République et canton de Genève
Grand Conseil
Séance du vendredi 27 mai 2011 à 20h45
57e législature - 2e année - 8e session - 48e séance -autres séances de la session
La séance est ouverte à 20h45, sous la présidence de M. Renaud Gautier, président.
Assistent à la séance: Mmes et MM. Pierre-François Unger, Charles Beer, Isabel Rochat et Michèle Künzler, conseillers d'Etat.
Exhortation
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, prenons la résolution de remplir consciencieusement notre mandat et de faire servir nos travaux au bien de la patrie qui nous a confié ses destinées.
Personnes excusées
Le président. Ont fait excuser leur absence à cette séance: MM. Mark Muller, président du Conseil d'Etat, David Hiler et François Longchamp, conseillers d'Etat, ainsi que Mme et MM. Guillaume Barazzone, Antoine Droin, Pierre Losio, Philippe Morel, Brigitte Schneider-Bidaux et Manuel Tornare, députés.
Discussion et approbation de l'ordre du jour
M. Eric Bertinat (UDC). Chers collègues, je vous demande d'inscrire en urgence, bien que ce soit au dernier moment, le point 176, soit le rapport du Conseil d'Etat RD 872 «relatif aux états financiers consolidés pour l'exercice 2010». Le but n'est pas d'en discuter mais de le renvoyer à la commission des finances, qui doit s'en saisir la semaine prochaine.
Le président. Merci, Monsieur le député. Nous nous prononçons sur cette demande.
Mis aux voix, le traitement en urgence du rapport du Conseil d'Etat RD 872 est adopté par 44 oui (unanimité des votants).
Annonces et dépôts
Néant.
Le président. Mesdames et Messieurs, histoire de continuer avec les entorses au règlement, je vous propose de voter tout de suite le renvoi de ce rapport du Conseil d'Etat en commission, ce qui nous épargnera d'y revenir tout à l'heure.
Mis aux voix, le renvoi du rapport du Conseil d'Etat RD 872 à la commission des finances est adopté par 51 oui (unanimité des votants).
Débat
Le président. Mesdames et Messieurs, nous traitons ce point en urgence. (Brouhaha. Le président agite la cloche.) C'est un débat de catégorie II: trois minutes par groupe. La parole est au premier signataire, M. le député Christo Ivanov.
M. Christo Ivanov (UDC). Mesdames et Messieurs les députés, la présente proposition de motion demande la réalisation d'un park and ride sur le territoire du Grand-Saconnex, à proximité de la jonction autoroutière de Ferney-Voltaire. Il s'agit là de réaliser un maillon essentiel et complémentaire aux deux projets de lois votés par ce parlement: le premier, sur l'extension et le prolongement du tram depuis la place des Nations, via le Grand-Saconnex et Ferney-Voltaire; le deuxième, sur la réalisation de la route des Nations, depuis l'OMC jusqu'à l'autoroute.
L'implantation d'un park and ride à cet endroit stratégique est capitale. Elle l'est d'abord pour les habitants du Grand-Saconnex, qui ne supportent plus ce trafic de transit de plus de 100 000 véhicules par jour. Il s'agit bien évidemment de diminuer ce trafic pendulaire, qu'il soit français mais surtout vaudois, en utilisant les transports en commun et en favorisant le transfert modal. L'autoroute de contournement est aujourd'hui plus que saturée. Et la traversée de la rade, ce n'est pas avant 2030. D'ici à dix ans, le trafic devrait quasiment doubler dans cette commune. L'implantation d'un P+R dans cet endroit stratégique permettra également aux visiteurs de Palexpo et de l'Arena d'en profiter.
Il s'agit donc d'anticiper ces continuelles augmentations de trafic, et c'est pour les raisons exposées, Mesdames et Messieurs les députés, que je vous demande de bien vouloir voter et accepter cette proposition de motion.
M. Gabriel Barrillier (R). Chers collègues, je pense que notre collègue Ivanov a bien expliqué les objectifs de cette proposition de motion. Effectivement, lorsque nous avons été amenés à voter différentes infrastructures dans le cadre du projet d'agglo, nous avons décidé, pour l'entrée de la rive droite de Genève, de financer la route des Nations et le tram. C'était une nouveauté. Je pense que cela pouvait mettre tout le monde d'accord, c'était objectif et cohérent.
Mais il fallait terminer le travail, c'est-à-dire voter également un P+R, qui est situé en Suisse, c'est vrai, mais il est situé en Suisse parce qu'il sera très utile notamment aux pendulaires vaudois. On a ainsi la chance de réaliser, dans un endroit stratégique de notre canton, des infrastructures de mobilité qui concernent les transports publics, le tram, le transport privé et le P+R. C'est une triangulation, si je peux m'exprimer ainsi, qui pourrait être également utilisée dans d'autres endroits stratégiques du canton.
Notre groupe accepte cette proposition de motion. Faut-il la renvoyer directement au Conseil d'Etat ou à la commission des travaux ou des transports ? Je n'ai pas de religion bien définie.
Le président. Je vous accorde, Monsieur le député, que vous n'avez pas de religion bien définie, mais il me faciliterait la vie de savoir laquelle des deux options vous choisissez.
M. Gabriel Barrillier. Il faut demander aux motionnaires !
Le président. La parole est à M. le député Mauro Poggia.
M. Mauro Poggia (MCG). Chers collègues, «agglo», «agglo»... Il y en a qui n'ont que ce mot-là à la bouche. «Engagez-vous - engagez-vous dans la région franco-valdo-genevoise»... Excusez-nous, mais le MCG ne marche pas. Nous sommes d'accord que la région est grande et qu'il faut la construire ensemble. Mais dans le mot «ensemble», il faut bien comprendre «tous ensemble», et pas «à sens unique». Les Français ne font rien, absolument rien. Vous avez vu sur le site de «La Tribune», à partir d'aujourd'hui les Français trouvent à redire sur votre merveilleux CEVA, qui a été plébiscité par la gauche comme par la droite, et ils ne mettront pas un centime.
C'est vrai qu'il faut faire des park and ride, mais il faut les faire là où il le faut, c'est-à-dire du côté français, et prévoir précisément des transports en commun pour que les pendulaires entrent dans le canton de Genève avec ces transports en commun. Or le MCG n'est pas d'accord que Genève finance encore et toujours un park and ride sur le territoire genevois: nous dirons non à la proposition qui nous est faite.
M. Olivier Norer (Ve). Je suis un peu estomaqué par la position du MCG qui nous fait penser que, s'il y a une solution à trouver, ce n'est visiblement pas en l'écoutant, car il n'apporte aucune réponse concrète aux problèmes de mobilité à Genève.
Nous, groupe des Verts, souhaitons effectivement pouvoir avancer sur ce dossier et renvoyer cette proposition à la commission des transports, afin que l'on puisse entendre les propositions en matière de P+R lancées par le canton. Nous irons de l'avant de cette manière.
Mme Loly Bolay (S). Mesdames et Messieurs les députés, cette proposition de motion demande quelque chose qui existe déjà. En effet - j'habite la commune du Grand-Saconnex - il y a un parking à côté du Bois-Brûlé. On a refait la route maintenant. Ce parking devait à l'origine être un P+R; on devait ériger un arrêt de bus, pour la ligne F, je crois, qui va à Ferney. Or ce parking, qui a été construit, sert uniquement aux petits avions.
Quand on a parlé de ce parking, à l'époque - vous vous en souvenez, on a voté ici le crédit pour la route du Bois-Brûlé, qui incluait ce parking - on a dit que ce dernier devait servir aussi pour y mettre des petits avions, car ils allaient à la Blécherette puisqu'il n'y avait plus de place à Genève. Ils partaient tous les soirs - avec le bruit, évidemment, pour les riverains - et revenaient tous les matins à l'aéroport de Genève. Le problème est que, aujourd'hui, l'aéroport a énormément développé le trafic privé des petits avions. On le sait, on a plusieurs fois traité ici des doléances de riverains, que ce soit au Grand-Saconnex ou ailleurs, concernant ce trafic énorme de petits avions. Alors voilà... (Remarque.) Les petits avions... Enfin bref, vous me comprenez, tous ces Russes et Ukrainiens, tous ces gens qui ont beaucoup d'argent viennent à Genève en jets privés, que l'on gare là. Pourtant, ce parking était dédié justement à un P+R.
Cette proposition de motion, telle qu'elle est rédigée, ne sert à rien - excusez-moi de vous le dire - car ce parking existe bel et bien. La seule chose que l'on pourrait faire est de changer l'invite en demandant que, tel que le gouvernement s'est engagé ici le faire, ce parking soit effectivement un P+R, et non pas qu'il serve à garer les avions des Russes et autres qui viennent à Genève en jets privés. Voilà, Mesdames et Messieurs les députés, ce que j'avais à dire.
M. Roberto Broggini (Ve). J'interviens très brièvement, Monsieur le président. Effectivement, je pense qu'il serait utile que cette proposition de motion soit renvoyée à la commission des transports, que l'on puisse faire le point sur les petits avions de Mme Bolay et examiner la situation, sachant que, dans le plan directeur cantonal, cette zone est appelée à être développée, avec des infrastructures ferroviaires, et que l'autoroute est à côté. Donc l'opportunité d'étudier ceci me semble tout à fait raisonnable.
En tant que président de la commission des transports, c'est très volontiers que je mettrai cet objet à l'ordre du jour de cette dernière, pour lui donner un accueil favorable ou pas, mais cela vaut le coup d'étudier cet objet.
Enfin, j'aimerais bien que l'on parle de «parc relais», et pas de «park and ride», anglicisme qui n'est peut-être pas de bon aloi dans ce parlement.
M. François Gillet (PDC). Mesdames et Messieurs les députés, je ne parlerai pour ma part que de P+R, ce qui laisse toute liberté au niveau de la langue utilisée.
Je crois que cette problématique des P+R est fondamentale aujourd'hui dans notre canton, plus généralement dans notre agglomération. Il était prévu de ne pas débattre ce soir de cette question, donc il est effectivement important de pouvoir en discuter en commission des transports, non seulement pour examiner la zone concernée du Grand-Saconnex, mais également, plus généralement, pour reprendre l'état de la situation des P+R, qui constituent un élément fondamental de la gestion de la mobilité à Genève.
Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à M. le député Eric Stauffer, à qui il reste deux minutes.
M. Eric Stauffer (MCG). Mesdames et Messieurs les députés, il faudra un jour expliquer à certains groupes que les P+R doivent être construits en France. Il faudra expliquer un jour aux groupes parlementaires représentés dans ce Grand Conseil que les Français doivent construire chez eux et respecter ce que les Genevois font. J'en veux pour preuve, Mesdames et Messieurs, que, sur le site de la «Tribune de Genève», il y a une «news» fédérale qui a été publiée aujourd'hui à 11h50 - vous trouvez cela sur le site de «La Tribune». Je vous lis le titre: «CEVA: l'étude d'impact jugée incomplète par la France». (Remarque.) Alors imaginez-vous bien que nos amis français commencent à faire de l'écologie. Ils trouvent des défauts au projet du CEVA - qui va coûter un petit milliard, à nous autres Suisses... (Remarque.) ...enfin, un milliard et demi ! - et disent que l'étude d'impact doit être complétée par plusieurs points, à savoir «des éléments concernant les impacts sur la biodiversité».
On sait pourtant que la première décision des Français, quand on a voté le CEVA, a été de supprimer le parking au terminus et d'en faire des bureaux. Eh bien, Mesdames et Messieurs: les P+R, les Genevois en ont assez ! Pour le trafic des pendulaires, les Français construiront des P+R... chez eux ! Et nous mettrons les Transports publics genevois à disposition de nos amis français. Mais maintenant cela suffit de prendre les Genevois pour... (Remarque.) «Pour des vaches à lait», exactement ! Merci, cher collègue ! Cela suffit, la plaisanterie a assez duré ! M. Pierre-François Unger s'est déjà fait rouler dans la farine, pour la santé... (Rires.) Mais oui ! Mais c'est vrai ! ...pour la santé...
Le président. Il vous reste cinq secondes, Monsieur le député !
M. Eric Stauffer. Je vais conclure. ...pour la santé et pour toutes les mesures hospitalières. A Genève, cela suffit ! Aujourd'hui, il faut savoir dire non aux Français ! Il faut faire acte de fermeté. Les P+R, c'est: chez eux !
Des voix. Bravo !
M. Stéphane Florey (UDC). C'est avec attention que j'ai écouté les propos de Mme Bolay. Cette proposition de motion a précisément tout son sens. Vous l'avez dit, il y a déjà un emplacement prévu pour un P+R. Eh bien, cette proposition de motion permettra justement, en commission, de déterminer si l'emplacement qui était prévu reste d'actualité ou s'il faudra peut-être en trouver un autre, à proximité de l'autoroute.
Nous sommes donc favorables à un renvoi en commission, afin que cette proposition de motion y soit étudiée. Nous pensions plutôt à la commission des travaux, mais si celle des transports a votre préférence, pourquoi pas.
Une voix. Bravo !
Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à M. le député Jacques Jeannerat, à qui il reste une minute et demie.
M. Jacques Jeannerat (R). Oui, très rapidement. Pour une fois, je vais être d'accord avec M. Stauffer. Mais le seul P+R qui n'est justement pas destiné aux Français, mais aux Vaudois qui viennent travailler à Genève... (Remarque.) ...c'est celui du Grand-Saconnex. Alors je suis d'accord avec vous, Monsieur Stauffer, pour tous les autres P+R du canton, mais pas pour celui-ci. (Remarque.) Celui-ci n'est pas destiné aux frontaliers français. Il est destiné aux Vaudois. Donc cela a tout son sens. (Commentaires. Le président agite la cloche.)
Mme Michèle Künzler, conseillère d'Etat. Mesdames et Messieurs, je pense que le Conseil d'Etat accepterait de toute façon volontiers cette proposition de motion, mais nous sommes aussi d'accord de l'étudier en commission. La volonté du Conseil d'Etat est d'avoir un vrai plan d'action P+R, en lien avec nos voisins français et vaudois. Nous avons dans ce périmètre... (Remarque.)
Des voix. Chut !
Mme Michèle Künzler. Ce périmètre n'est pas forcément le bon, mais on pourrait expliquer cela en commission. Peut-être qu'il faut le faire de l'autre côté de la frontière, de l'autre côté du tunnel de Ferney. Cependant, plusieurs projets sont en cours. Il y a déjà un parking P+R à cet endroit, mais il n'est simplement pas utilisé; il n'a aucun succès, il y a trois voitures... Certains P+R ne marchent pas, notamment sur la rive droite.
Il n'est pas exact de dire que les Français ne font rien: il y a tout un plan d'actions. Lundi prochain, je vais inaugurer un P+R à Bonneville, lequel est entièrement payé par les Français. Bientôt, on inaugurera le P+R de Veigy, qui est aussi financé uniquement par les Français. Et beaucoup de P+R sont en train de se mettre en place. Je me réjouis de vous présenter cela en commission, puisqu'il y a une grande méconnaissance quant aux infrastructures projetées par nos voisins.
Ils sont aussi en train de préparer un financement pour les trams qui vont passer la frontière - nous avons acheminé des trams pratiquement jusqu'à la frontière. Quatre projets de trams sont en cours. Lundi également, vous pouvez aller à Prévessin, où sera communiquée une information sur le tram qui va jusqu'à Saint-Genis. On a là beaucoup de projets en commun, qui sont cofinancés par les Français ! Ils ont parfois des difficultés à le faire, mais je vous garantis que, le jour où ils prennent une décision et qu'ils ont de l'argent pour une réalisation, ils seront peut-être plus rapides que nous, nous qui tergiversons si souvent ! (Remarque.)
Donc je vous engage, premièrement, à renvoyer la proposition de motion en commission: on vous y présentera le plan d'action. En ce qui concerne le P+R de Grand-Saconnex, pour celui-ci, on l'étudiera, et je ne sais pas si c'est la bonne solution de le réaliser à cet endroit. Quoi qu'il en soit les projets sont bien engagés tout autour de Genève.
Cependant, les P+R ne sont pas l'unique solution. En effet, je vous rappelle simplement que les mouvements aux frontières dépassent 550 000 entrées et sorties. Donc construire des P+R pour chaque voiture qui pourrait passer la frontière est économiquement insoutenable. C'est l'un des moyens d'agir, ce n'est pas le seul, mais on va entreprendre une action dans ce sens.
Le président. Merci, Madame la conseillère d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, nous sommes saisis d'une demande de renvoi à la commission des transports. Nous procédons au vote.
Mis aux voix, le renvoi de la proposition de motion 1991 à la commission des transports est adopté par 70 oui contre 15 non.
Débat
Le président. Nous traitons ce point en urgence. C'est un débat de catégorie II: trois minutes par groupe. La parole est à Mme la députée Anne Mahrer.
Mme Anne Mahrer (Ve). Mesdames et Messieurs les députés, je crois que les politiques ont compris le message. Les spécialistes des HUG s'activent avec un nouveau projet de centre coordonné et translationnel pour les études du cancer dès octobre prochain, avec un nouveau responsable. C'est pour cela que nous vous demandons, Mesdames et Messieurs les députés, de renvoyer cette proposition de motion à la commission de la santé, afin de donner un nouvel élan à ce projet, en collaboration avec les HUG, de proposer également une collaboration avec le canton de Vaud - puisque le Grand Conseil vaudois a déposé un postulat qui a été accepté et très bien accueilli par M. Pierre-Yves Maillard - et, pourquoi pas, de proposer aussi une collaboration avec les autres cantons romands intéressés. Mesdames et Messieurs les députés, je vous remercie de renvoyer cet objet à la commission de la santé.
Mme Anne Emery-Torracinta (S). Mesdames et Messieurs les députés, quand on parle du cancer du sein, on ne se rend pas toujours compte du l'ampleur du phénomène. Ici, dans cette salle, nous sommes, si je compte avec les conseillères d'Etat, trente-trois femmes. Eh bien, malheureusement, selon les statistiques, quatre d'entre nous devraient avoir - ont déjà eu ou auront, un jour ou l'autre - un cancer du sein. Quand on parle du cancer du sein, on oublie aussi que, indépendamment du pronostic vital, le traitement est extrêmement lourd et - c'est ce que j'aimerais ajouter aux propos de Mme Mahrer - qu'il engendre aussi, lui-même, des effets que l'on appelle les effets adverses du cancer. Autrement dit, on peut guérir du cancer, mais l'on en guérit avec des séquelles, avec un certain nombre de problèmes. On peut avoir des problèmes quant à sa santé, par exemple des problèmes cardiaques, de sorte que, dix ou quinze ans après que votre cancer a été guéri, vous puissiez mourir d'un infarctus. Vous pouvez avoir également, selon votre situation personnelle financière, des problèmes économiques et financiers, parce que vous aurez des séquelles au niveau des yeux ou des dents, par exemple, et que les soins ne sont pas remboursés par l'assurance-maladie. Vous aurez des problèmes peut-être dans votre vie familiale, dans votre vie intime, dans votre carrière professionnelle, etc.
Donc, c'est un problème qui est réel. Et il est d'autant plus grave - voici la nouveauté, ces dernières années - que l'on constate qu'il ne touche plus seulement les femmes dès 50 ans, les femmes ménopausées notamment, mais aussi davantage de jeunes femmes. M. Forni, dans son exposé des motifs, rappelle que, à Genève, la femme la plus jeune ayant eu un cancer du sein avait 22 ans.
Et c'est cette problématique que veut traiter tout particulièrement la proposition de motion: essayer de comprendre quels sont les facteurs de risque qui amènent à développer un cancer chez les femmes, et principalement les jeunes femmes. Il s'agit là véritablement d'un problème de santé publique et je crois qu'il est sage de renvoyer cette proposition de motion en commission, afin que nous ayons quelques éléments par rapport à l'enquête qui va être menée à ce sujet. Je vous remercie d'accepter ce renvoi en commission.
Mme Christina Meissner (UDC). Le cancer, il est vrai, est la maladie des sociétés dites civilisées. Effectivement, on ne meurt plus aujourd'hui ni de faim, ni de froid, ni de la grippe. Les hommes ne meurent plus sur les champs de bataille et les femmes ne meurent plus en couches, et j'espère qu'elles ne mourront plus d'avortement clandestin. Alors forcément, on vit plus vieux, nos cellules finissent par faire n'importe quoi et le cancer apparaît. A force de prévention - eh oui, nous avons pas mal de prévention - les facteurs de risque favorisant l'apparition du cancer sont connus: l'âge, les antécédents familiaux, l'absence de grossesse, la prise à long terme de traitement hormonal pour la ménopause, peut-être même la pilule contraceptive, ainsi que - et c'est valable pour tous les cancers - le surpoids, la mauvaise alimentation, le manque d'activités sportives, la consommation d'alcool ou de tabac. Donc les moyens de diminuer une bonne partie des facteurs de risque, nous les connaissons. Or que fait-on ? Eh bien on ne fait rien ! On continue à manger, à devenir de plus en plus obèses, même les enfants, et on reste de plus en plus scotchés derrière notre écran d'ordinateur.
Alors qu'est-ce qu'une étude de plus de 3 millions de francs pourrait nous apporter de plus ? Nous dire que l'eau, que l'air, et probablement tous les pesticides et rayonnements que nous absorbons, sont responsables ? Certainement. Très certainement. Ensuite, nous aurons la satisfaction d'avoir pu identifier des causes qui nous font mourir, mais nous ne changerons rien à notre train de vie civilisée.
Je suis la première concernée - d'ailleurs, il semblerait que ce ne soit que les femmes qui parlent ce soir, et c'est tant mieux ! Bien que je sois la première concernée - je fume, je bois... (Exclamations.) ...et je suis une femme - je ne comprends pas surtout une chose: ce que vient faire l'urgence, et un projet de loi, pour un programme de recherche au parlement ! Cela, je ne le comprends pas. La recherche est libre, je l'espère encore. (Brouhaha.) Nous votons des budgets pour les universités et pour la recherche; je ne comprends pas comment nous pouvons nous immiscer dans la recherche, à moins, évidemment, que cette recherche pour «élucider les risques encourus par les femmes [...] du canton de Genève» - je cite l'invite - nous soit proposée pour satisfaire l'appétit des pharmas. Là en tout cas, je ne marche pas ! Et l'UDC non plus.
Mme Marie-Thérèse Engelberts (MCG). Je voudrais d'abord adresser mes remerciements aux personnes qui ont déposé cette proposition de motion, à M. Forni en particulier. Mais depuis qu'elle a été déposée, c'est vrai qu'elle fait l'objet d'une fronde un peu sournoise, ou telle qu'elle vient d'être décrite, à la fois lancée par certaines querelles dans le monde médical concerné et celui de la recherche.
En fait, cela m'est complètement égal ! J'aimerais relever que le sujet est pertinent et angoissant, et qu'il est à l'urgence. Si, parmi nous, certaines d'entre nous ont subi ce genre d'interventions et de difficultés, elles savent - il s'agit là des femmes, cela pourrait être des hommes pour d'autres problématiques - que, assurément, nous sommes directement concernées. Elles ont suivi des traitements lourds, qui se calculent non pas en jours ni en mois, mais en années. Il y a le temps de la chirurgie d'abord, de la chimio, des rayons, par exemple, et j'en passe. Mais il y a surtout cette épée de Damoclès au-dessus de la tête: une rechute, etc.
On va dire qu'il ne faut pas faire pleurer dans les chaumières, nous sommes bien d'accord. En même temps, les querelles intestines des milieux médicaux ou de la recherche sont relativement peu intéressantes pour nous. Je pense que le MCG sera d'accord de soutenir cette proposition de motion pour qu'elle parte à la commission de la santé, où là pourront s'expliquer des personnes qui sont compétentes et qui auront entendu le message déposé ce soir.
M. Michel Forni (PDC). Mesdames et Messieurs les députés, comme vous l'avez parfaitement saisi, cette proposition de motion repose sur deux volets. Le premier est un problème de santé publique, cela a été relevé ce soir. Nous avons pris conscience du problème et notre empathie est tout à fait sincère. D'autre part, il y a bien sûr une étude, qui présente quelques maladies de jeunesse et qui coûte cher, mais qui est censée arriver - dans un climat parfois difficile. Je tiens cependant à rassurer les uns et les autres: il n'y a aucune collusion avec l'industrie. La méthodologie est peut-être particulière. Enfin, comme vous l'avez dit, il y a eu des conflits.
En revanche, cela a débouché sur une prise de conscience, je dirai surtout sur un développement, une coordination de ce projet, grâce à une ouverture des HUG. Cela nous permet non pas d'envoyer la proposition de motion dans la naphtaline, avec des caprices d'épidémiologistes, mais, au contraire, de la renvoyer à la commission de la santé, où l'on peut tout à fait évoquer cette coordination d'un projet pouvant être intrahospitalier, pouvant être coordonné grâce à l'arrivée d'un nouveau patron de cancérologie à Genève - qui est un homme raisonnable avec lequel nous pouvons discuter - et permettant aussi d'optimiser les programmes de recherche également sous un angle économique.
C'est la raison pour laquelle, sans vouloir épiloguer, nous vous proposons, non pas de dégager, mais de renvoyer cet objet à la commission de la santé, pour qu'il puisse être traité comme cela doit être le cas. Merci de votre attention et de vos efforts.
M. Pierre Conne (R). Mesdames et Messieurs, mes propos vont se placer sur deux niveaux. D'abord, il y a évidemment le niveau du problème de santé publique représenté par le cancer du sein, qui est un problème majeur. Le deuxième niveau sera de traiter, finalement, du coeur de la proposition de motion, laquelle nous demande de financer une recherche spécifique dans un domaine du cancer.
Le caractère majeur du problème de santé que représente le cancer du sein, touchant notamment les femmes jeunes, est unanimement reconnu. Mieux comprendre le phénomène, pour le prévenir et pour guérir de ce fléau, justifie que des travaux de recherche soient menés. Mais tout travail de recherche doit être fondé sur une méthodologie sans faille, afin de pouvoir répondre aux questions qui se posent, justifier les frais engendrés et surtout ne pas donner de faux espoirs aux personnes qui attendent des remèdes.
Apparemment, l'étude pour laquelle un financement de plus de 3 millions est demandé ne répond pas aux exigences méthodologiques requises, car aucun organisme officiel de financement ne la soutient. Les chances d'aboutir de cette étude sont également compromises, car les spécialistes hospitalo-universitaires et les médecins en charge des femmes concernées sont tenus à l'écart du projet à l'heure actuelle. Voyez-vous, le principal problème que pose spécifiquement cette proposition de motion tient au fait qu'il existe des organes et des mécanismes de financement officiels pour évaluer la valeur scientifique et méthodologique d'une étude, et que la présente démarche tend à les contourner.
Mesdames et Messieurs, compte tenu de la gravité du problème que représente le cancer du sein, le PLR propose de renvoyer cet objet à la commission de la santé, afin que toutes les questions qu'il soulève aujourd'hui y soient traitées de manière approfondie. Je vous remercie. (Applaudissements.)
M. Pierre Weiss (L). Mesdames et Messieurs les députés, je voudrais m'associer aux propos qui ont été prononcés par mon collègue Pierre Conne, qui posent un problème plus général, un problème de financement d'étude, de recherche. Dans quelle mesure ce parlement peut-il agir à titre subsidiaire lorsque des problèmes aussi sérieux de santé publique que le cancer du sein sont posés ? Mais il y a d'autres problèmes de santé publique qui pourraient nécessiter aussi de notre part une intervention. Donc, dans quelle mesure ce parlement peut-il et doit-il agir à titre subsidiaire lorsque des organismes spécialement chargés de recherche, tel le Fonds national suisse de la recherche scientifique, refusent d'entrer en matière ? Refusent-ils d'entrer en matière parce que la méthode est, comme il l'a été dit tout à l'heure, particulière, au sens de novatrice peut-être, voire audacieuse dans ses aspects méthodologiques ? Est-ce parce qu'il y a incompatibilité entre les déposants et les examinateurs dudit projet de recherche ? Il y a donc, au préalable, des questions de ce type qui se posent pour l'engagement de fonds publics qui sont les nôtres.
Ensuite, il y a probablement des questions d'arbitrage - d'abord de précédents, puis d'arbitrage. Il y a des questions de précédents pour les autres problèmes de santé publique que nous serions peut-être appelés à devoir examiner ici, pour lesquels des requêtes pourraient être présentées, avec le même sérieux, la même importance, la même nécessité, par les membres de ce parlement. Il y a des questions d'arbitrage ensuite, compte tenu des responsabilités qui sont les nôtres dans l'affectation de l'argent public pour les tâches auxquelles nous avons prioritairement vocation de répondre, et pour d'autres qui sont peut-être de la responsabilité primaire d'organismes fédéraux ou privés, par exemple des fondations pour l'étude du cancer affectées au développement d'études, y compris d'études novatrices.
Voilà pourquoi je pense que c'est une excellente idée de renvoyer cette proposition de motion à la commission de la santé, pour que ce genre de préoccupations soient aussi étudiées, avant qu'une décision finale ne soit prise au sujet de cet objet.
M. Pierre-François Unger, conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, vous l'avez toutes et tous dit, le cancer du sein est un fléau, puisque c'est le cancer qui tue 20% des femmes qui vont mourir d'un cancer. A cet égard, il est d'une gravité toute particulière, quand bien même un certain nombre de progrès ont été faits. Vous avez, Madame la députée, très bien décrit que le simple fait d'en guérir sur le plan de l'absence de cellules tumorales résiduelles n'était pas du tout forcément la solution à l'ensemble des problèmes que rencontrent les femmes, par la suite, en raison de séquelles, qu'elles soient physiques ou psychiques, et même psychosociales. A vrai dire, un gros travail a été fait ces dernières années à Genève, notamment par une association qui a fédéré des femmes ayant souffert d'un cancer du sein ou en souffrant toujours. Elle a, au même titre que les diabétiques, enseigné aux soignants ce qu'était le parcours de vie, de telle manière que, avec modestie, les soignants soient à leur tour enclins à apprendre des choses de celles qu'ils avaient soignées. Cela a été un travail tout à fait remarquable, qui doit continuer.
Vous le savez sans doute - ou cela a été dit tout à l'heure - le cancer du sein est l'un des axes stratégiques forts du nouveau plan stratégique des Hôpitaux universitaires de Genève. C'est la raison pour laquelle un centre consacré au cancer du sein va être ouvert, qu'il sera dirigé par Mme la professeure Castiglione, ancienne patronne de la SAKK, l'association faîtière, au fond, de tous les cancérologues de Suisse, et qu'elle fera une recherche de pointe dans tous les domaines concernés, qu'il s'agisse de l'épidémiologie ou de la génétique - un très grand spécialiste était à Genève, aux Hôpitaux; il est toujours à Genève mais s'est installé dans une clinique - et dans la recherche dite translationnelle, c'est-à-dire là où les échanges entre les soignants et les patients, et l'enseignement que l'on peut en tirer, sont particulièrement pris en compte. De cela, Mesdames et Messieurs, le Conseil d'Etat est tout à fait conscient.
En revanche, pour vous parler très franchement, une proposition de motion comme celle-là, pour moi, est le fruit d'une instrumentalisation. C'est un terme que je n'aime pas beaucoup utiliser, mais la vitesse à laquelle les choses se sont décidées et à laquelle on nous propose de financer à hauteur de 3,5 millions... Des recherches, il se trouve que j'en ai fait quelques-unes, mais jamais à ce prix. (Commentaires.) C'est insensé pour le prix d'une recherche, épidémiologique, d'une part, et sur des caractéristiques de cytogénétique, d'autre part, c'est-à-dire relatives à la génétique de la cellule. Ce sont des choses importantes, bien sûr, mais on se propose de les faire à Paris alors qu'elles peuvent être réalisées à Genève. Tout cela ressemble, excusez-moi de le dire, à une instrumentalisation.
Cette instrumentalisation m'est insupportable à plusieurs titres. D'abord parce que cette recherche n'a été approuvée, M. le député Weiss l'a dit, par aucune des autorités académiques, celles qui sont habilitées à juger de la qualité d'une recherche: ni dans l'institut concerné; ni dans le département médical concerné, celui de médecine communautaire; ni par les spécialistes d'oncologie, qui n'ont même pas été consultés; ni par le Fonds national suisse de la recherche scientifique. On aurait dû parler de cela dans la proposition de motion, si l'on était honnête et que l'on renonçait à se faire instrumentaliser.
Mesdames et Messieurs, le sujet est cardinal. La préoccupation du Conseil d'Etat et des Hôpitaux est très forte, et notre attention sera portée au développement des choses dont nous parlons. Les détails, vous avez raison, nous en parlerons en commission. Mais je pense tout de même que l'un des messages que le Conseil d'Etat aimerait apporter à votre parlement est le suivant: la liberté académique est la plus grande richesse des pays libres. Le jour où les parlements ou les gouvernements téléguideront la recherche universitaire, alors celle-ci disparaîtra au service du despotisme. (Applaudissements.)
Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, nous sommes saisis d'une demande de renvoi de cet objet à la commission de la santé, nous procédons au vote.
Mis aux voix, le renvoi de la proposition de motion 2010 à la commission de la santé est adopté par 76 oui contre 4 non et 4 abstentions.
Débat
Mme Patricia Läser (R). Mesdames et Messieurs les députés, un groupe de travail planche depuis des mois sur le dossier de candidature de notre ville à la Fête fédérale de lutte. Une demande d'aide financière a été déposée et cet argent est indispensable pour mener à bien ce projet. Nous avons une chance historique d'offrir une fête urbaine. C'est l'occasion, aussi, de démontrer que nous sommes attachés aux racines et à nos traditions, malgré notre vocation internationale. (Brouhaha. Le président agite la cloche.)
Pour déposer notre candidature, nous avons besoin d'un appui politique fort. Vaud et Neuchâtel ont déjà déposé leur dossier. Il est donc urgent de recevoir un appui politique massif, afin d'arriver en août, date butoir pour le dépôt des candidatures, avec un dossier béton. (Brouhaha. Le président agite la cloche.) Nous vous demandons donc d'adopter d'une seule voix cette proposition de résolution.
Une voix. Un peu plus, autrement cela ne va pas passer !
M. Roger Deneys (S). Mesdames et Messieurs les députés, les socialistes sont extrêmement sensibles à l'organisation de manifestations sportives qui sont populaires. Le sport d'élite et le sport business ne sont pas la panacée ni la tasse de thé des socialistes; par contre, les sports qui font référence à l'histoire, à la culture, à des traditions, nous sont très chers. Nous estimons utile de pouvoir accueillir une telle manifestation en Suisse romande.
Il est vrai que pouvoir apporter un soutien de la part de notre Grand Conseil nous semble extrêmement important. Cette manifestation se déroule souvent en Suisse alémanique, et le fait que le canton de Genève - son Grand Conseil - affiche son soutien à cette manifestation est aussi la preuve que Genève est attaché à la Suisse, à ses traditions, à ses valeurs et à ses beautés. Mesdames et Messieurs les députés, nous vous invitons à appuyer cette proposition de résolution.
M. Christo Ivanov (UDC). Mesdames et Messieurs les députés, l'organisation de la Fête fédérale de lutte est un événement considérable pour tout le pays. Tous les trois ans, en effet, ce sont plus de 150 000 spectateurs qui participent à ces festivités et contribuent au respect de nos traditions et valeurs qui nous sont si chères. (Brouhaha.)
L'UDC est le parti du sport en Suisse. De nombreux élus de notre parti, parmi lesquels notre ancien conseiller fédéral Adolf Ogi, ont oeuvré avec succès pour le sport, que ce soit en Suisse ou à l'étranger. Notre ancien collègue député Philippe Guénat soutient activement et financièrement le Club de lutte suisse de Genève. C'est pourquoi je déplore le fait que l'UDC et le MCG n'aient pas été contactés pour signer cette proposition de résolution. Il s'agit sans doute d'un oubli, car ce texte mérite le soutien unanime du parlement. Le groupe UDC votera cette proposition de résolution pour qu'en 2016 la fête soit belle.
M. Fabien Delaloye (MCG). Mesdames et Messieurs les députés, la proposition de résolution en faveur de la candidature de Genève pour la Fête fédérale de lutte suisse est une excellente idée. Nos traditions séculaires doivent vivre à tous les temps de l'histoire de notre pays. La lutte à la culotte véhicule de nombreuses valeurs humaines et sportives. (Brouhaha.) Notre Grand Conseil doit soutenir cette candidature genevoise, financièrement et politiquement. Le Mouvement Citoyens Genevois appuiera avec force cette proposition de résolution.
Une voix. Très bien !
M. René Desbaillets (L). Je ne veux pas en rajouter, puisque quasiment tous les groupes ont signé cette proposition de résolution. Je pense que, pour Genève, cité internationale... (Brouhaha.)
Des voix. Chut !
M. René Desbaillets. ...il s'agit d'avoir une vraie fête folklorique pour montrer un peu à nos internationaux ce qu'est la vraie Suisse. Parce qu'il faut reconnaître que, à Genève, on n'est pas tout à fait la vraie Suisse. Merci de soutenir cette proposition de résolution.
Mme Esther Hartmann (Ve). Les Verts étant très attachés à toute forme de manifestation culturelle et sportive, et étant très ouverts à la diversité, nous ne pouvons que soutenir cette proposition de résolution.
Je vous rappelle que le sport de lutte - outre le fait que c'est une manifestation suisse et qu'elle fait appel aux ferveurs patriotiques de certains membres de cet hémicycle, si je peux le dire comme cela - est d'origine suisse alémanique. Donc vos actes me touchent profondément, moi qui suis d'origine suisse alémanique. (Exclamations.)
Le président. Merci de cette précision, Madame la députée. La parole est à Mme Anne-Marie von Arx-Vernon.
Mme Anne-Marie von Arx-Vernon (PDC). Il est des symboles auxquels le parti démocrate-chrétien est très attaché. Tout comme le combat de reines, la lutte est emblématique du courage, de la ténacité et de la force que nous connaissons bien au parti démocrate-chrétien. C'est pourquoi la Fête fédérale de lutte, que la Genève internationale pourrait découvrir avec nous, est une fierté des Suisses. Nous nous battrons pour avoir cet honneur.
M. Charles Beer, conseiller d'Etat. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, je vous remercie de cette initiative, qui prend la forme d'une proposition de résolution, puisque - j'aimerais l'affirmer devant vous - le Conseil d'Etat est non seulement intéressé, mais également tout à fait désireux de déposer une candidature genevoise pour cette fête de lutte.
J'aimerais dire que non seulement cette tradition, plutôt ancrée en Suisse alémanique, a bien entendu dépassé la Sarine, mais que, vous le savez, cette fête étant organisée tous les trois ans, il revient régulièrement à la Suisse romande - c'est à peu près tous les quinze ans depuis la Seconde Guerre mondiale - de pouvoir l'organiser, sachant que, à Genève, nous n'avons malheureusement jamais eu la chance d'organiser un tel événement.
Dans la perspective de 2016, sachant notamment que la décision se prendra en mars prochain, en 2012, un comité a été mis sur pied. Il est présidé par M. Jean-Marc Guinchard et le Conseil d'Etat y est représenté par le département de l'instruction publique, de la culture et du sport. Nous allons également y travailler de façon interdépartementale, parce qu'il est évident qu'une telle organisation, une telle manifestation, demande une collaboration à tous les niveaux... (Brouhaha.) ...en matière de sécurité, d'économie, de tourisme, de manière que nous soyons bien évidemment unis, solidaires et volontaires, afin qu'un événement qui concilie si brillamment les traditions sportives et les traditions culturelles de notre pays puisse voir le jour au moment où nous allons instaurer une fondation sportive destinée à organiser, à faciliter le travail d'organisation des milieux cherchant à attirer les grands événements sportifs dans notre canton. Merci de cette proposition de résolution.
Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, nous nous prononçons sur le renvoi de cet objet au Conseil d'Etat.
Mise aux voix, la résolution 641 est adoptée et renvoyée au Conseil d'Etat par 66 oui et 6 abstentions.
Débat
Le président. Nous traitons ce point en urgence. Je pars du principe que quelqu'un a dit... (Remarque.) Voilà, merci ! Madame la députée Lydia Schneider Hausser, vous avez la parole.
Mme Lydia Schneider Hausser (S). Cette demande de traitement en urgence était pour permettre un renvoi à la commission de la santé, que je demande formellement.
Le président. Merci, Madame la députée. La parole est à Mme Christine Serdaly Morgan.
Mme Christine Serdaly Morgan (S). C'était pour formuler la même demande, merci.
Le président. Merci, Madame la députée. La parole est à M. le député... C'était aussi pour la même chose ? (Remarque.) Vous dites que vous renoncez: bien. Mesdames et Messieurs les députés, nous nous prononçons sur le renvoi du rapport du Conseil d'Etat RD 875 à la commission de la santé.
Mis aux voix, le renvoi du rapport du Conseil d'Etat RD 875 à la commission de la santé est adopté par 74 oui (unanimité des votants).
Le président. Nous en avons terminé, à 21h40, avec les urgences. Nous reprenons donc l'ordre du jour normal.
Débat
Le président. C'est un débat de catégorie II: trois minutes par groupe. La parole est au premier signataire, M. le député Jean Romain.
M. Jean Romain (R). Mesdames et Messieurs les députés, les voyages d'études en fin du collège sont problématiques. Voici deux raisons principales. La première est une nouvelle raison: depuis quelques années, on est majeur à 18 ans et le voyage d'études se fait à 19 ans, donc l'autorité extra muros est plus ambiguë, plus difficile à faire tenir. La deuxième raison tient au fait que les maîtres accompagnateurs n'ont plus, durant tout le voyage d'études, de sphère privée. Une récente affaire a montré, dans les journaux, la difficulté que l'on avait à pouvoir revendiquer la sphère privée pour se livrer à des occupations qui n'ont plus rien à voir avec l'étude et assez peu avec le voyage.
Les nouveaux professeurs, à quelques exceptions près, du moment qu'ils ont fait un essai, du moment qu'ils ont accompagné quelques voyages d'études, eh bien n'y vont plus. Parce que quantité de voyages d'études, Mesdames et Messieurs, finissent plus par chance que par maîtrise de la chose. Que l'on soit clair. Nous tenons, à Genève, à la tradition des voyages d'études, bien sûr, et il n'est pas question de les supprimer, ni - par rétorsion en fonction de ce qui a pu se passer dans divers pays - de les retirer.
Mais cette proposition de motion demande entre autres que les élèves impliqués dans la mise sur pied d'un voyage d'études connaissent les maîtres avec lesquels ils s'en vont. C'est cette confiance qui est fondamentale. On ne peut pas leur demander simplement de s'inscrire à des voyages comme on s'inscrirait à ceux du «Club Med», en fonction de destinations et de copains, alors que ce sont seulement les maîtres qui préparent les voyages d'études et leur proposent de s'y inscrire ici plutôt que là, à leur bon vouloir et leur libre arbitre. Il faut d'une part les impliquer dans l'organisation et, d'autre part, que les maîtres qui les accompagnent les enseignent de façon que l'autorité de l'enseignement, l'autorité de ce qu'ils leur communiquent, prenne la place de cette autorité civique que, étant majeurs, ils n'ont pas à respecter nécessairement.
Deuxièmement, nous voudrions recentrer les voyages sur la culture, sur l'aspect didactique des choses. Je ne vois pas pourquoi l'Etat subventionnerait des vacances. (Remarque.) Finalement, une bonne manière de faire...
Le président. Il vous faut conclure, Monsieur le député.
M. Jean Romain. Je termine par la dernière chose: il faut limiter à la baisse le nombre de participants, de façon à pouvoir circonscrire le mieux possible tous ceux qui sont ensemble.
Voilà pourquoi nous demandons le renvoi de cette proposition de motion à la commission de l'enseignement.
Une voix. Très bien !
Mme Sylvia Nissim (Ve). Mesdames et Messieurs les députés, les Verts sont divisés - une fois n'est pas coutume - sur leur position par rapport à cette proposition de motion radicale. (Exclamations.) En effet, nous sommes tous d'accord sur la validité et la valeur que peuvent avoir ces voyages d'études. Par contre, nous sommes divisés sur le rôle de l'Etat dans la détermination des règles qui doivent les régir. Alors si le tableau quelque peu dramatique que nous dépeint M. Romain ne nous correspond pas tout à fait, nous trouvons tout de même que les invites générales sur la clarification des finalités de ce voyage d'études et sur l'accompagnement et le rôle des participants devraient nous permettre un débat large et intéressant en commission.
J'apprécie pour ma part, en particulier, la mention de la participation active des élèves dans la préparation et le choix de la destination dudit voyage. Il me semble en effet qu'elle est à même, en plus, de renforcer les responsabilités des élèves, comme c'est mentionné dans les invites. Mais elle peut aussi être source d'enseignement et d'expérience dans la préparation d'un voyage, ce qui peut tout à fait être bénéfique pour la suite de leur expérience.
Donc les Verts vont garder le vote libre sur ce sujet. Pour ma part, je recommande le renvoi en commission, afin que l'on puisse discuter de ce sujet de manière approfondie.
M. Bertrand Buchs (PDC). Le PDC salue cette proposition de motion, parce qu'il est très important que l'on puisse discuter, en commission, des voyages d'études pédagogiques, dont on a vraiment l'impression qu'ils deviennent de plus en plus problématiques. Nous avons tous, nous les vieux, le souvenir de magnifiques voyages avec, toujours, un but pédagogique... (Remarque.) Oui, et sans doute les moins vieux ! ...et cela marchait très bien. Mais actuellement, on a même l'impression que certains professeurs ne veulent plus faire de voyages, ou hésitent, à cause de la responsabilité qu'ils assument en les organisant.
Il y a quand même des expériences qui se déroulent extrêmement bien. Je vais juste en citer une: l'échange du Collège de Staël avec un collège dans le Vermont, aux Etats-Unis - il a lieu tous les deux ans et se passe extrêmement bien - ou l'échange avec une classe d'un collège de Budapest et le Collège de Staël, échange qui fonctionne aussi très bien. Quand il y a un but pédagogique, un échange avec une autre culture, c'est vraiment un plus pour les élèves. Il faut soutenir les voyages pédagogiques et il faut en discuter en commission.
M. Antoine Bertschy (UDC). Force est de constater que depuis quelques années les voyages d'études finissent souvent dans la rubrique des faits divers; entre des jeunes qui s'amusent à frapper un employé de brasserie et un accompagnateur qui finit avec des femmes de petite vertu dans les chambres, apparemment il y a quelque chose qui ne joue pas. (Brouhaha.) Certes, le département a très bien géré tout cela par la suite, mais nous ne voulons pas voir le département devoir gérer ce genre de cas. Ce que nous voulons, c'est que les voyages d'études se passent bien, et cette proposition de motion tombe à point nommé pour recadrer la situation, pour faire en sorte que les voyages d'études en soient vraiment, et non pas des voyages de vacances, de farniente.
Donc, le groupe UDC soutient le renvoi de cet objet en commission. Nous en discuterons, il y a du travail à faire. Faudra-t-il passer par une voie réglementaire, ou quelque chose ? Nous en discuterons en commission. Par conséquent, nous soutenons le renvoi en commission de cette proposition de motion.
Mme Anne Emery-Torracinta (S). Non, Mesdames et Messieurs les députés, l'école n'est pas une agence de voyage. Je crois que nous sommes tous d'accord sur ce point. Mais je dois vous dire que j'ai été un peu étonnée quand j'ai regardé qui était le premier auteur de la proposition de motion, car je me suis dit que pour avoir rédigé un texte pareil, il faut vraiment ne rien connaître à ce qui se fait actuellement au DIP. Voici pourquoi j'ai été un peu étonnée, je vais vous donner quelques exemples.
Si vous permettez que je remonte à un peu en arrière, je vais vous parler de mon propre voyage de matu, en 1976, au Collège Voltaire... (Brouhaha.) ...en reprenant les trois arguments du motionnaire. Implication des élèves: zéro ! Zéro, à savoir que nous étions un grand troupeau à suivre effectivement, le matin, les visites guidées, qui étaient d'ailleurs fort intéressantes, mais nous étions livrés à nous-mêmes de midi à minuit. Et je dois vous dire que les brasseries de Prague sont extrêmement intéressantes, et la bière était très bonne ! Mais l'implication des élèves en termes culturels était limitée. Donc recentrer sur la culture... En 1976, du moins, ce n'était pas le cas. Les participants - baisse de participants: à l'époque, c'était toute une volée. On pouvait choisir, on n'était pas par classe. Je me suis retrouvée avec des gens d'autres classes, etc.
Donc, qu'est-ce que je constate, trente-cinq ans après, dans les différentes écoles du canton ? Vous avez parlé de l'affaire de Rome... Eh bien, à Rome, quelle était l'implication des élèves ? Ils avaient dû préparer en classe un certain nombre de choses. Recentrer sur la culture: des visites étaient organisées, avec les enseignants; les élèves devaient présenter un certain nombre de choses pendant le voyage. Nombre de participants: c'était une seule classe. Donc cela veut dire, Mesdames et Messieurs les députés, que ce ne sont pas forcément ces trois éléments qui sont suffisants pour garantir le bon déroulement d'un voyage d'études.
D'autre part, que se passe-t-il ailleurs ? Actuellement, des écoles dans le canton ne font plus, depuis longtemps, de voyages de fin d'études, mais des voyages d'études. Si l'on parle de la filière collège, par exemple, des écoles organisent des voyages obligatoires, liés à l'option spécifique choisie par les élèves, avec des préparations avant le séjour, en classe, avec des exposés ou des travaux à rendre. Si les élèves ne participent pas au voyage d'études, ils doivent faire le travail en classe pendant la période où ils ne sont pas partis. D'autres types de voyages sont des voyages linguistiques. Je viens d'en avoir dans l'école où j'étais. Les élèves qui ne sont pas partis ont dû faire de l'italien ou de l'allemand durant toute la semaine, donc en dehors des heures habituelles des cours qu'ils suivent.
Je crois, Mesdames et Messieurs les députés, qu'il est peut-être important, effectivement, de renvoyer cette proposition de motion en commission, pour que vous puissiez savoir tout ce qui se fait dans le canton. Mais vous vous rendrez compte que c'est beaucoup plus complexe que vous ne l'imaginez et qu'il ne suffit pas de dire «y a qu'à, y a qu'à, y a qu'à» pour régler les problèmes. Et surtout, je vous en prie, faites confiance au terrain et aux directions d'établissements, qui peuvent parfaitement cadrer les choses, plutôt que de vouloir à tout prix penser qu'il suffira d'une directive du chef du département pour régler des problèmes qui, au fond, sont des problèmes de société - vous parliez de respect, Monsieur le député, dans votre proposition de motion - qui sont peut-être liés aussi à notre société, plus, en définitive, qu'à l'école et à la manière dont les enseignants gèrent les voyages d'études. (Applaudissements.)
M. Mauro Poggia (MCG). Chers collègues, c'est vrai, la loi ne saurait générer la responsabilité individuelle. La loi ne saurait engendrer la maturité, ni même susciter la curiosité intellectuelle. Vous pouvez établir toutes les directives que vous voulez, ce n'est pas pour cela que, du jour au lendemain, d'un coup de baguette magique, nos jeunes, lorsqu'ils partiront en voyage de maturité, auront précisément cette maturité qu'ils seraient censés acquérir quelques mois plus tard.
Effectivement, il y a un point, dans cette proposition de motion, qui mérite notre soutien - et je ne suis pas le seul à avoir insisté sur ce point ce soir - c'est la participation des élèves à ce voyage. Ce n'est pas une course d'école. C'est effectivement quelque chose que l'on prépare pour se faire plaisir. Contrairement à Mme Anne Emery-Torracinta, j'ai un autre souvenir de mon voyage de maturité, puisque c'est moi qui l'avais organisé. C'était un peu plus tard, en 1978, à Rome. (Brouhaha.) Effectivement, on s'est bien amusé; on s'est aussi cultivé. Il est vrai qu'il n'y avait pas les compagnies d'aviation low cost et que l'on était descendus en train-couchettes... (Commentaires.) En tout bien tout honneur ! (Brouhaha. Le président agite la cloche.) Mais c'est vrai que l'on avait peut-être moins envie de faire la fête les soirs qui suivaient, puisqu'il fallait récupérer.
Alors vous pouvez renvoyer cette proposition de motion - le MCG soutiendra ce renvoi - à la commission de l'enseignement, mais j'ai bien peur que, finalement, la cause du problème ne soit pas trouvée lors des débats d'une commission. Le problème commence depuis l'enfance, c'est un problème d'éducation. Quand un jeune arrive à 18 ou 19 ans, il a accumulé le résultat de tout un enseignement, de toute une éducation, dont l'école n'est d'ailleurs pas seule responsable. Alors faisons l'exercice, si vous le voulez bien, mais j'ai pour ma part peu d'espoir. La solution se trouve ailleurs.
Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à Mme Marie-Thérèse Engelberts, à qui il reste une minute.
Mme Marie-Thérèse Engelberts (MCG). Pour compléter ce que vient de dire mon collègue, je voulais ajouter que les questions de voyages d'études consistent d'abord en un rapport de confiance entre les enseignants et les élèves et que, effectivement, cela doit se construire. Je ne suis pas au fait de toutes les nuances qu'il y a aujourd'hui, mais je dirai que la construction même d'un voyage d'études, que ce soit d'une sorte ou d'une autre, avec un corps enseignant, fait que, à un moment donné, on se met d'accord sur un certain nombre d'objectifs, et on les accepte. On définit ensemble un programme, et cela devient quelque chose d'extrêmement important dans cette relation entre les enseignants et les étudiants.
Des débordements, on peut imaginer qu'il y en aura toujours quelques-uns. Alors, autant qu'ils soient plutôt festifs, et non pas agressifs, et surtout pas à l'encontre de personnes. Mais j'ai un peu l'impression que cela a été monté en épingle, je ne crois pas que chaque voyage d'études fasse systématiquement l'objet...
Le président. Il vous faut conclure, Madame la députée.
Mme Marie-Thérèse Engelberts. ...de faits divers dans la «Tribune de Genève». Finalement, je ne pense pas que ce soit prendre un risque que de construire un projet d'études avec des étudiants.
M. Antoine Barde (L). Mesdames et Messieurs les députés, cette proposition de motion a pour objectif de redonner un sens aux voyages d'études, de redéfinir un peu l'objectif de ces voyages, d'accentuer le fait que leur but est l'acquisition de connaissances culturelles dans un nouveau pays plus que l'aspect festif - aller se dorer la pilule aux frais de la princesse, comme cela a déjà été dit. Voilà ce qu'il s'agit de souligner. Cette proposition de motion a aussi l'objectif d'impliquer les étudiants dans l'organisation de ce voyage, afin qu'ils prennent conscience de l'endroit où ils vont, des personnes qu'ils vont rencontrer, de la culture qu'ils vont découvrir.
D'autre part, je pense que cette proposition de motion a également l'objectif de réaffirmer l'autorité des encadrants, qui est probablement trop souvent remise en cause. Je crois que nous pouvons mettre l'accent sur ce point.
Je voulais encore souligner que, dans cette société, inculquer des valeurs tant culturelles que de respect est essentiel pour notre jeunesse. C'est un point qui me parait important et sur lequel nous souhaiterions insister. C'est pour cette raison, Mesdames et Messieurs, que le parti libéral-radical soutiendra le renvoi de cette proposition de motion à la commission de l'enseignement.
M. Jean Romain (R). Au fond, chacun a des souvenirs de voyages d'études à raconter, et on a entendu Mme Emery-Torracinta exposer combien c'était beaucoup moins bien en 1976, à la fin des années septante. C'est fort possible. Elle nous a dit que, dans certains collèges, il y a des élèves qui ne partent pas en voyage d'études et pour qui on organise, c'est juste, des choses. Mais on n'a pas de problèmes avec ceux qui restent ! On a des problèmes avec ceux qui partent, avec une grande partie de ceux qui partent. (Commentaires.) Alors le déni de réalité... (Commentaires.) ...le déni de réalité... (Brouhaha. Le président agite la cloche.) ...qui consiste à dire: «Tout va très bien, Madame la Marquise», ce déni de réalité n'a plus cours. Je crois que vous avez raison: dans certains collèges, on organise des voyages d'études avec les OS - l'option spécifique. Mais je ne pense pas que les profs de français puissent alors y participer, puisqu'il n'y a pas d'OS de français.
Je crois que l'on demande une chose relativement simple: essayer d'augmenter la liberté et la responsabilité de nos jeunes en ayant un rapport de pédagogie avec leurs maîtres et en ne partant pas avec des gens inconnus, à qui on soustrait - parce que les élèves ont dépassé 18 ans - l'opportunité de leur dire: «Non, tu passes les bornes.» C'est tout, et j'aimerais que l'on puisse en discuter en commission.
Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à M. Pierre Weiss, à qui il reste une minute et vingt secondes.
M. Pierre Weiss (L). Le titre de la proposition de motion, au fond, devrait être: «Pour une organisation de voyages d'études pédagogiques et de convivialité.» En effet, comme en 1976 pour Mme Emery-Torracinta, en 1978 pour M. Poggia, et dans des années peut-être du millénaire précédent pour d'autres dans cette salle, les voyages d'études ont été, pour ceux qui ont fréquenté les écoles genevoises, partagés à la fois entre études et convivialité. L'un et l'autre sont importants. Le problème est de savoir lorsqu'il y a explosion - de la partie études qui occuperait tout, ou bien de la partie convivialité - qui serait incontrôlé. Voilà la première chose. Donc il s'agit de savoir jusqu'où aller trop loin. Et j'ai remarqué qu'il y avait en tout cas un invariant entre Prague et Rome, c'était la consommation de bière ou de frascati !
La deuxième chose que je voulais dire - et cela ne doit pas être négligé - est qu'il faut regarder pour quelles raisons des parents refusent que leurs enfants partent en voyage d'études. Parce qu'il y a, justement, pour l'apprentissage de la convivialité, pour l'appartenance à un groupe, des parents qui, pour des raisons sur lesquelles il convient de se pencher, refusent...
Le président. Monsieur le député, il vous faut conclure.
M. Pierre Weiss. ...qui refusent de faire partie d'une collectivité. Et à l'égard de ces parents-là, je crois qu'il convient d'avoir aussi une approche de conviction pour que le groupe, pour que la classe ne soit pas séparée au moment de ces voyages d'études et de convivialité.
M. Charles Beer, conseiller d'Etat. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, d'abord peut-être quelques mots pour resituer le contexte général et dire que de nombreux, nombreux, nombreux voyages d'études sont organisés, qu'ils se déroulent bien, et que nous le devons à un corps enseignant qui, dans sa très grande majorité, son écrasante majorité, prend les choses en main, gère une présence d'adolescents et de jeunes adultes qu'il est parfois difficile d'accompagner dans des sorties organisées et pensées culturellement, mais qui laissent effectivement place aussi à la convivialité. Donc j'aimerais d'abord que l'on remarque tout ce qui est réalisé de façon très positive. C'est le fait d'enseignantes et d'enseignants qui, je le rappelle, décident de s'engager - rien ne les oblige à prendre des responsabilités - et qui accompagnent des jeunes gens qui, dans leur écrasante majorité également, non seulement sont tout à fait disciplinés, intéressés, mais aussi passent de bons moments lors de ces voyages d'études.
Puis il y a le fait divers. Et le fait divers qui apparaît nous a permis déjà de mesurer que les débordements peuvent être d'une gravité extrême. Tel n'a pas été le cas, parce que je ne peux parler d'extrémité, mais bien de gravité. A cette occasion, il faut non seulement saisir le fait divers, mais également le prendre en compte dans ce qu'il a de particulier et prendre en compte l'environnement, son environnement, de manière à bien penser la prise de risque.
Par rapport à cela, j'aimerais dire d'abord - et je rends hommage à votre Grand Conseil - que nous avons pris de bonnes décisions en instaurant par une loi un conseil de discipline. Celui-ci a permis de sanctionner des élèves qui s'étaient rendus coupables d'une agression. Je pense que, en prenant cette décision, le conseil de discipline a montré non seulement qu'il était légitimé à le faire, mais aussi que, légalement, il était positionné correctement, puisque ses décisions ont été confirmées par le Tribunal administratif dans leur ensemble.
Puis il y a l'environnement. Quand il y a le fait divers, il faut toujours s'interroger sur les circonstances qui peuvent, ou non, faciliter les débordements. D'abord, j'aimerais dire que la surréaction pourrait présenter un danger: tout particulièrement de rendre le voyage très peu attractif pour les enseignants, qui le préparent et prennent des risques, mais qui pourraient se sentir quand même déjugés du point de vue de leur activité. Et nous avons besoin de voyages bien pensés, bien positionnés.
Pour cela, nous avons également agi en demandant de clarifier l'ensemble des points de voyages d'études, parce que je rends bien sûr hommage au génie local, mais celui-ci correspond d'une certaine façon, doit correspondre, à des critères régulièrement réactualisés à la lumière des événements qui se produisent. C'est ce que nous avons fait. Sous l'égide de la direction générale de l'enseignement postobligatoire, un groupe de travail associant les enseignants de l'Union du corps enseignant secondaire genevois et de l'AGEEP, l'Association genevoise des enseignants des écoles professionnelles, s'est mis au travail de manière à pouvoir clarifier les conditions de responsabilité, de préparation et d'orientation de ces voyages. C'est non seulement avec plaisir, mais aussi motivation, que, le cas échéant, je me rendrai devant la commission de l'enseignement, de l'éducation, de la culture et du sport pour vous faire part de l'actualisation de ces contrats-cadres, de ces directives, qui doivent avoir toujours la légitimité du terrain et qui se doivent, aussi, quelque part, de passer devant le contrôle des autorités.
Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, nous nous prononçons sur le renvoi de cette proposition de motion à la commission de l'enseignement.
Mis aux voix, le renvoi de la proposition de motion 1982 à la commission de l'enseignement, de l'éducation, de la culture et du sport est adopté par 55 oui contre 18 non et 1 abstention.
Présidence de Mme Elisabeth Chatelain, deuxième vice-présidente
Débat
Mme Marie Salima Moyard (S). Mettre en place une véritable valorisation des langues allophones au sein de l'école publique genevoise est le but de cette motion que le groupe socialiste vous propose.
De quoi est-il question ? Vous savez sûrement, ou alors je vous l'apprends, que 42% des enfants scolarisés à Genève sont allophones, c'est-à-dire qu'ils n'ont pas le français comme première langue parlée. Or de nombreuses études scientifiques ont montré une bien meilleure maîtrise du français lorsque l'on possède correctement sa propre langue maternelle. C'est un premier point. Le second, c'est qu'une langue est aussi une histoire, une culture, une origine. En bref: une identité. Avoir confiance en sa langue d'origine, c'est avoir confiance en soi pour mieux aller vers la diversité culturelle, vers l'autre, dans un esprit d'ouverture, loin de tout ghetto et de repli identitaire.
Vu la forte proportion d'élèves allophones dans notre canton, le statut de ville internationale qui n'est plus à prouver et l'atout que la maîtrise des langues représente aujourd'hui, tous ces éléments ont amené le groupe socialiste à estimer comme une évidence la reconnaissance, la valorisation ou, autrement dit, la mise en place de conditions-cadres par le DIP, en lien avec les ambassades et consulats, très largement représentés dans notre canton, pour renforcer ces apprentissages. C'est d'ailleurs aussi l'avis de la CDIP, la Conférence suisse des directeurs cantonaux de l'instruction publique, puisque, dans l'accord intercantonal HarmoS, que vous connaissez bien depuis le débat d'hier soir, et dont je cite l'article 4, alinéa 4, il est question de la même problématique: «En ce qui concerne les élèves issus de la migration, les cantons apportent, par des mesures d'organisation, leur soutien aux cours de langue et de culture d'origine (cours LCO) organisés par les pays d'origine et les différentes communautés linguistiques dans le respect de la neutralité religieuse et politique.»
Qu'en est-il donc des invites de cette proposition de motion ? Il s'agit dans un premier temps de faire un état des lieux complet, trop succinct à ce jour, sur l'offre actuelle dans les trois niveaux d'enseignement - l'école primaire, le cycle d'orientation et le postobligatoire - sur les collaborations existantes entre le DIP et les autres partenaires, ainsi que sur les rôles et les responsabilités de chacun, car c'est un dossier qui n'est pas si simple.
Après cet état des lieux, il s'agirait aussi d'élargir l'offre actuelle, de la systématiser, car elle est très disparate aujourd'hui, et de valoriser les compétences acquises dans le parcours de l'élève. Dans la proposition de motion, nous avons pensé à trois éléments, mais il y en a peut-être d'autres. Augmenter l'offre actuelle de cours, à un prix raisonnable, permettrait ainsi à tous les élèves allophones de prendre des cours dans un cadre laïque, ce qui n'est pas toujours le cas aujourd'hui. Un deuxième élément pourrait être le fait de renforcer le rôle de coordination du DIP face à toutes ces représentations d'Etat présentes à Genève; elles sont 165 à ce jour. Finalement - et c'est important pour nous - il s'agirait de mieux reconnaître les acquis des élèves, par exemple en inscrivant systématiquement dans le carnet le cursus de l'élève, voire en le notant, de manière à attester de ses connaissances.
La présidente. Il vous faut conclure, Madame la députée.
Mme Marie Salima Moyard. La question n'est pas du tout que ces cours soient entièrement assurés financièrement par le DIP, mais il pourrait y avoir une réflexion, peut-être sur un fonds inter-Etats ou sur une aide ponctuelle à des représentations plus démunies que d'autres, car il y a une grande disparité à ce jour.
La présidente. Il vous faut conclure, Madame la députée !
Mme Marie Salima Moyard. C'est ce que je vais faire, Madame la présidente. Voilà pourquoi je propose de renvoyer cette motion à la commission de l'enseignement, afin, dans le contexte de l'harmonisation, du plan d'études romand et de l'accueil continu voté par le peuple, qui sont de grands chantiers, de pouvoir traiter de cette question. (Applaudissements.)
Mme Christina Meissner (UDC). Mesdames et Messieurs, maîtriser une langue étrangère est en effet un atout. Une langue étrangère est une culture, les racines qu'il faut effectivement garder et entretenir. Comme vous l'avez très bien dit, 42% des enfants scolarisés à Genève ont pour langue maternelle une autre langue que le français. Dans ces conditions, c'est la langue française qui se trouve largement mise à mal aujourd'hui. Et il s'agirait maintenant, au DIP, non seulement de s'occuper de l'essentiel, en l'occurrence le français, mais aussi de toutes les autres langues allophones pour coordonner le travail avec les 165 représentations de pays étrangers, dont certaines s'occupent déjà de donner des cours. Coordonner et noter les élèves, c'est un travail immense ! Non, ce travail doit se faire au niveau des ambassades, des organisations étrangères.
De plus, j'apprends en lisant cette proposition de motion - je lis cet extrait de la page 5: «Prenons un seul exemple: celui de l'enseignement de l'albanais, dont la communauté à Genève représente environ 12 000 personnes. Cette année, l'enseignement de cette langue n'a pu être garanti qu'à la suite d'un amendement au budget proposé par les socialistes demandant l'allocation d'une somme de 100 000 F au Bureau de l'intégration des étrangers (BIE). En effet, grâce à une partie de cet argent, qui lui sera reversé, la communauté albanaise de Genève sera en mesure de dispenser un enseignement à plus de 300 enfants de 7 à 12 ans [...].» Or ce financement n'est pas garanti pour 2011. Je calcule: 100 000 F fois 165 représentations étrangères... Mais nous n'avons simplement pas les moyens de promouvoir toutes les langues étrangères ! (Commentaires.)
Alors oui, avoir un état des lieux de la manière dont se passe effectivement la coordination, savoir qui enseigne quoi, quelle est la part et quel est le rôle du DIP dans tout cela, je pense que c'est pertinent. Quant à engager le DIP au-delà de son rôle qui, je le rappelle, est déjà d'apprendre aux élèves l'essentiel - en l'occurrence le français, qui n'est pas maîtrisé ou qui est de plus en plus mal maîtrisé - eh bien, je crois qu'engager le DIP au-delà serait exagéré.
Il appartient à la famille, aux communautés étrangères, de favoriser la maîtrise de la langue étrangère, de la langue maternelle des enfants. Je suis moi-même d'origine polonaise. (Remarque.) Ce n'est pas l'ambassade qui m'a enseigné la langue, mais mes parents. Ma mère est même allée jusqu'à m'apprendre le chinois, sachant que, un jour, on devrait peut-être tous le parler. (Commentaires.) Hélas pour elle, après quatre ans d'études, j'ai épousé un Libanais !
Finalement, il appartient à chaque famille de se préoccuper de ses enfants, afin qu'ils aient des racines, et il n'appartient en aucun cas à l'instruction publique de se substituer aux parents.
La présidente. Merci, Madame la députée. La parole est à Mme Sylvia Nissim. (Le micro de Mme Sylvia Nissim ne fonctionne pas. Quelques instants s'écoulent.) Est-ce possible de brancher le micro de Mme Nissim ? (Remarque.) Prenez la place de votre voisin, Madame la députée. (Le micro de cette place ne fonctionne pas non plus.) Essayez celui derrière... (Mme Sylvia Nissim retourne à sa place, son micro fonctionnant à nouveau. Exclamations.)
Mme Sylvia Nissim (Ve). Voilà, ça fonctionne ! Merci. Mesdames et Messieurs les députés, les Verts vont soutenir sans hésitation cette proposition de motion socialiste. Contrairement à ma préopinante - qui ne m'écoute pas, mais ce n'est pas grave - nous considérons qu'apprendre sa langue d'origine aide et facilite l'apprentissage du français et des autres langues, par la suite. Nous trouvons les considérants plus que valables, que ce soit par la force des chiffres, vu le nombre d'élèves que cela touche, par la force de l'attractivité de la Genève internationale et par la chance - car c'est bien d'une chance que l'on parle - la chance particulière que Genève a en bénéficiant de la présence de nombreuses représentations étrangères, à travers les ambassades et les missions, et enfin par le non négligeable atout de connaître deux langues ou plus, lors des études mais aussi dans le monde du travail, auquel ces élèves seront vite confrontés.
Les invites, quant à elles, ne mangent pas de pain. Nous sommes persuadés qu'une présentation de l'offre existante à la commission de l'enseignement ne pourra que nous enrichir, mes collègues et moi-même. Concernant la reconnaissance de l'importance des langues allophones et l'encouragement de leur pratique par un programme de promotion pour les rendre plus attractives et mieux les connaître, cela nous semble tout à fait raisonnable et nécessaire. Nous vous recommandons donc le renvoi de cette proposition de motion à la commission de l'enseignement, afin que nous puissions en débattre plus avant.
M. Jean-François Girardet (MCG). Mesdames et Messieurs les députés, le groupe MCG s'opposera catégoriquement à cette proposition de motion. Nous sommes citoyens, citoyens genevois. A Genève, hier, le parlement a décidé d'ajouter, le mercredi matin, quatre heures d'enseignement à l'école primaire pour les 8-12 ans. Je posais la question en fin de débat: «Mais à quoi serviront ces quatre heures ?» En résumé, le plan d'études romand nous impose un certain nombre d'obligations, c'est vrai: il y a l'anglais qui devient une priorité à introduire pour les élèves de 5e et de 6e; de plus, on voudrait faire un effort pour le développement durable; s'ajoute encore la sensibilisation à la sécurité, aux médias, au cinéma, aux communications de toutes sortes; puis, l'éducation citoyenne vient encore s'ajouter au programme que l'on voudrait imposer aux élèves de 8-12 ans. On a également voté 4 millions pour renforcer l'enseignement prioritairement de la lecture dans les petits degrés.
Les moyens qui ont été mis pour ce mercredi matin, 16 millions, financent l'ajout de quatre heures, alors que, au cycle d'orientation, on vient d'ajouter 30 millions pour la nouvelle grille horaire. On me dira: «Cela n'a rien à voir»... Mais cette proposition de motion ajoute ou désire ajouter des heures pour enseigner des élèves allophones. Alors je prends à partie ce parlement: on vient de voter une motion, proposée par M. Pierre... Weiss - j'allais dire «Bianco» - et...
M. Pierre Weiss. Albus !
M. Jean-François Girardet. «Albus» ! ...et l'on vient d'ajouter une heure d'enseignement du latin pour les classes de 7e du cycle d'orientation. Alors je vous demande comment et où on ajoutera encore des heures d'enseignement pour les allophones, comme le propose cette motion ! Cela d'autant plus qu'il est dit: «Au niveau de l'enseignement primaire, les cours existants, notamment en italien, espagnol, portugais, portugais du Brésil, albanais, turc, arabe, serbo-croate sont financés par les ambassades des pays respectifs ou par des associations agréées par le DIP et subventionnées via le Bureau de l'intégration», comme vient de le rappeler Mme Meissner.
La présidente. Il vous faut conclure, Monsieur le député.
M. Jean-François Girardet. Oui, Madame la présidente. Pour ces raisons, nous estimons, au MCG, que la priorité doit être donnée aux élèves de nos écoles, notamment pour qu'ils apprennent davantage et mieux le français.
Des voix. Bravo ! (Applaudissements.)
M. Jean Romain (R). M. Girardet a parlé chiffres. Parlons lettres. Connaître sa langue, vous avez raison, c'est connaître sa propre culture et c'est un élément de stabilité pour tout être humain, c'est vrai, quel qu'il soit. Les racines linguistiques sont, à l'évidence, fondamentales, parce qu'on est d'une langue, quelle qu'elle soit, comme on est d'un pays. Une langue, c'est une odeur, une couleur, un lieu d'où elle émane, une saveur; et la saveur des choses est d'abord dans les mots. C'est pourquoi les ambassades et leurs représentations chez nous mettent l'accent sur ce versant de la langue d'origine. Elles le font, et elles le font bien. D'ailleurs, fort heureusement et contrairement à pas mal d'autres villes, nous avons à Genève beaucoup de chance, parce que nous avons justement, à Genève, beaucoup d'ambassades, et c'est cette présence qui assure de manière magnifique ce qu'il leur revient, cette transmission. Ce n'est pas le cas de toutes les villes de Suisse romande, bien moins desservies par cette présence.
Nous ne pensons pas que ce soit la charge de l'Etat que d'assumer, tout ou en partie, cette transmission linguistique. Des cours payés par l'Etat, pour les élèves allophones, cela signifie que l'on prétérite les francophones, tout comme les Suisses allemands venus à Genève, qui eux n'auront pas de cours supplémentaires de français. Or la maîtrise du français, même pour les élèves francophones, même pour eux, est plus que déficiente. Cet enseignement devrait être prioritaire pour tous les élèves de l'école genevoise. Soustraire les cours de langues étrangères aux ambassades des pays concernés ou de leurs représentations chez nous, pour les transférer à la charge de l'Etat ou, éventuellement, dans un partenariat avec l'Etat, c'est augmenter le coût de l'école au bénéfice des seuls élèves allophones !
Nous, nous ne sommes pas amateurs de cette discrimination positive, parce que nous ne sommes pas amateurs de quelque discrimination que ce soit. C'est pour cela que nous ne soutiendrons pas cette proposition de motion.
Des voix. Bravo ! (Applaudissements.)
Mme Anne-Marie von Arx-Vernon (PDC). Pour le parti démocrate-chrétien, il sera de toute façon intéressant de renvoyer cette proposition de motion à la commission de l'enseignement. Il y a des choses à étudier avec lesquelles nous sommes d'accord et il y en a d'autres avec lesquelles nous ne le pouvons pas forcément. Mais ce qui est certain, Madame la présidente, c'est que, pour le parti démocrate-chrétien, il est important de continuer à développer de manière durable les langues d'origine, car nous savons que mieux on maîtrise sa langue d'origine, mieux on s'intègre dans son pays d'adoption. Nous sommes convaincus de la nécessité, voire de l'exigence d'un contrat d'intégration pour les étrangers qui s'installent à Genève, afin qu'ils maîtrisent le français, nos us et coutumes, nos valeurs, nos institutions. Dans la même logique, nous savons qu'il est indispensable de soutenir toute démarche qui renforce le bilinguisme, le trilinguisme, qui est en fait la garantie, Madame la présidente, que Genève reste attractive aux niveaux culturel, social et économique.
M. Pierre Weiss (L). Madame la présidente de séance, je suis heureux de m'exprimer face à vous. Mesdames et Messieurs les députés, j'aimerais tout d'abord dire combien je suis reconnaissant aux auteurs de la proposition de motion, qui sont issus de l'Alternative, de reconnaître le rôle positif de la mondialisation. Voilà enfin, ce soir, la mondialisation notamment mise en exergue au début de ladite proposition de motion, et parfois conversion tardive vaut mieux qu'absence de conversion; voilà une bonne chose ! C'est aussi reconnaître implicitement le rôle de l'aéroport de Genève, le rôle des moyens de communication. C'est de la part des auteurs de ce texte un pas significatif que je voulais saluer. Je ne voulais pas oublier de le souligner à l'intention de ceux qui n'auraient pas déchiffré ou décrypté toutes les intentions peut-être subliminales de cette proposition de motion. (Remarque.)
En deuxième lieu, je partage tout à fait l'avis de Mme von Arx-Vernon sur la nécessité d'un contrat d'intégration. L'on ne peut imaginer en effet soutenir une telle proposition de motion si elle ne s'accompagne pas d'une démarche concernant les contrats d'intégration. Or je n'ai pas compris, à la lecture et des invites, et des considérants, et du texte de la proposition de motion, que cette dernière s'accompagne précisément de cette démarche vers les engagements et la responsabilité à l'égard de la société hôte de la part des parents et élèves allophones. Donc, en l'état, cette proposition de motion me semble insatisfaisante. Si elle nous revenait complétée, par les auteurs, d'une volonté de faire signer des contrats d'intégration, mon approche serait certainement différente.
En troisième lieu, il y a la partie qui concerne l'enseignement proprement dit. Alors que l'on nous explique que les grilles horaires sont pleines à craquer, que l'on peine à trouver du temps pour assurer les fondements de notre culture de base - on a vu la discussion pour le latin: même pour une demi-heure, pour une heure, on ne peut trouver que deux trimestres pour le fameux regroupement 3 du cycle - voilà que, soudainement, il y aurait de la place pour les langues allophones ! Il y a quand même un problème de priorité qui se pose ! Doit-on privilégier des minorités ou, au contraire, la culture majoritaire de la société dans laquelle nous vivons ? Je crois que, à cette question, les motionnaires n'ont pas suffisamment, pour l'heure, réfléchi.
Enfin, les conséquences financières doivent aussi être prises en considération. Je ne partage pas la vision un peu catastrophiste de notre collègue Meissner qui imaginait qu'il y ait tout à coup 160 langues que l'on doive subventionner à raison de 100 000 F. Que je sache, les élèves originaires des îles Tonga sont plus faibles en nombre que ceux qui viennent d'Albanie ou du Kosovo. (Remarque.)
La présidente. Il vous faut conclure, Monsieur le député.
M. Pierre Weiss. Je conclurai simplement en disant que s'il y a effectivement des élèves albanais en grand nombre, il y a également une communauté albanaise qui, pour notamment assurer la vigueur de la société du Kosovo, a su trouver en elle-même les moyens financiers pour transférer dans ce pays, là-bas, les ressources nécessaires. Je suis persuadé qu'elle peut aussi les trouver pour les 100 000 F dont il a été question tout à l'heure, de façon tout à fait légale cette fois-ci.
Mme Lydia Schneider Hausser (S). Je suis quand même étonnée de toutes les réactions entendues jusqu'à maintenant. D'abord, il y a une mauvaise compréhension de la proposition de motion... (Remarque.) Oui, mais je vais peut-être vous l'expliquer ! ...et il y a peu d'ambition et de vision du futur. A Genève, on n'a pas de mine d'or ni d'uranium. A Genève, plus des 50% de la population parlent des langues d'origine étrangère. Alors oui, on a donné de l'argent pour que les gens des communautés elles-mêmes apprennent leur langue maternelle, ce qui est important individuellement pour aller de l'avant dans le français et dans l'apprentissage de notre langue cantonale.
Par contre, ici, la demande est d'aller plus loin. C'est de dire que mon enfant - ma fille, mon fils - s'il a envie d'apprendre l'arabe, il le peut, non pas dans la grille horaire, mais dans les heures qui seront en plus, le mercredi matin, ou à d'autres moments dans le cursus scolaire, ou encore à côté de ce dernier. (Brouhaha.)
Mesdames et Messieurs les députés, c'est vrai que cela demande de se projeter dans l'avenir, pas d'une mondialisation, mais simplement d'une valorisation de ce qui existe à Genève et que l'on n'arrive pas à porter au-delà des communautés. Et je crois que refuser cette proposition de motion, c'est refuser d'une certaine façon une vision différente de Genève, avec la population qui la compose. Cela avait déjà été relevé, concernant la loi sur l'intégration et le rapport que la commission des Droits de l'Homme avait rendu; on nous avait déjà exposé que des travaux étaient effectués au niveau intercantonal, justement sur ce melting-pot et sur cette valorisation que l'on pourrait faire des langues autres que le français. Il s'agit de pouvoir partager cela aussi avec nous, Genevois, et avec nos enfants.
Genève, qu'on le veuille ou pas, comme le dit M. Weiss, oui, Genève est au centre de l'Europe; oui, on a, à Genève, des diasporas de plusieurs pays du monde. (Brouhaha.) Alors, pouvoir valoriser l'apprentissage de nos enfants dans certaines langues et cultures autres que celles de Genève permettrait peut-être un développement que, malheureusement, nous sommes en train d'enterrer avant d'y avoir réfléchi ce soir.
M. Charles Beer, conseiller d'Etat. Madame la présidente, Mesdames et Messieurs les députés, il convient peut-être de rappeler que les cours de langues d'origine concernent potentiellement une grande partie de la population scolaire. Permettez-moi de dire que - et cela n'est nullement controversé au niveau de la recherche - tout démontre qu'une bonne connaissance et la maîtrise de la langue d'origine permettent plus facilement d'entrer dans l'apprentissage d'une nouvelle langue, principalement la langue d'accueil, la langue pratiquée dans l'école.
A partir de ce constat - je rappelle qu'il n'est pas controversé - respectivement l'ensemble des pays, mais, plus proches de nous... (Brouhaha. La présidente agite la cloche.) ...mais, plus proches de nous, l'ensemble des cantons se sont unis pour signer un concordat, que vous avez ratifié, qui s'appelle HarmoS et qui prévoit très clairement dans ses dispositions l'encouragement de l'apprentissage des langues d'origine. Très clairement, également, le plan d'études romand inscrit dans ses objectifs le fait d'encourager l'apprentissage des langues d'origine.
Mesdames et Messieurs, il est inutile de développer de fausses querelles en ce qui concerne les attentes partagées de faire en sorte que la pratique du français soit mieux entretenue et mieux, aussi, partagée. Je pense que nous avons à mesurer cela, et nous devons éviter de l'opposer à langue d'origine.
Monsieur le député Weiss, vous avez évoqué la question, après d'autres, des contrats d'intégration. Peu importe, finalement, le libellé de la proposition de motion, je ne suis pas là pour défendre une proposition de motion; mais je suis là pour défendre les pratiques du département de l'instruction publique, de la culture et du sport, les pratiques encouragées par le Bureau de l'intégration, rattaché au département de la sécurité, de la police et de l'environnement, finalement une vision du Conseil d'Etat où l'on souhaite améliorer le climat scolaire et améliorer la pratique et la maîtrise du français, en passant par cet encouragement.
Bien évidemment, ce n'est pas au détriment du français que nous devons le faire. Preuve en est le fait que le français, en termes de classes d'accueil, se déroule sur l'horaire scolaire, alors que le renforcement des compétences dans les langues d'origine se situe en dehors du temps scolaire. C'est bien cela qui est prévu également. Il faut faciliter cet accès et le fait que les enfants, quelle que soit leur origine, puissent pratiquer leur langue en dehors du temps scolaire, pour mieux se retrouver dans l'apprentissage du français sur le temps scolaire.
Mesdames et Messieurs, je pense que nous avons besoin d'un consensus là autour, parce que cette question n'est pas l'objet, au niveau suisse, de véritables combats, de véritables controverses. Au contraire, au niveau de l'éducation, au niveau des gouvernements, pratiquement l'ensemble des responsables partagent cette vision et cette opinion.
Permettez-moi enfin de dire que, dans les tests PISA... (Brouhaha. La présidente agite la cloche.) Je vois que M. Romain rit, mais je ne sais pas dans quelle langue. Ce doit être en latin ! (Commentaires. Chahut.) Alors je souhaite vous dire, car cela vous intéressera tous, et M. Romain aussi, qu'à l'occasion des tests PISA, au niveau suisse, on aura pu montrer que, en neuf ans, l'écart entre les élèves allophones non natifs et les natifs s'est resserré. Oui - parce qu'il faut le remarquer - un certain nombre de choses fonctionnent, y compris dans les départements de l'instruction publique des différents cantons de notre pays !
Je terminerai en disant ceci. Mesdames et Messieurs les députés, soyons très attentifs, si nous voulons parler de la Genève internationale, à ne pas diviser deux catégories de migrants, d'un côté ceux que l'on qualifie très régulièrement «de la Genève internationale» et, de l'autre côté, les immigrés. Mesdames et Messieurs les députés, il ne saurait y avoir de traitement particulier pour une Genève anglophone et on ne saurait considérer de façon diamétralement opposée le sort, par exemple, d'élèves qui sont attachés, par leur origine, à la langue arabe, au turc ou encore à d'autres langues. Mesdames et Messieurs les députés, la Genève internationale - c'est probablement l'un des aspects importants pour son avenir - devra capitaliser également sur la connaissance et le savoir des différentes langues, pour faire en sorte d'attirer tous types d'activités. Bien entendu, nous avons les activités onusiennes et celles des multinationales, mais nous aurons besoin, au niveau des entreprises - et c'est leur quotidien - de multiples langues, maîtrisées par une main-d'oeuvre capable ainsi de jeter des ponts avec l'ensemble des pays. L'environnement de Genève se situe sur la carte du monde comme un point privilégié à cet égard.
Je tenais simplement à remettre tout cela en perspective, du point de vue des pratiques et des objectifs. Nous avons, j'en suis convaincu, fondamentalement le même but: une meilleure intégration, une meilleure maîtrise de la langue française et des langues, ainsi qu'une diversité des langues, de manière à mieux préserver notre avenir en termes de connaissance et d'ancrage dans la communauté internationale. (Applaudissements.)
La présidente. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, nous sommes saisis d'une demande de renvoi à la commission de l'enseignement.
Mis aux voix, le renvoi de la proposition de motion 1992 à la commission de l'enseignement, de l'éducation, de la culture et du sport est rejeté par 44 non contre 30 oui.
Mise aux voix, la proposition de motion 1992 est rejetée par 44 non contre 29 oui et 1 abstention.
Présidence de M. Renaud Gautier, président
Débat
M. Charles Selleger (R). Mesdames et Messieurs les députés, cette proposition de motion part des constatations suivantes. Une place de crèche coûte globalement 40 000 F par an. La part contributive des parents, en fonction de leur capacité financière, ne dépasse pas 12 000 F, elle est très souvent beaucoup plus basse. La charge financière résiduelle à charge des collectivités, les communes principalement, s'élève donc au mieux à 28 000 F par an.
Mais cette proposition de motion n'est pas qu'un exercice comptable. Elle part aussi de la constatation maintes fois vérifiée que les familles désireuses d'assurer la garde de leur enfant en bas âge ne peuvent sacrifier le salaire d'un des parents. Ils sont contraints de recourir à une forme de garde pour tout ou partie de leur temps d'activité professionnelle. La mesure qui vous est proposée constitue un véritable incitatif pour des parents dont l'un renoncerait à tout ou partie de son activité lucrative. Elle ne constitue pas un salaire parental, car l'ordre de grandeur de la subvention proposée devrait être d'environ 1000 F par mois, ce qui, vous en conviendrez, n'est pas comparable à un salaire, même modeste.
Cette proposition de motion s'est heurtée à un débat très vif au sein de notre formation politique, et je ne vous cache pas qu'elle n'a pas obtenu un soutien majoritaire. Cette proposition... (Brouhaha. Le président agite la cloche.) Merci, Monsieur le président. Cette proposition a toutefois été jugée suffisamment intéressante pour qu'elle soit déposée en vue de son renvoi à la commission de l'enseignement, compétente en matière de petite enfance.
Les principales oppositions ont concerné les points suivants: renvoi des femmes au foyer, inapplicabilité aux familles monoparentales, incitatif insuffisant, le fait que l'activité de parent ne doit pas être salariée, mode de financement et, enfin, inégalité de traitement pour les familles aisées par rapport aux familles défavorisées économiquement. Sans vouloir entrer dans les détails, je répondrai très brièvement à ces oppositions.
Ce projet n'est pas destiné aux seules mères de familles. La souplesse d'utilisation prévue dans les invites permettrait par exemple aux deux parents de réduire leur activité à mi-temps chacun et de se partager la garde de l'enfant. Cette solution répondrait accessoirement aussi au risque de désinsertion professionnelle. Bien entendu, une mère seule au foyer ne pourrait pas bénéficier directement d'un tel projet. Toutefois, indirectement, le placement de son enfant en crèche se verrait être facilité par les places libérées par les enfants de parents pouvant souscrire à ce système.
Si le montant de l'allocation est trop faible et que peu de gens y souscrivent, rien n'empêcherait une réévaluation ultérieure. Tant que le montant alloué reste inférieur à la subvention d'une place en crèche, les finances publiques sont bénéficiaires, et la marge est grande pour déplacer le curseur dans ce sens. Etre parents ne doit pas constituer une activité lucrative, certes. Formellement, cette allocation n'est pas plus un salaire que les allocations familiales, qui, elles, ne sont contestées par personne. Le mode de financement devrait être le même que celui qui subventionne les crèches, évidemment, puisque le système vise à réduire le montant global de cette subvention.
Enfin, les familles aisées ne sont pas traitées d'une manière inégale par rapport à la situation actuelle du placement d'un enfant en crèche, puisque la contribution parentale est fonction de la capacité financière de la famille.
Le président. Il vous faut songer à conclure, Monsieur le député.
M. Charles Selleger. En conclusion, dans le contexte de l'initiative 143 et de son contreprojet en gestation, il est inéluctable que l'offre de placement des enfants en âge préscolaire dans une structure d'accueil va augmenter sensiblement. Il est donc d'autant plus important d'étudier toute solution alternative complémentaire de nature à élargir le choix parental, tout en réduisant le montant à charge des collectivités. Je vous propose donc, Mesdames et Messieurs les députés, de voter le renvoi de cette motion à la commission de l'enseignement, et je vous en remercie.
M. Patrick Lussi (UDC). Mesdames et Messieurs les députés, certes, le détail n'est pas là, mais en lisant une telle proposition de motion, l'UDC ne peut être que satisfaite. Car, rappelez-vous, nous préconisons depuis des années que l'éducation primaire doit être faite si ce n'est par la mère, du moins dans un système parental à domicile.
Alors, mon cher préopinant, vous avez fait plein de démonstrations, je ne veux pas les contredire. L'UDC soutiendra cette proposition de motion et son renvoi en commission, où peut-être nous arriverons sur quelques détails, de manière à les affiner. Mais, de prime abord, cette proposition de motion va dans le bon sens, et l'UDC ne peut que la soutenir.
M. Jean-François Girardet (MCG). Mesdames et Messieurs les députés, le groupe MCG soutiendra le renvoi de cette proposition de motion à la commission de l'enseignement et de l'éducation. Le MCG accueille avec reconnaissance cette proposition de motion et remercie les motionnaires d'avoir pensé à cette allocation parentale. Nous nous réjouissons de pouvoir l'étudier en commission, car c'est une mise en valeur du métier, de la vocation ou même de la fonction de parents que cette motion se propose de promouvoir. J'encourage donc notre parlement à étudier cette question en commission.
Mme Lydia Schneider Hausser (S). Mesdames et Messieurs les députés, cette proposition de motion ne s'adresse qu'à une certaine catégorie de parents, à savoir ceux qui peuvent se permettre de perdre tout ou partie d'un deuxième salaire et qui peuvent se satisfaire, en lieu et place de celui-ci, d'une allocation annuelle de faible montant. Il est vrai que, comme le disait M. Selleger, les crèches coûtent cher; cela coûte peu près la moitié, donc on est autour des 10 000 F ou 11 000 F, peut-être 12 000 F, par an.
Cette proposition de motion pénalise en plus le parent d'une famille monoparentale, parent qui ne peut s'arrêter de travailler, qui élève seul son enfant et qui est obligé de le placer à plein temps dans une structure d'accueil de jour - pour autant qu'il lui reste cet accueil de jour. Cette proposition de motion défavorise les carrières féminines et l'accès au marché de l'emploi pour les femmes, qui risquent fort d'être celles qui, in fine - comme le disait d'ailleurs M. Lussi - resteront à la maison, et elle introduit par conséquent un risque accru d'inégalité de traitement entre les hommes et les femmes; elle risque d'inciter les femmes à sortir du monde du travail pour toucher une faible allocation qui peut, à terme, entraîner une précarisation de la famille, car le retour à l'emploi pour les femmes est de plus en plus difficile malgré les mesures de réinsertion; elle introduit un risque de discrimination entre les parents, le droit à l'allocation étant restreint aux deux parents qui travaillent au moment de la naissance de l'enfant.
Bien que l'intention de l'auteur ne soit pas d'empêcher le développement de l'offre de places en crèche, elle risque de péjorer celui-ci. En effet, il sera difficile de planifier cette offre en crèches sans savoir quel sera le choix des parents en matière de prise en charge des enfants.
Par ailleurs, il est important de noter que les institutions de la petite enfance jouent aujourd'hui des rôles sociaux et éducatifs essentiels auprès de toutes les familles, en favorisant la création de liens sociaux, de réseaux d'entrée, et il est important, dans le contexte actuel, où un certain nombre de familles sont isolées, de développer et de renforcer ces réseaux. Dans une institution de la petite enfance, une crèche, l'enfant fait ses premières expériences de socialisation extrafamiliale et acquiert des processus d'apprentissage qui lui seront utiles par la suite.
En conclusion, une politique familiale devrait tenir compte, bien sûr, du bien-être de l'enfant, de la place de la femme dans la société et des contraintes socioéconomiques réelles des familles. Aussi, le développement des structures d'accueil extrafamilial reste incontournable et, en ce sens, devrait faire l'objet d'une réflexion quant à une répartition des charges de ces structures entre la Confédération, les cantons et les communes. Des études le montrent, 1 F investi rapporte environ 3 F à la collectivité en termes d'employabilité des femmes et de possibilités de développement de l'économie. Plutôt que de...
Le président. Il vous faut conclure, Madame la députée.
Mme Lydia Schneider Hausser. Oui ! Plutôt que de proposer une allocation parentale telle qu'elle est décrite dans la proposition de motion, il serait pertinent de réfléchir à la mise en place d'un congé parental d'une année au minimum, partiellement ou totalement rémunéré, avec une garantie de retrouver son emploi.
Le président. Il vous faut conclure, Madame la députée !
Mme Lydia Schneider Hausser. Voilà ! C'est là que le choix pourrait se faire pour les familles et les parents.
Mme Mathilde Captyn (Ve). C'est intéressant, car ma préopinante en particulier et certains autres dans l'hémicycle ont pu estimer que cette proposition de motion avait un relent ou un côté réactionnaire, parce qu'elle viserait les femmes, qui, aujourd'hui, se chargent encore en majorité des tâches ménagères et de l'éducation des enfants, effectivement, et aussi parce qu'elle vient des bancs de droite. Pour une fois, sur un tel sujet, c'est plutôt étonnant. Pourtant, le Verts l'ont signée. Sur ce coup, non, nous ne faisons pas preuve de «réactionnite aiguë»; au contraire, nous nous sommes beaucoup battus pour l'instauration d'un congé parental. Or, qu'est-ce qu'un congé parental ? Un congé parental est la possibilité pour un parent, le père ou la mère, de prendre un temps spécifique consacré à ses enfants, de manière rémunérée. La partie rémunérée, évidemment, c'est l'allocation parentale. Comme il existe un congé maternité, il y a aussi une allocation maternité. Au même titre, il existerait dans notre idéal un congé parental, avec le versant financier: l'allocation parentale.
Que veulent les Verts, au fond ? Le libre choix pour les parents de pouvoir organiser comme ils le souhaitent leur équilibre financier et la garde des enfants. Nous ne voulons pas un seul modèle, c'est-à-dire que les deux parents travaillent à 100% et que l'enfant soit forcément pris à 100% en charge par la collectivité publique - il n'y a pas qu'un seul modèle à défendre ! - nous voulons surtout que les parents puissent choisir s'ils veulent travailler à temps partiel, si l'homme ou la femme veut prendre un congé, afin de pouvoir s'occuper, une partie du temps en particulier, de ses petits enfants ou de son petit enfant entre 0 et 4 ans. C'est la raison pour laquelle nous avons signé cette proposition de motion. Elle ne vise clairement pas que les femmes. Je suis certaine que les bancs d'en face n'oseront pas fixer cette mesure - de toute façon, ce serait illégal - spécifiquement pour les femmes. C'est la raison pour laquelle nous vous engageons à accepter le renvoi de cette proposition de motion à la commission de l'enseignement, afin de pouvoir la lier au débat sur l'initiative «Petite enfance».
Vous savez tout comme moi que la solution pour la petite enfance réside non seulement dans les places en crèche et dans des allocations familiales dignes de ce nom, mais aussi dans un congé parental, et tout cela va en faveur de l'égalité homme-femme. C'est bien maintenant que la question se pose, puisque l'on est à trente ans des festivités sur la question du principe d'égalité homme-femme. (Applaudissements.)
M. Philippe Schaller (PDC). Mesdames et Messieurs les députés, le parti démocrate-chrétien va soutenir cette proposition de motion - nous sommes signataires. Nous pensons qu'il est nécessaire de travailler sur plusieurs solutions et que toutes les pistes doivent être ouvertes dans le cadre de cette réflexion. Nous travaillerons en commission de l'enseignement sur cette proposition de motion, avec les autres objets qui concernent la garde des enfants. Nous allons également, avec d'autres députés, déposer un contreprojet qui permettra en fait de trouver une alternative à l'initiative rose-verte 143.
Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à M. le député Pierre Weiss.
Une voix. Il renonce ! (Remarque.)
Le président. Monsieur le député, j'imagine que vous voulez dire que vous renoncez...
Une voix. Oui !
M. Pierre Weiss. Oui !
Le président. Voilà ! La parole est à M. le député Claude Jeanneret.
M. Claude Jeanneret (MCG). Voilà une proposition de motion intéressante, pour laquelle le MCG donnera, bien sûr, son plein accord au renvoi à la commission de l'enseignement. Pourquoi ? Parce qu'on est en train de supprimer la lutte des extrêmes, de dire que seule la famille ou seule la non-famille peut apporter quelque chose à l'enfant... Il y a quelque chose de très intéressant dans les invites de cette proposition de motion, par exemple: «[...] prévoir un barème graduel, pour les familles désirant placer leur enfant, mais à temps partiel seulement.» Il est aussi très intéressant, comme le soulignait ma préopinante, qu'il ne s'agit pas de dire que c'est Monsieur ou Madame qui reste à la maison; c'est simplement une famille qui désire s'occuper des enfants. Je crois qu'il est important que l'enfant reçoive une impulsion familiale dans sa vie, un accueil familial dans sa vie, pas seulement un accueil «étranger», même s'il est de haute valeur.
C'est la raison pour laquelle nous sommes très heureux que cette proposition de motion soit déposée, qu'elle puisse être étudiée et, très certainement, donner une solution à une société qui est actuellement un peu prise par les besoins économiques qui ont malheureusement, ces dernières années, imposé à tous les couples - hommes et femmes - de travailler. Aujourd'hui, on donne une possibilité à l'un ou l'autre de travailler moins pour s'occuper de la famille, je crois que c'est un grand progrès. Cela va peut-être permettre de concilier le travail et la famille. C'est la raison pour laquelle le MCG, Mouvement Citoyens Genevois, est très favorable à cette proposition de motion.
M. Charles Beer, conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, bien entendu, au stade où nous en sommes en matière de petite enfance, la maison ne saurait renoncer à aucun sacrifice; je crois que l'on doit en être à 184 motions, 12 résolutions et 14 projets de lois sur la petite enfance. Et nous avons à traiter aujourd'hui, vous le savez - et je suis coupable, je plaide coupable - la proposition de motion 1952. Je vous donne rendez-vous en septembre pour son retour, de façon ferme, et le contreprojet à l'initiative 143, qui parle d'un droit à des places tant dans les structures collectives que dans les structures individuelles. Jusque-là, j'aimerais dire que, même s'il y a un refus de l'initiative 143, on peut imaginer - en tout cas je le souhaite - que le contreprojet se rapproche d'une vision qui veut que la petite enfance et sa prise en charge, les prises en charge, permettent également de meilleures conditions d'accès au système scolaire, de façon générale. Et cela, je crois que c'est un point évidemment très important.
Par ailleurs, il y a bien entendu la logique de l'accueil continu. Il y a beaucoup d'encouragements en la matière. J'en veux pour preuve l'initiative, retirée finalement au profit du contreprojet unanimement voté et plébiscité par la population en ce qui concerne l'accueil continu. C'était le feu parti radical - excusez-moi de m'exprimer ainsi - qui, dans un élan de créativité et de vision pour l'avenir, nous proposait de prendre acte du fait que, père et mère travaillant de plus en plus, il fallait évidemment organiser les conditions-cadres, de manière que l'emploi ne soit pas défavorisé, mais, au contraire - dans un contexte où nous avons souvent de la peine à trouver la main-d'oeuvre qualifiée - encouragé. Or j'ai envie de dire qu'il y a là une logique un peu différente. Il y a la logique qui veut que l'on encourage les familles, ici, à garder leur enfant. Alors étudiez cela en commission, mais voici cependant, si vous me permettez, deux remarques.
La première est que, par rapport aux montants esquissés dans la proposition de motion, la moitié du coût public d'une place, cela revient à financer une personne qui reste à la maison, qui fait ce choix, à hauteur de 12 500 F; deux enfants, c'est 25 000 F. Jusqu'à quatre ans. Imaginons trois enfants: vous arrivez à un salaire de vendeuse. Alors, au moment où toutes les questions d'allocation font régulièrement débat sur l'attractivité, notamment au niveau migratoire, vous êtes en train de proposer un système qui non seulement est hyper attractif - «Très bien ! Venez ! Venez profiter des conditions-cadres d'accueil pour la petite enfance ! Salariez-vous à la maison !» - et, de plus, excusez-moi de devoir le dire comme ça, on dit: «Laissez-y bobonne !» (Commentaires.) Si au moins la proposition de motion avait préconisé: «Encourageons les hommes et mettons ce prix pour que les hommes y restent», il y aurait un élément de politique peut-être plus progressiste. Mais ce dont j'ai peur, l'enfer étant pavé de bonnes intentions, c'est que nous nous retrouvions ici avec des conditions-cadres, pour les migrations, absolument extraordinaires, de toutes natures, indépendamment même des questions de séjour - parce que nous raisonnons toujours ainsi dans notre canton - et que nous établissions les conditions-cadres pour faire en sorte que les femmes restent à la maison.
Mais étudions tout, sans tabou, en commission. Il y a beaucoup d'objets, mais concentrons-nous sur le contreprojet à l'initiative 143, de manière à assurer des réponses cohérentes. Merci de votre attention. (Applaudissements.)
Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, nous nous prononçons sur la demande de renvoi à la commission de l'enseignement.
Mis aux voix, le renvoi de la proposition de motion 1993 à la commission de l'enseignement, de l'éducation, de la culture et du sport est adopté par 50 oui contre 12 non et 3 abstentions.
Débat
Le président. Nous avons encore le temps de traiter ce point. (Commentaires. Protestations.) Monsieur le député François Lefort, vous avez la parole.
Une voix. C'est une erreur !
M. François Lefort. C'est une erreur, Monsieur le président !
Le président. Madame Schneider Hausser, vous avez la parole.
Mme Lydia Schneider Hausser (S). Oui, puisque vous insistez pour traiter cette proposition de résolution à 22h58 et qu'elle émane de notre groupe, j'aimerais quand même la présenter. (Brouhaha.) Comme nous venons de le dire pour la précédente proposition de motion, en termes de politique familiale et de politique de prise en charge de la petite enfance, la solution n'est pas dans les allocations parentales, mais bel et bien dans une répartition des coûts entre les cantons et les communes - pour ce qui concerne Genève - et la Confédération. A ce titre-là... (Brouhaha.)
Des voix. Chut ! (Brouhaha.)
Mme Lydia Schneider Hausser. Je ne pense pas que ce soient des conditions dans lesquelles on peut s'exprimer... (Brouhaha. Le président agite la cloche.)
Des voix. Chut ! (Brouhaha.)
Mme Lydia Schneider Hausser. Je veux dire soit on continue, mais alors... (Commentaires.) Monsieur le président, vu l'état de... «De la classe», allais-je dire ! Vu l'état du Grand Conseil, je propose une motion d'ordre, afin que nous puissions reprendre ce point lors de notre prochaine séance. (Exclamations. Applaudissements.) Ah ! Pour une fois que je me fais applaudir !
Le président. Nous nous prononçons, Madame la députée, sur votre demande de renvoyer à la prochaine séance le traitement de ce point. Et je signale simplement qu'il n'est pas 23h.
Mise aux voix, cette motion d'ordre (report du traitement de la proposition de résolution 621 lors de prochaine séance) est adoptée par 46 oui contre 13 non.
Suite du débat: Session 09 (juin 2011) - Séance 49 du 09.06.2011
Le président. La séance est close.
La séance est levée à 23h.