République et canton de Genève
Grand Conseil
Séance du jeudi 19 février 2009 à 17h
56e législature - 4e année - 5e session - 22e séance
PL 10287-A
Premier débat
Mme Elisabeth Chatelain (S), rapporteuse de majorité. Mesdames et Messieurs les députés, ce projet de loi a été accepté, tant en commission des affaires sociales qu'en commission des finances, par une faible majorité. Les reproches qui ont été formulés à l'encontre de cette association sont intéressants à relever, surtout pour montrer à quel point ils n'ont pas de sens.
Le premier reproche consiste à dire que les salaires des personnes employées - un juriste, un psychologue, etc. - sont alignés à la base sur ceux de l'Etat. En d'autres termes, on reproche à cette association de payer correctement ses employés ! Et j'ajoute que, s'il y a un renchérissement annuel, il n'y a pas eu d'augmentation depuis 2005 et aucune hausse n'est prévue.
Le deuxième reproche est le suivant: Pro Mente Sana Romandie est une association que nous subventionnons, alors qu'il existe Pro Mente Sana au niveau suisse, située à Zurich, laquelle est une fondation. Le reproche principal est que la fondation zurichoise possède une fortune apparemment considérable - j'ignore laquelle - mais qu'elle ne soutient pas l'association romande. En réalité, il convient de savoir que ces deux Pro Mente Sana sont deux entités juridiques distinctes, et que Pro Mente Sana Romandie n'est pas une filiale de Pro Mente Sana Zurich. Le seul lien qui existe entre ces deux Pro Mente Sana, c'est que l'OFAS verse un financement à Pro Mente Sana Zurich avec un contrat de prestations, et que cette dernière délègue une partie des prestations à assurer, avec la somme adéquate, à Pro Mente Sana Romandie. C'est le seul lien existant entre ces deux institutions.
S'agissant des prestations, ce qui est reproché à Pro Mente Sana Romandie, c'est que seuls deux tiers des prestations téléphoniques sont fournis à des personnes résidant dans le canton de Genève. En effet, il faut l'avouer, lorsqu'une personne appelle pour solliciter des renseignements juridiques ou une aide psychosociale, il ne lui est pas demandé en premier lieu d'où elle téléphone. Elle peut donc appeler d'autres cantons romands, voire - et cela n'a pas été relevé dans le rapport de minorité - de France voisine. C'est un fait, mais les personnes qui ont besoin d'aide composent ce numéro parce que ce dernier est connu d'elles-mêmes et de leurs proches.
Au niveau genevois, il est important de relever que l'on n'assure pas uniquement des prestations téléphoniques: il existe tout un lien social qui est établi avec les différentes associations, les groupes d'entraide et l'Etat, de façon que soient assurées les prestations contenues dans le contrat de prestations - qui est d'ailleurs nommé en toutes lettres dans le projet de loi du Conseil d'Etat - soit défendre les droits et les intérêts des personnes souffrant d'un handicap psychique, apporter conseil et soutien, informer le grand public, etc. Toutes ces prestations sont réalisées de manière beaucoup plus approfondie à Genève, étant donné que cette association a d'abord commencé ses services dans ce canton et que c'est là qu'elle a le maximum de liens.
D'aucuns reprochent en outre l'engagement politique de cette association par rapport à certains sujets, comme la réforme de l'AI. Parmi les prestations citées dans le projet de loi du Conseil d'Etat, il est indiqué que Pro Mente Sana doit intervenir auprès des autorités et institutions pertinentes afin que les intérêts de ces personnes soient préservés, participer à des projets législatifs, tant au niveau cantonal que fédéral, et soutenir des projets constructifs dans le domaine de la santé mentale. C'est exactement ce qui est fait et, dans le cadre des campagnes, notamment celle relative à la loi sur l'AI, les prestations fournies par Pro Mente Sana Romandie ont uniquement consisté à accorder des interviews et à répondre aux demandes formulées par les médias, et absolument pas à financer quoi que ce soit, ni à faire partie d'un comité référendaire.
Il est également question dans le rapport de minorité - et je le dis avec un certain sourire - de l'engagement politique ou de l'appartenance politique des personnes membres du comité. On dit même - je résume - que c'est un nid de socialistes. Je sais que les majorités sont parfois un peu mouvantes dans ce parlement, mais l'ancienne présidente de cette association, Mme Nelly Gichard, n'est à ma connaissance pas encore membre du parti socialiste, à moins que quelque chose ne m'ait échappé !
En conclusion, il faut constater que les personnes concernées par le travail de cette association constituent un public qui nous trouble et nous fait quelque fois peur, car il est atteint de maladies ou de handicaps qui sont parfois, même fréquemment, difficiles à percevoir. Ces maladies nous effraient un peu, nous avons peine à les comprendre car elles ne se voient souvent pas et, dans le même temps, cette population précarisée nous ressemble et nous inquiète dans la mesure où nous pourrions un jour ou l'autre basculer dans ce genre de problématiques. En conséquence, diminuer - comme le demande l'amendement déposé - les aides accordées à cette association, qui accomplit un travail remarquable, serait vraiment dommage pour Genève. Et même si une bonne partie des prestations sont également assurées dans d'autres cantons, il faut savoir que l'association recherche des fonds ailleurs, elle aspire à élargir son soutien financier, et elle arrivera certainement à le faire pendant la durée de ce mandat de prestations, ce qui fait que le prochain contrat de prestations sera certainement mieux réparti au niveau des différents cantons.
M. Eric Bertinat (UDC), rapporteur de minorité. J'ai bien entendu la différence que fait Mme la rapporteure de majorité entre la fondation Pro Mente Sana, dont le siège se trouve à Zurich, et l'association Pro Mente Sana Romandie. J'insiste sur ce point, car on parle bien de Pro Mente Sana Romandie, qui apporte ses compétences et ses lumières à de nombreux cantons - on peut évoquer Vaud, Valais, Neuchâtel, Fribourg, Jura, Berne et même le Tessin - et également, si j'ai bien entendu, à la France voisine. Cette démarche ne nous gêne absolument pas; ce qui nous dérange, c'est qu'en ces temps assez difficiles - et ils le seront certainement d'autant plus ces prochaines années - un tiers de l'activité de Pro Mente Sana Romandie est dirigé vers les cantons romands, sans qu'aucune contribution ne leur soit demandée.
Je me suis permis d'établir un parallèle avec le Centre intercantonal d'information sur les croyances: cette question y a également été abordée, et les responsables ont fini par admettre eux-mêmes qu'ils allaient aussi se tourner vers les cantons qui sollicitent l'aide de ce centre.
Ma deuxième remarque est infiniment plus politique. Dans mon rapport de minorité, j'ai eu envie de revenir sur le rapport annuel 2007 de Pro Mente Sana, plus précisément sur le mot rédigé par sa présidente d'alors, notre collègue Nelly Guichard. Sur un certain plan, cette dernière défendait effectivement Pro Mente Sana et sa démarche, puisqu'elle mentionnait notamment que la campagne contre la 5e révision de l'AI «a permis d'informer le public sur les besoins particuliers des personnes souffrant d'une maladie psychique dans le contexte professionnel». Il n'y a rien à dire, car cela fait partie du cahier des charges - si j'ose le dire ainsi - de Pro Mente Sana Romandie ! En revanche, Mme Guichard a également fait entendre sa voix pour critiquer «l'absence de mesures contraignantes pour les employeurs [...]». On voit donc bien que l'implication de Pro Mente Sana est aussi politique, et l'on retrouve dans cette démarche - comme dans celle de nombreuses autres associations que j'ai citées dans mon rapport - des positions dont je n'ose pas dire qu'elles sont proches du programme politique du parti socialiste, car elles font réellement partie du programme de ce dernier ! Il ne faut donc pas s'étonner que l'on relève ces accointances et que l'on s'y oppose.
M. Edouard Cuendet (L). Je ne reviendrai pas sur les chiffres avancés par le rapporteur de minorité et sur le fait qu'une grande partie des prestations sont fournies à d'autres cantons sans contrepartie financière - ce qui est déjà une raison de refuser le contrat en l'état - car j'aimerais plutôt aborder le problème de la thésaurisation intercantonale. La rapporteuse de majorité a dit d'un air un peu naïf qu'on avait parlé de la fortune de Pro Mente Sana à Zurich, sans en révéler le montant. Or, en commission, je suis venu avec les comptes révisés 2007 de cette fondation zurichoise, qui disposait - même si elle a certainement dû fondre quelque peu depuis lors - d'une fortune de 3 millions disponibles en titres et en comptes bancaires; 3 154 031,15 F ! C'est ce qu'on appelle de la thésaurisation !
Concernant les liens entre Genève et Zurich, je rappellerai que ces deux structures partagent le même site internet et qu'un représentant de Pro Mente Sana Romandie siège à Pro Mente Sana Zurich; alors que l'on ne me dise pas qu'il n'existe pas de lien institutionnel entre ces deux mondes, je n'y crois pas !
Je dois dire que j'ai été vraiment très étonné de ne pas entendre s'exprimer dans ce débat la pasionaria de la thésaurisation, pour qui il n'y a pas de tabous, on le sait. Etait-ce parce que la thésaurisation a ses limites au niveau du canton ou parce que, comme on l'a dit, une présidente était issue de sa formation politique ? Je trouve incroyable qu'elle fasse une différenciation entre les associations au niveau de la thésaurisation. En effet, on a ici 3 millions de thésaurisation, et l'on n'a pas entendu un mot à ce sujet; je trouve donc qu'il y a deux poids deux mesures !
D'autre part, l'association a elle-même proposé de réduire le montant inscrit dans le contrat de prestations. En effet, le conseiller d'Etat en charge de ce dossier est venu en commission nous dire qu'une discussion avec l'association était en cours et que celle-ci serait prête à voir passer l'aide financière qui lui est accordée à 180 000 F - c'est l'objet de l'amendement que je vous ai soumis et que je vous inviterai par la suite à adopter. Alors c'est incroyable ! On vient en commission avec une proposition concrète de réduction qui, semble-t-il, rencontrerait l'accord de l'association, et la commission des finances trouve encore le moyen de la refuser. Je trouve cela surréaliste !
Sur le fond, je rappellerai que la commission des finances n'a effectivement pas contesté le bien-fondé de l'action de Pro Mente Sana; en revanche, on peut émettre certains doutes quant au ton employé. De nombreuses personnes sont en effet d'avis que ce ton est souvent d'une agressivité inutile; j'en veux pour preuve la lettre trimestrielle no 41, datant de septembre 2008, qui parle tout au long de son texte de contraintes déguisées et cite l'article 181 du code pénal évoquant lui aussi des contraintes. Au fond, cette lettre reproche en des termes à peine voilés au système médical genevois de faire de la contrainte médicale. Or je trouve que c'est très grave, pour une association subventionnée, d'émettre des accusations à peine voilées en citant un article du code pénal. Je tenais à ce que ce point soit soulevé, et je m'étonne que la commission de la santé ne se soit pas penchée sur cet élément de publication et de communication qui me paraît particulièrement répréhensible.
En conclusion, je vous remercie par avance de faire bon accueil à mon amendement qui, je le rappelle, a été présenté comme possible par le chef du département.
M. Alain Charbonnier (S). Mesdames et Messieurs les députés, mon préopinant me permet de saluer le travail de Pro Mente Sana, puisque c'est justement la tâche de cette association de défendre les personnes atteintes psychiquement. Quant aux mesures de contrainte, Monsieur Cuendet, venez une fois à Belle-Idée et vous verrez que des mesures de contrainte sont très souvent employées ! En outre, il est normal qu'une association de défense de patients fasse référence à des articles de lois, Monsieur Cuendet, ce que vous ne faites pas toujours de votre côté. Pro Mente Sana le fait et ses employés connaissent très bien leur travail. L'association dispose d'ailleurs d'une juriste pour ce genre de tâches, et si c'est le cas, c'est bien qu'il y a des problèmes et que, pour défendre les patients atteints psychiquement... (Remarque.) Oui, Monsieur Weiss... Qu'avez-vous dit ? Elle est de l'Alliance de gauche ? D'A gauche toute ? C'est en tout cas une juriste qui est reconnue comme telle, du moins par le département, puisque le contrat de prestations a été signé entre le département de M. Longchamp et Pro Mente Sana. C'est donc une critique vraiment grossière que vous faites et vous devriez vous renseigner un peu plus auprès de vos confrères et de votre groupe, par exemple M. Aubert, qui aurait pu vous expliquer largement de quoi il retournait.
J'aimerais maintenant m'attarder un peu sur les chiffres, parce que de grosses critiques ont été formulées quant au fait que les autres cantons ne participent pas. C'est vrai, ils ne participent pas, mais l'activité de Pro Mente Sana concerne quand même à plus de 66% des habitants de Genève, et notre canton paie 40% de la subvention. D'ailleurs, là contre vous ne vous êtes pas du tout élevés en disant: «Mais comment ça se fait ? 66% d'activité et que 40% de financement ?» Non, là-dessus, vous n'avez rien dit, vous ne relevez que l'inverse, c'est-à-dire les 34% de prestations fournies aux gens qui téléphonent à l'association. Mais cette dernière ne va tout de même pas arrêter de répondre aux personnes qui téléphonent et qui ont besoin de ce soutien, lequel n'existe dans aucun autre canton romand ! Il est vraiment important que cela puisse se faire.
S'agissant de la thésaurisation, là, je crois rêver ! Ce sont des gens qui n'arrêtent pas, à longueur d'année, de nous donner des leçons à la commission des finances sur ce que sont le financement et la thésaurisation, mais là, aujourd'hui, entre la fondation basée à Zurich et l'association romande de Pro Mente Sana, il n'y a aucun lien financier ! Aucun lien financier ! Si une part du financement genevois allait à Zurich, comme on a pu le voir pour une autre association - je crois qu'il s'agissait de l'Armée du salut - où l'on doit intervenir pour demander une séparation claire et nette, je comprendrais, mais ici, rien de tel, Monsieur Cuendet, et vous le savez très bien ! Donc les 3 millions dont dispose la fondation à Zurich, ce n'est pas du tout de la thésaurisation de subventions genevoises, cela n'a rien à voir, vous le savez très bien, à moins que... Et à ce moment-là, je comprends mieux les problèmes qu'on connaît aujourd'hui avec les banques, si le représentant des banquiers privés arrive à faire de telles erreurs... (Exclamations.)
Concernant l'implication politique, Monsieur Bertinat, je vous remercie, parce que vous faites référence à tout ce nid de socialistes et d'associations présidées ou dirigées par des socialistes qui arrivent à piquer l'argent - car c'est un peu votre théorie ! - pour mener des campagnes politiques affreuses, or la commission des finances a fait une demande à la Cour des comptes à ce sujet-là - évidemment, c'est la majorité de droite qui a formulé cette demande. Cette dernière concernait plusieurs associations: l'APRET, dans laquelle oeuvre notre camarade Jean-Charles Rielle, la FEGPA, où travaille notre collègue Mme Fehlmann Rielle - parce que nous, nous jouons la transparence, nous disons les choses ! - l'AVIVO, proche de nos milieux, c'est vrai, mais pas tellement des vôtres, et d'autres encore. Vous demandiez donc à la Cour des comptes de nous indiquer si le fonctionnement de ces associations était légal, soit de soutenir certaines votations, de mener campagne ou de faire ce que vous appelez du sponsoring. La Cour des comptes a répondu mais, malheureusement, nous n'avons pas reçu copie de cette lettre hier à la commission des finances, alors que cette dernière est datée du 16 février. Je suis donc étonné que l'on ne nous ait pas donné la teneur de ce courrier hier en commission, mais je pense que ce n'est pas un hasard. Alors que dit-il ? Ce rapport de la Cour des comptes dédouane complètement toutes les associations. Je ne vais pas vous faire la lecture de cet avis de droit qui s'étend sur quatre pages, mais il enlève tout préjugé quant à une mauvaise utilisation de la subvention. Rien de tel d'après la Cour des comptes et selon les juristes ! Ces associations peuvent donc continuer à soutenir des clubs sportifs, mais aussi à intervenir dans des campagnes de votation, parce que tel est leur rôle. Par exemple, lorsque l'APRET prend position sur la fumée passive, il est évident que c'est son rôle, puisqu'elle est là pour dénoncer les méfaits du tabagisme. Il en va de même pour Pro Mente Sana concernant la révision de l'AI: c'est son devoir de défendre les gens qui sont à l'AI, les personnes atteintes psychiquement; et lorsque cette association indique qu'elle regrette la non-contrainte sur les entreprises, c'est aussi de la défense des personnes handicapées psychiquement qu'il s'agit.
Il n'y a donc aucun problème à ce niveau-là, et je vous encourage vivement à voter ce projet de loi tel quel, sans l'amendement proposé par les libéraux. Concernant cet amendement, lorsqu'on a demandé à Pro Mente Sana si elle était d'accord qu'on lui enlève 25 000 F, elle n'a pas répondu qu'elle y consentait, mais qu'elle allait vivre avec. Il en va de même pour toutes les associations à qui l'on met le couteau sous la gorge: elles n'ont pas d'autre choix que de dire qu'elles feront en sorte que ça aille et qu'elles iront chercher des dons privés, ce que M. Weiss mettait justement en doute tout à l'heure concernant une autre association. Vous êtes donc complètement incohérents, cela se voit tout au long des débats à la commission des finances, et l'on vous demande donc de revenir un peu sur terre et d'aider ces associations qui s'occupent d'hommes et de femmes dans la précarité. Heureusement pour ces personnes et pour nous, ce sont très souvent des gens de gauche qui sont à la présidence de ces associations.
Le président. Merci, Monsieur le député. Le Bureau décide de clore la liste. Doivent encore s'exprimer MM. Bavarel et Saudan, Mmes von Arx-Vernon et Schneider Hausser, MM. Deneys, Catelain et Cuendet, les deux rapporteurs et, enfin, M. le conseiller d'Etat.
M. Christian Bavarel (Ve). Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, les Verts ont raisonné ainsi: la somme que l'on nous demande s'élève à 205 000 F, ce qui équivaut environ à un financement de deux postes de travail par année. Je vous le dis pour montrer l'ampleur de la dépense par rapport à la discussion que nous avons en ce moment: nous parlons bien d'un équivalent de deux postes de travail et pas d'autre chose !
Nous avons également examiné ce que faisait cette association. Ce projet de loi a d'abord été renvoyé à une commission spécialisée, puis à la commission des finances, dans laquelle il y a eu un débat très technique. Toutefois, nous sommes là pour juger l'ensemble du projet, et non pas simplement deux ou trois détails techniques.
Que fait cette association ? A quoi sert-elle ? Elle offre un service juridique, prodigue des conseils psychosociaux, fait de l'information et de la sensibilisation, mène des travaux spécifiques à l'intention des collectivités publiques et soutient les groupes d'entraide. Toutes ces prestations concernent des personnes qui souffrent de problèmes psychiatriques. Lorsque vous êtes victime d'une maladie psychique, qu'il existe cette souffrance dans une famille, lorsque vous avez un père schizophrène ou atteint de troubles de ce genre, ou bien une mère sujette à tel ou tel type de problème, comment pouvez-vous résoudre les choses d'un point de vue juridique ? Vous pensez bien que ce n'est pas tout simple pour les familles ! Ce sont des problèmes qui vous tombent dessus comme un coup de tonnerre dans un ciel bleu, et il arrive un moment où il faut prendre les choses en main: doit-on mettre la personne concernée sous tutelle ? Les décisions prises sont-elles les bonnes ? Comment fait-on ? Les gens connaissent une certaine détresse, or ce que l'on vous propose aujourd'hui c'est uniquement de financer l'équivalent de deux postes de travail.
J'ai tout entendu, qu'il s'agit d'un débat technique, etc. Lorsque je vous écoute, j'ai simplement envie de dire que, quand on veut piquer son chien, on prétend qu'il a la rage. Vous pouvez chercher tous les prétextes que vous voulez, mais dites-nous clairement que vous êtes contre ! Vu la somme qui est en jeu... Nous avons entendu vos arguments en commission - c'est le travail des commissaires de débattre - mais venir les servir aujourd'hui en plénière sur un sujet de cette importance, je trouve cela scandaleux.
En conclusion, il est clair et ferme que les Verts défendront cette subvention et ce contrat de prestations, et je vous invite à faire de même. (Applaudissements.)
M. Patrick Saudan (R). Mesdames et Messieurs les députés, le groupe radical ne soutiendra pas ce projet de loi en l'état. Je remercie M. Bavarel de m'avoir indiqué quelle était l'action de Pro Mente Sana, parce qu'en lisant le contrat de prestations, je ne l'avais pas très bien perçue.
En commission des affaires sociales déjà, le parti radical s'était abstenu, et cela pour deux raisons. D'abord, nous trouvions qu'il y avait un manque de lisibilité des indicateurs de l'action de Pro Mente Sana. En effet, si vous prenez le nombre de consultations - pour la plupart téléphoniques - vous arrivez à environ 900 consultations, d'une durée de moins de vingt minutes dans la grande majorité, ce qui fait quatre consultations par jour ouvrable. Nous avions donc beaucoup de peine à vraiment déterminer quel était l'apport de Pro Mente Sana.
La deuxième raison, qui a déjà été soulignée par la rapporteure de majorité, c'est le problème de la subvention qui est uniquement genevoise, alors qu'un tiers des consultations s'adresse à des patients qui résident en dehors de la Versoix. Du reste, la proposition qui avait été faite par le conseiller d'Etat François Longchamp de retirer le projet de loi et de négocier pour réduire la subvention à 180 000 F permettait de débloquer la situation, d'autant plus que Pro Mente Sana était d'accord avec cette solution. Pour l'ensemble de ces motifs, nous ne soutiendrons pas ce projet de loi en l'état.
Mme Anne-Marie Arx-Vernon von (PDC). Pour les démocrates-chrétiens, il paraît logique de défendre ce genre d'associations et de voter un budget qui correspond à une réalité. Ce budget répond aussi à des besoins qui sont en augmentation, alors que la subvention est restée la même. Je crois que c'est essentiel, puisque l'on a affaire à une population extrêmement fragile, et qui, malheureusement, ne va certainement pas diminuer.
Nous soutiendrons donc ce projet de loi et estimons que, oui, il y a de bonnes raisons de demander à d'autres cantons romands de participer. Oui, il y a de bonnes raisons de demander à Zurich éventuellement de contribuer, pourquoi pas ? Mais je ne pense pas que c'est en privant une association de la subvention dont elle a besoin maintenant que l'on va utiliser un principe de chantage. Il nous faut travailler étroitement, en disant que Genève est certes d'accord de continuer, mais qu'alors il est extrêmement important que les autres cantons romands prennent conscience du fait qu'ils doivent contribuer et participer. C'est tout à fait possible ! De nouveau, ce n'est pas un tabou d'insister, et je crois qu'il est essentiel de donner un signal fort et de montrer que le canton de Genève a l'intention de poursuivre son soutien à ce type d'associations.
Pour la petite histoire, Mesdames et Messieurs les députés, vous serez certainement rassurés de savoir que le trésorier est libéral, c'est une bonne nouvelle ! On peut donc estimer qu'il y a la plus grande rigueur. En conclusion, je vous remercie infiniment de bien vouloir voter ce projet de loi.
Mme Lydia Schneider Hausser (S). On parle de Pro Mente Sana, mais le vrai problème, comme de nombreuses études le montrent, c'est qu'environ 25% de la population, à Genève comme en Suisse, souffrent de troubles psychiques. Tout le monde n'est pas atteint d'une maladie chronique, mais beaucoup de gens connaissent, durant la vie, des périodes où ils sont victimes de problèmes psychiques. En Suisse, la proportion des personnes bénéficiaires d'une rente AI en raison d'une maladie psychique a passé de 20% en 1986 à 37% en 2005. Le rapport national sur la santé 2008 - qui est donc tout récent - réalisé par l'Observatoire suisse de la santé, met en exergue les deux affections les plus importantes en termes d'augmentation de cas: les maladies cardio-vasculaires et les problèmes de santé psychique. Autant les médecins et les travailleurs sociaux que, sauf erreur, la commission d'indication sur le handicap nous diront, avec des indicateurs différents, que la maladie psychique est un véritable défi en matière sanitaire, sociale et de santé pour les prochaines années. Plusieurs organismes internationaux l'affirment, y compris l'OMS.
Alors que nous avons sous la main un organisme qui pourrait servir d'observatoire régional, alors que nous avons une carte pour travailler au niveau intercantonal et romand sur ce problème, nous allons affaiblir Pro Mente Sana pour 25 000 F - comme l'a dit Mme von Arx-Vernon - et perdre ainsi une force de proposition dans un véritable enjeu de positionnement de la santé mentale à Genève, mais également dans les cantons voisins.
Que la présidence de Pro Mente Sana soit de droite ou de gauche, cela a été dit, peu importe ! Par chance, cette association est là pour donner des informations aux patients, mais aussi - même si cela ne nous plaît pas toujours - pour nous pousser, nous, politiques, législatif et exécutif, à construire et à améliorer un système de santé dans le domaine psychique, qui soit sans discrimination et sans stigmatisation.
Nous vous demandons un peu de patience. Pourquoi refuser un projet de loi pour 25 000 F, alors que même Pro Mente Sana et, je crois, le conseiller d'Etat Longchamp sont d'accord d'approcher les autres cantons pour voir la suite durant ce contrat de prestations ?
Trois millions de thésaurisation à Zurich, la belle affaire ! C'est sympa de le dire comme ça, hors contexte, mais peut-être que Zurich est un organe fédératif pour l'OFAS, peut-être qu'à la fin de l'année... On n'a pas d'information à ce sujet ! Sortir un chiffre comme ça, sans savoir dans quel contexte il est posé, c'est discréditant, cela signifie que les gens ont quelque part mal fait leur travail, non seulement au niveau associatif genevois mais aussi au niveau suisse.
Voilà, Mesdames et Messieurs les députés, nous ne pouvons que vous encourager à adopter ce projet de loi et à soutenir cette association qui travaille dans un domaine qui n'est pas simple tous les jours. (Applaudissements.)
M. Roger Deneys (S). Mesdames et Messieurs les députés, pour compléter les propos de ma collègue, j'aimerais relever le fait que Pro Mente Sana s'adresse à des personnes et des familles qui sont dans des situations difficiles, et je ne suis pas certain que de mesurer le nombre moyen de consultations téléphoniques par jour ouvrable soit vraiment significatif. Ce sont des problématiques extrêmement lourdes et pas drôles pour les personnes qui y sont confrontées, et il me semble très choquant de suggérer une baisse de subvention de 25 000 F, soit en gros 10%, sous prétexte que des prestations s'adressent à d'autres cantons. L'intention peut être louable, on pourrait envisager un financement intercantonal, mais faut-il le faire passer de cette façon, alors qu'on pourrait imaginer qu'il intervienne dans le contrat de prestations suivant ? Je trouve que c'est vraiment jouer un méchant tour à une association qui a en outre un rôle important de porte-parole des personnes victimes de troubles psychiatriques, d'autant qu'il est loin d'être évident de s'occuper de ces personnes.
Cela m'amène à une autre remarque: dans le préavis de la commission des affaires sociales figure en page 4 une déclaration des libéraux, selon lesquels cette association a créé des difficultés lors d'une audition à la commission des Droits de l'Homme. Alors permettez-moi, en tant que président de cette commission, de m'insurger contre ces propos, et j'espère que M. Selleger, s'il lève le nez de son ordinateur, m'écoutera et arrivera à convaincre ses collègues radicaux de ne pas voter cette baisse de subvention.
Pro Mente Sana joue un rôle extrêmement important et a orienté les travaux de notre commission des Droits de l'Homme lorsqu'il s'est agi de parler du respect des droits de l'Homme en milieu psychiatrique. Je trouve qu'il est extrêmement utile d'avoir un interlocuteur qui rencontre les patients se plaignant à tort ou à raison d'abus en termes de respect des droits de l'Homme à Genève et qui transmet ces doléances sous forme structurée et juridique. Même si cela déplaît à certains pontes à l'hôpital ou ailleurs, j'estime qu'il est très important de garantir cette possibilité d'expression. Du reste, je vois dans cette baisse de 25 000 F un début de censure. Et cela ne m'étonne pas, parce que lorsque j'ai entendu M. Cuendet tout à l'heure, cela m'a semblé bien clair: les associations, d'accord, mais à partir du moment où elles se la coincent, qu'elles font un certain boulot et qu'elles ne parlent de rien d'autre, et surtout pas de ce qui dérange les libéraux et la politique libérale !
Mesdames et Messieurs les députés, je vous invite à reconnaître la qualité du travail professionnel qu'accomplit cette association, et éventuellement à dire qu'il sera nécessaire d'ouvrir le financement vers d'autres cantons - le débat d'aujourd'hui en sera la preuve - mais il n'y a pas d'urgence à le faire sur ce contrat de prestations, et ce serait vraiment rendre un mauvais service aux victimes de troubles psychiatriques et à leur famille que de diminuer cette subvention. Je vous engage donc à la voter à son montant initial de 205 000 F.
M. Gilbert Catelain (UDC). Nous sommes au coeur du problème de ces projets LIAF, car nous devons nous prononcer sur une période quadriennale, ce qui n'est pas si naturel que cela, puisque nous allons finalement engager toute la prochaine législature et que le futur parlement qui sera élu cet automne n'aura plus son mot à dire sur les subventions allouées à ces associations. Et je n'ai encore jamais eu de réponse claire à la question de savoir si le prochain Grand Conseil pourra éventuellement, pour des raisons budgétaires toutes simples, réduire les montants qui seraient votés par ce Grand Conseil.
On peut reprocher au rapporteur de minorité d'avoir ciblé son rapport sur l'un ou l'autre point, notamment la rémunération d'un juriste qui n'a pas les mêmes responsabilités qu'un juriste de département par exemple, car il ne doit pas traiter des recours comme est amené à le faire régulièrement un juriste de département; c'est donc un élément dont on peut discuter. On peut aussi se poser la question de savoir pourquoi le Conseil d'Etat fribourgeois a pris la responsabilité de diminuer sensiblement les subventions de toutes les associations, alors que le canton de Fribourg n'a, à ma connaissance, quasiment pas de dettes, qu'il ne souffre en tout cas pas d'un endettement de 11 ou 13 milliards comme le canton de Genève et que, sauf erreur, il ne subventionne pas ce type d'associations. Il est quand même assez révélateur que, à Genève, il faille absolument subventionner, alors que, dans les autres cantons romands, même les socialistes n'ont pas jugé utile d'accorder une aide financière à ce genre d'associations. Il aurait peut-être été plus judicieux pour la majorité de gauche qui soutient ce projet de demander aux autres parlements cantonaux de déposer des projets de lois qui puissent permettre à cette association de bénéficier d'autres sources de financement cantonal.
Le deuxième point que j'aimerais relever par rapport à ces projets de lois LIAF - et là on doit quand même rendre hommage au Conseil d'Etat d'avoir négocié ces nombreux contrats de prestations - c'est le fait qu'on ait établi un certain nombre de critères qu'on ne retrouve pas dans le rapport, mais qu'on a vus en commission. Malheureusement, ces critères sont essentiellement quantitatifs et non qualitatifs. Nous n'avons donc aucune indication objective sur la qualité réelle du travail fourni par cette association, et lorsque, conformément à l'article 22 de la LIAF, le Conseil d'Etat devra rendre un rapport sur l'accomplissement de ce contrat de prestations, notre parlement ne pourra que constater que l'on a rempli des objectifs quantitatifs, mais il n'aura aucune indication quant à la qualité de la prestation fournie.
D'autre part, on s'aperçoit que cette association s'est développée avec le soutien de l'OFAS, mais qu'une fois que la machine a été lancée, l'OFAS a retiré ses billes. Et, finalement, il fallait bien un imbécile pour... (Remarque.) Mais bien sûr que oui ! ...pour reprendre le relais des financements, et, donc, le canton de Genève doit suppléer au déficit de subventionnement de l'OFAS. D'ailleurs, la tâche a été relativement simple pour le canton, puisque cette association bénéficiait déjà d'un contrat de prestations avec l'OFAS.
Concernant les prestations, j'ai été personnellement étonné que certains services que fournit cette association ne soient pas facturés. On sait que Pro Mente Sana dispense des cours, des prestations sous forme d'instruction dans des écoles - notamment sociales - et que cela n'est pas facturé. Ce n'est pas tout à fait normal, c'est une source de financement possible qui devrait être exploitée !
L'article 4 du contrat de prestations énumère les prestations attendues de la part du bénéficiaire de l'aide financière. Parmi ces dernières, on peut se poser la question de savoir si l'information et la sensibilisation telles qu'elles sont définies et qu'elles ont été décrites par mon collègue libéral - avec notamment cette menace de l'article 181 du code pénal - doivent être subventionnées par le Conseil d'Etat, ou si cette information devrait être faite par l'Etat lui-même. Je crois que, dans ce contrat de prestations, on a des tâches essentielles qui relèvent plus du devoir de l'Etat - elles pourraient notamment être confiées à la faculté de médecine - et qu'il n'est pas nécessaire de subventionner une association pour accomplir ces tâches. Concernant les conseils juridiques, il n'est pas forcément besoin de subventionner Pro Mente Sana, une association spécifique, pour fournir de tels conseils et, s'agissant des conseils psychosociaux, c'est finalement le rôle des médecins en psychologie de les donner, et pas nécessairement celui d'une association. On peut donc également remettre en cause l'article 4, l'essence même de ce contrat de prestations.
En commission des affaires sociales, les commissaires UDC s'étaient sauf erreur abstenus par rapport à ces différents éléments. Concernant le projet de loi qui nous occupe ce soir, s'il y a un motif pour lequel s'abstenir ou refuser ce texte, c'est bien cet engagement sur quatre ans, dans une situation budgétaire qui sera très critique à partir de 2010, et nous le savons. Nous ne devrions donc pas engager le prochain Grand Conseil, dont la responsabilité majeure est de voter un budget, en lui liant les mains ce soir.
Mme Elisabeth Chatelain (S), rapporteuse de majorité. Mesdames et Messieurs les députés, je suis un peu atterrée d'entendre autant de remarques allant dans un sens très négatif pour cette association. Cette dernière accomplit un travail qui est unanimement reconnu, le conseiller d'Etat l'avait d'ailleurs relevé en commission.
Monsieur Catelain, vous parlez de contrats de prestations qui nous engagent sur quatre ans. C'est vrai ! C'est le cas pour celui-là comme pour beaucoup d'autres, dont certains qui portent sur des montants tout à fait différents. Je rappellerai simplement l'exemple qu'a cité tout à l'heure M. Losio concernant le prochain contrat de prestations que l'on va voter pour le stade - contrat de quatre ans lui aussi - qui est de l'ordre de presque 8 millions. Je crois qu'il sera intéressant de voir quel sera votre vote à ce moment-là !
L'OFAS finance l'association Pro Mente Sana par le biais de la fondation zurichoise, et cet organe n'a pas du tout l'intention de diminuer son subventionnement; il considère également que ces deux associations font un travail indispensable.
Vous avez évoqué le fait que les prestations fournies par Pro Mente Sana sont essentielles, très importantes, bien faites, etc., et vous avez ajouté qu'elles devraient peut-être même être intégrées dans le giron de l'Etat. C'est une réflexion intéressante, surtout lorsqu'on entend vos discussions sur le montant des salaires qui vous semblent toujours trop élevés, bien qu'ils soient moins hauts que ceux de l'Etat, puisqu'ils n'ont pas toutes les indexations, le treizième salaire, etc. Je crois donc que s'il faut étatiser ce genre de prestations, on ne peut pas simplement les fondre dans l'existant, puisqu'il s'agit d'un travail très spécifique: il concerne une population précarisée, souvent stigmatisée, et qui demande une aide particulière.
J'aimerais également revenir sur l'intervention de mon collègue radical, qui sous-entendait que les prestations de cette association étaient en réalité maigres, puisqu'elles équivalaient seulement à quatre consultations téléphoniques par jour. J'aimerais lui rappeler - puisqu'il n'a vraisemblablement pas eu le temps de lire le projet de loi rédigé par le Conseil d'Etat - qu'outre les prestations téléphoniques, qui sont réparties pour deux tiers à Genève et un tiers dans les autres cantons, de nombreux autres services sont fournis, et ceux-ci essentiellement sur le canton de Genève. Tout ce qui concerne l'activité d'information et de sensibilisation, la rédaction de brochures et de lettres trimestrielles ou encore le site internet peut être utilisé sur l'ensemble de la Suisse romande; en revanche, il en va autrement de la participation à des commissions - par exemple la commission de surveillance des professions de la santé et des droits des patients - aux commissions de politique sociale - celle d'AGILE Entraide Suisse Handicap - ou encore à la Conférence des organisations faîtières de l'aide privée aux personnes handicapées et de l'entraide.
De plus, l'association Pro Mente Sana soutient les mouvements d'entraide de Genève et constitue une ressource pour nombre d'entre eux sur le plan logistique ou de la coordination. Pro Mente Sana, qui a aussi la mission de promouvoir des projets spécifiques propres à favoriser l'intégration de ces personnes, a en outre mis sur pied différentes réunions, dont une réunion mensuelle destinée à l'échange entre les patients, les proches et les soignants. Par conséquent, cette association ne fait pas que répondre à quelques téléphones dans la journée, comme cela a été sous-entendu par mon collègue radical.
Par ailleurs, l'association, comme n'importe quelle autre à qui l'on annonce: «Nous vous donnons 25 000 F de moins; arriverez-vous à vous en sortir ?», dira déjà merci pour ces 180 000 F - au lieu de 205 000 - puis s'adaptera, en ajustant ses prestations en fonction des moyens qu'on lui allouera. Elle cherchera également des dons à l'extérieur, mais il faut quand même relever que ce genre d'associations n'attire pas énormément de dons. Il est en effet beaucoup plus facile d'offrir un soutien à une association qui, par exemple, comme Le Copain, aide à la formation de chiens pour soutenir les personnes qui en ont besoin. C'est plus joli ! Le Copain, de même qu'Hôpiclowns, par exemple, que je respecte également, sont des associations à qui il est facile de donner; il n'y a pas d'implication compliquée, ce ne sont pas des structures qui traitent de sujets difficiles, tandis que Pro Mente Sana s'occupe d'une problématique très délicate, comme je l'ai dit tout à l'heure. Je crois que le droit des patients est important, cette association les soutient, et ces derniers en ont vraiment besoin.
En conclusion, il est essentiel de relever que, dans la mesure où cette association s'occupe d'une population déjà précarisée, et souvent stigmatisée, procéder à une baisse de 25 000 F serait vraiment dommageable pour le message que nous voulons faire passer à l'égard de cette population. Pour l'ensemble de ces raisons, je vous remercie de bien vouloir voter ce projet de loi avec le montant prévu de 205 000 F.
M. Eric Bertinat (UDC), rapporteur de minorité. Permettez-moi de revenir sur une remarque assez intéressante de mon collègue Bavarel, selon lequel, finalement, on consacre beaucoup de temps pour un montant de 205 000 F ! En effet, si l'on pense au préavis de la commission des affaires sociales, qui a bien dû nécessiter une heure ou deux, puis au temps pris par son rapporteur, que l'on considère ensuite le temps pris par la commission des finances, puis par son rapporteur, et que l'on ajoute enfin la grosse heure que nous venons de consacrer à ce sujet, il ne m'étonnerait pas que le montant engendré par tout ce travail soit même plus élevé que l'aide financière qui est discutée aujourd'hui !
Cela m'amène à la remarque suivante: les petits ruisseaux font les grandes rivières, et nombreux sont dans notre république les petits ruisseaux. Il est donc logique et même sérieux que nous puissions nous pencher sur toutes ces demandes qui nous sont faites en prenant notre temps. Pour moi... (Brouhaha.) ...si Mme Keller me laisse parler, ce qui serait sympa... Merci ! Pour moi, le problème de Pro Mente Sana réside tout de même dans cette association romande. Le Grand Conseil a revu la subvention accordée au Centre intercantonal d'information sur les croyances, parce que le centre lui-même a admis que les prestations apportées aux autres cantons méritaient de la part de ces derniers une contribution financière. Cela a été fait, nous avons diminué l'aide allouée à cette association, et depuis lors nous n'avons pas entendu spécialement de plaintes de sa part ou appris qu'elle connaissait des difficultés. C'est une démarche que je trouve tout à fait logique, et c'est pourquoi je vous demande d'accepter l'amendement qui vous est proposé, afin de baisser l'aide financière de Pro Mente Sana et qu'elle se tourne par conséquent vers ces cantons qui la sollicitent de manière quand même relativement importante.
M. François Longchamp, conseiller d'Etat. L'essentiel des groupes politiques l'ont dit, la commission des affaires sociales l'a indiqué et la commission des finances ne l'a pas contesté, les activités de Pro Mente Sana sont nécessaires. Et s'il n'y avait qu'une seule raison pour les justifier, ce serait le souvenir des crises que la psychiatrie genevoise a connues dans des épisodes récents de son histoire. Il y a une nécessité d'être toujours vigilants et d'avoir des structures qui alertent des éventuelles dérives auxquelles la psychiatrie est confrontée à toutes les époques de son existence.
La commission des affaires sociales a constaté dans le cadre de ses auditions, après un examen attentif, que des activités de Pro Mente Sana s'exprimaient sur le territoire d'autres cantons et que certaines prestations pourraient probablement être financées par d'autres structures. Elle a confié à la commission des finances le soin de déterminer le montant financier nécessaire pour cette association. Or, entre le moment où la commission des affaires sociales a examiné ce projet et celui où la commission des finances l'a porté à son ordre du jour, j'ai eu quelques contacts avec les responsables de cette structure, notamment son trésorier. Il a été convenu que cette subvention pouvait probablement être adaptée en tenant compte des observations qui avaient été faites lors de l'audition devant la commission sans affaiblir Pro Mente Sana.
C'est la raison pour laquelle, avec l'accord de l'association, il nous a semblé préférable de réduire la subvention de cette dernière de 205 000 à 180 000 F. Cela ferait du reste passer la subvention sous la barre de la somme impliquant qu'un projet de loi soit étudié par la commission des finances. Cela permettrait de régler plus aisément la question de Pro Mente Sana, par le biais d'un simple arrêté du Conseil d'Etat. Néanmoins, cette décision vous appartient.
Monsieur Catelain, vous avez soulevé la question du lien et de l'obligation quatre ans durant découlant de ce contrat de prestations. J'aimerais ici vous rappeler qu'à l'article 5 de ce contrat - et de tous les autres - il est indiqué que c'est le budget que le Grand Conseil vote chaque année qui fait foi. Dans toute hypothèse, cette subvention - comme n'importe quelle autre - pourra être revue à la baisse, à la hausse ou à la stabilisation durant chaque exercice budgétaire.
Je vous invite donc à voter ce projet de loi, car je crois qu'il faut donner à nos concitoyennes et concitoyens un signal de soutien aux activités de Pro Mente Sana. Ensuite, je vous laisse juges, mais j'aimerais vous dire mon étonnement, notamment à l'endroit des membres de la commission des finances, à qui l'on a proposé - pour une fois ! - une réduction modeste de subvention, avec l'accord de ladite structure et sans que cela la mette en péril, et qui ont refusé cette baisse de subvention. Cela peut paraître surprenant aux yeux du Conseil d'Etat; néanmoins, celui-ci se rangera à votre sagesse. Alors que le projet d'origine prévoyait 205 000 F, 180 000 F pourraient faire l'affaire pour les raisons indiquées. En tout état, il est important que vous donniez le signal que les activités de l'association Pro Mente Sana méritent d'être soutenues.
Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Nous allons maintenant voter la prise en considération de ce PL 10287.
Mis aux voix, le projet de loi 10287 est adopté en premier débat par 51 oui contre 25 non et 3 abstentions.
Deuxième débat
Le président. Concernant le titre et le préambule, nous sommes saisis d'un amendement de M. Cuendet, qui vise à faire passer le montant de l'aide financière annuelle de 205 000 F à 180 000 F.
M. Edouard Cuendet (L). Dans mon intervention précédente, j'ai indiqué qu'il me paraissait invraisemblable que la commission des finances refuse un amendement présenté par le Conseil d'Etat, avec l'accord de l'association concernée, et le conseiller d'Etat Longchamp a répété exactement la même chose il y a deux minutes. Je ne comprendrais pas l'obstination du Grand Conseil à refuser cet amendement que je dépose déjà au niveau du titre et qui vise à réduire la subvention de 205 000 à 180 000 F. Je vous remercie donc de bien vouloir l'accepter !
M. Christian Bavarel (Ve). J'ai moi aussi écouté les propos de M. le conseiller d'Etat Longchamp: il n'a pas dit qu'il souhaitait cette baisse mais que, si elle devait intervenir, il préférait qu'il y ait une subvention de ce montant plutôt qu'il n'y en ait pas. Et je comprends bien la position qu'il adopte en tant que conseiller d'Etat. Mais nous sommes en train de faire des calculs d'épicerie, alors qu'il s'agit d'un sujet qui me semble important ! Si le message politique que vous voulez donner, c'est de chipoter sur des bouts de somme, de voir si c'est plutôt 180 000 ou 205 000 F, de réfléchir à la façon dont on va pouvoir faire et à la question de savoir si, par hasard, l'avocat qui travaille dans une structure de ce type doit être plus ou moins payé... Ça n'a pas de sens ! Vous êtes en train de chipoter pour continuer à montrer votre mauvaise humeur ! Nous trouvons cela très désagréable et refuserons votre amendement.
M. Alberto Velasco (S). Effectivement, le conseiller d'Etat en question nous invite à voter cet amendement, mais je dois dire qu'il est quand même un peu misérable de couper 25 000 F à cette association ! C'est ça, le fond du problème ! La question n'est pas de savoir si l'on peut couper ou pas ! Je trouve cela misérable.
M. Bertinat parlait tout à l'heure du fait que nous passions une ou deux heures ici à traiter de ce projet de loi et du coût engendré par notre présence ici. Un simple calcul - 100 députés multipliés par 160 F la séance, à quoi s'ajoutent les séances de commission et les rapports - nous permet de constater que l'on arrive facilement, voire que l'on dépasse largement cette somme de 25 000 F ! Donc la question ici, Mesdames et Messieurs les députés, est totalement idéologique.
D'autre part, M. Bertinat a rappelé ce qui s'était passé avec le Centre intercantonal d'information sur les croyances: vous aviez refusé la subvention ! C'était non ! Vous n'aviez pas réduit cette aide de 25 000 F, vous en aviez refusé la totalité ! Et il a fallu que mon groupe notamment se bagarre, que l'on agisse et que certaines personnalités - radicales et libérales - viennent en commission des finances pour vous démontrer le bien-fondé de cette association. Et c'est là que nous étions revenus et cela a été une porte de sortie qui a sauvé l'apparence de tout le monde.
Ce que je veux dire par là, c'est qu'il ne faut pas jouer au petit jeu auquel on s'adonne ici, parce qu'en réalité que fait-on ? Comme on ne peut pas couper cette subvention, on la réduit de 25 000 F. Et pourquoi cela ? Pour donner l'exemple, l'exemple d'une rigueur, mais ce n'est pas nécessaire, puisque l'association a démontré que sa gestion était rigoureuse.
Mesdames et Messieurs les députés, ce à quoi on assiste ce soir dans ce Grand Conseil est simplement misérable ! Il faut plutôt s'attacher au bien-fondé de cette association et au travail qu'elle accomplit, qui est estimable.
Le président. Merci, Monsieur le député. Le Bureau décide de clore la liste. Doivent encore prendre la parole MM. Weiss, Stauffer, Charbonnier et Bonny, ainsi que Mme Chatelain. Je vous rappelle que nous devons finir ce débat ce soir, sinon nous serons obligés de reprendre l'étude de ce projet de loi demain à 17h. A vous d'être brefs !
M. Pierre Weiss (L). Je pense qu'il faut rester digne dans ce débat et que nous nous devons, par égard pour les personnes concernées par cette association, de conserver un ton serein. Nous sommes saisis ici d'un projet de loi concernant une aide financière, et lorsque j'entends les termes «chipoter» et «misérable» à propos de ces 25 000 F, je me dis que ceux qui les prononcent sont irresponsables, parce qu'il y a un moment où l'argent qui est celui de l'ensemble des contribuables de ce canton n'est objet ni de chipotage ni de misérabilisme: il est objet de respect. Et par respect pour les contribuables, on ne doit pas jeter de l'argent, alors que l'association elle-même ne demande pas ces 25 000 F. Il y a une certaine indécence de la part de quelques-uns de nos collègues à considérer que les 25 000 F en question peuvent être distribués comme ça, alors qu'ils ne sont plus demandés. J'aimerais dire que cela s'appelle tout simplement «claquer du fric». Je félicite ces députés de notre Grand Conseil pour leur haute conception du respect qui est dû à la population de ce canton. (Commentaires.)
M. Eric Stauffer (MCG). Le MCG ne voulait pas intervenir afin de ne pas rallonger les débats, vous avez donc pu constater que nous n'avons pas pris la parole jusqu'à maintenant. Nous sommes en faveur de ce projet de loi et opposés à cet amendement, mais je m'offusque de ce que je viens d'entendre de la part de quelqu'un qui travaille pour la fonction publique, ne l'oublions pas. En effet, vous déclarez que nous sommes irresponsables parce que nous disons que l'on chipote pour 25 000 F, mais j'aimerais vous rappeler, Monsieur le député - Monsieur le président, vous lui transmettrez ! - que lorsqu'il s'agissait de gérer la Banque cantonale de Genève, ce sont 2,1 milliards que vous avez fait peser sur le contribuable, et pourtant là on ne vous entend pas ! Des éminents membres de votre parti défendent ceux qui ont plombé les finances publiques et, là, il y a un scandale, alors ce ne sont pas 25 000 F pour ces pauvres handicapés... J'en donnerais 200 000 s'il le faut, si je pouvais améliorer ne serait-ce que durant une semaine leur bien-être et leur qualité de vie, tant ces gens ont été frappés par la disgrâce. Et vous n'avez pas le droit, Messieurs les députés libéraux, faut-il le rappeler... (Brouhaha. Le président agite la cloche.) ...d'agir ainsi dans ce parlement. C'est véritablement un scandale et c'est un déni démocratique que vous êtes en train de pratiquer ! En effet, vous voulez réaliser des économies partout où cela vous arrange, mais lorsque vous commettez des erreurs, il n'y a plus personne, tout le monde est aux abonnés absents ! J'en ai terminé, et nous soutiendrons sans condition ce projet de loi.
M. Alain Charbonnier (S). Monsieur le président, pouvez-vous transmettre à M. Weiss ce qui suit: lorsque mon collègue Velasco parle de chipoter sur 25 000 F - M. Weiss le sait très bien, mais je vais quand même le dire un peu plus clairement - c'est par rapport aux 7 milliards de budget de l'Etat de Genève ! Ce n'est pas chipoter par rapport à l'association ! En effet, celle-ci a besoin de ces 25 000 F, même si elle a fait dire par la bouche de M. Longchamp qu'elle était d'accord de faire avec les 180 000 F. Evidemment ! Comme je l'ai dit tout à l'heure, lorsque vous avez le couteau sous la gorge, un revolver sur la tempe et que l'on vous fait du chantage, vous dites: «Oui, bien sûr, on fera avec, on ira chercher des dons.» Je ne sais pas exactement comment ils se sont expliqués, parce qu'en plus on ne les a pas auditionnés pour savoir comment ils allaient faire. Et vous qui êtes très à cheval sur les budgets, qui voulez savoir comment les gens vont fonctionner, si les prestations ne vont pas être diminuées - comme je l'ai entendu hier à la commission des finances - là, tout à coup, vous dites: «Allez, on enlève 25 000 F, pas de problème, ils feront avec !» Alors s'il y a une diminution des prestations, Monsieur Weiss, il ne faudra pas s'en plaindre par la suite.
J'aimerais ajouter quelque chose, même si je ne voulais pas le dire à la base: lorsque je vois MM. Bertinat et Catelain s'en prendre comme ça à Pro Mente Sana, j'ai quand même un petit doute. En effet, leur cible précédente était le Centre intercantonal d'information sur les croyances - M. Bertinat s'en glorifie d'ailleurs - or, qui était la première secrétaire générale du CIC ? Et qui est l'actuelle secrétaire générale de Pro Mente Sana ? C'est la même personne ! Alors s'il n'y a pas là derrière une attaque personnelle, j'ai de gros doutes ! (Applaudissements.)
M. Didier Bonny (PDC). Je vais vous révéler un scoop: le PDC est irresponsable ! (Exclamations.) En effet, il trouve que...
Une voix. Ce n'est pas un scoop ! (Rires.)
M. Didier Bonny. ...il trouve que diminuer cette subvention de 25 000 F, c'est chipoter, c'est misérable, et il ajoutera même qu'il juge cela totalement mesquin. Les buts poursuivis par cette association méritent d'être soutenus à raison de la somme prévue dans le contrat de prestations, et le PDC refusera donc cet amendement. (Applaudissements.)
Des voix. Bravo !
Mme Elisabeth Chatelain (S), rapporteuse de majorité. M. Longchamp l'a rappelé, c'est le budget qui définit les montants qui seront attribués aux différentes associations, fondations et autres. Tel que nous l'avons accepté, le budget de cette année prévoit 205 000 F pour Pro Mente Sana, et il n'a pas été amendé sur ce point. Nous devons tous du respect au contribuable, respect cher à M. Weiss... Or j'aimerais lui rappeler que, dans ce même budget, il a demandé 4 millions pour l'université, 4 millions qui d'ailleurs n'avaient pas été réclamés. Je précise en outre que 25 000 F multipliés par quatre ans, cela fait 100 000 F, soit ce qu'on estime être environ le coût d'un poste pour une année - et pas un poste de cadre. Je crois donc que cet amendement n'a aucun sens et je vous demande instamment de le refuser.
Le président. Merci, Madame la députée. Nous allons donc voter sur cet amendement, qui demande de faire passer l'aide financière annuelle accordée à Pro Mente Sana de 205 000 F à 180 000 F.
Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 47 non contre 32 oui et 2 abstentions.
Mis aux voix, le titre et le préambule sont adoptés, de même que l'article 1.
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, étant donné que vous avez refusé l'amendement modifiant le montant de l'aide dans le titre, je ne mets pas aux voix celui qui demande cette même modification à l'article 2.
Mis aux voix, l'article 2 est adopté, de même que les articles 3 à 10.
Troisième débat
Le président. Le troisième débat est-il demandé ? Oui, il l'est.
Une voix. Je demande l'appel nominal !
Le président. Etes-vous soutenu ? (De nombreuses mains se lèvent.) Oui, largement !
La loi 10287 est adoptée article par article en troisième débat.
Mise aux voix à l'appel nominal, la loi 10287 est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 50 oui contre 28 non et 4 abstentions.