République et canton de Genève
Grand Conseil
Séance du vendredi 16 mars 2012 à 20h30
57e législature - 3e année - 6e session - 32e séance -autres séances de la session
La séance est ouverte à 20h30, sous la présidence de M. Gabriel Barrillier, premier vice-président.
Assistent à la séance: M. François Longchamp et Mme Michèle Künzler, conseillers d'Etat.
Exhortation
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, prenons la résolution de remplir consciencieusement notre mandat et de faire servir nos travaux au bien de la patrie qui nous a confié ses destinées.
Personnes excusées
Le président. Ont fait excuser leur absence à cette séance: Mme et MM. Pierre-François Unger, président du Conseil d'Etat, Charles Beer, David Hiler et Isabel Rochat, conseillers d'Etat, ainsi que Mme et MM. Christophe Andrié, Roberto Broggini, Jacques Jeannerat, Pierre Losio, Olivier Norer et Morgane Odier-Gauthier, députés.
Annonces et dépôts
Néant.
Débat
Le président. Nous reprenons nos travaux aux points 35, 45 et 46. Je vous propose de traiter ces trois objets en même temps. Messieurs les rapporteurs, d'abord Monsieur le rapporteur de majorité Bertrand Buchs, avez-vous quelque chose à ajouter ?
M. Bertrand Buchs (PDC), rapporteur de majorité. Oui, merci, Monsieur le président. Avant de traiter le fond du problème, je vais faire une demande d'ajournement de ces trois rapports, ce pour deux raisons. Première raison, on devait discuter d'un quatrième rapport, sur la motion 1999. Malheureusement, pour des problèmes techniques, le rapport s'est perdu dans les profondeurs de l'informatique et n'est jamais arrivé sur le bureau du Grand Conseil.
Deuxième raison, nous avons maintenant la fin du travail de la task force sur ce problème, et la commission de contrôle de gestion aimerait étudier ce rapport avant de prendre une décision, selon que les motionnaires maintiennent leurs propositions ou qu'ils les enlèvent. Voilà la demande d'ajournement que je formule.
Le président. Merci, Monsieur le rapporteur de majorité. La parole est au rapporteur de minorité, sur la demande d'ajournement.
M. Patrick Lussi (UDC), rapporteur de minorité. Au sujet de la demande d'ajournement, le rapport de minorité vous recommande de refuser cette requête. Par contre, nous formulons une demande ferme de renvoyer ces trois objets à la commission de contrôle de gestion, parce que, justement, en ayant le rapport de la task force, nous pourrons voir si des réponses sont apportées. A ce moment-là, le groupe UDC, si les réponses sont données par la task force, retirera certainement ces objets.
Mais il nous semble prématuré de ne pas prendre ces objets en considération et inadéquat ne pas les renvoyer à la commission de contrôle de gestion, où l'on pourra les étudier pertinemment. En effet, je rappelle simplement que ces trois objets ont été survolés, et pas étudiés, en commission.
Mme Michèle Künzler, conseillère d'Etat. Pour le Conseil d'Etat, effectivement, il serait bon soit d'ajourner, soit - et ce peut-être préférable - d'aller en commission, pour que l'on puisse vous présenter le rapport qui a été fait par le groupe de travail, en tout cas en ce qui concerne les problèmes de gérance, mais aussi les locaux et la gestion de ces derniers. Il y a plusieurs rapports, soit intermédiaires, soit définitifs, qui permettront au nouveau conseiller d'Etat en charge de vous présenter les mesures qu'il compte prendre et les mesures organisationnelles qui doivent être prises. C'est un problème qui dure depuis de longues années. Maintenant, il faut prendre des mesures pour rétablir la situation et voir comment on peut continuer pour ce qui concerne la gestion des villas, la gestion et les acquisitions de terrains qu'il faut faire, ainsi que d'autres questions organisationnelles. Je pense que c'est le moment de faire le point, avant de débattre de manière houleuse d'une situation qui est en voie de résolution.
Le président. Merci, Madame la conseillère d'Etat. Conformément à l'article 78A de notre règlement, je vais vous faire voter d'abord l'ajournement, à la majorité simple. (Commentaires pendant la procédure de vote.)
Mis aux voix, l'ajournement des rapports M 1996-A, R 658-A et R 659-A est rejeté par 29 non contre 22 oui.
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, je vous soumets maintenant le renvoi à la commission de contrôle de gestion. Est-ce clair ? (Remarque.) Les trois objets, c'est clair !
Mis aux voix, le renvoi des rapports M 1996-A, R 658-A et R 659-A à la commission de contrôle de gestion est adopté par 38 oui et 15 abstentions.
Débat
Le président. Nous sommes maintenant au point 36 de notre ordre du jour. (Brouhaha. Le président agite la cloche.) S'il vous plaît ! Je passe la parole, s'il le souhaite, à M. le rapporteur de majorité, Jacques Béné.
M. Jacques Béné (L), rapporteur de majorité. Merci, Monsieur le président. Cette proposition de motion, Mesdames et Messieurs, est à nouveau une tentative du parti socialiste, qui n'est pas content du nouveau droit fédéral et essaie de corriger ce qui ne lui plaît pas. Alors, je vais peut-être rappeler l'intérêt de cette proposition de motion et la raison, surtout, pour laquelle nous ne pourrons malheureusement pas entrer en matière.
Il faut savoir que, avec la nouvelle procédure fédérale qui est entrée en vigueur le 1er janvier 2011, lorsqu'un locataire est en défaut de paiement et que son bail est résilié, on considère dorénavant qu'il y a une procédure sommaire et que, quand il y a procédure sommaire, on ne passe plus devant la commission de conciliation. La procédure sommaire est pour les cas clairs; le défaut de paiement est considéré comme un cas clair.
Avant le 1er janvier 2011, en cas de résiliation de bail pour un défaut de paiement, on devait passer par la commission de conciliation, ensuite par le tribunal, éventuellement par la section des affaires sociales. C'était une procédure qui prenait énormément de temps, entre dix-huit et vingt et un mois, avant de pouvoir obtenir un jugement d'évacuation pour le bailleur. Aujourd'hui, il est vrai que, entre le dépôt de la requête en évacuation et l'évacuation à proprement parler, il n'y a que trois mois, en gros, trois à quatre mois, et nous considérons que c'est une avancée considérable. Pourquoi est-ce une avancée considérable ? Parce que, à partir du moment où la longueur de la procédure est diminuée, il y a des conséquences, à savoir que les montants en jeu sont plus faibles, les cas à résoudre moins difficiles - parce que les montants sont plus faibles - et les bailleurs plus facilement à même de prendre des arrangements de paiement, puisque, pour résorber le retard de loyer, on va prendre nettement moins de temps, ce qui fait que la résiliation peut être reportée.
Il y a trois écueils que ce projet de loi n'arrive malheureusement pas à éviter. Premièrement, on nous a dit que c'était un problème récurrent - c'est vrai, c'est un problème récurrent - et qu'énormément de cas pourraient être résolus grâce à ce fonds cantonal de prêt aux locataires. Il faut d'abord savoir que l'Hospice général intervient déjà à de nombreuses reprises pour aider les personnes pouvant déjà bénéficier d'octrois d'aides par l'Hospice général. En fait, on voudrait, par ce fonds, essayer de faire en sorte que bénéficient d'aides des locataires qui ne peuvent pas obtenir l'aide sociale fournie par l'Hospice général.
Ensuite, on nous a dit que l'on allait résoudre beaucoup de cas avec cela. Il se trouve que l'office du logement, qui intervient aussi au tribunal, qui est présent avec l'Hospice général, a environ une trentaine de cas qui lui sont soumis par année pour essayer de trouver des locations d'urgence, des logements d'urgence, pour certains locataires. Il nous a été confirmé que, sur ces trente cas, en moyenne sur les dernières années... (Brouhaha. Le président agite la cloche.) ...seuls 12% d'entre eux ne trouvaient pas de solution; 12%, cela veut dire quatre cas par année. Cela signifie que tous les autres cas trouvent des solutions, des logements d'urgence. Ou alors, cela peut aussi être des locataires qui trouvent d'autres solutions par eux-mêmes. Mais il n'y a pas le nombre de cas estimé par les initiants de cette motion.
Voici le dernier point. C'est bien simple, on sait qu'à peu près 80% des locataires n'interviennent pas - alors qu'ils sont soumis à une procédure pour défaut de paiement de loyer, résiliation de bail, etc. - et c'est seulement au moment de l'évacuation qu'ils ont conscience qu'ils vont se faire mettre dehors. Ces 80% de personnes-là ne demandent de l'aide à personne et n'essaient pas de trouver des solutions. Pourquoi iraient-elles demander de l'aide à un fonds cantonal tel qu'il est voulu par cette proposition de motion ?
Pour nous, et pour la majorité de cette commission, la meilleure garantie pour le locataire, si le bail est résilié, est que la procédure soit la plus rapide possible, afin que les montants en jeu soient les plus faibles possibles pour permettre de trouver des arrangements. Effectivement, le tribunal nous a confirmé que, dans la très grande majorité des cas, il y a toujours des arrangements qui sont trouvés avec le bailleur.
C'est donc pour nous une question de responsabilisation du locataire. Notre crainte est tout simplement que la majorité des locataires qui seraient en défaut de paiement ou qui pourraient éventuellement l'être se disent...
Le président. Il vous faut conclure, Monsieur le rapporteur !
M. Jacques Béné. Je conclus, Monsieur le président. ...se disent: «A partir du moment où il y a un fonds, autant l'utiliser, et arrêtons de payer notre loyer avant de cesser de payer les autres factures que nous aurions éventuellement en suspens.» Donc, je vous prie de refuser d'entrer en matière sur cette motion.
M. Christian Dandrès (S), rapporteur de minorité. Oui, Mesdames et Messieurs les députés, les socialistes ne sont pas contents avec l'intégralité du code de procédure civile fédéral, parce qu'il peut avoir des effets potentiellement catastrophiques sur bon nombre de locataires, et principalement dans le cadre des évacuations judiciaires. Cette problématique présente aujourd'hui une acuité toute particulière, parce que l'on a en fait quatre facteurs qui se conjuguent. Il y a tout d'abord la pénurie de logements sans précédent, puis la spéculation immobilière d'importance, ensuite la situation sociale des locataires - donc de la population genevoise de manière générale - qui se détériore relativement à la conjoncture économique, et il y a enfin la réforme de la procédure civile fédérale. Dans ce contexte, ces quatre facteurs ont pour conséquence que bon nombre de locataires ont des difficultés énormes à trouver des solutions de relogement à l'issue d'une procédure d'évacuation.
Le nombre de personnes confrontées aux évacuations contredit les données qui ont été indiquées tout à l'heure. Ces chiffres, je les ai vérifiés. Ils viennent de l'office du logement; ce sont les chiffres pour 2011, que nous n'avions pas à l'époque où nous avons examiné ce document. Ce sont 297 jugements d'évacuation qui n'ont pas été exécutés en 2011 et 158 jugements d'évacuation qui ont donné lieu à une intervention de la force publique. Sur les 158, on a 67 cas où les locataires ont été physiquement expulsés. Pour être d'une intégrité parfaite, 21 cas où l'appartement a été trouvé vide et 70 cas où l'appartement a été restitué après le passage des gendarmes dans un délai de quarante-huit heures. On a quand même 137 personnes qui ont été délogées directement par les gendarmes.
Les travaux de commission ont permis de voir que le dispositif existant n'est pas adapté à la nouvelle situation et qu'il fallait faire mieux. Faire mieux pour les classes moyennes, faire mieux pour les petites entreprises qui sont sujettes à des difficultés importantes, des défauts de liquidités, et qui ne peuvent pas entrer aujourd'hui - fort heureusement - dans les dispositifs d'assistance. Et pour cause: ce dispositif a pour finalité de garantir la dignité humaine, et non pas de pallier des problèmes de liquidité passagers qui pourraient être liés à une séparation ou à une perte d'emploi, le temps, justement, que l'assurance-chômage puisse entrer en matière.
Mesdames et Messieurs les députés, la solution est alors assez simple. Elle s'ancre dans un cadre légal existant: on ne demande pas la modification ni du code des obligations, ni du code de procédure civile fédéral, on demande simplement de créer un fonds, pour éviter que la lettre de mise en demeure pour défaut de paiement soit suivie d'une résiliation du contrat de bail. Pour que le fonds fonctionne, il faut qu'il soit disponible à première demande pour un crédit qui correspondrait à tout ou partie du montant de la mise en demeure, et auquel il pourrait justement être fait appel sans devoir justifier d'un certain nombre de documents - on a pu constater que les évaluations sociales peuvent prendre plusieurs mois. Les personnes que nous avons auditionnées, notamment à Caritas et au Centre social protestant, ont indiqué qu'il s'agissait était évidemment de durées minimales.
Le but de cette proposition de motion n'est pas de substituer l'Etat à la responsabilité du locataire de payer son loyer. Cela vise uniquement des problèmes de liquidité passagers ! J'insiste sur le caractère passager, justement, de la demande qui est faite. C'est la raison pour laquelle ce fonds devrait pouvoir être ouvert aussi aux petites entreprises qui sont confrontées à ces difficultés.
M. Béné conclut dans son rapport en indiquant que la proposition de motion devrait être refusée pour deux raisons: le peu de cas et les risques de dérapages qui ne seraient pas contrôlables. Alors, j'ai l'impression que la proposition de motion n'a pas été très bien comprise ! J'ai même le sentiment que M. le rapporteur de majorité s'est laissé un peu emporter par son dada pour la responsabilité individuelle au sens «parti libéral» du terme et qu'il a même peut-être oublié de lire les invites de la proposition de motion. En effet, le problème n'est pas de «juger - comme c'est affirmé par le rapporteur, page 40 - de la capacité individuelle à rechercher et trouver des solutions sans intervention de l'Etat.» Le but, au contraire, est de donner au locataire la possibilité de s'en sortir seul, sans tomber à la charge de l'Etat parce qu'il perdrait son logement. Il faut absolument prévenir que 200 personnes soient logées chaque jour à l'hôtel - c'est malheureusement le cas actuellement - ce qui est un problème de taille. Simplement, aujourd'hui, le cadre légal ne permet malheureusement pas de trouver des solutions par d'autres biais que par celui d'un fonds de cette nature, parce que le délai de trente jours de la mise en demeure est beaucoup trop court ! Comme je l'ai dit, allez voir une banque: ils vont vous demander un plan financier, des garanties, un porte-fort... Tout cela, en un mois, il n'est pas possible de le trouver !
J'aimerais maintenant rassurer l'Entente, l'UDC et le MCG: la proposition de motion ne respecte pas seulement le principe de responsabilité... (Brouhaha. Le président agite la cloche.) J'ai dit qu'il s'agissait d'un crédit - et pas d'une subvention - que le crédit serait naturellement remboursable, avec arriérés...
Le président. Il vous reste trente secondes, Monsieur le rapporteur !
M. Christian Dandrès. Oui, je vous remercie; je finis tout de suite. De plus, le locataire n'est naturellement pas tenu de faire appel à ce fonds, s'il peut trouver des moyens par d'autres biais, mais c'est une potentialité qui pourrait avoir un avantage. Le principe de subsidiarité, cher également au coeur des libéraux, est respecté. J'ai même le sentiment que c'est là l'objectif, l'essence même du projet, puisque le but est d'éviter la perte du logement, donc le risque que la personne doive émarger à des prestations de l'Hospice général et être logée par l'office du logement.
Le président. Il vous faut conclure.
M. Christian Dandrès. Je vais arrêter là. Je reviendrai peut-être tout à l'heure.
Mme Sylvia Nissim (Ve). Mesdames et Messieurs les députés, la commission du logement a passé plusieurs séances à débattre de cette proposition de motion socialiste, qui a le mérite de soulever la question de l'évacuation des locataires, et cela juste après une modification de la procédure des tribunaux, dans une période que l'on sait extrêmement difficile dans le domaine. La pénurie de logements à Genève, avec son taux de vacance excessivement bas, touche en particulier les plus démunis, qui, une fois leur logement perdu, n'ont plus aucun moyen d'en trouver un autre. Pourtant, cette proposition de motion précise vouloir aider les personnes de classe moyenne, temporairement en difficulté financière, pour cause de divorce, de chômage ou autres. Une bonne partie des questions de la commission ont donc porté sur ces personnes. Il s'avère qu'elles sont très peu nombreuses et que l'écrasante majorité des personnes qui se retrouvent dans ces situations d'expulsion sont des personnes qui sont en surendettement. De plus, lorsque le locataire répond aux convocations - ce qui n'est pas toujours le cas, il faut le préciser - la pratique courante reste la négociation, malgré la suppression de la conciliation.
La proposition de motion a tout de même permis de se rendre compte qu'il y a un manque important d'information sur la procédure, comme sur les possibilités d'aide aux locataires. Cette information, en partie à charge de l'Etat en ce qui concerne l'aide de l'Hospice, par exemple, ou à charge des régies, pourrait largement être améliorée.
En conclusion, on peut reconnaître que la situation du logement à Genève est plus que précaire, en particulier pour les personnes en surendettement, mais que l'aide est disponible et que la négociation reste la norme quand c'est possible. Le fonds cantonal de prêt aux locataires ne nous semble donc pas être la bonne solution, et nous nous abstiendrons ou refuserons cette proposition de motion.
Le président. Merci, Madame la députée. La parole est maintenant à M. le député Guillaume Barazzone.
M. Guillaume Barazzone (PDC). Merci, Monsieur le président, de me donner l'occasion de faire part de l'avis du groupe démocrate-chrétien sur cette proposition de motion. Oui, Monsieur Dandrès, la situation du logement à Genève est préoccupante. Oui, la situation fait qu'il y a une pression sur les loyers et que, pour un certain nombre de familles et de personnes dans ce canton, ainsi que d'entreprises, il devient difficile de payer son loyer. Monsieur Dandrès, le problème c'est que votre proposition de motion, malheureusement, ne traite pas les causes du mal et apporte de mauvaises réponses à un problème qui se pose.
Le groupe démocrate-chrétien refusera cette proposition de motion pour deux raisons principales. La première, sur le fond, est celle-ci. Vous nous dites: «Cette proposition de motion ne remplacera pas la responsabilité individuelle.» Nous pensons au contraire que cette proposition de motion aura des effets incitatifs très négatifs dans la mesure où vous nous dites: «Fonds garanti à première demande; sans barème; sans document justificatif à présenter.» Comment voulez-vous que les gens ne fassent pas appel au fonds dès qu'un problème se pose ? Cela nous paraît être une évidence. Si les banques demandent toute une série d'informations, c'est qu'elles veulent se couvrir et faire attention que la personne demandant les fonds nécessaires puisse un jour les rembourser. De même, l'Etat, s'il voulait mener une politique sociale, devrait s'assurer que les personnes qui font appel au fonds répondent à un barème. Or, de cela, Monsieur Dandrès, vous ne parlez pas dans votre proposition de motion.
Pourtant, je pense que cette question pose un problème pratique majeur, dans la mesure où - vous l'avez dit - dès la mise en demeure, il y a environ trente jours, en fonction du moment où la personne décide d'agir, pour pouvoir faire appel au fonds. C'est la deuxième raison qui nous pousse à refuser cette proposition de motion: en termes pratiques, il nous paraît totalement impossible - admettons même qu'il y ait des critères objectifs que l'Etat pose à l'octroi d'un financement - de vérifier si la personne qui fait la demande respecte ces critères. Ainsi, la deuxième raison pour laquelle nous refusons cette proposition de motion, c'est qu'elle est totalement impraticable.
Donc, premièrement, sur le fond, nous pensons que ce n'est pas à l'Etat de se substituer à la responsabilité individuelle et, deuxièmement, il y a impraticabilité de cette proposition de motion, qui n'apporte aucune solution concrète et ne s'inscrit en réalité pas dans les exigences que posent le droit fédéral et ce fameux délai de trente jours.
Par conséquent, Mesdames et Messieurs les députés, oui, cette proposition de motion part d'une bonne intention, mais elle est une mauvaise réponse à la question qui est posée. Nous refuserons donc cette proposition de motion, et nous vous invitons à faire de même.
Mme Nathalie Schneuwly (R). Que demande cette proposition de motion ? On l'a dit, elle demande de créer un fonds cantonal pour payer les loyers des locataires en difficulté, afin d'éviter leur évacuation. A première vue, cette proposition de motion a effectivement tout pour plaire. Elle permet aux locataires de ne plus être évacués, aux bailleurs de ne plus avoir d'impayés et aux régies d'avoir moins de contentieux et moins de coûts. Mais après une étude approfondie en commission et plusieurs auditions, on s'est rendu compte que ce n'était pas si simple et que cela allait être coûteux. Tous les acteurs entendus le confirment, que ce soit le Centre social protestant, Caritas, l'Hospice général, le DSE avec son représentant de la politique d'insertion, l'office du logement, les Fondations immobilières et le Tribunal des baux et loyers. Tous nous ont confirmé que, dans la majorité des cas, on trouve des arrangements, que ce soit au niveau des régies, des tribunaux, ou même encore par la suite.
Il n'y a qu'une toute petite minorité de cas pour lesquels on n'a pas d'arrangement, mais c'est parce que les gens ne viennent pas demander de l'aide. Et ces cas ne seront pas réglés par cette motion ! Le but de cette dernière est d'agir en amont, dans le délai de trente jours pendant lequel les bailleurs peuvent résilier le bail. C'est donc une illusion totale de croire que ce fonds aura une utilité... (Brouhaha. Le président agite la cloche.) ...puisqu'il n'atteindra pas les personnes concernées.
L'effet pervers, Mesdames et Messieurs, c'est que les cas qui trouvent aujourd'hui des solutions grâce à la volonté de tous les acteurs se tourneront simplement vers l'Etat et coûteront alors plus cher. Pour toutes ces raisons, et malgré notre bonne volonté, le PLR va refuser cette proposition de motion.
M. Eric Stauffer (MCG). Mesdames et Messieurs les députés, laissez-moi peut-être expliquer à celles et ceux qui nous écoutent qu'une proposition de motion n'a aucun effet contraignant. Une motion - nous parlementons à son sujet depuis maintenant à peu près quinze minutes - n'a d'effet que d'obliger le Conseil d'Etat à donner une réponse dans les six mois. Voilà comment nous tentons de régler la crise du logement et d'aider les locataires qui ne seraient plus en mesure de payer leur loyer. Alors, tout cela, c'est bien joli; mais finalement c'est la démonstration des «blocs». Nous avons un bloc de gauche qui vient dire: « Il y a ces pauvres locataires qui ne peuvent plus payer leur loyer; il faut créer un fonds.» Et nous avons le bloc de droite qui dit: «Non, il faut défendre les intérêts des propriétaires. Et surtout, construisons, mais alors lentement; ainsi, les prix restent très élevés.»
Le MCG va vous dire, Mesdames et Messieurs, quelle est sa position. La première constatation est que l'hypocrisie règne. En effet, nous avons dans la constitution genevoise, chers collègues députés, un l'article 10B intitulé «Droit au logement». Je ne parle pas d'une loi, je parle d'un principe constitutionnel. (Brouhaha. Le président agite la cloche.) L'article 10B, alinéa 1, stipule: «Le droit au logement est garanti.» Vous devriez aller expliquer cela à tous les citoyens qui ne trouvent pas de logement et qui sont obligés de s'expatrier, soit en France voisine, soit dans le canton de Vaud. L'alinéa 2 est ainsi conçu: «L'Etat et les communes encouragent par des mesures appropriées la réalisation de logements - en location ou en propriété - répondant aux besoins reconnus de la population.» Ce devait être des voeux de Jean Calvin, jadis, qui sont restés pieux !
L'alinéa 3 a la teneur suivante: «A cette fin, dans les limites du droit fédéral, ils mènent une politique sociale du logement, notamment par: a) la lutte contre la spéculation foncière;» Il doit y avoir certains membres du PLR qui ont besoin de lunettes, parce que, concernant la spéculation foncière, je n'aimerais pas vous rappeler de tristes épisodes de la Banque cantonale de Genève... La population nous est témoin. Voici la lettre b): «la construction et le subventionnement de logements avec priorité aux habitations à bas loyers;» J'ai regardé la presse aujourd'hui pour voir quelles étaient les loyers pratiqués... Mon Dieu, j'ai pris peur ! Pourvu que mon immeuble ne s'effondre pas, parce que je n'aurai plus les moyens de déménager sur le canton de Genève ! Et voici la lettre c): «une politique active d'acquisition de terrains;» Ah oui, pour faire des discothèques, c'est vrai que l'on a été très rapide: 14 millions votés en moins de trois mois dans ce parlement ! Je dois dire «Chapeau !», c'était un record de vitesse.
Je pourrais continuer longtemps, Mesdames et Messieurs. Tant et aussi longtemps qu'il n'y aura pas, dans la constitution genevoise, un droit au logement opposable, tout cela ne servira à rien ! Le jour où un citoyen qui n'a pas de logement peut faire payer l'Etat, eh bien, ce jour-là, Mesdames et Messieurs, nous construirons, nous déclasserons, et nous aurons enfin une qualité de vie et des logements en suffisance pour nos concitoyens et pour leurs enfants, qui grandissent et qui veulent fonder une famille.
En ce qui concerne la proposition de motion du parti socialiste, évidemment, elle part d'une bonne intention. Mais comme l'Hospice général va se substituer droit derrière l'évacuation pour trouver un logement et subventionner ce dernier, votre proposition de motion ne sert strictement à rien dans ce sens-là.
M. Christo Ivanov (UDC). Créer un fonds cantonal de prêt aux locataires, voilà une magnifique et même très séduisante idée. Malheureusement, quand on gratte un peu, on se rend compte qu'il s'agit d'une nouvelle usine à gaz. En effet, faut-il instituer une déresponsabilisation des locataires dans ce canton ? Faut-il encourager, finalement, le non-paiement de son loyer ? Telles sont les questions.
L'Hospice général aide déjà ceux qui sont dans la précarité et participe à payer leur logement. Les tribunaux, de leur côté, font largement leur part des choses. Ils font leur maximum pour trouver une solution avec les bailleurs. Cette proposition de motion est donc un coup d'épée dans l'eau, purement électoraliste et démagogique. En conclusion, le groupe UDC refusera d'entrer en matière sur cette proposition de motion.
Mme Irène Buche (S). Mesdames et Messieurs les députés, je crois que cette proposition de motion a été mal comprise, en tout cas mal interprétée. Il s'agit avant tout d'agir en amont, d'éviter que certaines résiliations ne soient envoyées aux locataires, en leur donnant les moyens de payer leur loyer dans les temps. Il ne s'agit pas de déresponsabilisation, il s'agit d'intervenir dans des cas de difficultés passagères. Il s'agirait d'un prêt remboursable, donc pas du tout d'une aide à fonds perdu.
J'aimerais surtout relever que l'Hospice général, bien sûr, a un mandat et intervient dans un certain nombre de cas. Mais il ne peut pas intervenir financièrement, ou alors qu'à très petites doses, si une personne ne remplit pas les barèmes de l'Hospice. Donc, il y a beaucoup de personnes ayant des revenus tout à fait moyens, mais qui n'arrivent plus, à un moment donné, à payer leur loyer, et ce sont celles que l'on vise.
J'aimerais aussi attirer votre attention sur l'amendement qui a été proposé en commission par les socialistes, lequel consisterait à créer ce fonds à titre expérimental. Cet amendement est maintenu, et je vous invite à l'accepter. Il ne s'agit pas de créer une usine à gaz, mais simplement de réfléchir, de demander au Conseil d'Etat de réfléchir à une telle solution et de faire cela à titre expérimental.
Le président. Merci, Madame la députée. Je mettrai votre amendement aux voix tout à l'heure. La parole est maintenant à Mme la députée Marie-Thérèse Engelberts.
Une voix. Elle s'est barrée !
Une autre voix. C'est une erreur.
Le président. Alors, c'est une erreur. La parole est à M. le député David Amsler.
M. David Amsler (L). Merci, Monsieur le président. Effectivement, je pense que cette proposition de motion fait un peu l'unanimité contre elle. Mais elle a quand même eu deux ou trois effets positifs. (Brouhaha. Le président agite la cloche.) Tout d'abord, elle a permis d'auditionner tous les acteurs du domaine immobilier qui sont de près ou de loin liés à ces problèmes d'évacuation de locataires, qui sont toujours pénibles pour toutes les parties. Elle a permis aussi d'obtenir certains engagements, notamment de l'Union suisse des professionnels de l'immobilier, qui s'est engagée à écrire à ses membres pour qu'ils annexent aux courriers de résiliation de baux les procédures qui sont à disposition des locataires pour demander des aides, notamment à l'Hospice général. Nous espérons fortement que ces mesures pourront aider les gens dans la difficulté à s'adresser aux organismes compétents pour les aider. Enfin, cela nous a aussi permis, à la commission du logement, de voir que la chose importante dans cette problématique de l'évacuation est le problème du suivi social. En fait, l'aide financière sans un suivi social ne sert finalement pas à grand-chose. C'est pour cela que les actions du CSP et de Caritas sont primordiales dans le cadre du suivi social de ces dossiers de personnes en difficulté. On s'est rendu compte qu'il ne sert à rien de payer un loyer sans ce suivi social.
Alors, cette proposition de motion fait un peu l'unanimité contre elle; un fonds cantonal, c'est de nouveau une grosse infrastructure, une grosse logistique, pour un problème qui peut être réglé différemment. Ainsi, pour toutes ces raisons, le groupe libéral du PLR vous recommande de refuser cette proposition de motion.
M. Guillaume Barazzone (PDC). Dans le fond, vous l'avez dit tout à l'heure, cette proposition de motion pose la question générale du logement à Genève. Un certain nombre de députés dans cette enceinte font de grandes déclarations en opposant le bloc de droite et le bloc de gauche, arguant qu'il n'y aurait pas eu de solutions trouvées depuis un certain nombre d'année... C'est vrai, nous avons une responsabilité; les opposants aux projets immobiliers et aux déclassements dans ce canton ont une énorme responsabilité.
Mais nous, ce qui nous intéresse, au PDC, c'est de savoir ce que M. Stauffer fait, lui qui est magistrat depuis un certain nombre d'années dans une commune, Onex... (Remarque.) ...et qui est député depuis six ans dans cette enceinte. Eh bien, nous n'avons vu aucune proposition concrète en matière de logement de la part du MCG ! (Commentaires. Le président agite la cloche.) Nous attendons les propositions de motions et le programme politique de M. Stauffer, qui brigue un poste à l'exécutif de ce canton. Donc, il est très facile de critiquer, mais nous, nous attendons les solutions. J'invite tous les citoyens... (Commentaires.)
Le président. Il vous faut conclure !
M. Guillaume Barazzone. ...et les téléspectateurs... (Brouhaha.) qui nous regardent et qui écoutent religieusement M. Stauffer à longueur de soirées, à lui écrire et à lui demander ce qu'il a fait en matière de logement à Onex. Nous attendons ses propositions, parce que, pour l'instant, ce n'est que du vent, Mesdames et Messieurs !
Une voix. Bravo ! (Applaudissements. Commentaires.)
Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à Mme Prunella Carrard.
Mme Prunella Carrard (S). Merci, Monsieur le président... (Commentaires.)
M. Roger Golay. Vous avez fait quoi, avec vos conseillers d'Etat, jusqu'à maintenant !
Mme Prunella Carrard. Monsieur Golay, je vous remercie de me laisser parler ! J'aimerais juste dire ici que nous déplorons que ce débat ne mène nulle part. Tout le monde nous dit: «C'est une fausse bonne idée», mais personne ne soumet aucune proposition. Les socialistes ont au moins le mérite de le faire.
Refuser de renvoyer cette motion au Conseil d'Etat revient à dire: «Nous ne voulons même pas que le Conseil d'Etat réfléchisse à la question.» Ainsi, nous vous enjoignons de renvoyer cette motion au Conseil d'Etat, éventuellement avec l'amendement proposé par ma collègue, à savoir que ce fonds serait créé à titre expérimental. Cela permettrait au moins - au moins ! - que le Conseil d'Etat se penche sur la question et nous fasse des propositions. J'espère par ailleurs que les groupes qui ne sont pas capables de faire autre chose que de lire la constitution et de nous accuser de ne rien faire seront capables, désormais, de soutenir cette motion.
Le président. Merci, Madame la députée. Avant de passer la parole à Mme Dominique Rolle, j'aimerais demander à nos collègues sur ma droite, MCG... (Commentaires.) Voilà, c'est très bien, je vous remercie ! Ecoutez votre collègue ! Madame la députée, vous avez la parole.
Mme Dominique Rolle (MCG). Merci, Monsieur le président. Alors écoutez, quand j'entends les déclarations de M. Guillaume Barazzone, je trouve cela assez hilarant... «Parce que le PDC attend les solutions» ! Voilà ce dont il faut prendre note. Ils attendent. Merveilleux ! Nous, nous n'avons pas encore les exécutifs nécessaires à la construction et pour faire avancer les dossiers. Mais ce n'est pas grave: au moins, la bonne volonté est là. Bonne volonté qui a présidé à la commission du logement, qui s'est attachée à faire un état des lieux le plus complet possible en entendant tous les organismes, pour voir vraiment qui était concerné par les dossiers et qui ne l'était pas. Finalement, il est vrai que cela ne concernait pas tant de personnes que cela. On a fait le tour, et on a vu aussi que cela créait un doublon notamment avec les fonds...
Le président. Il vous reste dix secondes, Madame la députée.
Mme Dominique Rolle. D'accord. ...donc, cela créait un doublon avec les fonds de l'Hospice. C'est pour cela que le MCG a décidé de ne pas soutenir cette proposition de motion, bien qu'elle soit demandée par les divers organismes.
M. Patrick Lussi (UDC). Beaucoup de choses ont été dites, mais j'aimerais simplement répondre à ma préopinante socialiste, parce que, en définitive, elle a sans doute raison: il ne faut pas faire une guerre de tranchées. Mais votre rapporteur de minorité l'a dit... (Remarque.) ...je crois, dans les premiers mots: vous n'êtes pas contents avec la législation fédérale. Alors, est-ce ici, à nous, de demander au Conseil d'Etat de faire des choses ? Je crois que vous avez des relais encore plus puissants que les nôtres, sur place, pour le faire ! (Commentaires. Le président agite la cloche.) Voilà simplement ce que je voulais ajouter. C'est l'une des raisons pour lesquelles nous pensons que ce n'est pas à nous de traiter cela. Au-delà des guerres de tranchées, notre avis est simplement que ce n'est pas notre rôle, raison pour laquelle nous refusons cette proposition de motion.
Le président. Merci, Monsieur le député. Exceptionnellement, pour vingt secondes, la parole est à M. Eric Stauffer.
M. Eric Stauffer (MCG). Merci, Monsieur le président. Je souhaite simplement répondre, puisqu'on a mis en cause ma fonction de magistrat, au motif que je n'aurais rien fait à Onex. Rassurez-vous - vous transmettrez, Monsieur le président, à mes collègues du PDC - Onex bouge extrêmement vite. En ce qui me concerne, je n'ai pas les constructions ou l'urbanisme, j'ai les finances. Et j'en suis à la deuxième dénonciation à l'autorité de surveillance des communes, notamment pour votre magistrat PDC...
Le président. Voilà, il vous faut conclure !
M. Eric Stauffer. ...qui a violé la loi. Et j'ai reçu un arrêté de Mme la conseillère d'Etat m'autorisant à payer une facture, puisqu'il a payé plus de 40 000 F...
Le président. Voilà, Monsieur le député...
M. Eric Stauffer. ...en violant la loi. (Commentaires.)
Le président. ...on y est ! (Commentaires.) Mesdames et Messieurs les députés, j'en appelle à votre sagesse pour terminer cette journée de la façon la plus agréable possible. J'accorde une minute à chacun des deux rapporteurs. La parole est à M. le rapporteur de majorité.
M. Jacques Béné (L), rapporteur de majorité. Merci, Monsieur le président. Le problème est qu'il est toujours difficile de rester calme, parce que, quand le MCG est hors sujet, on lui donne encore plus la parole ! Alors, j'ai un peu de peine à comprendre ! (Commentaires.) Puisque l'on est dans ce sujet, je tiens quand même à relever que, pour M. Stauffer - il l'a dit sur Léman Bleu - il y avait prétendument 800 m2 dans les mains de l'Etat sur une galette commerciale qui était vide depuis huit ans. Il s'est avéré que cette galette commerciale n'est encore pas construite, donc je vous laisse juge ! (Commentaires.)
J'en viendrai juste, pour terminer, à une chose qui me paraît assez importante. En fait, la problématique n'intervient pas au moment où le locataire reçoit la lettre de mise en demeure, parce que, dans la plupart des cas, précisément, les locataires ne réagissent pas à cette lettre de mise en demeure; ils attendent la résiliation du bail. Or, au moment de la résiliation du bail, il se trouve que le locataire a déjà trois ou quatre mois de retard de loyer, ce qui fait que ce n'est plus seulement un petit prêt anodin.
Le président. Il vous faut conclure, Monsieur le rapporteur !
M. Jacques Béné. Ce sont des montants qui deviennent assez considérables. C'est également dans ce sens-là que l'on pourrait croire que la proposition se justifie, comme si rien ne se faisait à Genève. Mais il a été dit, en commission, lors des auditions que nous avons effectuées - que ce soit l'Hospice général, le Centre social protestant ou l'office du logement - qu'il y a déjà de nombreuses aides et que les cas qui pourraient être concernés par ce fonds cantonal sont minimes.
M. Christian Dandrès (S), rapporteur de minorité. Je serai très bref. J'aimerais rebondir sur la question de la responsabilité individuelle, notamment sur les propos qui ont été tenus par M. Guillaume Barazzone. J'ai l'impression qu'ils frisent l'absurde, pour une raison assez simple: comment peut-on parler de responsabilité individuelle lorsque le but d'un fonds de cette nature est de prévenir les défauts de liquidités ? Une entreprise qui, tout à coup, a un carnet de commandes qui fondrait ou un créancier qui ne paie pas ne peut pas être tenue pour responsable; on ne peut pas lui imputer ce fait-là. De la même manière pour une personne qui perdrait son emploi et pour une personne qui se séparerait de son conjoint ! Il ne s'agit pas d'un phénomène à endiguer, ou en tout cas d'un phénomène qui irait croissant et qu'il s'agirait de bloquer par ce biais-là.
La position de l'Entente est parfaitement contradictoire. En effet, on nous dit d'un côté que le fonds serait inutile parce qu'il toucherait une portion congrue de locataires, et, d'autre part, on nous explique qu'il y aurait des risques de débordements et que cela coûterait des fortunes.
Mesdames et Messieurs les députés, je pense qu'il faut clarifier le problème. Je vous fais donc la proposition - qui est celle de l'amendement - de créer ce fonds à titre expérimental, pour voir. Testons la chose, en précisant que les balises que nous avions mises étaient que le prêt soit limité à deux ou trois mois de loyer - sur signature d'une reconnaissance de dette, avec évidemment l'obligation de rembourser liée à cette reconnaissance - d'avoir un intérêt sur la dette et que, si la personne se trouve dans une situation sociale difficile, qu'elle soit évidemment soumise à une évaluation. Donc, je vous propose ceci: testons, puis nous pourrons revenir ici pour examiner s'il s'agit d'étendre la mesure, de la maintenir, ou non.
Le président. Merci, Monsieur le rapporteur de minorité. Mesdames et Messieurs les députés, je vous soumets d'abord l'amendement que vous avez à la page 54 du rapport, qui se limite à ajouter à l'invite les termes: «à titre expérimental». (Remarque.) Les termes: «à titre expérimental». J'espère que tout est clair pour tout le monde. Monsieur le rapporteur de majorité, vous avez levé la main ?
M. Jacques Béné (L), rapporteur de majorité. Oui, merci, Monsieur le président. Sur l'amendement, puis-je m'exprimer ?
Le président. Si c'est pour une précision...
M. Jacques Béné. Sur l'amendement ! L'amendement est présenté maintenant; j'aimerais bien m'exprimer juste sur l'amendement.
Le président. Vous aviez le temps de le faire. Je vous ai donné une minute de plus à chacun, donc vous aviez la possibilité de vous exprimer. (Commentaires.)
M. Jacques Béné. Je voulais juste apporter une précision.
Le président. Une précision !
M. Jacques Béné. Cet amendement a été proposé en commission; il est question d'un montant compris entre 100 000 F et 150 000 F. A considérer les loyers à Genève et les cas qui pourraient être concernés, même si l'on estime que c'est 1500 F par mois, quatre mois à 1500 F, cela fait 6000 F. Je vous laisse imaginer le peu de locataires que l'on pourrait aider avec ce petit montant.
Le président. Merci, Monsieur le rapporteur de majorité. Par parallélisme, j'accorde aussi trente secondes au rapporteur de minorité.
M. Christian Dandrès. Je les abandonne, Monsieur le président.
Une voix. Bravo !
Le président. Je vous remercie. Mesdames et Messieurs les députés, nous nous prononçons sur l'amendement.
Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 42 non contre 13 oui et 23 abstentions.
Mise aux voix, la proposition de motion 2017 est rejetée par 54 non contre 13 oui et 14 abstentions.
Débat
Le président. Nous sommes au point 37 de notre ordre du jour. La parole est à Mme Christina Meissner, cosignataire de cette proposition de motion.
Mme Christina Meissner (UDC). Merci, Monsieur le président. Changeons un peu de sujet, cela nous fera du bien. (Brouhaha.) En l'occurrence, parlons du bois indigène, lequel a tout pour plaire. Alors que l'emploi d'autres matériaux de construction, comme le béton, a un impact considérable en termes d'émissions de gaz à effet de serre, le bois peut se targuer d'avoir un excellent bilan carbone. Lorsque, en plus, le choix est d'utiliser le bois indigène, ce sont les émissions de carbone liées au transport qui sont fortement diminuées. (Brouhaha.) Utiliser un matériau indigène permet également de s'assurer que les conditions d'exploitation et de transformation respectent les normes environnementales les plus rigoureuses, contrairement à certains matériaux produits dans des contrées lointaines, où l'on ignore tout des conditions sociales et écologiques d'extraction et de production, qui, doit-on le rappeler, ne respectent pas toujours les principes du développement durable.
La loi sur les forêts prévoit que le canton appuie les efforts tendant à l'utilisation du bois indigène et qu'il veille notamment à ce que les institutions cantonales favorisent l'utilisation du bois indigène comme matière première et source d'énergie. Selon son règlement d'application, les projets de construction émanant des pouvoirs publics doivent en principe comporter une variante bois présentée dans le cadre d'une étude de faisabilité comparative. Pourtant, dans les faits, combien d'ouvrages construisons-nous à Genève, en bois ? (Brouhaha. Le président agite la cloche.) Quasiment aucun ! Pourquoi, alors que les bases légales sont claires et incitatives, l'Etat ne construit-il pas davantage de bâtiments en bois ? Telle est la question qui est posée par cette proposition de motion, et il est dès lors nécessaire de demander à l'Etat de nous donner des explications, en l'occurrence de nous rendre un rapport de ce qu'il fait et entend faire pour encourager l'utilisation du bois indigène dans la construction à Genève. Je vous remercie donc d'accepter cette motion et son renvoi au Conseil d'Etat.
M. Jean-Louis Fazio (S). Mesdames et Messieurs les députés, le bois est le fruit de la nature. (Exclamations.) C'est un matériau très performant... (Brouhaha. Le président agite la cloche.) ...remarquablement léger et résistant. La construction a chaque jour davantage recours aux nouveaux produits dérivés du bois. Le bois est une matière première renouvelable, en croissance permanente. Comme l'a dit notre collègue, c'est un avantage écologique indéniable face aux nombreux matériaux issus de matières premières non renouvelables utilisées dans la construction.
En Suisse, la production de bois est le fruit de cent ans de gestion durable de nos forêts. Seul l'accroissement est exploité, le stock de base reste intact. Chaque année, nos forêts croissent de près de 9,6 millions de mètres cubes de bois, dont 4,4 millions seulement sont récoltés, et 2,8 millions servent à la construction. Il pousse donc près de deux fois plus de bois que l'on n'en utilise. Il est nécessaire d'exploiter cet excédent, pour ne pas voir nos forêts vieillir et qu'elles perdent de leur vigueur.
A tous les stades de sa transformation, le bois génère des emplois au niveau local. De plus, les transports de longue distance peuvent être épargnés. (Brouhaha.) Quand le bois ne peut plus servir de matériau de construction, son élimination se fait sans problème. Le bois n'est pas un déchet; il devient une source d'énergie neutre du point du vue du CO2, capable de nous chauffer. Son cycle naturel est alors bouclé.
Du point de vue énergétique, les constructions en bois atteignent des valeurs d'isolation thermique largement supérieures à celles des bâtiments traditionnels. J'aimerais, mes chers collègues, citer deux exemples, proches de nous, de constructions réalisées en bois. La première est à Grenoble; dans l'ancien complexe de l'arsenal de l'armée française, un écoquartier a été réalisé dont les immeubles, classés Minergie, sont entièrement en ossature bois. (Brouhaha. Le président agite la cloche.) Voici l'autre exemple: dans la banlieue de Lyon, un lotissement de villas entièrement en bois a été construit... (Brouhaha.)
Le président. Monsieur le député, veuillez m'excuser. J'aimerais demander aux trois députés qui sont au fond, qui se reconnaissent, de peut-être aller discuter aux Pas-Perdus ou à la buvette. Je vous remercie. Vous pouvez continuer, Monsieur le député.
M. Jean-Louis Fazio. Dans la banlieue de Lyon, un lotissement de villas entièrement en bois a été construit. Ces dernières sont classées «Energie positive», puisque, au lieu de consommer de l'énergie, elles en produisent, pour la grande satisfaction de leurs propriétaires, devenus producteurs et revendeurs d'énergie.
Bref, comme vous pouvez le constater, Mesdames et Messieurs les députés, des progrès fantastiques ont été réalisés dans l'utilisation du bois: c'est le matériau d'un futur raisonnable. Nous soutenons cette motion et vous invitons à faire de même.
Une voix. Bravo ! (Applaudissements.)
M. Serge Dal Busco (PDC). Mesdames et Messieurs, chers collègues, notre collègue Fazio vient d'admirablement faire l'éloge de ce matériau qu'est le bois. Il parle évidemment en connaisseur, donc je ne vais pas répéter ce qu'il a excellemment exposé. Ce qui m'intéresse, en tant que signataire de cette proposition de motion, c'est de savoir pourquoi - alors que notre législation le prévoit, le demande - l'émergence de constructions en bois est limitée. Il y a certes des projets tout à fait remarquables qui voient le jour, dans des constructions de l'Etat mais également des communes, cependant il faut reconnaître que cela reste relativement marginal. C'est donc l'objectif, en tout cas le mien, en signant cette proposition de motion: savoir un peu davantage, dans le fond, pour quelles raisons on en arrive à cette situation.
Je voudrais encore dire que cette tendance, réjouissante, à vouloir utiliser des matériaux de construction de plus en plus compatibles avec l'environnement, et notamment avec la charge en matière de CO2, conduit également les gens ou ceux qui promeuvent l'utilisation d'autres matériaux, en particulier ceux que l'on semble décrier, comme le béton, à faire également preuve d'inventivité en la matière en utilisant - ou en en faisant la promotion de l'utilisation - du béton dit de recyclage, à partir de matériaux de démolition. Je trouve que c'est une manière tout à fait intelligente d'utiliser les matériaux selon leurs caractéristiques propres. On ne peut pas, à tout-va, se servir de bois pour n'importe quel objet. Il y a des objets qui s'y prêtent particulièrement bien, d'autres beaucoup moins et pour lesquels d'autres types de matériaux sont préférables.
Pour en savoir un peu davantage sur ces questions, je vous invite évidemment, au nom du groupe démocrate-chrétien, à voter cette motion.
Mme Jacqueline Roiz (Ve). En effet, le bois est une matière première dont nous ne manquons pas en Suisse. Seulement 50% de la surface forestière produisent 70% du bois utilisé dans notre pays, donc on a encore de la marge.
Je rappelle juste le cycle de fabrication d'une habitation en bois. Cela comprend la structure, la construction de l'ouvrage, son utilisation et sa déconstruction. Toutes ces étapes constituent des effets positifs considérables dans la perspective d'un développement durable.
Du point de vue du climat, on remarque que le bois est un matériau qui permet de capter une énorme quantité de CO2 - on l'a déjà dit - qu'il garde tant qu'il ne se décompose pas. Le bois agit contre les changements climatiques, et l'utiliser à maturité avant qu'il se décompose est un moyen de garder intelligemment ce CO2. D'un point de vue technique, le bois possède aussi une forte masse thermique qui s'oppose aux variations extérieures de températures; à épaisseur égale, il est près de dix fois plus isolant que le béton. (Brouhaha.)
Ce concept est un levier économique important pour la filière du bois, pour la filière du recyclage et pour l'artisanat local, qu'il stimule. Cette matière première est économique tant pour l'acquéreur que pour le locataire d'un bâtiment, puisque son prix est évidemment intéressant et que les économies d'énergie qu'il peut engendrer sont aussi très bonnes s'il est bien utilisé. L'Union suisse des paysans, l'USP, confirme... (Brouhaha.) Je n'arrive pas à parler, Monsieur le président, parce qu'on discute à ma gauche... (Le président agite la cloche.) ...c'est assez difficile. (Commentaires.)
Le président. Poursuivez, Madame la députée.
Mme Jacqueline Roiz. Selon l'Union suisse des paysans, l'utilisation de bois indigène est génératrice d'emplois et de valeur ajoutée en Suisse. Nous devons encourager le plus souvent possible le développement technologique local. De plus, le travail du bois et la construction à base de cette ressource sont capables de développer des métiers accessibles - vous vous souvenez du cycle de la construction - à tous les niveaux de formation et d'apprentissage.
Cependant, il faut rester attentif. Si le bois provient de loin, si par exemple trop d'essence ou d'électricité doivent être utilisées pour le transport du bois, le bilan CO2 n'est évidemment plus respecté. Donc, pour garder un avantage économique, écologique et social, ce bois doit non seulement provenir d'une zone proche, mais aussi être façonné et travaillé localement.
Depuis toujours, les Verts insistent pour préserver les ressources naturelles afin de les transmettre aux générations futures.
Le président. Il vous reste vingt secondes, Madame la députée !
Mme Jacqueline Roiz. J'ai fini ! Nous encourageons donc la production locale, qu'il s'agisse d'agriculture, d'exploitation forestière équilibrée ou de matériaux recyclés, et nous voulons une économie qui soit basée sur ces principes. C'est pour ces raisons que le groupe des Verts, évidemment, vous invite à accepter cette motion. (Applaudissements.)
M. Christo Ivanov (UDC). Encourager l'utilisation du bois indigène dans la construction, voilà en effet une vraie priorité. La production annuelle des forêts en Suisse, qui occupent un tiers de la superficie de notre pays, est d'environ 10 millions de mètres cubes. En 2009, seulement un peu moins de 4,9 millions ont été exploités, dont 2,85 millions destinés à la construction. A l'échelle de la Suisse, il y a donc environ 2 millions de mètres cubes de bois de construction non exploités et non utilisés. Par conséquent, je vous demande d'accepter cette motion, qui est une nécessité pour le développement harmonieux de la nature de notre pays, mais également pour l'emploi et la construction dans notre canton.
M. François Haldemann (R). Mesdames et Messieurs les députés, nous avons parlé de bilan carbone et d'énergie grise. En ce qui me concerne, l'enjeu principal de l'utilisation du bois dans la construction est d'abord et surtout de maintenir, voire de ressusciter une filière de production bois. En réalité, nous n'avons, en Suisse, plus les forces de travail. Elles manquent ! Donc, promouvoir l'utilisation du bois revient aussi à créer des emplois en Suisse. Je pense que, derrière cela, il y a un véritable message pour la création d'emplois dans notre pays. Voilà la raison pour laquelle je vous invite à bien vouloir accepter cette motion.
M. Alain Meylan (L). Je dirai quelques mots sur cette motion, qui doit naturellement être acceptée et renvoyée au Conseil d'Etat, c'est une évidence. C'est une évidence aussi que cette motion, d'une certaine manière, enfonce un peu des portes ouvertes. Voici néanmoins quelques considérations qu'il s'agit d'apporter ici.
J'ai bien entendu notre collègue Fazio parler du bois, il est très bien placé - et nettement mieux que moi - pour en parler. J'ai un peu regretté qu'il ne donne que des exemples étrangers. Il aurait pu citer la halle 7 de Palexpo, qui est quelque chose d'extraordinaire en termes de technologie et d'utilisation du bois, un symbole pour Genève et pour la Suisse; je ne l'ai pas entendu, et je regrette. Il aurait pu aussi évoquer certaines surélévations. Mais naturellement, parler de surélévations, pour le parti socialiste, peut paraître un peu délicat. Pourtant, la surélévation des immeubles à Genève, par l'utilisation du bois indigène, est primordiale. Pourquoi ? Simplement parce que le bois est un matériau léger et durable, qui permet justement ce genre de surélévations, de manière efficace, efficiente, lesquelles utilisent justement ce matériau que l'on estime et que l'on aimerait bien promouvoir ici par cette motion. Je n'ai malheureusement pas entendu le parti socialiste évoquer cela - et pour cause, puisqu'on parle de surélévation d'immeubles et de création de logements. Donc, de ce côté-là, je pense qu'il y a effectivement des choses à dire.
Le bois, au niveau suisse, doit être utilisé aussi de façon à connaître notre bois; on ne peut pas l'utiliser, non plus, à toutes les fins. On a fait de gros progrès technologiques, notamment dans le développement du lamellé-collé, quant à l'utilisation de ce bois, de façon à faire des réalisations qui soient technologiquement à la pointe. Je citerai quand même un exemple. Permettez-moi de le faire, puisque c'est un exemple assez extraordinaire et qui est notamment dû à nos anciens collègues Thomas Büchi et Hervé Dessimoz. Il s'agit de la création du Refuge du Goûter, le nouveau refuge du Mont-Blanc, une technologie suisse avec utilisation de ce matériau, qui est extraordinaire. On doit donc privilégier cela.
On souffre malgré tout - il faut le dire - au niveau suisse, de la compétitivité internationale. On a des forêts que l'on connaît. On connaît notre territoire, qui est, dans l'utilisation de la forêt, aussi difficile à gérer...
Le président. Il vous reste vingt secondes, Monsieur le député.
M. Alain Meylan. ...difficile à utiliser. Je crois qu'il faut aussi voir cela. J'aimerais encore dire qu'il y a également des organisations extraordinaires en Suisse, comme Lignum. L'Etat fait partie de Lignum, association qui promeut le bois, de sa production jusqu'à son utilisation, en passant par toutes les phases.
Le président. Il vous faut conclure, Monsieur le député !
M. Alain Meylan. Et l'Etat, notamment par les services de Mme Künzler, y participe activement et de façon efficace ! Donc, au nom du groupe PLR, je vous invite à accepter cette motion et à la renvoyer au Conseil d'Etat, de façon à faire encore plus pour le bois, ce matériau magnifique et durable.
Des voix. Bravo !
Mme Michèle Künzler, conseillère d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, c'est bien volontiers que le Conseil d'Etat accepte de recevoir cette motion et d'y répondre, non seulement sur le papier mais aussi concrètement pour toute la filière bois. Effectivement, le bois et la forêt à Genève connaissent depuis cinquante ans une mutation très importante pour reproduire des futaies, c'est-à-dire des forêts avec des troncs beaucoup plus importants, pour produire enfin du bois d'oeuvre; en effet, pendant des centaines d'années, on a cultivé en taillis pour faire du bois de feu. La forêt genevoise est en pleine mutation. Ce sont des choses qui prennent plusieurs générations, puisqu'on est sur des programmes qui durent une centaine d'années pour rétablir toute une forêt et créer une futaie. Voilà le début de l'histoire du bois.
Ensuite, il faut évidemment avoir des équipements. En Suisse, les scieries sont malheureusement en voie de diminution assez drastique, mais il y a encore des endroits - en Suisse - où l'on peut produire. Cependant, il faut aussi voir cela de manière régionale. Nous avons des contacts avec la France voisine, qui a un grand patrimoine forestier; c'est là qu'il faut également rechercher pour rester dans cette région, puisqu'on doit limiter les transports.
Enfin, on peut effectivement utiliser le bois de manière extrêmement moderne. Il y a eu dernièrement, produit à la fois par Lignum, l'EPFL et le département... (Brouhaha. Le président agite la cloche.) ...une exposition montrant les possibilités d'utilisation du bois, qui défient l'imagination. Je crois qu'il s'agit là d'un matériau extrêmement contemporain, dont on pourra faire des productions comme la surélévation ou la chapelle qui a été édifiée dans le canton de Vaud, avec un matériau extrêmement léger, absolument extraordinaire du point de vue de la construction et de la conception. On a toute une palette d'utilisations, et je pense que Genève pourrait aller de l'avant.
C'est vrai que nous avons plutôt du bois de chêne. Dans les siècles passés, on a énormément utilisé du chêne dans la construction. On l'a un peu oublié, parce que la facilité est d'utiliser les épicéas, mais on peut maintenant refaire du bois d'oeuvre avec du chêne. Il y a notamment un projet assez intéressant à Satigny, un projet de tour... (Brouhaha. Le président agite la cloche.) ...qui sera, après la tour Eiffel, la petite tour de Satigny ! On se réjouit de voir cette oeuvre en bois de notre région. Cela donnera peut-être un exemple de production et de construction, intéressante et moderne, que l'on peut réaliser à Genève avec le bois de notre région. Et c'est bien volontiers que nous acceptons cette proposition de motion.
Le président. Merci, Madame la conseillère d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, nous nous prononçons sur cette proposition de motion 2023.
Mise aux voix, la motion 2023 est adoptée et renvoyée au Conseil d'Etat par 74 oui (unanimité des votants).
Débat
Le président. Nous passons maintenant à une autre proposition de motion très intéressante, point 38 de notre ordre du jour. La parole est à M. François Lefort.
M. François Lefort (Ve). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, l'engazonnement des voies de tram se développe partout en Europe, en Suisse aussi, mais pas encore à Genève, malgré les timides essais du Bachet-de-Pesay des années quatre-vingts, que vous pouvez encore admirer !
Pourtant, l'engazonnement... (Brouhaha. Le président agite la cloche.) ...outre son aspect esthétique, à de nombreux avantages, que voici. Amélioration de la perméabilité des sols, c'est-à-dire suppression du ruissellement sur des surfaces imperméables. Fixation des poussières urbaines. Filtration et dégradation des polluants urbains émis par la circulation automobile. Rafraîchissement de l'air et stabilisation de la température ambiante: ce n'est pas anecdotique, puisque 100 mètres carrés de gazon produisent autant qu'une machine à air conditionné, soit l'équivalent de 70 tonnes d'air conditionné. Amortissement du bruit: avantage non négligeable en milieu urbain, où le bruit est la première des nuisances ressenties par la population. Enfin, l'engazonnement contribue à la fixation de carbone; cette contribution n'est pas anecdotique, puisque cela peut aller jusqu'à 10 000 kilogrammes de CO2 fixés par hectare de gazon. Pour le reste, il faut que la priorité soit donnée aux matériaux recyclés, pour les ballasts et les revêtements perméables. La priorité à l'engazonnement aura aussi des conséquences sur la création d'emplois locaux et durables.
Ces avantages sont certainement supérieurs aux inconvénients, que l'on ne manquera pas d'invoquer - je m'y attends - au nom de la force de l'habitude, pour ne pas dire de la paresse.
Alors, que demande cette humble proposition de motion, Monsieur le président ? Elle demande que priorité soit donnée à l'engazonnement des sites propres des futures lignes de tramway. Dans la situation où cela n'est pas possible, la priorité doit être donnée... (Brouhaha. Le président agite la cloche.) ...aux revêtements perméables. L'engazonnement ou les revêtements perméables, lorsque l'engazonnement n'est pas possible, doivent être également privilégiés lors des projets de rénovation de voies de tram en sites propres qui existent déjà.
Cette proposition de motion demande enfin que, dans tous les cas de création de nouvelles voies ou de rénovation de voies de tram, les matériaux recyclés locaux soient absolument privilégiés pour les ballasts et pour les revêtements perméables.
Voilà ce que demande cette petite motion, que nous vous remercions de renvoyer directement au Conseil d'Etat - comme vous venez de le faire pour le bois indigène - sinon à la commission de l'environnement et de l'agriculture.
M. René Desbaillets (L). Chers collègues, «Pour des voies de tramway perméables, engazonnées et fixatrices de carbone»... Avec mes collègues, notamment signataires de cette proposition de motion, membres estimés de la commission de l'environnement et de l'agriculture, nous faisons des travaux constructifs et en intelligence. Là, pourtant, je me demande si cette proposition de motion est vraiment sincère ou s'il s'agit simplement d'une proposition de motion tactique.
Alors, avant de parler de la tactique, je vais parler du sincère, pour vous signaler que - contrairement à ce que nous a dit M. Lefort - au niveau environnement, le gazon, il faut l'arroser, le tondre et y mettre de l'engrais. Il n'y a quasiment rien, dans la nature, de plus polluant que du gazon. D'ailleurs, lors de l'ancienne législature, les Verts nous avaient proposé une motion pour supprimer les gazons dans certains parcs genevois, parce que cela coûtait trop cher en arrosage, en engrais et en tonte; il fallait mettre des jachères florales dans nos parcs, au parc des Eaux-Vives, au Jardin anglais. Un essai a été effectué par les SIG, à Vernier, que l'on a visités. Je n'y suis pas retourné pour voir ce que c'était; à l'heure actuelle, cela doit certainement être de l'herbe toute sèche et toute brune. Donc, cette excuse de carbone et de perméabilité... De toute façon, sous les voies, il faudra mettre du ballast en béton, etc. Ainsi, 20 cm seront perméables, mais, au-dessous, ce sera du béton. Je pense que, là, c'est un peu nous forcer la main.
La vérité de cette proposition de motion est que c'est simplement une tactique - du reste, c'est indiqué dans les considérants. C'est une tactique pour empêcher les scooters, les vélos et les taxis d'utiliser les voies de bus et les lignes pour les trams. C'est là un moyen, malin, de contrer la proposition qui est faite, notamment par notre conseiller national Luc Barthassat, d'autoriser les scooters et motos à utiliser les voies de bus - en effet, si elles sont en herbe, on n'ira évidemment pas dessus avec les scooters ! C'est une petite tactique, que je qualifierai de pernicieuse, pour, encore une fois, empêcher la circulation, pour bloquer la circulation à Genève, pour nous empêcher de circuler et empêcher les taxis, notamment, d'utiliser ces voies rapides, bien évidemment en laissant de la place devant les feux.
Donc, nous, groupe PLR, avons décidé de renvoyer cette proposition de motion - gentiment, pour ne pas faire trop d'histoires - à la commission des travaux. Pour ma part, je ne voterai pas comme mon groupe: je la renvoie, tout court ! Parce que cette proposition de motion n'est pas honnête, c'est nous faire prendre des vessies pour des lanternes.
M. Serge Dal Busco (PDC). Mesdames et Messieurs, chers collègues, pour notre part, nous ne voyons pas, en tout cas pas à la première lecture de ce texte, de malice, comme notre collègue Desbaillets. Il y a des avantages à la végétalisation. C'est un terme que je préfère à «engazonnement» et je m'étonne d'ailleurs que M. Lefort ait persisté à l'utiliser. Effectivement, le terme d'engazonnement n'évoque pas tellement l'écologie. Il s'agit plutôt de végétalisation ou de verdissement. Il y a des techniques, aujourd'hui, qui permettent de végétaliser des surfaces, des grandes surfaces, sans avoir à y mettre des quantités astronomiques d'eau ou d'engrais. Il y donc des avantages, assurément.
Hier, nous avons presque eu l'occasion d'avoir un débat intéressant sur l'espace public ou les espaces publics. Ce sera pour une autre fois, puisque ce texte, le projet de loi 10499, a été renvoyé en commission. Mais je vois assurément un intérêt tout à fait marqué à ce verdissement, à cette végétalisation, en termes de qualité de l'espace public, lorsque l'on crée des sites propres pour le tram. Je pense tout particulièrement à un site que je connais bien mais qu'on n'a pas encore vu, si ce n'est dans des modélisations et des films en 3D: c'est le prolongement du TCOB du côté de Bernex, dont la demande d'autorisation de construire est en cours actuellement et qui prévoit précisément un verdissement du site central du tram. Je peux vous garantir que, en termes de qualité de l'espace public, c'est vraiment un plus tout à fait remarquable. Ne serait-ce que pour cette raison, pour la qualité des espaces que cela apporte, c'est quelque chose qui mérite vraiment d'être poursuivi.
Maintenant, il est vrai que cela présente un certain nombre de problèmes, et cela peut en poser aussi en matière de dessertes de transports publics. On aura peut-être une difficulté de ce type sur le prolongement de Bernex, dont le verdissement - ou la végétalisation - condamne non seulement le site pour l'utilisation par des cyclistes - mais là, il n'y a pas de problème, il y a des pistes cyclables - par des scooters ou des taxis, mais également par des transports publics sur pneus, pour lesquels cela peut poser un problème. Cela nécessite, lorsque l'on crée un site vert, un site propre, de bien étudier notamment le parcours des autobus, afin de ne pas se retrouver dans une impasse - en quelque sorte - de ce point de vue là.
Voilà, Mesdames et Messieurs les députés, nous ne sommes pas opposés au renvoi de cette motion au Conseil d'Etat, mais, s'il s'avère judicieux de la renvoyer en commission, pour étude, nous ne nous y opposerons pas non plus.
Le président. Merci, Monsieur le député, mais vous n'avez pas précisé la commission qui vous intéresserait.
M. Serge Dal Busco. La commission de l'environnement et de l'agriculture.
Le président. C'est noté. La parole est maintenant à M. Florian Gander.
M. Florian Gander (MCG). Je vous remercie, Monsieur le président. Je vais être assez bref. Concernant l'engazonnement ou la végétalisation des voies de tramway, effectivement, l'idée pourrait paraître bonne, même si je suis, comme certains collègues PLR, un peu dubitatif sur les vraies raisons de cette demande. Voici ce qui me pose un sérieux problème: les voies de tramway sont actuellement utilisées par les véhicules des transports publics, mais peuvent - et elles le sont certainement souvent - être utilisées par les véhicules de secours et d'urgence. Le problème est que, si l'on décide de mettre du gazon sur des voies de tramway, les véhicules d'urgence ne pourront plus les emprunter ! Alors, pour quelques kilomètres de gazon, est-on prêt à mettre des vies en danger ? (Exclamations.) Au MCG, on dira non.
Cette proposition de motion est intéressante, mais elle n'est pas très utile, actuellement. Je pense que ces voies peuvent servir aussi - on me l'a confirmé - pour la déviation, en cas de problèmes de circulation pour les TPG, donc les véhicules à pneus doivent pouvoir les emprunter. Or, tant qu'il y aura du gazon dessus, cela ne sera pas possible. Pour toutes ces raisons, le MCG refusera d'entrer en matière sur cette proposition de motion.
M. Michel Ducret (R). Tout simplement, déjà pour répondre à la dernière intervention qui vient d'être faite, je dirai ceci. Rien n'empêche une ambulance ou un véhicule de pompier, un véhicule d'urgence, de passer sur un site engazonné; il n'y a aucune impossibilité. Ce n'est vraiment pas un bon prétexte pour refuser une telle proposition. Il est vrai, par contre, que, pour un usage ordinaire, la dynamique d'un véhicule monté sur pneus, que ce soit un autobus ou une voiture, n'est pas la même que celle d'un véhicule ferroviaire. Dès lors, il est peu souhaitable, dans la mesure du possible, et surtout en dehors du centre-ville, que les transports publics sur rail partagent des sites avec des transports, publics ou non, sur pneus. En ce sens, la proposition qui est faite là est parfaite, parce qu'elle décourage effectivement les intrusions des véhicules qui n'ont rien à faire sur les voies réservées. Donc, elle garantit le respect de ces voies réservées et permet aux transports publics d'atteindre les vitesses commerciales qui leur sont prescrites par la loi - et qu'ils n'arrivent pas à tenir, parce que les sites qu'on leur réserve ne sont pas suffisamment protégés ! En ce sens, c'est clairement une avancée. Par ailleurs, il est vrai qu'il faut éviter, dans la mesure du possible, de faire partager aux autobus les sites que l'on offre au tramway, si l'on veut vraiment que le tramway soit l'ossature du transport public urbain et suburbain de notre cité.
Je remarquerai simplement une chose. Il ne faut pas s'illusionner, Mesdames et Messieurs, ces sites engazonnés ne sont pas si perméables que cela. Par contre, ils contribuent à la baisse de la température générale, parce qu'ils ne renvoient pas, comme des sols en dur, la chaleur dans l'atmosphère, et ils absorbent beaucoup plus de chaleur. En ce sens-là, ils sont intéressants. Ils sont aussi agréables pour les voisins, pour leurs yeux, et surtout pour un élément que l'on oublie parfois: l'absorption des bruits émis, y compris par les transports publics, car il n'y a pas que les voitures qui font du bruit.
Croyez-moi, en ce sens-là, c'est un progrès. Il est dommage que, jusqu'à présent, à Genève, on n'ait pas réussi à faire plus souvent des sites de ce type. Parce qu'on voulait absolument pouvoir remplacer un tram en panne par des autobus ! Ce qui est une ânerie. Dans toutes les autres villes de Suisse, on a su faire des sites engazonnés qui sont excellents, notamment à Bâle. Je vous invite à aller voir. Je pense que c'est une excellente solution que l'on doit encourager. En ce sens, nous vous invitons à renvoyer cette proposition, non pas à la commission de l'environnement, mais tout bêtement aux travaux, pour examen, approbation définitive et renvoi au Conseil d'Etat, afin qu'il passe aux actes et à la réalisation de sites réservés pour des tramways efficaces. (Applaudissements.)
Le président. Merci, Monsieur le député. Vous avez terminé à la seconde près ! La parole est maintenant à Mme Christina Meissner.
Mme Christina Meissner (UDC). Merci, Monsieur le président. Avec l'engazonnement des rails de tram, on est passé des vastes forêts au ras des pâquerettes. En l'occurrence, c'est une fausse bonne idée. On est là, vraiment, au ras des pâquerettes. Engazonner pour capter le carbone, pour améliorer le microclimat, pour la microfaune... Non. Il me semble qu'il s'agit là plus de cosmétique, d'esthétique, que de véritable contribution en matière de rétention d'eau. En effet, si on veut les garder verts, ces pâturages de milieu de route, il faudra les arroser, ce qui n'est peut-être pas exactement le but recherché ! En ce qui concerne la rétention d'eau, je rappelle que, sous le gazon, entre les lignes de tram, aujourd'hui il y a du béton, du ballast et du solide, donc on est loin des sols perméables.
Aussi ai-je de la peine à comprendre l'ordre des priorités qui sont demandées dans cette proposition. En effet, au lieu de dire que c'est lorsque ce n'est pas possible de faire des revêtements perméables qu'il faut de l'engazonnement, ce qui aurait été logique, vous avez fait l'inverse ! A l'évidence, vous préférez les surfaces imperméables, mais jolies à l'oeil. Donc, je ne comprends pas.
Par ailleurs, en matière d'espace public, il me semble que, vraiment, là où l'on a besoin d'un espace public, ce n'est pas au milieu de la voie. Mais c'est là où les gens peuvent circuler et en profiter véritablement, ainsi que la microfaune, parce qu'il ne faudrait quand même pas que des hérissons s'installent en plein milieu des rails de tram. Ce serait vraiment dommage.
Cette «micromotion», «capillotractée», se base sur l'émotion et ne mérite peut-être, à la rigueur, qu'un renvoi en commission, pour que l'on explique aux commissaires la vraie nature de ces engazonnements et leur vraie contribution au climat et à l'écologie.
Mme Lydia Schneider Hausser (S). Peut-être est-ce une micromotion; il est vrai que cela en a tout l'air, au premier abord. Pourtant, quand vous allez dans des villes suisses alémaniques ou européennes, comme Varsovie, Berlin ou d'autres, vous observez que l'espace urbain, là où circulent les trams, est nettement différent en termes de qualité visuelle, de rues et de transports.
L'avantage de cet engazonnement des surfaces internes entre les rails de tram est que les trams deviennent ou peuvent être plus performants, parce qu'ils sont en site propre - malheureusement, à Genève, on a certes un problème, les rues sont trop étroites - et, pour y parvenir, ce sera difficile au centre-ville. Par contre, avec les nouvelles lignes de tram - on parlait de Bernex, on peut mentionner Meyrin - entre le centre-ville et Meyrin, où il y a des rails de tram en dur, là auraient cependant pu se poser quelques engazonnements qui n'auraient pas été mal accueillis par qui que ce soit.
Egoïstement, on pourrait dire que refuser est une genevoiserie. En effet, il y a des scooters, et, moi-même...(Brouhaha. Le président agite la cloche.) ...en tant que cycliste, de temps en temps, j'aime bien pouvoir circuler entre les rails du tram, c'est pratique. Mais il faut penser à longue échéance, en termes d'urbanisation. Je pense que cette micromotion a son importance, à plusieurs points de vue, hydraulique, etc., on nous l'a déjà dit.
Les socialistes soutiendront donc cette proposition de motion et, par là, soutiendront aussi le principe de voies de tram en site propre et végétalisé, lequel devrait devenir un but à Genève dès que cela sera possible, que ce soit sur de petits ou de grands tronçons. C'est ainsi que les gens qui utilisent le tram se déplaceront plus vite qu'avec tout autre moyen de transport.
Le président. Merci, Madame la députée. Monsieur Pierre Weiss, votre groupe a épuisé son temps de parole, je regrette. (Commentaires. Le président agite la cloche.) La parole est à M. François Lefort.
M. François Lefort (Ve). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, que dire ? Monsieur le président, vous transmettrez déjà à M. le vigneron de Satigny que, heureusement, cette noble assemblée n'a pas consommé suffisamment...
Le président. Vous vous adressez au président, Monsieur le député !
M. François Lefort. J'ai dit: vous transmettrez, Monsieur le président, à M. le vigneron de Satigny que, heureusement, cette noble assemblée n'a pas consommé suffisamment de son divin nectar - qu'il ne produit, comme le gazon, d'ailleurs pas sans produits chimiques - pour prendre des vessies pour des lanternes ! (Commentaires.) Vous préciserez à M. le vigneron de Satigny que les espèces végétales dont on parle, que j'ai appelées communément «gazon», sont des espèces sélectionnées pour leur rusticité et leur tolérance à la sécheresse, et que, évidemment, elles ne s'apparentent pas au gazon de son jardin, dont il prend soin chaque dimanche ! Et qui est évidemment beaucoup plus fragile !
Quant aux inquiétudes du MCG concernant les véhicules de secours, M. Ducret a déjà répondu: il serait étonnant que ces véhicules ne puissent pas rouler sur du gazon. Revenez à la raison ! Je remercie enfin M. Ducret des précisions qu'il a bien voulu apporter sur l'augmentation de la vitesse commerciale des tramways que pourrait permettre, justement, l'empêchement de l'occupation de ces voies par d'autres véhicules !
Enfin, cela a été mentionné par plusieurs intervenants, ces voies engazonnées ont une valeur esthétique, un avantage esthétique, un esthétisme qui manque en particulier à de nombreux quartiers traversés par les tramways. Aussi, je vous remercie, encore une fois, de renvoyer directement cette motion au Conseil d'Etat, sinon à la commission de l'environnement et de l'agriculture.
M. Mauro Poggia (MCG). Chers collègues, nous avons entendu beaucoup de choses; toutes sont justes. Je pense que nous avons tous à coeur d'avoir une ville verte et agréable, avec le souci de centrer une priorité pour les lieux où l'on déambule, à pied évidemment. Lorsque l'on voit la rue du Marché et la place de Bel-Air, on ne peut qu'avoir des regrets que l'on n'ait pas pensé, dans les générations antérieures, à nous laisser un peu de verdure.
Cela étant, vous avez raison: il faut aussi penser à l'avenir. Si l'on peut ajouter un peu de verdure, il faut le faire. Il ne faut pas le faire n'importe comment non plus; il y a des questions d'entretien, il y a des questions de «carrossabilité» - si vous me passez le terme - de ces voies. Donc, en site propre, cela ne pose pas de problème. Mais évidemment, lorsque les voies doivent pouvoir être empruntées par des véhicules à roues, notamment des véhicules d'urgence, cela peut en poser.
J'atténuerai un peu les propos de mon collègue, M. Gander, qui a mis en avant les risques d'entrer en matière sans autre forme de procédure sur cette motion, en disant: «Allons plus loin dans la réflexion.» Je pense qu'il serait regrettable de passer à côté d'une solution qui soit plus agréable pour les yeux et pour nos poumons.
Renvoyons cette proposition de motion devant la commission des transports, puisqu'il nous semble que c'est plutôt une question de savoir si ces voies pourront être utilisées par d'autres véhicules...
Le président. Il vous faut conclure, Monsieur le député.
M. Mauro Poggia. ...notamment par des véhicules prioritaires.
M. Charles Selleger (R). J'aimerais mettre une toute petite note poétique dans nos débats de ce soir et rappeler un poète qui a écrit - cela nous mettra en garde contre l'engazonnement - ceci:
«[...] Et toutes les fleurs de toute la terre
Soudain se sont mises à pousser
Pousser à tort et à travers
Sur la voie du chemin de fer
Qui ne voulait plus avancer
De peur de les abîmer [...].»
J'espère que l'on n'en arrivera pas là avec la proposition de motion qui nous est présentée ce soir. (Applaudissements.)
Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est maintenant à Mme Michèle Künzler, conseillère d'Etat. (Remarque. Exclamations. Commentaires.) Dix secondes, Monsieur Desbaillets !
M. René Desbaillets (L). Juste en dix secondes, Monsieur le président ! Vous transmettrez à mon collègue Lefort que le Domaine des Abeilles d'Or n'a pas vu la couleur d'un insecticide, d'un acaricide ni d'un gramme d'engrais depuis 1993 !
Des voix. Bravo ! (Applaudissements. Le président agite la cloche.)
Le président. Merci, Monsieur le député, de ces précisions. La parole est à Mme la conseillère d'Etat. (Brouhaha. Le président agite la cloche.) S'il vous plaît !
Mme Michèle Künzler, conseillère d'Etat. Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs, après ce concours pour savoir qui sera le plus Vert, le plus écologiste, je pense que cette proposition de motion mérite peut-être un petit tour en commission, non pas que j'y sois opposée, ou que le Conseil d'Etat y soit opposé, mais il faut informer pour montrer l'utilité de ces voies qui seraient végétalisées. Effectivement, elles sont un apport très important. Toutes les villes d'Europe ont des voies engazonnées. On a cité Bâle, mais cela peut aussi être Milan. (Brouhaha. Le président agite la cloche.) On peut en voir un peu partout...
Des voix. Nice !
Mme Michèle Künzler. Nice ! Je crois que chacun d'entre vous s'est rendu dans une ville d'Europe. (Brouhaha. Le président agite la cloche.) Une fois de plus, à Genève, nous sommes là à nous poser des questions que les autres ont résolues depuis cinquante ans ! Maintenant, il faut vraiment aller de l'avant ! A Bernex, on l'a mentionné, il y aura déjà un kilomètre qui sera engazonné dans le nouveau projet. Le tram de Saint-Julien sera en site propre et engazonné sur la plupart du trajet.
Pour le reste, je vous invite aussi à voir les avantages - on l'a dit - la diminution du bruit, la qualité de l'air et l'espace public. Nous avons de magnifiques projets; il y a notamment ce que l'on pourrait réaliser vers Lancy, pour être en continuité du parc - comme on le fait à Bâle - afin de prolonger l'espace public. On ne peut pas forcément y marcher, mais, visuellement, on a un espace de parc beaucoup plus grand. C'est vraiment une bonne mesure qui est éprouvée dans la plupart des villes d'Europe. C'est le moment que l'on s'y mette et que l'on arrête de toujours chercher trente six mille excuses pour ne pas entreprendre ce que les autres font depuis cinquante ans. Je vous invite à renvoyer cet objet en commission, et l'on vous montrera tous les projets qui existent ailleurs et surtout ceux que l'on veut faire à Genève.
Une voix. Bravo ! (Applaudissements.)
Le président. Merci, Madame la conseillère d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, je vais vous faire voter sur le renvoi à diverses commissions. Dans l'ordre: à l'environnement; ensuite, le cas échéant, aux travaux; et, si j'ai bien compris, aux transports. (Commentaires.) Tout d'abord, je vous soumets le renvoi à la commission de l'environnement. (Brouhaha pendant la procédure de vote. Le président agite la cloche.)
Mis aux voix, le renvoi de la proposition de motion 2026 à la commission de l'environnement et de l'agriculture est rejeté par 49 non contre 36 oui et 1 abstention.
Mis aux voix, le renvoi de la proposition de motion 2026 à la commission des travaux est adopté par 65 oui contre 12 non et 4 abstentions.
Débat
Le président. Nous sommes maintenant... (Brouhaha.) Mesdames et Messieurs les députés, je vous demande encore un effort ! Il y a le coin PLR qui fait pas mal de bruit... Je suis désolé de vous le dire ! (Brouhaha.) Alors, je vous remercie de votre assiduité... (Brouhaha. Le président agite la cloche.) Nous sommes maintenant au point 39 de l'ordre du jour. La parole est à Mme la députée Emilie Flamand, première signataire.
Mme Emilie Flamand (Ve). Merci, Monsieur le président. (Brouhaha. Le président agite la cloche.) Mesdames et Messieurs les députés, le 15 mai 2011, la population genevoise a accepté le déclassement du périmètre des Cherpines-Charrotons, avec toutefois une opposition assez forte dans toutes les communes voisines à ce projet, dont on peut imaginer qu'elles craignent les nuisances pouvant apparaître avec la construction d'un grand quartier. Pendant la campagne, notamment pour calmer ces craintes, les partisans ont promis un écoquartier. On se souvient d'une campagne très positive, avec des trams qui roulaient et une petite fille qui promettait des transports publics et des espaces verts: aujourd'hui, il s'agit de tenir ces promesses.
La volonté de construire un écoquartier est à prendre en compte le plus en amont possible. Au niveau de la mobilité, le quartier des Cherpines-Charrotons sera très bien desservi... (Brouhaha. Le président agite la cloche.) ...puisque le nouveau tram de Saint-Julien passera à proximité et que, grâce à l'acceptation, le même 15 mai 2011, de l'initiative 144, des accès de mobilité douce seront garantis pour ce quartier.
Cela dit, pour correspondre à un véritable écoquartier, selon les définitions européennes, il s'agit également de limiter le trafic individuel motorisé dans ce périmètre. Pour cela, le levier principal, c'est le stationnement. Nous avons un règlement relatif aux places de stationnement sur fonds privé, qui comporte une carte. Cette carte définit des ratios de stationnement par secteurs, en fonction notamment de l'accessibilité en transports publics. Or le périmètre des Cherpines ne figure pas sur cette carte - qui, entre parenthèses, devrait être revue pour inclure d'autres grands projets d'aménagement, notamment le PAV, mais aussi la Chapelle-Les Sciers, les Communaux d'Ambilly, les Vergers, etc. L'article 8 du même règlement prévoit une dérogation au ratio minimal de places pour le cas d'un écoquartier, justement. D'ailleurs, cela ferait baisser le prix des logements, puisque, on le sait, la construction de parkings en souterrain est extrêmement coûteuse et fait augmenter fortement le prix des appartements qui sont construits au-dessus.
Dans cette proposition de motion, nous demandons donc ceci: premièrement, que le périmètre des Cherpines-Charrotons soit ajouté à la carte qui est annexée au règlement; deuxièmement, que le ratio attribué à ce périmètre soit adapté à un écoquartier, qui plus est bien desservi par les transports publics; troisièmement, nous demandons plus généralement que le Conseil d'Etat prenne toutes les mesures, y compris dans l'esprit d'un processus participatif, pour que les Cherpines-Charrotons soient un véritable écoquartier, conformément à ce que tout le monde demandait lors de la campagne de mai 2011. (Applaudissements.)
M. Roger Golay (MCG). Mesdames et Messieurs les députés, la proposition de motion des Verts arrive un peu comme la grêle après les vendanges. Il faut vous rappeler que les Verts avaient proposé tout et rien à cet endroit, mais plutôt rien, puisqu'ils avaient lancé le référendum contre les constructions de logements aux Cherpines-Charrotons. Aujourd'hui, ils nous proposent une motion pour un écoquartier. Ce mot est clairement devenu à la mode; bien ! Mais il faut quand même considérer que nous, Grand Conseil, avons procédé au déclassement. C'était le rôle du Grand Conseil. Pour le reste, le plan directeur de quartier, c'est de la compétence des communes.
Du reste, je tiens à signaler que, quand je dis que les Verts interviennent comme la grêle après les vendanges, ce n'est pas pour rien. En effet, le DCTI organise des tables rondes, et l'une se tiendra demain à Confignon, où tous les élus des communes concernées auront rendez-vous pour décider de ce qu'ils veulent dans leur quartier. Est-ce à nous, aujourd'hui, d'intervenir ? Surtout vous, qui n'avez absolument rien voulu à cet endroit ? Vous aviez même refusé, par votre référendum, l'école de culture générale ! Donc, à un moment donné, il faut savoir ce que l'on veut. Vous aviez en tout cas pris une décision. Aujourd'hui, vous semblez poursuivre votre politique contre le logement, puisque vous refusez des déclassements au motif que ce sont des zones agricoles, etc. (Remarque.) Oui, c'est le cas ! Souvent, vous refusez, parce que cela touche une zone agricole... Vous êtes contre le logement, on le sait bien, vous l'avez déjà démontré à plusieurs reprises.
Laissons faire, en tout cas aujourd'hui, les élus communaux pour la gestion de leur sol, de leur territoire, et l'aménagement de celui-ci. Et à nous, maintenant, de leur faire confiance et de refuser - je vous y invite - cette proposition de motion, puisque les choses avancent au niveau des communes. Donc, laissons faire ces communes ! Quant à nous, refusons cette proposition de motion.
M. Bertrand Buchs (PDC). Je vais être très biblique... (Exclamations.) ...c'est le rôle du PDC ! C'est vraiment la révélation sur le chemin de Damas, pour le parti Vert ! Il n'a rien voulu, et brusquement il se rend compte que les Cherpines existent et que l'on peut y faire quelque chose. Alors, nous les remercions, nous sommes contents qu'ils reviennent sur le droit chemin - engazonné - et que l'on puisse discuter de ce projet. Ce que dit M. Golay est très juste: maintenant, il faut discuter dans les communes, pour savoir ce qu'elles veulent.
Mais le PDC ne rejettera pas cette proposition de motion et demandera son renvoi à la commission d'aménagement du canton. Pourquoi ? Parce qu'il y a la notion d'écoquartier. On apprend qu'il y a de vrais écoquartiers, de faux écoquartiers, des simili-écoquartiers... Nous aimerions savoir quelle est la doctrine du vrai écoquartier. On aimerait bien discuter de cela en commission d'aménagement, parce que, sur ce sujet - l'écoquartier - tout le monde est d'accord. Et nous ne voulons absolument pas que l'on tombe dans l'idéologie de l'écoquartier, mais que l'on obtienne un consensus sur ce que l'on veut prochainement, à Genève, dans le cas des écoquartiers. Sinon, ce sera de nouveau une guerre, laquelle va ressembler à la guerre des transports.
Mme Christina Meissner (UDC). A titre personnel - mais je pense que tout mon groupe me rejoindra pour le dire - je trouve que les quartiers se construisent ensemble, en concertation. Si l'on veut construire à Genève, il faut le faire avec, et non pas contre, les habitants. On vote ici, au Grand Conseil, des déclassements; mais on ne sait pas ce qui va se passer sur les parcelles. C'est extrêmement frustrant ! J'avoue en avoir assez de ne pas voir les projets et de devoir voter les yeux fermés et la tête dans le sac.
En l'occurrence, ce que demandent les Verts, en troisième invite, c'est de prendre toutes les mesures nécessaires lors de l'élaboration d'un plan directeur de quartier pour construire un écoquartier. Oui, un plan directeur permet de voir ce qu'on va construire, il faut le mener de manière participative - c'est nécessaire, si l'on veut un jour construire - et en faire un écoquartier; c'est une évidence aujourd'hui, on ne peut qu'adhérer à cela. Je peux vous garantir que les propriétaires de ces parcelles se posent autant de questions que vous, les Verts, et que nous, l'UDC. C'est certain, donnons-nous les moyens de les écouter; c'est un devoir des représentants des citoyens.
En l'occurrence, vous avez aussi demandé d'attribuer à ce périmètre un ratio de stationnement adapté à un écoquartier. Cela risque d'être la deuxième invite qui fâche ! Et pas seulement l'UDC. C'est la raison pour laquelle je vous propose un amendement. En effet, si l'on amende cette motion, nous serons d'accord de la renvoyer, même au Conseil d'Etat, le plus rapidement possible, pour que le processus s'enclenche. Aujourd'hui, on est en train de travailler - d'ailleurs, c'est demain matin - sur un PSD dans le périmètre des Cherpines, et on demandera aux gens leur avis. Je ne sais pas exactement ce qui va se passer dans le cadre de ces tables rondes, mais une chose est certaine: on a déjà fait des concours d'architectes sans consulter véritablement les propriétaires et la population. Alors, il est aujourd'hui plus que temps de se rendre compte que, si l'on veut construire à Genève, ce sera avec la population ! Sinon, on n'y arrivera pas. Nous accepterons, amendée, cette motion.
M. François Haldemann (R). Mesdames et Messieurs les députés, je ne vous les apprendrai pas, je vais vous redonner certains résultats des votations concernant ce périmètre. Celles qui ont refusé sont Plan-les-Ouates, Confignon, Perly, Soral, Onex, Bernex et Laconnex, toutes les communes en périphérie. Donc, le projet est objectivement mal parti: on ne veut pas de logements proches de chez soi. C'est le triste constat de la situation actuelle dans notre canton. Malheureusement, nous devons trouver des solutions. Pourquoi en sommes-nous arrivés là ? D'abord parce qu'il y a la crainte du changement: on ne veut pas changer ses habitudes; on ne veut pas imaginer devoir financer de l'équipement communal; et, pire, nous avons la crainte de devoir augmenter notre fiscalité.
Les écoquartiers sont une magnifique opportunité. J'ai eu la chance de visiter un écoquartier qui a été réalisé à Malmö, en Suède. C'est extraordinaire, il y a un quartier de 10 000 habitants, où vous ne voyez pas une seule voiture en surface. C'est un cadre de vie que je peux imaginer être souhaitable pour tout le monde. Ce qui est important, Mesdames et Messieurs les députés, c'est que le plan localisé de quartier puisse être d'initiative communale, comme cela a été le cas pour les Vergers, à Meyrin. Au minimum, il faut que ce soit réalisé en concertation avec la commune; il est très important qu'elle puisse être associée à cet énorme projet d'urbanisation sur le canton. Le minimum - aussi - que nous puissions faire, c'est de renvoyer cette proposition de motion à la commission d'aménagement du canton, de manière que nous puissions travailler sur cet objet.
M. Roger Deneys (S). Mesdames et Messieurs les députés, c'est vrai que le déclassement du périmètre des Cherpines, anciennement en zone agricole, est extrêmement intéressant pour le développement du canton de Genève. C'est une opportunité unique de développer un nouveau quartier, avec des conceptions différentes de ce que l'on fait d'habitude à Genève - c'est-à-dire n'importe quoi, beaucoup de logements aux enjeux financiers, et pas forcément aux enjeux écologiques.
Dans ce sens, la proposition de motion des Verts est extrêmement intéressante et répond certainement à une préoccupation d'une partie de la population. Je pense que cela dépasse les clivages politiques. Ce n'est pas une question de gauche et de droite, c'est une question de vision de l'avenir, c'est une vision du développement, non seulement de Genève mais de notre planète. Il s'agit de savoir comment l'on envisage d'habiter et de consommer, afin que notre planète puisse exister à long terme. Un écoquartier, c'est aussi une façon de se dire: «Ecoutez, peut-être que l'on peut habiter et consommer moins, mais consommer mieux !» Et peut-être aussi, dans ce périmètre des Cherpines-Charrotons, zone agricole, est-ce l'occasion de réaliser un écoquartier.
Il y aurait plusieurs raisons à cela, notamment parce que la zone agricole implique un prix du terrain qui est bas à l'origine, c'est au maximum 10 F le mètre carré. On peut se dire que cela permettrait de réaliser du logement bon marché. De plus, il y a une nappe phréatique qui n'est pas très profonde; c'est donc assez difficile de construire en sous-sol, c'est difficile de construire des parkings. C'est pourquoi on devrait éviter de multiplier les constructions souterraines, qui, comme l'a - à raison - rappelé Emilie Flamand, renchérissent le coût de la construction. Voilà pourquoi on pourrait se dire: «Essayons de réaliser des immeubles pas trop élevés - en matériaux de construction durables, en bois par exemple - avec quatre ou cinq étages, mais sans faire de parking souterrain, que l'on peut difficilement construire à cet endroit, ou, en tout cas, que l'on peut difficilement réaliser sans coûts excessifs.»
Cette proposition de motion est intéressante. Mais cela ne veut pas dire que tous les projets de développement de Genève doivent se faire sur la logique de l'écoquartier. Je pense que cela ne répond pas à l'ensemble des souhaits de la population. Il n'empêche que l'on pourrait trouver, comme cela se fait à Fribourg-en-Brisgau, en Allemagne, eh bien, on pourrait trouver 4000 ou 5000 habitants qui sont prêts à habiter dans un quartier dans lequel on ne fait pas de voies de circulation ni de parkings souterrains. Pour cette simple raison, nous estimons que cette proposition de motion est extrêmement intéressante ! Nous serions même prêts à la renvoyer directement au Conseil d'Etat. (Brouhaha.) Maintenant, s'il faut l'étudier en commission, dans un premier temps, pourquoi pas ? Mais, fondamentalement, c'est bien une occasion unique qui se présente à Genève...
Le président. Il vous faut conclure, Monsieur le député.
M. Roger Deneys. ...de réaliser un projet d'avenir. Donc, nous vous invitons à soutenir cette proposition de motion ou, dans le pire des cas, à la renvoyer en commission, mais on pourrait l'accepter telle quelle ce soir.
Une voix. Bravo ! (Applaudissements.)
M. Christophe Aumeunier (L). J'ai eu l'honneur de pouvoir diriger la campagne pour le déclassement de ce périmètre des Cherpines. J'en suis fier, parce qu'il s'agit au fond de construire des logements à Genève, de le faire de manière massive et pour l'ensemble de la population genevoise. Il est bien que l'on rêve, du côté socialiste, en se disant: «On a enfin quelques terrains déclassés. Maintenant, construisons de petites cabanes en bois, de basse taille, et on pourra y loger quelques habitants.» (Commentaires.) Je ne suis pas certain que cela aille dans le sens des motions qui étaient proposées tout à l'heure, visant à une habitabilité qui soit tout à fait profitable à l'ensemble de la population genevoise, et qu'il y ait ainsi beaucoup de Genevois qui trouvent un logement.
Ce nonobstant, je suis particulièrement favorable, ainsi que le groupe libéral du PLR, aux quartiers durables. Aux quartiers durables qui trouvent effectivement des définitions: pas aux écoquartiers indéfinis ! Je crois qu'il y a là du travail à faire chez les Verts, parce qu'il semble que le niveau de connaissance des Verts, s'agissant de ces domaines-là, reste encore à parfaire singulièrement en matière... (Commentaires.) ...en matière de durabilité économique ! N'est-ce pas ?! Je conclurai ainsi, en disant que nous considérons qu'il faut renvoyer cette proposition à la commission d'aménagement du canton, pour l'étudier.
Mme Anne Mahrer (Ve). Je veux bien que nous soyons vendredi soir, très tard, or on entend un certain nombre de choses que l'on ne peut pas laisser passer.
Les Verts, le 4 mars 2011, envoyaient encore un communiqué de presse qui disait: «3000 logements au Cherpines-Charrotons: "Encore un effort Monsieur Muller"». C'est-à-dire que nous estimions que, sur 58 hectares de zone agricole, il y avait mieux à faire, et plus de logements à faire, qu'un centre sportif et de la zone industrielle et artisanale ! Nous avons fait campagne, et nous avons vu à quel point la campagne menée par M. Aumeunier parlait d'écoquartier, sans savoir très bien de quoi il retournait.
Les Verts sont entièrement au fait ! D'ailleurs, on attend toujours - on avait envoyé une motion ou une question - la réponse concernant la définition exacte d'un écoquartier. Alors, accuser les Verts de ne rien vouloir aux Cherpines... Je crois qu'on a dit précisément ce que l'on souhaitait voir. Bien entendu, nous attendons toujours la réponse, parce que nous ne l'avons pas eue. Sur 58 hectares de terres agricoles, il y avait mieux à faire que ce que l'on nous proposait.
Donc, Mesdames et Messieurs les députés, je vous invite à relire nos communiqués de presse et nos communiqués de campagne, et vous verrez ce que les Verts veulent aux Cherpines: évidemment, pas 5500 places de parking comme c'était prévu dans le projet initial. (Applaudissements.)
Le président. Merci, Madame la députée. La parole est pour une minute à M. Charles Selleger.
M. Charles Selleger (R). Je n'aurai même pas besoin d'une minute, Monsieur le président. J'interviens simplement pour dire - vous l'avez compris - que les groupes radicaux et libéraux voteront le renvoi à la commission d'aménagement du canton.
Mais j'aimerais m'exprimer sur la proposition d'amendement qui nous est faite par Mme Meissner, pour dire que nos deux groupes s'y opposeront dans la mesure où nous estimons que les modifications d'invites doivent être discutées en commission.
Des voix. Bravo !
Mme Michèle Künzler, conseillère d'Etat. Mesdames et Messieurs, le Conseil d'Etat se réjouit de parler de cette proposition de motion et d'écoquartier en commission d'aménagement. Effectivement, beaucoup de personnes pensent savoir ce qu'est un écoquartier... Il y a certainement de l'information à faire. Il faut voir d'autres villes. On cite souvent Fribourg-en-Brisgau, mais il y a aussi Malmö, Stockholm, Lille... Presque toute l'Europe ! C'est à peu près le même thème que tout à l'heure, avec les rails de tram engazonnés: il y en a partout, sauf à Genève. Quand j'ai vu que l'on allait faire un écoquartier à Viry, cela m'a vraiment déprimée parce que je me dis ceci: à Genève, si riche, si créative, eh bien non, nous n'avons même pas réussi à commencer le bout d'un premier écoquartier !
Je pense qu'il s'agit ici d'une proposition importante. Nous sommes en train de vivre une grande mutation, même dans la manière d'aborder l'aménagement du territoire. Vous avez voté des crédits pour réaliser des projets stratégiques de développement; on y rassemble des gens autour d'une table, que ce soit d'abord la population, mais aussi tous les spécialistes de tous les domaines - cela, en même temps, et non pas successivement. L'objectif est de faire avancer plus vite les dossiers, mais aussi de réunir... (Brouhaha. Le président agite la cloche.) ...toutes les compétences, en même temps, autour d'une table. C'est une mutation qui est en train de se passer au travers du département des constructions, mais il faudra aller de l'avant. C'est vrai que la population et les communes concernées doivent fournir un apport; elles sont désireuses de le faire, et des progrès ont été effectués dans ce sens.
En ce qui concerne la circulation et les parkings, c'est un point annexe. Mais il est clair que, dans un écoquartier, et dans ces quartiers maintenant bien desservis par les trams, il faudra simplement abaisser le taux de stationnement. C'est tout à fait possible de le faire ! Nous sommes en train de réviser la carte. Il est absurde de faire 1,6 place de parc dans un quartier nouveau - que ce soit un écoquartier ou non - où un tram est là pour le desservir. Nous verrions des centaines, des milliers de places vides, à 50 000 F la place... (Brouhaha.) C'est juste une absurdité économique ! (Brouhaha. Le président agite la cloche.) Nous avons déjà fait l'expérience dans beaucoup de quartiers que l'on a construits récemment: quand on prévoit un taux de stationnement au-delà de 1, il y a simplement des parkings vides.
Dans des quartiers durables, comme à Stockholm, il y a des immeubles de huit ou neuf étages, c'est-à-dire des quartiers denses... Ce sont des réflexions sur l'énergie, la santé, la perméabilité et la nature en ville, toutes ces réflexions doivent être menées ! C'est aussi une réflexion sociale... (Brouhaha. Le président agite la cloche.) ...c'est la mixité sociale qu'il faut favoriser, de même que les activités socioculturelles, qui doivent déjà exister dans un quartier. Un quartier, c'est un bout de ville, et on doit les développer différemment. Je pense que, pour ce projet...
Le président. Il va falloir conclure, Madame la conseillère d'Etat.
Mme Michèle Künzler. Oui, très volontiers. Je conclurai ainsi. La population a voulu un quartier là-bas; elle a l'espoir d'avoir enfin, à Genève, quelque chose qui donne envie d'habiter. Un écoquartier aux Cherpines doit donner envie de construire plus à Genève, c'est ce que l'on envisage, et c'est ce que le Conseil d'Etat veut faire à cet endroit. (Applaudissements.)
Le président. Merci, Madame la conseillère d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, je vous soumets le renvoi de cet objet à la commission d'aménagement du canton, tel qu'il a été demandé à plusieurs reprises.
Mis aux voix, le renvoi de la proposition de motion 2031 à la commission d'aménagement du canton est adopté par 71 oui contre 1 non et 8 abstentions.
Débat
Le président. Nous traitons maintenant le point 40 de notre ordre du jour. Ce faisant, je vous demande, comme je l'ai fait tout à l'heure, encore un peu de patience: nous allons arriver au bout de notre pensum en de bonnes conditions, mais cela dépend de vous ! La parole est à M. Guy Mettan.
M. Guy Mettan (PDC). Merci, Monsieur le président. Il est toujours délicat d'aborder les sujets transfrontaliers à 22h30, le vendredi soir, mais je pense qu'il faut le faire... (Brouhaha. Le président agite la cloche.) Je vais être très sobre et très bref, car je pense qu'il n'y a pas lieu, non plus, de se bagarrer sur cet objet. Pourquoi ? Parce qu'il y a une certaine urgence à ce que nous le votions, à ce que nous le renvoyions, en l'occurrence à la commission des affaires communales, régionales et internationales. En effet, nous sommes en train de discuter de l'extension de voies de tram à Saint-Julien, à Annemasse et à Ferney; de plus, nous avons commencé les travaux du CEVA. Bref, nous avons commencé à construire des infrastructures à Genève, qui vont au-delà de la frontière et concernent nos voisins français proches.
A partir de là, on constate qu'effectivement... (Brouhaha. Le président agite la cloche.) ...il n'y a toujours pas de fonds d'équipement transfrontalier commun. Il existe un fonds d'équipement communal, qui fonctionne plutôt bien, mais l'idée est de créer, avec les Français, un fonds d'équipement qui soit commun. Je sais que le Conseil d'Etat en parle; on entend ici où là des rumeurs qui diraient que le Conseil d'Etat est en train de préparer un projet dans ce sens. On s'en réjouit, or cela fait des mois, des années, que l'on en entend parler ! Je pense qu'il revient à notre Conseil de prendre l'initiative d'aller de l'avant, parce que, au fond, la construction de la région dépend aussi du Grand Conseil. Alors, c'est à nous, parlement, de prendre l'initiative d'aller de l'avant.
Sur le fond, nous n'avons pas voulu donner de précisions. Pourquoi ? Parce que c'est au Conseil d'Etat de négocier. C'est une négociation qui est aussi internationale. Il ne nous revient pas, à nous seulement, de dire exactement ce que les Français doivent faire, doivent payer, et la manière dont il faudrait qu'ils le fassent: il faut laisser les choses ouvertes. A partir de là, Mesdames et Messieurs les députés, je vous invite à renvoyer cette proposition de motion à la commission des affaires communales, régionales et internationales, pour que l'on puisse commencer à l'étudier, procéder aux auditions et examiner la faisabilité d'un tel projet. Le cas échéant, si le Conseil d'Etat venait à déposer son rapport dans un délai assez bref, eh bien, nous aurions déjà pu prendre de l'avance sur les travaux. Je vous remercie de votre attention.
M. Jacques Béné (L). Mesdames et Messieurs, j'interviens pour vous rappeler tout d'abord que nous sommes totalement en faveur du projet d'agglomération, que nous sommes pour le développement de Genève et que nous souhaitons maîtriser notre développement, plutôt que de le subir. La proposition qui est faite aujourd'hui par le PDC est intéressante, même si nous pensons que cela consiste à ajouter encore une couche à ce projet d'agglomération, alors que nous avons voté, il y a une année, la H 1 70, loi sur les infrastructures de transport issues du projet d'agglomération franco-valdo-genevois. Donc, même si ce n'est pas un fonds d'équipement commun avec les Français, quelque chose existe déjà. Et puis, comme l'a dit M. Mettan, les Français ont admis que, dans le cadre du projet d'agglomération et de la région Rhône-Alpes, il y avait encore en tout cas un milliard d'investissement à faire; j'imagine bien que les Genevois vont aussi devoir participer.
Pour nous, le renvoi en commission s'impose effectivement - à la CACRI, comme cela a été mentionné - sans aucun problème. Il sera assez temps, en commission, d'analyser le pourquoi du comment et d'auditionner éventuellement le CRFG, qui est actuellement en discussion avec le Conseil d'Etat pour examiner de quelle manière organiser les choses. Donc, je vous invite aussi à voter ce renvoi en commission.
M. Stéphane Florey (UDC). J'ai lu un article paru dans la presse le 25 octobre 2011, quand le dépôt de cette proposition de motion a été annoncé. On pouvait lire M. Mettan, que je cite: «Le canton dépense actuellement 900 millions pour ses investissements, il peut bien en consacrer 25, par exemple, à des projets prévus de l'autre côté de la frontière.» Eh bien, le groupe UDC dit non. Pourquoi ? Parce que ce sont 25 millions que nous pouvons dépenser pour Genève ! (Commentaires.) Pour autre chose ! Surtout à l'heure actuelle, quand on voit l'état de nos finances.
Pour le groupe UDC, il est absolument hors de question de financer quoi que ce soit de l'autre côté de la frontière, tout comme je vois mal le côté français financer n'importe quel projet chez nous ! Cela ne tient absolument pas debout. Cette proposition de motion, nous n'en voulons pas. Nous refuserons le renvoi en commission, et nous refuserons, tout court, cette proposition de motion !
Mme Irène Buche (S). Le projet d'agglomération est un enjeu majeur, comme tout le monde le sait, pour Genève et la région. Il doit se construire avec la France et le canton de Vaud; en l'occurrence, on parle de la France. Nous accueillons avec intérêt cette proposition de motion, qui vise la création d'un fonds d'équipement transfrontalier. Cela étant, il faut bien évidemment en discuter, en mesurer le bien-fondé et la faisabilité. C'est la raison pour laquelle nous accepterons le renvoi en commission.
M. Eric Stauffer (MCG). Mesdames et Messieurs les députés, il est assez piquant de constater que le PDC enfonce une porte qui est ouverte. Il est quand même intéressant de constater que le PDC, soucieux des finances publiques du canton de Genève, prétend qu'il faut créer un fonds pour l'équipement franco-genevois... Laissez-moi vous rappeler - vous transmettrez, Monsieur le président, à nos amis du PDC - qu'il existe un accord de 1973 qui régit déjà les fonds d'équipement pour nos amis de l'Ain et de la Haute-Savoie et que Genève verse, à ce titre-là, près de 200 millions de francs suisses par année, soit 3,5% de la masse salariale... (Commentaires.) Mais, que ce soit marqué, Madame la députée Loly Bolay... Si vous voulez prendre la parole, vous la demandez ! Je suis sûr que le président vous la donnera, tellement il est bon et respectueux du règlement. Ce que vous n'êtes pas en m'interrompant dans mon intervention ! (Commentaires.)
Cela étant dit, Mesdames et Messieurs, ces 200 millions de francs suisses que nous versons par année, selon les accords de 1973, doivent servir à la construction d'infrastructures du côté français. Alors, le groupe PDC est-il par hasard en train de dire que ces 200 millions ne sont pas suffisants et qu'il faudrait ajouter encore une couche par laquelle les Genevois, avec les impôts des Genevois, devraient payer des infrastructures du côté français ? Pas plus tard qu'hier, quand il s'agissait de remettre à flot la CGN, qui prenait un peu l'eau - il y a décidément beaucoup d'histoires d'eau, ces temps, dans ce parlement ! - eh bien, vous vous êtes opposés à cela, et c'est de nouveau le canton de Genève qui finance le tout.
Finalement, Mesdames et Messieurs les députés, soyons clairs. Les accords existent; ils ont été signés entre la Confédération suisse et la République française. Nous avons demandé, il y a quelques heures de cela, que le Conseil d'Etat veuille bien nous répondre. Puisqu'il n'a pas daigné prendre la parole lorsque j'ai posé cette question, nous, groupe MCG, allons déposer une série d'interpellations urgentes écrites pour la prochaine session du Grand Conseil, afin de demander quelle est l'utilisation faite par la France, des 200 millions de francs qu'elle reçoit...
Le président. Voilà, Monsieur le député ! Encore quinze secondes.
M. Eric Stauffer. Merci, Monsieur le président. ...quelle est l'utilisation faite de ces 200 millions de francs. Parce que c'est inscrit dans les accords de 1973. Et elle doit, une fois par année, donner le motif de ces dépenses. Nous savons que la France n'a pas répondu ! Nous savons que la France n'entend pas financer le CEVA !
Le président. Voilà, Monsieur le député, il faut terminer !
M. Eric Stauffer. Je vais terminer. Et nous n'avons pas encore d'accord écrit de la part de la France sur le financement du CEVA. (Commentaires.) Alors non ! Nous nous opposerons à la proposition de motion du PDC, qui enfonce une porte ouverte.
Mme Emilie Flamand (Ve). Mesdames et Messieurs les députés, ce n'est un secret pour personne, les Verts sont favorables à la région. C'est notre magistrat Robert Cramer qui a lancé le premier projet d'agglomération, que nous avons toujours soutenu, aussi avec un regard critique quand il le fallait, et que nous continuerons à soutenir.
La région, c'est un espace de vie commun, c'est une réalité au quotidien pour des milliers de gens, d'un côté de la frontière comme de l'autre, et la région est prise en compte au niveau de la planification avec le projet d'agglomération. Par contre, elle pèche parfois quant aux réalisations concrètes. On a peine à voir des équipements, justement; des infrastructures qui symbolisent la région et qui sont de véritables traits d'union entre nos deux pays, qui ne sont en réalité qu'un même bassin de vie.
Contrairement à ce que certains groupes pensent, pour bien vivre dans l'ensemble de la région, on a besoin d'équipements des deux côtés de la frontière, et il s'agit d'avoir des fonds communs et des financements communs. Pour nous, cette proposition de motion va tout à fait dans le bon sens, et c'est avec plaisir que nous la renverrons à la commission des affaires communales, régionales et internationales.
M. Patrick Saudan (R). Dans l'exposé des motifs de cette proposition de motion, un constat clair apparaît, qui est connu par l'ensemble des députés dans ce parlement, à savoir que cette région, qui est en train de se faire, souffre d'un déséquilibre structurel bien connu: les emplois à Genève, les logements en France ou dans le canton de Vaud. Or ce déséquilibre structurel ne va pas disparaître demain, même si nous souhaitons tous l'atténuer; il va prendre plusieurs décennies. Ce déséquilibre structurel entraîne un trafic pendulaire extrêmement important. Le seul moyen de le résoudre est d'avoir des équipements performants transfrontaliers.
J'aimerais juste répondre à M. Florey - vous transmettrez, Monsieur le président - que le Conseil d'Etat a décidé de financer la troisième voie depuis Lausanne, chez nos amis vaudois, parce qu'il s'est rendu compte que, si l'on parle de la région, les problèmes de transport doivent être réglés au niveau régional.
Alors, l'idée d'un fonds transfrontalier de financement est intéressante, et il faut l'étudier. Il faut l'étudier d'autant plus que les modalités de financement sont assez complexes. C'est pour cela que le groupe radical du PLR est tout à fait favorable au renvoi de cette proposition de motion à la commission des affaires communales, régionales et internationales.
M. Guy Mettan (PDC). Monsieur le président, je souhaiterais que vous transmettiez à M. Florey - qui est un homme que j'estime beaucoup et qui a, en plus, l'avantage d'être conducteur de tram - que, le jour où le tram ira jusqu'à Saint-Julien, Ferney et Annemasse, j'espère qu'il ne descendra pas à la frontière et qu'il ira jusqu'au bout ! C'est bien pour cela que, justement, c'est «transfrontalier» et «transfrontière»: il faut pouvoir aller de l'autre côté ! Cela, je vous invite à le faire, Monsieur Florey.
Quant à M. Stauffer, il faut lui dire, si vous pouvez, de lire quand même l'exposé des motifs ! Manifestement, il ne l'a pas lu ! S'il avait lu mon exposé des motifs, il aurait vu que ce ne sont pas 200 millions que nous rétrocédons aux Français, mais 230 millions. De plus, nous proposons - mais c'est une piste qui est à explorer - que ce soit justement sur cette part de rétrocession qu'une petite partie soit éventuellement prise pour doter la part française de ce fonds d'équipement ! Cela va donc parfaitement dans la logique qu'il semble souhaiter. Mais, pour cela, il faut évidemment lire l'exposé des motifs ! (Applaudissements.)
Une voix. Voilà, c'est comme le disait Mme Bolay !
Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à M. Stéphane Florey, pour une minute et cinquante secondes au maximum.
M. Stéphane Florey (UDC). Merci, Monsieur le président. Vous transmettrez ceci à la fois à M. Saudan et à M. Mettan: pour ce qui est du financement côté vaudois, nous ne sommes absolument pas opposés... (Brouhaha.) ...puisque cela reste suisse, si on veut. Par contre, ce que demande cette motion, c'est d'aller payer des projets en France ! (Brouhaha.) C'est franco-genevois ! C'est cela que nous refusons. (L'orateur s'exprime en s'adressant à l'assemblée.)
Le président. Monsieur le député, vous pouvez vous adresser au président, s'il vous plaît !
M. Stéphane Florey. Oui, Monsieur le président. Et puis, pour M. Mettan... soit ! Si le tram, un jour - parce que cela n'est encore pas fait, apparemment - traverse la frontière, il est évident que j'irai jusqu'au terminus. (Rires.) Mais si les Français veulent que les trams genevois aillent chez eux, eh bien, ils n'ont qu'à payer ! En effet, si l'on prend l'exemple de Vitam' Parc, c'est le demandeur qui paie sa part. Le bus D va jusqu'à Vitam' Parc, à Neydens; or c'est la Migros qui paie la totalité du prolongement de la ligne... (Remarque.) ...parce qu'elle en est demandeur. Et là, si les communes françaises veulent que le tram aille chez elles, elles n'ont finalement qu'à payer ! C'est tout ce que nous demandons.
Mme Michèle Künzler, conseillère d'Etat. Mesdames et Messieurs... (Brouhaha. Le président agite la cloche.) ...le Conseil d'Etat, au travers du CRFG, est déjà en train d'étudier cette possibilité. Nous vous présenterons cela bien volontiers en commission. Il ne s'agit pas de «payer totalement à la place de», mais de participer. Si l'on prend l'exemple des trams, je rappelle que, il y a cent ans, ces trams genevois passaient la frontière et étaient payés par les Suisses, donc entièrement. (Remarque.) Actuellement, les projets de tram - et je prends ces exemples que je connais bien - ont déjà obtenu un financement français, puisqu'ils ont, pour Saint-Julien, Annemasse et Saint-Genis, participé à un concours au niveau français, grâce auquel ils ont chacun obtenu environ 4 millions d'euros; c'est une première partie. Saint-Genis a obtenu des fonds de l'Europe pour un million, des fonds Interreg. Et nous participerons aussi, en partie.
Le problème est vraiment de, parfois, trouver le petit financement complémentaire pour un projet commun, afin d'aboutir plus vite à un projet réalisable, puisqu'il s'agit là de créer des équipements profitables - c'est l'un des objectifs et l'une des conditions du Conseil d'Etat - aux deux parties, de chaque côté de la frontière. Cela peut être des P+R. On a aussi parlé d'une centrale d'épuration commune, parce qu'il est absurde, par exemple, sachant que la station d'épuration d'Annemasse est à 500 mètres de notre station d'épuration, de reconstruire deux stations alors que l'on pourrait en faire une seule, commune. Tous ces projets méritent d'être étudiés.
Ce qui est précieux pour vous, c'est que non seulement vous serez informés en commission, mais aussi, s'il s'agissait de voter un crédit, vous auriez forcément le dernier mot ! Ce n'est pas le Conseil d'Etat qui va donner de l'argent sans que vous en soyez informés ! (Brouhaha.) C'est clairement ce Grand Conseil qui voterait, hypothétiquement, les fonds, s'il devait en exister. L'idée n'est pas de créer une grande cagnotte à distribuer, mais, pour chaque projet précis, de voir s'il y a besoin d'une participation pour accélérer le processus, en sachant que la France, l'Europe et Berne - aussi - peuvent participer à chaque projet. C'est ce que nous allons proposer très prochainement, et on vous le présente volontiers en commission.
Le président. Merci, Madame la conseillère d'Etat. Je vais, Mesdames et Messieurs les députés, vous faire voter le renvoi de cette proposition de motion à la CACRI.
M. Eric Stauffer. Je demande le renvoi à la commission fiscale !
Mis aux voix, le renvoi de la proposition de motion 2032 à la commission des affaires communales, régionales et internationales est adopté par 55 oui contre 22 non et 1 abstention. (Brouhaha durant la procédure de vote.)
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, j'aimerais vous dire que vous avez bien travaillé... (Brouhaha. Le président agite la cloche.) ...dans une bonne ambiance ! Et je vous remercie de votre compréhension à mon égard ! Sur ces bonnes paroles, je vous convoque et vous donne rendez-vous pour jeudi prochain à 8h, et je vous souhaite un bon week-end. (Exclamations. Applaudissements.)
La séance est levée à 22h45.