République et canton de Genève
Grand Conseil
Séance du jeudi 24 mars 2011 à 17h
57e législature - 2e année - 6e session - 37e séance -autres séances de la session
La séance est ouverte à 17h, sous la présidence de M. Renaud Gautier, président.
Assistent à la séance: Mme et MM. Pierre-François Unger, David Hiler, François Longchamp et Michèle Künzler, conseillers d'Etat.
Exhortation
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, prenons la résolution de remplir consciencieusement notre mandat et de faire servir nos travaux au bien de la patrie qui nous a confié ses destinées.
Personnes excusées
Le président. Ont fait excuser leur absence à cette séance: Mme et MM. Mark Muller, président du Conseil d'Etat, Charles Beer et Isabel Rochat, conseillers d'Etat, ainsi que Mmes et MM. Céline Amaudruz, David Amsler, Guillaume Barazzone, Antoine Bertschy, Beatriz de Candolle, Alain Charbonnier, René Desbaillets, Nathalie Fontanet, Esther Hartmann, Miguel Limpo, Vincent Maitre, Brigitte Schneider-Bidaux et Ivan Slatkine, députés.
Annonces et dépôts
Le président. La pétition suivante, parvenue à la présidence, est renvoyée à la commission des pétitions:
Pétition : Cycle d'orientation : Les textiles disparaissent! (P-1778)
Premier débat
Le président. Est-il envisageable d'avoir un rapporteur ? (Un instant s'écoule.) Je pars du principe que la minorité n'entend pas s'exprimer... (Remarque.) Ah, il est là. J'imagine que les rapporteurs veulent la parole ? Qu'ils appuient donc gentiment sur le petit bouton. Voilà ! Je passe la parole à M. le député Pierre Conne, rapporteur de majorité.
M. Pierre Conne (R), rapporteur de majorité. Merci, Monsieur le président. Chers collègues, la majorité de la commission fiscale vous invite à accepter ce projet de loi tel qu'amendé, qui propose l'abrogation du droit des pauvres.
Il faut se rappeler que le droit des pauvres, créé il y a un peu plus d'un siècle, avait pour but - comme son nom l'indiquait - de subvenir aux besoins des nécessiteux de l'époque; c'est évidemment une taxe résiduelle qui s'apparente plus à la gabelle. Elle procédait d'une démarche de bienfaisance consistant, de la part de ceux qui pouvaient s'offrir des spectacles, à faire une aumône un peu condescendante aux personnes dans le besoin. Heureusement, notre canton s'est depuis doté d'une politique d'aide sociale moderne d'un autre ordre. De ce fait, aujourd'hui, les revenus de ce droit des pauvres ne sont effectivement plus utilisés directement pour l'aide sociale.
Nous vous proposons donc de supprimer le droit des pauvres, d'abord parce qu'il n'a plus de sens - comme je viens de l'expliquer - ensuite, et c'est le plus important, parce qu'il procède d'une iniquité fiscale, dans la mesure où cette taxe de 13%, qui ne grève actuellement plus que les jeux, n'est prélevée qu'à Genève. Cela induit une distorsion de concurrence entre les commerçants genevois, près d'une cinquantaine, et leurs concurrents vaudois - j'y reviendrai.
Cette distorsion de concurrence peut être chiffrée. Par exemple, si l'on compare Genève et Vaud, les jeux représentent 25% des recettes sur Genève et 40% sur Vaud. De même, si l'on regarde le nombre de jeux vendus au bureau de vente le plus proche, qui est à Coppet, il est six fois plus important que sur le canton de Genève. Cela montre bien, effectivement, que la clientèle des jeux se détourne des commerçants genevois pour consommer sur le canton de Vaud.
Les commerçants qui vendent les jeux ne vendent pas que ça, le jeu est souvent considéré comme un produit d'appel. En effet, les kiosques à journaux vendent, comme leur nom l'indique, principalement des journaux, mais également des petits encas, des snacks, etc.
Voici quelques mots un peu techniques, d'abord pour préciser en quoi consistent les revenus du droit des pauvres. C'est important afin de comprendre les effets de la suppression du droit des pauvres. Ces revenus correspondent à 13% de prélèvement sur les jeux de loterie vendus sur le canton de Genève, qui sont de deux types.
Il y a premièrement les jeux de loterie qui ont ce qu'on appelle une valeur faciale, c'est-à-dire que le prix est préimprimé sur le jeu. Cela fait qu'on ne peut pas taxer directement le joueur, de sorte que ce sont les revenus de la Loterie romande qui vont se trouver, dans un deuxième temps, prélevés de ce 13% d'impôt. Ce sont les revenus de la Loterie romande - qui servent eux-mêmes à des actions sociales - qui vont se voir grever. En l'occurrence, cela correspond à un montant de 7 millions par année perçus au titre du droit des pauvres.
Pour les jeux sans valeur faciale, comme les jeux en ligne et les jeux électroniques - qui sont appelés à devenir les plus importants - la taxe de près de 13% est prélevée sur le montant de la facture du jeu. Chaque année, une facture est envoyée aux 50 commerçants du canton de Genève pour un total d'environ 8 millions de francs.
En gros, il y a donc 8 millions qui sont prélevés directement sur les joueurs, par le biais du revenu des commerçants, et 7 millions qui sont prélevés sur le revenu de la Loterie romande. Ces revenus sont gérés par l'office du droit des pauvres qui encaisse ce montant d'environ 15 millions.
Cette somme est distribuée, à raison d'environ 5 millions, sous forme d'aide financière à des associations qui interviennent sur le canton de Genève dans des domaines comme la santé publique et le bien-être social. La différence rentre dans les revenus de l'Etat et, historiquement, ce qui correspond à environ 70% de ces recettes est attribué à la subvention de l'Hospice général.
Si l'on regarde ce qu'il en est des revenus de la Loterie romande, on doit effectivement considérer que, sur un montant de 30 millions - c'est la part qui revient à Genève - 7 millions sont prélevés au titre du droit des pauvres. La suppression du droit des pauvres permettrait donc à la Loterie romande, sur Genève, de conserver ces 7 millions et de les distribuer dans les domaines - je pense qu'il faut les préciser - qui sont ceux de l'aide sociale, de l'action sociale et des personnes âgées, de la jeunesse et de l'éducation, de la santé et des handicaps, de la culture, de la formation et de la recherche, de la protection du patrimoine, de l'environnement, de la protection du tourisme et du développement.
On le voit bien, supprimer cette taxe sur les jeux permettrait aux commerçants d'améliorer leurs revenus, d'augmenter leur chiffre d'affaires pour un montant estimé à environ 10 millions, d'accroître les revenus fiscaux, d'augmenter les revenus de la Loterie romande avec un double effet et d'améliorer, évidemment, la possibilité pour cette dernière de distribuer des aides dans les domaines que je viens de citer. Quand je dis «double effet», c'est que les revenus de la Loterie romande sont réalisés au niveau de la Romandie et redistribués dans les cantons, pour moitié, au prorata de leur population, mais également, pour l'autre moitié, au prorata des revenus totaux des jeux. Donc, évidemment, plus on aura une augmentation de revenus sur les jeux, plus on aura une augmentation de la redistribution de ces revenus par la Loterie romande. Tout cela procède effectivement d'une amélioration des gains des commerçants genevois, et en même temps d'une augmentation des revenus de la loterie genevoise, qui sont redistribués pour des activités à caractère social.
Pour toutes ces raisons, il est nécessaire et utile d'abroger cette taxe sur les jeux, qui n'a plus de sens et qui n'est plus utile.
Avant de conclure, je ferai encore deux remarques, l'une sur la prévention du jeu pathologique et l'autre sur le financement de l'Hospice général.
Première remarque sur la prévention du jeu pathologique: la Loterie romande verse chaque année une participation à raison de 2 millions au programme de prévention des jeux excessifs - c'était à relever.
S'agissant du financement de l'Hospice général, c'est une charge pour laquelle le canton de Genève devra trouver une allocation dans le cadre de ses dépenses générales, à raison d'environ 8 millions. En effet, ce montant-là sera retiré des revenus du canton. Pour cette raison, dans le cadre des débats de la commission...
Le président. Il vous faut conclure, Monsieur le député !
M. Pierre Conne. Je conclus là-dessus, Monsieur le président. Nous avons convenu de différer au 1er janvier 2013 l'entrée en vigueur de cette loi pour donner le temps, aussi bien au département de la solidarité et de l'emploi qu'au département des finances, de mettre en place cette réallocation de 8 millions pour l'Hospice général. Je vous remercie.
Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est au rapporteur de minorité, M. le député Christian Dandrès.
M. Christian Dandrès (S), rapporteur de minorité. Je vous remercie, Monsieur le président. Les socialistes ont le sentiment, ce soir, qu'on nous sert une nouvelle oeuvre de commande. L'Entente est coutumière du fait: vous vous souvenez du dernier projet de loi qui avait été concocté - vous me passerez l'expression - par les «ateliers Jeannerat». (Commentaires.) Il s'agissait de la loi sur l'ouverture des magasins, que le peuple a rejetée en votation populaire récemment.
Alors, après Coop, après Migros, l'Entente sert aujourd'hui la soupe à Naville ! En fait, il y a une petite erreur dans ce que je dis, parce que ce projet était antérieur au projet d'ouverture des magasins; c'était sans doute le premier pas d'une longue lignée.
Ce qu'on propose aujourd'hui, c'est d'offrir 15 millions de recettes aux entreprises Naville et aux petits kiosques. La motivation de ce projet sort toutefois du syndicalisme ordinaire, parce qu'il a une portée symbolique assez forte. «Supprimer le droit des pauvres», voilà un vrai projet politique de droite ! La formule pourrait quasiment servir d'étendard au parti libéral et rappelle ses origines patriciennes. (Exclamations.) Voilà pour le symbole, Mesdames et Messieurs les députés. (Commentaires. Le président agite la cloche.)
Maintenant, sur le fond: la majorité de la commission a cherché en vain à justifier son point de vue dans une perspective économique. La tâche a été relativement ardue, en premier lieu parce que le lien entre la croissance des bénéfices des kiosques et la suppression du droit des pauvres relève du mythe. Il faut préciser tout d'abord que la taxe dont nous parlons est un impôt frappant les consommateurs et non le bénéfice d'une entreprise qui pourrait - si l'on suit l'argument ordinaire de l'Entente - être réinvesti dans l'entreprise.
L'autre point qui me semble essentiel, c'est qu'il y a un mécanisme de concurrence qui n'a pas été traité par le rapporteur de majorité: la concurrence de la France. Les personnes que nous avons auditionnées ont expliqué que les grands amateurs de jeux préféreraient toujours ce pays parce que l'offre y est plus large et qu'il est possible de jouer sans impôt anticipé sur les gains.
L'association «Rien ne va plus», spécialisée dans les addictions au jeu, a donné des informations éclairantes. Elle a indiqué que l'élément déterminant, ce n'est pas l'impôt en tant que tel, mais le montant des gains qui sont possibles.
Dans le même ordre d'idée, il faut également relever que les kiosques connaissent une autre forme de concurrence, celle des machines électroniques qu'on trouve dans les cafés. Elles présentent une concurrence extrêmement importante qui ne sera pas supprimée par le projet qu'on discute aujourd'hui.
De manière plus générale, il nous semble important de relever une erreur de jugement, une erreur économique, c'est que le prix du billet n'a strictement aucun impact sur le comportement des joueurs ordinaires - je dis bien des «joueurs ordinaires». Ce qui signifie en somme que la diminution du prix du billet n'aurait pas d'incidence sur neuf dixièmes des personnes.
On peut en effet avoir quelques doutes lorsqu'on nous indique que, simplement à cause du droit des pauvres, des joueurs genevois vont se déplacer vers d'autres cantons pour éviter de payer quelques centimes de taxe, et vont dépenser largement plus en transport, en voiture. Les seules personnes qui pourraient être amenées à le faire - qui «pourraient», j'utilise bien le conditionnel - ce sont les gros joueurs. Mais, à mon sens, il est très peu opportun de soutenir ce type d'addiction dont les méfaits sociaux sont coûteux pour la collectivité et pour les familles concernées.
En somme, je conclurai en expliquant qu'il est plus que douteux que la suppression du droit des pauvres puisse augmenter le revenu des kiosques, et cela d'autant plus que le droit des pauvres n'augmente pas le prix de vente des billets à gratter sur lesquels figure le prix.
Par contre, une chose est certaine, c'est que 15 millions de recettes vont manquer au budget, et ces 15 millions de recettes ne seront pas compensés. Cet argent va manquer tout d'abord aux associations et aux entreprises qui oeuvrent en faveur de la santé et luttent contre le mal-être social en bénéficiant justement du fonds du droit des pauvres. Ça représente 5 millions de francs par année, et il y a de fortes chances que ce projet de loi mette en péril ces associations qui servent des intérêts publics. L'argent va également manquer à l'Hospice général et aux contribuables. Ces derniers vont devoir compenser la perte représentée par ces 15 millions qui sont une source de financement pour l'Hospice.
Par rapport aux fameuses compensations dont on a parlé tout à l'heure, je pense qu'il est important de relever ici les déclarations qui ont été faites par le directeur de la Loterie romande. Ce dernier a indiqué que, pour compenser ces pertes de recettes, il faudrait augmenter les ventes de 50%. Or il a été clairement indiqué que ces objectifs étaient purement et simplement irréalisables.
Pour achever, en faisant une pesée des intérêts, nous avons d'un côté ceux des kiosques Naville, et de l'autre les pertes certaines d'associations dont il nous semble important de rappeler le nom: il s'agit d'Emmaüs, de l'Entraide protestante, de Pro Senectute, de la fondation «Intégration pour tous» - dont M. Longchamp avait parlé dans le cadre de la suppression du RMCAS - de Viol-Secours, et j'en passe. Il y a aussi les pertes - élément important - des associations qui bénéficient aujourd'hui d'argent pour lutter contre l'addiction au jeu. Je pense aussi, naturellement, au contribuable genevois qui va devoir mettre la main à la poche pour financer les pertes de l'Hospice général liées à la suppression.
Voilà, en somme, ce que je voulais dire dans ce premier tour. Je vous remercie, Monsieur le président.
M. Stéphane Florey (UDC). A Genève, nous avons trois impôts qui sont totalement stupides, à savoir la taxe professionnelle communale qui nous occupera prochainement, l'impôt sur les chiens qui nous a occupés jeudi dernier... (Commentaires.) ...et celui qui nous occupe aujourd'hui, le droit des pauvres. Pourquoi est-ce un impôt stupide ? Parce qu'il pénalise l'économie genevoise et prive le canton d'importantes ressources. En effet, les kiosques se retrouvent fortement pénalisés, puisque les joueurs se rendent soit en France voisine, soit dans le canton de Vaud, plus particulièrement à Coppet. Si vous avez une fois le loisir d'aller là-bas un week-end, vous verrez que la majorité des joueurs ont des plaques genevoises.
Ceux qui se retrouvent le plus pénalisés, ce sont donc les kiosques. De ce fait, ils font moins de bénéfices et, par effet domino, ils privent l'Etat de ressources financières.
Il faut savoir que le droit des pauvres prive également le canton de la redistribution des bénéfices par la Loterie romande. En effet, vu que Genève vend moins de tickets, eh bien le prorata des tickets vendus est diminué d'autant, et la Loterie romande redistribue moins d'argent à Genève. Comme Genève touche moins d'argent de la Loterie romande, qui est-ce qui doit compenser actuellement ? Eh bien c'est l'Etat. Mais l'Etat est privé de ressources vu que Genève vend moins de tickets. C'est un effet pervers, qui est néfaste pour notre économie. En conséquence, je vous invite à voter fermement ce projet de loi et à abroger le droit des pauvres.
M. Michel Forni (PDC). Ce droit des pauvres avait déjà été examiné par la commission fiscale en 2004, et la décision avait été de ne pas entrer en matière sur sa suppression. En 2009, suite à des questions complémentaires, ce texte a été à nouveau traité et, finalement, nous revient ce soir dans le sens de supprimer - comme cela a déjà été dit - le service du droit des pauvres et, indirectement, cette source de revenus arrivant de la Loterie romande.
Il est vrai que Genève reste un canton où la distorsion de concurrence - comme cela a été indiqué - existe. En effet, nous sommes à deux pas d'autres kiosques qui offrent, il faut le dire, des conditions «intéressantes» - entre guillemets - pour les joueurs, tant en France qu'en pays vaudois.
L'autre élément, bien sûr, c'est la répercussion en termes de finances, comme cela a été relevé, puisque ce qui revient à certaines activités pourrait diminuer. D'autre part, il faut se souvenir qu'il y a environ 7 millions qui sont prélevés à titre d'impôt sur les jeux à gratter.
Lorsque nous avons auditionné les différents services qui s'occupent de ces problèmes, il est apparu que les éclaircissements, notamment ceux du Conseil d'Etat, ne s'opposaient pas à l'abolition de ce texte et que, finalement, par des mécanismes de compensation, nous pouvions arriver à équilibrer l'élimination de ce type d'impôt, mais en tenant compte d'un certain délai dans le temps.
Ce type d'impôt interroge les démocrates-chrétiens, puisque le jeu - et la taxe sur le jeu - est pour certains une industrie respectable, pour d'autres une industrie florissante. Celle-ci cherche toujours, il est vrai aussi, à conquérir de nouveaux canaux qui vont parfois indirectement égayer notre vie, mais surtout aussi permettre à chacun d'y trouver sa part.
Cette loi genevoise bloquait la concurrence. Si nous l'oublions ce soir, le secteur des jeux d'argent, surtout de hasard, va faire saliver quelque peu l'industrie, non pas du spectacle, mais peut-être des casinotiers ou des kiosques, ainsi que celle des régions avoisinantes, peut-être dans un sens opposé. L'abolition de cette loi ne va pas assécher l'attractivité des sites de jeux, et elle permettra certainement à l'Etat de préserver des recettes, pour autant bien sûr que des consommateurs genevois restent sur le site genevois.
Son abolition ne doit pas accroître les problèmes d'addiction, je crois que cela a déjà été souligné, ni d'abus du jeu, et non plus de surendettement. C'est en effet l'un des problèmes, bien sûr, qui nous préoccupe aussi.
Les considérants sont pour certains d'ordre culturel, moral, voire religieux, et peuvent justifier finalement que nous restions prudents, dans la mesure où des profits privés sont tirés sur une forme d'exploitation - il faut le dire - non pas d'un fléau social, mais très souvent de l'infortune des joueurs.
En transformant ces pratiques à Genève, les caisses de l'Etat ne vont donc pas se vider. Si j'ose dire, ce «retour en grâce» du jeu à Genève va générer indirectement des impôts nouveaux qui vont eux-mêmes maintenir des sources de financement, de subventionnement, permettant d'alimenter le social comme le sportif.
C'est la raison pour laquelle, dans ce type d'équation qui est finalement équilibrée, nous vous proposons de suivre l'excellent rapport de majorité et d'y donner suite dans le sens de la suppression de ce droit des pauvres.
Mme Sophie Forster Carbonnier (Ve). Mesdames et Messieurs les députés, en commission fiscale, les Verts étaient partagés sur l'abolition du droit des pauvres, sachant que cette taxe est uniquement appliquée à Genève et qu'elle génère une certaine complexité administrative. Cependant, au vu des incertitudes existant quant à l'évolution des recettes fiscales, en particulier pour ce qui a trait à la fiscalité des entreprises, les Verts ont décidé de mettre en pratique le principe de précaution et de refuser de voter la suppression du droit des pauvres.
Comme cela a déjà été indiqué, 70% des recettes du droit des pauvres est versé à l'Hospice général. Il est vrai que la suppression de cette taxe ne mettrait pas en danger le financement de l'Hospice puisque ce financement est garanti par un article constitutionnel. Par contre, il n'en va pas de même pour de nombreuses associations accomplissant un travail fort utile pour Genève et qui pourraient se voir ainsi privées de subventions. Je voudrais en effet rappeler que 30% du droit des pauvres, soit environ 4 à 5 millions par année, est affecté à des associations travaillant dans les domaines de la santé publique et du bien-être social. (Remarque.) Ces associations sont notamment Emmaüs, l'EPER, l'AGORA, Caritas, Pro Senectute - Monsieur Barrillier - et Viol-Secours. (Commentaires. Rires.) Il m'a cherchée ! (Rires.) Or le financement de ces associations ne serait plus garanti si le droit des pauvres était supprimé. (Brouhaha.) En effet, contrairement à ce qu'indique le rapporteur de majorité, il n'est pas certain que la Loterie romande décide de prendre le relais de l'Etat, et nous craignons que certaines de ces associations ne se retrouvent ainsi sans ressources.
Pour toutes ces raisons, les Verts vous invitent, Mesdames et Messieurs les députés, à refuser ce projet de loi.
M. Claude Jeanneret (MCG). Mesdames et Messieurs, chers collègues députés, ce droit des pauvres a quelque chose d'assez extraordinaire. En effet, on parle d'addiction au jeu, on parle de protéger le public... Les casinos ne sont pas soumis au droit des pauvres. La loterie est un jeu qui est amusant, ce n'est pas un jeu qui est destiné à ruiner le commun des mortels. En plus de cela, on arrive à une inégalité de traitement entre les petits commerçants de Genève et ceux de la Suisse voisine. Je ne dis pas que les gens vont se déplacer pour aller chercher leurs tickets de loterie sur le canton de Vaud, mais il y a quand même beaucoup de Genevois qui se déplacent régulièrement en Suisse, et ils en profitent pour jouer à l'extérieur du canton.
En outre, 13%, je crois que c'est beaucoup. La suppression de cette taxe peut inciter les gens à jouer un peu plus sur Genève. Je pense qu'on serait ainsi très significatifs vis-à-vis de l'utilité des petits kiosques et qu'on les encouragerait. Ils ne font pas que vendre des tickets de jeux, ils sont là pour rendre service, pour vendre des journaux, du chocolat et plein d'autres choses. C'est quelque chose qui fait vivre la ville, et je crois qu'il faut les encourager. Cette taxe est inique, et elle empêche le développement normal de leurs affaires, en tout cas sur une partie de leur activité.
Un peu plus de la moitié du droit des pauvres est prélevée sur les petits commerçants. Mais l'autre moitié est payée directement par la Loterie romande, ce qui fait que, de toute façon, on aurait 7 millions qui seraient amputés sur les allocations de la Loterie romande. En plus de cela, comme on va augmenter le chiffre d'affaires sur les jeux, eh bien on aura davantage de rétrocessions de la Loterie romande, ce qui fait que ça compensera largement - largement - ce qu'on pourrait imaginer perdre.
D'autre part, 70% de ces revenus sont affectés à l'Hospice général qui, lui, dépend de toute manière des impôts de Genève. Donc, que l'on prélève sur les jeux ou autrement, cette institution est de toute façon subventionnée.
J'en déduis qu'il faut absolument supprimer cette taxe qui est inique, cette taxe qui est injuste et qui place de nouveau Genève avec une Genferei inutile et totalement discriminatoire. C'est la raison pour laquelle nous voterons la suppression de cette taxe. Merci, Monsieur le président.
M. Charles Selleger (R). La lecture du rapport de minorité m'a inspiré quelques commentaires. Lorsque la politique émotionnelle prend le pas sur la politique factuelle, on peut assister à de curieux dérapages, et le rapport de minorité est exemplaire de tels dérapages. A priori, bien sûr, on n'est pas surpris qu'un député socialiste défende «le droit des pauvres». Le titre même de cette taxe ne saurait permettre sa disparition sans que la gauche monte aux barricades, même si - comme le rappelle fort opportunément le rapporteur de majorité - cette taxe n'a plus rien à voir directement avec les pauvres.
A y regarder de plus près, toutefois, la gauche aurait dû souscrire au projet de loi car elle aurait dû se rendre compte que le droit des pauvres est perçu au détriment même des couches sociales qu'elle prétend défendre. Eh oui, les riches préfèrent jouer leur argent à la bourse ou en spéculant sur les cours des matières premières, ou encore sur l'immobilier. Ils ne sont pas concernés par cette taxe !
Les loteries, au contraire, cristallisent le rêve des gens modestes et des démunis de pouvoir accéder un jour à la richesse. Ce sont eux, principalement, qui achètent les billets de loterie tels que Loto, Euro Millions et divers attrape-nigauds. Non seulement ils y perdent leur mise, mais encore ils se font taxer par le fisc. Et cette taxe, perçue sous forme d'impôt à la consommation, n'est pas un impôt progressif; elle est donc, là aussi, contraire aux thèses socialistes. Et je ne parle pas des pertes des propriétaires des kiosques genevois, qui font, comme on l'a dit, eux aussi partie des couches laborieuses. (Remarque.) Ainsi, éblouis par leur dogme, les socialistes ont perdu une occasion de faire preuve de discernement.
Je vous invite donc, Mesdames et Messieurs les députés, à voter cette loi qui ne portera aucun préjudice aux pauvres de notre canton, mais qui favorisera une juste concurrence entre kiosques genevois et vaudois, et augmentera la redistribution des subventions allouées par la Loterie romande en faveur des associations genevoises.
Des voix. Bravo ! (Applaudissements.)
M. Roger Golay (MCG). Mesdames et Messieurs les députés, en tout cas, on peut déjà remercier et féliciter le rapporteur de majorité pour son excellent travail. Les chiffres ont été donnés, tout le côté technique a maintenant été évoqué, on ne va pas y revenir.
Ce soir, nous allons voter la suppression d'une genevoiserie, d'une tracasserie administrative. Il faut qu'on comprenne que, ce soir, on va travailler pour améliorer le PIB genevois. En effet, comme cela a été dit, lorsque les gens se déplacent en France voisine ou sur le canton de Vaud pour acheter leurs tickets à gratter, ça ne se limite pas qu'à cela. Qu'est-ce qu'ils font ? Ils vont acheter leurs journaux, ils vont aller boire l'apéro, manger au restaurant, et faire leurs courses sur France. Ça ne peut donc être que bénéfique pour le PIB genevois, comme je l'ai dit. Et pour ce qui est du social, il n'y aura pas d'effet induit, cela a été indiqué.
Ce soir, je pense qu'il est tout à fait intéressant de supprimer cette tracasserie, et c'est dans l'intérêt général des commerces genevois. Par conséquent, comme mon collègue Jeanneret l'a dit, votons ce projet de loi et supprimons cette taxe inutile aujourd'hui.
M. Alain Meylan (L). Monsieur le président, Mesdames et Messieurs, pour le groupe libéral, cette taxe doit évidemment disparaître. Elle a d'ailleurs disparu à satisfaction il y a quelques années, pour sa plus grande part, sur tout ce qui était spectacles et tout ce qui était lié aux sports et autres. On a vu les effets positifs que cela a eu comme conséquence.
Ce petit reste du droit des pauvres doit évidemment disparaître, au sens du groupe libéral, non pour faire valoir ou améliorer la capacité bénéficiaire de Naville. Je vous rappelle quand même que la majorité des kiosques, ce n'est pas Naville, mais des petits kiosques. Ce sont des kiosques tenus par des indépendants, c'est du commerce de proximité. Et, comme vient de le dire M. Golay, des achats peuvent être groupés dès le moment où le but du joueur est d'abord de jouer et ensuite de faire d'autres achats à l'intérieur de ces kiosques.
Il ne s'agit donc pas non plus, comme l'a dit M. Dandrès, de favoriser les situations d'addiction au jeu, mais bien de rapatrier les sommes qui se jouent déjà en France ou dans le canton de Vaud notamment. Il s'agit de rapatrier ces sommes sur des commerces de proximité, sans ce droit des pauvres. Cela améliorera évidemment la capacité contributive des kiosques et amènera évidemment aussi techniquement - ça a été dit - de l'argent de la Loterie romande sur le plan genevois en récupérant ce qu'elle nous déduit, c'est-à-dire les 7 millions et quelques de droit des pauvres.
Dans ce contexte-là, puisque les 70% qui sont destinés à l'Hospice général sont de toute façon couverts, selon la constitution, par le budget général de l'Etat, je dirais, il restera ces 30% destinés effectivement à certaines associations qui ont des buts tout à fait louables et positifs - comme cela a été rappelé tout à l'heure par Mme Captyn, sauf erreur. (Commentaires.) Non, par Mme Forster Carbonnier, excusez-moi !
Je suis persuadé qu'il ne faut pas non plus avancer la théorie de la peur. Ces associations - parce que leurs buts sont également essentiels au fonctionnement de l'Etat, au fonctionnement du canton, parce que leurs buts sont là et sont tout à fait louables - auront la possibilité de faire valoir leurs subventions et les obtiendront sans problème. Arrêtons donc avec cette théorie de la peur qui n'a pas lieu d'être en l'état.
Le groupe libéral, pour les raisons indiquées, pour les raisons techniques qui ont été très clairement expliquées par le rapporteur de majorité, vous invite à voter ce projet de loi et à en finir avec ces quelques millions d'une genevoiserie qui date des temps anciens !
Mme Lydia Schneider Hausser (S). Mesdames et Messieurs les députés, en termes de fiscalité, en termes de souci du bien commun, la majorité de ce parlement ressemble de plus en plus à une meute. Les attaques, les grignotages de ce qui permet à chacun d'avoir de la sécurité, des écoles, des hôpitaux, des soins, du social... Ces attaques sont incessantes. Une fois, c'est une attaque frontale de 450 millions; ici, en matière de droit des pauvres prélevé sur les loteries, le montant déduit du revenu de l'Etat est d'environ 15 millions.
Ces 15 millions permettent, comme il a été beaucoup dit, une redistribution à plusieurs entités publiques ou associatives. Encore une fois, la majorité - composée des partis de droite présents ici, qui veulent supprimer ce droit des pauvres - n'a présenté aucune piste de recettes supplémentaires qui permettraient de combler le vide laissé. Même si ce n'est pas énorme, cela permet déjà de faire vivre, en partie, vingt-trois entités.
M. Meylan a évoqué la suppression du droit des pauvres en ce qui concerne les spectacles il y a une dizaine d'années... Parlons-en ! Au niveau de la population, quel rabattage nous n'avons pas eu: diminution du prix des billets, on allait gagner, c'était super ! Le résultat: oui, il y a eu trois mois de baisse du prix des billets de cinéma, même pas. Et après, une montée faramineuse, sans limite, carrément... Le résultat de tout cela, c'est que les gens continuent à payer, voire même plus cher, pour aller au cinéma. Le bilan, c'est que les seuls qui ont gagné sont les propriétaires des salles, quelques personnes et non pas la collectivité via le droit des pauvres.
Il y a un point quand même étonnant - et je finirai là-dessus, parce que je crois que l'argumentation liée aux détails techniques a été bien développée dans le rapport de minorité et lors de sa présentation... Ce qui est quand même étonnant, c'est qu'il y a à peu près une heure, dans l'avant-dernier point que nous avons traité, Monsieur le président, le groupe socialiste s'est fait traiter de fossoyeur parce qu'il n'acceptait pas de faire porter 3 millions aux utilisateurs de la FSASD et estimait qu'il fallait trouver cette somme ailleurs. Et ici, mais quel terme oserions-nous franchement utiliser ?! On nous dit que 12 millions, c'est une bagatelle. Mais où allons-nous les trouver ?! C'est une question qui restera, et nous la poserons. En effet, 12 millions, c'est quatre fois ce pour quoi on nous traitait de fossoyeurs il y a une heure ! Merci beaucoup. (Applaudissements.)
Le président. Merci, Madame la députée. La parole est à M. le député Christian Dandrès, à qui il reste une minute quarante.
M. Christian Dandrès (S), rapporteur de minorité. Je vous remercie, Monsieur le président. Je serai bref et réagirai simplement à ce que j'ai entendu sur les bancs de l'UDC et du MCG. Bientôt, à les croire, supprimer le droit des pauvres fera gagner de l'argent et permettra de diminuer les déficits publics. Même le rapporteur de majorité n'est pas allé aussi loin. J'aimerais citer son excellent texte, très nuancé, à la page 29 du rapport. Il affirme: «La suppression de cet impôt aura donc des effets relativement limités dans ce secteur subventionné.» Il a donc quand même fallu admettre l'effet, même si on appréciera la nuance de la formule...
Certes, il a été indiqué, s'agissant des 70% qui sont versés à l'Hospice général, qu'il y a un droit constitutionnel à obtenir des prestations de l'assistance publique. Il faut quand même rappeler que le budget de l'Hospice général ne s'alimente pas par génération spontanée, Mesdames et Messieurs les députés, et que cet argent-là, il faudra bien le prendre ailleurs ! Et il sera pris sur les budgets d'Etat, il sera payé par le contribuable.
Je voulais également relever les propos d'un des députés de l'UDC, qui parlait du fameux kiosque de Coppet. Ce dernier attirerait un certain nombre de véhicules immatriculés à Genève. Ce kiosque dont on parle, c'est le kiosque Naville. Donc, en somme, la concurrence libre et non faussée qu'il faudrait défendre, c'est Naville Vaud contre Naville Genève. Voilà l'intérêt de ce projet !
Pour conclure, il me semble important de rappeler, et je serai très bref, la pesée des intérêts. Nous avons, d'un côté, les intérêts putatifs de Naville Vaud et Naville Genève, et nous avons, de l'autre, l'Etat, le contribuable, Emmaüs, l'Entraide protestante, Pro Senectute, la fondation «Intégration pour tous», Viol-Secours, l'Aumônerie genevoise oecuménique auprès des requérants d'asile, Appartenances-Genève...
Le président. Il vous faut conclure, Monsieur le député !
M. Christian Dandrès. ...le foyer Arabelle... Enfin, je renvoie les députés aux annexes du rapport de majorité, qui sont extrêmement instructives. Voilà, je vous remercie.
Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à M. le député Pierre Conne, à qui il reste une minute.
M. Pierre Conne (R), rapporteur de majorité. Merci, Monsieur le président. J'aimerais quand même bien préciser au rapporteur de minorité et aux bancs d'en face que la suppression du droit des pauvres ne concerne que la perception et non pas la destination des fonds. La destination des fonds n'est pas touchée par notre décision. (Commentaires.) Ça, c'est la première remarque.
La deuxième remarque... (Brouhaha.) La deuxième remarque concerne la concurrence entre Vaud et Genève. Elle existe réellement puisque, en moyenne sur le canton de Vaud, les jeux rapportent deux fois plus qu'à Genève, mais six fois plus en frontière. Il y a donc bien un phénomène transfrontalier Vaud-Genève qui existe, et il y a bien une distorsion de concurrence.
Je ferai une remarque pour les Verts qui, n'acceptant pas ce projet de loi, vont continuer à encourager les Genevois à aller en voiture à Coppet. Je suis un tout petit peu étonné... (Rires. Commentaires.)
Ma conclusion ira aux socialistes, pour leur dire que la suppression du droit des pauvres ne va pas profiter au gros monsieur en noir avec le chapeau haut-de-forme et le cigare, mais va profiter aux petits commerces genevois et au tissu social genevois. Je vous remercie. (Applaudissements.)
Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à M. le conseiller d'Etat David Hiler.
M. David Hiler, conseiller d'Etat. Merci, Monsieur le président. C'est un objet complexe pour le Conseil d'Etat puisque - comme vous le savez - c'est le DARES qui perçoit cette taxe, par le SCom, c'est le DSE qui la redistribue, et c'est le chef des finances qui suit les travaux parlementaires.
Cela dit, nous nous sommes coordonnés à quelques reprises sur ce point, et - comme cela ressort tout à fait justement du rapport de majorité - le Conseil d'Etat avait décidé à l'époque de ne pas s'opposer à ce projet de loi, pour autant que son entrée en vigueur soit différée. En effet, nous avions quelques soucis domestiques d'intendance. D'ailleurs, pour 2012, vous pouvez toujours les attendre, ces soucis, même si pour 2010-2011 les choses semblent s'arranger mieux que nous l'avions estimé au coeur de la crise. Entre-temps, évidemment, il s'est passé deux ou trois choses que je dois quand même vous rappeler et qui sont importantes à nos yeux.
Nous avons perdu, sur l'impôt à la source, une somme qui avait été estimée à 90 millions dans un premier temps et que nous estimons aujourd'hui, avec une énorme marge d'erreur, à 80 millions. Nous avons aussi eu l'annonce de la BNS, tout récemment, que tout ou partie de la redevance - qui est tout de même de 96 millions - ne nous serait pas versée pour quelques années.
Cela m'amène à vous dire deux choses. La première, c'est qu'on verra quel destin le peuple donnera à ce projet. Mais il conviendrait maintenant, pour la suite des opérations, qu'on s'abstienne de diminutions d'impôts tant qu'on ne saura pas exactement ce qui va se passer avec l'Union européenne. En effet, sur ce point - et là, nous parlons plutôt pour nos successeurs - on parle quand même de pertes extrêmement substantielles, soit parce que les sociétés partiraient, soit parce que nous baisserions le taux d'imposition. De toute façon, perte il y aura. Oui, oui, Monsieur Dandrès, il y aura, ça ne fait aucun doute.
Nous sommes donc circonspects, mais voilà, vous allez prendre cette décision. Nous ne nous y sommes pas opposés, c'est vrai, nous ne nous y opposerons donc pas ce soir. Par contre, nous sommes quand même obligés de mettre deux ou trois choses au point pour la suite des opérations. Mon collègue Unger a insisté sur ce point.
L'Hospice ne sera pas touché; ça, c'est clair. Le financement se fera par le biais des impôts. Pour les associations, la substitution ne pourra pas se faire intégralement par la loterie, parce que - et cela figure dans l'audition de M. Rageth - la Loterie romande ne peut pas faire des subventions de fonctionnement. Une partie de ces subventions reviendra donc dans le budget de l'Etat.
Sur les recettes supplémentaires éventuelles, M. Dandrès a une opinion, et vous avez, Monsieur Conne, une opinion. Chacun a une opinion; moi, j'ai le privilège de n'en avoir aucune. (Exclamations.) Mais ce que je peux en tout cas vous indiquer, c'est qu'aucun d'entre vous ne pourra, à la fin, démontrer d'aucune manière qu'il avait raison. On ne saura jamais si l'argumentation des uns ou des autres était juste. En tout cas, ce que nous pouvons vous dire, comme Conseil d'Etat, c'est que nous serons amenés, dans le cadre du budget 2013, à compter ces 15 millions en croissance des charges. Il faudra arriver à 2,2% de croissance des charges et pas à 2%, parce que, bel et bien, c'est quelque chose qui sera assumé par l'Etat avec l'argent du contribuable, et ça viendra en augmentation de charges.
Compte tenu de la facture pour le financement des hôpitaux, qu'on ne connaît pas encore exactement, mais qui existe - ça, c'est fédéral, on ne peut pas trop tricher avec - et de la facture sur un projet qui tient à coeur à beaucoup ici, à savoir le nouveau système d'évaluation de fonction - il aura inévitablement un surcoût, du moins temporaire, puisqu'il protège l'acquis - nous devons rester prudents. D'autant que nous voulons aussi répondre aux besoins de la formation et de la sécurité, qui sont pour le moins croissants ! On avait bien prévu qu'il fallait des policiers supplémentaires sur le terrain, mais on découvre avec horreur qu'il nous faudrait éventuellement, avec le nouveau système, 65 convoyeurs de plus, paraît-il, tant qu'on n'a pas de cachots... Et avec le nouveau code de procédure pénale, le travail administratif semble tel, au sein de la police, qu'il faudra encore augmenter les effectifs.
Donc je vous dis simplement qu'à un moment on ne peut pas avoir tout et son contraire, le beurre et l'argent du beurre, et que ceux qui voteront finalement ce soir ce «modeste» projet de loi doivent savoir qu'un jour ils devront aussi voter le léger supplément de croissance des charges - 0,2% - nécessaire à la couverture, obligatoire en ce qui concerne l'Hospice, assez hautement souhaitable pour les associations. En effet, il m'a semblé entendre que tout le monde avait affection et respect pour le travail de ces associations. Voilà, Mesdames et Messieurs, ce que le Conseil d'Etat souhaitait vous dire à ce stade. (Applaudissements.)
Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs, nous sommes en procédure de vote concernant l'entrée en matière sur le PL 9408.
Mis aux voix, le projet de loi 9408 est adopté en premier débat par 54 oui contre 26 non.
Deuxième débat
Le président. Mesdames et Messieurs, nous sommes en deuxième débat. (M. Eric Stauffer appuie sur le bouton pour demander la parole.) Le deuxième débat n'est pas lancé que M. Stauffer demande déjà la parole ! Je vous en prie, Monsieur Stauffer. (Remarque.) C'est une erreur, bien. (Commentaires.) J'aurais dû y penser ! Nous sommes donc en deuxième débat.
Mis aux voix, le titre et le préambule sont adoptés, de même que les articles 1 à 3 (soulignés).
Troisième débat
Le président. Le troisième débat est-il demandé ? (Remarque.) Il l'est. (Commentaires.) Vous n'avez pas entendu le député Aubert, à ce que je vois... (Commentaires.)
Mme Lydia Schneider Hausser. Je demande le vote nominal ! (Commentaires. Un instant s'écoule.)
Le président. Vous êtes soutenue. Très bien, il en sera donc fait ainsi.
La loi 9408 est adoptée article par article en troisième débat.
Mise aux voix à l'appel nominal, la loi 9408 est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 51 oui contre 26 non et 1 abstention.
Le président. Mesdames et Messieurs, l'ordre du jour appelle le traitement du point 63.
Premier débat
Le président. Pour autant que les rapporteures appuient sur le petit bouton devant elles, je leur passe volontiers la parole. Je cède donc le micro à Mme la députée Patricia Läser, rapporteure de majorité.
Présidence de M. Pierre Losio, premier vice-président
Mme Patricia Läser (R), rapporteuse de majorité. Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, ce projet de loi - présenté par ses auteurs comme une réparation à une injustice criante, à une inégalité de traitement, comme un correcteur d'effets néfastes pour les pays en voie de développement - est contré par la majorité pour plusieurs raisons.
Genève est d'abord le canton le plus pointilleux, avec une procédure très stricte qui comporte plusieurs variantes. C'est toujours la version la plus favorable à notre canton qui est choisie pour accorder un forfait d'impôt. Un suivi est assuré par l'administration, et une réévaluation est possible à tout moment.
Ces décisions d'abrogation des forfaits fiscaux doivent être prises, s'il y a lieu, au niveau national, comme le dit si bien Mme la rapporteure de deuxième minorité.
Le peuple genevois a voté, en septembre 2009, la nouvelle loi fiscale dans laquelle sont compris les forfaits fiscaux. Ce sont nos voisins directs qui tireraient profit des départs des bénéficiaires si ces forfaits étaient abrogés. N'oublions pas que les bénéficiaires de ces forfaits fiscaux paient des impôts successoraux, ce qui n'est pas le cas des contribuables ordinaires.
Pour le PS: n'oubliez pas le nombre de places de travail générées par les bénéficiaires. De plus, l'argent engrangé par Genève est important et permet de soutenir bien des actions sociales sur le canton. N'oublions pas non plus l'impact important de ces forfaits sur les communes.
Pour toutes ces raisons, je vous demande de refuser l'entrée en matière sur ce projet de loi, comme le suggère la majorité.
Le président. Je vous remercie, Madame le rapporteur. Je donne la parole à la rapporteure de première minorité, Mme Lydia Schneider Hausser.
Mme Lydia Schneider Hausser (S), rapporteuse de première minorité. Merci, Monsieur le président. L'imposition selon la dépense est née au début du XXe siècle avec l'arrivée des riches Anglais. Pendant longtemps, cet impôt ne s'appliquait qu'à un nombre très restreint de personnes. Depuis quelques décennies, le nombre d'adeptes du forfait fiscal a enflé pour arriver actuellement à 4570 en Suisse, dont 647 à Genève, qui se situe à la troisième place du palmarès intercantonal.
Les socialistes, dans ce projet de loi, visent et demandent l'abrogation de ce forfait fiscal en étalant celle-ci dans le temps.
Pourquoi les socialistes demandent-ils l'abrogation de ce forfait fiscal ? D'abord parce qu'il représente l'un des trois piliers de la fraude fiscale internationale, les deux autres étant l'imposition réduite des sociétés de domicile et la distinction floue entre fraude et évasion fiscales.
Ensuite, le forfait fiscal avantage les étrangers qui cherchent à se soustraire à leurs devoirs fiscaux dans leur pays d'origine, voire qui tentent de trouver un lieu avantageux pour faire prospérer leur fortune. En effet, les bénéficiaires du forfait fiscal ne sont que des gens inactifs.
En troisième lieu, au travers du mécanisme de forfait fiscal, nous maintenons de nombreux pays en voie de développement dans une situation de sous-développement en attirant chez nous les riches de ces pays, qui se soustraient ainsi à leur devoir de contribuable dans leur propre pays. Il est estimé que le montant des soustractions fiscales par les forfaits et d'autres genres de procédés représente en tout cas vingt fois les budgets d'aide au développement que nous pouvons fournir et que nous fournissons à ces pays en voie de développement.
Ensuite, le forfait fiscal déséquilibre également la fiscalité des pays européens. Ces derniers vivent entre eux, face à nous, le même genre de concurrence que les cantons suisses eux-mêmes se font en termes de fiscalité générale.
Le forfait fiscal nuit aussi à l'image de la Suisse, de Genève et de sa place financière, voire de sa gestion publique. Rappelons qu'en 2009 le canton de Zurich a annulé ses forfaits fiscaux. Et alors ? Eh bien, dans un premier temps, bien sûr, une partie des gens qui bénéficiaient des forfaits ont quitté le canton, mais quand on entend les commentaires des responsables des villages zurichois... Ils disent qu'ils ont bien sûr perdu des contribuables qui vivaient sous le régime des forfaits, mais ce n'est pas la panique, parce que ces contribuables ont été remplacés par d'autres qui ont repris les biens immobiliers. Et ces nouveaux contribuables sont des contribuables actifs qui paient des impôts. Ce n'est donc pas une perte aussi nette que ce qu'on pense, c'est peut-être même un bénéfice; simplement, nous n'avons pas encore le recul nécessaire pour avoir les chiffres. (Brouhaha.)
Il me faut vous dire que la proposition socialiste n'est pas isolée en Suisse. Actuellement, Saint-Gall, Berne, Lucerne, Schaffhouse, Argovie, Thurgovie, Glaris et même Bâle-Ville sont en train de discuter, de voir s'il est possible d'abolir ces forfaits fiscaux. La Confédération elle-même a maintenant proposé une harmonisation des barèmes cantonaux de forfaits fiscaux, en disant par exemple que le seuil de dépense minimal doit être calculé sur sept fois le loyer et non plus cinq fois.
Tout tend à dire que l'imposition selon la dépense, le forfait fiscal, est passéiste, injuste, et que l'image qu'il donne de notre canton est négative. Personne ne peut actuellement préjuger que, si nous l'abolissons, nous ne retrouverons pas des gens actifs et surtout des contribuables qui paient leurs impôts de manière juste, comme tout un chacun dans la population genevoise.
Pour toutes ces raisons, Mesdames et Messieurs, le groupe socialiste réitère sa demande et vous prie d'accepter son projet de loi.
Le président. Merci, Madame le rapporteur. La parole est à la rapporteure de deuxième minorité, Mme Mathilde Captyn.
Mme Mathilde Captyn (Ve), rapporteuse de deuxième minorité. Je vous remercie, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, les Verts ont déposé un rapport de deuxième minorité sur les forfaits fiscaux car notre position diffère sensiblement de la première minorité. Nous partageons bien sûr l'avis de principe qu'il faut supprimer les forfaits d'impôts à Genève. C'est d'ailleurs un élément inscrit dans notre programme de législature, c'est dire si nous estimons que les forfaits fiscaux ne sont pas justes. (Remarque.) Après avoir écouté l'audition de la Déclaration de Berne - il n'y a pas encore de «mais» - il faut dire que nous avons été tout à fait convaincus par leurs arguments.
Sur le fond, nous sommes opposés aux forfaits fiscaux car nous estimons que ce n'est pas acceptable de favoriser des riches étrangers dont la principale motivation est souvent de se soustraire à leur devoir de solidarité fiscale. De nombreux pays du Sud et des pays de l'est de l'Europe, notamment, sont privés de recettes fiscales qui leur permettraient d'investir de manière bien plus importante dans le sens de l'intérêt de leur population. Nous estimons que cette voie d'imposition constitue une concurrence fiscale internationale déloyale, en d'autres termes, un exemple assez clair de dumping fiscal.
S'agissant de ce que rapportent les forfaits fiscaux à Genève, eh bien il faut avouer que c'est là où les choses se compliquent. Le canton de Genève a compté 640 forfaitaires en 2008 pour un total de 66 millions de francs, sans compter les retours des impôts de succession. On peut se demander si ces recettes sont incontournables. La majorité de ce parlement, qui est en faveur du maintien de ce mode inique de perception fiscale, pense que, sans doute, ces recettes sont incontournables. Mais là, les Verts disent clairement qu'au vu du contexte actuel ce n'est pas le cas.
Nous préférerions donc que la Confédération règle le problème des forfaits fiscaux. Une solution fédérale aurait l'avantage d'être similaire pour les cantons qui bénéficient de forfaits fiscaux et permettrait notamment des délais identiques.
Quoi qu'il en soit, nous vous engageons à accepter l'entrée en matière sur ce projet de loi qui a le mérite de la sincérité.
M. Jacques Jeannerat (R). Mesdames et Messieurs les députés, les forfaits fiscaux font souvent l'objet d'arguments erronés, tant dans la presse que dans le rapport de minorité qu'on trouve à double exemplaire. Il n'est donc pas inutile de rappeler quelques éléments à propos de ces forfaits.
Pour bénéficier d'un forfait fiscal, l'étranger ne doit pas exercer d'activité lucrative dans notre pays. Il est imposé selon une estimation de ses dépenses et s'acquitte par ailleurs d'impôts à l'étranger, là où se situent ses biens et/ou son activité. Pour sa part, le résident actif en Suisse sera imposé en totalité dans notre pays. Nul besoin d'être fiscaliste pour comprendre qu'à situations fiscales distinctes, impositions différentes.
Le bon sens commande d'être sensible aux quelque 65 millions d'impôts directs que versent ces forfaitaires à Genève. Chacun des 600 contribuables imposés selon la dépense à Genève verse donc environ 120 000 F d'impôts par année en moyenne. A cela s'ajoutent, comme l'a précisé la rapporteure de majorité tout à l'heure, les impôts de succession; en effet, les personnes imposées au forfait sont, elles, assujetties à cet impôt.
Enfin, mettre la pénurie de logement sur le compte de ces 600 forfaitaires établis à Genève - parce qu'on l'a lu dans la presse dernièrement - c'est un peu une farce face aux 5000 personnes qui arrivent chaque année dans la région. Une abolition des forfaits fiscaux serait à l'évidence plus problématique pour les contribuables genevois, qui devraient compenser par leurs impôts le départ de ces excellents contributeurs, que pour les intéressés eux-mêmes, qui s'établiraient sous des cieux fiscaux beaucoup plus cléments.
En conséquence, le groupe radical refusera ce projet de loi.
Une voix. Bravo !
M. Michel Forni (PDC). Mesdames et Messieurs les députés, la fiscalité est un outil qu'il faut mobiliser avec doigté. Et nous avons bien entendu ce soir le discours de notre ministre des finances: lorsqu'on manie les leviers de la fiscalité, la prudence est visiblement de rigueur afin de ne pas casser des recettes, creuser des déséquilibres et surtout fragiliser notre économie.
Il est vrai que, ces derniers temps - il faut s'en souvenir - un certain désarmement fiscal s'est opéré, souhaitable pour certains moralement, nécessaire pour d'autres économiquement. Pensez aux successions, pensez également aux rabais fiscaux et pensez aussi à M. Laurent Fabius qui disait, en été 2010, que l'abaissement des impôts, ça prépare l'avenir.
Ce soir nous parlons d'une forme d'abattement d'un impôt particulier sur la fortune, qui génère actuellement par son action - il faut le dire - des rentrées fiscales importantes. Il est vrai que l'image, pour certains moralisateurs, est douteuse, mais souvenez-vous de M. Talleyrand: «Quand je me regarde, je m'inquiète; quand je me compare, je me rassure.» (Rires.)
Il paraît dès lors à certains peut-être très injuste, même scandaleux, que cette taxation - suffisante pour d'autres - équilibre nos comptes et, finalement - pour d'autres encore - oublie de participer à un environnement international où il y a les purs, les vrais, les bons, les moins mauvais.
D'autre part, j'ai été très intéressé par l'interprétation de la situation zurichoise - dont on n'a pas encore tout à fait les chiffres - qu'a faite la rapporteure de minorité. Visiblement, nous n'avons pas les mêmes sources, ou alors c'est un problème de traduction. Pour nous, ce qui ressort à Zurich, c'est actuellement plutôt négatif.
Le PDC est toujours très attentif à ces grandes manoeuvres visant à corriger en théorie la suprématie d'un discours social qui permet à certains de revenir sur les rentrées fiscales et qui, finalement, arrive toujours à des questions d'endettement.
Nous avons retenu deux éléments. D'abord, actuellement, nous pouvons nous attendre à ce qu'on appelle un effet contracyclique, c'est-à-dire qui vient contrecarrer le cycle économique, qui relance l'activité quand elle ralentit et qui, d'autre part, la freine lorsque la croissance s'emballe. C'est-à-dire que ceux qui ne sont pas contents et qui ont de l'argent peuvent partir à ce moment. En croyant à cette logique, nous nous permettons de soutenir le rapport de majorité et vous proposons de refuser catégoriquement ce projet.
Présidence de M. Renaud Gautier, président
Le président. Merci, Monsieur le député. Le Bureau a décidé de clore la liste. Pourront encore s'exprimer: Mmes et MM. les députés Forster Carbonnier, Florey, Golay, Ivanov, Jornot, Dandrès, Poggia, Jeanneret, Bolay, Deneys et enfin, bien évidemment, M. le conseiller d'Etat. La parole est à Mme la députée Sophie Forster Carbonnier.
Mme Sophie Forster Carbonnier (Ve). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, par principe, les Verts sont opposés aux forfaits fiscaux, comme l'a indiqué la rapporteure de minorité, Mme Captyn. Pour les Verts, ces forfaits fiscaux accordés aux étrangers représentent une injustice envers les contribuables suisses. En effet, les citoyens suisses sont tenus, eux, de déclarer leurs revenus au centime près et ils sont imposés sur l'ensemble de leurs revenus. Nous estimons aussi qu'il n'est pas correct d'aider de riches étrangers à se soustraire à leur devoir fiscal et nous considérons cette concurrence fiscale comme déloyale. De plus, cette forme de taxation prive de ressources financières les pays dont les ressortissants sont au bénéfice de forfaits fiscaux.
Les forfaits fiscaux ne sont donc pas acceptables d'un point de vue éthique. Cette vision semble d'ailleurs de plus en plus partagée en Suisse puisque, comme cela a déjà été mentionné, Zurich a aboli par vote populaire les forfaits fiscaux. Les Verts sont cependant de l'avis que l'abolition des forfaits fiscaux ne doit pas se décider à Genève mais se régler au niveau fédéral. Il convient en effet que tous les cantons concernés se mettent d'accord sur la manière de procéder.
Les Verts demandent donc au Conseil d'Etat de poursuivre les discussions engagées en la matière par la Conférence des directeurs cantonaux des finances. Afin de l'y inciter un peu plus efficacement, les Verts soutiendront ce projet de loi.
M. Stéphane Florey (UDC). Si Genève veut rester compétitif, ne serait-ce que par rapport au canton de Vaud, il est important qu'il maintienne ses forfaits fiscaux. Zurich les a abolis, Zurich s'en mord les doigts. En effet, il a vu bon nombre de ces bénéficiaires déserter ce canton au profit des cantons voisins et, par là même, ses rentrées fiscales fortement diminuer.
Il ne faut pas oublier que les forfaitaires contribuent aux impôts pour environ 60 millions de francs. Ils contribuent à faire baisser dans bien des cas les centimes additionnels communaux là où ils résident. Ils sont soumis à l'impôt sur les successions, mais surtout, ils participent à l'essor de l'économie locale.
Il faut également rappeler qu'environ 30% des Genevois ne paient pas d'impôts. Les contribuables au bénéfice de forfaits fiscaux contribuent également à rétablir l'équilibre entre ceux qui en paient et ceux qui n'en paient pas. Si ces forfaits fiscaux sont abolis, ce sera au contribuable genevois de les compenser.
Pour toutes ces raisons, le groupe UDC refusera ce projet de loi et vous invite à en faire de même.
M. Roger Golay (MCG). Mesdames et Messieurs les députés, c'est un petit peu paradoxal: les socialistes, les Verts - qui veulent toujours plus d'impôts pour payer le social - nous proposent ce soir exactement le contraire. Vous parlez d'injustice, d'inégalité de traitement, mais il ne faut pas faire de comparaisons ! Les comparaisons ne sont pas pertinentes et judicieuses, puisqu'on parle simplement de gens qui viennent ici sans activité lucrative. On ne peut donc pas comparer avec celui qui travaille sur le territoire suisse et doit payer son impôt par rapport à ses revenus. Là, c'est de l'argent frais qui arrive directement dans nos caisses. Ce sont des retombées économiques directes qui sont tout à fait importantes pour nous.
Il faut savoir qu'il y a eu une étude faite par des experts: 11 400 postes de travail sont dus à ces forfaits fiscaux sur le canton. Alors écoutez, Messieurs et Mesdames les spécialistes qui défendez les travailleurs: il y a 11 400 places grâce à ces forfaits fiscaux ! Celui qui arrive avec son forfait fiscal dépense une moyenne de 346 000 francs par année à Genève. C'est donc intéressant pour notre économie.
Nous, le MCG, estimons en tout cas que l'intérêt général prime sur certains principes moraux. On n'a qu'à voir dans certains cantons, notamment Vaud: certains villages ont pu construire des infrastructures importantes, des salles communales, des nouvelles écoles, grâce à ces forfaits fiscaux.
Nous n'arrivons donc pas à vous comprendre ! C'est pour notre économie, c'est pour le social ! Ces forfaits fiscaux ont un avantage. Nous, nous les avons aujourd'hui, Zurich ne les a plus; on a vu maintenant les résultats, Zurich s'en mord les doigts. Le MCG vous invite donc à refuser ce projet de loi.
M. Christo Ivanov (UDC). Le PL 10494 déposé par le groupe socialiste veut abolir les forfaits fiscaux. Les finances cantonales ne peuvent se passer de cette manne importante de plus de 65 millions par année. Celles-ci ont été sauvées depuis de nombreuses années par d'importantes successions provenant de ces gros contribuables décédés à Genève.
A Genève, il y a 647 forfaits fiscaux, mais - pour prendre un exemple - à Londres, il y a plus de 100 000 personnes qui bénéficient d'un statut équivalent, soit résident non domicilié. Par rapport à Londres, nous devrions donc en avoir vingt fois plus à Genève. Cela démontre que les Anglais sont des gens pragmatiques.
Le canton de Zurich, où les forfaits fiscaux ont été récemment abolis, est un bon exemple: la moitié de ces contribuables assujettis ont d'ores et déjà quitté le canton pour Zoug, Schwyz et d'autres cantons limitrophes.
Les socialistes se tirent une balle dans le pied en voulant faire fuir les bénéficiaires de ces forfaits. En effet, pour faire du social, il faut avoir de l'argent dans les caisses, or, avec la dette que nous avons à Genève, ce n'est pas demain la veille ! Comprenne qui pourra ! Par conséquent, l'UDC refusera ce projet de loi.
Une voix. Bravo Christo !
M. Olivier Jornot (L). On entend toujours, Mesdames et Messieurs les députés, parler d'un système inique à propos de l'imposition à la dépense. Et on oublie de ce fait qu'en réalité ce système d'imposition est né d'une nécessité. Il est né d'une réalité, à savoir qu'il y a des situations internationales pour lesquelles il n'est tout simplement pas possible d'appliquer le même système que celui que nous connaissons, vous et moi, pour des résidents dont les revenus et les biens sont tous concentrés au même endroit.
Il y a des réalités, il y a des besoins qui font qu'il est nécessaire, parfois, de recourir à des mécanismes de simplification, d'où le système de l'imposition à la dépense. Comme vous le savez, en effet, de nombreux pays ont un système de ce type. Et je remercie M. Ivanov d'avoir mis précisément le doigt sur l'exemple londonien, sur lequel je voulais aussi insister. Ça fait des décennies que les Anglais attirent, avec leur système de résidents non domiciliés, quantité de gens - y compris des Suisses d'ailleurs - parce que ce système répond à un besoin et est extrêmement favorable pour les contribuables. Et lorsque M. Gordon Brown - qui avait probablement dû lire les oeuvres complètes de M. Dandrès, à un moment donné, ou des rapporteures de minorités - a voulu tout d'un coup imposer ces gens-là, eh bien ils ont voté en faisant leurs valises et en quittant ce système qui n'était plus aussi favorable pour eux. Il y a donc un problème de concurrence.
Il y a ensuite un problème de recettes - sur lequel un certain nombre des orateurs précédents se sont exprimés - avec des recettes qui sont importantes pour l'Etat et les communes et qui sont renforcées par le système d'imposition des successions, qui ne concerne que les personnes imposées au forfait.
Pour nous, libéraux, c'est vrai que 60 millions, finalement, on pourrait s'en passer. (Exclamations.) Et je regarde M. Hiler pour voir comment il réagit à cette affirmation... En revanche, ce qui nous concerne le plus - plus encore que la question des recettes - c'est la question de l'effet économique de ces contribuables, parce que ce sont des contribuables, Mesdames et Messieurs, qui ne coûtent pas très cher à la collectivité. Leurs enfants ont passé l'âge d'aller à l'école et ce n'est pas eux qui vont recourir à l'aide sociale. Ce seront donc des contribuables bon marché, mais qui, en revanche, vont jouer un rôle économique considérable en dépensant dans notre canton, en recourant aux services d'artisans et de commerçants. Bref, ils ont un effet économique considérable et donc un effet démultiplié sur le plan fiscal, ce qui fait qu'en définitive les 60 millions dont nous avons parlé ne sont qu'une petite partie de ce qu'ils génèrent au profit de la collectivité.
Voilà les raisons pour lesquelles, Mesdames et Messieurs, nous n'avons, à l'époque, pas voulu entrer en matière sur ce projet de loi.
Il y a ensuite deux ou trois choses qui se sont produites. Il y a en effet la Confédération qui a lancé un système visant non pas à harmoniser les taux, comme cela a été dit tout à l'heure, mais à renchérir le coût de l'imposition à la dépense. Et puis il y a par ailleurs le vote de la LIPP qui a eu lieu - ce qui fait d'ailleurs que ce projet de loi modifie la LIPP-I qui a été abrogée entre-temps, mais c'est un détail. Ce vote de la LIPP signifie, Mesdames et Messieurs, que le peuple genevois a accepté un système fiscal, un paysage fiscal dont fait partie l'imposition à la dépense. On peut donc, en respectant cette volonté démocratique, refuser le projet de loi socialiste. Je vous remercie.
M. Christian Dandrès (S). Mesdames et Messieurs les députés, il y a quelques minutes à peine, la majorité de ce Grand Conseil était d'accord de sacrifier 15 millions pour un principe, la concurrence libre et non faussée. Alors on constate une chose: quand il s'agit de baisser les impôts, c'est les principes qu'on avance, et le pragmatisme quand il s'agit de favoriser les grandes fortunes. Voilà en quelques mots comment résumer le programme politique de l'Entente en matière fiscale.
On en avait déjà eu un magnifique exemple - et je pense que le député Weiss pourra confirmer - lors du débat sur l'amnistie fiscale, où les tenants de la loi de M. Jornot avaient tous indiqué, et le répètent encore ce soir, que leur seul objectif est de faire rentrer de l'argent dans les caisses de l'Etat. Mais quel noble idéal, Mesdames et Messieurs les députés ! Le problème, c'est la mise en oeuvre, qui est nettement plus prosaïque, puisque cette quête... (Remarque.) ...cette croisade a en mire les trois principes cardinaux du droit fiscal suisse, qui sont - et je pense qu'il est bon de le répéter ce soir - l'égalité de traitement, l'universalité de l'impôt et la capacité contributive. Et pour cause, la haine du parti libéral porte effectivement sur ces trois objets. En effet, ces trois règles instaurent la solidarité, qui est le fondement de notre société, et que l'Entente considère comme une entrave économique.
Mesdames et Messieurs les députés, le forfait d'impôt est un monstre juridique qui viole ces trois principes cardinaux et qui violente la cohésion sociale. (Commentaires. Rires.) Le fait que l'octroi des forfaits fiscaux soit soumis à des règles strictes - c'est ce qui a été indiqué dans le rapport - n'y change strictement rien. Le problème, Mesdames et Messieurs les députés, ce n'est pas l'application de la loi - je suis persuadé que les fonctionnaires le font avec beaucoup de rigueur - le problème, c'est la loi qui instaure ces forfaits.
Mesdames et Messieurs les députés, je crois qu'il est temps ce soir que notre Grand Conseil emboîte le pas au canton de Genève... de Zurich, excusez-moi ! (Rires.) Un lapsus ! Il est temps aussi qu'il demande au Parlement fédéral de modifier la loi d'harmonisation pour que les forfaits fiscaux ne soient plus possibles en Suisse, de manière à éviter que le choix des cantons responsables comme le canton de Zurich ne profite aux cantons que les scrupules n'étouffent pas. Je vous remercie, Mesdames et Messieurs. (Applaudissements.)
M. Mauro Poggia (MCG). Chers collègues, j'adore ! J'adore la naïveté des socialistes et la demi-naïveté des Verts ! (Commentaires.) Peut-être que, si vous n'existiez pas, on vous inventerait ! (Commentaires.) Peut-être, peut-être... (Commentaires.) Je vous cite... (Brouhaha.) Je vous cite: «On ne peut pas favoriser les riches étrangers.» Bien, donc il faut faire partir les riches étrangers ! Et Mme le rapporteur de première minorité nous dit: «Rien ne nous prouve qu'on n'arrivera pas à combler cette perte autrement.» Qui sait ? On peut toujours rêver, hein ! Et attendre ! Espérer !
Vous savez, avant, on vous a montré que le MCG pouvait être un parti de gauche; maintenant, on va vous montrer que le MCG peut être un parti de droite, pour faire bon poids bonne mesure. (Commentaires.) Parce que, vous comprenez, pour faire du social, il faut de l'argent. Nous, nous sommes prêts à aider les gens qui sont précaires dans cette république, et il y en a malheureusement de plus en plus. Mais l'argent, il faut aller le chercher là où il est. Vous comprenez ? Et nous faire croire que, finalement, ces riches étrangers pourraient payer comme tout le monde et resteraient peut-être en Suisse ou seraient remplacés par d'autres qui paieraient plus qu'eux, c'est doucement rêver ! Zurich a fait l'expérience, et aujourd'hui il s'en mord les doigts. Il y a encore une concurrence au niveau national, qui est bien présente et que nous ne pouvons pas négliger.
Comme vous avez fait croire à la population, lorsqu'il a été question de l'amnistie, qu'il était scandaleux de faire un cadeau aux fraudeurs, vous voulez nous faire croire aujourd'hui qu'il y a une comparaison à établir entre ce que ces riches étrangers paieraient s'ils n'avaient pas de forfait et ce qu'ils paient avec un forfait. Non, ils paient ce qu'ils paient avec un forfait ou ils ne paient plus rien parce qu'ils s'en vont ailleurs !
Nous disons, nous, au MCG: pour faire du social, il faut avoir de l'argent. Il n'y a pas de raison de se priver de ce revenu-là, parce qu'on ne peut pas faire autrement. Et je pense qu'effectivement la seule alternative c'est de faire fuir ces personnes. Alors, votre morale - excusez-moi - je vous la rappellerai lorsqu'il s'agira de sortir des millions pour aller aider ceux qui sont vos électeurs, n'est-ce pas ? Parce que ces millions, on ne les invente pas, il faut aller les chercher là où ils sont. Et ils sont là ! Et ces gens paient. Non seulement il y a les impôts qu'ils paient directement, mais il y a tous les bienfaits qu'ils apportent à notre économie de manière indirecte, comme M. le député Roger Golay vous l'a rappelé au niveau des emplois qu'ils créent. Nous refuserons donc ce projet de loi. (Applaudissements.)
Une voix. Bravo !
M. Claude Jeanneret (MCG). Mesdames, Messieurs, chers députés, le forfait fiscal est un bienfait pour notre canton. C'est une manière extraordinaire d'attirer des gens qui ne sont pas en concurrence avec les travailleurs locaux, au contraire, parce qu'en général ils ont fini leur activité. En plus de cela, ils créent de l'activité, ils dépensent beaucoup d'argent ici. Et il faut dire une chose: contrairement à une pseudo-morale que l'on entend, si ces personnes voulaient véritablement échapper au fisc dans leur pays ou ailleurs... Il y a longtemps que les Américains et autres pays anglo-saxons ont inventé ce qu'on appelle les «trustees»; et nous, les fondations.
Donc, il n'y a aucune... (Commentaires.) Il n'y a absolument pas d'incitation à la fraude. C'est simplement la mise en place d'un système qui permet à des gens de vivre normalement, et à Genève de récupérer un petit peu d'impôt sur le revenu, c'est vrai. En outre, si l'on en croit le rapport que j'ai reçu, il y a quand même eu 245 millions de droits de succession qui sont rentrés dans les caisses de l'Etat, c'est énorme. En plus de cela, ces impôts, une fois qu'ils sont payés, sont encore des générateurs de nouveaux impôts. Et on attire aussi chez nous des gens qui nous rendent service, qui donnent de l'emploi. Donc s'ils ne voulaient pas payer chez eux, de toute façon ils ne paieraient pas. (Remarque.)
Quand on voit les capitaux que les gens ont gagnés et qui ne sont pas nécessairement déclarés dans leur pays... Mais là, ce n'est pas la Suisse qui est un allié; la Suisse est au contraire un allié de personnes qui veulent rétablir un certain mode de vie où elles paient des impôts honnêtement. Et si on leur donne un forfait, c'est une bonne chose pour tout le monde ! C'est surtout une bonne chose pour Genève qui, de cette manière, profite d'une dépense supplémentaire, disons, faite par des gens qui ne coûtent rien à la société, d'une part, et qui de surcroît créent beaucoup d'emplois et font beaucoup de dépenses ici.
En conséquence, le MCG refusera bien sûr le PL 10494. Merci, Monsieur le président.
Mme Loly Bolay (S). Ce qu'on observe ce soir, ici, c'est en tout cas une chose: il y a beaucoup d'avocats qui s'expriment. Moi je me demande s'ils s'expriment en tant qu'avocats ou en tant que politiciens... (Commentaires.) ...parce que là est la question ! Franchement, là est la question ! On se demande qui vous défendez en ce moment !
Mesdames et Messieurs les députés, en droit suisse, le forfait fiscal est un impôt sur la dépense. En Suisse, il y a environ 5000 personnes qui ont des privilèges fiscaux. En 2010, le nombre a même augmenté de 5%. Mais, en 2011, la demande est encore plus forte, notamment de gens qui viennent de l'Hexagone. Pourquoi ? Parce qu'en France, la droite, Monsieur Jornot - la droite - prône la suppression du bouclier fiscal. Ce n'est pas la gauche ! C'est la droite de Nicolas Sarkozy ! (Remarque.)
Mesdames et Messieurs les députés, les forfaits fiscaux créent une inégalité de traitement. En même temps, ils créent une opacité des cantons sur la manière d'appliquer ces régimes. Sur l'inégalité de traitement, je vous citerai deux ou trois cas: d'abord, Federer, qui a même quitté un canton pour payer moins d'impôts. Mais si l'on compare ce que paie Federer sur ses revenus - parce qu'évidemment, comme il est suisse, il paie des impôts sur ses revenus - avec un Johnny Hallyday ou une Amélie Mauresmo, qui ont tous les deux des forfaits fiscaux, eh bien il paie dix fois plus ! Un grand producteur de télévision s'est vanté l'autre jour sur France 2. Il habite Cologny et a dit: «Moi, c'est extraordinaire, j'habite en Suisse et je paie un forfait fiscal: 200 000 francs suisses. Si je devais payer en France, je paierais dix fois plus, voire plus que cela, entre 2 et 3 millions.»
Ces forfaits fiscaux conduisent aussi à des dérives. Et je vais vous dire: il y a un cas d'une personne venant de l'étranger qui a créé dans le canton de Vaud une société spécialisée dans les conseils financiers. Cette personne a engagé un cadre qui est allé travailler dans le canton du Valais. Eh bien, ces deux personnes - qui habitent pourtant dans le canton de Vaud pour l'une, dans le canton du Valais pour l'autre - sont soumises au forfait alors qu'elles habitent en Suisse !
Mesdames et Messieurs les députés, tout à l'heure, quelqu'un a dit que le canton de Zurich s'en mord les doigts. Mais, écoutez, lisez cet article et vous verrez que c'est exactement le contraire. (Mme Loly Bolay montre une coupure de journal.) On y dit même que la suppression des forfaits fiscaux a fait revenir des gens parce qu'il y a des villas à acheter, que ces gens paient des impôts comme ils doivent et que ça a généré des recettes. D'ailleurs, je vais vous dire: le canton de Bâle-Ville veut aussi supprimer les forfaits fiscaux.
Mesdames et Messieurs les députés, les forfaits fiscaux poussent certains riches qui viennent ici à tricher. Ce forfait fiscal est une honte ! Et même si, aujourd'hui, nous sommes minoritaires dans ce parlement, eh bien ce n'est pas la dernière fois qu'on va remettre l'ouvrage sur le métier ! On reviendra ! On est déjà revenu plusieurs fois, mais, aujourd'hui, je crois qu'il y a une partie de la population qui va nous suivre dans notre raisonnement.
Moi je vous encourage, pour ceux qui ont une éthique, une morale... Parce que payer des impôts, Mesdames et Messieurs les députés, ça fait partie de la vie, c'est avoir une éthique, c'est avoir une morale ! Il n'est pas normal que ceux qui doivent tout déclarer paient un maximum, et qu'aux riches qui viennent ici parce qu'ils veulent se soustraire à l'impôt, on puisse encore faire ces cadeaux, parce que ce sont des privilèges fiscaux ! (Exclamations.)
Mesdames et Messieurs les députés, nous, nous assumons, vous assumerez aussi ! Je vous remercie de m'avoir écoutée. (Applaudissements.)
Une voix. Bravo !
Le président. Merci, Madame la députée. La parole est à M. le député Roger Deneys. (Exclamations.)
M. Roger Deneys (S). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, on va directement remettre une couche puisque, manifestement, on n'a pas l'air de vous avoir convaincus pour le moment. (Brouhaha.) Tout d'abord il faudrait rappeler que, il n'y a pas si longtemps que cela - moins de deux ans - nous avons voté à Genève une baisse d'impôts massive de plus de 400 millions de francs par année, qui bénéficie en grande partie aux riches contribuables genevois. Certains contribuables ont eu 2 millions de baisse d'impôts annuels grâce à cette votation. Genève a donc amélioré sa compétitivité fiscale, pour autant qu'on soit attaché à ce type de mesure. Ça a l'air d'être votre cas, vous devriez y être sensibles ! Quelque part, Genève fait déjà un effort en direction des grandes fortunes et des grands revenus qui souhaiteraient s'établir ici. On peut le déplorer puisque, bien entendu, ça péjore les recettes des collectivités publiques. Ainsi, un certain nombre de projets que nous avons à régler, une dette que nous avons à rembourser, se feront moins facilement, parce que nous n'avons pas les mêmes recettes. Fondamentalement, aujourd'hui, nous sommes donc dans une situation plus compétitive qu'avant. Faut-il conserver pour autant des forfaits fiscaux ?
Des voix. Oui ! (Rires.)
M. Roger Deneys. En réalité, comme l'a dit Loly Bolay tout à l'heure, on voit bien ce qui se passe à Zurich, et je pense que la situation genevoise n'est pas très différente. Certes, sur les 208 bénéficiaires de forfaits fiscaux zurichois, une cinquantaine sont partis. Mais de quel type de logement bénéficiaient ces cinquante ou soixante contribuables ? Etaient-ce des locataires de logements sociaux subventionnés ? J'ai un grand doute... C'étaient certainement des locataires ou des propriétaires de belles maisons au bord du lac de Zurich ! Est-ce que ces maisons sont aujourd'hui vides, inoccupées, squattées peut-être ? Bien entendu, non. Ces maisons ont retrouvé acquéreur, et ces acquéreurs, puisqu'il n'y a plus de forfait fiscal, paient des impôts.
Le secrétaire de la Ville de Zurich, dans l'article du «Temps» de début janvier, le précisait: le départ de chaque contribuable est une perte, mais une personne imposée au forfait n'est pas forcément un bon contribuable. Et c'est bien le cas ici: si vous remplacez une personne riche qui paie des impôts par une personne riche qui est imposée au forfait fiscal, en ce qui concerne les retombées dans l'économie locale, ça ne change absolument rien. En effet, elle va de toute façon dépenser localement ce qu'elle dépense localement; en réalité, avec des impôts, ce sont les recettes pour la collectivité qui augmentent.
Il faut quand même revenir au point de départ du problème des forfaits fiscaux: en réalité, les bénéficiaires de ces forfaits sont des parasites. Ce sont des parasites fiscaux... (Commentaires.) ...qui quittent un pays... (Commentaires. Le président agite la cloche.) ...qui quittent une région dans laquelle ils ont été formés et éduqués. Ils ont pu bénéficier dans leur pays d'origine des infrastructures publiques, de la sécurité donnée par la force publique et la police, or que font-ils quand ils atteignent un certain niveau de revenus ? Eh bien, ils abandonnent la collectivité publique qui les a formés, qui leur a permis d'atteindre ce statut social, pour aller cacher leur argent et ne pas en faire bénéficier leurs concitoyens ! (Commentaires.)
C'est tout simplement indécent, parce que la question qu'on devrait se poser dans ce parlement, c'est la question du revenu disponible, ce n'est pas celle du montant de l'impôt qu'on doit payer ! La question, c'est de savoir de combien nous pouvons bénéficier chaque jour pour vivre. Et moi je pense qu'au-delà d'un certain seuil, l'impôt n'est pas du tout confiscatoire. Il est juste normal, naturel, parce qu'on ne peut pas trouver correct que des gens vivent avec des millions de francs par année ! C'est tout simplement indécent quand des personnes meurent de faim ou sont aux minimums sociaux, comme nous en connaissons à Genève.
Et le MCG, qui prétend défendre les classes défavorisées, prouve une fois de plus que, ce qui l'intéresse, c'est de faire des cadeaux aux riches et de laisser tomber les plus pauvres ! (Brouhaha.)
Mesdames et Messieurs les députés, il faut donc soutenir ce projet de loi en faveur de la suppression des forfaits fiscaux pour rétablir la justice sociale et la justice fiscale à Genève et ailleurs sur terre ! (Applaudissements.)
Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à Mme la députée Lydia Schneider Hausser, à qui il reste deux minutes trente.
Mme Lydia Schneider Hausser (S), rapporteuse de première minorité. Merci, Monsieur le président. Deux minutes suffiront pour répondre ou pour reprendre quelques éléments. Quand on nous traite, nous, les socialistes, de rêveurs, c'est faux. C'est faux parce que ça ne sera pas le vide si ces gens s'en vont. Il y a peut-être 60 millions de forfaits fiscaux en tant que tels qui partiront. Mais, par contre, les propriétés seront rachetées, ou les locations reprises. Nous avons une assez grande pression au niveau de Genève pour qu'il n'y ait pas de problème de ce côté-là.
Ces gens qui arriveront, ces actifs, vont payer des impôts. Ces actifs représentent aussi des gens qui vont devoir engager ou qui auront l'utilité de postes de travail, on va dire, en parallèle. Donc là, on ne va pas perdre 11 400 emplois qui gravitent autour des contribuables au bénéfice de forfaits fiscaux actuellement.
Et il est vrai que, quand il s'agit de ne plus privilégier les riches, là, la droite - qui prône d'habitude le dynamisme, la prise de risque, qui préconise qu'il faut avancer, qu'il faut ne pas avoir peur... Ici, on est dans la théorie de la peur. Etonnant mais compréhensible, parce que les gens qui bénéficient de ces forfaits fiscaux, ce ne sont pas des pauvres !
C'est vrai que, là, on reconnaît un peu, quelque part, les tics du MCG et son côté «droite». En effet, quand il s'agit de sélectionner les étrangers, les pauvres ou les frontaliers, c'est l'horreur; par contre, les gens qui arrivent pour payer des forfaits fiscaux... Là, on a un autre discours !
Mesdames et Messieurs, les socialistes vous demandent de soutenir ce projet de loi. S'il n'est pas soutenu ce soir par la majorité, nous proposons que soit en tout cas relayé le vote de ce parlement au niveau fédéral et au niveau des instances fédérales comme étant une préoccupation d'une grande partie de la population actuellement à Genève, même si elle n'est pas majoritaire au parlement. Merci beaucoup.
Le président. Merci, Madame la députée. La parole est à Mme la rapporteure Patricia Läser.
Mme Patricia Läser (R), rapporteuse de majorité. Merci, Monsieur le président...
Le président. A qui il reste cinq minutes...
Mme Patricia Läser. Je n'en aurai pas pour aussi longtemps ! Mesdames et Messieurs, j'aimerais juste faire un rappel et vous mettre en garde: les bancs d'en face, les bancs de gauche nous ont donné un message ce soir en nous prouvant que c'était un problème au niveau suisse et non un problème au niveau cantonal. La seule vérité, c'est que l'abrogation de ces forfaits fiscaux ne fera pas partir les contribuables à l'étranger mais simplement dans les cantons voisins. Alors, soyons réalistes, Mesdames et Messieurs, gardons cet argent à Genève ! Et je ne doute pas que les socialistes et les Verts sauront nous proposer bien des choses pour arriver à le dépenser ! Je vous remercie. (Rires. Applaudissements.)
M. David Hiler, conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs, je dois d'abord résoudre un petit point d'histoire. Lorsque le PL 10494 a été déposé, le Conseil d'Etat alors en fonction avait indiqué que, dans sa majorité, il était favorable au but poursuivi par ce projet de loi mais qu'il estimait que cette question devait se résoudre au niveau fédéral - point sur lequel, au moins, nous étions sept.
Entre-temps, la majorité de ce Conseil a changé - et, Monsieur Jornot, je vous rassure, je n'ai charmé aucun serpent ! - raison pour laquelle je me dois, dans le système collégial qui est le nôtre, de vous signaler que le Conseil d'Etat dans sa majorité n'est pas favorable au principe défendu par les rapporteurs de minorités, mais qu'en revanche nous sommes toujours sept à penser qu'à ce jour il convient qu'une solution soit trouvée au niveau fédéral.
Au point où j'en suis dans les méandres du système suisse - démocratique et collégial - que vous connaissez, je vais m'offrir le plaisir d'essayer simplement de rapporter un certain nombre de faits, avec le privilège, pour une fois, d'être au moins sûr de déplaire à tout le monde.
La première chose, Mesdames et Messieurs, c'est qu'on aurait pu penser que la majorité précédente du Conseil d'Etat faisait oeuvre de duplicité en renvoyant la question au niveau fédéral. Tel n'est pas le cas. Et si j'ai été étonné de constater que les bancs qui défendent ce projet à Genève ne lancent pas une initiative fédérale, d'autres ont eu du courage. Le 1er mai, La Gauche, la vraie, lancera une initiative au niveau fédéral, de sorte que le peuple suisse pourra se prononcer.
La deuxième information, qui paraît avoir échappé à tout le monde, est basée sur un sondage de Vimentis paru récemment - pas dans l'optique d'une votation, parce qu'on sait qu'il y a une différence, mais par avis - sur la question: «Voulez-vous que l'on maintienne les forfaits fiscaux ?» Eh bien, 75% de la population suisse veut abolir les forfaits fiscaux, et il y a une raison à cela. Du reste c'est pour cela que je dois dire que l'exemple de Bâle doit me laisser relativement froid, parce que, en 2007, à Bâle-Ville, il devait bien y avoir... Excusez-moi, je vais chercher le chiffre... Bâle-Campagne, c'étaient six personnes; et Bâle-Ville, c'étaient quinze. Donc la raison, c'est qu'une partie de la Suisse, sa majorité - toute la Suisse, pratiquement, sauf la Suisse occidentale et le Tessin et, dans une moindre mesure, les Grisons - a traditionnellement peu développé les forfaits fiscaux, de sorte que, notamment en Suisse orientale et centrale, l'opinion est défavorable, y compris au sein des partis de droite.
Donc je dirai aux uns: si vous voulez avancer sur cette solution, posez une bonne fois la question. Mais à ceux-là je dirai aussi: faites tout de même attention au fait qu'il existe en Europe - et cela a été dit - des régimes extrêmement proches du forfait, mais généralement plus avantageux parce que la personne concernée n'a pas l'obligation, comme en Suisse, de ne pas travailler.
Vous avez mentionné l'Angleterre, c'est parfaitement juste. Et la loi vient d'être changée en sens inverse, si j'ai bien compris: il y a des conditions extrêmement favorables qui ont été faites aux investisseurs. De l'autre côté, il y a tout de même des pays qui ne sont pas exactement la négation de l'Etat social: il y a les Pays-Bas, en fait le Benelux, puisqu'il y a des régimes du même type au Luxembourg et en Belgique. Il y en a bien sûr en Chine - oui, en Chine communiste - et également à Hong Kong et à Singapour. Il y a encore - et puisqu'on parle souvent du paradis fiscal suisse, je vais vous la donner, celle-là, parce qu'elle est extraordinaire - la solution autrichienne. La solution autrichienne dit simplement que quelqu'un qui vient en Autriche ne peut pas payer plus d'impôts en Autriche que ce qu'il payait auparavant, de sorte qu'un Allemand qui a envie de payer moins d'impôts doit simplement déménager une petite année à Monaco, ce qui lui permet de ne pas payer d'impôts lorsqu'il arrive en Autriche.
C'est vous dire - et je vous l'avais déjà indiqué - qu'il faut quand même faire un peu la part des choses entre les guerres fiscales et la morale.
Maintenant, Mesdames et Messieurs les députés, il est vrai - et là, après avoir quelque peu ironisé pour les uns, je vais ironiser pour les autres - il est vrai que, à Zurich, comme l'indique un article du «Temps», la fin des forfaits fiscaux ravit les communes. Alors, Madame Schneider Hausser, ce ne sont pas exactement des villages... (Rire de l'orateur.) Ce sont les «rivages» dorés... (Exclamations. Rires.) ...«Goldküste» en allemand. Effectivement, la question est un peu moins théorique qu'il n'y paraît, à savoir que, aujourd'hui, compte tenu du peu d'objets de très haut prestige et de la croissance économique que l'on connaît ici, la question peut se poser dans les années qui viennent: est-il préférable d'avoir des forfaitaires ou est-il préférable que des personnes qui développent fortement l'activité économique puissent s'installer et n'aillent donc pas s'établir ailleurs ?
Toujours est-il, Mesdames et Messieurs, que si nous votions le projet de loi aujourd'hui, la seule conséquence qu'il y aurait, c'est de déplacer les forfaits dans le canton de Vaud. Donc le gain moral serait relativement faible.
Si certains veulent réfléchir à cette question d'ici aux votations, je pense qu'il faut prendre plusieurs éléments en considération. Le premier, c'est que, aujourd'hui, on peut imaginer - c'est un scénario parmi d'autres - que nous pourrions, comme Goldküste, remplacer ces contribuables au forfait par des contribuables actifs. Mais alors il faudra répondre à une autre question: si on veut les remplacer, il serait tout de même préférable que les multinationales ne quittent pas Genève et que le négoce international de matières premières ne quitte pas Genève, parce qu'autrement vous n'aurez aucun remplacement; et ça, c'est une question que vous devrez vous poser.
D'un point de vue de l'offre et de la demande - je me tourne maintenant vers vous - il n'est pas exclu qu'on puisse jouer cette carte dans quelques années; autant avoir des actifs. Je précise quand même qu'un certain nombre de contribuables, aujourd'hui, restent contribuables tant qu'ils travaillent - par exemple des managers très très bien payés - et se déplacent effectivement dans le canton de Schwyz lorsqu'ils sont à la retraite... Certains à Schwyz et, à vrai dire, deux ou trois à Monaco. Donc cette question se pose, et ce sont aussi des éléments qu'il faut prendre en considération.
Il y a une stratégie qui est basée sur l'activité - vous aurez compris qu'elle a ma faveur, au risque, là encore, de déplaire à beaucoup - et il y en a une qui est basée sur l'accueil de gens qui vivent des revenus de leurs capitaux.
Par rapport aux montants, j'aimerais rappeler que le Conseil fédéral a présenté un projet de loi qui n'est rien d'autre que la proposition de la Conférence des directeurs cantonaux des finances. Celle-ci, constatant des abus manifestes dans certains cantons, où il ne s'agissait plus d'un impôt sur la dépense mais d'une incitation à occuper les lits froids - si je puis m'exprimer ainsi - sur des montants ridicules de quelques dizaines de milliers de francs, a décidé, pour l'impôt fédéral, de fixer une assiette de 400 000 F. Ça peut paraître peu, une assiette de 400 000 F, mais enfin, ce sont des gens qui ne travaillent pas, et si c'est un rendement de la fortune, ça veut dire une fortune de 10 millions.
J'aimerais aussi préciser que vous ne pouvez pas comparer la situation des artistes et des sportifs avec celle des simples rentiers, parce que les artistes et les sportifs paient des impôts sur les lieux de leurs prestations, exactement comme tous les artistes qui viennent à l'Arena paient des impôts anticipés ici. Ce n'est donc qu'une partie de leurs avoirs qui est concernée.
Par ailleurs, je vous rappelle que, depuis que Mme Calmy-Rey a été en fonction, un relèvement graduel à hauteur de 300 000 F est opéré - pas sur les anciens mais sur les nouveaux - de sorte que la proposition des 400 000 F qui est faite ne nous poserait aucun problème à Genève. Nous avons d'ailleurs même suggéré que ces 400 000 F ne concernent pas que l'impôt fédéral direct mais également l'impôt cantonal.
Enfin, pour finir - et je vais me fâcher décidément avec tout le monde - je veux tout de même insister à nouveau sur un point compliqué. Aujourd'hui, le modèle genevois, le modèle vaudois, c'est de conserver un impôt sur la fortune - qui est en train de disparaître en Europe, littéralement, qui n'existe pas dans une bonne partie du monde et qui, chez nous, tend vers 1% pour les plus hauts, ce qui est un chiffre inhabituellement élevé - tout en gardant des impôts sur le revenu extrêmement élevés pour les hauts revenus. La récente étude comparative zurichoise montre que nous sommes effectivement, pour les pauvres et pour la classe moyenne jusqu'à des salaires de 200 000 F, disons, un paradis; par contre, pour les autres, évidemment, nous sommes généralement entre le vingt-deuxième et le vingt-sixième rang. Moi je vis très bien avec ça, d'autres moins. Mais enfin, c'est la réalité - n'est-ce pas, Monsieur Deneys, c'est ça la réalité.
Le fait d'abolir les forfaits fiscaux veut donc dire que vous acceptez aussi les risques de la concurrence avec Obwald, avec Schwyz, avec Nidwald, parce que c'est précisément ce qui permet aujourd'hui, un peu comme les statuts pour les entreprises, d'avoir des taux d'imposition élevés tout en étant attractifs au niveau international.
Voilà pourquoi je pense que tout le monde devra bien réfléchir. Pour les uns, aux vertus des lois de l'offre et de la demande de nos verts pâturages destinés aux personnes riches de ce monde. Est-ce que, vraiment, on ne peut pas se permettre de prendre le risque de la carte Goldküste, pour avoir sur notre territoire, quand il s'agit de maisons à 30 millions, des gens qui créent de la valeur plutôt que des rentiers ? N'est-ce pas... plus dynamique ?!
Pour les autres, il faudra se dire effectivement: que se passe-t-il en cas d'abolition des forfaits ? Que fait-on après ? Faudra-t-il un jour ou l'autre - et je ne serai pas là pour vous en parler, opportunément, vu les délais de traitement des initiatives au niveau fédéral - baisser l'impôt sur la fortune ?
Voilà, Mesdames et Messieurs, les raisons pour lesquelles je vous rappelle que la majorité du Conseil d'Etat est opposée en principe à ce projet de loi et que, de toute façon, les conseillers d'Etat - lorsqu'ils étaient avec une autre majorité et en avaient discuté - pensaient qu'il était peu souhaitable de le faire au niveau cantonal. Enfin, je tiens à disposition des rapporteurs de minorité et de majorité le projet de La Gauche, s'ils étaient intéressés à le vendre dans leur parti... Ah, j'ai réussi ! (Rires.)
Le président. Après cette séance de marketing, on remercie M. le conseiller d'Etat. Nous sommes donc en procédure de vote sur le projet de loi 10494. Celles et ceux d'entre vous qui sont favorables au vote d'entrée en matière...
M. Roger Deneys. Vote nominal !
Le président. Monsieur Deneys: «Vote nominal, Monsieur le président, s'il vous plaît.» Vous verrez, ça va aller tout seul ! Etes-vous soutenu ? (Commentaires. Des mains se lèvent.)
Une voix. C'est trop tard...
Le président. Parce que c'est M. Deneys et que ça me fâcherait de le décevoir, je vous propose d'entrer en matière sur sa demande, contrairement à l'avis d'une grande sagesse qui a été fait. Mais pensez, à l'avenir, à le dire suffisamment tôt, Monsieur Deneys; ce n'est pas la première fois. (Remarque.) Comme punition, vous serez condamné à amener un stère de bois pour imprimer tout cela... Nous allons donc voter à l'appel nominal.
Mis aux voix à l'appel nominal, le projet de loi 10494 est rejeté en premier débat par 53 non contre 25 oui. (Exclamations à l'annonce du résultat.)
Le président. Avant que de clore cette séance, je voudrais vous dire la chose suivante: entre les séances de jeudi dernier, celles de vendredi dernier - dont une a été écourtée - et celles d'aujourd'hui, nous avons traité 107 points de l'ordre du jour... (Applaudissements.) ...ce qui approche du record. Vous êtes donc, en ce qui me concerne, libérés pour la fin de soirée. Rentrez bien chez vous et à bientôt ! (Exclamations.)
La séance est levée à 18h50.