soumettre le renvoi en commission.
Mis aux voix, le renvoi du rapport sur le projet de loi 11056 à la commission judiciaire et de la police est rejeté par 57 non contre 28 oui.
Le président. Nous poursuivons notre débat. Nous en sommes à l'article 21A. Nous sommes saisis d'un amendement de Mmes Buche et Bolay à l'alinéa 1, lettre a, nouvelle teneur: «Il existe des indices sérieux qu'une infraction grave pourrait être commise.» (Remarque.) Vous vous êtes déjà exprimée, mais si vous voulez... (Le président est interpellé.) Mais bien sûr, Madame la députée ! Je vous donne la parole.
Mme Loly Bolay (S). Merci beaucoup, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, nous avons proposé cet amendement en commission, mais il n'a pas du tout été accepté. Nous le redéposons, parce que la notion d'infraction «grave» est inscrite dans le code de procédure pénale. Elle y est inscrite, parce que ce code de procédure pénale, je l'ai dit tout à l'heure, a beaucoup compliqué les choses.
Alors, dans ces investigations secrètes, réactives, c'est-à-dire au moment où l'instruction est devant le ministère public, que dit le nouveau code de procédure pénale ? Il dit que cette mesure se justifie au regard de la gravité de l'infraction - au regard de la gravité de l'infraction ! C'est la raison pour laquelle... Sinon, dans le projet de loi, on dit «une infraction», mais laquelle ? Laquelle ? Contre quoi, contre qui va-t-on mener une investigation secrète ?
M. le procureur général Jornot nous l'a dit en commission: il s'agirait d'admettre que la police peut infiltrer des organisations n'ayant pas commis d'infraction. Alors, moi je demande: quelle infraction ? Est-ce pour une infraction grave, ou pas ? Parce qu'il y a beaucoup de types d'infractions! (Commentaires.) C'est la raison pour laquelle, Monsieur le conseiller d'Etat, nous voulons qu'il soit inscrit qu'il s'agit bien d'une infraction grave, et pas de n'importe quelle infraction !
Le président. Merci, Madame la députée. La parole est à M. le député Vincent Maitre - sur cet amendement.
M. Vincent Maitre (PDC). J'interviens juste sur cet amendement pour dire qu'apparemment, contrairement au parti socialiste, moi je ne sais pas ce qu'est une infraction grave; en revanche, je sais ce qu'est un crime, je sais ce qu'est un délit, puisque les définitions de ces deux termes sont expressément données par le code pénal. Le terme d'«infraction grave» est donc beaucoup plus flou, plus aléatoire, et on ne sait à vrai dire pas sur quel pied danser ! Une infraction grave le sera pour certains, mais peut-être moins pour d'autres !
Quant à Mme Bolay, qui dit que, dans le cadre d'une recherche préventive, la police pourrait être amenée à soupçonner une organisation qui n'a pas commis d'infraction, eh bien, c'est justement le but de ces recherches préventives: par définition, on ne sait pas si oui ou non une infraction va être commise, mais on a du moins des indices ou des soupçons suffisants pour que cela vaille la peine de s'y intéresser et de, permettez-moi l'expression, frapper en avant plutôt que d'attendre que le crime ou le délit - ou, précisément, l'infraction grave - soit effectivement commis.
De nouveau - puisque le parti socialiste et les Verts ont un si grand besoin de rigueur dans ce projet de loi - je ne comprends pas pourquoi ils souhaitent introduire ce qu'on appelle une notion juridiquement indéterminée dans le terme d'«infraction grave», qui ne trouve sa définition nulle part dans la loi, contrairement au crime et au délit. (Applaudissements.)
Le président. Merci, Monsieur le député. Nous en sommes toujours à l'article 21A, alinéa 1, lettre a, avec un amendement de Mmes Buche et Bolay. (Remarque.) Monsieur Lussi, c'est à ce propos ?
M. Patrick Lussi (UDC). Monsieur le président, écoutez, nous avons beaucoup de travail ce soir, et j'allais prendre la parole pour dire à peu près ce que vient d'exprimer mon préopinant... Je dirai juste ceci: il est clair que le groupe UDC refusera cet amendement.
Le président. Merci, Monsieur le député. Monsieur Golay, vous êtes inscrits par rapport à cet amendement-là ? (Remarque.) Vous avez la parole.
M. Roger Golay (MCG). Le groupe MCG refusera cet amendement. Simplement, nous sommes aussi pour un contrôle de l'action de la police, mais pas pour entraver l'action de la police, comme le propose le parti socialiste. On sait très bien que si l'on donne cette autorisation au Tribunal des mesures de contrainte, ce sera trop long. On va perdre du temps dans des enquêtes préalables, et je pense que c'est une erreur. La police a besoin de moyens, de disposer d'une législation claire, et pas d'être entravée - comme on veut le faire, sur les bancs d'en face ! (Commentaires.) Cela ne fait rien, c'est pour tout le reste ! (Remarque.)
Le président. Madame Buche, c'est sur cet amendement ? (Le président est interpellé.) Alors je passe d'abord la parole à M. Stauffer, et à vous, Madame, à la fin.
M. Eric Stauffer (MCG). Je ne pouvais pas ne pas réagir aux propos de Mme la députée Loly Bolay - vous transmettrez, Monsieur le président. Moi, je suis... surpris, étonné, scandalisé, qu'on puisse encore essayer - vu les problèmes de sécurité que nous connaissons à Genève et vu l'image que nous avons à l'extérieur du pays - de vouloir entraver le travail de la police ! Je veux dire, infiltrer des réseaux de vendeurs de stupéfiants... mais c'est une bonne chose ! Essayons de contrer le crime avant qu'il n'ait lieu, puisque la commission future d'un crime est aussi condamnable !
Alors, peut-être - Monsieur le président, vous transmettrez - qu'il y a un conflit d'intérêts ! Parce que, avec tous les fumeurs de cannabis qu'on a en face, il faut bien qu'ils achètent leur marchandise quelque part ! (Rires. Brouhaha.) Alors, moi je me demande, Mesdames et Messieurs, si c'est cette espèce d'angélisme qui fait qu'aujourd'hui Genève se retrouve être un supermarché de la drogue ! Ceux qui plébiscitent à longueur d'année...
Le président. Il vous faut conclure, Monsieur le député.
M. Eric Stauffer. Je conclus ! Ils plébiscitent à longueur d'année la libéralisation de la drogue ! Eh bien, moi je dis qu'ils devraient quitter ce parlement - parce qu'il y a conflit d'intérêts - et qu'ils devraient quitter ce parlement pendant le traitement de ce projet de loi !
Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à la rapporteure de minorité, Mme Irène Buche - sur cet amendement, on est bien d'accord.
Mme Irène Buche (S), rapporteuse de minorité. Oui, sur cet amendement, Monsieur le président !
Premièrement, j'aimerais juste rappeler au préalable que les socialistes sont tout à fait pour les mesures de prévention, mais qu'il ne faut quand même pas prévoir n'importe quelle disposition légale pour remplir ce but.
Concernant l'amendement, pourquoi est-ce que les lois fédérales prévoient que des investigations secrètes peuvent avoir lieu lorsqu'il y a une infraction particulièrement grave ? Pourquoi est-ce que le canton de Genève ne pourrait pas prévoir la notion de gravité ? Cela, il faudra me l'expliquer. Et ce n'est pas seulement la loi fédérale sur l'investigation secrète qui a été abrogée au moment de l'entrée en vigueur du CPP, mais également la modification proposée par M. Jositsch il y a quelques mois, et qui va entrer en vigueur le 1er avril. Alors, ce que peuvent faire les autorités fédérales, j'imagine que nous pouvons le faire aussi ! Je vous invite donc à voter cet amendement.
Le président. Merci, Madame le rapporteur. La parole est à Mme Loly Bolay, pour presque une minute.
Mme Loly Bolay (S). Je n'aurai pas besoin d'autant de temps, Monsieur le président. Je dirai tout simplement que c'est l'hôpital qui se fout de la charité ! Quand on a un passé comme celui de M. Stauffer, on ne vient pas faire la morale aux autres ! C'est tout simplement ça, surtout si on en croit les journaux et certains membres qui ont des boîtes de nuit ! (Brouhaha. Applaudissements.)
M. Eric Stauffer. Je suis fier de mon passé !
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, je vais vous faire voter... (Remarque.) Non ! Monsieur Deneys, vous demandez la parole ?
M. Roger Deneys (S). Je compléterai les propos de ma collègue Loly Bolay en disant que, en plus, la moitié du groupe MCG a des liens avec le milieu de la prostitution genevoise, donc il est bien mal placé pour donner des leçons dans ce parlement ! (Brouhaha.)
Le président. S'il vous plaît, Mesdames et Messieurs !... Merci, Monsieur le député. Nous passons au vote. (Commentaires. Brouhaha.)
M. Eric Stauffer. Il y a Mauro, il lui reste une minute quinze ! (Brouhaha.)
Le président. Du calme ! On va y arriver ! (Brouhaha.) Je donne la parole à M. le député Gander. (Chahut. Le président agite la cloche.) S'il vous plaît !
M. Florian Gander (MCG). Je suis désolé, je ne peux pas laisser tenir des propos pareils ! Vous parlez, Monsieur Deneys, de la moitié du groupe MCG: est-ce que vous connaissez un ou deux députés MCG... (Brouhaha.)
Le président. S'il vous plaît, Mesdames les députées Vertes !
M. Florian Gander. ...ici présents, comme moi, qui auraient un lien avec la prostitution à Genève ? Je vous mets au défi de le prouver ! Et cela, je vous le jure sur la tête de mes deux enfants ! (Brouhaha.) Ne tenez plus jamais des propos pareils dans cette assemblée ! (Commentaires. Huées.)
Le président. Merci ! La parole est à M. le député Mauro Poggia. (Brouhaha.) S'il vous plaît ! (Remarque. Brouhaha.) S'il vous plaît, Monsieur Cerutti !
M. Mauro Poggia (MCG). Oui, je voudrais... (Brouhaha.) Excusez-moi, je suis scandalisé par les propos que deux députés socialistes peuvent tenir dans ce parlement. (Commentaires.) Les attaques de ce type n'ont pas à avoir lieu ici, elles sont inadmissibles ! (Commentaires.) Madame Bolay et Monsieur Deneys, tenir des propos aussi graves... (Brouhaha.)
Le président. S'il vous plaît, Mesdames et messieurs ! S'il vous plaît !
M. Mauro Poggia. Madame Bolay, vous avez attaqué directement un député, M. Eric Stauffer. Quant à M. Deneys, il a tenu des accusations d'une gravité inqualifiable à l'égard d'un groupe politique. Je pense, Monsieur Deneys, que vous seriez bien inspiré de vous excuser publiquement !
Une voix. Porte plainte ! (Brouhaha.)
Le président. Voilà ! Mesdames et Messieurs, le président suspend la séance pendant trois minutes et vous prie d'ouvrir les fenêtres ! (Exclamations. Applaudissements.)
La séance est suspendue à 21h59.
La séance est reprise à 22h02.
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, merci de fermer les fenêtres... De façon que Mme la députée Gautier puisse enlever son bonnet ! Nous reprenons nos débats !
Je vais vous faire voter l'amendement de Mmes Buche et Bolay à l'article 21A, alinéa 1, lettre a: «Il existe des indices sérieux qu'une infraction grave pourrait être commise.»
Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 46 non contre 27 oui.
Le président. Nous passons maintenant à l'amendement présenté à l'article 21A, alinéa 2, par Mmes Buche et Bolay - vous l'avez tous reçu. En voici la teneur. Après la phrase: «Lors de l'observation, la police peut avoir recours à des enregistrements audio ou vidéo» sont ajoutés les mots suivants: «[...], qui doivent être soumis à l'autorisation du Tribunal des mesures de contrainte.» La parole est à Mme la députée Irène Buche, sur cet amendement.
Mme Irène Buche (S), rapporteuse de minorité. Monsieur le président, comme je l'ai dit tout à l'heure, c'est dans la ligne des autres amendements, c'est-à-dire que nous souhaitons que ce soit le Tribunal des mesures de contrainte qui se prononce sur toutes ces mesures préalables. C'est la situation qui prévaut à Schwyz, qui prévaut dans le canton de Vaud, et il n'y a aucune raison qu'on ne puisse pas le faire ici. (Brouhaha.) Il est quand même incroyable que la police puisse agir sans contrôle quel qu'il soit et que l'autorisation du chef de département ne soit requise qu'au bout de trente jours ! Donc il faut changer cette situation et s'aligner sur les cantons qui ont été pris comme modèles.
Mis à part ça, j'aimerais quand même rappeler que M. Jornot a exprimé des doutes et des réserves importantes lors de l'examen du projet de loi - il l'a, d'une autre manière, redit dans la presse ce matin - et je pense véritablement que ce projet doit être renvoyé en commission pour qu'il soit examiné sérieusement. Je demande le renvoi en commission. (Commentaires.)
Le président. Merci, Madame la rapporteure. Mesdames et Messieurs les députés, je vous fais voter cette troisième demande de renvoi. (Commentaires.) Certains veulent-ils s'exprimer sur cette demande de renvoi en commission ? (Un instant s'écoule.) Ce n'est pas le cas.
Mis aux voix, le renvoi du rapport sur le projet de loi 11056 à la commission judiciaire et de la police est rejeté par 55 non contre 28 oui.
Le président. La parole est à M. Eric Stauffer - sur l'amendement.
M. Eric Stauffer (MCG). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, tout le problème de la situation genevoise est reflété ici, ce soir, dans cet amendement: nous avons des partis dits gouvernementaux qui proposent des amendements pour mettre encore des strates de contrôle et de supercontrôle ! Et, finalement, on en arrive à la situation que nous connaissons aujourd'hui sur la sécurité !
Aujourd'hui, il y a un langage que les criminels comprennent ! C'est celui d'une justice ferme, d'une justice juste, mais efficace ! Or, avec cet angélisme, Mesdames et Messieurs les socialistes et les Verts, vous avez fait de ce canton le Chicago de la Suisse ! Vous avez fait de ce canton la plaque tournante et le supermarché de la drogue !
Aujourd'hui, ça suffit, Mesdames et Messieurs ! L'angélisme n'est plus de mise et j'espère que la population vous sanctionnera durement aux élections d'octobre. Car, aujourd'hui, il y en a assez ! Vous le savez tous, vous pouvez vous balader à Genève, dans le quartier des Pâquis, à Plainpalais, et malheureusement...
Le président. Vous êtes arrivé au terme, Monsieur le député !
M. Eric Stauffer. J'arrive au terme. ...malheureusement, depuis plus d'une année, c'est le cas dans les communes suburbaines aussi ! C'est assez ! Aujourd'hui, donnons les moyens à la police d'accomplir la mission qui est la sienne, c'est d'assurer la sécurité des citoyens. Merci !
Le président. Voilà ! Merci. La parole est à M. le député Vincent Maitre, à qui il reste deux minutes.
M. Vincent Maitre (PDC). Je vous remercie, Monsieur le président. J'aurais juste voulu savoir si on s'exprimait bien sur l'amendement socialiste, car, à écouter mon collègue Stauffer, j'ai eu un doute quelques instants.
Le président. C'est l'amendement à l'article 21A, alinéa 2 - amendement de Mmes Buche et Bolay. (Commentaires.)
M. Vincent Maitre. Vous me rassurez ! Alors je vais pouvoir vous dire que leur argument est irrecevable à trois titres. (Brouhaha. Le président agite la cloche.) Il entend donner la compétence de surveillance et de contrôle au Tribunal des mesures de contrainte, or nous avons une loi d'organisation judiciaire cantonale qui indique expressément que le Tribunal des mesures de contrainte exerce les compétences que le code de procédure pénale lui attribue. Le code de procédure pénale ! C'est-à-dire une loi fédérale, et non pas une loi cantonale ! Le canton n'est donc pas compétent pour attribuer une quelconque compétence à ce tribunal.
Le deuxième argument se trouve à l'article 13 du code de procédure pénale, qui stipule que le Tribunal des mesures de contrainte a des attributions judiciaires dans le cadre de la procédure pénale. Encore une fois, ici, avec ce projet de loi, nous ne sommes pas encore en procédure pénale, mais bien en phase préalable.
Et le dernier argument est celui de l'article 18 du code de procédure pénale, lequel dit que, de nouveau, le Tribunal des mesures de contrainte statue sur la détention provisoire et la détention pour des motifs de sûreté ! Nous parlons donc de détention, et non pas de procédures préliminaires.
Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à Mme Loly Bolay. Je donnerai la parole à Mme la rapporteure tout à l'heure.
Mme Loly Bolay (S). Monsieur le président, j'aimerais tout d'abord adresser une remarque à mon préopinant. Vous savez que nous avons un code de procédure qui est unifié, et la loi vaudoise stipule que cette autorisation dépend du Tribunal des mesures de contrainte - du tribunal de mesures de contrainte ! Cela dit, pour revenir à ce qu'a exprimé M. Stauffer, qui prétend que nous entravons le travail de la police, eh bien, leur amendement - MCG ! - vous voyez... Eh bien, à l'alinéa 3 de ce même article, il est dit qu'au-delà de trente jours l'autorisation de poursuivre l'enquête préalable doit être demandée au procureur de permanence. Si j'ai bien compris, le MCG entrave aussi le travail de la police, puisqu'il va dans le même sens que nous ! Sauf qu'il demande que ce soit le procureur de permanence, alors que nous, nous demandons que ce soit le Tribunal des mesures de contrainte - mais, dans l'absolu, on parle de la même chose. Donc M. Stauffer ne lit même pas les amendements que son groupe dépose ! (Commentaires.)
Le président. Merci, Madame la députée. (Remarque. Commentaires.) Il lui reste combien de temps ?
Une voix. Il n'a plus de temps, mais elle l'a mis en cause...
Le président. Monsieur le député Stauffer, vous aviez déjà appuyé, mais il ne vous reste plus rien, plus de temps ! (Commentaire hors micro de M. Eric Stauffer.) Mais elle avait compris ! (Remarque.) Mais si ! Et vous aviez appuyé avant ! (Remarque. Rire du président.) Dix ! Mais dix alors !
M. Eric Stauffer (MCG). Vous transmettrez, Monsieur le président, à notre charmante collègue, Mme Bolay, que, finalement, quand on lit, il faut encore comprendre ce qu'on lit, et ce n'est pas son cas !
Le président. Merci. La parole est à M. Roger Deneys, qui vient d'appuyer.
M. Roger Deneys (S). Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, concernant cet amendement, je vous invite à relire la page 12 du rapport: on voit que sur l'article 21A, alinéa 2, un commissaire Vert aimerait savoir quelle est la limite de temps de conservation des données. Je lis: «M. Maudet lui dit que cela doit être la loi sur la protection des données qui s'applique. Il pense que cela doit être 7 jours à la base.» Ensuite, un fonctionnaire, M. Scheidegger, croit - donc on pense, on croit - que «sauf incident, le délai est de 14 jours». On voit bien que le travail en commission n'a pas été fait correctement ! Le département lui-même n'avait pas les éléments de réponses factuels qui permettaient de savoir ce qu'il en était sur des points aussi essentiels que ceux-ci, Mesdames et Messieurs les députés, qui concernent la protection de la sphère privée des citoyennes et des citoyens de ce canton ! Parce que c'est bien ça le souci des socialistes, Mesdames et Messieurs les députés: oui à la sécurité, mais oui aussi au respect de la sphère privée ! Et c'est donc bien cette pesée d'intérêts qui fait qu'on peut attenter, dans certains cas, au respect de la sphère privée ! Cela doit être contrôlé de façon sérieuse et avérée, avec toutes les cautèles nécessaires.
Et quand, Mesdames et Messieurs les députés, le procureur général, Olivier Jornot - un PLR - demande qu'un renvoi en commission ait lieu sur ce projet de loi, parce qu'il n'est pas clair et pas explicite...
Le président. Il vous faut conclure, Monsieur le député !
M. Roger Deneys. ..eh bien, je pense qu'il faut renvoyer ce projet de loi en commission, et je demande le renvoi en commission ! (Brouhaha.)
Le président. Bien ! Nous sommes saisis d'une quatrième demande de renvoi en commission. (Brouhaha.)
Une voix. Vous n'en avez pas marre ? (Commentaires.)
Mis aux voix, le renvoi du rapport sur le projet de loi 11056 à la commission judiciaire et de la police est rejeté par 55 non contre 30 oui.
Le président. Madame la rapporteure, je vous donnerai la parole à la fin des interventions. La parole est à M. Christian Bavarel.
M. Christian Bavarel (Ve). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, ce soir la question qui nous est posée porte sur deux sujets. Contrairement à ce qu'ont pu affirmer certains, les Verts sont pour une sécurité extrêmement ferme pour nos concitoyens. Cette sécurité a deux volets: celui d'éviter d'être agressé et de prendre des mesures préventives pour empêcher tout acte délictueux. Mais elle a aussi un deuxième côté qui a beaucoup occupé Genève ces temps-ci: ce sont les problèmes de transmission des données, les problèmes de respect de la vie privée - vous voyez de quoi je veux parler si j'évoque le secteur bancaire, sujet sur lequel chacun est d'un seul coup très sensible. Mais, pour l'ensemble des citoyens, le respect de la vie privée, c'est le fait de ne pas avoir des enquêtes de police sur le dos à tout bout de champ, c'est le fait d'être certain qu'on a une sécurité qui est aussi assurée face à l'Etat. Vous connaissez les Verts, ils éprouvent de la méfiance à l'encontre des instances étatiques. Nous voulons un Etat fort, mais nous ne voulons pas un Etat fouineur ! Nous ne voulons pas un Etat inquisiteur.
Nous constatons donc que ce projet de loi va dans le bon sens, du côté de la sécurité publique et de la prévention des actes qui pourraient être délictueux, et nous pensons que cet aspect a été abordé par ce projet de loi. Néanmoins, la problématique du respect de la vie privée et du respect de l'identité en se préservant d'un Etat fouineur a mal été travaillée en commission. Mesdames et Messieurs les députés, ce projet est mal ficelé de ce côté-là, il a des lacunes. Nous sommes en train de discuter et une solution a été proposée, c'est que ce soit le chef du département qui accorde les autorisations. D'un certain côté, ce n'est pas mal que ce rôle lui revienne, mais on se rend bien compte que les conditions ne sont pas suffisantes. Nous aurions voulu aller plus loin et que le pouvoir judiciaire puisse accepter de prendre la responsabilité du tout. Alors on n'est pas d'accord sur cet aspect, donc procureur, Tribunal des mesures de contrainte, etc.
Tout cela nous indique qu'il y a des questions encore en suspens. Ces dernières n'ont pas été tranchées et vous voyez bien aujourd'hui où nous en sommes ! Nous avons eu des débats en commission, et effectivement M. Deneys a tiré du rapport des propos que j'ai tenus en commission...
Le président. Il vous faut conclure, Monsieur le député !
M. Christian Bavarel. Monsieur le président, j'y arrive tout de suite ! Oui, ce sont des questions que j'ai posées en commission, et ce sont des questions auxquelles nous n'avons pas eu de réponses ! Nous disons donc que ce projet n'est pas abouti et nous demandons un renvoi en commission.
Des voix. Encore ? (Commentaires.)
Le président. Nous sommes saisis d'une cinquième demande de renvoi en commission.
Mis aux voix, le renvoi du rapport sur le projet de loi 11056 à la commission judiciaire et de la police est rejeté par 54 non contre 29 oui.
Le président. La parole est à M. Patrick Lussi au sujet de l'amendement. Il vous reste vingt secondes, Monsieur le député ! Vingt !
M. Patrick Lussi (UDC). Très bien, Monsieur le président. Je n'ai pas parlé auparavant, mais pourquoi pas vingt secondes puisqu'on est sur un amendement. J'aimerais simplement qu'on recentre le débat. J'aimerais demander aux députés des bancs d'en face qu'ils relisent la page 1, au point I, où M. le conseiller d'Etat nous dit que le code de procédure pénale n'a pas été très bien pensé et qu'il s'agit de remettre en place des mesures qui existaient auparavant. Il ne s'agit pas d'ouvrir de nouvelles enquêtes, il ne s'agit pas d'attaquer la sphère privée des gens ! Il s'agit simplement d'avoir des enquêtes secrètes qui permettent de prévenir les délits qui sont expressément nommés.
Je trouve totalement déplacé et injuste envers la population qui nous regarde de faire croire que vous êtes les phénix de la liberté individuelle, alors que vous êtes en train de contraindre les gens à rester enfermés chez eux...
Le président. Vous êtes au terme de votre intervention, Monsieur le député.
M. Patrick Lussi. ...et de laisser la rue aux truands !
Des voix. Bravo !
Mme Nathalie Schneuwly (R), rapporteuse de majorité. Je dois dire que ce débat me laisse sans voix, tant il dérape. Dans ce brouhaha et ce capharnaüm, il y en a quand même certains qui entendent des voix, surtout celle de M. Jornot ! J'aimerais juste préciser qu'à la page 6 de mon rapport il est clairement mentionné, tout en haut: «M. Jornot pense que la solution de l'alinéa 3, de ne pas confier au ministère public la responsabilité de la surveillance, est tout à fait juste.» Alors arrêtez de nous dire que M. Jornot a exprimé le contraire ou quoi que ce soit ! Refusez tous ces amendements et votez ce projet de loi. Je vous remercie. (Commentaires.)
Des voix. Bravo !
Le président. Merci, Madame la rapporteure. Mesdames et Messieurs les députés, je vous fais voter cet amendement de Mmes Buche et Bolay à l'article 21A, alinéa 2: «Lors de l'observation, la police peut avoir recours à des enregistrements audio ou vidéo, qui doivent être soumis à l'autorisation du Tribunal des mesures de contrainte.»
Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 57 non contre 30 oui.
Le président. Nous passons à l'article 21A, alinéa 3. Nous est soumis un amendement de Mmes Buche et Bolay. Le voici: «Al. 21A, al. 3 (modifié). La mise en oeuvre d'actes d'observation préventive est soumise à l'autorisation du Tribunal des mesures de contrainte.» (Remarque.)
J'aimerais vous dire, Mesdames et Messieurs les députés, que normalement nous avions trente minutes pour le deuxième débat. Vous avez tous, quasiment, épuisé vos temps de parole... Bon, puisque nous sommes sur un projet de loi important, le président décide de vous accorder encore un peu de temps, mais pas trop. Je donne la parole à M. Roger Golay. (Remarque.) Pour gagner du temps, vous renoncez: je vous en félicite ! Madame la rapporteure de minorité Irène Buche, vous aviez bien expliqué tous ces amendements, mais vous pouvez intervenir.
Mme Irène Buche (S), rapporteuse de minorité. Merci, Monsieur le président. J'aimerais quand même revenir sur une chose importante: on n'est pas en train de dire si oui ou non la police doit pouvoir faire son travail et assurer la sécurité à Genève, on est en train de se demander comment il faut prévoir ces mesures préalables, quelles sont les cautèles et les garde-fous qu'il faut y mettre. Ce n'est que de cela qu'on parle !
Un des problèmes est l'absence de contrôle judiciaire de l'activité de la police et le deuxième est le problème de la conservation des données personnelles ! Ce sont vraiment deux problèmes essentiels ! Et je voulais juste recadrer le débat à ce niveau-là. Je vous invite bien évidemment à accepter l'amendement.
Le président. Merci, Madame la rapporteure de minorité. Mesdames et Messieurs les députés, je vous fais voter cet amendement à l'article 21A, alinéa 3.
Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 60 non contre 30 oui.
Le président. Toujours à l'article 21A, alinéa 3, nous sommes saisis d'un amendement de MM. Golay et Poggia. Le voici: «Art. 21A, al. 3 (nouvelle teneur). Au-delà de trente jours, l'autorisation du procureur de permanence est requise pour que l'observation se poursuive.»
La parole n'étant pas demandée, je fais voter cet amendement... (Remarque.) Ah, il vient d'appuyer ! Je ne l'avais pas vu. La parole est à M. Golay.
M. Roger Golay (MCG). Mesdames et Messieurs les députés, je vous demande de soutenir cet amendement. On l'a dit, il ne faut pas mélanger les rôles: le rôle du Conseil d'Etat est de donner la mission générale à la police, et pas d'intervenir dans le cadre d'une enquête judiciaire.
Je pense qu'à ce niveau le procureur de permanence est tout à fait la bonne personne, puisqu'elle se trouve une partie de la journée à l'Hôtel de Police à Carl-Vogt; donc les policiers sont à proximité et peuvent avoir un résultat immédiat - a contrario peut-être du Conseil d'Etat, qui se trouvera à un séminaire à Loèche-les-Bains ou ailleurs. (Rires.) Je pense que ce n'est pas le rôle de la police de déranger un conseiller d'Etat pour lui présenter une demande de prolongation.
Concernant l'article qui suit, dans lequel il y a aussi une demande pour l'infiltration de policiers dans des réseaux, là on est d'accord que ce soit le rôle du Conseil d'Etat de donner l'autorisation. Car, lorsque un agent est infiltrés, je pense qu'il est tout à fait normal que le conseiller d'Etat en charge du département puisse savoir où se trouve cet homme, d'autant plus que le péril est grand pour les agents qui procèdent à ce genre d'infiltration. Donc pour une couverture, cela paraît tout à fait normal, cela dans le but que l'agent soit, en cas de difficulté, soutenu par l'ensemble du Conseil d'Etat.
Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à Mme la députée Loly... (Remarque.) Alors «Bôlay» ou «Bolay» ?
Une voix. C'est «Dolorès» ! (Commentaires.)
Le président. «Bolay» !
Mme Loly Bolay (S). En espagnol, on dit «Bolaï». (Commentaires.) Mesdames et Messieurs les députés, basta ya ! (Brouhaha. Le président agite la cloche.) Basta ya el señor Gautier ! (Rires.)
Le parti socialiste votera cet amendement; il le votera, le nôtre concernant le Tribunal des mesures de contrainte n'ayant pas été accepté. Mais il est dans notre logique de dire que cela doit se faire sous l'autorité d'un juge ! C'est d'ailleurs ce qu'indique le CPP: «La mise en oeuvre d'une investigation secrète est toujours soumise au contrôle judiciaire.» C'est la raison pour laquelle nous voterons cet amendement.
Vous voyez, Monsieur le président, malgré toutes les critiques qu'on nous a adressées - à nous, «les gens d'en face», comme on nous appelle - nous prenons nos responsabilités ! (Brouhaha.)
Le président. Merci, Madame la députée. Monsieur Vincent Maitre, vous avez la parole. Soyez le plus bref possible !
M. Vincent Maitre (PDC). J'interviens le plus brièvement possible, pour vous dire que, déjà, on parle de l'autorité du conseiller d'Etat au-delà de trente jours, et pas en deçà. Je pense que le MCG et le parti socialiste se trompent de cible, puisqu'en phase pré-judiciaire le ministère public non seulement n'est pas juge, mais, ensuite de cela, il n'a pas de compétences pour instruire quoi que ce soit et pour prendre les décisions qu'il faut. Il paraît ainsi tout à fait normal que la police, qui est appelée à agir directement sur le terrain et à effectuer ces mesures préventives, soit sous l'autorité du ministre de tutelle en cas de problème, donc sous son contrôle.
Une voix. Bravo !
Le président. Merci, Monsieur le député. Mesdames et Messieurs, je vous fais voter cet amendement: «Art. 21A, al. 3 (nouvelle teneur). Au-delà de trente jours, l'autorisation du procureur de permanence est requise pour que l'observation se poursuive.»
Mis aux voix, cet amendement est adopté par 55 oui contre 35 non.
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, je vous fais voter l'article 21A ainsi amendé.
Mis aux voix, l'article 21A (nouveau) ainsi amendé est adopté par 66 oui contre 13 non et 6 abstentions.
Le président. Nous passons à l'amendement de Mmes Buche et Bolay à l'article 21B, alinéa 1, lettre a, nouvelle teneur, qui est exactement le même que tout à l'heure: «Il existe des indices sérieux qu'une infraction grave pourrait être commise.» La parole est à M. Miguel Limpo.
M. Miguel Limpo (Ve). Monsieur le président, il me semble que, par rapport aux débats qui nous ont animés depuis le début de la soirée, ce projet de loi vient de connaître un changement assez important. Nous demandons donc de le renvoyer en commission, pour l'étudier plus en profondeur. (Protestations.)
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, je fais voter ce sixième renvoi.
Mis aux voix, le renvoi du rapport sur le projet de loi 11056 à la commission judiciaire et de la police est rejeté par 59 non contre 30 oui et 1 abstention.
Le président. Je vous fais voter l'amendement à l'article 21B, alinéa 1, lettre a: «Il existe des indices sérieux qu'une infraction grave pourrait être commise.»
Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 61 non contre 30 oui et 1 abstention.
Le président. Nous passons à l'amendement concernant l'article 21B, alinéa 2, de Mmes Buche et Bolay, qui a la teneur suivante: «La mise en oeuvre d'actes de recherches préventives secrètes est soumise à l'autorisation du Tribunal des mesures de contrainte».
Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 58 non contre 30 oui.
Mis aux voix, l'article 21B (nouveau) est adopté.
Le président. A l'article 22, alinéa 1, lettre a, nous sommes saisis d'un amendement de Mmes Buche et Bolay, qui est identique aux autres: «Il existe des indices sérieux qu'une infraction grave pourrait être commise.» Je passe la parole à Mme la rapporteure de minorité, Irène Buche.
Mme Irène Buche. Je voulais m'exprimer au sujet de l'amendement suivant.
Le président. Sur l'amendement suivant, bien ! Mesdames et Messieurs les députés, je vous soumets l'amendement à l'article 22, alinéa 1, lettre a.
Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 59 non contre 29 oui.
Le président. Nous passons à l'amendement qui concerne l'article 22, alinéa 4: «La mise en oeuvre d'actes d'enquête sous couverture est soumise à l'autorisation du Tribunal des mesures de contrainte.»
Mme Buche, rapporteure de minorité, veut brièvement s'exprimer.
Mme Irène Buche (S), rapporteuse de minorité. Là, il s'agit de l'enquête sous couverture et de l'alinéa 4 qui stipule: «La mise en oeuvre d'actes d'enquête sous couverture est soumise à l'autorisation du chef du département.» Cela n'est clairement pas suffisant. Il faut que ce type de mesure soit soumise au Tribunal des mesures de contrainte, comme on l'a dit tout à l'heure.
J'aimerais juste citer la page 11 du projet de loi, où le département de la sécurité, respectivement le Conseil d'Etat, dit qu'il s'agit d'un procédé tout à fait exceptionnel et invasif. Raison de plus pour le soumettre à un contrôle judiciaire, et non pas simplement à celui du chef du département.
Le président. Merci, Madame la rapporteure de minorité. Mesdames et Messieurs les députés, je vous fais voter cet amendement.
Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 59 non contre 30 oui.
Mis aux voix, l'article 22 (nouveau) est adopté.
Mis aux voix, l'article 1 (souligné) est adopté.
Le président. Je vous fais encore voter l'article 2 souligné.
Mis aux voix, l'article 2 (souligné) est adopté par 58 oui contre 28 non.
Troisième débat
Le président. Je passe la parole à Mme Buche pour le troisième débat, et ensuite à M. le conseiller d'Etat Pierre Maudet.
Mme Irène Buche (S), rapporteuse de minorité. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, la minorité regrette beaucoup que les amendements proposés n'aient pas été acceptés, car il s'agissait véritablement de mieux cadrer cette loi. Je vous invite encore une fois à ne pas voter ce projet de loi tel quel et je fais une ultime demande de renvoi en commission.
Le président. Merci, Madame la députée. Je passe la parole à Mme Loly Bolay.
Mme Loly Bolay (S). Merci, Monsieur le président. Nous regrettons effectivement le vote de ce soir. On aurait pu renvoyer ce projet de loi en commission pour l'étudier plus en profondeur, et même, Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, attendre que les Chambres fédérales s'occupent de la disposition 286 du code de procédure pénale - qui aurait pu mettre tous les cantons au même niveau - et non pas avoir des dispositions cantonales qui pourraient, on vous l'a dit, s'avérer contraires au droit fédéral.
Nous regrettons cette perte de temps, ici. Nous l'avons dit au sujet des mesures préalables: concernant des infractions graves, notamment en ce qui concerne la pédophilie et le terrorisme, le parti socialiste n'était pas contre lesdites mesures. En revanche, ce projet de loi va beaucoup trop loin et, surtout, bafoue les libertés individuelles et les droits fondamentaux ! Nous regrettons donc ce vote et nous espérons que les Chambres fédérales mettront un peu d'ordre dans tout ce système !
Le président. Merci, Madame la députée. Monsieur Stauffer, vous avez la parole pour une petite déclaration.
M. Eric Stauffer (MCG). Merci, Monsieur le président. Le groupe MCG vous enjoint de voter ce projet de loi, a contrario de ce que vient de déclarer la représentante du parti socialiste. Parce que, s'il faut attendre, le message qu'on pourrait en tirer serait: «Il y a des discussions sur la dépénalisation de la drogue: finalement attendons, n'arrêtons plus personne.» Monsieur le conseiller d'Etat, vous aurez pris note du message du parti socialiste: n'arrêtez plus les dealers, n'arrêtez plus les consommateurs, les grossistes et les narcotrafiquants, car peut-être que, dans dix ou vingt ans, ce sera légalisé... Finalement, ils sont très contents, avec ce nouveau code de procédure pénale ! Puisque le premier délit est gratuit. On l'a assez dénoncé, au MCG. Aujourd'hui, les Chambres fédérales ont compris leur erreur et cela va être corrigé.
Mesdames et Messieurs les députés, ne suivons pas encore une fois cet angélisme irresponsable et coupable des partis de la gauche ! Agissons pour le bien de nos concitoyens, qui aujourd'hui ont bien compris que ce n'est plus un «sentiment» d'insécurité, mais que l'insécurité est réelle ! Et donnons à notre police et au ministère public les moyens de rétablir la sécurité pour la tranquillité de la population genevoise !
M. Roger Deneys (S). Mesdames et Messieurs les députés, je dois dire qu'en fait le problème réside bien dans la façon dont M. Stauffer et le Conseil d'Etat présentent ce projet de loi - ce serait une avancée majeure pour la sécurité de nos concitoyennes et concitoyens - mais, malheureusement, ils passent bien vite sur les risques de dérives que ce projet de loi contient, car il n'est pas suffisamment clarifié... (Brouhaha. Le président agite la cloche.) ...notamment son interprétation, article par article, au niveau des dispositions relatives aux écoutes, voire aux infiltrations.
J'en veux pour preuve, Mesdames et Messieurs les députés, qu'aujourd'hui... (Brouhaha. Le président agite la cloche.) ...dans notre république, le mélange des genres malsains a déjà lieu ! On voit que dans le groupe MCG il y a non seulement un certain nombre de représentants de la police - ce qui est déjà assez particulier dans un pouvoir législatif - mais, en plus, on voit que le MCG, à l'époque, avait soutenu le procureur général PLR - et pas très compétent - Zappelli ! On voit donc un mélange des genres, un retour d'ascenseur... On soutient un magistrat PLR, parce que c'est peut-être intéressant à long terme.
Ce qui préoccupe les socialistes, ce sont les garanties que les citoyennes et les citoyens genevois ne soient pas abusivement écoutés pour des raisons politiques ! C'est bien cela le problème, et aujourd'hui les garanties n'existent pas ! Voilà pourquoi nous pensons qu'un projet de loi comme celui-là doit être étudié très attentivement, afin qu'il n'y ait aucun doute quant aux intentions réelles de l'usage de ces mesures préalables ! Aujourd'hui, nous n'avons aucune garantie, et je crois que M. Stauffer en a fait la démonstration. Les risques sont patents, à ce stade, de dérives d'usage politique de ce projet de loi. (Brouhaha.)
Mesdames et Messieurs les députés, nous vous invitons à refuser ce projet de loi - ou à le renvoyer en commission ! Parce que, évidemment, sur le fond nous étions prêts à étudier la possibilité de prendre de telles mesures, or aujourd'hui les garanties, les droits fondamentaux ne sont pas respectés.
Le président. Monsieur le député, est-ce que votre demande de renvoi est formalisée ?
M. Roger Deneys. Non.
Le président. Non. Je vous en remercie. Il y a encore deux interventions avant celle du conseiller d'Etat. Monsieur Lussi, vous avez la parole.
M. Patrick Lussi (UDC). Mesdames et Messieurs les députés, je m'exprime - quitte à vous faire hurler - pour les gens qui nous regardent. Vous mentez ! Le Conseil d'Etat n'a fait que remettre en place ce qui existait auparavant ! Est-ce qu'auparavant vous aviez tous ces délits, tous ces dépassements que vous annoncez ?! Non, Monsieur Deneys !
Mesdames et Messieurs les députés, l'Union démocratique du centre pense aux citoyens - il est vrai, je vous l'accorde, Monsieur Deneys, que nous pensons un peu moins au confort des délinquants. Là, il s'agit d'investigations préalables en vue de sauver... Je rappelle un fait divers - vous me direz qu'il n'y a pas de liaison directe - eh bien, nous avons un vidéo-club, à Lancy, lequel en est à son septième hold-up et cambriolage et qui va mettre les clés sous la porte, parce qu'il a peur de continuer son activité ! (Commentaires. Brouhaha.) Mesdames et Messieurs les députés, faites preuve d'états d'âme pour protéger notre population ! C'est elle qui compte, pas les prévenus ! Votez ce projet de loi ! (Commentaires. Brouhaha.)
M. Eric Stauffer (MCG). Le groupe MCG ne peut pas se laisser insulter comme ça, à longueur de soirée ! Si cela pose un problème au parti socialiste que des gens qui assurent la sécurité de nos concitoyens et qui sont policiers - et ce n'est pas vraiment une profession, c'est une vocation - soient des députés venus défendre les intérêts de Genève, eh bien n'en déplaise au parti socialiste !
J'affirme à nouveau la position du MCG, Mesdames et Messieurs les députés. (Brouhaha.) Ce projet de loi est nécessaire ! Pour vous donner un exemple, parce qu'il faut savoir qu'il y a des groupes terroristes dans ce parlement, j'ai cité ici les Verts, qui, il y a vingt ans, ont voulu aller tirer des rockets contre l'usine atomique... (Protestations.) ...de Creys-Malville...
Le président. Monsieur le député...
M. Eric Stauffer. Ce qui aurait pu causer des milliers de morts !
Le président. Monsieur le député !
M. Eric Stauffer. Voilà à quoi servent les enquêtes sous couverture ! A démasquer ces terroristes qui aujourd'hui veulent se la jouer bon chic bon genre et s'opposent à toute mesure de sécurité pour nos concitoyens ! (Brouhaha.)
Le président. Monsieur le député !
M. Eric Stauffer. Que le peuple m'en soit témoin ! Et, en octobre... (Brouhaha.)
Le président. Monsieur le député, je suis obligé de vous couper la parole. (Le micro est coupé. Applaudissements.) Monsieur le député, vous avez employé des termes qui ont dépassé... (Protestations de M. Eric Stauffer.) Voilà ! Nous sommes au terme... (Remarque.) Non, vous avez épuisé votre temps de parole, au MCG. Je passe la parole... (Commentaires. Brouhaha.) Monsieur Bavarel, vous avez la parole.
M. Christian Bavarel (Ve). Merci, Monsieur le président. (Brouhaha. Le président agite la cloche.) Mesdames et Messieurs les députés, je suis quelque peu surpris par les propos excessifs de celui qui se voudrait être le chef de la police occulte. Les Verts, comme vous le savez tous, aiment la «rocket» uniquement en salade ! (Rires.) Et les dérives d'un individu - avant la création du parti - ne sauraient associer le parti à différentes actions que nous avons condamnées.
Néanmoins, Mesdames et Messieurs les députés, quand j'entends ce type de délire, je me dis: c'est cela qu'on veut soutenir ? C'est cela le projet de loi que vous voulez soutenir ? Et si ce sont des gens de ce type-là - capables de partir dans des délires de ce type-là ! - qui soutiennent la loi, cette loi est dangereuse !
Mesdames et Messieurs les députés, cette personne qui est en train de nous faire l'apologie, de cette manière-là, de la loi, et de nous dire ce qu'il veut en faire, c'est-à-dire surveiller des partis politiques - qui se sont comportés correctement; parce que, il y a vingt ans, un individu a commis un acte, que nous avons condamné ! - eh bien, Mesdames et Messieurs, nous sommes en train de voter une loi dangereuse !
Et, Mesdames et Messieurs les députés, à ce moment du débat, en entendant ce qui vient de se passer, je ne peux que vous inviter à voter non à ce projet de loi. M. Stauffer vient de faire la démonstration que ce projet de loi est dangereux et qu'il est contre la démocratie. (Exclamations. Applaudissements.)
Le président. Voilà ! Je vous remercie. Monsieur le conseiller d'Etat Pierre Maudet, à vous les mots de la fin ! (Commentaires.)
M. Pierre Maudet, conseiller d'Etat. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, j'ai écouté avec beaucoup d'attention ce débat, et en particulier celui qui, en deuxième partie, a porté sur les amendements.
J'aimerais ici vous dire que le Conseil d'Etat partage la plupart des préoccupations qui ont été évoquées, notamment celles qui viennent d'être abordées s'agissant d'un projet de loi qui, en réalité, défend la démocratie - j'y reviendrai dans un instant. Mais j'aimerais dire aussi à quel point il est important, dans notre canton, au vu de la situation sécuritaire et pour retrouver le chemin de la sécurité et restaurer la sécurité que nos concitoyennes et concitoyens appellent de leurs voeux, de retrouver aussi une certaine sérénité dans nos débats - sur ce sujet en particulier - de ne pas prêter à ce projet de loi des vertus extraordinaires qu'il n'a pas, et de ne pas, non plus, le diaboliser.
Ce projet de loi va permettre de déployer ses effets dans quelque temps et vous aurez l'occasion - c'est une première cautèle que je me plais à rappeler ici aux Verts et aux socialistes - de le reprendre à la faveur de la révision totale de la loi sur la police et de l'aspiration profonde que je veux amener à travers cette révision quant aux missions fondamentales de la police.
C'est une matière difficile - vous l'avez illustrée par vos propos - une matière difficile parce qu'elle est grave ! Elle touche à des notions judiciaires, mais aussi pré-judiciaires: il y avait une partie de confusion dans ce débat sur la capacité d'intervenir en pré-judiciaire et l'idée de confier précisément à des instances judiciaires du travail qui est pré-judiciaire... On ne doit pas mélanger les genres !
Je regrette de mon point de vue l'amendement qui a été approuvé, il n'est pas dramatique mais vous allez à l'encontre de ce que voulait le procureur général et de ce qu'il a clairement exprimé. C'est dommage également pour le Parquet. Vous induisez par cette notion un changement de hiérarchie. Parce que le Conseil d'Etat est l'instance première de surveillance de la police ! C'est son rôle, comme c'est son rôle de surveiller l'ensemble de l'administration. Je le regrette, mais ce n'est évidemment pas rédhibitoire.
C'est une matière non seulement difficile, mais sérieuse. Et là, j'aimerais vraiment insister sur le fait que des réponses ont été apportées. Elles l'ont encore été ce soir, et je vais les compléter maintenant, sous l'angle du respect des libertés fondamentales par rapport aux données: le respect des données privées, le respect de la sphère privée est une notion fondamentale et le Conseil d'Etat en est le garant !
S'agissant de cette loi, on appliquera strictement la LIPAD et son article 40. Ce dernier définit très précisément la protection des données concernant la nécessité de conserver, parfois plus longtemps que les délais, des moyens de preuve au bénéfice de la justice, laquelle doit disposer de preuves licites pour établir son dossier ! On appliquera strictement cet article de la LIPAD et l'on verra qu'à travers le dispositif existant, notamment la protection des données et les préposées afférentes, les droits des citoyens sont conservés.
J'aimerais enfin évoquer un troisième et dernier élément qui me semble fondamental. A travers le vote de cette loi - et j'appelle vraiment les Verts et les socialistes, qui semblent vouloir s'y opposer, à la soutenir en réalité - vous reconnaissez le travail de la police et vous dotez la police des moyens réels d'agir, avec des cautèles qui existent ! Ces cautèles, je les ai rappelées tout à l'heure. Vous reconnaissez, au-delà du travail de la police, le travail de l'Autorité - avec un grand «A» ! Et l'autorité manque de crédibilité aujourd'hui à Genève ! Cette loi permet - elle ne sera pas seule - mais elle permet de restaurer cette crédibilité.
Pour conclure, j'aimerais rappeler contre quoi on se bat. On ne se bat pas un parti contre l'autre, on se bat pour la sécurité ! On se bat contre la criminalité informatique, on se bat contre la pédophilie ! On se bat ici contre les braquages et les nombreux actes préparatoires, que l'on pourra plus facilement discerner avec cette loi. On se bat contre le trafic de stupéfiants ! On se bat aussi, Mesdames et Messieurs, contre la traite d'êtres humains ! Parce que si l'on veut se battre là contre, on doit aussi se donner les moyens d'infiltrer des organisations criminelles de plus en plus puissantes !
Mesdames et Messieurs, avec ce projet de loi, on se bat pour les droits fondamentaux des plus faibles - de celles et ceux qui sont régulièrement menacés dans leur intégrité corporelle, physique, psychique et sexuelle ! On se bat pour le droit à la vie ! On se bat pour ces libertés fondamentales ! Je vous remercie de soutenir, je l'espère unanimement, ce projet de loi. (Applaudissements.)
Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, je vous fais voter ce projet de loi dans son ensemble.
Une voix. Vote nominal !
Le président. Oui, Monsieur le député. Etes-vous soutenu ? (Plusieurs mains se lèvent.) Oui, vous l'êtes largement.
La loi 11056 est adoptée article par article en troisième débat.
Mise aux voix à l'appel nominal, la loi 11056 est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 58 oui contre 30 non.
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, je vous donne rendez-vous demain à 15h30. Les deux urgences qui restent seront traitées à 17h. Je lève la séance. Bonne nuit !
La séance est levée à 22h45.