République et canton de Genève

Grand Conseil

La séance est ouverte à 20h30, sous la présidence de M. Pierre Losio, président.

Assistent à la séance: Mmes et MM. Pierre-François Unger, président du Conseil d'Etat, Charles Beer, Isabel Rochat et Michèle Künzler, conseillers d'Etat.

Exhortation

Le président. Mesdames et Messieurs les députés, prenons la résolution de remplir consciencieusement notre mandat et de faire servir nos travaux au bien de la patrie qui nous a confié ses destinées.

Personnes excusées

Le président. Ont fait excuser leur absence à cette séance: MM. David Hiler et François Longchamp, conseillers d'Etat, ainsi que Mme et MM. Elisabeth Chatelain, Marc Falquet, Jacques Jeannerat et Olivier Norer, députés.

E 1958-A
Prestation de serment de M. EYA NCHAMA Cruz Melchor, élu Juge assesseur à la Commission de conciliation en matière de baux et loyers, représentant les groupements de locataires

Le président. Mesdames et Messieurs les députés, l'ordre du jour appelle la prestation de serment d'un juge assesseur. Je prie Madame le sautier de le faire entrer et l'assistance de bien vouloir se lever. (Le magistrat entre dans la salle du Grand Conseil et se tient debout, face à l'estrade.) Monsieur Cruz Melchor Eya Nchama, vous êtes appelé à prêter serment de vos fonctions de juge assesseur à la commission de conciliation en matière de baux et loyers, représentant les groupements de locataires, entrée en fonction le 1er mai 2012. Je vais vous donner lecture de la formule du serment. Pendant ce temps, vous tiendrez la main droite levée et, lorsque cette lecture sera terminée, à l'appel de votre nom, vous répondrez soit «je le jure», soit «je le promets». Veuillez lever la ma droite.

«Je jure ou je promets solennellement:

- d'être fidèle à la République et canton de Genève, comme citoyen et comme juge;

- de rendre la justice à tous également, au pauvre comme au riche, au faible comme au puissant, au Suisse comme à l'étranger;

- de me conformer strictement aux lois;

- de remplir ma charge avec dignité, rigueur, assiduité, diligence et humanité;

- de ne point fléchir dans l'exercice de mes fonctions, ni par intérêt, ni par faiblesse, ni par espérance, ni par crainte, ni par faveur, ni par haine pour l'une ou l'autre des parties;

- de n'écouter, enfin, aucune sollicitation et de ne recevoir, ni directement ni indirectement, aucun présent, aucune faveur, aucune promesse à l'occasion de mes fonctions.»

A prêté serment: M. Cruz Melchor Eya Nchama.

Veuillez baisser la main. Le Grand Conseil prend acte de votre serment et vous souhaite une heureuse carrière. (Applaudissements.) La cérémonie est terminée. Vous pouvez vous retirer. (Applaudissements.)

Annonces et dépôts

Le président. La commission des pétitions nous informe qu'elle désire renvoyer la pétition suivante:

Pétition concernant la décision de suspendre la progression des annuités (P-1821)

à la commission ad hoc sur le personnel de l'Etat.

Nous abordons maintenant le traitement des urgences, à commencer par le point 79.

PL 10854-A
Rapport de la commission des finances chargée d'étudier le projet de loi du Conseil d'Etat soutenant la restructuration de la Compagnie Générale de Navigation sur le lac Léman (CGN) par l'abandon de créances de 7'776'699F, la transformation du capital social, la prise de participation à hauteur de 2'867'000F et l'ouverture d'une subvention d'investissement de 3'685'400F
Rapport de majorité de M. Roger Deneys (S)
Rapport de minorité de M. Renaud Gautier (L)

Premier débat

Le président. Nous sommes en catégorie II: quarante minutes. Je donne la parole au rapporteur de majorité, M. Roger Deneys.

M. Roger Deneys (S), rapporteur de majorité. Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, une fois n'est pas coutume, voilà un projet de loi qui devrait, en tout cas dans son esprit, rallier l'ensemble des forces politiques présentes dans ce Grand Conseil, parce qu'il s'agit d'éviter que, dans des jours plus ou moins lointains, la CGN, nos chers bateaux qui naviguent sur le Léman, ne coulent. Bien entendu, nous sommes toutes et tous attachés à la CGN, aux bateaux qui naviguent sur le Léman, que ce soit pour les touristes... (Brouhaha. Le président agite la cloche.) ...le transport de pendulaires ou la préservation du patrimoine historique que constituent les anciens navires de la CGN.

En fait, un petit retour historique est certainement nécessaire pour expliquer aussi pourquoi nous sommes aujourd'hui saisis d'un tel projet de loi et d'un tel rapport. Entre fin 2009 et début 2010, vous l'avez peut-être oublié, «Le Matin dimanche», pour le citer, avait évoqué le fait que la CGN était au bord du dépôt de bilan. La situation était suffisamment grave pour que les médias et les parlements se saisissent de ce dossier de façon un peu plus efficace que par le passé. En effet, la CGN, en réalité, année après année, fonctionnait certes à satisfaction des touristes et des usagers occasionnels, mais accumulait en même temps des pertes qui étaient comblées par les autorités publiques, genevoises en partie mais surtout vaudoises. D'ailleurs, j'ai retrouvé un très joli article du «Messager», un journal de nos amis français, dans lequel le directeur de la CGN évoquait le fait qu'il n'y avait pas de problème à la CGN puisque, chaque année, il y avait ce qu'il appelait une «subvention d'équilibre». La «subvention d'équilibre», voilà une jolie notion pour dire que l'on n'a pas de problème financier. Mais, en réalité, on a depuis plusieurs années, avec la CGN, un problème de financement.

Ce projet de loi vise d'une part à abandonner des créances. L'Etat de Genève a effectivement prêté de l'argent à la CGN, depuis de nombreuses années; il n'a jamais pu le récupérer. Alors plutôt que de le garder en pied de bilan de l'Etat, on se dit ceci aujourd'hui: tournons la page, envisageons la CGN d'une autre façon, en essayant déjà de clarifier les missions de la CGN, entre l'entretien du patrimoine historique, le transport de passagers et bien entendu la vocation touristique. Ces différents enjeux ont été étudiés à la commission des finances.

En fait, ce projet de loi du Conseil d'Etat répond très exactement au souhait des cantons romands, au souhait exprimé ici dans notre Grand Conseil, pour demander que l'on essaie de garantir un financement de la CGN à long terme, de façon plus intelligente et en évitant ces fameuses subventions d'équilibre qui viendraient combler les trous - qu'il vaudrait d'ailleurs mieux éviter dans les bateaux de la CGN.

Le président. Il vous faut bientôt conclure, Monsieur le député.

M. Roger Deneys. Alors je vais conclure, Monsieur le président, en vous invitant, Mesdames et Messieurs les députés, à voter ce rapport. Je souhaite encore exprimer ceci. Je n'ai pas très bien compris pourquoi le rapporteur de minorité, le capitaine Haddock - pardon: M. Renaud Gautier - avait décidé qu'il ne fallait pas voter ce projet de loi, dans la mesure où ses camarades PLR estimaient que c'était quand même une solution intéressante, à défaut d'être la solution idéale. Je pense que ce projet de loi est la seule façon d'aller de l'avant de façon positive, à moyen terme. Donc je vous invite à le soutenir.

Le président. Je vous remercie. Votre humour est désopilant. Je passe la parole à M. le rapporteur de minorité Renaud Gautier.

M. Renaud Gautier (L), rapporteur de minorité. Merci, Monsieur le président. Edward John Smith: rappelez-vous bien ce nom, Mesdames et Messieurs. Né le 27 janvier 1850, il est décédé dans la nuit du 14 au 15 avril 1912, soit il y a un siècle moins un mois très précisément. Edward John Smith, représenté ici par notre excellent collègue, était le capitaine du Titanic. M. le rapporteur de majorité, exactement comme le capitaine du Titanic, nous explique qu'il s'agit là d'un projet qui, comme le Titanic, ne pourra pas couler. C'est le truc qu'il faut, la construction la plus extraordinaire qui soit. J'ai donc quelques minutes pour vous expliquer le nombre d'icebergs qui vont se trouver sur le chemin de ce projet de loi.

Le premier iceberg, Mesdames et Messieurs, est que, à ce jour, le canton abandonne, suivant comment on calcule - parce qu'ils ont fait preuve d'une certaine créativité comptable - en gros 11,5 millions de francs, que le canton de Genève a investis à ce jour et qui se transforment en fait simplement en 7 776 699 F. Tout cet argent, Mesdames et Messieurs, qui a été voté au cours des temps, passe aux pertes et profits.

Le deuxième iceberg, Mesdames et Messieurs, est le brouillard. Vu l'état catastrophique des finances de la CGN - et le capitaine Smith en face de moi a très bien démontré les principes des subventions de comblement - on entend donc dans un même projet de loi construire une holding, à savoir une société qui va s'occuper de la gestion des bateaux d'époque et une société qui va, elle, exploiter les bateaux un peu plus modernes. Tout cela, bien évidemment, Mesdames et Messieurs, a un coût. C'est d'une part 2 867 000 F comme participation d'entrée, après les 11,5 millions que l'on a déjà dépensés, qui vont servir d'une part à la rénovation du bateau «Ville de Genève» et d'autre part, je vous le donne en mille, l'assainissement du chantier naval basé à Ouchy, extraordinairement important pour le développement de Genève, comme chacun sait !

Le troisième iceberg, Mesdames et Messieurs, est une subvention d'investissement - à fonds perdus je vous prie ! - de 3,7 millions, qui doit permettre la rénovation du bateau «Vevey», bateau dit de la classe Belle Epoque.

Le quatrième iceberg en vue, Mesdames et Messieurs, est le fait que, malgré ces dépenses absolument somptuaires, chaque année, vous aurez encore à voter à peu près 2 millions de budget de fonctionnement pour que la CGN daigne venir aborder aux différents ports de notre canton. C'est donc l'autorisation que vous avez, en dépensant tout cet argent-là, d'être sûrs que vous allez encore dépenser 2 millions de plus par année pour le contrat de prestations fourni avec la CGN. Ce sont donc 7,8 millions comme ticket d'entrée pour payer 2 millions.

Enfin, venons-en au fond du problème. Il s'agit-là d'une construction que l'on aurait dû présenter dans ce parlement sous des tranches différentes, à savoir d'une part la recapitalisation, d'autre part la création de la Holding, enfin l'exploitation entre la flotte dite «Belle Epoque» et la flotte «traditionnelle», ce qui nous aurait laissé un certain nombre de choix. Car il ne faut pas nous bercer d'illusions, Mesdames et Messieurs, l'agenda des parties prenantes, des cantons prenants, à savoir les cantons de Vaud et du Valais, n'est pas l'agenda du canton de Genève. Celles et ceux qui siègent dans ce parlement depuis suffisamment longtemps se rappellent chaque année les discussions qu'il y avait avec la CGN pour obtenir de celle-ci qu'elle veuille bien desservir l'entier des ports genevois - ce fut chaque fois et à chaque printemps les mêmes négociations - cela pour vous dire que les agendas ne sont pas communs.

Le président. Il vous faut conclure.

M. Renaud Gautier. Mesdames et Messieurs, la seule chose que vous pouvez faire avant que ce projet de loi ne sombre corps et biens est tout au mieux, ou tout au pire, de le renvoyer à la commission des finances, de façon que ce projet soit séparé entre les trois composantes qui en font son thème aujourd'hui, de sorte que ce parlement puisse décider ce qui est nécessaire et le distinguer de ce qui est superflu.

Le président. Merci, Monsieur le député. Mesdames et Messieurs les députés, nous sommes saisis d'une demande de renvoi de ce projet de loi à la commission des finances. La parole est à chacun des rapporteurs pour trois minutes ainsi qu'au Conseil d'Etat. Je redonne la parole à M. le rapporteur Roger Deneys.

M. Roger Deneys (S), rapporteur de majorité. Merci, Monsieur le président. L'éventuel renvoi en commission de ce projet de loi pourrait avoir un sens si nous n'étions pas en plein milieu de la traversée. En effet, le but aujourd'hui est justement d'avoir un projet ficelé pour essayer de changer la gouvernance de la CGN. Aujourd'hui, le problème est celui des dix, vingt, trente, quarante dernières années, où la CGN est venue, année après année, nous demander un financement complémentaire, que nous avons toujours accordé ! Pour quelles raisons ? Parce que nous sommes toutes et tous attachés à ces magnifiques bateaux et que personne ne veut mettre en péril l'activité économique de la CGN ! C'est tout simplement une vache sacrée - ce n'est pas le terme à utiliser, parce qu'une vache sacrée ne va pas très bien dans l'eau ! En l'occurrence, c'est bien le phénomène de l'objet intouchable auquel nous sommes attachés et auquel nous sommes prêts à passer tous les caprices. Pour cette simple raison, le projet de loi doit aujourd'hui être voté, parce que la CGN doit, au niveau de sa structure, de la société anonyme, prendre des décisions pour rendre possible l'évolution de sa gouvernance et permettre aux pouvoirs publics de ne pas continuer à payer à fonds perdus en fonction des caprices des uns et des autres.

Donc pour cette simple raison, même si ce projet de loi n'est pas parfait - je ne l'ai jamais affirmé - il faut aller de l'avant et voter ce projet de loi, qui est d'ailleurs conditionnel et qui ne sera appliqué que si la CGN prend les décisions en assemblée générale pour constituer la fameuse holding. Aujourd'hui, le canton de Genève, avec le canton de Vaud, paie mais ne décide rien. Ce projet de loi permet de changer cette gouvernance. Nous paierons toujours, mais au moins nous pourrons décider.

M. Renaud Gautier (L), rapporteur de minorité. Monsieur le président, l'excellent capitaine Deneys l'a très justement dit: il s'agit d'une vache sacrée; et si c'est une vache sacrée, alors il ne faut rien changer. C'est exactement contre ce type de raisonnement que je m'oppose. Je reste convaincu que découpler les différents projets qu'il y a à l'intérieur de ce projet de loi permettra à ce parlement de préserver ce qui doit l'être, en ayant d'autre part la garantie de ne pas participer à des montages de type financier qui risquent de l'emmener financièrement beaucoup plus loin que ce que l'on vous propose aujourd'hui.

Mme Michèle Künzler, conseillère d'Etat. Le Conseil d'Etat pense au contraire qu'il s'agit maintenant d'arrêter le flottement qui entoure toute cette question. Vous nous avez demandé une clarification. On payait à fonds perdus; on subventionnait à bien plaire. Nous avons clarifié la situation. L'assemblée générale qui entérinera, nous l'espérons, ces projets qui tiennent à coeur des trois cantons a lieu le 16 mai. C'est le moment de clarifier les choses, après plus de cinquante ans où elles ont été à la dérive.

Le président. Merci, Madame la conseillère d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, nous nous prononçons donc sur le renvoi du rapport PL 10854-A à la commission des finances.

Mis aux voix, le renvoi du rapport sur le projet de loi 10854 à la commission des finances est rejeté par 52 non contre 28 oui et 1 abstention.

Le président. Nous poursuivons le premier débat. La parole est à M. le député André Python.

M. André Python (MCG). Mesdames et Messieurs les députés, depuis 189 ans, la CGN sillonne le lac Léman avec des bateaux à aubes. Ces bateaux représentent la plus prestigieuse flotte Belle Epoque du monde. Cela a un coût. Vaud et Valais ont déjà compris qu'il fallait soutenir la CGN. Afin que ces navires, dont l'attrait touristique est incontestable, puissent continuer à nous émerveiller et à naviguer, le groupe MCG vous demande d'accepter ce projet de loi.

M. Christian Bavarel (Ve). Mesdames et Messieurs les députés, ce projet est avant tout un projet de loi de gouvernance. Il s'agit de séparer la flotte Belle Epoque de l'entreprise de transport. C'est ce que ce parlement avait demandé lors de la précédente législature. Nous remercions le département d'avoir négocié avec les Vaudois et de l'avoir fait. En même temps, cela établit et consacre un partenariat public-privé. Il s'agit aujourd'hui, dans une entreprise qui a des actionnaires privés, de revenir à quelque chose de plus sain; pendant des années, les collectivités publiques payaient mais n'avaient pas les droits de vote. Alors nous remercions les gens et les quelques familles qui ont mis énormément d'argent dans la CGN, mais il se trouve que les collectivités publiques en ont mis encore plus et entendent avoir un actionnariat qui corresponde à la part à laquelle ils contribuent.

C'est aussi un partenariat avec nos amis vaudois et valaisans. On nous dit à longueur de temps dans ce parlement: «Mais pourquoi ne va-t-on pas voir comment font les Vaudois et les Valaisans ? Ne pourrait-on pas s'associer avec eux ?» C'est le cas ici.

Donc nous sommes aujourd'hui face à un projet qui correspond aux demandes de ce parlement - qui est un préalable afin de pouvoir commencer à travailler plus finement avec la CGN - à savoir d'assurer la gouvernance. C'est ce qui est proposé dans ce projet de loi. C'est pour cela que les Verts vous invitent à le soutenir.

M. Edouard Cuendet (L). Comme souvent, dans ce dossier, il y a un aspect émotionnel et un aspect rationnel. L'émotionnel, évidemment, porte sur le maintien et la rénovation de la flotte Belle Epoque de la CGN. Je pense que personne dans cet hémicycle n'imagine le lac de Genève - on peut aussi dire «Léman» - sans ces magnifiques bateaux. Mais cet attachement au patrimoine historique lacustre ne doit pas occulter les aspects matériels et structurels; il ne doit donc pas y avoir de rideau de vapeur dans ce dossier. Ainsi vous ne m'en voudrez pas de parler aussi du côté rationnel du projet. Je ne m'appesantirai pas sur les erreurs matérielles que le département a faites dans la rédaction du projet de loi et qui ont dû être corrigées sur le siège en commission, ce qui était difficile. Je m'étendrai plutôt sur les aspects - cela n'étonnera personne - financiers et structurels.

Comme cela a été rappelé ici, le Grand Conseil a effectivement demandé que l'on sépare les activités de transport, de navigation, et les activités de conservation du patrimoine. Cela, je crois que personne ne le conteste. Mais il n'a jamais été question, dans le mandat donné par le Grand Conseil, d'abandonner une créance et de prendre une participation dans la holding à hauteur d'à peu près 11 millions, ce qui coûte extrêmement cher pour le droit de payer davantage à l'avenir, lorsqu'il s'agira de renflouer à nouveau la flotte, ce qui ne manquera pas d'arriver dans un futur assez proche.

En termes d'actionnariat, aussi, il ne faut pas se leurrer. On nous dit: «Les cantons de Genève et de Vaud ont la majorité.» Mais il faut encore regarder de près le fonctionnement de la S. A. Il s'avère que Pro Vapore, qui représente des actionnaires historiques et privés, dispose d'une minorité de blocage. Or cette minorité de blocage rend totalement illusoire la majorité virtuelle qu'ont les cantons de Vaud et de Genève. Au passage, d'ailleurs, on relèvera que la France participe de manière extrêmement congrue à ce redressement, à ce financement, alors qu'elle bénéficie énormément des prestations de la CGN; notamment Evian est un grand bénéficiaire de ces prestations. On nous a dit qu'il y avait bien eu des approches mais que ce n'était encore pas très concret.

Surtout, on relèvera aussi que la commission des finances à ce stade n'a pas eu connaissance du contrat de prestations, et c'est un point essentiel. On l'a demandé. Il nous a été répondu: «Il n'est pas encore rédigé.» Or ce contrat de prestations fixera les services que la CGN fournira à l'avenir. Donc on a payé 11 millions pour voir, on n'a pas vu le contrat de prestations, et l'on sait que la CGN est très encline à supprimer des stations, d'ailleurs, puisque beaucoup de communes genevoises se sont plaintes du fait que la CGN avait décidé de supprimer des haltes à certains pontons qui ne lui paraissaient pas rentables. En plus, on a vu que la gestion n'était pas parfaite. Mon collègue Renaud Gautier se souvient parfaitement de l'épisode du...

Une voix. Titanic !

M. Edouard Cuendet. Pas du Titanic ! Concernant les citernes de Vernier, il se souvient des options prises pour l'avenir sur le coût du mazout, épisode qui a été un désastre financier absolu. Donc la gestion n'était pas super rigoureuse. Bref, on paie à l'avance 11 millions pour ensuite voir le contrat de prestations sur lequel on nous dira: «On veut bien vous accorder ces prestations si vous payez tant et tant.» Donc là, on est un peu pieds et poings liés.

Le président. Il vous faut conclure !

M. Edouard Cuendet. Mais au fond, pour le groupe libéral, évidemment que l'on s'est rendu compte que l'élément émotionnel était extrêmement fort et pesait plus dans la balance que l'élément rationnel, ce qui a conduit la grande majorité du groupe à vouloir s'abstenir sur ce projet de loi.

Mme Christine Serdaly Morgan (S). Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, nous avons ce que nous avons demandé, soit la scission des activités de la CGN. Ce Grand Conseil voulait que la rénovation des bateaux soit distinguée de l'exploitation; c'est chose faite, ou presque. Nous ne sommes pas majoritaires. C'est le canton de Vaud qui assume la grande partie. Vaud et Valais ont accepté une solution élaborée avec toutes les parties. Allons-y, et cette fois-ci aux côtés de toutes les autres collectivités publiques qui ont retrouvé leur place.

Il faut renoncer à de vieux prêts datant des années soixante. Allons de l'avant et ne plombons pas la CGN en restant aujourd'hui sur une situation que nos prédécesseurs n'ont pas réglée. A l'avenir, nous continuerons à verser une subvention annuelle de 2 millions, certes, et nous pourrons décider, au coup par coup, projet de loi par projet de loi, si nous soutenons la rénovation ou non. Qui voudrait donc couler CGN ? Tout de même pas le député Gautier, Monsieur le président, qui, bien qu'attaché au bon fonctionnement des institutions, a tenu à nous concocter un rapport de minorité et un petit renvoi en commission pour que nous en discutions longuement ici alors que, finalement, nous avons ce que le Grand Conseil a voulu et ce que le PLR, habituellement, aime, soit la bonne gouvernance et les structures claires. Alors sommes-nous tous des «babas cool» ici et y a-t-il uniquement le PLR pour maîtriser le rationnel sur l'émotionnel ? Nous ne le pensons pas et nous vous invitons à voter ce projet de loi.

M. Frédéric Hohl (R). Mesdames et Messieurs les députés, bien évidemment, je remercie le rapporteur de minorité, mais je remercie également le rapporteur de majorité, qui nous a dit tout à l'heure que, ma foi, ce projet de loi n'était pas parfait. C'est exactement pour cela que l'on s'est posé des tas de questions durant les auditions. Alors si la question principale était: «Etes-vous pour ou contre la CGN ?», nous répondrions: «Mais bien évidemment que nous sommes pour la CGN !» On est tous fiers de cette magnifique flotte. C'est un attrait touristique. C'est notre patrimoine. Il n'y a aucune discussion là autour.

Vous l'avez rappelé dans vos différents rapports, il y a trois volets. Le premier est l'abandon de la créance de 7,7 millions. On a bien compris que personne ne pourrait rembourser cela, donc on est d'accord avec ce point-là. Ensuite, le deuxième volet consiste justement à l'entrée dans le capital de la holding, avec d'un côté la flotte Belle Epoque, et, de l'autre côté, l'exploitation. C'est là que nous nous sommes posé pas mal de questions. La première est celle-ci: somme toute, serons-nous obligés de payer ces rénovations sans pouvoir avoir notre mot à dire dans ce Conseil ? Certes, les projets de rénovation passeront quand même devant le Grand Conseil, mais c'est l'une des questions que l'on s'est posée. Voici la deuxième question: cette holding ne fera-t-elle pas fuir les richissimes familles qui, traditionnellement, aident la CGN ? Peut-être ces grandes familles vont-elles se dire: «Voilà, maintenant que la holding est en place et que les cantons de Vaud et de Genève, ainsi que la France - je l'espère, parce c'est aussi l'une des questions - participent à cela, on va peut-être gentiment se retirer.» C'est probablement ce qui va arriver. Or l'une des grandes questions, c'est la France ! Mesdames et Messieurs, quand vous êtes à Evian, à Thonon, vous bénéficiez de cet aspect touristique. La flotte de la CGN est quelque chose d'exceptionnel. Je trouve que la France devrait être, au même titre que Genève, dans cette holding.

Alors voilà pourquoi ces questions ouvertes, somme toute restées sans réponses, nous ont fait plutôt basculer sur une abstention pour ce projet, et nous vous encourageons, Mesdames et Messieurs les députés, à faire de même.

M. Guy Mettan (PDC). J'ai écouté avec attention les deux rapporteurs, qui nous ont parlé des capitaines Haddock et Smith. J'avoue que je ne sais pas lequel vaut l'autre. Si nous devions choisir entre l'un et l'autre, nous serions bien empruntés. Il se trouve que, dans le débat qui nous occupe, ce n'est pas du tout une question de capitaine qui nous importe, mais d'armateur. On nous demande de jouer le rôle d'armateur, au fond, c'est-à-dire d'accepter de prendre les risques, le risque économique, de soutenir la flotte de la CGN.

Or le projet de loi qui nous est proposé ce soir est tout à fait acceptable. Pourquoi ? Parce qu'il nous permet de mener à bon port la CGN, c'est-à-dire dans son budget de fonctionnement, et en même temps de sauvegarder son patrimoine. A partir de là, Mesdames et Messieurs, je vous suggère de renoncer au rôle de vaillant capitaine, de tenir celui, plus modeste, de remorqueur et d'amener ce projet de loi à bon port.

Une voix. Bravo ! (Quelques applaudissements.)

Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à M. le député Pascal Spuhler, à qui il reste trois minutes et vingt secondes.

M. Pascal Spuhler (MCG). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, j'ai entendu pas mal de choses. Effectivement, je pense que M. Mettan a raison. Il faut amener ce projet à bon port et ne pas le laisser couler. On parle ici d'un fleuron touristique, d'une activité quand même importante pour le lac Léman, le lac de Genève, et pour nos villes que sont Lausanne, Genève et d'autres au bord du lac. On parle d'une vieille dette de 7 millions, qui date des années soixante ou juste après. Finalement, cette dette, il y a longtemps qu'elle est effacée par l'apport touristique que nous amènent ces bateaux, directement et indirectement.

Il nous paraît quand même important que l'on puisse décider de l'avenir de cette compagnie, que l'on puisse justement maîtriser les coûts. Cela se fera en allant au sein de cette holding pour mener à bon port ce projet de loi.

Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à M. le député Roger Deneys. Je suppose que vous vous exprimez sur le temps du groupe socialiste... (Remarque.) Il vous reste deux minutes.

M. Roger Deneys (S), rapporteur de majorité. Merci, Monsieur le président. J'aimerais inviter les députés, qui hésitent à voter ce projet de loi, à se replonger dans le PL 10711, notamment aux pages 22 et suivantes, qui contiennent un audit de gestion de la CGN qui avait été demandé en 2009. Je vous relis simplement les conclusions: «Il est vite apparu comme une évidence que les problèmes opérationnels rencontrés par la CGN, depuis bientôt plus d'un an, ne sont pas uniquement conjoncturels. Certes, des points de gestion courante peuvent encore être améliorés et ceci sans trop de difficulté. Néanmoins, une stabilisation financière de la CGN, garantissant sa pérennité et, sans aucun doute, une productivité améliorée, n'est envisageable que si des mesures stratégiques radicales - radicales ! - sont prises. Dès lors, l'avenir de la CGN ne réside pas seulement dans les mains de sa direction, mais bien plus dans la vision que les cantons voudront définir et que le conseil d'administration de la CGN se chargera de faire mettre en oeuvre par sa direction.»

Donc il s'agit bien d'une vision politique que nous devons donner à la CGN pour qu'elle puisse continuer de voguer de façon sûre dans les prochaines années. Je crois que c'est vraiment la mission de ce projet de loi: garantir la pérennité de la CGN. En effet, jusqu'à aujourd'hui, malgré tous les arguments évoqués par les libéraux dans le rapport de minorité, malheureusement, nous n'avons fait que payer et continuer à faire durer de mauvaises habitudes. Or ce projet de loi est une occasion unique de faire changer cette vision des choses, ma foi, un peu dépassée. Donc il faut voter ce projet de loi.

Le président. Je vous remercie, Monsieur le député. Monsieur le rapporteur de minorité Renaud Gautier, vous avez épuisé votre temps de parole, votre groupe politique aussi. La parole est à Mme la conseillère d'Etat Michèle Künzler.

Mme Michèle Künzler, conseillère d'Etat. Merci, Monsieur le président. Rationnel ou émotionnel ? Je crois que ce qui a été émotionnel est le comportement de nos ancêtres, si l'on peut parler ainsi des gens des années soixante... (Commentaires.) ...et de l'Etat de Genève, qui a, longtemps, amené du financement, par à-coups, en prêtant, en donnant des subventions diverses, sans aucune rationalité ! Ce que nous demandons actuellement est de revenir à quelque chose de rationnel. Depuis 2008, le Conseil d'Etat a été alerté par la situation financière de la CGN. Un audit a été commandé qui conclut à des mesures de gouvernance strictes et à une séparation de deux activités, le transport et la conservation du patrimoine.

Les trois cantons se sont mis d'accord. Je salue le travail que nous avons fait avec MM. Marthaler et Melly, des cantons de Vaud et du Valais, pour faire aboutir ce projet. Effectivement, c'est là que l'émotionnel se joue, notamment dans le canton de Vaud. Cela a été un long cheminement pour arriver à ce résultat, et nous espérons bien que l'assemblée générale de la CGN, le 16 mai, adoptera ce projet. Nous avons déjà procédé par étapes, puisque vous avez adopté en 2010 une loi entrée en vigueur le 1er février 2011 qui donnait une base légale au financement de la CGN. En effet, auparavant, on donnait simplement de l'argent sans aucune base légale, à bien plaire ! Maintenant, il s'agit d'avoir une vraie gouvernance et de respecter une forme juridique appropriée.

Vous avez là tous les éléments pour mettre d'un côté toutes les prestations de transport, de l'autre tout ce qui concerne le patrimoine. Il a maintenant vocation à être conservé à long terme, puisque le canton de Vaud a procédé au classement de tous ces bateaux Belle Epoque. Donc il y a là une sécurité pour les membres de Pro Vapore, qui militent pour le maintien de ce patrimoine. Ainsi, étape après étape, on procède à une meilleure gouvernance, à une légalisation des choses. Et c'est maintenant le dernier pas pour avoir une meilleure gouvernance.

Ensuite, nous viendrons avec un contrat de prestations. Mais là, on pourra enfin choisir les prestations ! Si certaines communes demandent à être desservies davantage il faudra qu'elles participent. Je rappelle juste que, si la CGN ne dessert plus certains ports, c'est aussi parce qu'elles ne payaient plus ce qu'elles devaient. Le contrat de prestations s'élèverait à environ 2 millions de francs par année, c'est ce que nous payons déjà maintenant Quant à la France, elle participe déjà, mais de manière insuffisante. C'est à peu près à hauteur d'un million; j'estime, comme vous, qu'il devrait y avoir une participation plus importante. Ce sera plus facile de les faire participer quand la situation sera clarifiée entre les différents acteurs cantonaux.

C'est pourquoi le Conseil d'Etat vous demande d'approuver ce projet de loi, qui amène cette clarté souhaitée et qui termine une histoire un peu émotionnelle par une fin beaucoup plus rationnelle et permettant de préserver l'avenir.

Le président. Merci, Madame la conseillère d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, nous procédons au vote d'entrée en matière sur le projet de loi 10854.

Mis aux voix, le projet de loi 10854 est adopté en premier débat par 61 oui contre 13 non et 14 abstentions.

La loi 10854 est adoptée article par article en deuxième débat et en troisième débat.

Mise aux voix, la loi 10854 est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 62 oui contre 13 non et 15 abstentions.

Loi 10854

M 2058
Proposition de motion de Mme et MM. Sandro Pistis, Thierry Cerutti, Dominique Rolle, Mauro Poggia, Jean-Marie Voumard, Pascal Spuhler, Eric Stauffer, Florian Gander, André Python, Guillaume Sauty, Roger Golay, Henry Rappaz, Christophe Andrié, Jean-François Girardet pour une fluidité du trafic aux carrefours, développons les feux orange clignotants !

Débat

Le président. Nous sommes au point 50, traité en catégorie II: trois minutes. Je donne la parole au premier motionnaire, M. Sandro Pistis.

M. Sandro Pistis (MCG). Merci, Monsieur le président. Nous demandons le renvoi sans débat à la commission des transports de la proposition de motion 2058: «Pour une fluidité du trafic aux carrefours, développons les feux orange clignotants !» Je demanderai également le vote nominal.

Mme Emilie Flamand (Ve). Quelques mots sur cette proposition de motion, qui paraît a priori être une très bonne idée. C'est tellement vrai que les Verts avaient eu la même idée il y a quelques années... (Exclamations. Applaudissements.) Si, si ! (Commentaires.) Avec Mme Sylvia Leuenberger, dont nous regrettons qu'elle ne soit plus parmi nous... (Brouhaha. Le président agite la cloche.) ...nous avions déposé la proposition de motion 1850, qui avait été renvoyée à la commission des transports. Je crois que Mme Favre s'en souvient, parce qu'elle était rapporteure de cette proposition de motion.

A la commission des transports, portés par l'enthousiasme lié à cette proposition de motion, nous avions demandé l'audition du service des routes et de la mobilité de la Ville de Lausanne, qui, croyions-nous, appliquait cette mesure. Alors nous avons effectivement fait venir de Lausanne un technicien en transport; il nous a expliqué que les feux clignotants avaient été supprimés à Lausanne depuis déjà de nombreuses années, car ils causaient trop d'accidents. Deux essais ont été faits en ville de Lausanne et, à chaque fois, le nombre d'accidents prenait l'ascenseur. Donc ils ont dû renoncer à cette mesure. Tout cela pour vous dire que cette idée qui paraît si bonne en apparence ne l'est peut-être pas tant que cela.

A l'époque des débats de commission, nous avions fait plusieurs auditions. Donc nous avions étudié le problème assez à fond. Les TPG avaient également dit que cela pouvait poser des problèmes par rapport aux priorités de leurs véhicules et donc à la vitesse commerciale.

En revanche, une piste intéressante qui était apparue durant nos débats est celle de la réduction du nombre de feux de circulation, en particulier au centre-ville. C'est d'ailleurs le sens de l'amendement que nous avions déposé sur notre proposition de motion, lequel avait été rejeté par deux tiers de ce parlement en novembre 2010. Alors ce sujet ayant déjà été étudié il y a moins de deux ans, nous refuserons cette proposition de motion ainsi que son renvoi en commission, tout en restant ouverts à d'autres propositions futures visant à diminuer le nombre de feux de circulation. (Brouhaha.)

Le président. Merci, Madame la députée. Je rappelle aux interpellants voire aux quérulents que, lorsqu'il s'agit d'une proposition de motion, si est formulée une demande de renvoi, cette dernière se vote à la fin du débat. Quand il s'agit d'un projet de loi, la demande de renvoi interrompt le débat, raison pour laquelle nous votons en pareil cas directement après la demande de renvoi. La parole est donc à M. le député Philippe Morel.

M. Philippe Morel (PDC). Merci, Monsieur le président. Nous sommes en face d'un dilemme, en fait, et de deux dynamiques qui sont probablement antagonistes. La première est bien sûr la fluidité du trafic, que nous voulons tous. La deuxième, à laquelle nous ne voulons pas renoncer, est bien sûr la sécurité. Alors il est indiscutable que les feux - rouges, verts, orange - ont amélioré la sécurité. C'est vrai que, comme utilisateur du circuit routier, on voit les feux rouges plus souvent que les feux verts. Mais ils ont indiscutablement amené une sécurité, diminuant très clairement le nombre d'accidents, de blessés et de morts aux carrefours.

L'autre élément, la fluidité du trafic, ne dépend certainement pas uniquement des feux, mais plus de la densité du trafic. Il ne suffit pas de mettre des feux clignotants en ville, à midi ou aux heures de pointe, pour que le trafic soit plus fluide. Il faut qu'il y ait moins de véhicules ou qu'il y ait des «sensors» sur le sol pour que les feux deviennent verts au moment où des véhicules se présentent, respectivement rouges.

Nous voulons donc conserver la sécurité et l'alternative des feux, mais augmenter la fluidité du trafic. Alors quand pouvons-nous l'augmenter ? Cela est dit dans la proposition de motion: la nuit et à certaines heures du jour, ou éventuellement le week-end. Mais c'est justement le moment où il y a peu ou moins de trafic et où le problème de fluidité se pose beaucoup moins. Il est par ailleurs démontré - et ma préopinante l'a dit - que, dans la ville de Lausanne, la tentative de mettre des feux orange clignotants s'est soldée par un nombre de blessés et de morts significativement plus grand, qui a vite interrompu cette expérience.

Nous pensons cependant que des pistes doivent être ouvertes dans la direction d'une augmentation de la fluidité du trafic, tout en conservant la sécurité, et que cette proposition de motion doit être rediscutée, non pas seulement dans l'alternative des feux orange clignotants, mais dans d'autres alternatives qui augmentent la fluidité du trafic sans pour autant diminuer la sécurité des utilisateurs de la route.

M. Stéphane Florey (UDC). Mme Emilie Flamand a parfaitement résumé ce que je voulais dire sur le fond. Effectivement, notre groupe, à l'époque du dépôt de la proposition de motion 1850, s'était empressé de cosigner le texte, tellement l'idée d'une ville sans feux, avec des feux clignotants, nous paraissait l'idée de la législature précédente ! (Rires.) Donc nous nous étions empressés de la signer. Or, comme Mme Flamand l'a également dit, non seulement le principe des feux clignotants ou de la suppression des feux augmentait les accidents - c'était une mesure dangereuse - mais supprimer totalement les feux occasionnait aussi des dépenses supplémentaires, parce que ce serait bien évidemment autant de carrefours à réaménager.

Enfin, Monsieur le président, vous transmettrez ceci au groupe MCG. Je trouve quand même un peu limite de laisser un collègue déposer un texte qui lui paraît si bon que cela alors qu'ils étaient parfaitement au courant de l'ancien débat que nous avons eu. Personnellement, si quelqu'un de mon groupe avait fait cette proposition, je l'aurais fortement déconseillé de la déposer, parce que relancer exactement le même débat que l'on a eu il y a quelques années ne sert strictement à rien. En commission, il a été totalement prouvé que ces mesures étaient dangereuses et ne servaient à rien. C'est pour cela que nous refuserons également cette proposition de motion.

Mme Patricia Läser (R). Mesdames et Messieurs les députés, en effet, cette proposition de motion est semblable à celle de novembre 2010. Néanmoins, il nous semble que certaines pistes pourraient être à nouveau étudiées concernant la fluidité du trafic, par exemple les feux clignotants... (Brouhaha. Le président agite la cloche.) ...pour tourner à droite ou les feux déclenchants lorsqu'une voiture arrive à un feu rouge et qu'il n'y a personne en face. C'est la raison pour laquelle le PLR vous demande de renvoyer cette proposition de motion à la commission des transports.

Le président. Merci, Madame la députée. Mesdames et Messieurs les députés, nous nous prononçons sur le renvoi de la proposition de motion 2058 à la commission des transports.

Mis aux voix à l'appel nominal, le renvoi de la proposition de motion 2058 à la commission des transports est rejeté par 45 non contre 40 oui et 1 abstention.

Appel nominal

Mise aux voix, la proposition de motion 2058 est rejetée par 68 non contre 16 oui et 3 abstentions.

R 688
Proposition de résolution de Mme et MM. Bertrand Buchs, Vincent Maitre, Guillaume Barazzone, Anne Marie von Arx-Vernon, Fabiano Forte, Michel Forni pour une planification cantonale portant sur l'ouverture de nouveaux cabinets médicaux (initiative cantonale)

Débat

Le président. Nous sommes au point 86... (Brouhaha. Le président agite la cloche.) Nous sommes au point 86... (Brouhaha.) S'il vous plaît, Messieurs du MCG, un peu de calme ! Le premier rédacteur et déposant est M. le député Bertrand Buchs, à qui je donne la parole.

M. Bertrand Buchs (PDC). Merci, Monsieur le président. Il est peut-être difficile ou bizarre qu'un médecin qui est un libéral et qui exerce comme libéral demande une planification pour l'ouverture des cabinets médicaux. Cela peut sembler contradictoire, mais ce ne l'est pas. Pourquoi ? Parce que, en 2002, la Confédération a décidé d'une clause du besoin... (Brouhaha. Le président agite la cloche.) De 2002 à 2010... (Brouhaha.)

Le président. Monsieur le député, veuillez m'excuser de vous interrompre. Je prie les députés qui souhaitent avoir des mises au point politiques ou stratégiques de bien vouloir le faire dans l'une des salles attenantes ou d'écouter M. le député Bertrand Buchs. Je vous rends la parole, Monsieur le député.

M. Bertrand Buchs. Merci, Monsieur le président. Je disais que, de 2002 à 2010, le canton a pu faire une planification pour l'ouverture des cabinets, parce que la clause du besoin au niveau fédéral le permettait. Au départ, les médecins étaient contre cette clause du besoin, puis se sont rendu compte qu'elle avait un bon côté, parce que l'Etat a eu l'intelligence d'associer tous les acteurs de la santé dans cette planification. A partir de 2010, les médecins de famille ont pu s'installer sans clause du besoin et, à partir de cette année, tous les médecins peuvent s'installer.

Or que voit-on ? Malheureusement, au niveau des cabinets médicaux, Mesdames et Messieurs les députés, il n'y a pas de concurrence. On peut penser que, en permettant l'installation de multiples médecins, la concurrence va s'installer, les meilleurs vont rester et les moins bons partir. Malheureusement, ce n'est pas le cas, parce qu'il y a un tarif, parce que chaque cabinet médical qui est ouvert coûte beaucoup d'argent; cela montre que, à la longue, les coûts de la médecine flambent. Que se passe-t-il si les coûts de la médecine flambent au niveau cantonal ? Vos primes d'assurance-maladie vont monter.

Pendant les années de la clause du besoin, avec la collaboration du département, on a réussi à avoir une excellente gestion de l'ouverture des cabinets médicaux, qui n'était peut-être pas parfaite mais qui était bonne. Genève a été montré en exemple dans toute la Suisse; on a pris Genève en exemple pour montrer ce que l'on pouvait faire d'intelligent.

Ce ne sont peut-être pas tous les cantons qui ont besoin de planification, mais ce sont principalement les cantons qui ont une frontière, comme Bâle, Zurich ou Genève. Mais il faut laisser aux cantons la possibilité de faire une planification sanitaire. Actuellement, la loi ne le permet pas; c'est Berne qui le fait. Il faut une planification pour les cabinets médicaux. On ne peut pas continuer comme cela. Actuellement, plus de 120 personnes veulent s'installer. Les gens s'installent et il y a une espèce de volonté de certaines cliniques d'ouvrir énormément de cabinets médicaux. Il y a une volonté aussi d'investir énormément d'argent dans la santé. Le résultat est que l'on va avoir une anarchie complète au niveau de la demande, et surtout de l'offre. Faut-il autant de psychiatres que nous en avons à Genève ? Faut-il autant de chirurgiens que nous en avons à Genève ? Les médecins généralistes, les médecins de famille, ont de gros problèmes pour tourner. Il faut quand même se reposer la question de savoir ce qui peut être bien ou mal au niveau des cabinets médicaux et des besoins que l'on a quant aux spécialités.

Voici donc ce qu'il faudrait. C'est d'ailleurs pour cela que, avec cette résolution, nous voulons soutenir le travail de M. le conseiller d'Etat Unger, qui s'est déjà battu à Berne afin de pouvoir obtenir une planification au niveau cantonal. Il est important que nous renvoyions le plus vite possible...

Le président. Il vous faut conclure !

M. Bertrand Buchs. Merci, Monsieur le président. Il est important que nous renvoyions le plus vite possible aux Chambres fédérales cette résolution, pour qu'elles puissent en discuter le plus vite possible.

Mme Christine Serdaly Morgan (S). Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, la clause du besoin est une question complexe, au carrefour de plusieurs autres. D'abord, même si l'on peut considérer la décision de la lever comme mauvaise, elle a été voulue au niveau national dans un concept de planification de la santé. Demander une exception cantonale non seulement ne sera pas simple, mais cela ne fait pas non plus sens, aujourd'hui, dans une politique de la santé qui doit être pensée à tout le moins en termes de région.

Par ailleurs, si plus de cabinets équivaut à plus de coûts, on peut dire oui a priori. Mais l'augmentation aujourd'hui constatée de la demande de droit de pratique ne va pas forcément déboucher sur l'ouverture de cabinets. Un cabinet, Mesdames et Messieurs les députés, c'est aussi une perspective de carrière. (Brouhaha.) Or si les étudiants qui se forment... (Brouhaha. Le président agite la cloche.) Or si les étudiants qui se forment aujourd'hui n'ont plus d'autres visions de leur métier que celle de l'exercer à l'hôpital, on risque de diminuer l'attractivité de la filière et d'accentuer encore la pénurie.

Enfin, ouvrir un cabinet tout seul peut certes contribuer à augmenter les coûts de la santé, mais ce n'est pas la seule manière d'envisager la médecine en cabinet. Il y a d'autres formes qui peuvent émerger, des formes en réseaux, qui peuvent contribuer à transformer les pratiques médicales pour une gestion plus économique de la santé.

N'évaluons donc pas la question tout seuls en la renvoyant à l'Assemblée fédérale, mais renvoyons-la à la commission de la santé de manière à ne pas raisonner tout seuls sur une question nationale, mais à l'évaluer d'abord collectivement.

M. Patrick Saudan (R). Mesdames et Messieurs les députés, les députés du groupe PLR vont également demander le renvoi de cette proposition de résolution à la commission de la santé. Le problème est important, et je remercie mon préopinant, M. Bertrand Buchs, de l'avoir amené dans notre enceinte. Les considérants de cette proposition de résolution sont tout à fait exacts. Depuis 2010 et la levée de la clause du besoin pour les généralistes, beaucoup de praticiens de premier recours de l'Union européenne se sont installés à Genève. Et, depuis janvier 2012, 120 demandes d'installation ont été déposées. Mais il faut savoir que, sur ces demandes d'installation, beaucoup proviennent de spécialistes suisses, en particulier des HUG, qui ont profité de la levée de la clause du besoin pour les spécialistes pour demander leur installation. Il est également vrai que l'accroissement du nombre de cabinets médicaux augmente les dépenses de santé et que certaines ne sont pas justifiées; cela va se reporter sur les primes de nos concitoyens et en provoquer l'augmentation. Il est aussi vrai que l'on admet tout à fait une régulation au niveau hospitalier, par exemple dans la médecine de pointe. Tout le monde en Suisse admet que les transplantations cardiaques, par exemple, ne doivent être pratiquées que dans un ou deux hôpitaux en Suisse. Donc le PLR, a priori, n'est pas opposé à une régulation du secteur privé dans certains domaines.

Alors pourquoi ne pas renvoyer directement cette résolution à Berne ? D'abord - et nous devons rendre hommage au conseiller d'Etat - le conseiller d'Etat a essayé depuis de nombreuses années d'obtenir une clause régionale du besoin, et a cependant essuyé des échecs à la Berne fédérale. Or ce n'est pas en renvoyant rapidement une résolution à l'Assemblée fédérale que nous allons réussir; nous allons juste lui assurer un classement vertical. En effet, comme le dit Mme Serdaly Morgan, ma préopinante, la solution ne peut être que régionale. Genève tout seul n'arrivera pas à fléchir la position de la Berne fédérale. Il faut savoir que les besoins en médecins sont dans certains cantons très différents des cantons frontaliers comme Genève, Bâle ou le canton de Vaud. C'est pour cela que, si l'on veut arriver à une planification intelligente, il nous faut l'accord des associations professionnelles et le soutien d'autres cantons.

Deuxièmement, le parti libéral-radical aborde cette problématique sous un angle un peu différent, qui est aussi celui de la nécessité d'une meilleure information pour les résidents genevois, et suisses en général, sur la qualité de la formation postgraduée des médecins qui s'installent en Suisse. C'est pour cela que nous avons déposé...

Le président. Il vous faut conclure.

M. Patrick Saudan. Je vous remercie, Monsieur le président. Laissez-moi encore une minute. (Rires.) Et c'est pour cela que nous avons déposé une proposition...

Le président. Non !

M. Patrick Saudan. Je parle très peu, Monsieur le président !

Le président. Non !

M. Patrick Saudan. Nous avons déposé une proposition de motion qui rejoint un peu cette problématique et qui est à notre ordre du jour.

Donc oui, c'est une urgence, mais nous préférons renvoyer cette proposition de résolution à la commission de la santé pour qu'elle soit mieux étudiée, juridiquement solide et non en contradiction...

Le président. Je vous remercie, Monsieur le député !

M. Patrick Saudan. ...avec les accords de libre circulation. (Le micro de l'orateur est coupé.)

M. Claude Aubert (L). Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, dans le cadre du duo pédagogique PLR, je vais prendre la parole pour aller et continuer dans le sens de Mme Serdaly Morgan. Il faut savoir qu'il y a plusieurs plans qui s'entrecroisent et qu'il ne faudrait pas prendre le métier de médecin pour un métier en dehors des autres métiers; tout ce qui est de l'ordre de la libre circulation touche aussi bien la médecine que d'autres métiers. Par conséquent, il faut distinguer deux plans qui sont vraiment différents.

D'une part, un médecin en Suisse peut parfaitement demander un droit de pratique, s'installer et pratiquer sa profession à titre libéral, c'est-à-dire qu'il peut pratiquer sans être forcément à charge de l'assurance-maladie. Par conséquent, vous pouvez vous installer comme médecin et être libre praticien, dans mon idéal - qui est un monde PLR bien évidemment... (Rires.) Dans le monde PLR, la concurrence devrait pouvoir jouer comme pour n'importe quel autre métier.

En ce qui concerne l'aspect LaMal, cela signifie que, quand vous vous installez, vous pouvez vous installer à charge de la LaMal. L'écrasante majorité des médecins est à charge de la LaMal. Mais on n'est alors plus dans un métier que l'on appellera libéral, parce que le médecin n'assume en fait pas complètement les réalités économiques de sa profession.

Donc nous sommes intervenus - la Fédération des médecins suisses - au niveau de Berne, à l'époque auprès de Mme Dreifuss, pour faire remarquer qu'il est certes possible d'utiliser la libre circulation des personnes, bien sûr, mais que cela ne se passe ainsi dans aucun pays européen, directement, parce que tous les pays annoncent quelques obstacles pour l'installation. Par exemple, en Italie, je sais qu'il faut passer un examen de médecine légale, c'est-à-dire montrer que l'on connaît un certain nombre de choses. Autrement dit, chaque pays met une sorte de cautèle.

Par conséquent, il s'agirait de savoir où mettre la régulation. La régulation doit-elle se faire au niveau des médecins qui sont agréés pour travailler à charge de l'assurance-maladie, charge aux autres médecins de travailler autrement ?

Le président. Il vous faut conclure, Monsieur le député.

M. Claude Aubert. Dans ma conclusion, conformément à ce qu'a dit mon préopinant, nous demandons le renvoi en commission, parce qu'il faut que la flèche soit vraiment affûtée et acérée et que l'on ait cerné exactement ce que l'on veut demander aux Chambres fédérales. Donc nous demandons le renvoi en commission.

Mme Esther Hartmann (Ve). Je vais être la deuxième personne à prendre la parole ce soir à ce sujet, je crois, qui ne sera pas médecin. (Remarque.) Pour le moment ! Je vais donc avoir le point de vue de la patiente qui va voir le médecin. Si j'ai un grave problème de santé et que je me retrouve par exemple chez un neurochirurgien, je préfère savoir que mes frais de santé sont couverts par la LaMal plutôt qu'ils ne le soient pas. Autrement, j'aurais un problème pour me faire opérer, je pense, vu les frais que j'encourrais en raison d'une opération.

Maintenant, l'attitude de certains et ce que j'entends me rendent quand même assez perplexe. Au niveau fédéral, on parle constamment de réduction des frais de santé. On nous parle de managed care, on supprime le remboursement des frais de lunettes, on conseille aux gens de rester le moins possible à l'hôpital, on exerce des pressions sur les hôpitaux pour que les séjours hospitaliers soient de plus en plus brefs... Et tout d'un coup, en janvier 2012 - paf ! - voilà que l'on peut faire autant de cabinets médicaux que l'on veut, et voici donc que les primes risquent de nouveau de s'envoler et que, grâce à la libre entreprise, tous ces efforts conjugués - d'ailleurs promulgués en partie aussi par le parti libéral-radical à Berne - se trouvent un peu contredits.

Je suis pour une certaine cohérence. Je prône une certaine régulation aussi pour les cabinets médicaux. En conclusion, les députés Verts vont soutenir la résolution du PDC et le renvoi direct aux Chambres fédérales. Perdre du temps dans la situation actuelle - si urgente - par rapport aux risques d'explosion des frais de la santé à Genève, c'est de l'inconscience. Nous ne soutiendrons pas le renvoi à la commission de la santé. (Quelques applaudissements.)

M. Patrick Lussi (UDC). Comme a dit ma préopinante, je serai peut-être le troisième non-médecin à m'exprimer et, à titre peut-être de futur patient potentiel... (Brouhaha.) ...j'aimerais dire deux choses. La première n'est pas fréquente. Je sais que le parti démocrate-chrétien et M. Unger en particulier ont toujours eu beaucoup de souci à défendre M. Tout-le-monde, M. De-la-rue, à ce sujet. Cette proposition de résolution, pour nous - c'est peut-être là que vous serez moins d'accord, Monsieur le conseiller d'Etat - est un peu la réalité que l'on n'ose pas dire. En effet, on a en somme prévu il y a trois ans une clause du besoin. Quand il y a eu ces ouvertures, cette clause du besoin s'est effacée, vu les délais. Puis maintenant, on s'aperçoit que, sans cette clause du besoin, cela ne fonctionne pas; vous l'avez clairement dit, je vous en remercie. J'aurais juste aimé que vous en disiez un peu plus sur les causes et les autres remèdes.

Je n'irai pas plus loin, parce que tout a été dit, mais je reviendrai simplement, Mesdames et Messieurs les députés, sur le fait de renvoyer en commission une évidence pour remettre ce qui est en place. Voici ce que dit l'invite et ce que demande cette proposition de résolution: «elle invite le Conseil d'Etat à demander aux Chambres fédérales de permettre aux cantons, qui le désirent, de pouvoir mettre sur pied une planification portant sur l'ouverture de nouveaux cabinets médicaux.» On refait pareil ! Pourquoi reprendre cela en commission ? Pourquoi faire venir une armada de juristes pour cela ? Mesdames et Messieurs les députés, l'UDC vous invite à accepter cette résolution et à la renvoyer directement à Berne.

Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à Mme la députée Christina Meissner, à qui il reste une minute et trente secondes.

Mme Christina Meissner (UDC). Merci, Monsieur le président. Beaucoup de choses ont été dites, surtout par mon préopinant. Il faut simplement aussi admettre la réalité: l'ouverture des frontières implique une concurrence rude, extrêmement rude, qui va du bas en haut de l'échelle sociale, qui touche tout le monde, y compris les médecins ! Voilà le problème. Avec cette proposition de résolution, on n'ose pas dire que le problème est en fait qu'il y a trop de concurrence qui vient d'ailleurs et que - qui sait ? - ces médecins sont peut-être même meilleurs que les nôtres. Alors on s'attaque à la formation, on cherche des artifices. Mais admettons-le, la situation actuelle est telle que la concurrence, pour nous Suisses, nous Genevois, que l'on soit médecin ou pas, est terrible. Les bilatérales nous ont apporté un problème terrible. Et s'il faut trouver des artifices pour arriver, d'une manière ou d'une autre, à préserver des emplois aux résidents, ma foi, admettons que l'on peut approuver ces artifices. Mais, à un moment donné, il faudra bien admettre que cette libre circulation des personnes est un problème pour tous, et il faudra trouver des moyens d'y pallier.

Le président. Il vous faut conclure, Madame la députée.

Mme Christina Meissner. Je crois même que M. Sarkozy dit la même chose. (Brouhaha.)

Le président. Merci, Madame la députée. La parole est à M. le député Mauro Poggia.

M. Mauro Poggia (MCG). Je vous remercie, Monsieur le président. J'avais demandé à prendre la parole quand je n'avais entendu que des médecins. Je voulais quand même que ceux qui nous écoutent sachent que c'est une question qui préoccupe l'ensemble de la population. Je dirai aux médecins concernés que je suis heureux de les avoir entendus. J'aimerais qu'ils écoutent avec la même attention lorsqu'il y a des spécialistes de la sécurité qui s'expriment et qu'ils viennent de nos rangs.

Cela dit, en ce qui concerne cette résolution, nous considérons qu'elle doit effectivement être renvoyée directement à Berne pour être examinée, avec peu d'espoir d'un quelconque effet, mais peut-être d'autres cantons se joindront-ils à nous dans cette démarche. Il est vrai que la clause du besoin avait été critiquée. Je suis heureux de voir que même les libéraux considèrent qu'il y a peut-être des dysfonctionnements de la libre concurrence. Ce n'est pas parce que c'est un médecin qui s'est exprimé... J'imagine que c'est un fin observateur du système de la santé helvétique qui s'exprime. Il y a effectivement un problème. Nous le savons, l'ouverture de cabinets va engendrer une hausse des coûts de la santé. On peut se demander pourquoi, mais c'est ainsi. Je dirais presque que c'est naturel, même si cela implique, implicitement, que les nouveaux médecins installés auraient tendance à créer le besoin. Quoi qu'il en soit, c'est ainsi.

Qui a demandé que l'on arrête cette clause du besoin ? Pas les patients, que je sache. Pas les professionnels de la santé. Pourquoi, finalement, cette décision a-t-elle été prise ? Peut-être pour faire augmenter les coûts de la santé, puisque, quand les coûts de la santé augmentent, la réaction va finalement être de diminuer les prestations. Et devinez qui va gagner lorsque l'on va diminuer les prestations à charge de l'assurance sociale ? Ce sont évidemment ceux qui vont offrir de l'autre main ce que l'on retient de l'une. Donc ceux qui ont intérêt à ce que le système ne fonctionne pas, ou plutôt qu'il devienne insupportable financièrement, sont «les croque-morts» de l'économie de la santé - croque-morts pas pour tout le monde, bien sûr - ceux qui attendent précisément que nous soyons exsangues pour venir nous proposer, à ceux qui en ont la possibilité, évidemment pas à tout le monde, des assurances complémentaires très chères qui viendront se substituer à ce qu'on leur a enlevé de l'assurance de base. Alors c'est une préoccupation.

Vous savez que, pour moi, la solution est ailleurs. Elle viendra, j'espère dans un avenir pas trop lointain. Le système est malheureusement gangrené, parce que ceux qui ont le pouvoir ici ne sont plus ceux qui dirigent notre pays, mais ceux qui ont intérêt à faire de l'argent dans ce système. Alors nous pouvons effectivement nous en plaindre, nous devons nous en plaindre, mais sachant bien évidemment que cela fera autant de bruit que lorsqu'un poisson rouge s'excite dans un bocal.

Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à M. Philippe Morel, à qui il reste trois minutes.

M. Philippe Morel (PDC). Merci, Monsieur le président. J'ai craint que le poisson rouge dont on vient de parler ne devienne un requin et que les poissons rouges, eux, soient les patients. Oui, je suis médecin... Non, pardon: je suis chirurgien. Mais c'est en fait en termes de patient que je vais m'exprimer ce soir, parce que je suis effrayé. Je suis effrayé de voir le potentiel d'augmentation du nombre de médecins dans notre canton et que, potentiellement, la qualité va diminuer. Bien sûr que le nombre appelle la prestation d'actes plus nombreux; je suis effrayé par cette pléthore. Je suis effrayé par l'impossibilité de planifier ce qui va nous arriver. La Société suisse d'anesthésiologie et de réanimation a soigneusement planifié ce qui allait arriver en Suisse dans les dix ans qui viennent. Actuellement, je suis président de la Société suisse de chirurgie. Nous planifions soigneusement pour essayer d'avoir une adéquation entre le nombre de médecins et de chirurgiens formés et les besoins de la population. Evidemment que, si l'on se trouve avec une inconnue aussi importante que celle que l'on est en train d'évoquer maintenant, c'est-à-dire l'afflux important de médecins étrangers, la planification est impossible; nous savons tous ce que cela implique sur les coûts de la santé d'une part, sur la qualité des prestations d'autre part, ainsi que sur la désorientation des patients face aux nombreux soins de santé entre lesquels ils auront le choix. Je suis donc effrayé.

Je pense que, tôt ou tard, une réglementation viendra. Si elle ne vient pas aujourd'hui, elle viendra plus tard. Or je pense que, plus tard, cela signifiera des problèmes pour les patients et une baisse claire de la qualité, avec une augmentation totalement intolérable des coûts. Je pense donc que ce premier coup d'épée, pour reprendre la comparaison du début, s'il est dans l'eau, risque tout de même d'avoir un effet initiateur sur un mouvement qui devra, à terme, réguler l'afflux des médecins et l'installation des cabinets, tout en conservant totalement l'aspect libéral de notre profession. L'un et l'autre me paraissent parfaitement compatibles. Je pense donc qu'il faut renvoyer cette proposition au Conseil d'Etat pour la Berne fédérale.

Le président. Merci, Monsieur le député. Monsieur le député Stauffer, votre groupe a épuisé son temps de parole. (Remarque.) Je donne la parole à M. le président du Conseil d'Etat Pierre-François Unger.

M. Pierre-François Unger, président du Conseil d'Etat. Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, cette proposition de résolution est importante. En effet, lors de la libéralisation de la médecine de premier recours, il y a deux ans, qui concerne donc en gros les généralistes et les pédiatres, on a vu s'accroître de manière énorme, proportionnellement, les dépenses à charge de ce type de spécialistes - et en ville. Il y a donc une relation de causalité tout à fait claire, alors même que l'on ne peut pas dire que, avant 2010, on ait été dans une situation de pénurie, qui générait par exemple des files d'attente pour les généralistes ou pour les internistes.

Parallèlement, et curieusement, les dépenses ont explosé mais les revenus des mêmes spécialistes ont fondu, parce que évidemment que, en devenant plus nombreux, ces médecins devaient «diluer» un peu, si j'ose dire, leurs revenus. Cela pousse à générer un certain nombre d'actes dont l'utilité n'est pas forcément démontrée.

Entre le 1er janvier de cette année et le 29 février, ce sont 182 droits de pratique qui ont été donnés - 182 droits de pratique ! - deux tiers pour des Suisses et un tiers pour des étrangers, qui sont déjà là ou qui sont en train d'arriver. Mais ce sont des chiffres énormes, lorsque l'on sait que, en gros, le coût généré à charge de l'assurance obligatoire de soins par un médecin qui s'installe est de l'ordre de 300 000 F ou 350 000 F par année ! Vous imaginez un peu la charge supplémentaire qui va être imposée aux assurés, naturellement, et à l'Etat d'autre part.

Alors cette proposition de résolution dit une chose de bon sens. Je suis d'accord, Madame Serdaly Morgan, qu'il faut avoir une vue plus systémique que cela. Mais, au niveau d'un canton comme Genève, nous avons un tiers de toutes les installations de Suisse, pendant la période. Ce n'est pas tolérable dans le canton qui est d'ores et déjà le plus onéreux pour les pouvoirs publics et pour chacun des assurés de ce canton. Il est donc urgent que l'on puisse discuter au niveau suisse, bien sûr, parce que la libération de la clause du besoin n'a pas du tout réglé les problèmes de désertification médicale auxquels on assiste dans d'autres régions de Suisse, mais cela nous indique simplement qu'il faut pouvoir s'organiser à l'échelle d'une région entre ceux qui manquent de médecins et ceux qui en ont un excès.

En effet, même le très libéral Claude Aubert, que je côtoie depuis bientôt quarante ans, reconnaît que la médecine n'a plus de libéral que le nom. Quand l'assurance est obligatoire, que les tarifs sont fixés et que le point TARMED n'a pas bougé à Genève, malgré les injonctions de M. Prix, qui voulait le baisser de 15% - de 15% ! - on est dans un système clos, fermé, et, pour les gens qui exercent à charge de l'assurance obligatoire de soins, nous ne sommes pas dans un système libéral. N'étant pas dans un système purement libéral, nous devons pouvoir réguler l'offre, de telle manière que les gens puissent encore s'assurer.

Alors que cet objet fasse un détour par la commission de la santé ou qu'il aille directement à Berne, ce problème doit être traité vite. En effet, lorsque ces médecins se seront installés - ce sont peut-être 200 maintenant, peut-être 400 à la fin de l'année - plus jamais il ne sera possible de revenir en arrière sur les coûts qui auront été induits par leur installation. C'est donc rapidement qu'il faut donner la possibilité aux cantons et aux régions de s'organiser entre elles pour assurer tout à la fois l'accès aux soins à chacun sur ces territoires, mais sans excès des soins dans aucune partie du territoire.

Le président. Merci, Monsieur le président du Conseil d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, nous sommes saisis d'un amendement de M. Eric Stauffer pour ajouter une deuxième invite ainsi conçue: «à appliquer les mêmes principes pour le secteur tertiaire contre l'afflux massif de frontaliers... (Exclamations.) ...et afin de protéger la population résidente comme les médecins.» Monsieur Stauffer, je vous donne une minute pour présenter votre amendement, une et pas plus.

M. Eric Stauffer (MCG). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, le MCG est enchanté aujourd'hui d'entendre le PDC et le PLR venir dire qu'il faut protéger les médecins résidents contre l'afflux des médecins français qui viendraient s'installer à Genève. Nous le disons, Mesdames et Messieurs, depuis six ans ! Protégeons la population résidente ! C'est pour cette raison que, sans états d'âme, nous soutiendrons votre texte - et je retire ma demande de renvoi en commission.

Si vous pouviez avoir la même énergie, Mesdames et Messieurs, pour défendre les chômeurs, qui doivent avoir priorité sur l'emploi avant et envers les frontaliers, lesquels arrivent de plus en plus nombreux et causent des dégâts considérables dans le canton de Genève, la population vous en rendra grâce. Nous, c'est ce que nous continuerons à faire, très humblement, pour servir le peuple qui nous a portés aux fonctions que nous occupons.

Une voix. Bravo !

Le président. Monsieur le député, je n'ai pas bien compris si vous retiriez la demande de renvoi ou l'amendement. (Commentaires.) D'accord. Alors nous allons d'abord voter sur cet amendement, puis sur le renvoi de cette proposition de résolution. Nous nous prononçons donc sur l'amendement que je vous ai lu...

M. Eric Stauffer. Vote nominal ! (Appuyé.)

Mis aux voix à l'appel nominal, cet amendement est rejeté par 72 non contre 12 oui.

Appel nominal

Le président. Nous avons été saisis d'une demande de renvoi à la commission de la santé, sur laquelle nous nous prononçons.

Mis aux voix, le renvoi de la proposition de résolution 688 à la commission de la santé est rejeté par 45 non contre 41 oui.

Mise aux voix, la résolution 688 est adoptée et renvoyée au Conseil d'Etat par 67 oui contre 1 non et 13 abstentions. (Quelques applaudissements à l'annonce du résultat.)

Résolution 688

Le président. Mesdames et Messieurs les députés, nous allons traiter, à huis clos, le RD 925 au sujet de l'opposition formée par M. Eric Stauffer contre la décision du Bureau du Grand Conseil du 28 février 2012 le sanctionnant d'une exclusion de cinq mois des commissions dont il est membre. (Brouhaha.) En conséquence, je demande au Conseil d'Etat de bien vouloir se retirer, aux personnes qui sont à la tribune de bien vouloir la quitter, aux huissiers de fermer les portes et à Mme la mémorialiste de couper les micros et la retransmission sur Léman Bleu et sur notre site internet. Le temps que ce soit fait techniquement et que deux collaborateurs du Secrétariat général me fassent signe, et nous pourrons passer à la discussion à huis clos.

La séance publique est levée à 21h53.

Le Grand Conseil continue de siéger à huis clos.

RD 925
Opposition formée par M. STAUFFER Eric contre la décision du Bureau du Grand Conseil du 28 février 2012 le sanctionnant d'une exclusion de cinq mois des commissions dont il est membre (huis clos)

L'opposition est rejetée.

Cet objet est clos.

La séance est levée à 22h15.