République et canton de Genève
Grand Conseil
Séance du jeudi 28 août 2008 à 17h
56e législature - 3e année - 10e session - 61e séance
PL 10216-A
Suite du premier débat
La présidente. Nous sommes toujours au point 31 de notre ordre du jour. Le rapporteur est M. Jornot - il est là. Il y avait encore trois autres personnes qui souhaitaient s'exprimer, dont M. Eric Stauffer.
M. Eric Stauffer (MCG). Mesdames et Messieurs les députés, ce projet de loi - qui a pour rapporteur M. Jornot - ne me surprend pas. Je vais vous expliquer pourquoi. Depuis un certain temps, par tous les moyens à disposition du pouvoir législatif, que nous représentons, des limitations de la parole sont édictées au sein de ce parlement.
Une voix. A cause de qui ?!
M. Eric Stauffer. Oui, vous faites bien de le dire: «à cause de qui ?» Justement, Monsieur le président du PDC... (Exclamations.) Ce n'est pas vous ? C'est pas vous, excusez-moi ! Mais ça venait de chez vous ! Madame la présidente, il est à noter que certains renient leurs paroles ici. Et moins on en dit, mieux ils se portent ! Eh bien non, Mesdames et Messieurs les députés, ce n'est pas comme ça que fonctionne un parlement ! Un parlement est fait pour parlementer, et c'est donc au sein de cet hémicycle, sous l'oeil attentif de la population, que nous sommes appelés à délibérer sur les outils législatifs qui modifieront la vie quotidienne de nos concitoyens. Et c'est là où le bât blesse, parce que vous êtes parvenus, grâce à une courte majorité lors des débats sur la bonne gouvernance des établissements publics cités par mon collègue Roger Deneys. Je ne rappellerai pas ici - mon éducation me l'interdirait - que vous avez mis les pieds sur la table et bu du champagne en lisant le journal alors que l'on parlait de bonne gouvernance... Donc, je ne le rappellerai pas, justement pour éviter ce genre de - selon vous - dérapage.
Néanmoins, Mesdames et Messieurs les députés qui avez déposé ce projet de loi pour limiter le temps de parole, eh bien, grâce à vous, il y a eu un référendum, remporté par la population qui vous a désavoués ! Là, c'est vrai, vous avez pris une sacrée claque, et par deux fois ! Le soir de la discussion au parlement, nous avons dû, M. Deneys et moi, déposer une «myrielle» d'amendements... (Commentaires.) ... «myrielle» ou «kyrielle», comme vous voulez, ça n'a aucune espèce d'importance ! Avec arrogance, vous n'avez pas voulu nous écouter, et le peuple vous a rappelés à l'ordre. C'est lui qui a le dernier mot !
Raison pour laquelle, Mesdames et Messieurs les députés, nous allons nous opposer à ce projet de loi élaboré par «Saint Jornot». Il est vrai que sa supériorité dans le langage est tout à son honneur, mais, dans bien des cas, cela fait que ce parlement est complètement annihilé par son «phrasage», puisqu'il ne peut plus s'exprimer.
Alors, Mesdames et Messieurs les députés, je vous enjoins de refuser ce projet de loi et à laisser sa fonction première à ce parlement, c'est-à-dire parlementer !
La présidente. Merci, Monsieur le député. Je passe la parole à «Saint» Jornot Olivier. (Rires.)
M. Olivier Jornot (L), rapporteur. Je vais faire un peu de «phrasage», vous me le pardonnerez. (Rires.) Je souhaite en effet rappeler à ce Grand Conseil de quoi il s'agit, parce que cela fait un moment, déjà avant la pause, que nous parlons d'un tas de choses, que nous projetons tout un tas de peurs intérieures sur un débat qui ne mérite pas autant d'honneurs. Je rappellerai d'ailleurs qu'en commission, lorsqu'on estime qu'un projet de loi voté par la majorité représente une atteinte terrible à la démocratie, on dépose un rapport de minorité ! Je suis très surpris d'entendre aujourd'hui un certain nombre de partis pousser des cris d'orfraie alors même qu'ils n'ont pas jugé utile ni pris la peine de prendre leur plume pour rédiger un rapport de minorité ! Me retrouvant seul rapporteur, je pensais d'ailleurs que le débat serait tranquille et je suis très surpris de constater que tel n'est pas le cas.
Le deuxième point que je voudrais relever, c'est qu'on doit finalement discuter et décider d'une chose extrêmement simple ! Tout à l'heure, on l'a compliquée à l'envi. On doit simplement décider, dans le cadre du système actuel des demandes de renvoi en commission - question assez facile à trancher - s'il est nécessaire que chaque groupe parlementaire ait le temps de dire exactement la même chose que les groupes qui l'auront précédé, c'est-à-dire, selon les fois, quatre fois la même chose, trois fois dans l'autre sens, etc. Donc, s'il est nécessaire, pour le bien de la démocratie, d'entendre à plusieurs reprises exactement les mêmes arguments, probablement pas exprimés dans le même «phrasage», mais les mêmes arguments quand même ! C'est de ça qu'il s'agit dans ce projet de loi, et seulement de ça.
Tout à l'heure, on a évoqué la solution fédérale. La solution fédérale, c'est celle qui consiste en effet à exiger des groupes qu'ils déposent des demandes de renvoi avant le débat. Alors c'est formidable, parce que ça permet à chacun de s'exprimer, mais le résultat concret c'est qu'ensuite, dans le cours du débat, on ne peut plus former de demande de renvoi ! Or, il est arrivé dans ce parlement qu'après quelques heures de débat échauffé on ait pu trouver raisonnable de renvoyer un objet en commission, et je trouverai dommage que le parlement se prive de cette possibilité.
Il y a une autre solution dont nous n'avons pas parlé, qui est évoquée dans le rapport, c'est celle qu'on pratique en matière de motions, en matière de résolutions et en matière de rapports divers. Elle consiste à obliger - à obliger ! - que le premier tour de parole soit terminé avant de voter sur le renvoi en commission. Ça évite la solution du «débat dans le débat» qui, précisément, pourrit nos discussions en matière de projets de lois.
Toutefois, de nouveau, ce n'est pas de cela qu'il s'agit aujourd'hui ! Il s'agit aujourd'hui uniquement de savoir quels sont les interlocuteurs qui s'expriment lors du débat sur le renvoi en commission. Le groupe radical proposait qu'on applique la même solution que pour les points de l'ordre du jour définis comme urgents. En matière d'urgences, Mesdames et Messieurs, personne d'entre vous ne considère que la démocratie est bafouée parce que vous ne pouvez pas vous exprimer lors des demandes d'urgence ! Un député fait une demande d'urgence, on dit oui ou on dit non, et c'est réglé ! Parce qu'il est relativement facile de comprendre ce que signifie le choix ou le refus de l'urgence; de la même manière qu'il est relativement facile de comprendre les enjeux du choix ou du refus d'un renvoi en commission !
Pour les projets de lois, Mesdames et Messieurs, je vous rappellerai qu'en raison du système de renvoi automatique de ceux-ci en commission, la problématique ne se pose en réalité que quand les projets de lois reviennent de commission. Donc, elle ne se pose que pour les projets de lois pour lesquels il y a des rapports. Et s'il y a des rapports, il y a des rapporteurs, et c'est à ces rapporteurs que le projet de loi tel qu'il est sorti de commission se propose de donner la parole pour qu'ils s'expriment avec le Conseil d'Etat sur la question du renvoi. Cela signifie que quand un objet est controversé et que la minorité joue son rôle en faisant un rapport de minorité, eh bien, celle-ci a la possibilité de s'exprimer sur la question du renvoi en commission !
Je crois donc qu'il n'y a là aucune atteinte à la démocratie, il n'y a aucune volonté de brimer qui que ce soit et il n'y a aucune atteinte à la substance des débats ! Il y a simplement volonté de mieux régler une problématique purement technique qui, aujourd'hui, est mal organisée.
Nous avons reçu tout à l'heure un amendement. J'aimerais d'entrée de cause en dire deux mots pour relever que si effectivement la démocratie «totale et impartiale» consiste à donner trois minutes à chaque groupe pour qu'il s'exprime sur le fond et sur la proposition de renvoi, ça signifie en gros que, là où un groupe - comme le groupe socialiste, par exemple - peut aujourd'hui s'exprimer trois fois sept minutes, fois le nombre de ses députés, c'est-à-dire à peu près trois cent cinquante-sept minutes, soit six heures, il ne pourrait plus s'exprimer que trois minutes avec cet amendement !
Je crois qu'il y a vraiment de la marge entre la solution proposée par la loi actuelle, qui ne fonctionne pas, et des solutions qui, elles, conduiraient effectivement à empêcher un déroulement correct des débats. Donc, je vous invite, Mesdames et Messieurs les députés, à voter ce projet de loi tel qu'il est, sans projeter dessus des peurs qui n'ont pas de raison d'être.
Une voix. Très bien !
M. Laurent Moutinot, président du Conseil d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, dès lors qu'il s'agit des règles de fonctionnement de votre Grand Conseil, le Conseil d'Etat se montre très retenu. Néanmoins, quelques observations pourraient peut-être éclairer vos travaux.
Depuis un certain nombre d'années, vous vous êtes limités dans l'exercice de la parole. En premier lieu, en supprimant le débat de préconsultation. En deuxième lieu, en limitant la durée et le nombre des interventions. Maintenant vous vous attaquez au problème du renvoi en commission. Toutes choses qui sont de votre compétence. Ce que j'observe tout de même avec curiosité, c'est que plus vous ajoutez de règles limitant le temps de parole, plus vos débats durent. Et, surtout, l'ordre du jour n'est pas épuisé ! Au point que je viens à m'en demander si, en réalité, la complexité et la limitation que vous vous imposez n'a pas cet effet pervers que des députés créatifs trouvent un certain nombre de moyens pour s'exprimer encore plus qu'ils ne l'auraient fait s'ils n'avaient pas été limités ! Je pense que vous êtes un peu dans cette situation-là.
Si vous me permettez de le rappeler, quand j'étais député, à l'époque du gouvernement monocolore, il y avait encore le débat de préconsultation et aucune limitation du temps de parole. L'ordre du jour était toutefois épuisé le vendredi soir à 23h30 ! Il y avait pourtant de solides contradicteurs de part et d'autre, mais la culture politique voulait à ce moment-là que tout le monde ne s'exprime pas sur tous les sujets au maximum du temps admis. Dès lors que vous avez fixé un maximum dans la durée du temps de parole, vous vous retrouvez avec la situation dans laquelle personne n'entend parler moins que ce temps maximum, parce que les orateurs se sentiraient déconsidérés de parler moins que le temps total auquel ils ont droit. La norme maximum est donc devenue une norme minimum !
Le résultat des courses, c'est que vous aurez pour la session de septembre environ deux cent cinquante projets inscrits à votre ordre du jour.
S'agissant du projet qui vous occupe, le Conseil d'Etat renonce à vous faire part de sa position, mais il vous invite à réfléchir à la manière d'organiser le temps de parole pour ne pas, comme presque à chaque coup, vous tirer une balle dans le pied ! (Applaudissements.)
Mis aux voix, le projet de loi 10216 est adopté en premier débat par 41 oui contre 31 non et 2 abstentions.
Deuxième débat
Mis aux voix, le titre et le préambule sont adoptés.
La présidente. A l'article 78A, alinéa 2, nous sommes saisis d'un amendement de Mme Sandra Borgeaud, à qui je donne la parole pour qu'elle le présente.
Mme Sandra Borgeaud (Ind.). Cet amendement demande tout le contraire de ce que M. Jornot a tenté de vous faire croire. Il ne s'agit absolument pas de réduire le temps de parole de sept à trois minutes, mais de faire en sorte que les demandes de renvoi en commission surviennent une fois que les tours de paroles ont eu lieu et que tout le monde a pu s'exprimer en toute démocratie. Si une demande de renvoi en commission survient, il faut qu'elle soit faite tout à la fin. C'est pour cela que je demande que la démocratie soit impartiale et respectée... Il faut que la demande de renvoi intervienne tout à la fin, de façon que ça se passe démocratiquement ! De plus, il n'y a pas six groupes actuellement, comme il est indiqué dans le rapport. Je rappelle juste que nous sommes sept groupes !
J'approuve ce qu'a dit M. Moutinot, cela me paraît totalement juste: plus vous fixez des règles, moins on avance ! Ce n'est pas cohérent. Le fait que vous empêchiez les gens de s'exprimer librement sur le fond des choses aboutit à une prise d'otage. On s'en est rendu compte dernièrement: dès qu'un parti s'aperçoit que son projet de loi a peu de chances d'aboutir, il essaie de gagner du temps en demandant un renvoi en commission et en empêchant les autres - les adversaires - de s'exprimer sur le fond, pour être sûr de ne pas être laminé propre en ordre sur le siège ! Ça, ce n'est pas normal ! Je n'appelle pas cela de la démocratie, je n'appelle pas cela être dans un parlement pour discuter des choses. Et si vous n'êtes pas capables de faire le travail en commission et qu'il faut ensuite palabrer des heures encore, sur le siège, ce n'est pas de la responsabilité de tout le monde ! Il faudrait peut-être simplement demander à quelques personnes de se calmer un peu.
Cet amendement demande simplement que tous les groupes puissent s'exprimer clairement, de manière qu'ils aient aussi le droit de pouvoir dire les choses, en tout cas pour la minorité. Car, se baser sur un renvoi en commission décidé en trente secondes, c'est totalement inutile, personne ne comprend rien, et si le renvoi en commission est refusé, eh bien, ces groupes perdent automatiquement, puisque le projet de loi est ensuite accepté tel quel par la majorité ! De cette façon-là, ce n'est pas démocratique !
Je ne suis pas là pour faire la prof d'école ni vous rappeler ceci: vous oubliez que nous sommes des élus, que c'est un honneur, un privilège, et non pas un droit et un dû. Tout le monde se doit le respect, alors ne faites pas aux autres ce que vous ne voulez pas qu'on vous fasse !
Acceptez cet amendement et, à ce moment, on pourra rediscuter ! Sinon, je refuserai le projet de loi tel qu'il est. (Brouhaha.)
M. Eric Stauffer (MCG). Je tiens à relever l'excellente intervention de M. Moutinot, qui a parfaitement raison dans son argumentaire. J'en veux pour preuve que, pour la prochaine séance du Grand Conseil, je me suis vu contraint de prendre un rapport de minorité contre notre excellent collègue, M. Olivier Jornot, simplement parce que le temps de parole étant limité, si je voulais faire passer tout ce que le MCG veut dire, je ne pouvais le faire qu'avec le rapport de minorité ! (Rires.) Eh oui ! Vous pouvez rigoler, mais en attendant, Mesdames et Messieurs les députés, la réalité quotidienne dans les rues de Genève est très loin de votre arrogance dans ce parlement. Alors, ricanez, continuez, vous nous faites plaisir !
Enfin, tout ça pour dire encore une fois que nous allons nous opposer à ce projet de loi. Nous soutiendrons en revanche l'amendement de la députée Sandra Borgeaud, mais, à la fin, nous nous opposerons quand même à ce projet de loi.
M. Alberto Velasco (S). J'aimerais m'adresser au rapporteur de ce projet de loi qui dénonce là l'absence de rapporteur de minorité. C'est vrai, il y a parfois des personnes qui votent contre un projet mais n'estiment pas nécessaire de pondre un rapport de minorité, de s'asseoir à la table des rapporteurs, pour en débattre. Monsieur Jornot, si le système devait nous obliger, chaque fois, à faire ne serait-ce qu'un paragraphe de minorité, il y aurait un, deux ou trois rapports de minorité ! Cela obligerait Mme le sautier à prévoir un budget important pour les rapports et il y aurait une quantité de paperasse incroyable; cela ferait que chacun des trois rapporteurs s'exprimerait, parce qu'il en a le droit ! Conclusion: les débats dureraient encore plus longtemps, comme le disait M. Moutinot tout à l'heure. Non, ce n'est pas la solution ! Et je pense, chers collègues - je le répète - que, si le groupe radical est pertinent dans son constat, la solution qui nous est proposée aujourd'hui n'est pas satisfaisante. La pratique du parlement a changé, j'en conviens. Il y a moins d'accords entre les groupes, il y a beaucoup plus de confrontations, et parfois pour des projets qui n'en valent même pas la peine. Mais qui a introduit cette pratique ? On pourrait débattre là-dessus... Je suis à la commission des finances et j'ai pu voir comment les choses ont dérivé, dans ce parlement. Et, Monsieur Stauffer, vous y êtes pour quelque chose... (Commentaires.)
Donc, chers collègues, l'amendement qui nous est proposé est un pis-aller. Le groupe socialiste votera cet amendement au lieu d'accepter le projet de loi tel quel. Bien que certains - dont M. Gros, même - aient dénoncé les carences de ce projet de loi tel qu'il est rédigé, aucune proposition n'a été faite pour un renvoi en commission, pour amender le texte ou pour l'améliorer ! C'est dommage, parce qu'on aurait peut-être dû imaginer une meilleure solution. En l'occurrence, nous nous voyons obligés d'essayer de faire passer l'amendement proposé par la députée Borgeaud, qui ne nous satisfait pas complètement mais nous laissera au moins la possibilité de nous exprimer.
C'est la raison pour laquelle je souhaite que vous acceptiez au moins cet amendement, qui donnera à chaque groupe la possibilité de s'exprimer. Je répète toutefois que les solutions proposées ne sont pas «la» solution et que cela nuit à la possibilité d'expression de chaque groupe.
M. Pascal Pétroz (PDC). Mesdames et Messieurs les députés, nous assistons vraiment à un drôle de débat. C'est souvent le cas, d'ailleurs, lorsque nous évoquons le fonctionnement de notre Grand Conseil. Il est rare que ce type d'objet soit traité avec sérénité. Enfin, il est quand même piquant de constater un certain nombre de choses: sur un objet précédent, le parti socialiste - l'UDC de même, d'ailleurs - a fait le reproche au groupe démocrate-chrétien d'inonder ce parlement de motions diverses et variées; et, dans le cadre de ce débat, vous venez crier au loup en disant qu'il s'agit d'une atteinte à la démocratie, d'une atteinte à votre liberté d'expression. Alors, c'est quoi la liberté d'expression ? C'est que le PDC n'aurait pas le droit de s'exprimer et de déposer des motions et que le parti socialiste aurait le droit de parler autant qu'il veut ? Est-ce que la démocratie est à géométrie variable ?! Non, elle ne l'est pas ! Nous avons le même droit, vous et nous, de déposer toutes les motions qu'il nous semble opportun de présenter, ce d'autant plus que celles que nous déposons sont pertinentes, quoique certains puissent en douter ! Vous verrez mardi prochain, lors du dépôt, que nous avons encore une motion assez intéressante à vous soumettre. (Brouhaha.)
Une autre chose piquante dans ce débat est que M. le président du Conseil d'Etat commence son intervention en disant qu'il est d'usage que le Conseil d'Etat s'impose une certaine retenue en ce qui concerne le fonctionnement de notre Grand Conseil, et je suis parfaitement d'accord avec cette réflexion. Si votre intervention s'était arrêtée là, Monsieur le président du Conseil d'Etat, j'aurais été enchanté ! Le problème, c'est que si vous avez commencé en nous disant que le Conseil d'Etat devait s'imposer une retenue, vous nous avez dit ensuite le mal que vous pensiez de ce projet de loi ! (Commentaires.) Permettez-moi une certaine perplexité !
Mme Borgeaud s'est tout à l'heure plainte du fait que nous parlons trop, dans ce Grand Conseil, et je crois qu'en cela elle a parfaitement raison. Je relève quand même que c'est elle qui a déposé un amendement et que ce dernier est en train de nous faire discourir longuement !
Venons-en à cet amendement, précisément. Je crois que le principe, quand on vote un texte, c'est que, indépendamment de l'idée de base, il doit pouvoir être compréhensible. Dans la mesure où il va figurer dans la législation genevoises, il ne doit pas comporter de fautes d'orthographe et doit, si possible, être compréhensible et expurgé de toute considération extérieure au débat. Alors, on peut bien corriger et ôter les accents en trop, ce n'est pas grave. Toutefois, quand on dit que «chaque groupe a trois minutes pour s'exprimer sur le fond du PL», on devrait plutôt écrire «projet de loi» que «PL». En réalité, si l'on veut être logique, il faudrait juste écrire - toujours à propos de cet amendement - que «chaque groupe a trois minutes pour s'exprimer sur la proposition de renvoi».
Mais que dire par rapport à la phrase finale «pour que la démocratie totale et impartiale soit respectée» ? Je comprends votre point de vue, vous allez prendre la parole tout à l'heure, vous pourrez bien évidemment développer que la raison de votre amendement est précisément le respect d'une démocratie «totale et impartiale», mais il me semble que cela ne devrait pas, en tant que tel, figurer dans votre amendement ! Il s'agirait donc aussi d'enlever ce dernier bout de phrase. Voilà ce que je voulais me permettre de relever quant à la forme de cet amendement.
Dernière point: M. Stauffer a dit quelque chose de tout à fait juste, de tout à fait pertinent, parce que ça résume bien la problématique dans notre parlement: M. Stauffer a dit tout à l'heure que, pour pouvoir s'exprimer autant qu'il le souhaitait, il était obligé de faire des rapport de minorité.
La présidente. Monsieur le député !
M. Pascal Pétroz. Je conclus ! Je termine dans quelques instants. Le gros problème que nous avons, dans ce parlement, est que nous ne parvenons pas à nous autolimiter ! Voilà le problème ! C'est que les règles de courtoisie et la volonté de faire avancer les choses, qui relèvent du bien commun et du bon sens, nous n'arrivons plus à les appliquer à nous-mêmes ! C'est la raison pour laquelle nous légiférons et que la législation comporte des effets pervers. Ce projet de loi est une proposition, ce n'est peut-être pas la meilleure, mais d'autres, visant à limiter la durée de nos débats, seraient les bienvenues ! Je vous remercie.
Mme Sandra Borgeaud (Ind.). Je vais entrer d'emblée dans le sujet. Effectivement, j'ai mis un «à»... Puisqu'on veut parler du français, ce n'est pas une faute d'orthographe, Monsieur Pétroz, c'est une faute de conjugaison, comme cela peut arriver à tout le monde ! Ainsi, on va vraiment au fond des choses... Si le petit accent que j'ai mis n'avait pas lieu d'être, excusez-moi !
«PL» signifie «projet de loi», tout le monde l'aura compris. Je pense effectivement que, si le projet de loi devait être amendé, on écrirait «projet de loi», ce n'est qu'une question de sémantique. Cela peut vous déranger en tant qu'avocat, ce qui n'est pas mon cas !
D'autre part, si vous dites que ce n'est pas le lieu d'inscrire que la démocratie totale et impartiale doit être respectée, on peut effectivement discuter sur ce point-là. Si j'ai écrit cela, c'est parce que, depuis trois ans que je siège dans ce parlement, j'ai pu - moi qui reste sur le terrain et qui garde mon âme très entière, je l'admets - me rendre compte qu'il n'y a pas toujours la démocratie totale et impartiale dans ce parlement ! Sinon, je ne me serais jamais permis d'écrire cela.
Il y a encore une petite parenthèse que je pourrais faire, après ce que M. Jornot a dit. Concernant les urgences, j'aimerais juste vous rappeler, Mesdames et Messieurs les députés, que la plupart d'entre elles - pour leur grande majorité - sont décidées au Bureau du Grand Conseil, avec les chefs de groupe, et non pas ici ! Donc, cela se décide d'entente, dans les caucus, et c'est déjà largement discuté avant d'arriver ici.
En ce qui concerne les renvois en commission, il n'y a que les initiatives qui partent en commission législative qui sont sans débat. Cela fait partie du règlement et c'est normal.
Une proposition aurait cependant pu être faite. En effet, je vois que tout le monde critique, or personne ne propose rien: c'est «faites comme je dis, mais ne dites pas comment je fais !» Et vous auriez très bien pu avoir l'idée d'établir le règlement de la même façon que pour les motions: à l'article sur les renvois en commission, il est prévu clairement que, lorsqu'il y a une motion, il y a automatiquement un premier tour de parole. Dans le cas qui nous occupe, vous auriez donc pu proposer un changement ! Mais je vois que personne n'a cru bon de le faire... Alors, avant de critiquer, proposez mieux ! Ensuite on pourra discuter ! Moi, j'essaie de proposer quelque chose. Je ne prétends pas être la meilleure, mais, au moins, j'ai le courage d'agir au lieu de discuter dans le vide.
La présidente. Voici l'amendement: «La proposition de renvoi se fait tout à la fin du débat. Chaque groupe a trois minutes pour s'exprimer sur le fond du projet de loi et la proposition de renvoi pour que la démocratie totale et impartiale soit respectée.»
Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 55 non contre 28 oui.
Mis aux voix, l'article 78A, alinéa 2 (nouvelle teneur), est adopté.
Mis aux voix, l'article 1 (souligné) est adopté, de même que l'article 2 (souligné).
Troisième débat
La loi 10216 est adoptée article par article en troisième débat.
Mise aux voix, la loi 10216 est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 43 oui contre 33 non.