République et canton de Genève
Grand Conseil
Séance du vendredi 20 février 2009 à 20h30
56e législature - 4e année - 5e session - 26e séance
R 577
Débat
M. Gabriel Barrillier (R). Chers collègues, j'ai vraiment l'impression que cette résolution sur la situation économique du canton que nous traitons en urgence arrive à un moment de notre session qui n'est pas très propice à un tel débat. Je le regrette ! Ainsi va l'ordre du jour... Nous venons de passer quelque vingt minutes sur la traversée du lac en bac... Nous avons passé beaucoup de temps sur les problèmes de sécurité, d'organisation des forces de l'ordre... Tout ceci est certes très important, mais, au regard de la situation économique actuelle dans le monde, en Europe et en Suisse, j'eus au moins souhaité que nous puissions débattre de façon plus sereine et que nous disposions de plus de temps. Je le répète, Monsieur le président, je regrette vraiment cette situation, mais ce sont les aléas de l'ordre du jour.
Je rappellerai - très brièvement, pour que l'on puisse prendre une décision ce soir, même si elle ne va pas sauver la république... - que la situation économique n'est pas bonne: elle empire de jour en jour ! Je ne voudrais pas tomber dans le fatalisme, le pessimisme, l'activisme ou la méthode Coué, mais enfin, vous savez tous - vous lisez les journaux - que Genève est une place financière importante, et nous espérons qu'elle sera préservée. En ce qui me concerne, j'ai une bonne connaissance d'un secteur économique qui oeuvre pour l'économie intérieure et je puis vous dire que la situation se dégrade rapidement, de jour en jour.
Les cantons ont peu de compétences en ce qui concerne la politique économique, les mesures de soutien et de relance - il ne faut pas se le cacher ! - mais la plupart des cantons suisses et des cantons romands en particulier ont d'ores et déjà débattu de cette problématique. J'en veux pour preuve le Valais, Fribourg, Neuchâtel et, également, la Suisse alémanique. Quelles mesures pouvons-nous prendre pour soutenir l'emploi, pour éviter le pire ? Dans le domaine de la fiscalité, nous sommes bien avancés - à cet égard, il serait souhaitable que la commission fiscale termine rapidement ses travaux, mais c'est une chose acquise - avec le soutien pour une baisse de la pression fiscale sur les classes moyennes.
Par ailleurs, le Grand Conseil a voté un budget de 620 millions pour les investissements. Avec l'effort consenti par la Ville de Genève et des communes, on doit arriver aux alentours d'un milliard. Il ne faut pas se contenter d'avoir voté ces investissements: il faut que les travaux se concrétisent, et nous savons trop quels obstacles se dressent lorsqu'il s'agit de réaliser des projets.
Et puis, il y a également les questions liées aux procédures. Nous avons voté depuis plusieurs années des déclassements importants...
Le président. Monsieur le député, vous avez dépassé votre temps de parole de trois minutes. Vous pourrez reprendre la parole plus tard, si vous le souhaitez.
M. Gabriel Barrillier. Je reprendrai la parole plus tard, parce que j'ai encore quelques idées à développer.
Le président. En tant qu'auteur, vous en avez le droit.
M. Gabriel Barrillier. J'aimerais juste préciser encore que je souhaite que cette résolution soit renvoyée directement au Conseil d'Etat, afin qu'il puisse prendre les décisions nécessaires.
Le président. C'est ce qui se passe si la résolution est acceptée, Monsieur le député ! La parole est à M. Charbonnier - qui dispose de trois minutes.
M. Alain Charbonnier (S). Je tiens - très rapidement, malheureusement - à aller dans le sens de M. Barrillier, mais pas tout à fait pour la même raison. Ce que je déplore, c'est la brièveté de ce débat... Je trouve scandaleux que chaque groupe n'ait droit qu'à trois minutes pour s'exprimer, alors que nous venons de passer plus de huit heures pour traiter le point concernant la sécurité ! C'est certes important, mais je trouve que le temps imparti est tout à fait disproportionné par rapport à d'autres débats, et, je le répète, je trouve cela scandaleux !
Le président. Cela a été accepté par les chefs de groupe, Monsieur Charbonnier !
M. Alain Charbonnier. Monsieur le président, laissez-moi parler ! Je n'ai que trois minutes; si vous me coupez la parole, cela va encore réduire le temps qui m'est imparti !
De prime abord, nous accueillons - je parle au nom du parti socialiste - cette motion positivement, car nous sommes l'un des premiers partis à avoir demandé un débat sur cette question au niveau national - débat qui, d'ailleurs, nous a été refusé par les partis de droite... La Confédération n'a injecté qu'un malheureux milliard et demi en guise de plan de relance, alors que le parti socialiste suisse et les Verts demandaient plus de 6 milliards - ce qui était la moindre des choses, en tout cas par rapport à ce que les pays voisins ont fait dans ce domaine - pour espérer une véritable relance et éviter un effondrement total de notre économie.
Cette résolution du parti radical tombe un peu bizarrement. En effet, j'ai appris que la commission de l'économie - je n'en fais pas partie - étudiait en ce moment les effets de la crise... Je trouve donc quelque peu étonnant que ce parti s'empare tout à coup de ce sujet. Je sais bien que nous sommes en année électorale, mais il est tout de même dommage que, au lieu d'attendre la fin des travaux de la commission de l'économie, le parti radical dépose tout seul une résolution ! Quant au parti démocrate-chrétien, il reprend une partie de cette résolution pour en faire une motion... Enfin, je le répète, je trouve dommage que les choses se passent ainsi !
Il aurait fallu que tous les partis de ce parlement s'entendent et procèdent dans un même élan. Il me semble que nous désirons tous entreprendre ce qui est possible pour éviter que notre économie ne plonge et, surtout, pour soutenir les personnes et les familles qui risquent de se trouver précarisées par les effets de la crise. Il faut en effet tout faire pour que les gens ne perdent pas leur emploi et que ceux qui l'ont perdu puissent en retrouver. Enfin, il y a de nombreuses mesures à prendre, et pas seulement celles qui sont préconisées dans cette résolution !
Pour notre part, nous demandons le renvoi de cet objet à la commission de l'économie, car il n'y a pas urgence ! Il n'y a quand même pas le feu, et on n'en est pas à une semaine près ! (L'orateur est interpellé par M. Gabriel Barrillier.) Non, Monsieur Barrillier ! Il n'y a pas le feu, et on n'en est pas à une semaine près ! Les choses ont commencé il y a déjà plus d'un mois et demi. Il serait d'ailleurs intéressant, malgré la réponse à l'interpellation de notre collègue Anne Emery-Torracinta, de l'étudier à la commission de l'économie en même temps que la résolution.
Et puis, au cas où cette résolution ne serait pas renvoyée à la commission de l'économie, nous avons déposé un amendement demandant l'abrogation de certaines invites, entre autres celle qui propose d'anticiper les mesures d'allégement de la fiscalité des particuliers et des entreprises... En effet, on ne voit pas comment il est possible d'anticiper les votes de ce parlement !
Ensuite, il est préconisé «un soutien à la consommation par une politique adaptée et concertée d'ouverture des magasins»... Que se cache-t-il derrière cette mesure ? Nous voulons des explications à ce sujet !
Par ailleurs, vous parlez «d'accélération - éventuellement par dérogations réglementaires - des procédures d'autorisations de construire...». Que signifie «éventuellement par dérogations réglementaires» ? Par quelles dérogations, par quels artifices législatifs pensez-vous y arriver ?
Enfin, vous proposez de nouvelles invites, dont celle-ci: «à concentrer l'ensemble des ressources des administrations publiques...» Il s'agit de votre invite, mais nous, nous ajoutons à la fin: «et des transports publics».
Nous proposons d'autres invites: «à renforcer en moyens financiers et en ressources humaines l'office cantonal de l'emploi et le département des constructions et des technologies de l'information, afin que ce dernier puisse réaliser les projets d'investissement votés par le parlement.» En effet, on l'a vu à la commission de contrôle de gestion, les membres du contrôle interne et du département sont venus se plaindre qu'ils manquaient de ressources humaines pour pouvoir accomplir leur tâche.
Le président. Il va falloir terminer, Monsieur le député !
M. Alain Charbonnier. Je finis, Monsieur le président ! Et j'en profite pour dénoncer à nouveau le peu de temps qui nous est donné sur ce sujet pourtant vital pour toute la population de notre canton !
La deuxième invite est: «à faire appel à la possibilité du chômage partiel plutôt que le chômage individuel et à temps complet». Et puis, les deux dernières: «à instaurer des subsides cantonaux pour des primes de l'assurance-maladie en faveur des familles» et, enfin, «à instaurer l'octroi de chèques de formation continue destinés à permettre aux jeunes sortant d'apprentissage de prendre un meilleur départ dans leur carrière professionnelle».
Voilà ! Malheureusement, je n'ai pas le temps de développer davantage ce sujet, et, je le répète: je trouve scandaleux que nous ayons si peu de temps pour parler d'un sujet aussi primordial ! (Applaudissements.)
Le président. Monsieur le député, je vous signale simplement que ce n'est pas moi qui ai fixé le temps de parole à trois minutes, c'est le Bureau et les chefs de groupe. Si vous voulez disposer de plus de temps, je vous suggère de le faire savoir à vos représentants afin qu'ils modifient la catégorie des débats. C'est tout ! Je ne fais qu'appliquer ce qui a été décidé par vos pairs.
Madame Schneider-Bidaux, je suis désolé, mais le temps disponible est épuisé pour vous. Monsieur Zaugg, vous avez la parole.
M. Daniel Zaugg (L). Merci, Monsieur le président ! Mesdames et Messieurs les députés, bien que les libéraux aient quelques doutes quant à l'efficacité des interventions de l'Etat sur la conjoncture, nous accueillons très favorablement cette résolution.
En effet, comme l'indiquent les auteurs, Genève n'échappera pas, même partiellement, à la récession mondiale. Il est, à nos yeux, nécessaire de mettre en oeuvre, le plus tôt possible, des mesures qui ressortent des compétences cantonales, soit celles qui touchent à la fiscalité, aux investissements, au soutien à la consommation et à l'accélération des procédures d'autorisation de construire et d'aménager. Pour nous, cette résolution a le mérite de donner une impulsion politique et un signal à nos concitoyennes et concitoyens sur la volonté et le sens des responsabilités de ce parlement, dans la conjoncture difficile qui s'annonce.
Certes, les mesures proposées n'auront pas d'effets miraculeux, mais elles témoignent de la nécessité de prendre au sérieux la gravité de la situation. En ma qualité de chef d'entreprise dans les métiers techniques de la construction, je peux témoigner aujourd'hui de la dégradation rapide de la conjoncture, puisque nos carnets de commande fondent comme neige au soleil. Et nombre de mes collègues naviguent déjà à vue. Du point de vue de la demande privée, par exemple, les travaux de rénovation et de transformation s'essoufflent. De très nombreux projets sont reportés au lendemain. Quand on sait que des investissements énormes doivent être effectués pour assainir le domaine bâti, qui concerne près de 60% des énergies non renouvelables, cette situation est proprement inadmissible !
Dès lors, les libéraux soutiennent particulièrement les mesures visant à coordonner et à utiliser sans délai toutes les subventions fédérales et cantonales au titre d'incitation aux économies d'énergie. De même, nous insistons aussi pour que la totalité des budgets d'investissement du canton et des communes soient réellement engagés cette année, soit près d'un milliard de francs, dont 600 millions pour le canton, en espérant que la «recourite» ne va pas encore frapper...
En conclusion, les libéraux sont conscients que la relance ne passe pas uniquement par la construction, mais aussi par une réduction de la pression fiscale sur les classes moyennes - y compris une réduction de la taxe professionnelle - mesures qui doivent impérativement entrer en vigueur le 1er janvier 2010.
Les libéraux vous proposent donc de renvoyer immédiatement cette résolution au Conseil d'Etat, qui aura tout le loisir de compléter ce programme en fonction des possibilités existantes.
Le président. Merci, Monsieur le député. Madame Schneider-Bidaux, je suis désolé, j'ai fait une erreur ! Vous avez sauté un tour, mais c'est maintenant à vous.
Mme Brigitte Schneider-Bidaux (Ve). Merci, Monsieur le président ! C'est vrai qu'il n'est pas courant que des femmes - ni des Verts, d'ailleurs... - parlent d'économie Si le but de cette résolution est louable, il ne faut pas, pour autant, faire n'importe quoi.
Il est vrai que nous sommes dans une situation mondiale difficile. Genève n'y échappe pas, mais il n'y a aucune raison que l'on brade certains acquis ou que l'on accepte des travaux sans respecter les règles en vigueur ! Si tel était le cas, on risquerait de le payer dans plusieurs années, par exemple en acceptant de laisser construire des maisons sans respecter les règles Minergie. (L'oratrice est interpellée par M. Etienne Barrillier.) Vous ne demandez pas de réaliser des projets Minergie, Monsieur Barrillier, vous voulez juste pouvoir construire ! (Remarque de M. Etienne Barrillier.) Monsieur Barrillier, j'ai bien compris ce que vous voulez: j'ai lu votre texte !
Par ailleurs, vous préconisez de rendre pratiquement libres les heures d'ouverture des magasins... Les Verts ne sont absolument pas d'accord sur ce point !
Nous souhaitons effectivement une économie qui pourrait correspondre à ce qui s'appelle, tout le monde l'aura compris, le «Green Deal»... Oui, mais pas à n'importe quel prix et pas à n'importe comment ! En tout cas pas en bradant des acquis au niveau de la protection du paysage et des énergies !
Mme Anne-Marie Arx-Vernon von (PDC). Pour les démocrates chrétiens, cette résolution arrive à point nommé. Elle relève tous les éléments qui nous tiennent particulièrement à coeur, et d'ailleurs nous nous réjouissons de voir qu'elle recoupe à plusieurs niveaux la motion que nous avons déposée, demandant que l'on puisse aider en urgence les petites et moyennes entreprises et les petites et moyennes industries.
Alors, Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, nous ne pouvons pas en vouloir aux collègues qui ont des bonnes idées ! Nous ne pouvons pas en vouloir aux collègues qui pensent que, si nous nous mettons plusieurs à demander simultanément la même chose, nous y arriverons plus vite ! Et il y a état d'urgence: la situation est telle qu'il n'est pas question de nous demander qui y a pensé le premier. Ce n'est pas ce qui compte ! Ce qui compte aujourd'hui, c'est de permettre aux petites et moyennes entreprises d'avoir une fluidité de trésorerie qui leur donne la capacité de continuer à payer leurs factures, leurs employés et d'éviter à tout prix de déposer le bilan et de devoir licencier. C'est le meilleur moyen de maintenir une consommation correcte et des carnets de commande convenables. Il faut tout faire pour que le pouvoir d'achat se maintienne. C'est extrêmement important pour tout le monde, que les familles soient moyennes, modestes ou aisées. Et nous sommes tous concernés !
Aujourd'hui, en soutenant cette résolution, Mesdames et Messieurs les députés, le parti démocrate-chrétien s'associe totalement à l'aide aux petites et moyennes entreprises. Et nous vous invitons - car, je le répète, il y a état d'urgence, parce que nous sommes dans une situation de crise - à renvoyer cette résolution au Conseil d'Etat, qui, nous le savons, lui réservera le meilleur accueil !
M. Gilbert Catelain (UDC). Le groupe UDC est d'accord avec la plupart des invites de cette résolution. Le Conseil d'Etat a eu l'occasion de répondre à une série de demandes des auteurs de la résolution dans le cadre de l'interpellation urgente écrite 709 de Mme Torracinta, sauf erreur de ma part...
La commission de l'économie consacre actuellement tout son temps au problème de la crise que nous traversons et nous avons pu observer - nous le savions déjà - que notre économie dépend essentiellement de la bonne santé de l'économie des pays voisins, puisqu'elle est principalement orientée à l'exportation et qu'il existe un déphasage entre la perception des uns - à savoir les entrepreneurs - et les statistiques qui nous sont fournies par les instituts de prévisions économiques, respectivement la Banque cantonale de Genève. En effet, on nous indique des diminutions d'activités qui ne dépassent pas 10 ou 15% dans certains secteurs, voire 4% pour la construction, alors que, déjà aujourd'hui, certains secteurs d'activités économiques subissent des baisses d'activité de 30 à 50%.
Il est effectivement urgent d'agir, mais ce n'est pas pour autant qu'il faut se précipiter. Si le Bureau de ce Grand Conseil a décidé de ne consacrer que trois minutes à ce sujet, c'est justement pour que le débat puisse avoir lieu en commission, pour que nous puissions prendre le temps qu'il faut et nous mettre d'accord sur les mesures à prendre. Et puis, le Conseil d'Etat n'est pas composé de sept imbéciles... (Rires.) Ils ont bien compris la situation: ils ont compris qu'il était important d'agir rapidement et ils n'ont pas attendu ce Grand Conseil pour prendre un certain nombre de mesures, pour débloquer des fonds et essayer d'accélérer le mouvement ! Ils ont besoin de notre soutien, certes, mais je ne pense pas qu'il soit judicieux d'entraver, par une résolution - qui, de plus, est peut-être incomplète - la marche de l'exécutif.
D'ailleurs, hormis le domaine de la construction, le secteur bancaire a totalement été occulté. Or, vous le savez, le Conseil fédéral a pris une décision hier, qui va grandement aggraver la crise, notamment dans notre canton. En effet, suite à la fameuse décision prise par rapport au secret bancaire, nous avons du souci à nous faire s'agissant de notre place financière et de notre place économique. Et c'est peut-être le premier élément qui aurait dû figurer dans cette résolution ! Je rappelle que ce Grand Conseil avait voté une résolution demandant d'inscrire le secret bancaire dans la constitution, mais, malheureusement, le Parlement fédéral l'a refusée, et nous en payons le prix aujourd'hui ! Il faudrait donc tenir compte de l'aspect «place financière» dans cette résolution.
S'agissant des amendements proposés par le groupe socialiste, notamment M. Charbonnier, je me fais effectivement du souci, car il refuse la mise en oeuvre anticipée des mesures d'allégement de la fiscalité des particuliers et des entreprises; il refuse le soutien à la consommation par une politique adaptée et concertée d'ouverture des magasins; et, finalement, il souhaite bien une accélération des procédures d'autorisation de construire, mais pas par des dérogations réglementaires.
Le président. Il faut terminer, Monsieur le député !
M. Gilbert Catelain. Donc, en conclusion, Monsieur le président, je souhaiterais que nous participions tous à la recherche d'une solution à cette crise, non pas comme le fait la gauche - par exemple, en déposant un recours contre les travaux de la gare Cornavin, voilà encore un chantier qui a été immobilisé et qui va mettre au chômage un certain nombre de personnes - ...
Le président. S'il vous plaît, vous devez conclure, Monsieur le député !
M. Gilbert Catelain. ...mais en agissant sur la formation. Je vous invite, Mesdames et Messieurs les députés, à voter le renvoi de cette résolution à la commission de l'économie.
M. Claude Jeanneret (MCG). Voici, me semble-t-il, une résolution qui, en temps normal, aurait pu être intéressante, mais tel n'est pas le cas étant donné la crise qui nous attend malheureusement et à laquelle nous ne pourrons pas échapper, même si Genève a eu de la chance jusqu'à maintenant. A mon avis, cette résolution est plus due à une réaction épidermique qu'à une volonté bien réfléchie. Je ne crois pas que notre parlement, ce soir, soit capable de juger s'il faut mettre en oeuvre des réductions d'impôt - dont on parle de toute façon déjà...
Une chose est certaine, c'est qu'il est important que le gouvernement mette immédiatement en oeuvre des moyens pour soutenir l'économie par le biais d'investissements. La Cour des comptes a fait un rapport accablant qui nous annonce que le parc immobilier de l'Etat de Genève n'a pas été entretenu: voilà une belle occasion de faire travailler les entreprises genevoises ! Il est en effet important de rénover le parc immobilier, qui donne une idée de l'état de santé de Genève. Ce n'est qu'un exemple - je ne suis pas en train de donner des ordres au gouvernement - une piste à explorer. En commission des finances, le gouvernement nous a promis de nous préparer, dans un délai extrêmement court, un plan de mesures permettant d'agir sur l'économie; ensuite, ce sera à nous de juger si nous sommes d'accord ou pas. Mais, ce soir, nous n'avons pas à faire - passez-moi le terme - des «cacas nerveux» en lui recommandant de faire attention et en lui disant ce qu'il doit faire ! Non ! Des projets - lesquels seront traités en commission de l'économie - vont être présentés par nos sept sages qui sont en train d'élaborer un plan intéressant... Et ça, il faut le relever ! Ils ne disent pas qu'ils vont attendre de voir les effets qu'auront les 700 millions d'investissements pour cette année ! Il y a 60 millions qui sont déjà supprimés à cause du CEVA et d'autres investissements ne seront pas réalisés... Ils ont l'intelligence de dire qu'il faut dépenser la somme dont ils disposent pour relancer l'économie.
Alors s'il vous plaît, messieurs-dames, faisons confiance à notre gouvernement ! Renvoyons cette résolution à la commission de l'économie, qui, elle, va jouer le rôle de catalyseur des bonnes volontés de notre parlement et, surtout, des présentations des plans d'action de ce dernier qui nous a été promis dans un délai très bref ! C'est pour cela que je vous demande d'accepter de renvoyer cette résolution à la commission de l'économie. Voilà la position du MCG.
Mme Sandra Borgeaud (Ind.). Je soutiendrai cette résolution ainsi que son renvoi à la commission de l'économie. En revanche, j'attire votre attention sur les faits suivants. S'agissant du démarrage de travaux publics d'infrastructure déjà financés au niveau cantonal et communal, je vous rappellerai juste qu'à Genève seules trois entreprises gèrent les décharges... Il faudra donc bien régler cela le plus rapidement possible, avant de réaliser le CEVA, le CMU, la clinique de la Colline, etc., qui généreront d'autres difficultés. Il y a déjà plus d'un million de tonnes de déblais rien que pour le CEVA, ce qui va poser un gros problème. Il faut donc anticiper. Alors, certes, il faut construire, mais il faut d'abord savoir où il sera possible de décharger les déblais ! (Brouhaha.)
Deuxième chose: le soutien à la consommation en assouplissant les horaires d'ouverture des magasins... Je ne suis pas d'accord ! Il ne faut pas oublier que la majorité des employés des magasins sont des femmes et que la plupart d'entre elles sont mères de famille. Il me semble que les gens doivent pouvoir se débrouiller et faire leurs courses entre 12h et 14h. Nous ne sommes pas obligés de faire - comme à New York, où il y a des millions d'habitants - nos courses à 21h ! Je pense qu'il faut respecter la vie de famille.
D'autre part, j'aimerais aussi que l'on soutienne les privés qui veulent construire un immeuble en respectant les normes Minergie... J'ai des connaissances dans ce cas, qui n'ont reçu absolument aucune aide, que ce soit sous forme de subventions ou sous forme de défiscalisation pour la construction d'un immeuble.
S'agissant des procédures d'autorisation de construire - qui durent pendant des mois - il faudrait vraiment cesser de demander aux gens de fournir une quantité de documents et d'effectuer toutes sortes de paperasseries, souvent inutiles. Une demande d'autorisation a même été bloquée huit mois alors qu'elle n'avait pas lieu de l'être... Il me paraît donc fort utile d'avancer à ce niveau, c'est très important. Du reste, j'ai des preuves à ce sujet; je préfère les garder pour le moment, mais, s'il le faut, je me réserve de les montrer.
Le président. Madame la députée, il vous faut terminer !
Mme Sandra Borgeaud. Pour conclure, Monsieur le président, je ne peux absolument pas accepter que des députés socialistes puissent déclarer qu'il n'est pas nécessaire de prendre des mesures urgentes pour remédier à la situation... Il y a déjà beaucoup trop de chômeurs, et les choses vont s'aggraver ! Il est, au contraire, urgent d'agir ! Il y en a assez de pratiquer la politique de l'autruche: il faut accepter la réalité de la situation économique ! Je pense que l'argent est bête, pas nous ! (Commentaires.)
Le président. Madame la députée, il vous faut terminer !
Mme Sandra Borgeaud. Nous saurons endiguer cette crise avant de ne plus pouvoir faire quoi que ce soit d'autre que de regarder le navire de notre économie couler à pic. Une erreur est d'autant plus dangereuse qu'elle contient un fond de vérité...
Je soutiens donc cette résolution ainsi que son renvoi à la commission de l'économie, afin que nous effectuions le travail rapidement - mais pas dans la précipitation.
M. Gabriel Barrillier (R). Je pensais intervenir après tous les autres intervenants... (Commentaires.) Mais je dois dire que la fin de l'intervention de ma préopinante m'a plu ! En effet, «il faut agir» ! Mais, chère Madame, chère collègue, ce n'est pas en renvoyant cette résolution dans une commission qu'on va pouvoir agir ! Il faut renvoyer cette résolution au Conseil d'Etat, pour la simple et bonne raison - tout le monde l'a dit - que ce dernier n'est pas resté les bras croisés: toute une série de mesures sont prêtes !
Cette résolution, cher collègue Jeanneret, n'est pas une réaction épidermique, une espèce d'urticaire... Vous, vous n'avez rien fait: je n'ai pas lu de motion ou de résolution du MCG à ce sujet ! Cette résolution n'a d'autre objectif que de soutenir, d'encourager notre gouvernement - qui va se réunir, sauf erreur, la semaine prochaine, pour préparer le printemps - à accélérer le mouvement.
Et puis, Madame Schneider-Bidaux, chère collègue, si vous lisez attentivement cette résolution, vous voyez bien que tout n'est pas détaillé: «Utilisation des diverses subventions décidées sur le plan fédéral... (Brouhaha. Le président agite la cloche.) ...au titre d'incitations aux économies d'énergie dans le domaine bâti [...]»... Je ne comprends pas: il faut écrire en volapük pour que vous saisissiez que c'est à ce niveau qu'il y a un travail à réaliser, qu'il faut investir ! (L'orateur est interpellé.) Non, je disais à ma collègue qu'il était tout à fait évident que l'un des objectifs de cette résolution est bien d'assainir le domaine bâti ! Et cela va dans votre sens !
Je persiste à penser que cette résolution représente un soutien de notre parlement, tout en restant modeste et raisonnable. Alors, bien sûr - je le répète - cette résolution n'est pas exhaustive. Mais il est plus facile de critiquer que d'agir, je suis désolé de vous le dire ! (L'orateur est interpellé.) Oui, je me répète ! Certes, le volet social n'est pas abordé, c'est possible... Quoi qu'il en soit, je vous invite à renvoyer cette résolution au Conseil d'Etat sans tarder, pour le soutenir et l'encourager à agir. (Applaudissements.)
M. Pierre-François Unger, conseiller d'Etat. Tout le monde se rappelle, il y a environ dix-huit mois - cela paraît déjà lointain - les premières trémulations de la crise financière, initiée par la crise des subprimes. Cela a commencé à faire réfléchir les gens sur le modèle de ce grand pays ami et allié - dont certains financiers avaient complètement perdu la maîtrise - qui, dans la mauvaise conjoncture qu'il traverse aujourd'hui, ne trouve rien de mieux que d'essayer d'étrangler son allié naturel, historique: la Suisse, alors que nous entretenions des liens privilégiés avec lui. Le rapport des forts et des faibles est comme ça, et dans cette crise, qui de financière devient économique, il en va, hélas, de même...
Certes, la résolution qui nous est proposée contient des imperfections de rédaction. Je pense, par exemple, à «mettre en place de manière anticipée une baisse d'impôt»... C'est un peu difficile à réaliser, dans la mesure où c'est votre parlement qui nous a imposé de passer devant le peuple ! Ce qui ne raccourcit pas franchement les délais, vous en conviendrez ! Quoi qu'il en soit, on comprend ce que ça veut dire: agir au plus vite pour faire en sorte que les choses marchent le mieux possible. (Brouhaha.)
Et puis, à la liste que vous avez élaborée, j'aimerais ajouter trois éléments... (Brouhaha. Le président agite la cloche.) ...d'importance diverse, mais qui me paraissent utiles.
Le bonus à la rénovation que nous avions initié au cours des années 90 - entre autres, à votre initiative, Monsieur le député - peut être mis en oeuvre très rapidement. Nous allons en parler lundi, puisque le Conseil d'Etat doit faire le point sur l'ensemble des mesures. Et ce bonus à la rénovation tomberait probablement particulièrement bien par rapport à la conjoncture, puisque - vous le savez mieux que moi - le second oeuvre subit la crise de plein fouet. En effet, les gens n'ayant pas confiance, ils hésitent à faire effectuer les travaux nécessaires à l'entretien de leur maison, de leur usine, de leurs locaux d'une manière générale. Le gros oeuvre, lui, a encore un carnet de commandes convenable, et nous espérons d'ailleurs pouvoir l'alimenter grâce à des projets d'investissements lourds, déjà votés ou qui devraient l'être rapidement. L'avantage du bonus à la rénovation et du bonus LDTR, c'est qu'il permet réellement d'agir sur le second oeuvre qui, je le répète, est d'ores et déjà touché de plein fouet.
Et puis, pour tenir compte de la sensibilité exprimée par M. Charbonnier tout à l'heure et étant donné l'ampleur de la crise, nous devrons mettre en place rapidement un «observatoire de la précarité» pour savoir quelles sont les classes sociales, les catégories professionnelles, les formations, les plus touchées par une précarisation rapide. Car la crise que nous connaissons est non seulement d'une ampleur exceptionnelle, mais aussi d'une brutalité exceptionnelle. A fin décembre, la plupart des chiffres économiques genevois étaient pratiquement intégralement au même niveau. Seuls certains signes, depuis fin août, comme la progression de l'impôt à la source, qui était plus modeste, semblaient montrer qu'il se passait quelque chose. Mais, depuis un mois et demi, la chute est vertigineuse - vous le savez bien ! Le chiffre concernant les industries d'exportation n'a baissé «que» - et il faut le mettre entre guillemets - de 5% en janvier, mais il risque de baisser de manière beaucoup plus significative. L'hôtellerie voit ses réservations pour le mois de mars diminuer de 40% par rapport à l'année dernière ! Tous ces indicateurs que je suis en train de vous annoncer devraient pouvoir nous faire réagir pratiquement en temps réel, alors que, trop souvent, les indicateurs, qui sont annuels, nous indiquent après la fête qu'il y a eu une fête... Mais vous le savez, puisque vous êtes en train de faire le ménage... Il faut donc nous donner les moyens de pouvoir agir concrètement.
Nous considérons évidemment que votre résolution est un soutien, mais vous savez sans doute qu'une première réunion, avec des collègues du Conseil d'Etat et l'ensemble des partenaires de l'économie, a eu lieu au mois d'octobre, et que la prochaine doit avoir lieu dans dix jours, sur la base d'indicateurs pour déterminer ensemble ce que nous entendons faire, ce que nous voudrions faire et ce que nous pensons qu'il ne faut pas faire. Mais tout ceci - et vous devriez faire de même dans ce parlement - en prenant le temps nécessaire, même si nous sommes pressés, pour construire des consensus plutôt que des oppositions. Bien sûr, vous pouvez vous opposer, par exemple, sur la loi sur la sécurité municipale... Mais il vous a fallu cinq heures pour la voter à l'unanimité moins une abstention ! Nous, nous entendons discuter moins longtemps et agir plus vite, tout en trouvant un consensus de manière à pouvoir anticiper tous les blocages auxquels vous faites référence. En situation de crise, il y a des choses qu'il ne convient pas de faire !
Le Conseil d'Etat a donc pris trois mesures qu'il avait d'ores et déjà annoncées au mois d'octobre de l'année dernière. La première consiste à renforcer les investissements et, surtout, de les étendre - comme l'a signalé le député Jeanneret tout à l'heure - en ceci que nous allons en prévoir plus que nous ne pouvons en financer, parce que nous savons bien qu'un projet voté ne signifie pas pour autant que les travaux vont pouvoir commencer... Donc, nous prévoirons une palette plus large de projets votés et nous déclencherons au fur et à mesure ceux qui sont réalisables.
Le deuxième élément, que nous avons mis sur pied avec vous, porte sur la fiscalité des familles, notamment des familles de la classe moyenne. Le seul moyen de soutenir le pouvoir d'achat - c'est-à-dire le pouvoir de consommer qui est un élément relativement important - c'est, évidemment, d'alléger la charge fiscale de la classe moyenne. Parallèlement, dans le domaine qui est le nôtre, c'est d'avoir tenu parole quant à nos engagements salariaux vis-à-vis de la fonction publique, tout en sachant que nous prenons un risque financier. Mais nous allons probablement nous y retrouver, car les personnes concernées, récupérant une partie de leur pouvoir d'achat qui avait été amputé ces quinze dernières années, reprennent confiance, ce qui représente un encouragement à la consommation.
Et puis, il y a d'autres mesures à prendre. Il faudra - c'est à plus long terme - déclasser des zones, de manière à pouvoir créer de nouvelles zones industrielles. Vous savez que le projet de la Praille-Acacias-Vernets ne pourra se réaliser que si un certain nombre d'entreprises se montrent mobiles... Eh bien, pas plus tard qu'aujourd'hui, avec mon collègue Cramer, nous avons rencontré nos fonctionnaires de l'aménagement et de la construction pour les inviter à mener conjointement des procédures qui, habituellement, étaient menées séquentiellement. Par exemple, pour un projet concernant Bernex, un PLQ devait vous être soumis à fin 2010... Eh bien, la simple exigence de mener en parallèle les réflexions dans les deux services et dans les deux départements nous a permis d'exiger que ces travaux soient terminés au cours de l'automne 2009 ! Et c'est ce type d'action qui peut modifier les choses ! Il ne s'agit pas de dérogation réglementaire, il s'agit d'un changement des habitudes qui doit nous permettre d'accélérer certains processus.
Mesdames et Messieurs, bien sûr, nous acceptons votre résolution. Bien sûr, nous tiendrons compte des éléments - nous les développerons dans notre réponse - concernant l'aspect social, parce qu'il est réellement fondamental.
Mesdames et Messieurs, je conclurai en vous disant la chose suivante: j'ai eu la chance de participer au World Economic Forum, comme c'est le rôle du ministre de l'économie de Genève, qui, chaque année, est l'invité de cette grand-messe de Davos. J'y assiste depuis cinq ans, avec un plaisir toujours égal quant à la qualité des gens que j'y rencontre, un peu plus inégal quant aux leçons données par telle ou telle sommité. Certaines de ces sommités sont probablement maintenant inculpées pour des faits relativement graves par rapport aux leçons qu'elles donnaient... Eh bien, cette année, Mesdames et Messieurs les députés, j'ai trouvé au World Economic Forum... (Brouhaha.) Cela intéressera sans doute M. Velasco, qui pourrait attendre que j'aie terminé pour bavarder sous mes yeux ! Vous pourriez avoir la gentillesse de regagner votre place, Monsieur le député ! (Exclamations. M. Alberto Velasco répond hors micro. Rires.)
Le président. S'il vous plaît ! Oui, nous arrivons à la fin de la séance, il serait bien que les choses se passent calmement ! Merci, Monsieur Velasco ! (Rires.)
M. Pierre-François Unger. Je vous remercie ! J'ai découvert, cette année à Davos, trois éléments chez des personnes qui ont les plus grandes responsabilités, et il m'apparaît que nous devons nous y raccrocher et les méditer au milieu de cette crise. Le premier est une qualité: l'humilité. Il n'y a pas de leçons à donner à qui que ce soit dans un système qui a autant failli... Il n'y a sans doute que des leçons à tirer ! Et, pour cela - c'est la deuxième chose - il convient, à n'en pas douter, de retourner à des valeurs d'intérêt commun, d'intérêt général, d'intérêt communautaire, là où un certain nombre d'intérêts extrêmement égoïstes et particuliers avaient pris le dessus, notamment par rapport à certaines techniques financières pour le moins discutables. Et, enfin - troisième élément - aucune de ces personnes n'a imaginé que nous pourrions sortir de cette situation, probablement plus lentement que ce que nous espérons mais avec une vision infiniment plus durable de ce que nous fabriquons.
Alors, Mesdames et Messieurs, à travers votre résolution, j'espère que vous partagez avec moi la conviction qu'il faut nous montrer humbles dans une situation qui nous dépasse à plusieurs égards, qu'il faut nous retrouver autour des valeurs qui fondent notre démocratie, notre Etat de droit, et qu'il ne faut pas nous laisser impressionner par d'autres, dans la mesure où notre pays tient encore à peu près la route, au service d'éléments plus durables. Ces trois éléments devraient nous fédérer autour de notre gestion de la crise.
Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, nous sommes saisis d'une demande de renvoi de la résolution 577 à la commission de l'économie, je vous la soumets.
Mis aux voix, le renvoi de la proposition de résolution 577 à la commission de l'économie est adopté par 33 oui contre 32 non. (Exclamations à l'annonce du résultat.)