République et canton de Genève
Grand Conseil
Séance du jeudi 18 septembre 2008 à 20h30
56e législature - 3e année - 11e session - 63e séance
PL 10253-A
Premier débat
La présidente. Nous sommes au point 128, demandé en urgence par le Conseil d'Etat.
Mesdames et Messieurs les députés, je vous prie d'être attentifs, parce que ce projet de loi est extrêmement technique et que de nombreux amendements ont été déposés. Tel qu'il a été décidé avec les chefs de groupe, chaque groupe pourra - ainsi que les rapporteurs - s'exprimer dix minutes sur la prise en considération de ce projet de loi. Ensuite, le temps sera limité à cinq minutes pour chaque amendement.
M. Olivier Jornot (L), rapporteur de majorité. Madame la présidente, Mesdames et Messieurs les députés, les douze coups de minuit avaient commencé à sonner - vous savez, les douze coups de minuit de Cendrillon - lorsque le Conseil d'Etat a déposé en mai dernier son projet de loi modifiant la loi sur l'organisation judiciaire. Oui, les douze coups, parce que cette réforme de la juridiction administrative genevoise doit impérativement entrer en vigueur le 1er janvier 2009, c'est le droit fédéral qui l'impose. Alors vous avez décidé, par voie de résolution, de créer une commission ad hoc, que l'on a intitulée «Justice 2010», pour évoquer les différentes réformes fédérales qui concernent non seulement le droit administratif, mais aussi le droit pénal et civil. Cette commission s'est donc mise à l'ouvrage et a réalisé un travail remarquable, je dois dire, en très peu de temps. Je rends d'ailleurs ici hommage une fois de plus à mes collègues; une fois de plus, parce que je l'avais déjà clairement exprimé dans mon rapport écrit.
De quoi s'agit-il ? Quelles sont les exigences du droit fédéral ? Il s'agit de deux points que nous imposent la Constitution fédérale et la loi sur le Tribunal fédéral: d'abord, d'une extension des droits du justiciable, qui doit pouvoir soumettre à un tribunal toutes les contestations en matière de droit public. Or, aujourd'hui, dans un certain nombre de domaines, nos lois restreignent la possibilité pour les justiciables de recourir. Dans ce domaine-là, un certain nombre d'arbitrages doivent être faits, et ils l'ont été de manière très restrictive, je dirais, par le Conseil d'Etat, qui a voulu donner la possibilité au justiciable de recourir autant que possible et fixer un minimum d'exceptions. Néanmoins, quelques exceptions supplémentaires sont venues s'ajouter au cours des travaux de la commission, et nous aurons l'occasion d'en débattre. Mais ce point, à vrai dire, n'est guère controversé.
Le deuxième point qui découle du droit fédéral, c'est l'obligation pour les cantons d'instituer des tribunaux supérieurs qui tranchent les contentieux de droit public. Et là, le Conseil d'Etat a logiquement proposé dans son projet de supprimer un certain nombre de commissions de recours un peu particulières qui subsistaient à Genève, contre lesquelles il n'y avait pas de recours cantonal. Les commissions en matière de personnel de police et de l'instruction publique ou encore la commission de recours de l'université sont donc supprimées et leur contentieux repris par le Tribunal administratif.
La commission Justice 2010 a éprouvé le sentiment, en procédant aux auditions qui ont précédé ses travaux, que l'on s'était en quelque sorte arrêté non pas à mi-chemin, mais pas très loin. En effet, de nombreux auditionnés, qu'ils proviennent du pouvoir judiciaire ou de milieux spécifiques, ont regretté qu'on ne profite pas de cette réforme pour remettre à plat l'organisation judiciaire dans le domaine administratif et pour mettre de l'ordre - je crois qu'on peut le dire - dans le foisonnement des différentes commissions de recours que notre canton a construites comme des strates au fur et à mesure de son histoire. La commission s'est donc dit qu'il y avait peut-être là un travail à poursuivre, et c'est la raison pour laquelle le projet tel qu'il vous revient comprend non seulement les deux premiers grands chapitres que j'ai évoqués, mais également un troisième chapitre visant à fusionner diverses commissions de recours et à créer une commission cantonale de recours en matière administrative - CCRA.
Le but de cette réforme, Mesdames et Messieurs, chers collègues, n'est pas de faire de l'esthétique, ni de faire en sorte d'uniformiser à tout prix. Parce que c'est vrai que cela a un certain charme d'avoir ces commissions qui sont toutes composées différemment - certaines ont des politiques, d'autres pas; certaines ont des juges professionnels, d'autres pas; certaines sont à jour, d'autres ont des années de retard. Il y a un certain charme à cela, mais la commission a estimé que ce charme devait céder le pas à l'efficacité, que les citoyens de ce canton avaient droit à une justice rapide, efficace, et qu'ils avaient aussi le droit, lorsqu'ils sont en contentieux avec l'Etat - parce que c'est de cela qu'il s'agit, lorsqu'on parle de droit administratif - de recevoir rapidement une réponse s'ils ne sont pas d'accord avec les décisions prises.
Le but, évidemment - je l'ai dit - est d'accroître l'efficacité, de faire en sorte que l'on se calque sur les commissions qui fonctionnent le mieux et qu'on ne ralentisse pas le système mais que, au contraire, on accélère le tout. Ce sont des domaines - je pense en particulier à celui des constructions - dans lesquels nous savons tous à quel point il est nécessaire que les décisions soient rendues rapidement, afin que des projets ne soient pas bloqués.
Voilà, Mesdames et Messieurs, en quelques mots, ce que je peux vous dire de cette réforme. J'ai la conviction, au terme des travaux de la commission, que vous êtes saisis d'un projet qui aura pour effet, lorsqu'il sera mis en oeuvre - et ce sera à brève échéance, soit au 1er janvier prochain - d'améliorer la vie des citoyens de ce canton.
Alors pourquoi, dans ce cas-là, sommes-nous confrontés à un rapport de minorité ? Le rapporteur nous expliquera sans doute les diverses raisons psychologico-politiques qui l'ont conduit à vous présenter un rapport de minorité. J'aimerais quant à moi vous dire un mot, non pas des compliments qu'il a adressés au groupe libéral pour avoir fourni de nombreuses propositions au cours des travaux de commission, mais de la substance de ce rapport, plus exactement de la proposition qu'il contient en matière de demi-charges.
Vous savez qu'aujourd'hui nous avons un système compliqué - je le reconnais - voire opaque - je le reconnais également - en matière de demi-charges. La loi dit clairement que de nombreuses juridictions peuvent accueillir des postes dédoublés en deux demi-charges. Au Tribunal de première instance, le Grand Conseil a voulu il y a quelques années que cela soit différent et que le nombre des postes divisés soit fixé dans la loi. On peut le regretter, on peut changer - j'en suis convaincu - un beau jour ce système, le réformer dans le sens de plus de souplesse, mais il y a une chose qui est certaine, c'est que si l'on veut tuer toute évolution en la matière, il faut de but en blanc déclarer que tous les postes sont divisés par deux; c'est ce que nous propose le rapport de minorité, et nous aurons très certainement l'occasion d'en débattre par la suite ce soir.
J'aimerais aussi vous dire deux mots d'un lot d'amendements, important, déposé par le Conseil d'Etat. Ce dernier a déposé plusieurs amendements qui sont, je dirais, d'une densité normative diverse, d'une importance qui n'est pas toujours égale, mais nous allons évidemment tous les étudier ce soir. Et il y a un groupe d'amendements dont j'aimerais d'emblée vous dire que le rapporteur de majorité s'y rallie, ce sont ceux qui visent à modifier le mode de désignation des juges assesseurs de la commission cantonale de recours en matière administrative. La commission avait, sur conseil des experts, privilégié une désignation par le Conseil d'Etat, or ce dernier, avec magnanimité, restitue cette compétence au peuple, voire au Grand Conseil, entre les élections judiciaires, dans le sens d'un plus grand respect de la constitution cantonale. Il est évident qu'il s'agit d'une proposition qu'il conviendra donc d'accepter tout à l'heure.
Voilà, Mesdames et Messieurs, ce que je souhaitais vous dire d'entrée de cause, avant de revenir, le cas échéant, dans le détail du débat par la suite.
M. Eric Stauffer (MCG), rapporteur de minorité. Chers collègues, chers députés, cher Maître Olivier Jornot, je n'aurai certainement pas votre prestance dans le domaine juridique, car ce n'est pas mon métier; nous tous, autour de cette table, sommes des parlementaires de milice et nous venons d'horizons très différents.
D'emblée, il sied de préciser que le Mouvement Citoyens Genevois ne s'oppose pas à la loi modifiant l'organisation judiciaire. Cependant, dû principalement au fait que notre Grand Conseil a voulu, pour des raisons politiciennes, limiter le temps de parole de ses députés à trois minutes par groupe parlementaire, il ne nous paraît pas concevable qu'un projet de loi d'une telle importance ne puisse pas être débattu de manière sérieuse en séance plénière du parlement. Le seul moyen qu'il restait au groupe parlementaire qui représente la minorité était de briguer un rapport qui donne comme résultante que le temps de parole à disposition du rapporteur n'est, lui, pas limité.
Si, majoritairement, le MCG adhère aux modifications proposées par le présent projet de loi sur l'organisation judiciaire, il n'en demeure pas moins qu'il nous apparaît comme nécessaire d'y apporter certaines améliorations. L'argument principal qui nous a poussés à rédiger ce rapport de minorité réside dans ce qu'il y a quelque chose de «malsain», Monsieur le rapporteur de majorité, dans le système, qu'il faut impérativement abolir afin que la séparation des pouvoirs soit réellement effective dans les faits et pas seulement pour faire bien sur le papier.
Monsieur le rapporteur de majorité, vous avez prononcé un superbe discours qui était réservé à des initiés, parce que les citoyens moyens comme nous n'ont rien compris à ce que vous avez dit préalablement. (Protestations.) Je vais donc essayer de simplifier ces propos afin de rendre compréhensible une réforme aussi importante sur le pouvoir judiciaire. (Remarque.) Merci, chers collègue !
Par ailleurs, il est important de préciser que les députés siégeant au Grand Conseil de la République et canton de Genève sont des députés de milice - c'est justement ce que j'expliquais - c'est-à-dire que nous ne sommes pas des professionnels de la politique, et encore moins des docteurs en droit. Telle a été la volonté du législateur pour constituer ce qui représente notre parlement.
Cependant, certains groupes parlementaires ont délégué dans cette commission ad hoc Justice 2010 des députés qui sont avocats au barreau de Genève. C'est dire si l'emprise de ces derniers a été forte dans le cadre des travaux de commission ! Et finalement, dans le projet de loi qui vous est présenté aujourd'hui, c'est sans nul doute l'emprise libérale qui a prédominé, à bon escient la plupart du temps. Nous le reconnaissons, mais vous êtes un professionnel en la matière, Monsieur le rapporteur de majorité ! Néanmoins, dans d'autres cas, le bon sens n'a pas été l'apanage du commissaire libéral, ce qui pose plusieurs problèmes quant à la pertinence de certains amendements proposés.
Une voix. Tu vas lire tout ton rapport ou quoi ?
M. Eric Stauffer. Mais, écoutez, c'est mon choix ! Je suis le rapporteur de minorité, donc je vous prie simplement de respecter mon temps de parole. Je vous en remercie par avance, chers collègues !
Lors des travaux en commission parlementaire sur le présent projet de loi, les commissaires, c'est-à-dire les députés de milice que nous sommes, étant exclus les professionnels du barreau genevois que vous représentez, se sont affairés à introduire l'empreinte du bon sens dans cet important projet de loi qui va réformer l'ensemble du pouvoir judiciaire.
Le modeste rapporteur de minorité que je représente ici vous fera grâce des «charabias juridico-techniques» qui ont fait rage dans cette commission. Lorsqu'un commissaire posait par malheur une question sur un article de loi bien précis et que le professionnel du barreau et les juristes de l'Etat avaient fini de répondre, un autre commissaire milicien disait alors: «Mais quelle était donc la question ?»
Il va sans dire que la perspicacité des uns et des autres a tout de même fini par mettre en lumière certains dysfonctionnements majeurs, notamment à l'article 14 ! Et nous y arrivons, Monsieur le rapporteur de majorité, puisque vous avez eu la gentillesse de faire le préambule de mon rapport de minorité et de parler de ce qui nous a poussés à briguer ce rapport.
De quoi s'agit-il ? Le Tribunal de première instance est composé de 25 juges. Et le Mouvement Citoyens Genevois est très attaché aux principes égalitaires entre hommes et femmes, pas seulement dans les belles paroles, mais surtout dans les faits concrets. (Brouhaha.) Ecoutez, si ce rapport ne vous intéresse pas...
M. Olivier Jornot. Mais je l'ai déjà lu, Monsieur le député ! Je n'ai pas besoin de l'entendre à nouveau !
M. Eric Stauffer. Ah, vous l'avez lu ! C'est bien ! Mais alors soyez respectueux des citoyens qui nous regardent et qui n'ont rien compris à votre charabia juridico-technique ! Je continue.
Nous le savons, vous le savez, lorsqu'une femme a le bonheur de mettre un enfant au monde, la première voire la deuxième année, c'est le parcours du combattant entre la crèche, les mamans de jour, les activités professionnelles et la vie familiale. C'est pourquoi il est important que les femmes ne perdent pas le contact avec le monde professionnel durant cette période clé qu'est l'après-maternité. Pour cette raison, il nous paraît indispensable de laisser toute latitude au pouvoir judiciaire de se déterminer sur le nombre de postes de juge qui devraient être dédoublés en postes à mi-temps, afin de permettre aux femmes de rester en contact avec le monde professionnel et de concilier vie familiale et professionnelle. Le point est là, Monsieur le rapporteur de majorité, Mesdames et Messieurs les députés ! Parce que vous avez voulu limiter dans la loi le dédoublement en postes à mi-temps à deux postes sur vingt-sept - vous avez en effet rédigé un amendement visant à augmenter de deux juges le Tribunal de première instance, qui en comprenait vingt-cinq. Je fais partie de la commission intitulée SPPE - Service pour la promotion de l'égalité entre homme et femme - et cette dernière s'est offusquée de cette limitation volontaire; c'est à croire que le pouvoir judiciaire n'aime pas les femmes comme magistrates ! Eh bien, nous, au Mouvement Citoyens Genevois, Monsieur le député libéral, nous avons décidé de soutenir les femmes, pour qu'elles ne perdent pas le contact avec leurs activités professionnelles lorsqu'elles ont eu le bonheur de mettre un enfant au monde.
Alors qui a proposé quoi ? Actuellement, le texte de l'article 14, alinéa 1, de la loi sur l'organisation judiciaire est le suivant:
«Le Tribunal de première instance se compose de 25 juges, dont 1 président et 1 vice-président, ainsi que de 18 juges suppléants. Sur les 25 postes de juge, 2 sont dédoublés en postes à mi-temps.»
Le commissaire libéral - le professionnel du barreau - conscient de la surcharge de travail qu'affronte quotidiennement le pouvoir judiciaire, a proposé d'augmenter de deux postes la composition du Tribunal de première instance, ce qui nous a donné, sous la forme d'un amendement, le texte suivant:
«Le Tribunal de première instance se compose de 27 juges, dont 1 président et 1 vice-président, ainsi que de 18 juges suppléants. Sur les 27 postes de juge, 2 sont dédoublés en postes à mi-temps.» Le commissaire du Mouvement Citoyens Genevois, fort des principes égalitaires hommes-femmes décrits précédemment, propose un sous-amendement formulé de la manière suivante:
«Le Tribunal de première instance se compose de 27 juges, dont 1 président et 1 vice-président, ainsi que de 18 juges suppléants. Les 27 postes de juge peuvent être dédoublés en postes à mi-temps.» C'est dire si nous sommes vraiment égalitaires et que nous laissons pleins pouvoirs au pouvoir judiciaire, en qui nous devrions avoir confiance ! C'est à lui de choisir s'il veut mettre un, deux, dix ou vingt postes dédoublés en postes à mi-temps. C'est une latitude sans contrainte, sans obligation et qui, surtout, va respecter la constitution par rapport à l'égalité hommes-femmes. Parce que vous avez prononcé de belles paroles en théorie, Monsieur le rapporteur de majorité, mais, dans la pratique, il y a beaucoup plus d'hommes dans la magistrature qu'il n'y a de femmes ! Je continue.
La présidente. Monsieur le rapporteur, il vous reste deux minutes.
M. Eric Stauffer. Alors je reprendrai la parole par la suite, comme m'y autorise le règlement. En attendant, je termine. Il ne me reste qu'une page et demie, ce n'est pas très long ! Sinon, je reprendrai le fil plus tard !
La présidente. Monsieur le rapporteur de minorité, vous n'étiez pas là tout à l'heure lorsque j'ai annoncé que, pour le débat de préconsultation - ainsi que nous l'avons décidé avec les chefs de groupe - chaque groupe disposait, de même que les deux rapporteurs, de dix minutes, et non pas trois comme vous l'avez indiqué dans votre rapport. M. Jornot a parlé sept minutes, il lui en reste donc trois. Quant à vous, vous vous êtes exprimé pendant huit minutes, il vous en reste donc deux. Au-delà, vous ne pourrez plus parler sur le débat de préconsultation. En revanche, si vous déposez des amendements tout à l'heure, vous pourrez également les présenter, à raison de cinq minutes par amendement. Vous pouvez continuer, mais vous ne disposez plus que de deux minutes.
M. Eric Stauffer. Bien. Donc, vous voyez que la dictature, finalement, n'est pas loin ! (Protestations.) On empêche les minorités de s'exprimer... Toutes les grandes dictatures de la planète ont commencé ainsi ! Je vais donc faire un raccourci, pour vous indiquer, à vous, Mesdames et Messieurs les députés, et à tous ceux qui nous regardent en direct sur Léman Bleu, la véritable raison qui a poussé le commissaire libéral et son collègue PDC à refuser les demi-postes dans le pouvoir judiciaire: c'est qu'ils ne savaient pas comment les décompter dans la commission judiciaire interpartis ! Qu'est-ce que cette commission ? C'est une commission illégale, anticonstitutionnelle, une commission d'affairistes, qui choisissent quel juge de quel parti politique ils vont mettre dans telle juridiction. Et comme dans la loi il est inscrit que, s'il y a dix postes de juge à pourvoir et dix candidats, il n'y a pas d'élection populaire, mais une simple déclaration du Conseil d'Etat, eh bien, c'est comme ça que fonctionne notre pouvoir judiciaire ! Durant les trente dernières années, il n'y a eu que deux fois dans l'histoire du pouvoir judiciaire des élections populaires pour les juges; on se souviendra notamment d'un cas, je crois que c'était la juge Sordet, qui avait provoqué une élection populaire parce qu'elle était rebelle et n'avait pas voulu adhérer à un parti politique pour briguer son poste de juge d'instruction. Eh bien, aujourd'hui - il faut le savoir - pour être juge au pouvoir judiciaire de Genève, il faut d'abord payer sa cotisation dans un parti politique, jouer les cire-pompes pour être présenté par cette commission judiciaire interpartis, illégale et anticonstitutionnelle, et ce n'est qu'ainsi que vous pouvez siéger comme juge ! Et cela, Mesdames et Messieurs, en 2008, il faut l'abolir et, pour cela, la future Constituante sera vraiment un moyen...
La présidente. Il vous faut conclure, Monsieur le rapporteur !
M. Eric Stauffer. Oui, bien sûr, Madame la présidente ! Cette Constituante permettra vraiment d'améliorer la justice pour les citoyens, ainsi que vous l'avez déclaré, Monsieur le rapporteur de majorité. Vous voyez, je n'ai pas vos connaissances juridiques, mais il y a une chose que j'ai peut-être davantage que vous, c'est le bon sens et le pragmatisme par rapport à la population. Je vous remercie, j'en ai terminé pour l'instant !
La présidente. Merci, Monsieur le député. Monsieur Jornot, j'ai vu que vous aviez demandé la parole: il vous reste trois minutes. Souhaitez-vous vous exprimer maintenant ou plus tard ?
M. Olivier Jornot. Madame la présidente, je m'exprimerai sans doute après les différents orateurs.
La présidente. Très bien. La parole est à Mme Anne Emery-Torracinta.
Mme Anne Emery-Torracinta (S). J'hésitais quant à l'ordre dans lequel j'allais commencer à traiter cette question, mais je crois que les paroles du rapporteur de minorité m'ont suggéré une idée: peut-être devrions-nous proposer dans ce Grand Conseil d'avoir des députés à mi-charge ou à mi-temps, ce qui permettrait au Mouvement Citoyens Genevois d'avoir éventuellement un certain nombre d'élues féminines ! (Rires. Applaudissements.)
Quoi qu'il en soit, je lui ferai grâce d'une chose: le débat a été très technique en commission. Et il a peut-être été un peu plus facile pour nous, qui étions là depuis le début des travaux de la commission, de nous dépatouiller, si j'ose dire, que pour M. Stauffer, qui n'est arrivé qu'à la fin des débats.
Il est vrai qu'il a été beaucoup question de commissions; nous avons parlé de la CCRC, de la CCRPE, de la CCRIC, de la CCRIF, de la CCRIP, de la CRPP et d'une, au moins, qui se prononce un peu facilement, la CRUNI. Alors, en effet, pour les députés - comme moi - qui ne sont pas des habitués du Palais de justice, cela n'a pas été facile mais, au bout du compte, la loi que l'on vous propose aujourd'hui vise un but qui est en définitive extrêmement simple, puisque le coeur de la réforme, c'est l'application d'un article de la Constitution fédérale qui stipule: «Toute personne a droit à ce que sa cause soit jugée par une autorité judiciaire.» C'est cela, l'essentiel, c'est le principe qu'un recours puisse toujours exister par une autorité qui n'est pas administrative, mais qui soit un tribunal indépendant. Et cela, Mesdames et Messieurs les députés, c'est un principe important. Pour vous montrer combien le système peut parfois être pervers, je vais vous citer un cas que j'ai eu l'occasion de vivre il y a quelques années à propos de l'intégration scolaire des enfants handicapés. Lorsqu'une décision était prise et que l'on voulait faire recours - et ce fut le cas d'un certain nombre de parents - on devait le faire auprès du conseiller d'Etat ou, en l'occurrence, de la conseillère d'Etat - c'est une histoire qui date d'il y a une quinzaine d'années - qui suivait ses services, et l'autorité supérieure de recours était ensuite le Conseil d'Etat lui-même. Vous voyez l'absurdité ! Vous vous adressez à un chef de département, puis au Conseil d'Etat ! Vous voyez bien qu'il n'y a pas de tribunal indépendant, raison pour laquelle la nouveauté constitutionnelle que l'on applique ici me paraît extrêmement intéressante.
Cela dit, si le principe est simple, l'application l'a peut-être été un peu moins par rapport à ce que l'on a décidé de traiter en commission. Je trouve que, en définitive, l'idée d'avoir une commission de recours en matière administrative simplifie les choses, car on n'aura plus la CCRPE, la CCRIC, la CCRIF, etc., mais une commission de recours unique, qui sera chargée de faire le filtre pour éviter que le Tribunal administratif soit surchargé.
Quelques points ont néanmoins posé un certain nombre de problèmes, et l'un d'eux a fait débat au sein de mon groupe, à savoir la question du réexamen en matière de naturalisation. Vous savez que le projet de loi propose que ce réexamen par le Grand Conseil soit supprimé; on s'est alors posé la question de savoir si la naturalisation était au fond un acte politique ou administratif. A titre personnel, je me réjouis que la commission ait suivi le projet du Conseil d'Etat puisque, à mon sens, la naturalisation n'est pas un acte politique, mais répond bien à des critères qui doivent être de l'ordre de l'administratif.
Cela dit, il y a un point sur lequel le groupe socialiste reviendra tout à l'heure, c'est la question de la possibilité pour les communes de faire recours contre une décision.
En conclusion, le groupe socialiste vous invite à soutenir ce projet de loi.
Mme Nathalie Fontanet (L). Mesdames et Messieurs les députés, comme Mme Emery-Torracinta, j'hésite à savoir par quoi je vais commencer. Vais-je vous lire ce que j'ai préparé ? Ou prendre les pages 20, 21, 82 et 83 du rapport de majorité, qui résument les prises de position, notamment des libéraux, et terminer là mon travail ? Non, Mesdames et Messieurs, trêve de plaisanteries, je ne permettrai pas cet affront, étant donné la tâche accomplie par la commission - et le peu de temps qu'elle avait à disposition - le travail considérable réalisé par le rapporteur et la qualité indéniable de son rapport. Je crois que tous les partis ont quelque chose à dire, et pas uniquement en lisant leur rapport.
Mesdames et Messieurs, à première vue, la matière semble très technique. Elle l'est effectivement, et en réalité la réforme de la justice administrative aura un impact direct sur la vie de nos citoyens. N'oublions pas que le contentieux administratif concerne tous les litiges des particuliers avec l'Etat, si bien que c'est la vie quotidienne des gens qui est concernée, par exemple leurs rapports avec l'administration fiscale, les autorisations de construire, les permis de séjour, etc.
Le projet initial du Conseil d'Etat prévoyait certes des améliorations indispensables, notamment en matière d'accès au juge, mais il s'arrêtait à mi-chemin, puisqu'il réformait la justice administrative sans s'intéresser à l'un de ses principaux défauts, à savoir la coexistence d'une multitude de commissions de recours, que le législateur a créées l'une après l'autre au fil de l'histoire. Or s'intéresser aux commissions de recours, c'est chercher à améliorer concrètement la situation des justiciables. En effet, il n'est pas normal qu'un recours contre une autorisation de construire soit traité en six mois, alors qu'un recours en matière fiscale ne l'est toujours pas après deux ans. Il n'est pas normal non plus qu'un retrait de permis soit directement examiné par le Tribunal administratif - soit la plus haute instance cantonale - alors qu'une contestation portant sur 250 F d'impôts serait examinée successivement par trois instances. Enfin, il n'est pas normal que ce soient des politiciens désignés par les partis politiques qui examinent les recours en matière fiscale ou de police des étrangers, alors que les dossiers de constructions sont examinés par des spécialistes de la branche.
Toutes ces incohérences et ces inégalités de traitement doivent être corrigées, et la commission ad hoc Justice 2010 a le mérite d'avoir proposé une solution. Cette solution, soit la création d'une commission cantonale de recours en matière administrative, est bonne, parce qu'elle permet une professionnalisation de l'instance de recours, qui sera présidée par un juge à plein temps et entièrement rattachée au pouvoir judiciaire, tout en s'assurant le concours de spécialistes des différents domaines touchés. Le but de cette réforme n'est pas esthétique, mais pratique: il s'agit de faciliter l'accès à la justice administrative dans les secteurs qui touchent le plus les Genevois et les Genevoises.
Mais la commission ad hoc n'a pas seulement étendu le sens du projet de loi du Conseil d'Etat, elle a également apporté des contributions importantes dans d'autres domaines; souvent, d'ailleurs, à l'instigation des libéraux. Ainsi, c'est notamment sous l'impulsion des libéraux, très attachés à l'autonomie communale, qu'une voie de recours a été ouverte aux communes en matière de naturalisation. Et c'est encore à leur instigation que les critères d'expérience ont été imposés aux futurs magistrats qui composeront la Cour d'appel de la magistrature.
Mesdames et Messieurs les députés, s'agissant des amendements proposés par le rapporteur de majorité, lesquels font l'objet d'un consensus avec le Conseil d'Etat, le groupe libéral les soutiendra tous. Il soutiendra également la plupart des amendements proposés aujourd'hui par le Conseil d'Etat, à l'exception toutefois de celui portant sur la levée du secret de fonction, qui ne se justifie pas. En outre, le groupe libéral déposera un amendement supplémentaire. Ce dernier a déjà été proposé en commission et rejeté par un vote à égalité de quatre voix contre quatre, en raison de l'absence d'un commissaire. J'aurai l'occasion de l'exposer en détail tout à l'heure, mais il s'agit en substance de prévoir en matière administrative ce qui existe déjà en matière civile - et qui existe dans tous les cantons et sur le plan fédéral - à savoir une règle selon laquelle, lorsqu'une avance de frais est demandée au recourant et que ce dernier ne la paie pas dans le délai imparti, le recours est déclaré irrecevable.
Un mot maintenant sur le rapport de minorité, d'abord pour rendre hommage à son auteur. Merci, Monsieur Stauffer, de reconnaître que l'emprise libérale a dominé les travaux de la commission et que cela a été la plupart du temps à bon escient ! Pour le reste, le rapporteur de minorité insiste sur un amendement qu'il a déposé en commission, qui vise à autoriser le dédoublement de l'intégralité des 27 postes de juge du Tribunal de première instance. Mais il n'est pas question aujourd'hui de refaire tout le débat des demi-charges dans la magistrature, qui a déjà fait couler beaucoup d'encre et qui en fera certainement encore couler beaucoup. Une chose est certaine: proposer le dédoublement de l'intégralité d'une juridiction prise au hasard, parce que touchée par le projet de loi, et cela, sans aucune concertation ni consultation, notamment du pouvoir judiciaire, est le pire service que l'on puisse rendre aux potentiels bénéficiaires des demi-charges, particulièrement aux femmes, parce que c'est la garantie d'assurer l'échec de la proposition.
Mesdames et Messieurs les députés, vous l'aurez compris, les libéraux soutiennent avec enthousiasme l'entrée en matière de ce projet. (Applaudissements.)
M. Guillaume Barazzone (PDC). Je crois que, dans ce dossier, il faut commencer par faire un peu d'histoire. En 2004, l'ancien président du Grand Conseil et le représentant du pouvoir judiciaire - à savoir M. Pascal Pétroz, ici présent, et M. Daniel Zappelli - adressent une lettre au Conseil d'Etat en soulignant la nécessité d'aller vite, de prendre le taureau par les cornes et de faire en sorte que le canton travaille à l'adaptation de son système judiciaire, en vue de la future adoption de la loi sur la Tribunal fédéral. Les années 2004, 2005, 2006 et 2007 passent... et toujours rien. Pas de dépôt de projet de loi. Enfin, en 2008, le Conseil d'Etat dépose un projet de loi qui, je dois le dire, a mis ce Grand Conseil, et en particulier la commission ad hoc Justice 2010, dans des conditions de travail relativement difficiles: nous avons notamment dû travailler souvent tard le soir, mais cela ne nous a pas dérangés. En définitive, je crois que nous avons plutôt fait du bon travail, même si nous avons dû siéger cet été. Toutefois, ce retard a eu plusieurs conséquences fâcheuses, bien plus importantes que les désagréments que cela a pu causer à l'un ou l'autre des membres de la commission.
La première, c'est que je crois qu'un certain nombre d'entre nous auraient voulu procéder à de nombreuses auditions supplémentaires de personnes qui s'étaient annoncées et qui, pour des raisons de temps, n'ont pu être entendues en commission. Nous aurions aussi souhaité entendre à nouveau toute une série de groupements, suite à des amendements proposés par certains commissaires mais, malheureusement, cela n'a pas été possible.
La deuxième conséquence, c'est que, dans un parlement de milice - et vous allez vous en rendre compte tout à l'heure - il n'est pas possible pour des députés de milice non juristes de prendre connaissance d'un objet aussi faramineux, d'une telle importance et de le voter comme ça, en se le faisant expliquer par ceux qui s'y connaissent. Je crois donc que, pour l'avenir, il faudra tirer les leçons de ces événements.
Maintenant, s'agissant de ce projet de loi, j'ai deux remarques d'ordre général. La première concerne les engagements pris par le Conseil d'Etat. Il faut savoir que toute une série de dispositions légales figurant dans ce projet de loi devront être précisées ou complétées - et le Conseil d'Etat s'est engagé en commission à le faire - par des dispositions réglementaires que ce dernier a promis d'adopter. J'émets ce soir le souhait avec mon groupe que ces engagements seront tenus, et complètement tenus !
Ma deuxième remarque générale concerne les aspects budgétaires de ce projet de loi. Vous savez que la commission Justice 2010 avait la compétence de modifier la loi sur l'organisation judiciaire, c'était son rôle, mais elle n'avait en revanche ni le droit ni la compétence d'adopter les budgets y relatifs. J'espère donc que le législateur, et plus particulièrement la commission des finances et le Conseil d'Etat lors de la préparation des budgets, pourront allouer les budgets relatifs à ce projet de loi, de manière que l'organisation qui a été votée en commission - et qui, je le souhaite, sera adoptée ce soir - puisse fonctionner normalement, et cela même avant 2009, puisqu'il faudra prendre, j'imagine, des budgets supplémentaires pour tout ce qui concerne les préparatifs.
J'en viens maintenant au fond. Je crois que le but et l'esprit de la réforme, c'est simplement de rendre la justice administrative la plus efficace et efficiente possible. Certains des auditionnés nous ont demandé de créer un tribunal administratif universel, une sorte de tribunal administratif de première instance, comme c'est le cas actuellement en matière civile. La commission n'a pas retenu cette solution pour deux raisons principales. Premièrement, contrairement au but visé par la réforme, la création d'un tribunal administratif universel risquait de prolonger les procédures, ce qui n'était pas souhaitable et, deuxièmement, cette création d'un nouveau tribunal généraliste aurait engendré des coûts beaucoup trop élevés pour notre république. Or, compte tenu de la situation des finances publiques, ce n'était pas raisonnable. Nous avons donc décidé de créer une commission administrative de première instance qui, à mon sens, offre plusieurs avantages: elle facilite, comme l'a dit Mme Fontanet, l'accès à la justice et rend cette dernière plus efficace, plus lisible et plus rapide. Nous pensons donc que le système que nous avons organisé sera plus efficient et permettra de rendre des décisions plus rapides, notamment dans les dossiers fiscaux ou en matière de constructions, ô combien importants pour notre république.
Dans cet esprit de réorganiser la justice et de la rendre plus efficace, nous avons décidé sagement de supprimer la représentation automatique des partis politiques au sein d'une commission fiscale, puisque je crois que, s'il y a bien un domaine dans lequel les compétences doivent primer sur l'appartenance politique, c'est bien lorsque des juristes, des comptables ou des fiscalistes se prononcent sur un dossier fiscal. En conclusion, je crois donc, Mesdames et Messieurs les députés, que tous ces éléments nous poussent naturellement à adopter ce projet de loi.
Enfin - et j'en terminerai par là, Madame la présidente - Mme Emery-Torracinta a évoqué le thème des naturalisations. Or la question n'est pas vraiment de savoir ce soir si la décision de naturaliser ou le recours concernant une décision de naturalisation revêt un caractère plus ou moins politique puisque, de toute façon - et ce sont les experts qui nous l'ont dit - la décision de naturalisation doit faire aujourd'hui l'objet d'un recours devant un tribunal. Donc, quoi qu'il arrive, que l'on maintienne ou que l'on supprime la décision du Grand Conseil suite à un recours, il y aurait un recours ouvert au Tribunal administratif, puis au Tribunal fédéral. Quoi qu'il en soit, ce débat a déjà eu lieu en commission, mais il n'est pas fondamental, dès lors que le but était que, pour chaque domaine - et les juges sont également concernés, puisque l'on a créé une Cour d'appel de la magistrature - chaque citoyen, chaque juge, chaque individu ait un accès à la justice, par exemple s'il souhaite se faire naturaliser, et c'est très bien ainsi.
Mme Michèle Ducret (R). La Berne fédérale nous a parachuté un cadre assez rigide pour cette réforme de la procédure administrative, et la commission Justice 2010 a travaillé dans ce cadre, en essayant de rassembler les éléments, assez disparates, qui se présentaient devant elle. Nous avions notamment devant nous une mosaïque de commissions diverses et variées, dont nous avons tenté de faire quelque chose. Cela ne s'est pas fait tout seul, mais nous y sommes parvenus petit à petit, au fur et à mesure des différentes auditions et de nos discussions.
Le fruit de ces débats, le groupe radical l'approuve. Que l'impulsion ait été donnée par tel ou tel groupe ne nous semble pas important; ce qui l'est, c'est le résultat obtenu en juillet dernier.
Je voudrais signaler que nous voterons la plupart des amendements, mais j'aimerais faire une parenthèse à l'intention du rapporteur de minorité, pour lui dire que, en ce qui concerne la féminisation de la magistrature - et je me sens tout à fait autorisée à en parler ! - il y a en première instance 25 juges, soit 14 femmes et 11 hommes, dont un est en demi-charge. Je suppose donc que vous avez fait une erreur lorsque vous nous avez dit qu'il y a davantage d'hommes que de femmes dans la magistrature !
Cela dit, je ne voudrais pas terminer mon intervention avant d'avoir attiré votre attention sur un problème qui me tourmente quelque peu. Les trois domaines que sont la procédure administrative, pénale et civile - dont nous allons devoir parler ces prochains temps - ont été uniformisés par la Berne fédérale, et ce qui m'ennuie dans cette affaire c'est que j'ai l'impression que le pouvoir judiciaire enfle quelque peu et prend ou va prendre peut-être un peu trop de place. Et j'ai peur que cette enflure du pouvoir judiciaire ne nuise... (Rires.) J'ai dit «enflure», effectivement !... qu'elle ne nuise pour finir à la séparation des pouvoirs et à l'équilibre entre ces trois pouvoirs, principes auxquels nous sommes très attachés, vous le savez, surtout nous, les radicaux. Notre groupe sera donc très attentif aux suites qui seront données à cette affaire et veillera à ce que les principes de la séparation des pouvoirs et de l'équilibre entre ceux-ci soient respectés.
La présidente. Merci, Madame la députée. La parole est à M. Yves Nidegger.
M. Yves Nidegger (UDC). Merci, Madame la présidente. Vous m'avez un peu manqué, mais c'est de ma faute, c'est mon exil bernois, qui a fait d'ailleurs que la participation de mon groupe aux travaux de cette commission a été un peu modeste. C'est l'occasion pour moi de remercier et de féliciter les commissaires plus assidus, en vous assurant que, si je n'ai pas participé à toutes les séances de cette brillante commission, je les ai suivies par le biais du procès-verbal avec énormément d'attention.
C'est l'époque des grands chantiers: d'abord, ce principe constitutionnel du droit au juge, qui modifie dès ce soir notre droit administratif; puis, va suivre l'unification de la procédure pénale et de la procédure civile. Tous ces chantiers sont une manière non pas de faire table rase du passé cantonal différencié et de tout ce que l'histoire aura produit comme commissions diverses et variées au fur et à mesure des besoins et de l'évolution des choses, mais une manière de systématiser - on le voit ici au niveau cantonal - et de rationaliser - on le verra également avec la procédure civile et pénale - en rassemblant les expériences réalisées dans les laboratoires judiciaires des différents cantons, pour en tirer la quintessence et arriver à l'essentiel du fonctionnement de l'appareil judiciaire. Là où une marge de manoeuvre existait, la commission a trouvé l'équilibre correct et est parvenue à des solutions avec lesquelles l'UDC pourra être entièrement d'accord. Même dans le domaine des naturalisations, où le peuple a récemment tranché - ce peuple qui n'a pas toujours raison, mais qui a toujours le dernier mot - on a trouvé un équilibre qui permet aux parties, c'est-à-dire la commune d'une part, le requérant recourant d'autre part, d'être toutes deux présentes dans une procédure devenue, par la volonté du peuple, administrative.
Le rapporteur de minorité s'en prend d'une part à la perversité de certains partis, qui ont eu le mauvais goût de choisir des personnes compétentes et d'envoyer des spécialistes du métier pour participer à une commission extraordinairement technique, dont la tâche allait consister à définir l'architecture qui régirait le Palais de justice. Je pense pour ma part que, dans un domaine où la compétence est requise, il est plus démocratique d'avoir des législateurs, des députés compétents, que de laisser l'entier de cette compétence à l'administration qui, elle, en regorge ainsi que de temps et de moyens. Je suis donc parfaitement heureux que les compétences aient été celles-là.
Du reste, si notre rapporteur stakhanoviste a eu un ascendant jugé excessif sur ces travaux, eh bien, le fait d'être libéral n'étant certes pas une qualité morale ou personnelle suffisante, on le lui pardonnera pour cette fois, en raison de la qualité de ce qu'il nous apporte. En d'autres termes, le travail a été bon, il faut le saluer, mais celui-ci n'est que le début d'un chantier.
Le rapporteur de minorité s'en prend d'autre part à une commission qu'il dit être illégale, parce que certains termes juridiques - il nous l'a bien expliqué - ne sont pas maîtrisés dans sa conception des choses; cette commission interpartis n'est pas illégale, elle n'est simplement pas fondée sur une base légale, c'est-à-dire qu'elle n'est pas instituée par la loi, et l'on n'y touche pas de jetons de présence comme dans les commissions où M. le rapporteur de minorité siège assez abondamment. Il s'agit d'une commission où ce sont les partis qui se mettent autour de la table, et cela bénévolement. Et c'est un paradoxe - mais le paradoxe mérite d'être analysé - qui fait qu'une commission dont l'origine est les partis politiques aboutit finalement à dépolitiser les élections judiciaires en cours de magistrature - donc entre les élections populaires - parce qu'autour de la table se trouvent des avocats qui ont un intérêt, d'une part, à ce que les juges soient bons, puisqu'ils les fréquentent au quotidien et, d'autre part, à ce que la répartition des forces politiques en présence puisse se faire de la manière la plus fine possible. En effet, si on laissait l'élection uniquement au Grand Conseil ou au peuple, on aurait des rapports gauche/droite qui priveraient cette finesse d'appréciation et de représentation. En d'autres termes, on a une commission d'origine politique qui dépolitise, qui affine et qui, en fin de compte, démocratise à mon sens véritablement la représentation. Je parle un peu dans le vide, Monsieur le rapporteur de minorité, puisque vous savez tout cela tout aussi bien que moi, dans la mesure où votre parti est représenté de manière assidue dans cette commission par Me Dimier, que je soupçonne par ailleurs d'être l'auteur de votre rapport, celui qui a été écrit pour que nous le lisions et que vous nous avez relu ce soir.
Les amendements tels qu'esquissés dans le rapport de majorité seront soutenus par notre groupe. L'amendement libéral sur la question du paiement des frais et de l'irrecevabilité en cas de non-paiement le sera également, ainsi que les amendements du Conseil d'Etat, dans la mesure où ils reviennent à un autodessaisissement de certaines compétences, en faveur d'un organe plus démocratiquement représentatif. L'amendement qui, en revanche, propose de rendre impossible le recours contre une décision de non-levée du secret de fonction ne sera pas accepté, et sera même combattu.
Un dernier mot sur la suite. Cette nouvelle architecture de notre système judiciaire aura pour effet de coûter plus d'argent. Même si l'on essaie de minimiser la chose, il y aura des budgets importants et, pour une fois - car ce n'est pas mon habitude ni celle de ce côté de l'hémicycle de dire qu'il faut dépenser plus - il faudra accepter de dépenser davantage, pour une justice de qualité et qui soit simplement en phase avec la population de ce canton et la situation sociologique et économique de ce dernier. Le département de justice et police, qui s'appelle aujourd'hui département des institutions, a été un département mal aimé, et il est temps de dire qu'il faudra plus de coeur et de moyens dans ce département pour la justice, la police et les prisons également, qui sont le service après-vente des deux premières.
En conclusion, nous allons donc voter avec conviction ce projet de loi et suivre les amendements ainsi que je l'ai indiqué.
Mme Mathilde Captyn (Ve). A titre personnel, j'ai rarement été confrontée à des travaux de commission aussi compliqués. J'aurais presque envie ce soir de parler au nom des non-juristes de cette enceinte pour démontrer les limites de la démocratie de milice, mais c'est un autre débat, et l'on ne va pas s'étendre sur le sujet, vu les 165 pages de ce rapport !
En préambule, je remercie sincèrement toutes les personnes qui ont participé à la vulgarisation de cette matière ardue en un temps record, ainsi que le rapporteur de majorité pour la clarté et la précision de son rapport.
Le premier point à relever, c'est que, par l'acceptation de ce projet de loi, nous clarifions, nous professionnalisons et nous simplifions la structure de la justice administrative; c'est une bonne chose, car elle en sera vraisemblablement plus transparente pour tout un chacun. La création de la commission cantonale de recours en matière administrative - CCRA - est la nouveauté de cette réforme; elle permettra de traiter les contentieux de masse touchant aussi bien aux recours éventuels sur des amendes de la route qu'aux recours en matière d'impôts. On peut donc espérer que, dans l'avenir, le domaine administratif de la justice genevoise, avec vraisemblablement trois juges supplémentaires, soit plus rapide et plus efficace.
Deuxièmement, nous affinons par cette réforme le principe constitutionnel fédéral selon lequel toute personne a droit à ce que sa cause soit jugée par une autorité judiciaire. Dans l'application de ce principe, nous avons entre autres créé la Cour d'appel de la magistrature, et nous avons surtout beaucoup débattu de la suppression du recours en matière de naturalisation au Grand Conseil, au profit d'une voie de recours au Tribunal administratif. Même s'il est dommage de changer un système qui marche, je rappelle que la quasi-totalité des recours contre des refus communaux sur des demandes de naturalisation sont rejetés. De plus, nous ne sommes pas une instance judiciaire. Il ne nous reste donc plus qu'à espérer que le Tribunal administratif statue sur les recours en matière de naturalisation de manière aussi humaniste que notre parlement.
Pour terminer, les Verts sont satisfaits que la gratuité des recours pour les étudiants n'ait pas totalement disparu - car elle a failli disparaître - et nous comptons sur le règlement d'application pour préciser que les étudiants qui sont exonérés des taxes universitaires ne paieront pas de frais. Les Verts vous engagent donc évidemment à accepter l'entrée en matière de ce projet de loi.
M. Claude Jeanneret (MCG). Nous avons entendu ce soir énormément de paroles de personnes convaincues qui ont participé à ce travail. Il convient donc d'abord de remercier les membres de la commission, qui ont réalisé un travail remarquable. Toutefois, je ne suis pas sûr qu'ils aient bien compris la portée de cette nouvelle loi vis-à-vis de la simplicité administrative qui était donnée à chaque citoyen de pouvoir réagir à chaque niveau et à chaque département, sans que tout soit confondu dans une commission où il n'y aura plus de spécialistes mais uniquement des gens de formation principalement juridique, qui sont aptes à comprendre tous les problèmes de la loi, ce qui n'est pas le cas du commun des citoyens. Je m'explique. Si l'on prend la commission de recours en matière d'impôts, tous les gens qui en faisaient partie - contrairement à ce que disait M. Barazzone, qui ne doit pas très bien connaître le système - étaient soit des juristes-avocats, soit des fiscalistes, donc il ne s'agissait pas nécessairement de représentation politique uniquement; il y avait le politique, mais qualifié.
En outre, puisqu'il a été question d'accumulation de dossiers, je dirai simplement que ces derniers étaient préparés par des juristes de la commission, c'est-à-dire que le goulet d'étranglement ne se situe pas au niveau des commissaires, mais au niveau du travail antérieur, qui est important, et qui nécessite des études assez approfondies tant de droit que de jurisprudence et autres. Et c'est grâce à ces juristes que la commission pouvait agir de manière assez rapide. Mais, effectivement, le nombre de recours est tel qu'on ne peut pas les achever en cinq minutes.
D'autre part, on a évoqué les différentes commissions intitulées CC ceci, CC cela. C'est vrai qu'il y en avait beaucoup, mais lorsqu'on avait une réponse sur réclamation de l'administration fiscale, il était clairement dit que, en cas de désaccord, on pouvait s'adresser à la commission de recours. Ce qui était très simple pour le commun des mortels ! On écrivait: «Je ne suis pas d'accord avec ceci, je souhaite cela et je conclus que j'aimerais cette réponse.» Et, à partir de là, la commission de recours agissait. Aujourd'hui, avec une difficulté juridique supplémentaire, on va être obligé de se tourner vers des avocats, c'est-à-dire que la justice ne va plus être véritablement populaire, mais va devenir celle de quelques privilégiés qui peuvent payer très cher des avocats qui pratiquent des tarifs très onéreux. Alors on a une petite caste, malheureusement, qui prévoit ces lois et qui permet de cette manière de faire une sorte de chasse gardée dans certains domaines.
On le dit toujours, le progrès induit le changement, mais je ne crois pas que le changement induise nécessairement le progrès. Dans ce cas-là, nous sommes obligés de nous mettre à l'heure de la demande fédérale; c'est une espèce de concentration de pouvoir, une sorte de perte de liberté du citoyen, nous sommes en train de démanteler la vraie démocratie ! Je ne juge pas la loi, je constate. Et le dernier message que j'aimerais faire passer, c'est que, malheureusement, notre démocratie est en train de foutre le camp grâce à toutes ces juridictions qui sont absolument incompréhensibles pour le commun des citoyens que nous sommes.
M. Olivier Jornot (L), rapporteur de majorité. J'aimerais remercier les différents orateurs qui ont apporté des éclairages intéressants sur leur perception de ce projet de loi et de cette réforme. Les différents exemples que vous avez pris, chers collègues, montrent la variété des domaines qui sont touchés par le droit administratif, et donc par cette réforme que nous allons voter ce soir.
J'ai tout à l'heure réagi avec vivacité en pressant le bouton, Madame la présidente, afin de répliquer aux propos du rapporteur, mais, le temps s'étant écoulé depuis, je me rends compte qu'il n'est pas très utile que je réponde sur des points qui ne figurent pas dans le projet de loi. En effet, dans le projet du Conseil d'Etat, il n'était pas question de Tribunal de première instance, et donc, s'il n'y avait pas eu la création de la commission de recours unifiée, M. Stauffer n'aurait pas eu l'idée de se dire que, après les ordures napolitaines, les Services industriels et je ne sais quoi, il pouvait maintenant se présenter comme le grand défenseur de la cause féminine !
Non, je préfère vous parler de choses sérieuses, donc du contenu de ce projet de loi, en réagissant aux propos de Mme Ducret. En effet, cette dernière nous dit à juste titre que cette évolution est un peu effrayante. Eh bien, Mesdames et Messieurs, j'aimerais vous rappeler que, il y a quelques dizaines d'années encore, comme le disait Mme Emery-Torracinta, nous vivions dans un système où, lorsque vous n'étiez pas content d'une décision, vous vous adressiez au chef de celui qui l'avait prise, lequel vous envoyait paître avec une belle argumentation mais sans aucune indépendance. Puis, dans les années 70, on a créé le Tribunal administratif. Il y a une dizaine d'années, on lui a donné une compétence universelle, et ce n'est donc finalement que l'évolution tout à fait logique aujourd'hui que de traquer les domaines dans lesquels l'administration peut encore prendre des décisions sans que le justiciable ne puisse les soumettre au juge. Par conséquent, cette évolution est non pas à craindre, mais à accueillir et peut-être à accompagner justement par des réformes institutionnelles, pour faire en sorte qu'on ne finisse pas dans un monde où la justice deviendrait kafkaïenne à force d'avoir voulu répondre à toutes les situations.
A M. Jeanneret, j'aimerais dire qu'il n'a pas lu le projet de loi qui est sorti de commission car, s'il l'avait fait, il aurait constaté que la commission de recours siégera avec un juge professionnel et deux assesseurs en matière fiscale lorsqu'elle traitera des problèmes fiscaux; il y aura donc toujours des spécialistes, et vous-même, Monsieur Jeanneret, vous pourrez sans autre forme de procédure vous faire réélire dans un poste d'assesseur.
Mesdames et Messieurs les députés, je voulais vous dire encore de nombreuses choses, mais lorsque je vois «l'enflure» du nombre des amendements qui sont déposés, je préfère m'arrêter !
M. Laurent Moutinot, président du Conseil d'Etat. Au départ, ce projet de loi du Conseil d'Etat était un projet minimal d'adaptation au droit fédéral que vous avez décrit, ce droit qui permet maintenant à tout justiciable de faire trancher sa cause par un tribunal cantonal supérieur en matière administrative. Je rends hommage à votre commission Justice 2010 d'avoir dépassé cette adaptation minimaliste, pour en faire une véritable réforme de la juridiction administrative genevoise. Je vous félicite de cette audace et d'avoir résisté à un certain nombre de pressions - dont j'ai aussi été l'objet - de la part de conservateurs effrénés qui tenaient beaucoup à certaines de ces vieilles commissions, dont pourtant le fonctionnement - nous le savons - n'était pas toujours irréprochable. Vous faites donc véritablement oeuvre de législateurs, et je vous en remercie. J'associe aussi à ces remerciements, parce que personne ne l'a fait, les collaborateurs de la fonction publique et les experts, qui ont très ardemment travaillé pour vous présenter cette matière difficile et ardue.
Pour répondre à M. le député Barazzone, qui s'inquiète des engagements pris par le Conseil d'Etat lors des travaux en commission, ces engagements seront tenus, et les dispositions d'application seront prises dans le sens que j'ai promis. Et pour vous répondre quant à vos soucis budgétaires, j'ai le plaisir de vous informer que, à la suite d'une rencontre qui a eu lieu lundi après-midi, le Conseil d'Etat et le pouvoir judiciaire sont tombés d'accord sur le budget 2009. Il n'y aura par conséquent qu'un seul budget, celui que nous avons présenté ce matin à votre commission des finances. Et si nous sommes tombés d'accord, j'imagine que l'un des objectifs qu'avait le pouvoir judiciaire dans cet exercice budgétaire était bien de s'assurer qu'il disposait des moyens nécessaires à l'entrée en vigueur de cette nouvelle loi.
Monsieur le rapporteur de minorité, je ne peux pas vous laisser dire que la commission judiciaire interpartis est anticonstitutionnelle ! La constitution garantit à tout groupe d'individus le droit de se réunir, de discuter de choses et d'autres, y compris d'élections judiciaires; ce n'est non seulement pas anticonstitutionnel, mais c'est l'exercice d'un droit constitutionnel fondamental. En conclusion, je vous remercie, Mesdames et Messieurs les députés, de réserver bon accueil à ce projet de loi.
Mis aux voix, le projet de loi 10253 est adopté en premier débat par 64 oui (unanimité des votants).
Deuxième débat
Mis aux voix, le titre et le préambule sont adoptés.
La présidente. A l'article 1, lettre t (nouvelle), nous sommes saisis de l'amendement suivant, qui figure à la page 80 du rapport de majorité: «une commission cantonale de recours en matière administrative». (Brouhaha. Commentaires.) Monsieur Stauffer, vous avez demandé la parole ?
M. Eric Stauffer (MCG), rapporteur de minorité. Il faut savoir ! Si vous voulez complètement limiter le temps de parole, faites voter une motion d'ordre, comme ça on va tambour battant et on fait passer ce projet de loi ! Mais si les minorités ne peuvent plus s'exprimer, parce que le Bureau a décidé de limiter à dix minutes les rapporteurs... Mais il faut savoir que c'est un règlement spécial MCG ! A croire que vous avez peur de ce que le MCG pourrait dire ! (Exclamations.) Mais oui, mais c'est la vérité, Mesdames et Messieurs ! Regardez ! Vous arrivez à faire un front uni, gauche comme droite, vous en venez à nous critiquer, mais, en attendant, puisque M. le rapporteur de majorité a fait allusion aux déchets napolitains et aux SIG, c'est bien votre système et l'inféodation des partis politiques au pouvoir judiciaire qui font que rien n'avance dans cette république ! Mais ça, évidemment, il ne faut pas le dire, ça ne fait pas bien dans l'establishment ! Eh bien, le Mouvement Citoyens Genevois ne fait pas partie de l'establishment, le Mouvement Citoyens Genevois défend les citoyens de cette république, vous savez, ceux qui ont de la peine à joindre les deux bouts à la fin du mois, ce qui n'est évidemment pas le cas de ces éminents juristes ! (Exclamations.) Qu'y a-t-il, Mesdames et Messieurs les libéraux ? Vous voulez encore donner des leçons de bonne gouvernance ? C'est comme vous voulez ! Vous savez, pour moi il n'y a pas de problème, on attend juste la réponse des 100 millions par rapport aux Services industriels !
J'en reviens au projet de loi, Madame la présidente.
M. Yves Nidegger. Bonne idée !
M. Eric Stauffer. Oui, bonne idée ! Vous savez, Monsieur Nidegger, lorsque vous dites que la votation du peuple élimine la subtilité des différents partis, c'est à croire qu'ici nous n'avons pas de subtilité et que le peuple est un imbécile lorsqu'il vote ! Donc il vaut mieux appliquer votre théorie, laisser cela aux professionnels, comme ça, lorsque le justiciable demande un recours au point de vue judiciaire, on lui dit à la fin: «Monsieur, cela vous coûtera tant, vous avez perdu, vous n'avez rien compris, mais ce n'est pas grave, vous payez et vous vous taisez !» C'est ainsi que cela se passe habituellement dans notre canton !
Bref, pour en revenir au projet, je voulais simplement terminer ce que j'avais commencé à préciser...
La présidente. Nous en sommes au premier amendement, Monsieur le rapporteur de minorité !
M. Eric Stauffer. Oui, bien sûr ! Mais compte tenu du fait que j'avais appuyé sur le bouton de demande de parole et que vous n'avez pas daigné me céder à nouveau le micro...
La présidente. Non, Monsieur le député ! Monsieur Stauffer, on a compris depuis longtemps que vous vouliez jouer le rôle de la victime, mais, vous savez, le Bureau et l'ensemble des députés ne sont pas dupes ! Vous avez eu le même temps de parole que tout le monde, parce que le Bureau et les chefs de groupe ont été d'accord, y compris en ce qui vous concerne ! Alors arrêtez ce cirque ! Vous avez eu dix minutes, maintenant vous devez vous exprimer sur l'amendement, et vous disposez pour cela de cinq minutes. Votre temps de parole est chronométré. Une fois que vous aurez dépassé les cinq minutes qui vous sont imparties, je vous dirai de vous arrêter !
M. Eric Stauffer. Oui, bien sûr ! Mais nous avons cinq minutes par amendement, rassurez-moi ! Ou est-ce que ce temps vaut pour tous les amendements, Madame la présidente ? C'est juste pour qu'on sache ! Et vous dites que notre chef de groupe a accepté mais, même s'il s'opposait, de toute façon, il y a une superbe ligue ! Regardez ! Gauche, droite, tous unis, pas de problème, anti-MCG, il ne faut surtout pas que ses membres s'expriment !
Bref, Mesdames et Messieurs les députés, je reviendrai tout à l'heure avec des amendements qui nous concernent, et je vous démontrerai que, malgré les propos de M. le conseiller d'Etat selon lesquels cette commission judiciaire interpartis est complètement constitutionnelle, ce n'est absolument pas le cas et qu'il s'agit d'une entente pour présenter des listes négociées. Et je maintiens que, pour être juge ou magistrat aujourd'hui à Genève, il faut d'abord payer sa cotisation dans un parti politique, sinon vous ne siégez pas comme juge. Et cela, je le dis haut et fort, et je défie quiconque dans ce parlement de venir me prouver le contraire !
La présidente. Merci, Monsieur le député. Nous votons maintenant sur l'amendement que je vous ai lu tout à l'heure sur l'article 1, lettre t (nouvelle).
Mis aux voix, cet amendement (création d'une lettre t à l'article 1) est adopté par 70 oui (unanimité des votants).
La présidente. Nous sommes à l'article 14, alinéa 1 (nouvelle teneur), pour lequel nous sommes saisis de deux amendements, l'un du rapporteur de majorité, et l'autre du rapporteur de minorité. Je vous passe la parole, Monsieur le rapporteur de majorité, puis nous voterons cet amendement en deux temps.
M. Olivier Jornot (L), rapporteur de majorité. Il s'agit de l'article 14, celui qui fournit l'excellent prétexte à M. le rapporteur de minorité de s'exprimer sur le dédoublement, non pas de personnalité - qui semble d'ailleurs le frapper lorsqu'on l'entend parler de ce genre de sujet - mais sur celui des postes en demi-charge. En l'occurrence, ce n'est pas pour cela que cet article est ici cité: il s'agit d'une conséquence de la création de la commission cantonale de recours en matière administrative. En effet, la volonté de la commission était de faire en sorte que cette commission de recours soit comprise dans le Tribunal de première instance, que ce ne soit pas une juridiction à part, mais que l'on puisse avoir une souplesse maximale dans l'allocation des moyens mis à disposition de cette commission. Et cela s'est donc traduit par un amendement à cet article 14 de la loi, visant à faire passer le nombre des juges de 25 à 27, la commission ayant estimé que deux juges supplémentaires étaient suffisants pour absorber la charge de travail. Or il se trouve que, par la suite, les discussions se sont poursuivies, et le pouvoir judiciaire a fait valoir son avis selon lequel ce nombre, arrêté certes un peu arbitrairement, était insuffisant. C'est la raison pour laquelle, d'entente avec le département et le Conseil d'Etat, je vous propose un amendement portant à 28 le nombre des juges, ce qui permet d'allouer trois postes à plein-temps supplémentaires pour absorber les causes qui relèveront de la commission cantonale de recours en matière administrative. J'observe au passage que, par erreur, je n'ai pas proposé la modification de la phrase suivante, dans laquelle figure également le nombre de juges. Par conséquent, Madame la présidente, je complète mon amendement dans le sens que, à la phrase qui suit, il convient également d'évoquer 28 juges, et non pas 27, comme on pourrait le croire, dès lors que cette deuxième phrase n'était pas touchée par mon amendement.
En outre, Mesdames et Messieurs, cet amendement porte sur le nombre de juges suppléants, parce qu'une réflexion a été menée, postérieurement à la clôture des travaux de la commission, sur la meilleure manière d'absorber le retard des commissions cantonales de recours en matière d'impôts - celles dont le MCG faisait tout à l'heure l'éloge de l'efficacité - qui ont accumulé deux ans de retard dans le traitement des recours des contribuables, non pas par la faute des commissaires qui y siègent, mais simplement à cause de la procédure qui leur est imposée, qui consiste à siéger en commission à treize pour trancher chacun des recours, dont un membre désigné par parti siégeant au Grand Conseil. Alors comment résorber ce retard ? La suggestion qui est faite consiste à créer un poste de juge suppléant, ce dernier étant spécifiquement chargé de traiter les causes fiscales, afin de rattraper le retard et de faire en sorte qu'ainsi les dossiers qui sont à jour dans d'autres domaines ne soient pas retardés.
Voilà, Madame la présidente, la raison pour laquelle je propose cet amendement. Et même si le vote a lieu en deux fois, je vais m'exprimer d'emblée sur l'amendement déposé par le MCG. J'aimerais rappeler à cette assemblée... Alors je sais bien, c'est juridique, puisqu'il s'agit d'un article de loi mais, enfin, je n'ai pas tellement le choix, nous sommes quand même là pour faire des lois, et les lois sont légales ou juridiques, ce qui, par conséquent, est évidemment extrêmement ennuyeux pour la compréhension du rapporteur de minorité ! Quoi qu'il en soit, j'aimerais simplement insister sur le fait que, aujourd'hui, à l'article 60C de la loi sur l'organisation judiciaire, il est dit: «1 Les magistrats de la Cour de justice, du Tribunal administratif, du Tribunal de première instance, du Tribunal tutélaire et du Tribunal cantonal des assurances sociales peuvent exercer leur fonction à mi-temps...» A mi-temps ! Cela signifie que le législateur a prévu depuis des années la possibilité, dans toutes ces juridictions, de diviser les postes en deux. C'est donc une porte ouverte que cet amendement cherche à enfoncer, mais une porte dangereuse, Mesdames et Messieurs, parce qu'aujourd'hui la formulation de l'article 14 de la loi sur l'organisation judiciaire garantit le dédoublement de deux postes. Et si cela devait être supprimé au profit d'une autorisation générale, qui ne ferait que recopier cette autre disposition dont je vous ai donné lecture, on n'aurait même pas la garantie que ces postes seraient effectivement dédoublés, autrement dit que le Grand Conseil aurait l'obligation, comme c'est le cas aujourd'hui, de dédoubler ces postes lors des élections auxquelles il procède. Je vous recommande donc de rejeter cet amendement.
M. Eric Stauffer (MCG), rapporteur de minorité. Merci, mon cher collègue Jornot, vous venez de me donner raison en faisant une très belle contradiction ! En effet, vous dites d'une part que c'est déjà prévu dans la loi et, d'autre part que, dans cet article de loi que nous sommes en train de discuter, le dédoublement est limité à deux demi-postes. C'est extraordinaire ! Donc, finalement, vous donnez raison au Mouvement Citoyens Genevois, selon lequel il faut corriger cet article qui apparaîtrait comme étant contradictoire avec un article supérieur et ne justement pas limiter le dédoublement à deux postes, mais laisser toute latitude au pouvoir judiciaire, ainsi que le prévoit cet article général. Donc, en fait d'enfoncer une porte ouverte, je crois que vous venez de vous en prendre une en pleine figure, mon cher collègue !
J'en reviens au fond de l'amendement. Qu'est-il dit dans notre constitution, Mesdames et Messieurs les députés ? Il est dit, à l'article 2A de la constitution genevoise: «1 L'homme et la femme sont égaux en droits. 2 Il appartient aux autorités législatives et exécutives de prendre des mesures pour assurer la réalisation de ce principe et aux autorités judiciaires de veiller à son respect.» C'est extraordinaire ! Evidemment, ceux qui sont chargés de veiller au respect de cet article constitutionnel sont les premiers à l'enfreindre, il est donc vraiment grand temps de faire le ménage, chers collègues, si vous le permettez et, encore une fois, la Constituante me paraît être une création très importante. Alors que proposons-nous ? Nous ne souhaitons justement pas limiter le dédoublement à deux demi-postes et présentons un amendement dont la teneur est la suivante: «Le Tribunal de première instance se compose de 27 juges - mais nous acceptons votre proposition de porter ce nombre à 28, Monsieur le député - dont 1 président et 1 vice-président, ainsi que de 18 juges suppléants. Les 28 postes de juge peuvent être dédoublés en postes à mi-temps.» Nous laissons donc la liberté au pouvoir judiciaire - à qui, par principe, nous faisons confiance - de choisir s'il veut dédoubler un, deux, trois, dix ou vingt postes. Je ne vois pas en quoi c'est dangereux ! Mais, je le répète, la véritable raison de la virulence dont tout le monde a fait preuve autour de cet hémicycle, c'est que vous ne savez pas comment les décompter dans cette commission judiciaire interpartis ! Qu'on soit bien clair ! Car cette commission, qui n'est pas inscrite dans la loi, selon les propres paroles de M. le conseiller d'Etat, qui se targue pourtant de promouvoir l'égalité entre hommes et femmes, puisqu'il siège avec moi dans la commission égalitaire appelée SPPE, pour les initiés... Monsieur le rapporteur de majorité, il y a un article qui stipule que les dédoublements sont possibles, un autre qui prévoit qu'il faut les limiter à deux, et, dans les décomptes de la commission judiciaire interpartis, vous devez faire des calculs entre la gauche et la droite, en disant: « La droite, vous avez eu tant de juges, alors maintenant c'est au tour de la gauche !» Eh oui, mais dans vos petits calculs d'apothicaires et d'entente... je ne dirai pas le mot... vous n'aviez pas prévu l'arrivée du Mouvement Citoyens Genevois ! Et sachez, Mesdames et Messieurs qui nous regardez, qu'il y a une grande guerre dans cette commission judiciaire interpartis, puisque la droite dit: «Oui, mais le MCG est un parti de gauche, il faut donc décompter les magistrats du MCG à la gauche.» Ce à quoi la gauche répond: «Mais non ! C'est un parti de droite ! Il faut les décompter à la droite !» Vous êtes pitoyables, laissez-moi vous le dire ! Vous avez inféodé le pouvoir judiciaire au politique, la Banque cantonale de Genève en est le plus bel exemple, et tous les citoyens comprendront ! En effet, ce sont 2 milliards à la charge du contribuable et, à ce jour, Mesdames et Messieurs, il n'y a aucun coupable, personne en prison, et cela, c'est un véritable scandale !
Mme Mathilde Captyn (Ve). J'aimerais simplement dire que les Verts voteront l'amendement ayant reçu l'aval du département des institutions et s'abstiendront sur celui du MCG. En effet, nous avons parlé des demi-charges en commission et avons décidé de revenir sur le sujet plus tard dans la suite des travaux, notamment par le biais du projet de loi que les Verts ont déposé sur la question. Je vous invite donc à respecter ce que nous avons décidé en commission.
La présidente. Merci, Madame la députée. La parole est à M. Stauffer, à qui il reste une minute et dix secondes.
M. Eric Stauffer (MCG), rapporteur de minorité. Ce sera plus qu'assez ! Je souhaite simplement dire, Monsieur le rapporteur de majorité, que les Verts, comme le MCG, enfoncent une porte ouverte, puisque ces derniers ont carrément rédigé un projet de loi qui est encore beaucoup plus général ! Donc, finalement, il n'y a que les libéraux qui sont intelligents, et tous les autres sont des idiots.
M. Laurent Moutinot, président du Conseil d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, le Conseil d'Etat vous demande d'accepter l'amendement figurant en page 80 du rapport de majorité. C'est en effet sur ce nombre de 28 juges, y compris à la deuxième phrase, qu'a été calculé le budget du pouvoir judiciaire.
Quant à l'amendement du MCG, Monsieur le rapporteur de minorité, vous le défendez en indiquant qu'il convient que l'égalité entre homme et femme soit mieux garantie dans le pouvoir judiciaire. Or j'ai le regret de vous dire que, dans le pouvoir judiciaire, l'égalité homme-femme penche même du côté des femmes, et que s'il reste peut-être encore du travail à accomplir dans ce domaine, c'est certainement au Grand Conseil, et assurément au Conseil d'Etat.
La présidente. Merci, Monsieur le président du Conseil d'Etat. Nous allons voter ces amendements en trois temps. Nous nous prononcerons d'abord sur l'amendement du rapporteur de majorité portant sur la première phrase de l'article 14, alinéa 1, qui a la teneur suivante: «Le Tribunal de première instance se compose de 28 juges, dont 1 président et 1 vice-président, ainsi que de 19 juges suppléants.»
Mis aux voix, cet amendement est adopté par 65 oui contre 6 non.
La présidente. Nous sommes également saisis d'un amendement à la deuxième phrase provenant du groupe MCG. Je vous le lis: «Les 27 postes de juge peuvent être dédoublés en postes à mi-temps.»
Monsieur Stauffer, vous avez demandé la parole ? Non, Monsieur le député, vous avez déjà parlé sur cet amendement... (Remarque de M. Eric Stauffer.) Non, je l'ai lu ! (Nouvelle remarque de M. Eric Stauffer.) Pardon ?
M. Eric Staufferer, rapporteur de minorité (MCG). Notre amendement commence à «Le Tribunal de première instance se compose de...» Ce n'est pas seulement la dernière phrase !
La présidente. Non, mais cette partie ne peut plus être votée, puisqu'on vient d'accepter l'amendement visant à ce qu'il y ait 28 juges ! Donc, maintenant... (Remarque de M. Eric Stauffer.) Ecoutez, je lis votre amendement !
M. Eric Stauffer, rapporteur de minorité (MCG). Donc ce sera 28 !
La présidente. D'accord, alors je répète votre proposition: «Les 28 postes de juge peuvent être dédoublés en postes à mi-temps.»
Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 48 non contre 7 oui et 18 abstentions.
La présidente. Nous allons à présent voter sur la deuxième phrase de l'amendement proposé par le rapporteur de majorité, à savoir: «Sur les 28 postes de juge, 2 sont dédoublés en postes à mi-temps.»
Mis aux voix, cet amendement est adopté par 66 oui contre 6 non.
Mis aux voix, l'article 14, alinéa 1 (nouvelle teneur), ainsi amendé est adopté.
La présidente. Nous sommes à l'article 56B. A l'alinéa 3 (nouvelle teneur), nous sommes saisis d'un amendement du Conseil d'Etat, que je vous lis: «Il n'est pas non plus recevable contre les décisions du Conseil d'Etat portant sur la levée ou le refus de levée du secret de fonction.»
M. Olivier Jornot (L), rapporteur de majorité. Nous en sommes donc à l'amendement qui concerne la possibilité ou l'impossibilité de recourir contre les décisions du Conseil d'Etat portant sur la levée ou le refus de levée du secret de fonction. Ce qu'il faut bien voir, c'est que cet amendement s'inscrit très exactement en porte-à-faux total avec toute la philosophie du projet de loi, c'est-à-dire en porte-à-faux total avec le principe de l'accès illimité au juge, sauf, nous dit la Constitution fédérale, dans des cas exceptionnels, à savoir dans des cas où la décision a un caractère politique prépondérant. Or, ici, de quoi s'agit-il ? Il s'agit des décisions que le gouvernement prend - et lorsque je dis «le gouvernement», c'est en réalité une tâche qui est aujourd'hui déléguée aux chefs de département, donc aux conseillers d'Etat - d'autoriser ou non un fonctionnaire à témoigner devant une juridiction civile, pénale ou administrative. C'est un domaine dans lequel, jusqu'à présent, la situation des justiciables était déplorable. En effet, lorsque vous vouliez faire citer comme témoin, dans un procès pénal ou de divorce, un membre de l'administration qui avait appris des faits importants sur votre cas dans le cadre de son travail, et que vous demandiez à ce fonctionnaire de venir témoigner, généralement, je peux le dire, vous essuyiez un refus de la part du chef de département, qui disait: «Non, nous ne voulons pas que ce fonctionnaire vienne témoigner.» Et, généralement, la motivation était la suivante: «Les faits sur lesquels vous avez l'intention de l'interroger ne sont pas pertinents pour la solution du litige.» Et, contre cette décision, vous ne pouviez vous adresser qu'au Conseil d'Etat, qui avait admis la possibilité de recourir auprès de lui, et c'est tout ! C'est donc un acquis de cette réforme que d'ouvrir le recours contre ces décisions-là.
En voyant l'amendement du Conseil d'Etat cet après-midi, je me suis rappelé l'existence d'un magnifique article écrit par M. François Paychère - j'aime bien citer M. Paychère, puisqu'il était expert dans le cadre de l'élaboration de ce projet de loi - article qui s'intitulait: «Entraide administrative et secret de fonction: le mariage de la carpe et du lapin». Dans cet article, M. Paychère dénonçait l'impossibilité de recourir contre les décisions de ce type et disait que, de toute façon, il ne sera plus possible de maintenir ce système une fois que les nouvelles normes fédérales seront entrées en vigueur; il ne sera plus possible d'empêcher les gens de saisir le juge; le droit cantonal genevois ne sera plus conforme aux dispositions de la Constitution fédérale, nous disait M. Paychère. Alors je comprends bien que le Conseil d'Etat entende maintenir sous sa férule toute la fonction publique et l'empêcher de se distraire dans toutes sortes de procès, mais, en réalité, lorsque le justiciable a besoin du témoignage d'un fonctionnaire et que cela lui est refusé, il doit pouvoir saisir le juge. Je vous invite donc à rejeter cet amendement, et je le regrette parce que, pour le reste, nous sommes parfaitement sur la même longueur d'onde avec le Conseil d'Etat, à part peut-être un détail «canin» de fin d'examen de la loi.
M. Laurent Moutinot, président du Conseil d'Etat. J'ai les mêmes lectures que M. le rapporteur de majorité, et il est vrai qu'il est un peu difficile de vous convaincre que la décision de lever ou non le secret de fonction d'un fonctionnaire devrait être soustraite au contrôle judiciaire. Je renonce par conséquent à cet amendement, s'agissant des fonctionnaires, tout en vous indiquant que cela va changer considérablement les moeurs de notre république. Je vous signale entre autres choses que, de manière très régulière, en matière pénale, on demande à citation comme témoins des gardiens de prison, qui doivent venir dire si tel ou tel était un bon gaillard, s'il était bien sage et s'il s'est bien comporté. Cela va entraîner un nombre d'heures de travail supplémentaires évident, il faut que vous le sachiez !
En revanche, je dépose un amendement modifié en limitant le non-recours exclusivement au Conseil d'Etat lui-même, à ses membres et à ses anciens membres. Parce que, là, on est dans le pur domaine politique, qui n'est pas une décision administrative, qui par conséquent n'est pas susceptible d'un contrôle par le Tribunal administratif. L'amendement est ainsi rédigé: «Il n'est pas non plus recevable contre les décisions du Conseil d'Etat portant sur la levée ou le refus de levée du secret de fonction d'un de ses membres ou anciens membres.» Là, c'est vous, et vous seuls, Mesdames et Messieurs les députés, qui êtes en droit de convoquer les conseillers d'Etat et de leur demander des comptes; ce n'est pas Tartempion, par le biais d'une procédure x, y ou z, qui doit pouvoir faire comparaître devant lui le Conseil d'Etat ou d'anciens conseillers d'Etat. Monsieur le rapporteur de majorité, en lisant attentivement «La carpe et le lapin», je pense que vous n'aurez pas d'objection à cet amendement.
La présidente. Monsieur le conseiller d'Etat, pouvez-vous me donner cet amendement, afin que je le transmette au moins aux chefs de groupe ? A moins que vous ne décidiez, Mesdames et Messieurs les députés, de le voter en écoutant la proposition verbale de M. le conseiller d'Etat ?
M. Olivier Jornot (L), rapporteur de majorité. Madame la présidente, je vous propose, pour éviter de perdre trop de temps et pouvoir aller de l'avant, que cet amendement soit repris dans le troisième débat, afin que, d'ici là, tout le monde ait pu en prendre connaissance. Je vous indique d'ores et déjà que je me rallie à cet amendement, à partir du moment où il est limité au Conseil d'Etat, mais que je rédigerai un sous-amendement de telle manière à reprendre la même formule que dans tous les cas où nous avons exclu les recours en raison du caractère politique prépondérant de la décision; il faut donc ajouter à cette phrase: «en raison de leur caractère politique prépondérant au sens de l'article 86, alinéa 3, de la loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral.» Je vous recommande d'ajouter cette phrase à la main sur l'amendement, de le photocopier, et nous serons ainsi tous d'accord !
La présidente. Très bien, nous reprendrons donc ce point au troisième débat.
Mis aux voix, l'article 56B, alinéa 2 (nouvelle teneur) et alinéa 4 (abrogé), est adopté, de même que l'article 56D (nouvelle teneur).
La présidente. A l'article 56F, nous sommes saisis d'un amendement du Mouvement Citoyens Genevois.
M. Eric Stauffer (MCG), rapporteur de minorité. Mesdames et Messieurs les députés, de quoi s'agit-il dans cet article de loi ? Il est question du Tribunal administratif et du nombre de juges qui doivent y siéger. Il existe de nombreuses exceptions ou conditions et, pour que vous compreniez - sans être trop technique, puisque je m'évertue à simplifier le débat parlementaire et les articles de loi afin que tout le monde puisse les comprendre - je vais vous lire l'actuel article 56F de la loi sur l'organisation judiciaire: «1 Le Tribunal administratif siège, au nombre de 5 juges, en matière de: a) votations et d'élections; b) contentieux de la fonction publique; c) décisions relatives à l'acquisition d'immeubles par des personnes à l'étranger; d) décisions de l'office cantonal du logement [...]. 2 Dans les autres causes, le Tribunal administratif peut, par règlement, décider de siéger en section de 3 juges. [...]»
L'expérience du Mouvement Citoyens Genevois de ces trois dernières années l'a conduit à une réflexion: le Tribunal administratif nous a par deux fois donné tort, avec des directives émanant de l'Etat - l'une de la chancellerie, l'autre du service des votations - notamment à propos du 1,5 bulletin qui prétendument nous manquait dans la commune de Carouge pour obtenir le quorum. Un bulletin et demi, Mesdames et Messieurs, 74 suffrages - un bulletin correspondant à 42 suffrages ! Nous nous sommes donc posé des questions puisque, comme je vous l'ai expliqué préalablement, malheureusement, à ce jour - et tant que la constitution n'y aura pas fait le ménage, mais c'est une vision à huit ou dix ans - le pouvoir judiciaire est complètement inféodé au pouvoir politique. Vous l'aurez compris, ces décisions, à Carouge comme à Vernier, étaient donc d'ordre politique, et non pas judiciaire, et je l'affirme haut et fort ici, ce soir, devant vous !
Nous proposons donc un amendement, dont la teneur est la suivante: «1 Le Tribunal administratif siège en section de 5 juges. 2 En matière de votations et d'élections, le Tribunal administratif siège obligatoirement avec des juges titulaires et des juges assesseurs représentant l'ensemble des partis politiques siégeant au Grand Conseil. [...]» Pourquoi ? Parce que c'est un garant de la démocratie ! Puisque vous nous bassinez avec cette commission judiciaire interpartis, qui n'a aucune base légale, mais qui est légale - nous, nous la considérons comme anticonstitutionnelle et complètement illégale - et que vous nous dites que cela assure une espèce de dépolitisation du pouvoir judiciaire, parce qu'il y a un équilibre subtil - pour reprendre les propos de maître Nidegger, un autre avocat, décidément ! - nous, nous vous proposons la même chose ! Dans le cas de votations et d'élections, jouons sur cette subtilité consensuelle, dont Genève est la championne d'Europe, et mettons un juge par parti politique représenté au Grand Conseil ! Ainsi, les décisions qui seront issues de ce collège des juges seront à tout le moins équilibrées et non contestables ! Puisque nous savons que le Tribunal administratif, dans l'affaire de Carouge, avec la perte du quorum pour le Mouvement Citoyens Genevois, et lors de l'élection du Conseil administratif, troisième tour... Et espérons que l'on ne fasse pas comme Rocky, qui sort chaque année un film supplémentaire ! Maintenant, le pauvre, il doit bientôt avoir 70 ans, et il joue toujours dans Rocky ! Nous espérons donc qu'à Vernier, enfin, nous aurons ce troisième magistrat ! C'était donc la preuve puisque, dans le cas de Carouge, sur trois magistrats, il y avait un Vert, un socialiste et un libéral et que, dans le cas de Vernier, je n'ai plus la clé de répartition en tête, mais c'était à peu près du même acabit. Alors c'est simple ! On est juge et partie, on est dans une logique complètement politicienne, et cela, ce n'est juste pas concevable dans un Etat de droit en 2008. Oui, Mesdames et Messieurs les députés...
La présidente. Il vous faut conclure !
M. Eric Stauffer. Je conclus, Madame la présidente ! On sait que le MCG vous dérange au point de vue électoral mais, malheureusement pour vous, on a le soutien populaire et, aussi longtemps que les citoyens voteront pour nous, nous serons ici et nous veillerons à ce que vous fassiez les choses bien, et dans le respect des citoyens qui nous ont élus.
Pour finir, je vous demande d'accepter, Mesdames et Messieurs les députés, l'amendement du Mouvement Citoyens Genevois.
La présidente. Merci, Monsieur le député. Nous allons à présent voter sur l'amendement du MCG à l'article 56F: «1 Le Tribunal administratif siège en section de 5 juges. 2 En matière de votations et d'élections, le Tribunal administratif siège obligatoirement avec des juges titulaires et des juges assesseurs représentant l'ensemble des partis politiques siégeant au Grand Conseil. 3 Il siège toutefois au nombre de 5 juges: a) lorsque l'un de ses membres titulaires ou l'un des juges suppléants membre de la section concernée le demande; b) lorsque l'une des sections entend se prononcer sur une question de principe, changer de jurisprudence ou amorcer un tel changement; c) en matière de décisions du Conseil d'Etat; d) en matière de décisions du Grand Conseil.»
Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 58 non contre 6 oui.
Mis aux voix, l'article 56F (nouvelle teneur) est adopté, de même que les articles 56G (nouvelle teneur de la note), alinéa 1 (nouvelle teneur), et 56V, alinéa 2, lettre g (nouvelle).
La présidente. A l'article 56X, alinéa 3, nous sommes saisis d'un amendement du Conseil d'Etat.
M. Olivier Jornot (L), rapporteur de majorité. Comme je l'ai dit tout à l'heure, en tant que rapporteur de majorité, je me rallie à cet amendement. Il s'agira donc de faire des juges assesseurs des magistrats comme les autres puisque, finalement, l'une des innovations essentielles qui découlent de la création de la commission cantonale de recours en matière administrative est d'en faire un organe judiciaire à part entière. Comme cette commission sera composée de juges assesseurs spécialisés en fonction des matières, il n'a pas paru raisonnable à la commission de déterminer dès aujourd'hui le nombre des juges assesseurs que nous aurions à élire. Il est préférable - et, en ce sens, l'amendement du Conseil d'Etat est judicieux - de déléguer au Conseil d'Etat qui, par voie réglementaire, fixera le nombre des assesseurs. Il le fera notamment - j'en forme le voeu et M. le conseiller d'Etat me le confirmera certainement - en fixant un nombre de juges assesseurs suffisant pour que le tribunal puisse constituer de nombreuses chambres spécialisées et, ainsi, disposer d'une force de travail importante pour absorber les recours et les traiter dans des délais raisonnables.
M. Laurent Moutinot, président du Conseil d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, je n'ai rien à ajouter à la brillante plaidoirie du rapporteur de majorité et il est évident que le Conseil d'Etat veillera à ce qu'il y ait des assesseurs en nombre suffisant pour éviter toute paralysie de la justice. L'autre intérêt de cet amendement est de préciser que les juges assesseurs sont élus par votre Grand Conseil et non plus désignés par le Conseil d'Etat.
La présidente. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Nous passons donc au vote sur l'amendement du Conseil d'Etat à l'article 56X, alinéa 3, que je vous lis: «Le Conseil d'Etat fixe le nombre des juges assesseurs à élire. Ces derniers sont pris en dehors de l'administration.»
Mis aux voix, cet amendement est adopté par 56 oui et 6 abstentions.
Mis aux voix, l'article 56X (nouveau) ainsi amendé est adopté.
Mis aux voix, l'article 56Y (nouveau) est adopté, de même que les articles 56Z (nouveau) à 149D, alinéa 4 (abrogé).
La présidente. A l'article 162, nous sommes saisis de deux amendements: le premier - qui figure à la page 80 du rapport de majorité - concerne l'alinéa 4, alors que le second, qui provient du Conseil d'Etat, touche l'alinéa 7.
M. Olivier Jornot (L), rapporteur de majorité. L'amendement que je propose dans le rapport de majorité est strictement technique. Il s'agit de faire en sorte d'assurer la transition entre les commissions de recours existantes et la commission cantonale de recours en matière administrative, sur le modèle qui était prévu d'ores et déjà pour la reprise par le Tribunal administratif des commissions statuant en instance unique.
Quant à l'amendement du Conseil d'Etat, il est en fait intimement lié à celui que vous venez d'accepter, s'agissant du mode de désignation des juges assesseurs. Il sera nécessaire de mettre en place une procédure d'élections, dont on sait qu'elle peut prendre quelques mois et, par conséquent, il paraît raisonnable de prévoir une disposition transitoire, de telle manière que la commission puisse siéger dès le 1er janvier 2009 et qu'elle soit ensuite rejointe par les juges assesseurs, une fois que ces derniers auront été élus et assermentés et qu'ils seront entrés en fonction.
M. Laurent Moutinot, président du Conseil d'Etat. J'aimerais juste préciser que cet amendement à l'alinéa 7 est une prudence de notre part pour éviter de paralyser, le cas échéant, une juridiction en cas de difficultés, mais l'idée fondamentale est d'aller suffisamment vite pour que, pratiquement, cette disposition ne soit pas utilisée ou, au pire, pendant un temps extrêmement limité.
La présidente. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Nous votons d'abord sur l'amendement à l'alinéa 4, dont voici la teneur: «Les recours interjetés avant l'entrée en vigueur de la modification du (à compléter) et pendants devant une autre juridiction sont transmis d'office au Tribunal administratif, respectivement à la commission cantonale de recours en matière administrative, s'ils entrent dans leur compétence en vertu des dispositions du nouveau droit.»
Mis aux voix, cet amendement est adopté par 60 oui et 3 abstentions.
La présidente. Nous passons maintenant au vote de l'amendement du Conseil d'Etat à l'alinéa 7, que je vous lis: «La commission cantonale de recours en matière administrative siège dans la composition prévue à l'article 56X, alinéa 1, de la présente loi jusqu'à l'entrée en fonction de ses juges assesseurs.»
Mis aux voix, cet amendement est adopté par 62 oui (unanimité des votants).
Mis aux voix, l'article 162, alinéas 3, 4, 5, 6 et 7 (nouveaux), ainsi amendé est adopté.
Mis aux voix, l'article 163, alinéa 2 (nouveau) est adopté.
Mis aux voix, l'article 1 (souligné) est adopté, de même que l'article 2 (souligné).
Article 3 (souligné) Modifications à d'autres lois:
Loi sur l'information du public et l'accès aux documents
La présidente. A l'article 3 (souligné), alinéa 1 (nouveau), nous sommes saisis d'un amendement.
M. Eric Stauffer. C'est à l'alinéa 1 ? Je ne vous ai pas bien comprise !
La présidente. C'est un amendement de M. Jornot à l'alinéa 1 de l'article 3 (souligné), qui concerne les modifications de la LIPAD - page 80 du rapport.
M. Eric Stauffer. Alors je parlerai plus tard de mon amendement sur le conseil supérieur de la magistrature.
La présidente. Oui, il n'est pas à cet endroit, nous y viendrons plus tard !
M. Olivier Jornot (L), rapporteur de majorité. Mesdames et Messieurs les députés, il s'agit simplement de compléter une lacune. La LIPAD évoque la problématique du huis clos du Grand Conseil, et puisque tout cela est abrogé par la suite, il convient également d'abroger cette disposition avec, évidemment, un effet de décalage sur les différents alinéas de l'article 3 (souligné).
La présidente. Merci, Monsieur le député. Nous allons procéder au vote sur cet amendement à l'article 3 (souligné), alinéa 1 (nouveau), dont voici la teneur: «La loi sur l'information du public et l'accès aux documents (LIPAD), du 5 octobre 2001 (A 2 08), est modifiée comme suit: Art. 6, alinéa 2, let. a (abrogée).»
Mis aux voix, cet amendement (abrogation de l'article 6, alinéa 2, lettre a) est adopté par 49 oui et 12 abstentions.
Mis aux voix, l'alinéa 1 (nouveau) de l'article 3 (souligné) ainsi amendé est adopté.
Les alinéas 1 à 44 deviennent les alinéas 2 à 45.
Article 3 (souligné) Modifications à d'autres lois:
Loi sur la procédure administrative
Mis aux voix, l'article 4A (nouveau) est adopté, de même que les articles 7 (nouvelle teneur) à 63, alinéas 3, 4 et 5 (nouvelle teneur).
La présidente. A l'article 86 de cette loi, nous sommes à nouveau saisis d'un amendement.
Mme Nathalie Fontanet (L). Dans tous les domaines du droit, l'examen d'un recours est subordonné à une avance de frais, qui ne couvre de loin pas le coût de la justice, mais qui y contribue, en rappelant au justiciable que la justice n'est pas gratuite. Exiger une avance de frais a en outre l'avantage de forcer le recourant à se demander s'il souhaite vraiment poursuivre la procédure. Si, par exemple, un contribuable proteste sur un coup de tête après avoir reçu une décision fiscale qui ne lui plaît pas, et que son courrier est traité comme un recours, le fait de devoir verser un émolument l'incitera sans doute à se demander s'il souhaite vraiment que la justice se penche sur son dossier.
Aujourd'hui, Mesdames et Messieurs, la situation est totalement hypocrite. En effet, plusieurs juridictions, dont le Tribunal administratif, exigent une avance de frais en fixant un délai précis et en faisant référence à l'article 86 de la loi sur la procédure administrative. Or cette disposition ne permet pas actuellement de déclarer irrecevable le recours pour lequel l'émolument n'a pas été payé, et donc le tribunal n'a pas d'autre choix que d'instruire le recours, même si aucune suite n'a été donnée à sa demande.
Compte tenu de l'importance du contentieux que traite le Tribunal administratif et de l'importance de celui que traitera la commission cantonale de recours en matière administrative, il est impératif que ces juridictions puissent déclarer irrecevables les recours pour lesquels l'avance de frais n'a pas été payée dans le délai. Encore une fois, c'est la même solution qui s'applique en matière civile, ainsi que dans les autres cantons, et même au plan fédéral. Et ce n'est pas une mesure antisociale - car d'ores et déjà je vous entends ! - parce que, lorsque le recourant est dépourvu de moyens financiers, il peut solliciter l'assistance juridique ! Pourquoi cela serait-il acceptable en procédure civile, et non pas en procédure administrative ? Et s'il obtient cette assistance, il est dispensé de verser toute avance de frais; par conséquent, l'égalité de traitement entre les contribuables aisés et démunis est parfaitement garantie.
En commission, M. François Paychère, qui a été entendu en qualité d'expert et qui, sauf erreur de ma part, n'est pas particulièrement issu de nos bancs, s'est déclaré favorable à un système qui fasse dépendre du versement des avances de frais l'examen du recours. Encore une fois, si tous les commissaires avaient été présents, la majorité aurait adopté cet amendement, mais ce ne fut pas le cas, raison pour laquelle le groupe libéral vous le soumet à nouveau aujourd'hui.
Mme Mathilde Captyn (Ve). Les Verts n'approuvent pas du tout l'amendement des libéraux, dont la volonté est de déclarer un recours irrecevable si les avances de frais n'ont pas été payées, parce que cela alourdirait les procédures, qu'il faudrait envoyer des recommandés d'exécution de payer, etc., et, surtout, parce que la loi sur la procédure administrative, en son article 86, prévoit déjà la possibilité pour les juges d'exiger une avance de frais. La situation actuelle permet donc la souplesse, ce qui est une bonne chose, et nous vous engageons par conséquent à refuser cet amendement.
La présidente. Merci, Madame la députée. Nous allons donc voter sur l'amendement de Mme Fontanet à l'article 86 (nouvelle teneur), que voici: «1 La juridiction invite le recourant à faire une avance ou à fournir des sûretés destinées à couvrir les frais de procédure et les émoluments présumables, et en fait dépendre l'examen du recours. Elle fixe à cet effet un délai suffisant. 2 Si l'avance n'est pas faite dans le délai imparti, la juridiction déclare le recours irrecevable.»
Mis aux voix, cet amendement est adopté par 40 oui contre 22 non.
Mis aux voix, l'article 89C, lettre c (nouvelle teneur), est adopté.
Mis aux voix, cet alinéa de l'article 3 (souligné) ainsi amendé est adopté.
Article 3 (souligné) Modifications à d'autres lois:
Loi sur la nationalité genevoise
Mis aux voix, l'article 15 (nouvelle teneur) est adopté.
La présidente. Nous sommes saisis de plusieurs amendements touchant les articles 17, 18, alinéa 1, 19, 20, 21 et 46, alinéa 2, de cette loi, amendements déposés par M. Velasco.
M. Alberto Velasco (S). Je me suis permis de déposer ces amendements qui concernent la question des naturalisations, car c'est peut-être la dernière fois - je dis bien « peut-être» ! - que nous aurons à débattre sur le sujet. J'aimerais d'abord citer les propos de Jean-Jacques Rousseau selon lesquels la loi protège les faibles; mais j'ajouterai: pour autant qu'ils y aient accès ! Chers collègues, comme d'autres, j'ai assisté ici, durant toutes ces années, à des recours, non pas de citoyens, mais d'habitants de cette cité qui avaient demandé la naturalisation mais ne l'avaient pas obtenue, parce que la commune la leur avait refusée. Ensuite, c'était à notre Grand Conseil de statuer, avec des critères qui lui étaient propres et à la suite d'enquêtes de collègues députés qui se rendaient sur place pour s'enquérir de la situation et discuter, avant de nous faire un rapport à huis clos pour que nous puissions prendre une décision. Et très souvent, même pratiquement toujours, ce Grand Conseil, comme l'a dit Mme Captyn tout à l'heure, acceptait avec humanité ces recours.
Que nous propose-t-on aujourd'hui ? La possibilité d'aller devant une instance judiciaire, à savoir le Tribunal administratif voire, pourquoi pas, le Tribunal fédéral. Ce que moi je suggère, Mesdames et Messieurs les députés et citoyens, c'est de rétablir la situation antérieure, où le Grand Conseil pouvait être saisi, et de laisser en outre la possibilité d'aller au Tribunal administratif ou fédéral. Un citoyen à qui le Grand Conseil refuserait la nationalité pourrait ainsi saisir le Tribunal administratif ou fédéral.
D'autre part, nous ne sommes pas d'accord avec la question des communes. En effet, dans la situation actuelle, tel que le projet de loi issu de commission est rédigé, les communes ont le droit de recours. Or vous savez très bien qu'un recours auprès du Tribunal administratif ou fédéral a un coût, et rappelez-vous, Mesdames et Messieurs les libéraux, qu'à l'époque libéraux et socialistes avaient travaillé ensemble afin de diminuer les taxes de naturalisation, car ces dernières étaient très chères et que bien des habitants de ce canton ne se naturalisaient pas en raison du prix élevé de ces taxes. Nous avons obtenu des taxes très basses mais, aujourd'hui, malgré la diminution du prix de celles-ci, il reste des gens qui n'osent pas aller de l'avant. Alors imaginez-vous lorsqu'ils sauront qu'en cas de refus ils devront aller jusqu'au Tribunal administratif, voire au Tribunal fédéral, mais avec la possibilité que la commune recoure... Or cette dernière peut recourir, parce qu'elle a tous les avocats qu'elle veut - elle a les moyens - mais la personne en question, si elle a de faibles revenus, devra mettre les moyens. Nous estimons donc que le fait que la commune recoure a pour effet de décourager bien des habitants et ne fait pas en sorte que ces futurs citoyens puissent gagner leur recours devant les instances. C'est la raison pour laquelle nous avons déposé ces amendements, qui n'enlèvent pas du tout ce que prévoit le projet de loi tel qu'issu des travaux de commission, à savoir la faculté d'aller devant les instances du Tribunal administratif et fédéral, mais retirent la possibilité - puisque nous proposons d'abroger l'article 19 - pour les communes de recourir. En outre, ils rétablissent la faculté pour tout habitant de s'adresser au Grand Conseil, car je ne vois pas pourquoi les gens ne pourraient plus faire appel à notre Conseil ! Voilà ce que je voulais vous expliquer à propos des amendements que nous avons déposés.
M. Olivier Jornot (L), rapporteur de majorité. La question de la procédure de naturalisation a entraîné des réflexions importantes au sein de la commission ad hoc Justice 2010, qui s'est posé toute une série de questions. Les questions de base, d'abord - celles qu'évoquait tout à l'heure Mme Emery-Torracinta et que vous mentionnez maintenant, Monsieur Velasco - comme celle de savoir s'il s'agit de décisions politiques ou non. Et je crois que, là, il y a eu une unanimité pour dire qu'en effet ce ne sont pas des décisions politiques: elles sont d'abord administratives, même s'il est évident qu'elles comportent un caractère politique important.
Je vous rappelle qu'aujourd'hui, dans notre canton, les étapes du processus sont les suivantes: vous obtenez un préavis de la commune de résidence - alors que, dans bien d'autres cantons suisses, c'est une décision, il s'agit chez nous simplement d'un préavis de la commune. Vous faites ensuite l'objet d'une décision du Conseil d'Etat, puis vous avez cette possibilité de réexamen - ce n'est pas le mot techniquement juste, mais c'est celui qu'on a toujours employé - à savoir la possibilité de porter devant le Grand Conseil cette décision du Conseil d'Etat. A partir du moment où la définition de la naturalisation est claire, le recours doit être ouvert, et il est évidemment impossible de l'exclure, ce qui fait que votre amendement, à juste titre, vise simplement à réintroduire la phase «Grand Conseil» entre le Conseil d'Etat et un éventuel recours au Tribunal administratif.
Mesdames et Messieurs, j'aimerais attirer votre attention sur le fait que cette idée, aussi sympathique soit-elle... En réalité, je ne suis pas sûr qu'elle le soit, parce que si je me souviens bien des débats en commission, il n'y a pas eu un commissaire pour trouver sympathiques les discussions que nous avons sur les naturalisations; les commissaires les ont généralement plutôt décrites comme étant relativement indignes, en tout cas indignes du traitement individualisé que l'on devrait réserver aux cas particuliers des personnes qui s'adressent à nous. Mais à supposer que l'on considère cette idée comme sympathique, elle est néanmoins irréaliste parce que, à partir du moment où l'on doit ouvrir un recours judiciaire contre cette décision, on ne peut plus la prendre dans une assemblée de cent personnes, car cela devient une décision qui doit être motivée et respecter une série de critères, et ce ne peut pas être simplement un vote au bulletin secret, comme nous le pratiquons.
J'observe d'ailleurs que ce serait le seul domaine du droit où, par extraordinaire, les décisions prises par l'administration peuvent être portées devant ce cénacle: il n'y en a aucun autre ! Or il n'y a aucune raison de faire de la naturalisation un cas particulier, à partir du moment où, comme le rappelait M. Nidegger tout à l'heure, l'initiative lancée par l'UDC a été refusée par le peuple suisse. Je vous invite donc, même si j'ai de la compréhension pour ces amendements, à les rejeter.
La présidente. Merci, Monsieur le député. Nous allons donc voter l'ensemble des amendements proposés par M. Velasco, qui touchent les articles 17, 18, alinéa 1, 19, 20, 21 et 46, alinéa 2, de la loi sur la nationalité genevoise.
Mis aux voix, ce groupe d'amendements est rejeté par 46 non contre 10 oui.
Mis aux voix, l'article 17 (abrogé) est adopté, de même que les articles 18, alinéa 1 (nouvelle teneur) à 53A (abrogé).
Mis aux voix, l'alinéa 2 de l'article 3 (souligné) est adopté.
Article 3 (souligné) Modifications à d'autres lois:
Loi portant règlement du Grand Conseil de la République et canton de Genève
La présidente. Nous sommes saisis d'un amendement de M. Velasco aux articles 2 et 29 de cette loi...
Une voix. Ils tombent !
La présidente. Oui, ils tombent, puisque les amendements précédents n'ont pas été acceptés.
Mis aux voix, l'alinéa 3 de l'article 3 (souligné) est adopté.
Article 3 (souligné) Modifications à d'autres lois:
Loi sur la statistique publique cantonale
Mis aux voix, l'alinéa 4 de l'article 3 (souligné) est adopté.
Article 3 (souligné) Modifications à d'autres lois:
Loi sur l'administration des communes
Mis aux voix, l'alinéa 5 de l'article 3 (souligné) est adopté.
Article 3 (souligné) Modifications à d'autres lois:
Loi sur l'instruction publique
Mis aux voix, l'alinéa 6 de l'article 3 (souligné) est adopté.
Article 3 (souligné) Modifications à d'autres lois:
Loi sur les Hautes écoles spécialisées
Mis aux voix, l'alinéa 7 de l'article 3 (souligné) est adopté.
Article 3 (souligné) Modifications à d'autres lois:
Loi sur l'université
La présidente. A l'article 62, nous sommes saisis d'un amendement de M. Jornot.
M. Olivier Jornot (L), rapporteur de majorité. J'aimerais simplement rappeler qu'il s'agit ici de la problématique de la commission de recours de l'université. Le projet de loi du Conseil d'Etat prévoyait sa suppression mais, au cours de ses travaux, la commission ad hoc a constaté que le Grand Conseil avait déjà supprimé cette commission lors de l'adoption de la loi sur l'université ! Par conséquent, nous avions biffé cette disposition, considérant qu'il était inutile de s'acharner et de tirer sur l'ambulance en supprimant deux fois la CRUNI. Or il se trouve que, cette loi faisant l'objet d'un référendum, il paraît nécessaire au rapporteur de majorité de réintroduire cette disposition, de sorte que le tout puisse entrer en vigueur au 1er janvier 2009.
La présidente. Merci, Monsieur le rapporteur. Nous allons donc voter l'amendement de M. Jornot modifiant l'article 62 de la loi sur l'université, que voici: «Les décisions concernant les candidats à l'admission à l'université, les étudiantes ou étudiants, les auditrices ou auditeurs, peuvent faire l'objet d'une opposition.»
Mis aux voix, cet amendement est adopté par 59 oui et 1 abstention.
Mis aux voix, l'alinéa 8 de l'article 3 (souligné) ainsi amendé est adopté.
Les alinéas 8 à 45 deviennent 9 à 46.
Article 3 (souligné) Modifications à d'autres lois:
Loi sur la formation professionnelle
Mis aux voix, l'alinéa 9 de l'article 3 (souligné) est adopté.
Article 3 (souligné) Modifications à d'autres lois:
Loi sur les indemnités et les aides financières
Mis aux voix, l'alinéa 10 de l'article 3 (souligné) est adopté.
Article 3 (souligné) Modifications à d'autres lois:
Loi générale sur les contributions publiques
Mis aux voix, l'alinéa 11 de l'article 3 (souligné) est adopté.
Article 3 (souligné) Modifications à d'autres lois:
Loi sur l'imposition des personnes physiques Objet de l'impôt Assujettissement à l'impôt
La présidente. Nous sommes à présent saisis d'un amendement à l'article 15, alinéa 2, de cette loi.
M. Laurent Moutinot, président du Conseil d'Etat. Il s'agit d'un amendement du Conseil d'Etat revenant à supprimer les articles 46 et 47 de la loi de procédure fiscale. Dès lors que les juges assesseurs seront désignés par votre Grand Conseil, ils seront soumis au conseil...
La présidente. Monsieur le conseiller d'Etat, nous n'en sommes pas encore là ! Nous traitons d'un amendement figurant à la page 80 du rapport de M. Jornot, qui porte sur l'article 15 de la loi sur l'imposition des personnes physiques.
M. Olivier Jornot (L), rapporteur de majorité. Cet amendement figure effectivement à la page 80 du rapport. Il s'agit d'exclure le recours contre les décisions prises par le Conseil d'Etat en matière d'exonération d'entreprises. La commission a adopté une disposition de même teneur dans la loi sur l'imposition des personnes morales; elle ne l'a pas fait en ce qui concerne la loi sur l'imposition des personnes physiques, qui est également touchée, puisque les entreprises peuvent être organisées en raison individuelle. Il y a lieu d'exclure ce recours, puisqu'on est vraiment, en matière d'exonération, dans un domaine totalement politique, où le Conseil d'Etat a toute latitude pour accorder lesdites exonérations.
La présidente. Merci, Monsieur le rapporteur. Nous allons voter sur votre amendement à l'article 15, alinéa 2, de la loi sur l'imposition des personnes physiques, dont voici la teneur: «Revêtant un caractère politique prépondérant au sens de l'article 86, alinéa 3, de la loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral, les décisions du Conseil d'Etat fondées sur l'alinéa 1 ne sont pas sujettes à recours cantonal.»
Mis aux voix, cet amendement est adopté par 44 oui et 10 abstentions.
Mis aux voix, l'alinéa 12 de l'article 3 (souligné) ainsi amendé est adopté.
Les alinéas 12 à 46 deviennent les alinéas 13 à 47.
Article 3 (souligné) Modifications à d'autres lois:
Loi sur l'imposition des personnes morales
Mis aux voix, l'alinéa 13 de l'article 3 (souligné) est adopté.
La présidente. Je vous signale juste que, dans la loi sur l'imposition des personnes morales, il y a une petite faute de frappe. Il s'agit de la loi D 3 15, et non D 3 11, comme il est écrit dans le rapport.
Article 3 (souligné) Modifications à d'autres lois:
Loi de procédure fiscale
Mis aux voix, l'article 7 (nouvelle teneur) est adopté, de même que les articles 12, lettre h (nouvelle teneur) à 45 (abrogé).
La présidente. Aux articles 46 et 47, nous sommes saisis d'un amendement du Conseil d'Etat.
M. Laurent Moutinot, président du Conseil d'Etat. Je suis navré d'avoir été trop rapide tout à l'heure ! Il s'agit simplement de la suppression du pouvoir disciplinaire sur les juges assesseurs; dès lors que c'est vous qui les élirez, ils deviendront des magistrats justiciables du conseil supérieur de la magistrature, et donc plus du Conseil d'Etat, en conformité avec les principes de séparation des pouvoirs. C'est la raison pour laquelle il vous est demandé d'abroger les deux dispositions qui fondaient le pouvoir disciplinaire du Conseil d'Etat.
La présidente. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Nous allons donc voter sur l'amendement du Conseil d'Etat, qui consiste à abroger les articles 46 et 47 de la loi de procédure fiscale.
Mis aux voix, cet amendement (abrogation des articles 46 et 47) est adopté par 59 oui (unanimité des votants).
Mis aux voix, l'abrogation de l'articles 48 est adopté.
Mis aux voix, l'article 49, alinéa 1 (nouvelle teneur) est adopté, de même que les articles 50, alinéas 1 et 2 (nouvelle teneur) à 54 (nouvelle teneur avec modification de la note).
Mis aux voix, l'alinéa 14 de l'article 3 (souligné) ainsi amendé est adopté.
Article 3 (souligné) Modifications à d'autres lois:
Loi sur les droits de succession
Mis aux voix, l'alinéa 15 de l'article 3 (souligné) est adopté.
Article 3 (souligné) Modifications à d'autres lois:
Loi sur les droits d'enregistrement
Mis aux voix, l'alinéa 16 de l'article 3 (souligné) est adopté.
Article 3 (souligné) Modifications à d'autres lois:
Loi sur la dation en paiement
Mis aux voix, l'alinéa 17 de l'article 3 (souligné) est adopté.
Article 3 (souligné) Modifications à d'autres lois:
Loi sur la constitution de réserves de crise par l'économie privée
Mis aux voix, l'alinéa 18 de l'article 3 (souligné) est adopté.
Article 3 (souligné) Modifications à d'autres lois:
Loi d'application de la loi fédérale sur l'acquisition d'immeubles par des personnes à l'étranger
Mis aux voix, l'alinéa 19 de l'article 3 (souligné) est adopté.
Article 3 (souligné) Modifications à d'autres lois:
Loi instituant un conseil supérieur de magistrature
Mis aux voix, l'intitulé (nouvelle teneur) est adopté, de même que l'article 8 (nouvelle teneur).
La présidente. A l'article 11A de cette loi, nous sommes saisis d'un amendement de M. Stauffer.
M. Eric Stauffer (MCG), rapporteur de minorité. Madame la présidente, Mesdames et Messieurs les députés, de quoi s'agit-il ? Je vais essayer encore une fois de simplifier les choses, pour la compréhension de tout le monde.
Nous avons un pouvoir judiciaire, nous avons un conseil supérieur de la magistrature, qui est là pour contrôler la légalité de l'application du pouvoir judiciaire, et nous avons une Cour d'appel de la magistrature, qui contrôle les contrôleurs du pouvoir judiciaire. Or figurez-vous que, au premier étage du sandwich, c'est-à-dire le conseil supérieur de la magistrature, nous avons des juges de siège qui travaillent et qui se déterminent sur la légalité des actions de leurs collègues. On voudrait ainsi faire passer un «contrôle du contrôleur», en reprenant toujours les mêmes collègues.
Comme je vous l'ai expliqué précédemment, avant d'être juge, il faut payer sa cotisation de parti, alors je vois bien un juge socialiste condamner un autre juge socialiste et, s'il ne le fait pas, le contribuable aller à la Cour d'appel de la magistrature pour demander à un socialiste de condamner deux socialistes dans la foulée ! Evidemment, ce ne serait pas concevable, donc cela ne fonctionne pas.
Je vais vous parler encore une fois de l'expérience du Mouvement Citoyens Genevois depuis ces trois ans. Chers citoyens, chers collègues, vous l'avez tous vécu: lors de la campagne électorale pour le poste de procureur général, un des candidats, le socialiste François Paychère, a attaqué publiquement le candidat Daniel Zappelli sur un plateau de télévision, en disant qu'il avait fait un classement politique et non judiciaire à propos de l'affaire de Vernier. Quel scandale dans notre république ! Nous avons, nous, saisi le conseil supérieur de la magistrature qui s'est évidemment empressé, comme pour toutes les plaintes déposées par le MCG, de classer l'affaire. C'est encore une fois une belle démonstration de l'inféodation politique du système judiciaire. Et ça, ça ne va pas, Mesdames et Messieurs ! Ce n'est pas concevable dans un Etat de droit en 2008 ! Du reste, cher collègue rapporteur de majorité, vous êtes bien placé pour le savoir, puisque c'est vous qui avez fait sauter les élections à Vernier avec votre autre casquette d'avocat au barreau de Genève pour le parti libéral.
Cela étant, que proposons-nous dans la constitution de cette Cour d'appel de la magistrature ? Encore une fois, nous ne sommes pas juristes, mais nous voulons simplement essayer d'apporter un peu de bon sens citoyen dans ces lois extrêmement compliquées pour le justiciable. Nous demandons que le but et la composition de la Cour d'appel de la magistrature soient les suivants: la Cour d'appel de la magistrature est composée de 5 juges; aucun juge du siège ne peut être candidat; peuvent être candidats les détenteurs du brevet d'avocat; l'âge minimum est 50 ans; les juges de la Cour d'appel de la magistrature ne sont pas des juges de carrière - puisqu'on voit mal quelqu'un juger l'un de ses collègues ou anciens collègues, ce n'est pas concevable dans le principe de la séparation des pouvoirs ! - et, enfin, pour ne pas que cela coûte cher au contribuable, nous demandons que le greffe de cette Cour d'appel de la magistrature soit commun avec celui d'autres cours existantes. Voilà notre demande qui, encore une fois, est empreinte de bon sens.
Et que nous propose le Conseil d'Etat ? Il ne suggère évidemment pas la même chose et je vais vous montrer une fois de plus le pouvoir du politique dans le système judiciaire genevois, puisque le Conseil d'Etat nous propose que le greffe de la Cour d'appel de la magistrature soit tenu par la chancellerie d'Etat, autrement dit la garde républicaine du Conseil d'Etat. Or je vous rappelle, Mesdames et Messieurs les députés, qu'il n'y a pas si longtemps il n'existait pas de secrétariat du Bureau du Grand Conseil, puisque nous dépendions de la chancellerie d'Etat pour nos travaux. Nous avons donc souhaité, dans une saine séparation des pouvoirs, créer un secrétariat du Grand Conseil complètement autonome du Conseil d'Etat, lequel mettait un peu trop son nez dans les affaires du législatif.
Voilà ce que nous proposons, Mesdames et Messieurs les députés ! Encore une fois, nous ne sommes pas juristes, nous ne sommes pas avocats, nous avons simplement voulu apporter un peu de bon sens et de respect des citoyens, afin de ne pas reprendre toujours les mêmes, qui jugent toujours les mêmes, et ainsi de suite. Je vous demande donc de soutenir l'amendement du Mouvement Citoyens Genevois.
M. Olivier Jornot (L), rapporteur de majorité. A vrai dire, cet amendement me permet de vous dire deux mots sur cette Cour d'appel de la magistrature, qui a beaucoup occupé la commission, parce qu'il n'y a pas de solution qui s'impose d'elle-même pour trouver le moyen d'exercer un contrôle judiciaire sur les décisions du conseil supérieur de la magistrature. Ce conseil n'est pas une instance judiciaire, puisqu'il n'y a pas que des juges qui y siègent, mais également des gens qui ne sont pas magistrats, précisément pour assurer un contrôle qui ne soit pas interne à la magistrature, mais le plus ouvert possible. Alors comment trouver une solution judiciaire au-dessus de ce conseil supérieur de la magistrature pour respecter le droit fédéral, sans retomber dans une solution où les juges se contrôlent eux-mêmes ? Pour résoudre ce problème, le Conseil d'Etat a proposé de créer une juridiction à part, qui n'a rien à voir avec le reste de la magistrature, même si elle a un caractère judiciaire, même si c'est un tribunal supérieur au sens de la loi sur le Tribunal fédéral.
La solution proposée a certainement de nombreux inconvénients, les libéraux notamment l'ont beaucoup critiquée, mais ils se sont finalement rangés à l'avis de la majorité - que je représente ici - qui a voté cet article avec différents accommodements, certains résultant même de propositions émanant du rapporteur de minorité. Je suis d'ailleurs étonné qu'il ait déposé un amendement, alors précisément que certaines de ses propositions ont été retenues, de manière à rendre par exemple la fonction de juge titulaire et de juge suppléant incompatible avec toute fonction de magistrat du pouvoir judiciaire. Et pourtant vous revenez aujourd'hui, Monsieur Stauffer, avec une disposition qui va moins loin, car elle permettrait par exemple à M. Daniel Zappelli d'être candidat puisque, comme vous le savez bien, le parquet ne fait pas partie de la magistrature du siège !
Quoi qu'il en soit, je vous propose, Mesdames et Messieurs les députés, de refuser cet amendement. Et j'oubliais la raison principale pour laquelle il faut le refuser: à l'alinéa 1, il a pour effet de biffer le champ de compétence de la Cour d'appel de la magistrature, dont on ne comprendrait dès lors plus du tout ce qu'elle a à faire dans le système.
M. Laurent Moutinot, président du Conseil d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, j'aimerais simplement vous inviter fermement à refuser cet amendement et vous rappeler, Monsieur Stauffer, que vous avez voté l'article tel qu'il ressort du rapport de majorité, précisément parce qu'il a été pris en compte un certain nombre de critiques - comme la nécessaire indépendance - y compris sur la question de savoir où devait se trouver le greffe. Je vous ai fait la proposition de le mettre à la chancellerie pour éviter toute suspicion de collusion avec quelque juridiction que ce soit, vous avez accepté cette proposition et vous avez pourtant l'audace de revenir ici sur un sujet dont vous êtes vous-même l'auteur ! (Applaudissements.)
La présidente. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Nous votons l'amendement de M. Stauffer à l'article 11A de la loi instituant un conseil supérieur de la magistrature, dont voici la teneur: «1 La Cour d'appel de la magistrature est composée de 5 juges. 2 Aucun juge du siège ne peut être candidat. 3 Peuvent être candidats les détenteurs du brevet d'avocat. 4 L'âge minimum est 50 ans. 5 Les juges de la Cour d'appel de la magistrature ne sont pas des juges de carrière. 6 Le greffe de cette Cour d'appel de la magistrature est commun avec celui d'autres cours existantes.»
Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 49 non contre 5 oui et 1 abstention.
Mis aux voix, l'article 11A (nouveau) est adopté, de même que les articles 11B (nouveau) et 11C (nouveau).
Mis aux voix, l'alinéa 20 de l'article 3 (souligné) est adopté.
L'alinéa 21 de l'article 3 (souligné) concerne la loi sur la procédure administrative.
Article 3 (souligné) Modifications à d'autres lois:
Loi sur la police
Mis aux voix, l'article 25A, alinéa 6 (nouvelle teneur), est adopté.
La présidente. A l'article 27, alinéa 4, nous sommes saisis d'un amendement du rapporteur de minorité.
M. Eric Stauffer (MCG), rapporteur de minorité. Pour répondre à notre cher conseiller d'Etat, oui, nous avons évidemment participé aux travaux de cette commission, et ce n'est pas parce qu'on essaie de simplifier le discours et le charabia juridico-technique pour ceux qui nous écoutent que nous ne savons pas de quoi nous parlons. C'est vrai que nous avons apporté des améliorations, qui ont été acceptées en commission, à l'amendement que vous aviez proposé, mais cela ne nous a pas semblé suffisant à la relecture, raison pour laquelle nous avons déposé cet amendement en plénière. (Exclamations.) Mais oui, mais bon, encore une fois, vous pouvez émettre des sarcasmes, vous pouvez rigoler, ça m'est égal ! Nous continuons à faire notre travail humblement. Nous avons été élus pour ça et nous continuerons ainsi, tant et aussi longtemps que la population nous soutiendra. Et à voir votre attitude, ce n'est pas demain la veille que ça va cesser !
Maintenant, concernant cet amendement à l'article 27, alinéa 4, de la loi sur la police, puisque l'on sait que la seule chose qui est dure chez les avocats qui ont rédigé tous ces projets, c'est le noyau, comme je l'avais déjà dit, et que c'est justement le noyau dur qui pèche dans ce parlement, nous avons pris la décision au Mouvement Citoyens Genevois de retirer cet amendement et nous n'avons plus rien à dire sur ce projet de loi.
Mis aux voix, l'article 27, alinéa 4 (nouvelle teneur), est adopté, de même que les articles 40 (nouvelle teneur) et 40A (nouvelle teneur avec modification de la note).
Mis aux voix, l'alinéa 22 de l'article 3 (souligné) est adopté.
Article 3 (souligné) Modifications à d'autres lois:
Loi sur les violences domestiques
Mis aux voix, l'alinéa 23 de l'article 3 (souligné) est adopté.
Article 3 (souligné) Modifications à d'autres lois:
Loi sur l'organisation et le personnel de la prison
Mis aux voix, l'alinéa 24 de l'article 3 (souligné) est adopté.
Article 3 (souligné) Modifications à d'autres lois:
Loi d'application de la loi fédérale sur les étrangers
Mis aux voix, l'article 3 (nouvelle teneur) est adopté.
La présidente. A l'article 4, nous sommes saisis d'un amendement de M. Jornot.
M. Olivier Jornot (L), rapporteur de majorité. La commission s'est efforcée, s'agissant des assesseurs spécialisés qui siégeront dans les diverses matières pour lesquelles la commission sera compétente, de conserver les exigences de formation qui figurent aujourd'hui dans la loi. Malheureusement, en ce qui concerne la commission cantonale de recours de police des étrangers, cette exigence de formation avait disparu; je vous propose donc simplement de la réintroduire en acceptant cet amendement.
La présidente. Merci, Monsieur le député. Nous allons donc voter sur cet amendement à l'article 4 de la loi d'application sur la loi fédérale des étrangers, que je vous lis: «Lorsqu'elle est compétente pour statuer en matière de police des étrangers, la commission cantonale de recours en matière administrative est composée d'un juge du Tribunal de première instance, qui la préside, et de deux juges assesseurs de formation juridique.»
Mis aux voix, cet amendement est adopté par 53 oui et 3 abstentions.
Mis aux voix, l'article 4 (nouvelle teneur avec modification de la note) ainsi amendé est adopté.
Mis aux vois, l'article 7, alinéa 5 (abrogé) est adopté.
Mis aux voix, l'alinéa 25 de l'article 3 (souligné) ainsi amendé est adopté.
Article 3 (souligné) Modifications à d'autres lois:
Loi sur les procédés de réclame
Mis aux voix, l'alinéa 26 de l'article 3 (souligné) est adopté.
Article 3 (souligné) Modifications à d'autres lois:
Loi d'application de la législation fédérale sur la circulation routière
Mis aux voix, l'alinéa 27 de l'article 3 (souligné) est adopté.
Article 3 (souligné) Modifications à d'autres lois:
Loi sur les allocations familiales
Mis aux voix, l'alinéa 28 de l'article 3 (souligné) est adopté.
Article 3 (souligné) Modifications à d'autres lois:
Loi concernant les Rentes genevoises Assurance pour la vieillesse
Mis aux voix, l'alinéa 29 de l'article 3 (souligné) est adopté.
Article 3 (souligné) Modifications à d'autres lois:
Loi sur la santé
Mis aux voix, l'alinéa 30 de l'article 3 (souligné) est adopté.
Article 3 (souligné) Modifications à d'autres lois:
Loi d'application de la législation fédérale sur les sites contaminés
Mis aux voix, l'alinéa 31 de l'article 3 (souligné) est adopté.
Article 3 (souligné) Modifications à d'autres lois:
Loi sur la commission de surveillance des professions de la santé et des droits des patients
Mis aux voix, l'alinéa 32 de l'article 3 (souligné) est adopté.
Article 3 (souligné) Modifications à d'autres lois:
Loi sur les routes
Mis aux voix, l'alinéa 33 de l'article 3 (souligné) est adopté.
Article 3 (souligné) Modifications à d'autres lois:
Loi sur la gestion des déchets
Mis aux voix, l'alinéa 34 de l'article 3 (souligné) est adopté.
Article 3 (souligné) Modifications à d'autres lois:
Loi d'application de la loi fédérale sur l'aménagement du territoire
Mis aux voix, l'alinéa 35 de l'article 3 (souligné) est adopté.
Article 3 (souligné) Modifications à d'autres lois:
Loi sur les eaux
Mis aux voix, l'alinéa 36 de l'article 3 (souligné) est adopté.
Article 3 (souligné) Modifications à d'autres lois:
Loi instituant deux fonds pour le développement des énergies renouvelables et les économies d'énergie
Mis aux voix, l'alinéa 37 de l'article 3 (souligné) est adopté.
Article 3 (souligné) Modifications à d'autres lois:
Loi sur les gravières et exploitations assimilées
Mis aux voix, l'alinéa 38 de l'article 3 (souligné) est adopté.
Article 3 (souligné) Modifications à d'autres lois:
Loi sur la protection des monuments, de la nature et des sites
Mis aux voix, l'alinéa 39 de l'article 3 (souligné) est adopté.
Article 3 (souligné) Modifications à d'autres lois:
Loi sur les constructions et les installations diverses
Mis aux voix, l'alinéa 40 de l'article 3 (souligné) est adopté.
Article 3 (souligné) Modifications à d'autres lois:
Loi sur les démolitions, transformations et rénovations de maisons d'habitation (mesures de soutien en faveur des locataires et de l'emploi)
Mis aux voix, l'alinéa 41 de l'article 3 (souligné) est adopté.
Article 3 (souligné) Modifications à d'autres lois:
Loi autorisant le Conseil d'Etat à adhérer à l'accord intercantonal sur les marchés publics
Mis aux voix, l'alinéa 42 de l'article 3 (souligné) est adopté.
Article 3 (souligné) Modifications à d'autres lois:
Loi sur l'expropriation pour cause d'utilité publique
Mis aux voix, l'alinéa 43 de l'article 3 (souligné) est adopté.
Article 3 (souligné) Modifications à d'autres lois:
Loi sur les améliorations foncières
Mis aux voix, l'alinéa 44 de l'article 3 (souligné) est adopté.
Article 3 (souligné) Modifications à d'autres lois:
Loi sur les conditions d'élevage, d'éducation et de détention des chiens
La présidente. A l'article 27, nous sommes saisis d'un amendement du Conseil d'Etat.
M. Olivier Jornot (L), rapporteur de majorité. Je vais essayer de ne pas faire un grand débat sur les délais d'ordre à 22h55 ! De quoi s'agit-il ? Lorsque nous avons parlé en commission de la suppression de la commission de recours de l'université, un commissaire a émis une proposition consistant à dire qu'on devrait finalement, lorsque le Tribunal administratif statue sur les recours des étudiants, imposer un délai d'ordre, c'est-à-dire le forcer à rendre sa décision dans un certain délai. Nous avons largement disserté de tout cela, pour arriver à la conclusion que la notion de délai d'ordre était en soi inopportune, parce que les juridictions administratives devaient pouvoir donner la priorité aux causes qui sont prioritaires ! Ce peut être un projet qui concerne des centaines de logements, une détention administrative sur laquelle il faut statuer très vite, ou encore une question d'euthanasie canine, puisque c'est de cela qu'il s'agit dans l'amendement du Conseil d'Etat.
Après avoir constaté en commission que les délais d'ordre étaient haïssables, nous avons ensuite eu notre attention attirée sur le fait qu'il en existait déjà un dans la législation genevoise, à savoir celui de la loi en question sur les conditions d'élevage, d'éducation et de détention des chiens. La commission a donc voulu être cohérente et dire que, puisqu'il n'y a pas de délai d'ordre pour statuer sur la détention administrative des êtres humains qui sont incarcérés en vertu de la loi d'application de la loi fédérale sur les étrangers, il n'était pas nécessaire de placer au-dessus la qualité de vie des chiens qui sont retenus dans le chenil cantonal. Nous apprenons grâce à l'amendement du Conseil d'Etat qu'il n'y a que dix places dans ce chenil et que le onzième chien incarcéré, si vous me pardonnez cette analogie, serait fort mal traité; quant à moi, je vous propose de maltraiter cet amendement et de le rejeter !
M. Laurent Moutinot, président du Conseil d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, après avoir entendu M. Jornot, je retire l'amendement relatif aux chiens ! (Exclamations.)
Mis aux voix, l'alinéa 45 de l'article 3 (souligné) est adopté.
Article 3 (souligné) Modifications à d'autres lois:
Loi sur la pêche
Mis aux voix, l'alinéa 46 de l'article 3 (souligné) est adopté.
Article 3 (souligné) Modifications à d'autres lois:
Loi sur les forêts
Mis aux voix, l'alinéa 47 de l'article 3 (souligné) est adopté.
Mis aux voix, l'article 3 (souligné) est adopté.
Troisième débat
La présidente. Au troisième débat, nous sommes saisis de trois amendements. Le premier, qui concerne l'article 56B de la loi sur l'organisation judiciaire, émane conjointement du Conseil d'Etat et du rapporteur de majorité. Le voici: «3 Il n'est pas non plus recevable contre les décisions du Conseil d'Etat portant sur la levée ou le refus de levée du secret de fonction d'un de ses membres ou anciens membres, en raison de leur caractère politique prépondérant au sens de l'article 86, alinéa 3, de la loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral.»
Mme Mathilde Captyn (Ve). Le groupe des Verts propose un sous-amendement visant à ce que les anciens conseillers d'Etat soient exempts de cette disposition.
La présidente. Pardon ?
Mme Mathilde Captyn. Excusez-moi, il est un peu tard ! Je disais donc que nous ne souhaitons pas que les anciens conseillers d'Etat soient mentionnés dans cet amendement.
La présidente. Vous souhaitez donc biffer l'expression «ou anciens membres», c'est bien cela ?
Des voix. Oui !
M. Eric Stauffer (MCG), rapporteur de minorité. Pour résumer la proposition des Verts, cela veut dire que les anciens conseillers d'Etat seraient astreints à venir témoigner, c'est ainsi que nous l'avons compris ! Et le Mouvement Citoyens Genevois va soutenir cet amendement, parce que bien des fois l'immunité peut être utilisée à mauvais escient. Nous attendons bien sûr quelques réponses du Conseil d'Etat, et il nous paraît important que, avec le temps, une certaine prescription soit abolie et que les anciens conseillers d'Etat puissent venir témoigner sans être couverts par leurs successeurs. Nous soutiendrons donc l'amendement des Verts.
Mme Michèle Künzler (Ve). Il nous semblait simplement important que les anciens magistrats redeviennent des citoyens tout à fait ordinaires et qu'ils soient soumis au même régime, c'est la raison de cet amendement. Il pourrait y avoir d'autres problèmes comme il y en a eu à la BCG, on ne sait pas ce que l'avenir nous réserve, et je pense que, s'il est logique que les magistrats en fonction bénéficient de cet effet, ceux qui ne le sont plus ne doivent en revanche plus en bénéficier, car ils sont des citoyens ordinaires.
M. Guillaume Barazzone (PDC). J'aimerais m'exprimer sur l'amendement des Verts. Il me semble qu'on ne peut pas faire une distinction aussi simpliste que celle que vous venez de faire, Madame Künzler ! Ce qui est dit dans l'amendement du Conseil d'Etat, c'est que lorsqu'un conseiller d'Etat a quitté sa charge, il ne peut pas, après avoir été en fonction, c'est-à-dire après son élection, témoigner sur des faits dont il a eu connaissance durant sa période de fonction. Par conséquent, en réalité, il revient au même d'être ancien conseiller d'Etat ou d'être en fonction, puisqu'il s'agit de faits ou de décisions qui ont été prises lorsque le conseiller d'Etat était en fonction; cela concerne donc des dossiers d'un département et il n'est pas question ici d'un témoignage d'un conseiller d'Etat qui viendrait s'exprimer à titre privé sur un accident de la circulation, par exemple.
M. Eric Stauffer (MCG), rapporteur de minorité. Je crois qu'on a ici la démonstration de l'emprise politique sur le pouvoir judiciaire ! Et, dans la constitution, il doit être inscrit que la justice est là pour faire la preuve de la vérité ! Or, lorsque la population a besoin de connaître la vérité, on voudrait empêcher ceux qui détiennent cette vérité de venir témoigner au sacro-saint que c'était une décision politique. Mais j'estime - et le Mouvement Citoyens Genevois avec moi - que, lorsque l'Etat a fauté lors de décisions politiques et a truandé la population genevoise, notamment sur des sujets qui nous animent, comme les tarifs de l'électricité - et j'espère que le conseiller d'Etat en charge du département du territoire répondra avant qu'il ne soit plus un élu, parce que la population a besoin de savoir - il n'est pas normal qu'on se cache derrière un pseudo-secret, alors que la population genevoise doit connaître la vérité et que la justice est là pour faire la preuve de la vérité. J'estime que c'est un bien, et donc nous soutiendrons inconditionnellement cet amendement.
M. Yves Nidegger (UDC). Je crois que le débat a glissé, ce doit être l'heure tardive, la fatigue et l'envie d'en finir... Toujours est-il qu'il n'est pas question ici de débattre sur le bien-fondé du secret de fonction et son importance pour les conseillers d'Etat et les anciens conseillers d'Etat, mais bien de se demander si, lorsqu'on aura refusé de lever le secret, un juge pourra examiner si les motifs y sont ou n'y sont pas. Il s'agit uniquement de cela ! Et je pense quant à moi que les juges seront assez intelligents pour distinguer les cas où, précisément, un intérêt public préside valablement à la décision du Conseil d'Etat de refuser de lever le secret - auxquels cas ils confirmeront le refus de lever - des cas où cela n'a rien à voir avec le secret et où il s'agit simplement de protéger des conseillers d'Etat ou des anciens conseillers d'Etat contre toutes sortes d'autres choses, comme le fait d'être cité en justice pour des raisons frivoles. Je comprends tout à fait qu'il faille protéger les gens contre la frivolité de certains procès, mais cela n'a rien à voir avec la matière que nous régissons ici, à savoir si l'on peut demander à un juge d'examiner le bien-fondé d'un refus. Quant à moi, l'amendement du Conseil d'Etat peut être refusé.
M. Laurent Moutinot, président du Conseil d'Etat. J'aimerais tout de suite dire à Mme la députée Künzler que, lorsqu'on quitte le Conseil d'Etat, on redevient un citoyen comme tous les autres, il ne s'agit pas d'être protégé dans la durée ! Simplement, lorsqu'il y a un secret de fonction, il s'applique pendant la durée des fonctions mais, même après, on ne peut pas le violer. Par exemple, même si j'ai demandé ma radiation au barreau pour venir siéger ici, je suis toujours soumis au secret professionnel des avocats, et il en va de même dans toutes les professions assermentées.
En outre, si vous décidez que seuls les magistrats en fonction sont couverts par cette disposition, il est facile d'aller demander à l'un de nos anciens collègues, trois ou quatre ans après, de raconter tout ce que l'on veut savoir ! Donc soyons clairs: soit vous suivez la position de M. Nidegger, selon laquelle il n'y a plus de levée de secret qui tienne, soit vous estimez que, s'agissant des décisions politiques et de la manière dont elles sont prises politiquement - je ne parle pas d'administration - on a le droit, au niveau de l'exécutif, d'être entre nous et, à ce moment-là, vous suivez l'amendement du Conseil d'Etat intégralement. Mais le sous-amendement des Verts ne joue pas !
La présidente. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Nous allons d'abord voter sur le sous-amendement des Verts, qui vise à supprimer l'expression «ou anciens membres».
Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 50 non contre 15 oui et 1 abstention.
La présidente. Nous allons à présent voter sur l'ensemble de l'amendement à l'article 56B, à savoir: «3 Il n'est pas non plus recevable contre les décisions du Conseil d'Etat portant sur la levée ou le refus de levée du secret de fonction d'un de ses membres ou anciens membres, en raison de leur caractère politique prépondérant au sens de l'article 86, alinéa 3, de la loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral.»
Mis aux voix, cet amendement est adopté par 46 oui contre 4 non et 11 abstentions.
Mis aux voix, l'article 56B, alinéas 2 et 3 (nouvelle teneur) et alinéa 4 (abrogé), ainsi amendé est adopté.
Mis aux voix, l'article 1 (souligné) est adopté, de même que l'article 2 (souligné).
Mis aux voix, l'alinéa 1 de l'article 3 (souligné) est adopté, de même que l'alinéa 2.
La présidente. Nous sommes à présent saisis d'un groupe d'amendements touchant les articles 49, 95, 180, 182 et 186 de la loi portant règlement du Grand Conseil à l'alinéa 3.
M. Olivier Jornot (L), rapporteur de majorité. J'endosse ces amendements réalisés par la perspicacité du secrétariat général du Grand Conseil, qui visent à éliminer dans notre loi portant règlement du Grand Conseil les références à la procédure de réexamen en matière de naturalisation.
M. Laurent Moutinot, président du Conseil d'Etat. C'est effectivement la suite logique de votre vote précédent sur la question de la procédure en matière de naturalisation, j'appuie donc ces amendements.
La présidente. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Nous allons donc voter sur ce groupe d'amendements à la loi portant règlement du Grand Conseil. Je les énumère:
«Art. 49, lettre b (abrogée)
Art. 95, al. 1, lettre b, chiffre 8 (abrogé)
Art. 180, al. 1, lettre b (abrogée)
Art. 182, al. 1, lettre a (abrogée)
Art. 186, al. 2, lettre a (nouvelle teneur)
2 Les commissions permanentes renouvellent leur bureau au mois de novembre de chaque année à l'exception:
a) de la commission de grâce qui renouvelle son bureau conformément aux règles qui lui sont propres;».
Mis aux voix, ce groupe d'amendements est adopté par 64 oui (unanimité des votants).
Mis aux voix, l'alinéa 3 de l'article 3 (souligné) ainsi amendé est adopté.
Mis aux voix, l'alinéa 4 de l'article 3 (souligné) est adopté, de même que les alinéas 5 à 20.
La présidente. Nous votons maintenant l'ensemble...
Des voix. Mme Künzler !
La présidente. Ah oui, Madame Künzler, j'ai oublié votre amendement, ce doit être la fatigue, excusez-moi ! Il concerne l'article 86 de la loi sur la procédure administrative.
Mme Michèle Künzler (Ve). Merci, Madame la présidente ! C'est vrai que l'heure est tardive et qu'on a plutôt envie de rentrer que de déposer un amendement ! Mais je crois qu'il est extrêmement important de revenir au texte actuel de la loi. En réalité, on peut déjà demander des sûretés ou des avances, si on le juge nécessaire ou si l'on voit qu'il s'agit d'une opposition un peu téméraire. Mais, là, vous l'exigez pour tous les cas ! Or il y a déjà tellement de cas où des personnes sont exclues d'un jugement simplement à cause du délai au tribunal... Et la cause n'est pas plus juste parce qu'elle est payée ! Par conséquent, je pense qu'il faut vraiment revenir aux dispositions actuelles, qui permettent de demander des sûretés, surtout - comme dans d'autres juridictions - si des commissions rogatoires ou des expertises sont demandées, car alors, oui, il est logique de réclamer des sûretés ! Mais pour un accès basique au tribunal, pour pouvoir faire un recours, j'estime qu'il n'est absolument pas normal que l'on doive toujours payer à l'avance, comme au poker, où l'on paie pour voir... Ce n'est pas de la justice, c'est une justice de classe, et ce n'est pas normal !
Je pense qu'il faut pouvoir garantir un accès à la justice pour tout le monde. Vous dites que les personnes peuvent solliciter l'aide judiciaire - je ne sais plus le terme exact - mais, franchement, ce ne sont que les gens extrêmement démunis qui y ont droit et il existe de nombreux cas où ce n'est pas possible !
Actuellement, le tribunal est plutôt encombré par des gens qui ont des assurances juridiques et qui font recours à propos de tout et n'importe quoi. C'est peut-être là qu'il faudrait agir ! En revanche, à ceux qui n'ont pas ces assurances, qui veulent faire un recours justifié - parce qu'il est peut-être justifié ! - mais qui n'ont pas l'argent tout de suite, il n'est pas normal de refuser l'accès à la justice, simplement parce qu'ils n'ont pas les moyens sur le moment. Je trouve que ce n'est vraiment pas juste et qu'il faut donc revenir au texte actuel.
Mme Nathalie Fontanet (L). Tout d'abord, je constate que, dans l'amendement des Verts, on a une notion totalement indéterminée: on est dans le cadre d'une base légale et vous indiquez «si les circonstances l'exigent». Très bien, mais quelles circonstances ? Cela donnera lieu aussi à d'autres problèmes !
J'aimerais aussi souligner qu'aujourd'hui ce que nous souhaitons, c'est que la procédure soit la même devant toutes les juridictions, comme on l'a déjà indiqué. Or, tant au niveau cantonal que national, il y a des frais à payer lors des procédures de recours, et si ces frais ne sont pas payés, il n'y a pas de recours et celui-ci est déclaré irrecevable.
En outre, il n'existe pas de problème d'égalité de traitement, notamment pour les personnes en situation plus difficile, puisqu'elles ont la possibilité de demander l'assistance juridique. Le groupe libéral vous demande donc de refuser l'amendement des Verts.
M. Olivier Jornot (L), rapporteur de majorité. Mesdames et Messieurs les députés, pour les excellentes raisons qui vous ont incités tout à l'heure à accepter l'amendement à l'article 86, je vous invite à refuser cet amendement des Verts. Il y a une erreur dans le raisonnement, Madame Künzler, parce qu'aujourd'hui l'article 86, dont vous voulez la réintroduction, ne permet tout simplement pas de déclarer irrecevables les recours lorsque l'avance de frais n'est pas payée. Et cela engendre des situations ubuesques et injustes, parce que celui qui se débrouille pour réunir les 500 F dans le délai se sera, lui, saigné pour parvenir à payer cette somme, et celui qui, en revanche, n'aura pris aucune mesure et ne s'en sera pas préoccupé verra quand même son recours traité par la juridiction, comme si de rien n'était. Il s'agit donc simplement d'avoir un peu de bon sens, comme disait tout à l'heure l'un des interlocuteurs du débat !
La présidente. Merci, Monsieur le député. Nous allons donc voter l'amendement de Mme Künzler à l'article 86 de la loi sur la procédure administrative, qui vise donc à revenir à la version actuelle de la loi, que voici: «Si les circonstances l'exigent, la juridiction peut obliger le recourant à faire une avance ou à fournir des sûretés destinées à couvrir les frais de procédure et les émoluments présumables, et en faire dépendre l'examen du recours.» Si cet amendement est accepté, l'alinéa 2 sera donc abrogé.
Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 34 non contre 30 oui et 3 abstentions.
Mis aux voix, l'article 86 (nouvelle teneur) est adopté.
Mis aux voix, l'alinéa 21 de l'article 3 (souligné) est adopté, de même que les alinéas 22 à 47.
Mise aux voix, la loi 10253 est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 64 oui et 1 abstention. (Applaudissements à l'annonce du résultat.)