République et canton de Genève
Grand Conseil
Séance du vendredi 18 juin 2010 à 15h
57e législature - 1re année - 9e session - 43e séance
P 1349-A
Débat
Mme Anne-Marie von Arx-Vernon (PDC), rapporteuse ad interim. Dans le cadre de cette pétition, les inquiétudes des pétitionnaires étaient légitimes. Ils ont été entendus et des solutions raisonnables, concertées et respectueuses entre les habitants, les livreurs, les piétons, les voitures et bien sûr la police municipale et la police cantonale ont été trouvées. C'est pourquoi une large majorité s'est dégagée à la commission pour le dépôt de cette pétition sur le bureau du Grand Conseil. Je vous remercie de bien vouloir en faire autant, Mesdames et Messieurs les députés.
Mme Fabienne Gautier (L). Les libéraux sont en faveur d'un renvoi au Conseil d'Etat, parce que nous ne sommes pas tout à fait d'accord avec ce qui vient d'être dit et qui se trouve dans le rapport. Ce dernier, rédigé par Mme Béatrice Hirsch-Aellen, a été déposé en 2007; c'était donc une autre législature et elle n'avait pas pu assister aux débats de l'époque. On ne peut pas dire que la situation se soit améliorée, notamment dans le stationnement, ce que réclament en fait les habitants, les commerçants, aussi en ce qui concerne les livraisons à la Vieille-Ville.
Nous n'arrivons pas à savoir - et là, je parlerai aussi au nom des commerçants - nous ne connaissons absolument pas la politique de stationnement du Conseil d'Etat. Nous nous sommes toujours battus pour que, lorsque des places de surface étaient supprimées, elles soient remplacées par des places de sous-sol. Or nous n'obtenons toujours pas un plan directeur de stationnement dans ce canton. Nous trouvons cela inadmissible, parce que, dans la situation actuelle, des commerces sont désertés ou se ferment dans la Grand-Rue; nous pouvons voir, sans arrêt, des arcades fermées ou des changements dans ces arcades, parce qu'il y a un problème d'accessibilité à ces commerces. Nous ne demandons pas l'accessibilité en voiture, hormis pour les livraisons, mais l'accessibilité piétonne avec cependant, comme nous le défendons depuis des années, des parkings de proximité.
Il est regrettable que, malheureusement, la Ville ait refusé par son vote le parking prévu alors à la place Neuve et que l'on se trouve dans la situation actuelle pour la circulation, qui, grâce à ce parking, aurait été largement améliorée autour de la place Neuve. On aurait eu une place Neuve digne de ce qu'elle devrait être, c'est-à-dire avec un Conservatoire, un Grand Théâtre et un Musée Rath mis en valeur. Or on ne voit que des voitures qui tournent autour de la place toute la journée, tout cela parce que le parking de la place Neuve n'a pas pu être construit, ayant été refusé par la Ville. C'était un parking complètement financé par les privés, je vous le rappelle.
La situation ne s'est pas améliorée, c'est regrettable, et c'est pour cela que les libéraux vous demandent un renvoi au Conseil d'Etat pour enfin avoir une ligne directrice du stationnement au centre-ville, laquelle n'existe pas.
M. Frédéric Hohl (R). Je ne vais pas répéter les propos de Mme Gautier. Nous y adhérons pleinement. Nous vous encourageons, Mesdames et Messieurs les députés, à renvoyer cette pétition au Conseil d'Etat. En effet, il y a toute une problématique, qui avait d'ailleurs été soulevée par la Ville, qui disait qu'elle a la volonté de mener une politique conciliante entre les commerçants, les agents de ville et les habitants. Je crois que l'on attend effectivement des réponses du Conseil d'Etat. Pour les habitants, les commerçants et tous ceux qui effectuent des livraisons dans la Vieille-Ville, il est donc important de lui renvoyer cette pétition.
Mme Loly Bolay (S). Mesdames et Messieurs les députés, je trouve que mon groupe a été très gentil - trop gentil - de voter le dépôt de cette pétition sur le bureau du Grand Conseil. Alors je ne partage pas l'avis, je ne suis pas dans la même lignée que Mme Gautier, qui est d'ailleurs fâchée avec moi depuis hier. Bon, vous savez pourquoi ! (Commentaires.) En effet, la Vieille-Ville est devenue un véritable dépotoir.
Mesdames et Messieurs les députés, je vous rassure tout de suite, je n'habite pas la Vieille-Ville, mais toujours le Grand-Saconnex. Et bien évidemment, comme vous tous, je viens régulièrement ici. Or quand je vois ce qui se passe dans cette Vieille-Ville, cela me fait frémir. Quand je passe au Bourg-de-Four et que je vois des personnes qui viennent boire un café dans un certain bistrot que je ne nommerai pas et qui se garent tout simplement devant ce dernier, eh bien elles empêchent les habitants de la Vieille-Ville et les voitures qui viennent ici pour livrer de véritablement avoir accès aux magasins pour diverses raisons. Alors je suis désolée, mais regardez, quand on arrive ici, toute la rue de l'Hôtel-de-Ville. Vous voyez vous-mêmes les parkings sauvages à n'importe quelle heure. Hier, j'ai vu une voiture qui est restée depuis l'après-midi: nous sommes partis à 23h30 et elle était toujours là. C'est dire ! On a un parking Saint-Antoine, mais les gens ne veulent pas payer ce parking, et ce sont des voitures ventouses qui sont toute la journée en Vieille-Ville.
Monsieur le conseiller d'Etat Unger, vous avez fait un planning pour la mobilité douce et vous encouragez les gens à marcher. Marcher fait du bien, Mesdames et Messieurs les députés ! (Remarque.) Eh bien, allons dans cette optique ! Si l'on ne met pas de l'ordre en Vieille-Ville... Je vais vous dire, je crois que la Vieille-Ville de Genève est la seule de Suisse, et je dirais même dans le monde, en tout cas en Europe, où il n'y a pas une meilleure politique de concertation quant au parking sur son territoire. C'est absolument surprenant de voir comment les gens utilisent la voiture pour venir ici, constamment. Alors je ne voterai pas comme mon groupe. Je vais m'abstenir ou voter contre, parce que, franchement, je trouve qu'ils ont été extrêmement gentils.
M. Roberto Broggini (Ve). Sur un point, je suis d'accord avec Mme Gautier. (Exclamations. Commentaires.) Effectivement, c'est avec beaucoup d'impatience que j'attends le plan directeur du stationnement. C'est là que les chiffres nous montreront - nous le savons déjà - que nous avons, par hectare et par habitant, le plus haut taux de places en Suisse. (Commentaires.) C'est cela, l'auto. (Brouhaha.) L'offre en stationnement à Genève est donc supérieure aux autres villes de Suisse, et on en veut encore plus !
Et on souhaite, par cette pétition, accorder des privilèges aux habitants de la Vieille-Ville, car c'est bien ce dont il s'agit: de pouvoir stationner hors des cases, où bon nous semble. En effet, à Genève, ce n'est bien sûr pas à nous d'appliquer la loi fédérale sur la circulation routière ! En effet, chez nous, on doit bien entendu pouvoir inventer d'autres règles ! J'ai entendu l'autre jour un brigadier de gendarmerie me dire que nous avions des jurisprudences particulières à Genève pour la circulation routière. C'est incroyable ! (Brouhaha.) Alors voilà, même dans les rangs de la police, on n'applique pas la loi sur la circulation routière parce que, tout simplement, on ne peut pas l'appliquer. (Commentaires.)
Cette pétition - je rejoindrai Mme Bolay - devrait effectivement être classée purement et simplement, et même pas être déposée. C'est dans ce sens, Mesdames et Messieurs, que je prends position.
En outre, cette pétition date de 2001. Elle a déjà été traitée par la Ville de Genève. Je vois que, ici dans ce Grand Conseil, on a mis dix ans pour traiter cet objet, parce que nous savons que les députés aiment bien leurs petits privilèges et pouvoir se garer avec leur deux-roues motorisé ou avec...
M. Fabiano Forte. Des noms !
M. Roberto Broggini. Non, pas de noms, Monsieur Forte ! ...ou avec leur automobile sans payer, parce qu'il y a des privilèges, alors qu'ils ont la possibilité de stationner gratuitement à Saint-Antoine. Mais il y en a toujours qui s'évertuent à venir se garer devant l'Hôtel de Ville, parce qu'ils croient qu'ils ont des privilèges.
Alors non, Mesdames et Messieurs, nous ne pouvons pas accepter cette situation ! Tout simplement, du point de vue de la légalité et vis-à-vis de nos concitoyens, les députés ne sont pas au-dessus des lois; les habitants de la Vieille-Ville ne sont pas au-dessus des lois. Il y a des lois et des règlements sur la circulation. Eh bien, simplement, on doit les appliquer ! (Applaudissements.)
M. Fabiano Forte (PDC). Mesdames et Messieurs les députés, il est vrai qu'il y a des lois et des règlements qu'il faut faire appliquer. On souhaiterait qu'il y ait autant de verve dans l'application de ces lois et règlements vis-à-vis des cyclistes... (Remarque.) ...que vous chérissez, cher collègue.
Le groupe démocrate-chrétien votera le renvoi de cette pétition au Conseil d'Etat parce que nous sommes convaincus que l'on peut trouver des solutions pour les habitants - pas forcément les solutions préconisées dans cette pétition, «vieille», entre guillemets, de 2001 - mais surtout pour les commerçants. Connaissez-vous en effet les démarches administratives que doivent entreprendre les commerçants, livreurs et divers coursiers afin de pouvoir accéder à la Vieille-Ville en journée, pendant leurs heures de travail, et faire une simple livraison pour un commerçant dans le quartier ? Savez-vous ce qu'un citoyen doit faire comme démarches administratives pour venir prendre un meuble qu'il aurait acheté dans la Vieille-Ville, car il y a aussi des magasins de meubles et de hi-fi ? Connaissez-vous ces démarches administratives ?
Le message que nous aimerions délivrer au Conseil d'Etat par ce renvoi est de trouver aussi des solutions administratives un petit peu plus simples pour faciliter la vie des citoyens, mais également des entreprises qui ont bien besoin de travailler.
Une voix. Bravo !
Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à Mme Gautier, à qui il reste quarante secondes.
Mme Fabienne Gautier (L). Puisque j'ai été un peu interpellée, Monsieur le président, vous direz à Mme Bolay que tout le monde n'a pas la chance d'avoir un parking gratuit au centre-ville et que je me réjouis de la voir utiliser la mobilité douce en venant à pied depuis le Grand-Saconnex, voire en vélo électrique. (Exclamations. Commentaires.) Je la remercie d'avance.
M. Antoine Bertschy (UDC). Premièrement, je dirai que je laisserai la responsabilité de ses élucubrations à notre sympathique collègue Vert pour ce qu'il a dit précédemment, qui n'avait ni queue ni tête.
Une voix. Si ! (Commentaires.)
M. Antoine Bertschy. Evidemment, nous ne pouvons pas suivre ce genre de discours, qui sont bêtement et méchamment anti-automobilistes; ce sont tout de même plus de 220 000 personnes à Genève. (Brouhaha.)
Concernant cette pétition, cela a été un problème pour le groupe UDC parce que nous ne siégions pas dans ce Grand Conseil à l'époque où elle a été traitée. Donc nous avons dû faire de puissantes recherches pour nous prononcer sur cette pétition. Et au vu de nos recherches et de ce qui a été dit ce soir, nous nous positionnons en faveur d'un renvoi au Conseil d'Etat.
M. Roger Golay (MCG). Mesdames et Messieurs les députés, lorsque cette pétition a été traitée à la commission des pétitions, le groupe MCG n'était pas encore en place dans ce parlement. (Exclamations.) Toutefois, nous allons soutenir l'avis de la droite et renvoyer cette pétition au Conseil d'Etat pour justement démontrer que, au niveau des commerces, il y a maintenant quelque chose à faire. On le sait, cela a été dit, les loyers des commerçants sont très onéreux. Il faut aussi faciliter l'accès de leurs clients dans la Vieille-Ville. Je pense que cette pétition est, dans ce sens, quelque chose de positif.
M. Pierre-François Unger, conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, vous l'avez dit, cette décision date d'il y a dix ans, pratiquement, et correspondait au fond à un moment où l'organisation du trafic et du parking dans la Vieille-Ville - parce que c'est vraiment de l'hypercentre de la Vieille-Ville qu'il s'agit - n'était pas du tout celle qu'elle est maintenant. Au moment où cela a changé, entre la situation décrite par les pétitionnaires et la période actuelle, un certain nombre de choses se sont passées.
Pour commencer, il y a eu un plan de mobilité de grande importance au niveau de la Vieille-Ville. De grande importance, parce qu'il a eu des influences: vous avez cité certains effets bénéfiques et certains effets que vous trouvez, le cas échéant, maléfiques. Mais il faut rappeler comment cela se passe. Cela se passe d'abord par une consultation des milieux intéressés - elle a eu lieu - par une enquête publique - elle a eu lieu - par un arrêté de circulation - il a été produit - et par une possibilité de recours dans les trente jours, qui n'a pas eu lieu.
Partant de là, on veut bien tout recommencer. Mais, en réalité, la procédure, extrêmement complexe parce que les modifications étaient complexes, a été menée de A à Z. Et cela n'amène pas en soi à la paralysie. Ce qui amène à la paralysie, c'est la largeur de la rue de l'Hôtel-de-Ville, qui ne permet pas, quand une voiture est parquée, que cette dernière soit dépassée par une autre qui voudrait circuler. C'est la raison pour laquelle, très naturellement, des mesures ont été prises, qui permettent aux cycles et aux taxis d'y accéder, cela va de soi. Que celles et ceux qui rêvent de venir boire un petit verre sur la terrasse dont on connaît tous le nom, ou presque, prennent le taxi. Les taxis peuvent passer, de même que les véhicules qui portent un macaron pour handicapés et toutes les voitures de livraison entre 7h et 11h30. Bref, des tas de mesures ont été prises qui permettent de rendre cette rue accessible au moment où elle doit l'être pour des fonctions particulières.
Et non contents de cela, vous le savez, Mesdames et Messieurs, tous les habitants et commerçants de la Vieille-Ville qui ont un parking dans le périmètre au sens large peuvent demander un macaron, le macaron BB - je ne sais pas pourquoi exactement il est appelé ainsi - qui autorise, en tout temps, d'amener pour les décharger des biens ou des personnes à proximité du domicile avant de retourner au parking qui est le leur.
Alors Mesdames et Messieurs, je vous défie de trouver un moyen plus mesuré et plus subtil de sorte que l'on puisse encore, de temps en temps et à certaines heures, passer par la rue de l'Hôtel-de-Ville. C'est la raison pour laquelle, Mesdames et Messieurs, le Conseil d'Etat vous propose de suivre l'idée première, qui est le dépôt sur le bureau du Grand Conseil.
Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Nous allons procéder à deux votes. Le premier se fera sur la base de la conclusion de la commission, à savoir le dépôt sur le bureau du Grand Conseil. En cas de refus, nous voterons dans un deuxième temps le renvoi au Conseil d'Etat. Nous nous prononçons donc maintenant sur le dépôt sur le bureau du Grand Conseil.
Mises aux voix, les conclusions de la commission des pétitions (dépôt de la pétition 1349 sur le bureau du Grand Conseil à titre de renseignement) sont rejetées par 41 non contre 21 oui et 3 abstentions.
Mis aux voix, le renvoi de la pétition 1349 au Conseil d'Etat est adopté par 39 oui contre 23 non et 2 abstentions.