République et canton de Genève
Grand Conseil
Séance du jeudi 6 mai 2010 à 20h30
57e législature - 1re année - 7e session - 32e séance
PL 10519-A
Premier débat
M. Ivan Slatkine (L), rapporteur de majorité. Mesdames et Messieurs les députés, la commission des travaux s'est penchée sur ce projet de loi pour la réalisation d'un P+R à Sécheron, prévu voilà plus de dix ans comme mesure d'accompagnement à la construction du tram Nations. Lors de nos travaux, nous avons pu étudier de manière approfondie ce projet de loi et nous sommes rendu compte qu'il était nécessaire de lier le crédit pour la route de liaison à cette garantie de la part de l'Etat par rapport à la Fondation des parkings. En effet, on était en train de voter un projet de loi pour construire un P+R, mais il n'y avait pas de route qui permettait d'en ressortir. La commission s'est donc permis d'amender le projet, de manière peut-être - comment dirais-je ? - un peu surprenante. Mais enfin, il y avait un côté pragmatique, c'est-à-dire que, du moment qu'on acceptait de faire un P+R, il fallait bien admettre qu'il y ait une route permettant d'en sortir.
Maintenant, pour être relativement bref sur ce sujet, ce parking-relais, ainsi que je vous l'ai dit, était prévu depuis plus de dix ans comme mesure d'accompagnement du tram Nations et s'inscrit dans le développement de la poche de Sécheron. Sur ce parking est prévue la construction de logements pour étudiants, sujet qui anime actuellement de nombreux groupes politiques réclamant plus de logements pour les étudiants. Voilà l'occasion de réaliser cela.
Je crois que le rapport que je vous ai fait est absolument complet, donc, à ce stade, je n'ajouterai rien, Monsieur le président. Et je ne peux, Mesdames et Messieurs les députés, que vous inviter à voter ce projet de loi, qui a tout son sens pour réduire le trafic pendulaire dans notre ville et pour offrir des logements supplémentaires aux étudiants.
Et puis, j'allais l'oublier, et je le dis: ce projet est intimement lié au développement de l'OMC, lequel avait été soutenu tant par le parti socialiste que celui des Verts. Il est quelque peu étonnant de voir aujourd'hui que ces mêmes partis, qui prônent la Genève internationale, s'opposent dans les faits au développement de l'OMC. Car, sans le parking de Sécheron, il n'y aura pas de parking pour l'OMC et, donc, tout le débat que nous avons eu en novembre 2009 tomberait. Ainsi, l'OMC ne pourrait pas se développer et, pourquoi pas, pourrait en venir à quitter notre canton. Je vous remercie, Monsieur le président.
Mme Morgane Gauthier (Ve), rapporteuse de minorité. Mes premiers mots vont au rapporteur de majorité qui, effectivement, a retransmis fidèlement les travaux de la commission - nous l'en remercions. La première chose que j'aimerais relever dans ses propos - et qui ne figure pas dans son rapport - c'est que non seulement le projet n'a pas dix ans, mais il en a trente. Excusez-moi, mais c'était avant tous les projets de développement des transports publics dans cette zone-là ! Le projet de loi - paradoxe de plus - a été voté en pleine semaine du Sommet de Copenhague sur le changement climatique. Tous les partis introduisent un petit chapitre sur le développement durable dans leur programme - vous avez même des Verts libéraux, me semble-t-il, chez vous. Vous arguez de cela pendant les campagnes électorales, vous parlez du développement durable, du fait qu'il faut mener des actions pour protéger le climat, et dès qu'il s'agit de passer de la parole aux actes vous n'êtes plus avec nous, ce qui est fort dommage.
Le projet vise entre autres à transformer la cité des parcs en la cité des parkings: caser 2450 places environ dans une poche aussi restreinte que celle-ci nous semble complètement illusoire. Il est vrai que, quand on aime, on ne compte pas, et il nous semble que vous êtes vraiment des amoureux de la bagnole ! C'est beaucoup trop pour un seul périmètre, aussi riche de potentiel soit-il. Et, surtout, ces voitures sont censées pouvoir entrer et sortir. De plus, il est scandaleux d'imaginer que des entreprises ayant l'immense chance de pouvoir s'implanter dans ce secteur-là n'aient pas privilégié un transfert modal pour leurs employés et n'aient pas été persuadées d'aller avec plus de conviction dans ce sens. A ce propos, nous sommes très déçus de l'action du Conseil d'Etat. La construction de parkings devrait en outre s'accompagner, à l'intérieur des entreprises, de mesures incitatives sérieuses en faveur du report modal, et il est temps que le canton applique de façon rigoureuse une règle de proportion entre la qualité de la desserte par les transports en commun et le nombre de places de parking autorisées sur le lieu de travail.
Ensuite, il existe déjà un P+R sur ce lieu-là, qui compte 110 places, et seuls 79 abonnements ont été demandés... C'est donc bien la preuve qu'à cet endroit-là on n'a pas besoin de P+R.
La deuxième chose, c'est que les automobilistes qui sont arrivés jusque là, qui ont dû subir des bouchons depuis Nyon, voire Coppet... Pouvez-vous imaginer une seule seconde qu'ils déposeraient leur voiture juste là ? Ils sont tout près de leur lieu d'arrivée, on a donc un peu de peine à croire qu'après avoir passé entre une demi-heure et trois quarts d'heure dans les bouchons ils iraient gentiment déposer leur voiture et parcourir les derniers mètres qui leur restent en tram ou au moyen de la desserte de train.
La troisième chose, c'est qu'effectivement plusieurs députés de la commission ont trouvé que l'affectation du P+R était absurde et ont proposé de la transformer ou d'en changer l'affectation, en imaginant en faire un parking pour les habitants. Le problème, c'est qu'actuellement on ne peut pas le faire. Et cela ne relèverait pas du tout de la compétence du canton, mais plutôt de la Ville.
Dans son rapport, M. Slatkine a annexé un document sur la mobilité, effectué par l'Université. Il est vrai que les conclusions sont plutôt modérées, mais quelques éléments sont très inquiétants: il y a le taux de capture, qui est jugé faible; le potentiel du P+R, qui semble limité; la volonté de capter les flux plus en amont, ce qui est effectivement problématique parce qu'on ne trouve pas d'endroit pour installer ces P+R, et il y a enfin l'évaluation quantitative révélant que le potentiel d'attractivité est faible. Tous ces éléments nous font dire que ce P+R n'a vraiment pas sa place à cet endroit-là.
Ce projet a donc quasiment trente ans et était soutenu par l'Alliance de gauche - je vous le rappelle - dans sa première mouture; c'est celle qui a été reprise par le Conseil d'Etat. Alors, voir que ce projet est repris et soutenu par le groupe libéral dans son rapport de majorité nous fait quelque peu sourire, Monsieur Slatkine - désolée. (Remarque.) Tous ensemble, si vous voulez...
En conclusion, par un micmac législatif, on nous fait croire que c'est du pragmatisme, on verra dans les autres projets de lois...
Le président. Il vous faut conclure, Madame !
Mme Morgane Gauthier. J'espère, Monsieur le président, que ce n'est pas un précédent. En pleine semaine du Sommet de Copenhague sur le climat, voter, avec une telle majorité, un projet de loi allant à l'encontre de toutes les mesures en faveur de la réduction du CO2 et de la limitation du réchauffement climatique nous semble vraiment paradoxal ! Je vous remercie, Monsieur le président. (Applaudissements. )
M. Christo Ivanov (UDC). Le parking P+R de Sécheron fait partie du plan d'action 2007-2010 de la DGM. Ce park and ride de 2450 places sur la rive droite permettra de canaliser les automobilistes venant du canton de Vaud ou de France voisine, ce qui est à mon sens très positif. Le second mérite de ce projet de loi, c'est la construction, sur ce site, de 240 logements pour étudiants, qui font cruellement défaut dans notre canton. L'un n'ira pas sans l'autre ! Pour toutes ces raisons, le groupe UDC soutiendra et votera ce projet de loi.
M. Pierre Weiss (L). Mesdames et Messieurs les députés, j'ai lu avec attention ce projet de loi, qui est en fait un paquet ficelé. J'ai aussi entendu les propos de la rapporteure de minorité et j'y ai été très attentif, parce que ce park and ride ne prévoit effectivement pas de stalles pour chevaux, et on ne pourra pas s'y rendre à cheval. En revanche... (Commentaires. Brouhaha.) En revanche, Madame la députée rapporteure de minorité, je serais curieux de savoir comment vous allez vous rendre à Avenches - probablement en voiture privée. Et, du point de vue de Copenhague, tous ceux qui ont soutenu ou soutiendront la résolution de notre collègue UDC - et qui d'ailleurs se rangeront derrière votre propre interpellation urgente récente - se rappelleront que, pour aller admirer ces admirables chevaux nationaux, eh bien, il faut probablement aller, soit en avion à l'aéroport de Payerne, soit en voiture, ou bien, évidemment, aller directement à cheval, ce qui est... harassant ! Vous me passerez ce petit rappel. (Commentaires. Brouhaha.)
S'agissant du projet qui nous est soumis - qui se situe d'ailleurs près de la rue Kazem-Radjavi, c'est une petite ironie de l'histoire vis-à-vis d'une manifestation de ce soir - il serait paradoxal de la part du groupe socialiste, et c'est à lui que je m'adresse maintenant, qu'après avoir soutenu par certains de ses membres la mise des étudiants dans des containers, aussi spacieux et bien décorés soient-ils - parce qu'il s'agit effectivement de répondre à un besoin urgent des étudiants dans notre canton, de nos hautes écoles, qui ne disposent de logements que de façon insuffisante - il serait donc paradoxal que l'on préfère les containers et que l'on refuse les logements en dur ! Il y a là 240 logements, Mesdames et Messieurs les députés, 240 lits d'étudiants et d'étudiantes dans un immeuble de qualité !
Alors, de deux choses l'une: soit certains veulent entretenir la crise du logement pour les étudiants - parmi ceux qui se proclament leurs défenseurs, et notamment au parti socialiste - soit, au contraire, ce soir, ils prennent une décision courageuse au-delà des dogmes, ils prennent la décision de voir ce qu'il convient de pondérer. Il s'agit d'un parking - qui peut avoir ses qualités et ses défauts, mais qui est vieux de trente ans - et surtout d'une résidence qui, elle, est faite pour des moins de trente ans, pour des jeunes d'une vingtaine d'années, qui sont l'avenir de notre société.
Nous verrons ce soir qui est pour la formation supérieure, nous verrons ce soir qui est contre cette formation ! Nous verrons aussi comment le groupe socialiste soutient les efforts du conseiller d'Etat Beer qui, lui, est favorable, comme tout le Conseil d'Etat, à cette proposition, parce qu'il en va du logement étudiant ! Je vous remercie.
Des voix. Bravo !
M. Jean-Louis Fazio (S). Mesdames et Messieurs les députés, le groupe socialiste ne votera pas ce projet de loi. En effet, décidé en 91 - décidément, nous n'avons pas les mêmes dates, tous partis confondus - ce P+R de presque vingt ans - fruit de négociations entre l'Etat et plusieurs associations, et faisant partie des mesures d'accompagnement à la réalisation du tram 13 - ne correspond plus aux réalités d'aujourd'hui. Entre-temps, sur la même parcelle, on a autorisé la construction de plus de 2000 places de parking, uniquement pour les employés pendulaires de l'OMM, l'OMC, Merck Serono et JTI. Ces 2000 places de parc ne faisaient pas partie du paquet de négociations de 91, qui prévoyait 800 places en P+R et 500 places pour l'OMC.
Comme prévu, le tram 13 est arrivé et la halte ferroviaire a été créée. Le CEVA, qui n'était pas d'actualité à l'époque, desservira encore mieux ce quartier dans quatre ans, sans parler du prolongement du tram jusqu'au Grand-Saconnex et Ferney-Voltaire. Avec les années, depuis vingt ans, la ville s'est développée et densifiée à cet endroit, amenant de nouveaux habitants et son lot d'infrastructures: crèche, future faculté de l'Université, agrandissement du collège, EMS. Ce parking est une monstruosité en matière d'aménagement du territoire puisque, trop proche du centre-ville, les futurs utilisateurs devront passer plusieurs heures dans les bouchons avant d'y arriver, les accès étant saturés.
Toutes ces raisons rendent ce projet de réalisation de parking caduc. (Un instant s'écoule.) Donc... Mes conclusions... Excusez-moi ! Je me suis trompé dans mes... Voilà, excusez-moi ! (Commentaires. Brouhaha.) Pour conclure, Mesdames et Messieurs les députés... (Commentaires. Rire de l'orateur.) Après tous les investissements consentis pour le développement des transports publics à Genève, ce serait un non-sens économique et urbanistique de construire, en plein centre-ville, un parking pour pendulaires. Je vous invite donc à refuser les conclusions du rapport.
Et enfin, Monsieur le président, vous transmettrez à M. Weiss que pour construire un immeuble d'habitation - si l'on veut faire du logement étudiant - on n'a pas besoin de construire sur cinq niveaux de parking, mais on peut directement le faire sur de la terre. (Applaudissements.)
M. Roger Golay (MCG). Mesdames et Messieurs les députés, le peuple genevois s'est prononcé pour l'extension de l'OMC et la construction d'un parking. Aujourd'hui, nous avons un projet de loi pour un P+R se situant à côté de cette organisation, et - comme cela a été expliqué - il y a un lien, puisque l'un ne va pas sans l'autre par rapport à la route d'accès. D'autre part, nous sommes conscients que si cela ne devait pas se réaliser, ce serait simplement la Genève internationale qui en subirait les conséquences. En effet - et nous sommes très sensibles à cet aspect-là - on sait ce que rapporte la Genève internationale au niveau de notre économie. J'aime bien le rappeler: c'est 5 à 6 milliards de retombées économiques directes dans les caisses de notre république.
Cela veut donc dire que la Fondation des parkings va prendre en mains ce P+R de 430 places. Nous aurions souhaité un parking destiné aux habitants et au public plutôt qu'un P+R, car ce parking est à l'intérieur de la ville, il est mal situé. En revanche, représentera une facilité pour nos voisins vaudois, puisqu'ils n'ont pas, eux, lorsqu'ils empruntent la route de Suisse, de P+R. Et puis, ils sont relativement pauvres... (Commentaire.) Pauvres dans ce domaine.
Nous avons donc, en commission, déposé un amendement pour que ce soit un parking destiné aux habitants et au public; ça n'a pas passé. En revanche, nous avons obtenu un engagement de la Fondation des parkings pour que, si ce P+R ne remplissait pas sa fonction, son rôle, il pourrait y avoir, à ce moment-là, un changement d'affectation, c'est-à-dire qu'il pourrait devenir un parking pour les habitants du quartier, qui souffrent énormément du manque de places. Pour toutes ces raisons, nous soutiendrons ce projet de loi et vous invitons à en faire autant.
Mme Anne Mahrer (Ve). Mesdames et Messieurs les députés, comme l'a dit la rapporteure de majorité, un projet qui a trente ans est un projet d'un autre âge. (Remarque.) Oui, «rapporteure de minorité», excusez-moi. De plus, il est tellement compliqué à construire que sont coût sera exorbitant et qu'on aboutira à des places à 45 000 F. En effet, il va falloir une dalle tout à fait particulière et représentant un coût supplémentaire. Cela nous rappelle le feuilleton de Frontenex où, là aussi, il a été imaginé un P+R et un collège - paquet ficelé tout à fait inopportun. Nous pouvons tout à fait, comme l'a dit M. Fazio, construire des logements pour étudiants - nous le souhaitons et soutiendrons cela - mais ce parking, à cet endroit, représente un coût vraiment inutile, et je pense qu'il est préférable d'effectuer un tel investissement ailleurs. De plus, ce parking ne pourra accueillir - relativement - que très peu d'automobilistes, puisqu'une fois qu'ils seront là ils vont poursuivre et ne laisseront pas leur voiture comme ils le devraient.
Mesdames et Messieurs les députés, pour toutes ces raisons - et pour un paquet qui est, de nouveau, fort mal ficelé - nous vous demandons de refuser ce projet de loi. (Applaudissements.)
M. Michel Ducret (R). Mesdames et Messieurs les députés, effectivement, l'histoire pose parfois des coïncidences curieuses. C'est vrai qu'on a, en commission, décidé de ce parking, au moment d'une grande réunion sur le climat. Et, juste peu après, un certain volcan islandais a envoyé dans l'atmosphère des quantités de matière dont l'impact sur le climat, Mesdames et Messieurs, pourrait certainement être plus lourd sur le destin de la terre que tout ce que pourrait produire ce park and ride durant toute la durée de son existence. De plus, si les voitures deviennent de moins en moins polluantes et de plus en plus électriques, ce n'est vraiment pas là le problème. Ce ne sont que prétextes et ce n'est pas la problématique qui doit nous occuper ce soir.
Je ne m'étendrai pas non plus sur les aspects liés à l'OMC et à l'accueil des institutions internationales à Genève. Cela a déjà été évoqué, et je crois que, bien que ce soit très important dans cette affaire, ce n'est pas non plus essentiel.
N'est-ce pas, les choses importantes, dans tout ça, c'est que cette proposition répond finalement à une demande de notre Grand Conseil, formulée lors de la réalisation du tram. Et cette demande n'était pas le fait de la droite ou des amateurs de voitures, c'était la demande de tout le monde, c'était une des mesures qui devaient accompagner la réalisation du tram.
Mesdames et Messieurs, c'est tout simplement une question de crédibilité: il en va de la crédibilité de notre Grand Conseil, de la crédibilité de la politique que notre canton entend mener en matière de transports et d'accueil des gens venant de l'extérieur pour travailler à Genève. Si nous ne faisons pas ce park and ride, nous n'avons, Mesdames et Messieurs, aucune réponse alternative à proposer aux gens qui viennent de la Côte vaudoise ou du Pays de Gex, aucune réponse valable à leur opposer par rapport au fait qu'ils viennent en voiture jusqu'au centre de Genève. Il n'y a pas d'autre réponse prête ! On nous parle de projets: «Ah, il faudrait faire quelque chose aux Tuileries !» «Ah, il faudrait quelque chose au Vengeron !» «Il faudrait augmenter le park and ride à Coppet !» Bien sûr ! Bien sûr, Mesdames et Messieurs, c'est ce qu'il faut faire ! C'est ce qu'il faut faire, mais rien n'est prêt ! Rien n'existe, rien n'est fait à ce jour ! Il n'y a aucune crédibilité par rapport à l'accueil de tous ces gens venant par dizaines de milliers tous les jours sur cet axe-là. Et c'est tout petit, ce qu'on vous propose ici, c'est un tout petit parking ! Je le trouve, personnellement, insuffisant, mais il est en proportion de son accessibilité, paraît-il... Alors très bien !
Mesdames Messieurs, soyons simples ! Faisons au moins ce que nous pouvons réaliser immédiatement, et c'est ça qu'on vous propose ce soir ! Ce n'est pas parfait, je vous l'accorde volontiers, mais ça a au moins le mérite d'exister. Et arrêtons de chipoter et d'ergoter pour savoir ce qu'il est mieux d'effectuer quand on sait très bien qu'on ne le fera pas avant des années ! Ceci existe, faisons-le, et rapidement !
Une voix. Bravo ! (Applaudissements.)
M. Hugo Zbinden (Ve). Mesdames et Messieurs les députés, un P+R vise deux objectifs: on devrait réduire le nombre de kilomètres parcourus par voiture et on aimerait aussi réduire le trafic en centre-ville. Ce P+R ne va jamais atteindre aucun des deux objectifs, comme d'ailleurs la majorité des P+R à Genève. Il ne va pas réduire le nombre de kilomètres parcourus parce que... Disons, moi je dirai même que le terme «P+R» est mensonger, on devrait plutôt appeler ça un «Drive and Park»; parce qu'il ne faut pas oublier que le gars venant de Tolochenaz va faire cinquante kilomètres en voiture avant de se garer à Sécheron. Après, il va peut-être faire un ou deux kilomètres en tram. Pour ces un ou deux kilomètres parcourus en tram, on va le subventionner à raison de 200 balles par mois, c'est cher payé le gramme de CO2 économisé !
Ce P+R ne va pas diminuer le trafic en ville parce que, pour ce faire, il faut réduire le nombre de parkings en ville. Ce P+R ne fait rien d'autre que d'augmenter la capacité de parking aux abords de la ville - et, dans cas-là, même à l'intérieur de la ville.
Nous, les Verts, ne pourrons jamais voter un P+R si le nombre de places qui y sont créées n'est pas compensé par une suppression de places au centre-ville. C'est seulement comme ça qu'on peut réduire le nombre de voitures en ville. C'est pour ces raisons que l'on refuse ce projet de loi. (Applaudissements.)
Le président. Merci, Monsieur le député, la parole est à M. Béné, à qui il reste une minute dix.
M. Jacques Béné (L). Ouh ! Alors il faut que je me dépêche, Monsieur le président. J'ai l'impression qu'on assiste plutôt à un débat politique d'il y a vingt ans. Comme le disait Mme Mahrer, c'est projet qui a vingt ou trente ans. Pour avoir siégé il y a une dizaine d'années avec Mme Gauthier, j'ai effectivement l'impression de me retrouver à cette époque-là, sauf que nous, on a évolué, parce que nous, aujourd'hui, on est totalement en faveur des transports publics. On ne vous dit pas, comme vient de le faire M. Zbinden: «Nous, on arrête maintenant avec les transports publics, vos crédits, c'est terminé tant qu'il n'y a pas la traversée de la rade !» On pourrait aussi faire cela de cette manière-là. Eh bien non, on évolue, on est pour les transports publics.
On a ici un projet de loi prévoyant un P+R dont l'évaluation a été effectuée, et il est dit clairement qu'elle est globalement positive. Vous ne pouvez rien faire d'autre à cet endroit-là ! On crée des logements, ce que vous voulez aussi; on a voté, ou on va voter, une motion posant la question «Où sont les grues à Genève ?» Eh bien, dans ce cas-ci, elles peuvent être très rapidement sur ce terrain-là ! On aura des logements étudiants - il y a un énorme besoin de tels logements - et puis on aura un P+R dans les étages inférieurs où l'on ne peut rien faire d'autre. Je ne vois donc pas en quoi vous pouvez refuser cela, si ce n'est pour des raisons politiques ! En effet, vis-à-vis de vos électeurs, vous êtes obligés de prendre ces positions-là, et moi je trouve cela regrettable.
De toute façon, on doit voter ce projet de loi, parce que l'OMC est également concernée. Il va passer ce soir, et je trouve dommage que l'on s'arrête à des doctrines politiques - auxquelles, nous, nous avons renoncé ! (Commentaires.)
M. Eric Stauffer (MCG). Mesdames et Messieurs les députés, halte aux intégristes anti-voitures ! (Exclamations.) Un mot simple, un slogan clair pour tout le monde ! (Commentaires. Brouhaha.) On ne peut pas imaginer une seule seconde qu'il y a quelques minutes - enfin, quelques heures - vous vous êtes opposés au trafic polluant les petits villages dans les communes suburbaines du canton de Genève et que, aujourd'hui, vous venez nous dire: «C'est inacceptable pour nous de construire un P+R si l'on ne supprime pas des places de parc à Genève.» Mais vous voulez quoi ? La mort des véhicules à Genève ?!
Des voix. Oui ! (Brouhaha.)
M. Eric Stauffer. «Oui !» Eh bien voilà ! (Exclamations. Commentaires.) Eh bien, dites-le ! C'est tellement plus simple ! (Brouhaha. Exclamations.) Mais alors, ça veut dire par ailleurs que vous ne respectez pas la volonté populaire qui a estimé que le transport en commun et le transport individuel devaient être complémentaires ! Vous vous moquez donc de vos électeurs aussi ! (Commentaires.) Puisque vous ne voulez pas freiner l'afflux... (Commentaires. Rires.) ...puisque vous ne voulez pas freiner l'afflux de ces 200 000 mouvements de véhicules par jour autour de Genève. Mais vous, c'est uniquement concernant les Genevois, vous êtes là pour taper sur la tête des Genevois: taxer les automobiles, supprimer les places de parc ! Et, en plus, vous faites ça avec le sourire ! Voyez, c'est fabuleux ! (Rires.) J'adore... Chers collègues, en fait, j'adore Léman Bleu, qui rediffuse ces images, il faut que la population sache que vous n'êtes pas cohérents dans votre ligne politique... (Commentaires.) ...et qu'en fait la seule chose qui vous intéresse, c'est de taper et de taxer les Genevois - c'est fabuleux !
Alors nous, pour respecter la volonté populaire, Monsieur le conseiller d'Etat, nous soutiendrons ce projet de loi. Puisqu'il y a eu un vote populaire sur l'OMC, qui comprenait ce paquet ficelé ! Certes, il n'est pas parfait, mais enfin, la perfection, dans la République et canton de Genève, je ne l'ai pas encore trouvée - or je cherche désespérément. (Commentaires. Brouhaha.) Nous allons donc soutenir ce projet de loi, tout en émettant, en ce qui concerne le MCG, un avertissement...
Le président. Il vous faut conclure, Monsieur le député !
M. Eric Stauffer. Je vais conclure. Les parkings P+R, dorénavant et à partir d'aujourd'hui, après ce projet de loi, sont à construire par nos amis français, en France ! (Commentaires.)
Le président. Merci, Monsieur le député, la parole est à M. Slatkine, à qui il reste... (Remarque.) Non, c'est terminé, il n'y a plus de temps de parole pour les libéraux. C'est au tour de M. Deneys de s'exprimer... (Remarque.) ...et il lui reste une minute quarante.
M. Roger Deneys (S). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, quand j'entends mon collègue Michel Ducret parler de crédibilité s'agissant d'accepter ce projet de loi, j'ai envie de lui dire que c'est la crédibilité de l'autruche que d'accepter un projet de loi pareil ! En effet, le besoin de P+R dans le canton de Genève est avéré; en même temps, peut-on dire que ce qu'on a envisagé il y a trente ans dans le quartier de Sécheron - qui est un quartier d'habitation - est pertinent aujourd'hui, alors que ça fait partie de la ville et qu'on est bien loin de la sortie de l'autoroute, bien loin de la périphérie du côté du Grand-Saconnex ? Je suis désolé, il n'y a aucune crédibilité à réaliser un P+R à cet endroit !
De plus, Mesdames et Messieurs les députés, le peuple vient d'accepter le CEVA: on est en train de développer l'infrastructure de transports publics rapides, et l'on fait un P+R en pleine ville ! C'est totalement aberrant en 2010 ! (Commentaires.) Rien que pour cette raison, Mesdames et Messieurs les députés, ce projet, qui date, doit être refusé, parce qu'il doit être adapté ! Si des P+R doivent être construits, c'est bien à l'extérieur de l'agglomération, et pas en ville !
J'aimerais aussi dire ceci à M. Béné, qui parle de la cohérence des discours politiques: Monsieur Béné, il y a un projet de loi de la droite, qui conditionne la réalisation du tram sur le Grand-Saconnex à la réalisation préalable d'une route. Alors si vous êtes cohérents, vous retirez ce projet de loi, nous réalisons le tram, et il n'y a pas besoin de P+R à cet endroit !
Le président. Merci, Monsieur le député. Le temps de parole pour les socialistes étant épuisé, Mme Schneider Hausser ne pourra pas prendre la parole. Je la passe donc à M. Broggini... (Remarque.) ...à qui il reste une minute vingt.
M. Roberto Broggini (Ve). Je vous remercie, Monsieur le président. Je vous rappellerai, Mesdames et Messieurs, que la constitution genevoise stipule bien, en son article 160E, que le canton doit encourager les modes de déplacement doux... (Commentaires.) ...c'est-à-dire la bicyclette, la marche à pied et les autres moyens de transport en commun. Et ça, vous l'oubliez systématiquement, parce que vous parlez toujours des articles 160A et 160B ! (Brouhaha.) Mais il faut savoir lire un peu plus loin ! Il faut savoir lire l'article 160E. (Brouhaha.)
Je vous rappellerai qu'en ville de Genève 36% des habitants n'ont pas de véhicule - il faut le savoir ! Nous allons donc faire subir à une majorité ou à une grande partie des habitants de la ville, qui ont renoncé à l'automobile, le trafic des pendulaires venant soit du canton de Vaud, soit du Pays de Gex jusqu'au centre-ville. (Commentaires.) Nous avons l'opportunité, aux Tuileries - à la sortie de l'autoroute, où il y a une halte RER - de construire là un véritable parking d'échange ! Qui sera à l'extérieur de la ville, à côté d'une gare et à côté de la bretelle d'autoroute.
Vous parlez des organisations internationales, de l'OMC notamment...
Le président. Il vous faut conclure, Monsieur Broggini !
M. Roberto Broggini. Mais depuis, il y a eu les normes MOSS, imposées par l'ONU... (Remarque.) ...qui ne veut plus de parkings souterrains sous les organisations internationales...
Le président. Très bien !
M. Roberto Broggini. ...car c'est un vecteur de danger...
Le président. Il vous faut conclure ! (Brouhaha.)
M. Roberto Broggini. ...relativement aux attentats ! Je vous remercie, Monsieur le président. (Exclamations. Applaudissements. Chahut.) Les organisations internationales ne veulent plus de parkings souterrains !
Le président. La parole... (Exclamations. Applaudissements. Rires.) La parole est à M. Slatkine, à qui, comme rapporteur, il reste une minute vingt.
M. Ivan Slatkine (L), rapporteur de majorité. Merci, Monsieur le président. Il est dommage qu'une fois de plus, quand on veut parler du développement de Genève, on se retrouve dans des combats de ce type. Je tiens d'abord à préciser qu'il y a une grande confusion chez les socialistes et chez les Verts entre parkings habitants et P+R. Les P+R ne sont pas destinés à ceux qui travaillent dans la poche de Sécheron ni à ceux qui vivent en ville de Genève, non, les P+R sont destinés à ceux qui viennent travailler en ville de Genève ! Et parce qu'on ne veut plus les voir comme pendulaires sur le pont du Mont-Blanc, à la gare, sur le pont de la Coulouvrenière, nous, on préfère qu'ils viennent se garer à Sécheron, pour prendre ensuite le tram qui a été construit il y a dix ans et que ce parking devait accompagner, cela pour qu'ensuite on puisse libérer les avenues de notre ville, afin qu'on y vive bien, dans un air pur !
Le but du P+R Sécheron, c'est bien de stopper les pendulaires là où on peut le faire. Notre territoire est limité, et je suis - Monsieur Broggini, vous me permettrez, mais moi je vais tous les jours dans l'autre sens - donc je suis persuadé que si ceux qui viennent du canton de Vaud avaient des places de parking à Sécheron, en tout cas 330 d'entre eux s'y arrêteraient !
Je pense qu'on joue ce soir un jeu dangereux et je dois dire que je suis très étonné par la position des membres l'Alternative. En effet - je l'ai dit en introduction - lors des votations de novembre sur l'OMC, nous n'avons à aucun moment entendu ces derniers nous dire qu'il était exclu de construire des parkings dans la poche de Sécheron ! Vous étiez tous pour le développement de l'OMC ! Et vous savez pertinemment que si la majorité de ce Grand Conseil venait à refuser le P+R de Sécheron ce soir, c'est tout le développement de l'OMC qui serait remis en question ! Et cette organisation viendrait peut-être à quitter Genève. Je comprends bien que, finalement, parce que vous êtes complètement dogmatiques - vous n'arrivez pas à être pragmatiques...
Le président. Il vous faut conclure, Monsieur le rapporteur.
M. Ivan Slatkine. Je vais terminer, Monsieur le président, vous permettez ? ...en fait, vous, votre dogme ne vous pousse pas à développer Genève, mais à tuer Genève ! Et je conclurai en disant qu'il y a, grâce à ce parking, la possibilité de construire aussi des logements étudiants. Vous êtes tous en train de nous dire qu'il faut du logement pour étudiants, mais quand il s'agit...
Le président. Il vous faut conclure !
M. Ivan Slatkine. ...d'être concret et de poser les grues que vous réclamez, vous les refusez !
Le président. Très bien...
M. Ivan Slatkine. Mesdames et Messieurs, il faut soutenir ce projet de loi. Je vous en remercie. (Applaudissements.)
Le président. Je suis désolé pour Mme le rapporteur de minorité, qui a déjà épuisé son temps de parole. Nous allons maintenant écouter M. le conseiller d'Etat Muller.
M. Mark Muller, conseiller d'Etat. Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, nous sommes ici en train de concrétiser un engagement pris par le Conseil d'Etat il y a près de vingt ans. Comme l'a justement dit M. Ducret tout à l'heure, il en va de la crédibilité de l'Etat quant au respect de ses engagements, et c'est ce que nous faisons aujourd'hui. Certes, cela a pris du temps, je le regrette beaucoup. D'ailleurs, un grand nombre de projets prennent trop de temps, on les dénomme «serpents de mer», mais ils vont de l'avant et se réalisent.
Le deuxième élément - cela a été dit, je serai donc bref - c'est que ce projet fait partie d'un ensemble de plans divers. Alors, on peut parler de paquet ficelé, peut-être mal ficelé, mais bon, la question n'est pas de savoir s'il est bien ou mal ficelé... (Commentaires.) ...la question, c'est qu'il s'agit d'un paquet ficelé. Et c'est vrai ! C'est un élément parmi un certain nombre de projets qui vont se réaliser en cascade - je trouve plus élégant de parler de projets en cascade que de paquet ficelé: c'est le parking de l'OMC; c'est le maintien de cette organisation à Genève; et c'est également la réalisation du projet extraordinaire de Campus de la paix à l'IHEID, dont font partie ces 200 logements pour étudiants.
Ce qui vous est demandé ce soir, c'est tout d'abord de respecter un engagement pris par l'Etat il y a vingt ans et, deuxièmement, d'autoriser la réalisation de l'ensemble de ces projets, importants pour le développement de Genève. Je vous remercie.
Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. (Remarque.) Oui ?
Une voix. Je demande le vote nominal. (Appuyé.)
Le président. Très bien, cette proposition est acceptée. La parole n'étant plus demandée, nous allons nous prononcer sur la prise en considération de ce projet de loi.
Mis aux voix à l'appel nominal, le projet de loi 10519 (nouvel intitulé) est adopté en premier débat par 61 oui contre 28 non et 4 abstentions.
La loi 10519 est adoptée article par article en deuxième débat et en troisième débat.
Mise aux voix, la loi 10519 (nouvel intitulé) est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 62 oui contre 27 non et 4 abstentions.
Le président. Nous passons à l'urgence suivante, point 156 de notre ordre du jour.