République et canton de Genève

Grand Conseil

PL 10785-A
Rapport de la commission des finances chargée d'étudier le projet de loi du Conseil d'Etat autorisant le Conseil d'Etat à aliéner la parcelle 2120, de la commune de Genève, section Petit-Saconnex

Premier débat

M. Pierre Weiss (L), rapporteur ad interim. Je n'ai pas grand-chose à ajouter à cet autre excellent rapport, sinon que mes grands-parents paternels habitaient au Petit-Saconnex. Je suis très favorable à tout ce qui concerne le Petit-Saconnex. (Commentaires.)

Le président. Merci, Monsieur le...

M. Pierre Weiss. Et le Grand-Saconnex aussi !

Le président. Merci pour ce cours d'histoire, Monsieur le rapporteur ! La parole est à Mme la députée Lydia Schneider Hausser.

Mme Lydia Schneider Hausser (S). Mesdames et Messieurs les députés, il est clair que le groupe socialiste est en faveur du développement de l'Institut de hautes études internationales et du développement. La preuve: lorsque nous avions traité ce dossier, j'avais été rapporteuse de majorité de la commission des travaux. A l'époque, on nous avait parlé d'un plan public-privé où la Confédération et le canton étaient partenaires. Mais on avait omis de nous dire que, pour participer à ce plan, l'Etat allait vendre des terrains. Or vous savez ce que pense le parti socialiste de l'aliénation des terrains de l'Etat. Nous venons de voter, il y a peu de temps, un achat; quand l'Etat achète, on le voit, cela coûte des fortunes par rapport à ce que l'ancien propriétaire a acheté et on est prêt à faire des efforts dans ce sens-là.

Par contre, le parti socialiste n'est pas prêt à faire des efforts pour vendre ces terrains et vendre les terrains de l'Etat, d'autant moins que ce serait là une vente pour qu'un autre propriétaire de la parcelle puisse mettre cette dernière en droit de superficie. Donc quid de la possibilité pour l'Etat d'établir, lui, un droit de superficie ? La question se pose, car c'est quand même pour une école, donc pour un équipement public à destination des Genevois et des Confédérés, voire aussi d'une population estudiantine beaucoup plus large, vu que nous souhaitons un rayonnement beaucoup plus étendu pour l'Institut des hautes études internationales et du développement. Par conséquent, le parti socialiste refusera ce projet de loi.

M. Pierre Weiss (L), rapporteur ad interim. Monsieur le président, sur ce projet de loi, j'avais imaginé, probablement par optimisme, que le parti socialiste en serait resté aux abstentions qui avaient caractérisé le vote de ses représentants en commission des finances. S'ils s'étaient abstenus, c'est précisément parce qu'ils avaient entendu ce qui s'était dit lors de l'audition de représentants de la Fondation Wilsdorf.

Pourquoi y a-t-il eu cet accord et pourquoi s'est-il fait ainsi ? C'est précisément parce que c'est la garantie pour la collectivité publique et pour l'IHEID que le terrain sera dans les plus brefs délais mis à disposition du développement de la formation supérieure à Genève. Voilà la raison qui amène à cette solution, qui a été adoptée par tous les partis, sans opposition en commission des finances !

Voilà la raison pour laquelle je plaide encore devant vous, chers collègues du parti socialiste, vous qui êtes généralement favorables au développement de la formation, sauf exception, et qui, en cette occasion, devriez continuer à le manifester, au minimum à vous abstenir, en prenant encore rapidement connaissance des excellentes explications du rapport de M. Cuendet. Il en va de la façon dont on agit face à la place de la formation supérieure à Genève. Il en va là de notre réputation. Il en va aussi de la rapidité de la mise en oeuvre d'un projet nécessaire !

M. Eric Stauffer (MCG). Mesdames et Messieurs les députés, c'est vrai que nous avons traité de ce projet de loi en commission des finances... (Sonnerie du téléphone portable de l'orateur. Commentaires.) Excusez-moi, cela arrive toujours quand il ne faut pas ! (L'orateur coupe la sonnerie.) Je l'avais dit à la commission des finances, je vais le répéter ici: lorsque Genève a la chance d'avoir une fondation telle que Wilsdorf, avec ce qu'elle a fait pour la collectivité, j'aimerais dire à nos amis socialistes qu'il n'y a qu'un mot qui me vient aujourd'hui à l'esprit: merci à la Fondation Wilsdorf. Et je ne comprends pas pourquoi les socialistes s'opposent à ce projet de loi. On parle de l'IHEID. Je suis désolé, vous ne pouvez pas, éthiquement, politiquement, vous opposer à ce projet de loi. Encore une fois, au nom du groupe MCG, je remercie la Fondation Wilsdorf de tout ce qu'elle a fait et, je l'espère, continuera à faire pour le canton de Genève.

Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à M. Christian Bavarel. Voulez-vous vraiment la parole ?

M. Christian Bavarel (Ve). Monsieur le président, si vous me l'offrez - avec un plaisir non dissimulé - je la prends.

Mesdames et Messieurs les députés, les Verts soutiendront ce projet de loi. On entend que, à certains moments, on pourrait souhaiter que le canton reste propriétaire de son sol. Mais vous voyez à peu près comment sont montées les parcelles dont on parle, qui sont en bordure des voies de chemin de fer: une partie est sur terrain CFF, une autre est sur terrain fédéral, et il y a avait un petit bout sur terrain cantonal. Le choix qui a été fait ici est d'avoir une seule parcelle, unique, dans les mêmes mains. C'est une chose sur laquelle nous pouvons trouver un accord. Nous estimons que cela fonctionne. Surtout, c'est la finalité de l'opération qui nous semble importante.

Effectivement, à Genève, ville internationale, avoir un institut tel que l'IHEID, c'est d'une très grande importance, et pour la Genève internationale, et pour la formation des étudiants. Nous pensons que l'un des plus beaux métiers de Genève est celui de la Genève internationale. Je rappelle que c'est un métier qui est difficile: lorsque vous voulez faire la paix entre deux personnes qui se font la guerre - et dans les affaires gérées à l'ONU, on parle de guerres avec des millions de morts - eh bien, au mieux vous avez un salopard qui est un gentil - ça c'est dans les bonnes situations - mais, souvent, vous pouvez trouver deux salopards. Ce sont des choses qui arrivent aussi. Et le métier de Genève est de réunir tous ces gens-là pour empêcher qu'il y ait des dégâts.

Dans ce contexte-là - dans les contextes internationaux - nous avons cette chance d'avoir un institut universitaire qui forme non seulement des diplomates, mais aussi des politologues et différentes personnes qui vont pouvoir travailler dans ce contexte, ainsi que des gens qui s'occupent de développement. Nous en sommes fiers. Et nous sommes fiers de voir que, à Genève, nous pouvons appuyer ce type de démarches.

Aujourd'hui, il y a un très beau projet d'un point de vue tant architectural qu'académique. Nous n'entendons faire qu'une seule chose: le soutenir, aider à ce qu'il se réalise le plus rapidement possible. C'est pour cela que nous acceptons qu'une partie du sol parte dans une fondation privée, mais avec un droit de superficie et différentes choses. Surtout, ce qui compte c'est qu'à cet endroit-là puisse se réaliser cette université. Voilà vraiment l'essentiel.

M. Gabriel Barrillier (R). Chers collègues, c'est en qualité de député mais aussi d'ancien étudiant de HEI que je m'exprime. Alors je ne sais pas si l'article 24 s'applique après cinquante ans... (Exclamations.) Quarante ans... (Commentaires.) Quarante ans, voilà !

Je poursuis sur la lancée de mon collègue Bavarel en vous rappelant que l'Institut des Hautes études internationales et du développement est vraiment l'artisan de procédures de paix. Il est basé sur l'interdisciplinarité et a permis, depuis 1925-1926, de fournir, d'alimenter les organisations internationales, à commencer par la SDN. Bon, les plus jeunes parmi nous ne voient peut-être pas très bien ce dont il s'agit... (Commentaires.) L'Institut était le premier lieu de formation de diplomates rompus à la négociation multilatérale. Donc c'est un institut qui est voué à la recherche de la paix.

Je m'étonne beaucoup de ce que nos amis socialistes, pour différentes raisons - parce que c'est Wilsdorf, une institution privée, qui finance ? - s'opposent à cet investissement, à cette participation. C'est un mauvais signal, chers collègues socialistes, que vous donnez à la Genève internationale et à vos concitoyens. Je souhaiterais que vous puissiez changer d'avis dans les quelques secondes qui vont s'écouler avant le vote.

Donc je vous invite, chers collègues, à adopter ce projet de loi, parce que, encore une fois, HEI c'est vraiment le fondement, l'un des fondements de la Genève internationale. Je vous remercie.

M. Roger Deneys (S). Mesdames et Messieurs les députés, je crois qu'il ne faut pas exagérer non plus l'importance de l'opposition socialiste ce soir. Chaque cas est différent ! Mais, nous l'avons rappelé tout à l'heure, pour les socialistes, la maîtrise du foncier est essentielle pour le développement d'une agglomération qui se fait en dehors de la spéculation et de la surenchère dans l'immobilier. Ici, il s'agit d'un institut universitaire. Donc cela échappe à cette règle commune.

En même temps, la pesée d'intérêts fait que, pour certains socialistes, c'est prioritairement la maîtrise foncière par la collectivité publique plutôt que par une entité comme Wilsdorf, quels que soient ses bienfaits - parfois relatifs pour moi, mais c'est mon jugement personnel dans certains dossiers - qui fait que les socialistes penchent pour la maîtrise foncière publique. Cela ne remet en question ni l'intérêt que nous portons à l'Institut universitaire, ni la volonté de développer ses activités, et cela ne remet fondamentalement pas en cause le travail de Wilsdorf à Genève. C'est une pesée d'intérêts. Je pense qu'il faut en prendre acte. C'est bien d'avoir relevé que, pour vous, c'était aussi possible de le faire avec Wilsdorf.

M. Guy Mettan (PDC). A l'inverse de mon collègue Barrillier, je n'ai pas fait de licence, mais qu'une demi-licence HEI... (Remarque.) Et c'est déjà pas mal ! C'est déjà pas mal. J'ai ensuite fait ma licence à l'Université, pour avoir les deux formations.

Qu'est-ce qui est important dans ce projet ? C'est qu'on est en train de créer un nouveau campus international autour d'un bâtiment qui, pour celles et ceux qui ont déjà pu avoir la chance de le voir, s'avère effectivement de toute beauté. Le projet qui sera construit à cet emplacement est d'une grande originalité architecturale. Et l'on sait aussi qu'il est important, pour des projets universitaires de ce genre, de pouvoir les incarner dans une enveloppe physique, dans un bâtiment qui transcende un peu ce que l'on peut voir... (Remarque.) ...à l'image, effectivement, du Rolex Learning Center de l'EPFL. Le bâtiment qui vous est proposé sur cette parcelle sera d'une qualité égale - même s'il est un peu plus petit - à celle du Learning Center de l'EPFL. Pour Genève, je trouve que c'est une innovation et un projet d'importance majeure.

Celles et ceux qui passent tous les jours par l'avenue de France - c'est mon cas - ont pu constater que les bâtiments en bois qui abritaient les requérants d'asiles ont déjà été démontés, que les tracks et les camions s'activent déjà, que les rails ont été démontés et que le projet avance rapidement; donc je ne peux que vous encourager à accepter ce projet de loi qui, en même temps, incarne et cristallise un partenariat public-privé, puisque la Fondation Wilsdorf est une institution privée. Je crois que, à ce titre aussi, ce projet mérite d'être soutenu.

Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à M. le député Roberto Broggini, à qui il reste quarante-cinq secondes.

M. Roberto Broggini (Ve). Je serai très bref, Monsieur le président. Je regrette simplement que nous n'ayons pas conclu un contrat de droit de superficie sur ces parcelles, pour que l'Etat de Genève puisse continuer à être maître de son terrain dans trente ou soixante ans. On ne sait pas ce que l'avenir nous dira. C'est pour cela que je m'abstiendrai. Mais, bien entendu, je ne suis absolument pas contre la réalisation de cette opération.

M. Pierre Weiss (L), rapporteur ad interim. J'ai pris acte du fait que tout le monde est favorable au développement de l'Institut. J'ai pris acte du fait que la plupart d'entre nous sont favorables à cette solution qui, en fait, représente un partenariat public-privé.

Il y a un dernier argument qui devrait pourtant être cher aux socialistes, et je m'étonne, soucieux comme ils le sont de la bonne gestion de l'Etat, qu'ils ne l'aient pas relevé eux-mêmes. Si cette solution proposée par la Fondation Wilsdorf était refusée, cela signifierait simplement que la Fondation économiserait 3,2 millions et que ce serait à l'Etat de mettre cet argent. Alors voulez-vous simplement aujourd'hui, par votre geste, montrer que vous préférez une solution qui amènerait l'Etat à dépenser 3,2 millions simplement pour le plaisir d'un dogme ?! Voilà en fait la façon dont vous réfléchissez. Voilà la façon dont il convient de dire aux citoyens de Genève que vous réfléchissez. Voilà comment d'autres, en réalité, dans ce parlement, ne réfléchissent pas, parce qu'ils préfèrent que ce soient des privés qui fassent un cadeau à l'IHEID plutôt que ce soit les contribuables qui doivent mettre ces 3,2 millions pour un projet qui doit de toute façon être réalisé ! Voilà la raison pour laquelle le refus de ce projet de loi par une minorité est quelque chose que j'ai de la peine à comprendre. Parce que c'est au détriment des intérêts de la collectivité publique !

Une voix. Bravo !

Le président. Merci, Monsieur le rapporteur. La parole est à Mme la députée Anne Emery-Torracinta, à qui il reste vingt secondes.

Mme Anne Emery-Torracinta (S). Monsieur Weiss, cela ne sert à rien de monter sur vos grands chevaux ! L'Etat n'aurait pas perdu 3,2 millions si ce projet avait été refusé: il n'aurait simplement pas gagné ces 3,2 millions. C'est un peu différent !

Le président. Merci, Madame la députée. Mesdames et Messieurs les députés, la parole n'étant plus demandée, nous procédons au vote d'entrée en matière.

Mis aux voix, le projet de loi 10785 est adopté en premier débat par 73 oui contre 1 non et 7 abstentions.

L'article unique de la loi 10785 est adopté en deuxième débat et en troisième débat.

Mise aux voix, la loi 10785 est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 66 oui contre 9 non et 8 abstentions.

Loi 10785