République et canton de Genève
Grand Conseil
Séance du vendredi 15 mai 2009 à 15h
56e législature - 4e année - 8e session - 42e séance
PL 10420-A et objet(s) lié(s)
Premier débat
M. Eric Stauffer (MCG). Mesdames et Messieurs les députés, le groupe MCG va demander le renvoi de ce projet de loi en commission, parce que nous avons reçu quelques informations qui méritent à tout le moins d'y être étudiées. En effet, si vous n'acceptez pas le renvoi en commission, nous allons octroyer un crédit de 49 millions à 32 établissements médico-sociaux, or voici l'information que j'ai reçue et que je vous livre à l'instant: certains EMS se sont vu augmenter leurs prestations, c'est-à-dire les indemnités qu'ils touchent de l'Etat. Par exemple, les indemnités du domaine de la Louvière sont passées de 224 à 230 F par pensionnaire et par jour, celles des Lauriers de 229 à 234 F, celles du Léman de 228 à 233 F, celles de la Châtelaine de 261 à 265 F, et la liste n'est de loin pas exhaustive. En outre, ces établissements n'avaient pas demandé à toucher plus, ce qui fait qu'ils ont maintenant un excédent de budget. C'est à se demander comment le Conseil d'Etat gère ses deniers ! Mesdames et Messieurs les députés, il nous faut donc encore travailler ce projet de loi en commission.
Par ailleurs, un autre problème apparaît, c'est que, dans le pipeline, il y a quelques millions qui vont être octroyés pour la construction d'EMS. Je vais essayer de vous synthétiser cette information de manière claire. Si des promoteurs veulent construire un EMS et que cet établissement coûte par exemple 20 millions, eh bien ils peuvent aller demander à l'Etat 10 millions sous forme de dons, soit 50% de la valeur de la construction de l'EMS. Pour les 10 millions restants, ils vont se faire financer dans n'importe quelle banque qui, évidemment, va accepter de le faire, puisqu'ils ont octroyé un apport de 10 millions sous forme de dons de l'Etat. Ensuite, ils vont facturer le loyer aux EMS, mais cette fois en amortissement sur 20 millions de francs, c'est-à-dire que ces petits malins - et vous comprendrez pourquoi il y a eu autant d'EMS construits ces quinze dernières années - gagnent dans les amortissements plus d'un demi-million de francs sans rien faire, juste en louant les structures pour l'exploitation d'un EMS, et cela avec les deniers publics. Nous avons dénoncé cet état de fait, car c'est une véritable escroquerie, qui a été cautionnée par le département des travaux publics, puisque c'est lui qui délivre les autorisations de construire.
Mesdames et Messieurs les députés, il nous faut donc renvoyer ce projet de loi en commission et étudier ce phénomène parce que, entre ce projet de loi et le suivant, ce ne sont pas moins de 80 millions que l'Etat va octroyer à ces établissements médico-sociaux, or nous ne sommes pas là pour enrichir les golden boys de l'immobilier qui ont construit des EMS ou pour octroyer des subventions que les EMS eux-mêmes n'ont pas demandées. Je pourrais vous donner toute la liste de ces EMS, je l'ai ici, ce n'est absolument pas acceptable, et je demande donc le renvoi de ce projet de loi à la commission des finances.
Le président. Merci, Monsieur le député. Est-ce que vous demandez le renvoi en commission des deux projets de lois ?
M. Eric Stauffer. Absolument !
Le président. Très bien, nous mettrons aux voix cette proposition. Peuvent prendre la parole concernant ces renvois en commission des finances le rapporteur et le conseiller d'Etat. Monsieur Mettan, vous avez la parole.
M. Guy Mettan (PDC), rapporteur. Merci, Monsieur le président. Je laisserai à M. Stauffer la responsabilité de ses propos en ce qui concerne ces accusations contre le DCTI. Pour ma part, je voudrais juste rappeler ce qu'a fait la commission des finances. Vous avez vu d'après l'épaisseur des rapports que celle-ci a bien travaillé, et j'aimerais d'ailleurs ici remercier l'ensemble des commissaires aux finances pour le travail qu'ils ont effectué. Je rappelle - et c'est présent dans le rapport - que la majorité des EMS de ce canton ont pu être auditionnés. La tension qui a régné entre les EMS et le département n'avait rien à voir avec les propos de M. Stauffer, elle était simplement due au fait qu'il y a eu un malentendu entre la FEGEMS et les EMS d'une part, et le département d'autre part. En effet, les EMS croyaient qu'ils pourraient être mis au bénéfice d'une décision du département et qu'ils n'auraient pas besoin d'avoir un contrat de prestations tout de suite. Or la commission des finances a légitimement pensé qu'il était nécessaire que les EMS aient un contrat de prestations pour ne pas créer d'inégalité de traitement avec toutes les autres associations soumises à la LIAF. Cela a été fait, il y a simplement eu du retard, et il a fallu se décider pour les EMS de façon rapide. Comme les malentendus ont pu être pour la plupart levés, la commission des finances a décidé d'auditionner largement les responsables des EMS pour qu'ils puissent s'exprimer et que l'on prenne aussi en considération leur point de vue. Cela a été fait, et ces éléments figurent dans le rapport. Il y a en outre des annexes qui précisent les choses quant aux montants des pensions et au rôle de l'Etat, soit la part de l'Etat qui est versée aux EMS par rapport aux autres ressources des EMS; je crois que c'est très complet.
Le problème que soulève M. Stauffer n'a rien à voir avec le projet de loi qui nous est soumis, c'est tout à fait différent; c'est un problème qui relèverait à la limite davantage - mais je n'entre pas même en matière avec son point de vue - de la commission des travaux et des investissements qui sont votés par cette dernière pour la construction des EMS, or cela n'a rien à voir avec le contrat de prestations qui nous est soumis. Pour toutes ces raisons, je vous propose, Mesdames et Messieurs les députés, de rejeter cette demande de renvoi en commission et de voter ces projets de lois.
M. Laurent Moutinot, conseiller d'Etat. Le travail accompli par le Conseil d'Etat concernant les règles de gestion des EMS et le niveau que l'on est en droit d'attendre ne méritent pas de votre part, Monsieur Stauffer, le terme d'escroquerie, ni à l'égard de M. Mark Muller, ni à l'égard de M. François Longchamp. C'est précisément d'ailleurs la nouvelle loi qui doit régler la manière dont doivent être pris en compte le terrain, le loyer et la construction, parce qu'il n'est pas faux qu'il y a eu là quelquefois dans le passé des problèmes, que nous avons identifiés et que nous entendons réguler.
En ce qui concerne le projet de loi qui vous est soumis, il ne touche pas à cette problématique-là; il s'agit effectivement des contrats de prestations qui, eux aussi, apportent une rigueur de gestion et une clarification des flux financiers absolument indispensables, et je vous invite par conséquent à refuser cette demande de renvoi en commission.
Mis aux voix, le renvoi du rapport sur les projets de lois 10420 et 10452 à la commission des finances est rejeté par 45 non contre 9 oui.
Le président. Monsieur Weiss, vous souhaitez vous exprimer ? (Commentaires.) Monsieur Stauffer, vous ne pouvez plus prendre la parole ! Nous sommes dans la séance des extraits, et c'est une intervention par personne, de sept minutes maximum.
M. Pierre Weiss (L). Je souhaite remercier M. Mettan pour la qualité de son rapport, mais aussi pour la précision de son intervention. Je voulais aussi dire que, à la suite de l'intervention de M. le conseiller d'Etat, si escroquerie il y a, il s'agirait d'escroquerie intellectuelle seulement, mais «escroquerie intellectuelle», dans le cas qui nous occupe, c'est déjà un oxymore.
Le président. Merci, Monsieur le député. Il y a une nouvelle demande de renvoi en commission, nous allons donc l'écouter.
M. Eric Stauffer (MCG). Je vais être bref: je demande le renvoi de ce rapport à la commission des affaires sociales et je réponds à M. le conseiller d'Etat, je parle bien d'escroquerie... (Protestations.)
Le président. Ce n'est pas le sujet !
M. Eric Stauffer. ...les gens se sont enrichis sur le dos de l'Etat...
Le président. C'est inadmissible...
M. Eric Stauffer. ...et je vous défie, Monsieur le conseiller d'Etat, de me prouver le contraire !
Le président. Je vous coupe la parole, c'est inadmissible ! Nous allons donc voter sur cette nouvelle demande de renvoi en commission.
Mis aux voix, le renvoi du rapport sur les projets de lois 10420 et 10452 à la commission des affaires sociales est rejeté par 48 non contre 7 oui.
Le président. Votre attitude est inadmissible, Monsieur Stauffer, vous n'avez aucun respect pour les institutions. Je suis très heureux de voir qu'il y a peut-être 30 000 personnes qui vous regardent et qui finissent par comprendre qui vous êtes vraiment. (Applaudissements.)
Mis aux voix, le projet de loi 10420 est adopté en premier débat par 48 oui contre 7 non.
La loi 10420 est adoptée article par article en deuxième débat et en troisième débat.
Mise aux voix, la loi 10420 est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 50 oui contre 7 non.
Mis aux voix, le projet de loi 10452 est adopté en premier débat par 54 oui contre 3 non.
La loi 10452 est adoptée article par article en deuxième débat et en troisième débat.
Mise aux voix, la loi 10452 est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 50 oui contre 7 non.