République et canton de Genève
Grand Conseil
Séance du jeudi 13 décembre 2007 à 20h30
56e législature - 3e année - 3e session - 13e séance -autres séances de la session
La séance est ouverte à 20h30, sous la présidence de Mme Loly Bolay, présidente.
Assistent à la séance: MM. Laurent Moutinot, président du Conseil d'Etat, Robert Cramer, Charles Beer et Mark Muller, conseillers d'Etat.
Exhortation
La présidente. Mesdames et Messieurs les députés, prenons la résolution de remplir consciencieusement notre mandat et de faire servir nos travaux au bien de la patrie qui nous a confié ses destinées.
Personnes excusées
La présidente. Ont fait excuser leur absence à cette séance: MM. David Hiler, Pierre-François Unger et François Longchamp, conseillers d'Etat, ainsi que Mme et MM. Luc Barthassat, Marcel Borloz, Michel Forni, Georges Letellier, Claude Marcet, Véronique Pürro et Charles Selleger, députés.
Annonces et dépôts
Néant.
La présidente. M. Gregory Bovey est assermenté. (Applaudissements.)
La présidente. M. Fabrice Roch est assermenté. (Applaudissements.)
Mesdames et Messieurs les députés, nous allons maintenant traiter le dernier projet de loi concernant la Fondation de valorisation des actifs de la BCGe, soit le projet de loi 10182-A.
Mis aux voix, le projet de loi 10182 est adopté en premier débat par 49 oui (unanimité des votants).
La loi 10182 est adoptée article par article en deuxième débat et en troisième débat.
Mise aux voix, la loi 10182 est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 66 oui (unanimité des votants).
Premier débat
La présidente. Le rapport est de M. Jean-Claude Ducrot... (Brouhaha.) Mesdames et Messieurs les députés, nous sommes en débat, je vous prie par conséquent de bien vouloir cesser vos conversations privées et de vous asseoir. Cas échéant, vous pouvez sortir de la salle. Merci beaucoup. Monsieur le rapporteur, avez-vous quelque chose à ajouter à votre rapport ?
M. Jean-Claude Ducrot (PDC), rapporteur. Oui, Madame la présidente. Permettez-moi, en préambule, de signaler que le projet de loi initial... (Brouhaha. La présidente agite la cloche.) ...plus particulièrement l'article 1, lettre e), «cash-flow de gestion», indiquait 79,2 millions. Or il s'est avéré en commission qu'il s'agissait d'une coquille. Il fallait lire: moins 379,2 millions ! Ce n'est pas rien, puisqu'il s'agit d'une différence déficitaire de l'ordre de 300 millions, due, précisément, à ce cash-flow lié au transfert d'actifs !
Cela étant, depuis la dernière séance de la commission, nous avons pu lire dans la presse que des divergences se faisaient jour par rapport au conseil d'administration, ce qui nous avait été déclaré dans le cadre de la commission. Mais nous sommes en présence d'une décision populaire qu'il faudra, bien évidemment et à mon avis, respecter. Quoi qu'il en soit, il est souhaitable que le Conseil d'Etat nous apporte toutes les précisions utiles en ce qui concerne ce différend et s'il a été résolu avec le conseil d'administration des TPG... (Exclamations.) Des SIG, pardon ! (Rires. Commentaires.)
Mesdames et Messieurs les députés, la commission a accepté ce projet de loi du bout des lèvres... Du bout des lèvres, mais une majorité des commissaires l'a tout de même voté pour éviter que les SIG ne se trouvent sans budget au 1er janvier 2008. Les interrogations des députés, dans le cadre de l'examen de ce projet de loi, ont été nombreuses. Elles sont liées à différents facteurs: on a parlé des jetons de présence, des bonus, etc. J'ose espérer que le Conseil d'Etat précisera ses intentions, puisqu'il l'a fait pour nous dans le cadre de l'introduction de ce projet de loi, compte tenu qu'il entend «mettre de l'ordre dans la maison». Aussi, je n'y reviendrai pas.
Le débat a également été nourri de par la position du Conseil d'Etat par rapport à la hausse du prix de l'électricité. J'ajoute que M. Prix a autorisé une augmentation de 2,9 centimes par kWh, augmentation conditionnée à un blocage durant deux ans. Les SIG ont proposé 2,5 centimes d'augmentation par kWh. Le Conseil d'Etat a limité cette hausse à 1,8 centime par kWh, imposant ainsi aux SIG de trouver des économies sur son budget global de l'ordre de quelques 15 millions de francs.
Pour certains députés, cette hausse ne répond qu'à des critères économiques: elle ne permet pas d'obtenir un juste prix de l'énergie et, surtout, elle n'incite pas à faire des économies d'énergie, elle est donc dommageable; pour d'autres, l'entreprise a les ressources nécessaires pour faire face à cette situation.
Permettez-moi, Mesdames et Messieurs les députés, quelques mots sur l'approvisionnement en électricité. Les SIG produisent environ 25% de l'énergie consommée, qui augmente de l'ordre de 5% par année en termes de consommation. Les SIG ont la volonté d'augmenter l'autoproduction qui pourrait, au cours de ces prochaines années, atteindre 50% - ce qui est un véritable défi - notamment avec une centrale à gaz au Lignon, productrice d'électricité et de chaleur pour le chauffage à distance.
Le directeur général des SIG nous a également déclaré que l'entreprise envisageait une éventuelle construction d'un barrage en aval de Verbois. Mesdames et Messieurs, actuellement les SIG doivent acheter sur le marché environ 75% de la consommation électrique, quand bien même l'électricité doit être certifiée à 100% d'origine hydraulique. Les SIG seront confrontés l'an prochain à la libéralisation du marché; ils seront donc tributaires du prix d'achat actuellement en hausse et, par conséquent, supérieur au prix de sa propre production.
Comme vous le savez, Mesdames et Messieurs, la mission des SIG, tant au travers des différents plans, mais, surtout, au travers de la conception générale de l'énergie - dont le rapport de mon collègue François Gillet est pendant par-devant cette commission - impose à l'entreprise d'être à la fois vendeuse d'énergie et, également, incitatrice d'économies d'énergie. Pour d'aucuns, cela peut paraître la quadrature du cercle...
Mais signalons tout de même la volonté des SIG, dans le cadre du programme d'ECO 21 - quand bien même il a été critiqué par certains commissaires - de promouvoir un programme ambitieux d'économies d'énergie, afin de ramener la consommation par habitant, en 2011, à celle de 1990, soit 5800 kWh, alors que la consommation actuelle est de l'ordre de 6300 kWh et que, je le rappelle, l'on assiste actuellement à une augmentation de 5% par année. C'est dire le défi que les SIG devront relever ces prochaines années !
L'intérêt des SIG n'est donc pas de pousser à la consommation d'électricité, mais, en accord avec leur conception générale de l'énergie, de maîtriser cette consommation.
La présidente. Excusez-moi, Monsieur le rapporteur, il vous faut conclure. Bien entendu, vous pourrez reprendre la parole tout à l'heure. Je vous rappelle que le temps imparti est de sept minutes par intervention.
M. Jean-Claude Ducrot. Bien ! Mais j'ai encore beaucoup à dire par rapport aux déchets...
La présidente. Vous pourrez intervenir à nouveau, Monsieur le rapporteur, il n'y a pas de problème ! Je vous remercie. Sont inscrits: M. Stauffer, M. Walpen, M. Kunz, M. Zbinden, M. Deneys et M. le conseiller d'Etat, Robert Cramer. Monsieur Stauffer, je vous donne la parole, mais j'aimerais, s'il vous plaît, que vous annonciez vos liens d'intérêt.
M. Eric Stauffer (MCG). Je vais le faire avec grand plaisir, Madame la présidente: Eric Stauffer, député, 43 ans, membre du conseil d'administration des Services industriels de Genève. Voilà, tout le monde ayant connaissance de mon pedigree, je peux continuer.
Mesdames et Messieurs les députés, les SIG sont un sujet dont nous allons parler à plusieurs reprises durant cette soirée. Comme l'a très justement relevé notre rapporteur sur cet objet, il y a pas mal de problèmes qui sont liés au transfert d'actifs, notamment avec les Cheneviers, problèmes que le Mouvement Citoyens Genevois a signalés, il y a quelques semaines, voire quelques mois. Laissez-moi peut-être vous expliquer la corrélation qu'il y a entre l'incinération des ordures aux Cheneviers et le budget qui va probablement être voté, puisqu'une majorité s'est dessinée. Pour notre part, nous nous y opposerons avec les libéraux, mais je leur laisserai expliquer leurs raisons.
Jusqu'à aujourd'hui les Cheneviers incinéraient des déchets importés d'Allemagne, mais cette dernière, pour des raisons purement écologiques, a décidé de ne plus exporter ses déchets pour les faire incinérer dans d'autres pays et de les incinérer chez elle. Résultat des courses, les déchets de Genève et de ses environs - la France voisine incluse - ne suffisent pas à alimenter ces trois fours, car ceux qui ont construit les fours des Cheneviers avaient vu beaucoup trop grand à l'époque. Ce qui fait que nous nous retrouvons dans une situation tout à fait antinomique: d'un côté, nous sommes bien conscients que les Services industriels de Genève sont un établissement public autonome - c'est donc un service public qui doit fournir une prestation à nos concitoyens - et, de l'autre, nous sommes confrontés à une réalité économique d'une logique implacable, celle des businessmen qui sont intéressés à «faire de l'argent». Eh bien, figurez-vous qu'au lieu de fermer ou de réduire les fours des Cheneviers, nos chers fonctionnaires des Services industriels - établissement public autonome ou pas, cela n'a par beaucoup d'importance - ont fait du shopping d'ordures dans toute l'Europe, et ils vont importer très prochainement des ordures ménagères et industrielles en provenance du sud de l'Italie ! Mais cela pose un problème, et nous nous y sommes opposés avec beaucoup d'énergie. En effet, ce qui prime pour nous ce n'est pas l'argent - surtout s'agissant d'une entreprise qui doit fournir un service public - mais bien la santé de nos concitoyens ! Si nous devions suivre la logique de l'argent - M. le conseiller d'Etat va vous l'expliquer dans quelques minutes - pourquoi ne pas construire quarante-cinq fours à Genève et importer des centaines de milliers de tonnes de déchets de toute l'Europe ? Nous pourrions ainsi faire du business et rembourser la dette des Genevois ! L'Etat de Genève ne serait plus un Etat démocratique, mais un «Etat business», où «on fait» du fric, du fric et encore du fric ! Eh bien, ce n'est pas notre conception d'un service public !
Que s'est-il passé ? Les réviseurs ont demandé une provision de quelques dizaines de millions de francs, de l'ordre de 50 à 100 millions de francs - je connais le chiffre exact, mais je vais encore jouer le jeu de la séparation des pouvoirs et rester vague, pour ne pas divulguer ce qui pourrait être confidentiel - ce qui donne comme corollaire que le budget ne prévoit pas la provision que les Services industriels vont devoir faire. Il ne prévoit pas non plus, si ce parlement ou la population s'opposait à l'importation des déchets du sud de l'Italie, le manque à gagner conséquent que cela impliquerait pour les Services industriels, et le budget s'en trouverait tout à fait déséquilibré. C'est la raison principale pour laquelle nous allons refuser ce budget.
Nous parlerons de la violation de la loi sur les mécanismes salariaux et les bonus un peu plus tard dans l'ordre du jour. Du reste, à ce sujet, nous nous réjouissons que la Cour des comptes rende bientôt son rapport - qui se fait attendre, telle la fiancée le jour du mariage - mais cela finira par arriver... Donc, je le répète, nous allons refuser ce budget... (L'orateur est interpellé.) Absolument !
Mais il y a encore un autre problème: le four spécial destiné aux déchets spéciaux est complètement hors normes, le conseiller d'Etat ne pourra pas nier cela. Ce four ne va pas être mis en adéquation avec les lois qui régissent les normes de pollution, il va être fermé dans une année et demie ou deux ans - en tout cas selon les dernières nouvelles que j'ai reçues. M. le conseiller d'Etat répondra très certainement sur ce point.
Par conséquent, nous ne pouvons par conséquent tout simplement pas voter ce budget, parce qu'il ne correspond pas à la réalité. C'est vrai, un budget n'a pas «force de loi», entre guillemets, dans le sens où c'est quelque chose de prévu, et pas quelque chose d'établi. En effet, les budgets peuvent faire l'objet de dépassements ou connaître des aléas. Mais, Mesdames et Messieurs, dans la mesure où nous savons que les réviseurs ont demandé une provision et puisque ce budget ne tient pas compte de cet élément, nous savons déjà, avant de le voter, que ce budget est faux. Dans ce cas, il faut le retourner aux Services industriels pour qu'ils établissent un nouveau budget sur lequel nous pourrons nous prononcer en toute connaissance de cause.
Pour toutes ces raisons, Mesdames et Messieurs les députés - ce sera ma conclusion pour l'instant, Madame la présidente - nous demandons le renvoi de ce budget à la commission de l'énergie, afin d'obtenir des chiffres exacts, tenant compte de cette provision et des changements qui vont avoir lieu et que nous connaissons d'ores et déjà.
La présidente. Je vous remercie. Mesdames et Messieurs les députés, la demande vient d'être faite de renvoyer ce projet de loi à la commission de l'énergie, je la mettrai au vote. Auparavant, une personne par groupe peut s'exprimer, mais uniquement sur le renvoi en commission. Je passe la parole à M. Walpen.
M. Francis Walpen (L). Oui, Madame la présidente, uniquement sur le renvoi en commission... Mais au préalable, selon votre souhait de tout à l'heure, je tiens à déclarer que je n'ai aucun lien d'intérêt en l'affaire, même pas avec le Mouvement Citoyens Genevois, qui n'est pas habilité à s'exprimer au nom du parti libéral.
Le parti libéral, en ce qui le concerne, refusera le renvoi en commission.
La présidente. Merci, Monsieur le député. Je vous donne la parole, Monsieur Kunz, uniquement sur le renvoi en commission.
M. Pierre Kunz (R). C'est non, Madame la présidente !
M. Hugo Zbinden (Ve). Les Verts refuseront également le renvoi de ce projet de loi en commission.
M. Roger Deneys (S). Le parti socialiste refusera également le renvoi en commission.
La présidente. Merci, Monsieur le député. Tous les groupes se sont exprimés, sauf l'UDC...
Une voix. Le PDC !
La présidente. Vous avez raison ! Monsieur Gillet, je vous ai oublié. Vous avez la parole, uniquement sur le renvoi en commission.
M. François Gillet (PDC). Le groupe démocrate-chrétien ne voit aucune raison qui motiverait le renvoi de cet objet en commission.
La présidente. Tout le monde s'étant exprimé, je vous soumets le renvoi de ce projet de loi à la commission de l'énergie.
Mis aux voix, le renvoi du rapport sur le projet de loi 10166 à la commission de l'énergie et des services industriels de Genève est rejeté par 65 non contre 7 oui et 2 abstentions.
La présidente. Nous poursuivons notre débat et je donne la parole à M. Pierre Weiss.
M. Pierre Weiss (L). Merci, Madame la présidente. J'interviens dans ce débat sur un point de détail concernant le budget des Service industriels de Genève. J'aimerais que le chef du département de tutelle m'indique si les Services industriels de Genève appliquent, en tout ou partie, les plans de mesures du Conseil d'Etat ou s'ils s'en inspirent pour améliorer leur gestion et, en particulier, dans quelle mesure les SIG réduisent leurs frais de communication: à combien s'élèvent ces frais et quel est le nombre de personnes employées dans ces unités de communication.
La présidente. Merci, Monsieur le député, je pense que le conseiller d'Etat pourra vous répondre tout à l'heure. Monsieur Claude Jeanneret, vous avez la parole.
M. Claude Jeanneret (MCG). Merci, Madame la présidente. Le renvoi en commission ayant été refusé, j'aimerais juste préciser ce qui m'ennuie au sujet de cette loi. Elle nous est présentée, mais nous n'avons pas auditionné des personnes des douanes ou d'autres instances supérieures fédérales. Un budget vient d'être établi sur la base de l'incinération de déchets hautement toxiques, qui produisent énormément de dioxydes sur Genève; il me semble donc assez gênant que nous ne soyons pas renseignés sur les conditions d'importation de ces déchets, si ces conditions sont respectées, s'il y a un risque que ces importations soient supprimées à un moment donné, dans la mesure où il s'agit tout de même de produits hautement toxiques.
Il me paraît donc quelque peu inconséquent que le parlement puisse accepter un budget qui ne soit pas étayé par une étude sérieuse sur les possibilités d'exploitation.
M. Francis Walpen (L). Comme vous le savez, la commission de l'énergie a dû, dans les circonstances et les turbulences que vous connaissez, examiner ce projet de budget 2008. Ayant été appelé moi-même l'an dernier à rédiger le même rapport, il convient que je salue tout d'abord la prouesse de mon collègue Ducrot, qui a réussi à rendre son rapport dans les délais.
Pour le reste, vous me permettrez de revenir sur trois points qui ont tout particulièrement cristallisé l'agacement des commissaires libéraux. Il ne serait pas très fair-play de s'arrêter sur le lapsus de plume qui, à l'article 1, a fait passer le cash-flow de gestion de moins 379 millions à moins à plus 79 millions.
Les produits sont en hausse de plus de 77 millions par rapport à 2007, progression due, notamment, à la répercussion prévue sur les clients de la hausse des prix d'achat de l'énergie. Dans l'exposé des motifs du projet de loi déposé le 31 octobre 2007, le Conseil d'Etat précise dans le même temps, je cite: «...que l'adoption du présent projet de loi n'implique pas de sa part une approbation de l'augmentation des tarifs de l'électricité, laquelle, telle que prévue par les SIG, paraît excessive.» Il nous faudra attendre jusqu'au 7 novembre 2007 pour apprendre que l'adaptation s'élèvera, en définitive, à 1,8 centime par kWh, pour tous les usagers au lieu des 2,9 ou 2,5 prévus ! La progression des produits sera due aussi, à raison de 5 millions de francs, à la répercussion - probable ! - de la nouvelle taxe de pompage de l'Etat de Genève qui doit entrer en vigueur au 1er janvier 2008, soit 10 centimes par mètre cube pompé dans les eaux de surface et qui devraient être répercutés sur les clients à raison de 8 centimes par mètre cube vendu.
Je reprends deux paragraphes du document qui nous a été soumis pour étude. Dans les commentaires sectoriels de l'exposé des motifs du Conseil d'Etat, en page 10, quatorzième ligne, il est dit: «Répercutée entièrement, cette taxe aurait pour incidence une augmentation de tarif de 11 centimes par m3.» Dans le texte «Budget d'exploitation», version approuvée au conseil d'administration du 11 septembre 2007, page 27, deuxième ligne, il est dit: «Répercutée entièrement, cette taxe aurait pour incidence une augmentation de tarif de 11 centimes par m3.» Il s'agit donc bien de 11 centimes. Mais, dans la présentation des SIG, dans «les principales hypothèses», page 10, quatrième ligne, il est dit, «Fin de l'exemption de la taxe de pompage, soit une redevance supplémentaire de 10 centimes par m3 pompé.» Puis, à nouveau dans l'exposé des motifs du Conseil d'Etat, en page 10, quinzième ligne, il est dit: «Le montant définitif du produit dépendra de la décision du Conseil d'Etat [...] sur l'augmentation du tarif de l'eau consécutive à la perception par l'Etat de cette taxe de pompage.» Après une question, il nous est précisé qu'il ne s'agit que: «...d'une taxe de pompage sur le prélèvement d'eau en vue de la production d'eau potable.» Je crois savoir qu'une organisation professionnelle s'est adressée au Conseil d'Etat, afin d'obtenir des précisions en date du 20 novembre 2007. A ma connaissance, elle n'a pas encore reçu d'accusé de réception à ce jour !
De toute façon, dit le Conseil d'Etat dans son exposé des motifs: «Le Conseil d'Etat examinera courant novembre - il se garde bien de préciser de quelle année - un projet de modification du règlement sur l'utilisation des eaux superficielles et souterraines du 5 mars 2003.» Ce texte figure à la page 6, note 2, de l'exposé des motifs.
Dans leur lettre circulaire, «Bonne communication», datée de décembre 2007, les SIG nous informent que: «Le Conseil d'Etat prévoit de mettre un terme à l'exemption de la taxe de pompage des eaux naturelles, ce qui renchérira le prix de l'eau potable au cours de l'année 2008.», alors que l'on parlait jusqu'ici du 1er janvier.
S'agissant enfin de la politique de rémunération de la direction générale et du conseil d'administration, le Conseil d'Etat nous rappelle fort judicieusement en page 5 de l'exposé des motifs que celle-ci: «...n'a pas d'influence sur la fixation des tarifs...» Et, plus loin: «Ce point fera toutefois l'objet de décisions - ultérieures - de la part du Conseil d'Etat, sur la base de critères à arrêter dans la perspective de l'harmonisation des politiques de rémunération entre établissements publics autonomes et, cas échéant, sur la base des conclusions de la Cour des comptes.»
Dans le même courrier - adressé, j'imagine, à tout abonné des SIG - les mêmes SIG nous assurent «qu'ils vont poursuivre et intensifier leurs efforts au sein de l'entreprise, afin d'assurer une gestion rigoureuse.» La commission de l'énergie a demandé, en date du 2 novembre, des précisions sur les rémunérations des membres des conseils d'administration des SIG... Eh bien, probablement grâce à une gestion rigoureuse, le président de la commission a reçu les précisions demandées - enfin ! - le 6 décembre...
La présidente. Vous devez conclure, Monsieur le député !
M. Francis Walpen. Oui, Madame la présidente ! Mesdames et Messieurs les députés, si nous devions noter ce projet de loi, nous serions sévères ! Et nous pourrions aller jusqu'à dire, s'agissant des SIG, que l'on veut nous faire prendre des vessies pour des lanternes ! A contre-coeur, les libéraux doivent vous demander, au nom de la transparence, de l'orthodoxie budgétaire et comptable, de refuser un document aussi flou et, par conséquent, de rejeter ce projet de budget des SIG pour l'année 2008. J'en ai terminé, Madame la présidente.
La présidente. Merci, Monsieur le député. Sont inscrits M. Gillet, M. Deneys, M. Zbinden, M. Kunz, M. Gautier, M. Stauffer, M. le rapporteur et M. le conseiller d'Etat, Robert Cramer. Le Bureau décide de clore la liste. Monsieur Gillet, cette fois, je ne vous ai pas oublié: je vous donne la parole.
M. François Gillet (PDC). Merci, Madame la présidente. Le groupe démocrate-chrétien veut bien entrer dans la réflexion amenée par M. Stauffer et reconnaît l'intérêt de discuter de la politique de gestion des déchets de SIG, aux Cheneviers. C'est vrai, c'est une question politique intéressante, et nous devrons l'aborder à nouveau. Nous pouvons partager les propos de M. Walpen au sujet de certains renseignements arrivés un peu tard en commission de l'énergie, même s'il faut rappeler cependant que toutes les informations demandées par les commissaires ont été obtenues. Alors, certes, nous pouvons rediscuter de ces points, mais, à nos yeux, cela ne justifie pas de remettre en cause le budget des SIG. Nous ne voyons pas de lien qu'il y aurait entre l'intérêt de discuter à nouveau de la politique des déchets des Cheneviers et le budget 2008 de SIG. Pour nous, il n'y en a pas !
Pour ce qui est de la polémique récente concernant les réticences du conseil d'administration de SIG à verser ce qui est dû par rapport au transfert d'actifs, nous ne voyons pas non plus de raison de nous opposer à ce budget. Les SIG se sont engagés, dans le cadre de ce transfert d'actifs. Ils sont tenus de respecter leur engagement - et je pense que M. Cramer nous rassurera sur ce point - et nous ne pensons donc pas, là non plus, qu'il y ait matière à remettre en question ce budget.
Pour toutes ces raisons, et aussi grand soit l'intérêt de discuter à nouveau de ces sujets, il n'est pas question, pour le groupe démocrate-chrétien, de refuser le budget des SIG.
M. Roger Deneys (S). Les socialistes accepteront le budget SIG 2008 tout en précisant au préalable les limites de l'exercice qu'il me semble important de rappeler.
Ce budget est daté du 11 septembre 2007. Il a été traité en commission les 9 et 23 novembre, ce qui représente deux séances de commission pour un budget qui s'élève à 975 millions de francs... Je vous laisse juges de la pertinence de l'exercice, car, à mon avis, voter un budget de 975 millions en deux séances, c'est franchement atteindre les limites du travail parlementaire ! Et ce d'autant plus que nous avons deux contraintes: la première est que ce budget doit être adopté avant le 1er décembre et, la deuxième, que nous ne pouvons pas l'amender. Et c'est bien ce qui constitue la principale limite de l'exercice. Nous avons le droit de ne pas être d'accord, mais nous ne pouvons pas proposer d'amendement pour ce budget, ce qui est - somme toute - assez raisonnable, parce que je ne vois pas très bien comment nous pourrions amender sérieusement un budget de cette importance en ne disposant que de deux séances pour l'examiner. Tout cela n'est vraiment pas très sérieux, et les projets de lois qui visent à privatiser les conseils d'administration risquent d'empirer les choses.
Pour le reste, le problème, c'est que les socialistes n'ont pas posé de questions par rapport au budget, contrairement aux comptes, Monsieur Ducort... (L'orateur est interpellé.) «Ducrot», pardon ! (Rires.) «Ducort» et «Ducrot», il y a un petit lien avec les SIG, d'ailleurs ! Je disais que nous n'avons pas posé de questions au sujet du budget, en revanche nous en avons posé au sujet des comptes. Et la droite n'a posé aucune question concernant les rémunérations des administrateurs et du conseil d'administration: je suis bien le seul à l'avoir fait concernant les comptes ! D'ailleurs, Monsieur Cramer, je tiens à le rappeler, nous attendons des chiffres pour les années précédentes. Nous ne les avons pas obtenus, et j'espère bien les avoir pour pouvoir faire mon rapport sur les comptes 2006.
Pour le reste - cela me fait du reste penser à la question de M. Weiss concernant la communication - nous nous sommes en effet posé des questions sur le sponsoring... Je comprends bien, Monsieur Weiss, que vous n'ayez pas pu obtenir des réponses précises auprès de votre éminent collègue M. Walpen, parce que nous n'avons pas eu de réponse concernant le budget. Nous avons posé des questions concernant les comptes et nous avons notamment appris que les SIG finançaient la FEDRE, dans laquelle M. Haegi, ancien conseiller d'Etat libéral, est très actif. C'est assez particulier... Autre sponsoring assez particulier: la Chambre de commerce et d'industrie, dirigée par un ancien député libéral, M. Balestra, et dont le directeur, M. Jeannerat, siège parmi nous. De nouveau, on constate que les limites de la dépolitisation sont à géométrie variable ! (Commentaires.)
Quoi qu'il en soit, nous, les socialistes, nous voterons ce budget SIG 2008, principalement parce qu'il nous semble - et je tiens à le préciser - particulièrement bien présenté. Le travail de M. Battistella, à la direction des SIG, régie publique, est tout à fait exceptionnel. Même si nous avons des divergences idéologiques, politiques, sur certains points - je pense notamment aux rémunérations de la direction - en tout cas, sur le fond, il effectue un très bon travail depuis plusieurs années, et je tiens à le relever.
Nous voterons donc ce budget SIG avec un seul regret: c'est que le Conseil d'Etat n'ait pas accepté une augmentation de 2,5 centimes le kWh. M. Prix préconisait une augmentation de 2,9 centimes le kWh; le Conseil d'Etat a décidé une augmentation moindre. Pour nous, cela représente un message absolument catastrophique, car, si l'on veut encourager les économies d'énergie, il est important de payer l'énergie à son juste prix. Ce n'est pas en baissant les tarifs que l'on incite à faire des économies d'énergie. A nos yeux, cette mesure est tout à fait contre-productive. D'ailleurs, le budget SIG intègre l'augmentation de 2,5 centimes. C'est une raison supplémentaire pour que les socialistes votent ce budget.
Par conséquent, même si nous avons des remarques à formuler, même si la gestion des déchets est problématique, il s'agit d'un autre problème, qui ne rentre pas dans le cadre de ce débat. Je le répète, nous voterons le budget SIG 2008.
M. Hugo Zbinden (Ve). Nous, les Verts, nous allons voter ce budget. Cela ne veut pas dire que nous sommes d'accord avec tout ce qui se passe aux SIG et je ne veux pas revenir sur les propos de M. Walpen et de M. Deneys. J'aimerais me concentrer sur un seul point concernant la problématique posée par la hausse limitée du prix de l'électricité. Je le rappelle, les SIG ont prévu dans leur budget une hausse de 2,5 centimes par kWh, mais le Conseil d'Etat a décidé que cette hausse ne devait pas excéder 1,8 centime...
Vous le savez très bien, nous, les Verts, nous avons toujours défendu des prix élevés pour l'électricité et, de façon générale, pour toute forme d'énergie, afin de favoriser les économies d'énergie. Or, ici à Genève, malheureusement la consommation d'électricité continue d'augmenter, loin d'atteindre les objectifs d'ECO 21. Ce n'est donc vraiment pas le moment de limiter la hausse des tarifs !
Nous, les Verts, nous avons déposé il y a quelques années, un projet de loi qui demandait de mettre en oeuvre une taxe incitative sur l'électricité. Ce n'était bien sûr pas dans le but de renflouer la caisse des SIG. Le produit de cette taxe devait être distribué aux consommateurs ou être utilisé pour encourager les économies d'énergie ou pour favoriser les énergies renouvelables.
Quoi qu'il en soit, les SIG ont déjà fait savoir qu'ils pourraient très bien supporter cette baisse de revenus de 15 millions, car ils ont trouvé des moyens d'économiser cette somme. C'est donc une bonne nouvelle. Il est par conséquent dommage que les tarifs de l'électricité ne soient pas augmentés de 2,5 centimes, car ces 15 millions pourraient servir à mener une réelle politique d'économies d'énergie et à favoriser les énergies renouvelables.
M. Pierre Kunz (R). Mesdames et Messieurs les députés... (Forte sonnerie.)
La présidente. Excusez-moi de vous interrompre, Monsieur le député ! Il y a un problème, probablement dû à un portable ou à un micro...
Une voix. C'est Mme Ducret !
La présidente. Madame Ducret, êtes-vous responsable de ce bruit ? (Forte sonnerie. Rires.) Monsieur le député, prenez un autre micro, c'est préférable. Vous avez la parole.
M. Pierre Kunz. Merci, Madame la présidente. Les radicaux, contrairement à mes voisins libéraux, ne s'opposeront au vote du projet de loi 10166. Mais ils tiennent à souligner que leur vote positif ne constitue pas un endossement ou un blanc-seing de la gestion des SIG pour 2008. Il ne s'agit, pour les radicaux, que de donner aux activités des SIG un cadre formel, une espèce d'autorisation de dépenses maximum pour son fonctionnement.
Nous voulons dire ici que nous ne sommes pas satisfaits du degré d'efficacité général des SIG et de la productivité du personnel, cela malgré les efforts effectués sous la conduite de M. Battistella au cours des dernières années. Les rémunérations fantaisistes de certains administrateurs et cadres supérieurs de l'entreprises, telles qu'elles ont été révélées dans la presse récemment, ne font d'ailleurs rien d'autre qu'illustrer - mais illustrer seulement, et rien de plus - les pans d'une gestion, disons, encore largement défectueuse.
Quant aux effectifs, nous nous fondons sur les déclarations de M. Battistella lui-même en commission: nous rappelons qu'ils sont excessifs et déraisonnables. Ils n'ont d'ailleurs pas diminué au cours des dernières années.
Dans les années à venir, ils devront être réduits significativement si les SIG entendent rester compétitifs dans des marchés ouverts et s'ils entendent livrer aux Genevois de l'énergie à des prix raisonnables. Les départs naturels suffiront amplement pour atteindre cet objectif de réduction des effectifs.
Il faut souligner à ce sujet que, contrairement à ce qu'affirment les Verts et le parti socialiste, la hausse du prix de l'électricité de 1,8 centime par kWh infligée aux Genevois dès l'an prochain constitue une solution de facilité que le Conseil d'Etat n'aurait pas dû admettre, pas plus qu'il serait acceptable que, dans les mois qui viennent, il accepte une hausse du prix de l'eau.
Peu habitué, nous le savons, à réduire avec courage son train de vie, le Conseil d'Etat a cédé - une fois de plus, devrait-on dire - à la facilité en n'exigeant pas davantage d'efforts de restructuration des SIG. A qui, au demeurant, il est vraiment très curieux d'exiger qu'ils vendent moins d'énergie, comme le suggèrent certains ici et, même, au Conseil d'Etat. Une restructuration qui reste indispensable, car il faut savoir que si le bilan des SIG a retrouvé, disons, une allure convenable, c'est essentiellement grâce aux cadeaux tarifaires accordés aux SIG depuis l'an 2000 par EOS, dont nous savons tous que les SIG sont actionnaires.
Cela étant précisé, nous le répétons, les radicaux voteront le cadre purement formel que donne aux SIG le projet de loi 10166.
M. Renaud Gautier (L). Vous me voyez fort perplexe... Nous avons passé de très très nombreuses heures, il n'y a pas si longtemps, à parler de la gouvernance. Une partie de la salle prétendait qu'elle savait mieux que l'autre partie ce qu'était la gouvernance. Or ce projet de loi, Mesdames et Messieurs, devrait nous mettre tous d'accord, à savoir ceux qui, plutôt en face, souhaitaient un meilleur contrôle démocratique et politique des entités autonomes comme les SI et ceux qui, plutôt de ce côté de la salle, souhaitaient évidemment plus de transparence, entre autres budgétaire.
Je m'étonne donc que nous n'arrivions pas à nous mettre d'accord sur ce budget, car ce dont il s'agit ce soir, Mesdames et Messieurs, c'est du budget des SI. Ce n'est pas de la politique de récupération ou de la vente: il s'agit du budget des SI ! C'est d'ailleurs défini dans l'article 160 de notre constitution, qui indique que le parlement accepte le budget des SI.
Le budget de l'Etat comporte huit cents pages, il change tous les jours, c'est relativement agaçant. Et le budget d'exploitation des SI, Mesdames et Messieurs, compte une, deux, trois, quatre, cinq lignes ! J'ai entendu M. Deneys tout à l'heure dire qu'il avait fallu... (Commentaires.) Nous devons, d'après l'article 160... (Commentaires.) On se calme ! Merci, Madame la présidente ! Nous devons, d'après l'article 160 de la constitution, voter le budget des SI. Et le budget des SI est réduit à cinq lignes dans ce projet de loi. Ne me parlez pas de cet excellent document, parfaitement incompréhensible pour qui n'est pas un comptable patenté ! Ce que vous allez voter n'est rien d'autre que ces cinq lignes !
Alors, je vous pose les questions suivantes: a) peut-on parler d'un budget quand on entend dans les gazettes locales que ce qui a fait l'objet d'un vote populaire sur un certain montant concernant le transfert des actifs est actuellement contesté ? Et je ne parle pas ici des actes notariés qui n'ont pas été préparés; c'est encore une autre broutille ! b) Peut-on parler d'un budget alors qu'aujourd'hui on ne sait pas ce qui va être répercuté sur le client en termes de la taxe sur l'eau ? c) Peut-on parler d'un budget alors que l'on ne sait pas quel va être le traitement offert ou imposé dorénavant aux cadres ou au conseil d'administration ?
Mesdames et Messieurs, ce soir vous n'allez pas voter un budget, comme vous l'impose la constitution genevoise, vous allez tout au plus accepter un gruyère, avec des trous relativement importants... Vous sentez-vous aujourd'hui capables de voter un budget qui n'est pas un budget, parce qu'il vous cache des éléments essentiels ?
Vous allez donc être confrontés à deux choix. J'oublie évidemment la sempiternelle rengaine du Conseil d'Etat selon laquelle il ne reste plus qu'une semaine pour voter le budget et que, sans cela, les SIG vont couper l'électricité et qu'il n'y aura plus ni eau ni chauffage dans les logements... Si au moins c'était vrai, les choses seraient claires ! (L'orateur est interpellé.) Moi, je chauffe au bois ! Donc, Mesdames et Messieurs vous allez voter sur un budget qui est incomplet, qui ne correspond à aucune norme en ce qui concerne l'explication d'un budget. Et vous allez peut-être être obligés de le faire, parce que sinon, comme je viens de le dire, les choses n'iront pas.
Les libéraux vous proposent par conséquent de refuser ce qui n'est pas un budget, mais seulement une vaste pantalonnade en l'état ! Et si tant est qu'il faille vous rassurer, je vous fais la proposition suivante: adopter le budget à hauteur des montants 2007, dans la mesure où il faut absolument voter ce budget aujourd'hui. Au moins là, vous avez l'ensemble des chiffres précis !
Si vous votez maintenant ce prétendu budget des SIG, Mesdames et Messieurs, vous le ferez dans le vide, sans connaître les conséquences de votre vote, ce qui est à mon avis regrettable aussi bien pour ce parlement que pour les SIG, lesquels, dans la période difficile qu'ils traversent, ont certainement besoin de tous les encouragements et les tendresses de ce parlement.
J'annonce un amendement au cas où, par hasard, ce budget serait refusé, consistant à adopter le budget à hauteur des chiffres de 2007.
M. Eric Stauffer (MCG). Je constate que lorsque l'on explique les choses gentiment, en fait, vous écoutez, mais vous n'entendez pas...
Mesdames et Messieurs du parti des Verts, je comprends que vous soyez évidemment très embarrassés avec cette affaire des Services industriels de Genève étant donné que le ministre de tutelle... (Rires.) ...est un conseiller d'Etat Vert ! Il n'en demeure pas moins qu'aujourd'hui vous êtes face à vos contradictions... En effet, si vous acceptez ce budget, c'est en partie parce que les 2,5 centimes sont inscrits dans le budget, mais en réalité vous avez fait remarquer que vous étiez déçus que le Conseil d'Etat ait limité cette augmentation à 1,8 centime. Parce que vous estimez que la consommation d'énergie doit être davantage taxée pour pouvoir financer les énergies renouvelables, etc.
Première remarque: vous n'avez en aucun cas le monopole de la pensée universelle écologique... De plus, ce qui me désole, moi et mon groupe, c'est qu'en ce qui concerne la question des Cheneviers - pfutt ! - on ne vous a pas beaucoup entendus... Et puis, votre ministre de tutelle va probablement nous faire un grand laïus, comme lui seul en est capable dans cet hémicycle, et, à la fin, nous aurons même oublié quelle était la question, tant il arrive à enrober un sujet avec son air jovial. Mais finalement, c'est le peuple genevois qui paiera les conséquences.
Alors j'aimerais tout de même vous dire ceci: certains ont critiqué mes actions un peu dynamiques, un peu, comment dirai-je... Le fait de secouer le cocotier trop fort au point de faire tomber quelques noix de coco...
Une voix. Tombées sur la tête ! (Rires.)
M. Eric Stauffer. Eh bien, le Conseil d'Etat a anticipé dans ce budget, ou plutôt, comme l'a excellemment dit mon collègue Renaud Gautier, dans cette pantalonnade - parce que c'est tout sauf un budget... Donc, le Conseil d'Etat, dans sa grande sagesse et suite à mes interventions, a quand même eu le courage de prévoir une réserve dans ce budget. Je vais vous la lire, elle est très courte: «...la politique de rémunération de la direction générale et du conseil d'administration n'a pas d'influence sur la fixation des tarifs [...]. Ce point fera toutefois l'objet de décisions de la part du Conseil d'Etat, sur la base de critères à arrêter dans la perspective de l'harmonisation des politiques de rémunération entre établissements publics autonomes et, cas échéant, sur la base des conclusions de la Cour des comptes.»
Merci au député MCG, merci à l'administrateur député d'avoir mis le doigt sur ces quelques violations de la loi en matière de politique salariale ! Et c'est ce même Conseil d'Etat qui vient prôner la bonne gouvernance, la transparence... Mais quelle transparence ? Dans ce parlement, aujourd'hui, il y a plus de brouillard qu'aux Cheneviers ! On ne voit rien, on ne voit rien ! (Rires.) Ce soir, tous les députés ont critiqué ce budget, mais ils nous disent qu'il faut tout de même l'accepter. Ils vont tous le voter !
Une voix. Non !
M. Eric Stauffer. Sauf les libéraux, c'est vrai ! Bravo ! Vous voyez ! Comme quoi le «ni gauche ni droite» prend tout son sens au fil des séances de ce Grand Conseil par rapport au MCG. Mesdames et Messieurs, nous devons être cohérents ! Vous le savez, puisque cela a été publié dans les journaux, les SIG ont retenu 20% sur le transfert des actifs, parce que, précisément, ce budget ne correspond à rien ! Ce n'est pas vous qui le dites, ce sont les SIG ! Ce budget est donc faux ! De plus - vous l'avez très justement relevé, Monsieur Deneys - ce budget est calculé sur la base d'une augmentation des tarifs de 2,5 centimes... Or un arrêté du Conseil d'Etat a limité cette augmentation à 1,8 centimes ! Donc, ce torchon que nous avons entre les mains ne correspond à rien ! Et vous allez le voter ce soir... En vous disant: «Eh bien, on se moque des Genevois... Ce n'est pas grave, votons, nous sommes du reste là pour cela. Finalement, que des gens fournissent des chiffres qui ne correspondent à rien n'a aucune espèce d'importance... Que l'on importe des dizaines de milliers de tonnes d'ordures de toute l'Europe pour les incinérer à Genève, ce n'est pas grave non plus... Et pourquoi ne pas augmenter encore le prix du kWh, le fixer tout de suite à deux francs ? Ainsi, on pourra installer des éoliennes partout, et peut-être que dans trois ou quatre cents générations Genève sera enfin devenu écologiste !»
Non, nous devons être sérieux et cohérents ! Certains partis ont prôné la bonne gouvernance, chacun avec ses thèses. Mais si ce soir, devant la population genevoise, nous votons ce budget, ce ne sera pas un exemple de bonne gouvernance. A ce sujet, je tiens à saluer les libéraux qui sont cohérents avec leur ligne politique, même si ce n'est pas pour les mêmes motifs que le MCG. En effet, aujourd'hui, la cohérence nous commande de refuser ce budget parce qu'il ne correspond à rien ! Vous le savez, les réserves préconisées par les réviseurs n'y figurent pas - il y a une réserve quant à la politique des salaires par rapport à la Cour des comptes.
Vous ferez comme vous le voulez, mais, une fois de plus, la population constate et subit les décisions qui sont prises dans cet hémicycle ! J'en ai terminé, Madame la présidente: nous refuserons ce budget, comme je l'ai déjà indiqué.
La présidente. Nous avons bien pris note, Monsieur le député. Je donne la parole à M. Guénat, pour le groupe UDC.
M. Philippe Guénat (UDC). Chers collègues, pour une fois - et ça n'a rien à voir avec ce qui s'est passé récemment - le groupe UDC est un peu confus... (Exclamations.) Ah oui, ça arrive ! Ce qui vous montre que nous sommes humains ! (Exclamations. Applaudissements.) Nous ne sommes que des humains ! Nous ne sommes même pas des bêtes, nous sommes des humains !
Plus sérieusement. Le groupe UDC a suivi ces travaux. Bien que nous ayons été, en commission, quelque peu surpris de constater qu'à chaque fois que nous posions une question à M. le président Mouchet, celui-ci semblait très embarrassé - il se tournait vers son directeur, M. Battistella, qui, heureusement, jouait pleinement son rôle de capitaine des SIG et qui était en mesure de répondre à nos questions - eh bien, le groupe UDC, dans un esprit de conciliation et afin d'aller de l'avant, a décidé de soutenir ce projet.
Peut-être les SIG se sont-ils sentis rassurés par le support de la plupart des partis... Quoi qu'il en soit, plusieurs informations ont tout à coup été données. Et ces informations, Madame la présidente, nous ont fortement troublés ! Nous nous sommes demandé comment celles-ci pouvaient remonter à la surface à ce moment-là. Devant cette nébuleuse, devant tant de questions et d'inquiétudes - mon collègue Gautier parlait de fromage, je parlerai de gruyère nébuleux - nous avons commencé à nous sentir déstabilisés. Alors aujourd'hui, Madame la présidente, le groupe UDC, faisant face à ses responsabilités... (Brouhaha. La présidente agite la cloche.) ...a décidé de refuser ce budget.
Une voix. Bravo !
M. Philippe Guénat. A mon collègue des Verts, qui indique que la consommation d'électricité ne cesse de croître à Genève, je répondrai que 200 000 places de travail ont été créées ces dix dernières années, que la population genevoise a augmenté et que, par conséquent, la consommation totale d'énergie a forcément augmenté. C'est comme les salaires, c'est comme l'espérance de vie !
Je parlerai maintenant en tant qu'entrepreneur. D'un côté, les SIG nous demandent des augmentations du prix de l'électricité; de l'autre, des réseaux concurrents me proposent, en tant qu'entrepreneur à Genève, d'acheter de l'électricité à un prix inférieur à celui qui proposé par les SIG... Qui a raison ?! Cela pose un problème !
C'est pourquoi je conclurai, Madame la présidente, que le groupe UDC, bien qu'il ait accepté ce projet en commission et suite aux découvertes faites entre-temps, va énergiquement refuser ce budget. (Applaudissements.)
M. Jean-Claude Ducrot (PDC), rapporteur. Je ne reviendrai pas sur toutes les inexactitudes qu'on a pu entendre au cours de ce débat... Mais permettez-moi tout de même de revenir sur certains propos, notamment ceux de M. Deneys concernant les revenus des administrateurs. Je le renvoie à la page 10 du rapport où il est indiqué: «Le Conseil d'Etat a adressé une note à tous les établissements autonomes en leur précisant que les jetons de présence encaissés dans des conseils d'administration des filiales des établissements autonomes devront être reversés à ces dernières.» Cette déclaration a été faite.
J'en viens maintenant à un autre problème, soulevé par M. Stauffer, lié aux déchets des Cheneviers. Les SIG ont précisé la stratégie qu'ils ont développée en la matière - quand bien même il peut y avoir des inquiétudes quant aux émanations de ceux-ci - et que l'apport des déchets a diminué cette année de l'ordre de 15%. (Brouhaha.)
Il faut savoir également que la volonté... (Brouhaha. L'orateur se tait. La présidente agite la cloche.)
La présidente. Mesdames et Messieurs les députés, ce brouhaha est insupportable, nous avons de la peine à entendre M. le rapporteur ! Si vous préférez poursuivre vos conversations, vous pouvez vous rendre à la salle Nicolas-Bogueret ou à la salle des Pas-Perdus. Je demande le silence et redonne la parole à M. le rapporteur.
M. Jean-Claude Ducrot. Merci, Madame la présidente. Au sujet des Cheneviers, il est vrai - les SIG l'ont reconnu et c'est dans le cadre du rapport - que les déchets proviennent de différents endroits. Mais la volonté des SIG, à terme, c'est de tenter de se fournir dans la région limitrophe. Il faut dire aussi que les Cheneviers sont producteurs d'énergie, notamment au travers de CADIOM - le chauffage à distance - qui devrait être, d'ici à 2011, couplé avec la centrale à gaz du Lignon. (Brouhaha.) Du point de vue de la production d'énergie, cela représente une valorisation des déchets qui sera importante.
Quant aux déchets spéciaux dont il a été fait état, il est également relevé dans le rapport que la mission - qui a été reprise par les SIG de l'Etat, puisque les Cheneviers étaient à l'Etat - était de les transférer, de les faire reprendre par des sociétés contrôlées et spécialisées dans le traitement de tels déchets.
Permettez-moi encore, Mesdames et Messieurs, deux trois mots liés à la libéralisation du marché de l'électricité. Cette libéralisation va conduire, bien évidemment, les SIG à devoir se fournir sur le marché. Sur le marché libre à la concurrence. Mais, comme cela nous a été précisé, le coût du kWh pour les SIG sera beaucoup plus cher que la production locale que les SIG veulent tenter de pousser à 50% ces prochaines années. (Brouhaha. La présidente agite la cloche.) Toutefois, la libéralisation du marché de l'électricité offrira quand même quelques avantages, puisqu'une taxe de 0,6 centime par kWh sera dévolue à la promotion des énergies renouvelables. Et il a été également signalé qu'environ 1,3 kilomètre de toitures bien orientées dans le canton de Genève permettront des installations photovoltaïque, précisément pour produire de l'énergie renouvelable.
Mesdames et Messieurs, bien évidemment, on peut voir le verre à moitié plein ou à moitié vide... D'aucuns veulent le voir à moitié vide. Pour ma part, je serai optimiste, et je le verrai à moitié plein. Je conclurai en disant que les SIG ont une vision d'avenir - indépendamment des problèmes qu'il ne faut pas occulter - notamment par le biais d'ECO 21, parce qu'ils sont à la fois producteurs, mais aussi incitateurs d'économies.
La présidente. Il faut conclure, Monsieur le député !
M. Jean-Claude Ducrot. Je terminerai par cette phrase: Carpent tua poma nepotes... (Exclamations.) ...qui se trouve à la fin de mon rapport. Elle est tirée d'un vers de Virgile, et Dieu sait si ce n'est pas d'aujourd'hui: le poète s'inspire de cette pensée que l'homme ne doit pas seulement songer au présent et à lui-même, mais aussi à l'avenir et aux générations futures. (Applaudissements.)
M. Robert Cramer, conseiller d'Etat. Tout d'abord, je tiens à remercier M. Ducrot, et, en l'occurrence, il ne s'agit pas d'une clause de style... On remercie en effet souvent le rapporteur, mais, dans le cas présent, M. Ducrot a travaillé dans des conditions difficiles et il a rendu son rapport dans un temps record. En outre, il a remarquablement préparé cette séance, ce qui lui a permis de compléter son rapport en donnant d'autres indications, ce qui fait qu'en réalité je n'aurai que fort peu de chose à ajouter... Mais tout de même !
Je dirai d'abord que ce budget 2008 des Services industriels - les débats d'aujourd'hui le montrent très clairement - est le budget de tous les dangers. Pourquoi le budget de tous les dangers ? Premièrement, parce que c'est le budget de la libéralisation du marché de l'électricité et, pour toutes les sociétés d'électricité de ce pays, le budget est très compliqué à faire. Deuxièmement, parce que - et il s'agit d'une affaire beaucoup plus genevoise - c'est aussi le budget des transferts d'actifs. A cela s'ajoute que cette entreprise vit une période de transition, puisque son directeur va partir à la fin de cette année.
Je vais essayer de répondre, l'une après l'autre, aux questions que vous avez posées, en les regroupant par thèmes, tout en disant - ce sera mon propre liminaire en réponse à ces questions - que la vitesse à laquelle nous avons dû travailler, de même que les conditions un peu particulières de cette année-ci et, aussi, la volonté de fournir les renseignements qui ont été donnés expliquent que, parfois, certains chiffres changent. Parce qu'ils changent au cours du temps ! Ce n'est pas que l'on a dit quelque chose de juste à un moment ou de faux à un autre; simplement, les données évoluent au cours du temps.
Le premier chiffre qui change porte sur la problématique des tarifs de l'électricité. C'est un élément extrêmement important, puisque c'est l'essentiel du produit des Services industriels. Je ne vais pas vous accabler de chiffres, mais il faut tout de même en retenir un: entre 1998 et 2007, le prix de l'électricité à Genève a diminué - diminué, entendez bien ! - de 20%. C'est considérable ! Non seulement c'est considérable, mais cela fait de Genève l'endroit de Suisse romande où l'électricité est la moins chère pour les ménages et pour les entreprises. J'ai rencontré hier, à Berne, le Surveillant des prix, M. Strahm, qui me le confirmait: il m'a dit que s'il me parlait de certains problèmes qui le préoccupaient au sujet de l'électricité en Suisse romande, c'est parce qu'à Genève nous étions les meilleurs, les pionniers dans la façon de faire les choses.
Eh bien, ce prix de l'électricité est aujourd'hui trop bas par rapport aux prix du marché, qui ont considérablement augmenté. Il faut savoir que Genève ne produit que 25% de son électricité, comme l'a rappelé M. Ducrot, de sorte que nous devons acheter 75% à l'extérieur. Et quand le vendeur vend beaucoup plus cher, il faut répercuter le coût sur le consommateur. Le Surveillant aux prix nous avait indiqué que nous pouvions procéder à une augmentation de 2,9 centimes au kWh. Les Services industriels ont décidé, par toutes sortes de mesures d'économies, de se borner à une augmentation de 2,5 centimes, mais le Conseil d'Etat a fixé volontairement cette augmentation à 1,8 centime en sachant que ce prix est trop bas - en tout cas en ce qui concerne le prix de la marchandise - par rapport aux prix du marché. Cela veut dire dans le même temps - je reviendrai sur les questions de gestion - que nous demandons aux Services industriels de Genève de compenser cette différence en effectuant des performances supplémentaires dans leur manière de gérer.
Par là-même, favorisons-nous le gaspillage ou une mauvaise politique de l'énergie, comme le disent mes amis Verts ? Non ! Parce que, sur ce point aussi, Genève est pionnière: nous avons été le premier endroit de Suisse à distinguer, comme le demande la libéralisation du marché, l'électricité dans ses trois composantes: la production, le transport et la distribution. En réalité, seul le secteur «Achats» ou «Production» est affecté par le changement de tarif et ce n'est pas le domaine où l'on gagne de l'argent. Les Services industriels de Genève ont tout intérêt, en définitive, à ce que les consommateurs achètent le moins d'électricité possible, parce qu'ils ont tout intérêt à vendre le moins possible de cette électricité à perte. Ce n'est pas en vendant le produit que l'on gagne de l'argent: c'est en offrant des services, notamment des conseils en matière d'économies d'énergie. Nous pourrons revenir ultérieurement sur ces mécanismes.
Retenez simplement que, après augmentation, le prix de l'électricité à Genève restera encore très avantageux par rapport à ce qu'il est ailleurs en Suisse romande et que cette augmentation est inévitable !
La deuxième question de tarif qui a été évoquée concerne l'eau. L'affaire est très simple. Le Conseil d'Etat envisage - et c'est vrai - de créer une tarification de l'eau. Cela ne signifie pas du tout qu'il acceptera pour autant une augmentation du prix de l'eau - et je le dis très clairement à ce Grand Conseil, parce qu'il faut tordre le cou à ces rumeurs - il n'y aura pas d'augmentation du prix de l'eau, en tout cas dans le cadre de l'exercice budgétaire de 2008. Jusqu'ici personne ne nous l'a demandé, mais le Conseil d'Etat entend bien, si les Services industriels de Genève lui demandaient une augmentation du prix de l'eau, la refuser. Cet élément devait être souligné.
Deuxième élément qui a été évoqué - je sors maintenant de la problématique des tarifs pour parler de celle de la gestion des déchets - je vais en parler très brièvement, parce que, juste après ce débat, trois objets portent uniquement sur les Cheneviers, ce qui fait que nous aurons l'occasion d'en parler plus longuement. Je souhaite simplement que vous reteniez - c'est peut-être l'essentiel - qu'en matière de gestion des déchets un double contrôle est exercé: par la Confédération sur certains déchets, par le canton de Genève sur d'autres. C'est donc dire que le canton de Genève doit exercer ses compétences dans ces domaines. J'ajoute qu'il les exerce avec rigueur pour prémunir la population du risque qu'un exploitant - qu'il s'agisse des Services industriels de Genève, de tout autre exploitant ou de toute autre chaudière de ce canton - puisse polluer l'air, puisse ne pas respecter les normes légales. En l'occurrence, ce n'est pas le problème des Cheneviers ni des Services industriels de Genève: c'est très clairement celui de l'Etat de Genève, qui se doit de ne pas accorder de passe-droits et d'être rigoureux dans ses exigences en matière de qualité de l'air et en matière de qualité des installations qui fonctionnent à Genève.
Quant à la problématique générale sur la manière dont fonctionne un incinérateur, nous en reparlerons peut-être tout à l'heure, si vous le voulez bien. Ce qui est au centre de cette discussion, c'est de montrer qu'il est tout simplement exclu d'imaginer que les Services industriels de Genève vont gagner de l'argent en polluant l'air: ce n'est pas du tout le cas !
Troisième problématique qui a été évoquée: de façon générale, des questions liées à la gestion, ont été posées par M. Gautier, par M. Walpen et par d'autres, sous des angles différents. Tout d'abord, on le sait bien - l'effet de manche est beau - le budget des Services industriels est comme le budget de l'Etat. La loi qui parle du budget comporte peu de chiffres et il en est de même pour la loi que vous voterez demain, je l'espère, concernant le budget de l'Etat ! La loi elle-même contient peu de chiffres, mais, à côté, il y a un bouquin qui détaille la façon dont les choses sont faites. Je n'accepterai donc pas que l'on accrédite l'idée que le budget serait établi au petit bonheur la chance ! Je vois que vous avez un livre entre les mains, mais ce n'est pas tout à fait le bon, Monsieur Gautier... (Rires. M. Robert Cramer est interpellé.) Il faut venir en commission ! Je ne laisserai pas dire que les Services industriels de Genève ont établi leur budget au petit bonheur la chance: c'est tout à fait inacceptable ! Les Services industriels de Genève ont été la première entreprise publique de ce canton à appliquer intégralement les normes IPSAS. Des contrôles internes et externes sont préparés de façon extrêmement rigoureuse. La manière dont le budget est effectué aux Services industriels passe par un très gros travail au niveau de l'entreprise, au niveau de ses directions, au niveau du conseil d'administration et des commissions du conseil d'administration. C'est un budget qui a été lu, lu et relu. Ce qui explique, d'ailleurs, qu'il parvienne un peu tardivement au Grand Conseil où les députés ont à nouveau la possibilité, ligne par ligne, de demander les renseignements nécessaires.
De façon plus générale sur ces questions de gestion et au-delà des contrôles internes et externes qui s'appliquent sur ce budget, je tiens également à dire que si vous prenez la masse salariale des Services industriels de Genève et le nombre de postes, il y a assurément des progrès à faire, comme le relevait M. Battistella, mais, surtout, il est frappant de voir à quel point, en une dizaine d'années, le nombre de postes a peu varié aux Services industriels de Genève. Et à quel point, dans bon nombre de domaines, il y a eu des diminutions, il y a eu des gains de productivité.
La question de la communication m'a été posée de façon plus particulière: je me renseignerai sur ces chiffres... Vous comprenez bien que je n'ai pas sous la main le nombre des collaborateurs du service qui s'occupe de la communication !
Et puis, s'agissant de la gestion, je parlerai également de la rémunération des administrateurs. Sur ce point aussi, le Conseil d'Etat a dit des choses extrêmement précises: nous entendons mener une réflexion globale en ce qui concerne les établissements de droit public. Cette réflexion globale se fera, bien sûr, à la lumière des indications que nous donnera la Cour des comptes; mais, sans attendre ces indications, une première mesure a été décidée par le Conseil d'Etat, qui a fait l'objet d'une communication. Il s'agit d'une lettre qu'il a adressée à tous les établissements de droit public de ce canton pour les avertir que, dorénavant, les gens, qu'ils soient administrateurs, employés ou directeurs de ces entreprises, qui, parce qu'ils sont dans ces entreprises, ont accès à des conseils d'administration d'entreprises tierces, ne pourront plus conserver pour eux-mêmes le produit de leurs jetons de présence. Ces montants doivent être reversés dans la caisse de l'entreprise. Cette directive a été envoyée à tous les conseils d'administration et dans toutes les directions de tous les établissements de droit public de ce canton.
Dernier point que je souhaitais aborder, puisqu'il a fait l'objet de questions, je veux parler de la problématique des transferts d'actifs, question qui a été médiatisée. Il s'agit d'une affaire très simple. La population genevoise a accepté à une très large majorité de transférer aux Services industriels de Genève un certain nombre d'actifs de l'Etat - concrètement, il s'agit de toute une série d'installations: Cheneviers, stations d'épuration des eaux et autres. La façon dont le prix devait être fixé pour ces installations a fait l'objet de débats: il figure dans la loi qui a été adoptée et il ressort aussi des dispositions constitutionnelles qui ont été approuvées par la population genevoise. La loi n'a pas fait l'objet de référendum: elle est en force. Ce sont donc bien les montants qui figurent dans la loi qui devront être versés par les Services industriels, que cela plaise ou pas !
On a connu, l'année dernière, un petit épisode de ce genre avec la Ville de Genève qui devait de l'argent à l'Etat, mais qui trouvait que ce n'était pas une très bonne idée de le verser aux dates dites... On lui a dit que si elle ne voulait pas payer ce n'était pas un problème, que ça lui coûterait 5% d'intérêts chaque mois: du coup, la somme a été payée très rapidement ! Eh bien, pour les Services industriels, c'est exactement la même chose. Un arrêté du Conseil d'Etat a été pris dans ce sens: une lettre est partie, et il y a tout lieu de penser que les Services industriels vont s'exécuter. Du reste, il y a demain une séance du conseil d'administration de cette entreprise pour discuter de cette question, et j'imagine que les administrateurs, une fois qu'ils auront reçu les explications adéquates, seront fort raisonnables. Tout l'indique, en tout cas !
Voilà, ces quelques indications étant données, je vous remercie de voter l'entrée en matière de ce budget. De la voter non pas parce que vous vous y sentez contraints, mais avec conviction et, aussi, parce que c'est le seul moyen de donner la possibilité à cette entreprise de continuer à travailler pour notre collectivité dès le 1er janvier de l'année prochaine et de permettre également, de manière générale, de ne pas déstabiliser une entreprise, qui est confrontée, comme je l'ai dit en introduction, à un passage difficile et compliqué. Ne pas déstabiliser l'entreprise... Vous comprenez bien que, si vous ne votez pas le budget, elle ne saura pas au 31 janvier comment elle pourra payer les collaborateurs ! C'est du reste la raison pour laquelle vous n'avez pas renvoyé ce projet en commission.
On ne sait pas non plus dans quelles conditions les prestations fournies par les Services industriels en matière de gaz et électricité seraient rendues. En cas de scénario catastrophe, j'imagine qu'un système de service d'urgence serait instauré et que l'on ne couperait pas l'électricité à l'hôpital, mais peut-être des mesures un peu délicates devraient-elles être prises, ne serait-ce que pour respecter vos décisions. Mais je n'ose pas envisager ce genre d'événement ! Les messages que vous nous avez donnés ont été compris.
J'ajoute tout de même - comme M. Deneys l'a dit, à mon avis, très justement - qu'une bonne partie de vos interrogations seraient extrêmement légitimes au moment de traiter les comptes, parce que c'est le bon moment pour discuter dans le détail de la manière dont l'entreprise a été gérée, de ce qu'elle a fait ou de ce qu'elle n'a pas fait. Pour l'instant, nous sommes au stade du budget, et il s'agit simplement de donner à l'entreprise la possibilité de continuer à travailler l'année prochaine. Les collaborateurs de cette entreprise n'ont pas démérité, et ils méritent notre confiance.
La présidente. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Monsieur Stauffer, vous demandez le vote nominal ? Etes-vous appuyé... Vous l'êtes. (Remarque.) Non, Monsieur Velasco, la liste était close... (Remarques. Mme le Sautier fait signe de ne pas passer le micro. Brouhaha.) Monsieur le député, je suis obligée de vous demander d'annoncer vos liens d'intérêt. Merci. (Un instant s'écoule.)
Une voix. Parle fort ! (Exclamations.)
La présidente. Je vous en prie ! Ce n'est pas moi qui enclenche les micros. Je vous ai donné la parole, Monsieur le député.
M. Alberto Velasco (S). Madame, un débat a eu lieu dernièrement dans ce Grand Conseil à ce sujet. Je tiens à dire, en ma qualité d'administrateur des Services industriels, que je ne participerai pas au vote du budget, puisque que le vote est uninominal dans ce Grand Conseil. (Exclamations. Applaudissements.)
La présidente. C'est tout à votre honneur, Monsieur le député. Je vous en remercie.
Mis aux voix à l'appel nominal, le projet de loi 10166 est adopté en premier débat par 45 oui contre 39 non et 1 abstention.
Deuxième débat
Mis aux voix, le titre et le préambule sont adoptés.
La présidente. Nous sommes saisis d'un amendement que vous avez tous reçu et qui est proposé par M. Stauffer à l'article 1. Monsieur le député, je vous donne la parole.
M. Eric Stauffer (MCG). Merci, Madame la présidente. Je voulais juste intervenir avant le vote pour préciser que, pour ma part, je participerai au vote, car l'article 24 ne s'applique pas dans ma situation. Il n'y a en effet pas de conflit d'intérêt, dans la mesure où ma seule mission est de défendre les intérêts des citoyens... (Protestations.) ...que ce soit en ma qualité d'administrateur ou de député !
Cela étant dit, Mesdames et Messieurs les députés, nous avons entendu les brillantes explications de M. le conseiller d'Etat Cramer concernant le budget relatif à divers problèmes qui ont été évoqués dans cet hémicycle, notamment sur l'importation des déchets provenant de l'Europe et, plus spécifiquement, de l'Italie du Sud. M. le conseiller d'Etat a indiqué que des contrôles étaient effectués avec beaucoup de rigueur... Oui, certes, nous n'en disconvenons pas. Du reste, un illustre député de ce Grand Conseil est chef des douanes de Genève et il effectue tous les jours des contrôles aux frontières... Il n'empêche que si l'on trouve beaucoup de drogue dans les rues de Genève, cela signifie que les contrôles ne peuvent pas être efficaces à 100% ! Les contrôles sont ponctuels. (Brouhaha. La présidente agite la cloche.)
J'en viens à l'amendement que nous avons déposé... Si nous voulons être cohérents, Mesdames et Messieurs les députés, et en adéquation avec cette bonne gouvernance prônée par tout le monde, eh bien, nous devons, puisque nous le savons aujourd'hui, déduire du budget des Services industriels de Genève la réserve ou provision qui a été demandée par les réviseurs. M. le conseiller d'Etat nous dit que tout est contrôlé, que les normes IPSAS sont appliquées... Il y a une armada de juristes aux Services industriels qui ont quand même influencé le conseil d'administration pour bloquer 20% du montant du transfert des actifs précisément à cause des Cheneviers, dont nous sommes en train de parler. Du reste, à ce sujet, Monsieur le conseiller d'Etat, j'aimerais tout de même ouvrir une parenthèse, parce qu'il faut tout de même faire savoir à la population que - et cela fait l'objet d'un autre texte parlementaire déposé par un député indépendant - selon les dernières études autour de la cheminée des Cheneviers, c'est-à-dire à Aire-la-Ville, les taux de cancer sont quatre fois supérieurs que dans le reste du canton... Il faudra bien qu'un jour nous ayons une explication à ce sujet !
Par ailleurs, vous dites, Monsieur le conseiller d'Etat, qu'il n'est pas question de gagner de l'argent avec l'incinération des ordures et que tout se passe très bien. J'avais prévenu tout le monde que vous alliez nous endormir avec votre charisme naturel... Il ne reste pas moins que les chiffres parlent d'eux-mêmes, Monsieur le conseiller d'Etat, puisque plus de 65 000 tonnes de déchets sont importés de l'étranger - et pas de la région - pour être incinérés à Genève ! Alors, si ça ne pollue pas, Monsieur le conseiller d'Etat, pas de problème ! Construisons vingt-cinq usines d'incinération, et Genève fera du business avec les déchets ! Nous pourrons faire du fric, cela nous permettra de rembourser la dette et, qui sait, Genève fera avec les ordures comme Monaco avec le casino ! (Rires.) Et les habitants ne payeront plus d'impôts !
Soyons sérieux, Mesdames et Messieurs les députés ! (Brouhaha. La présidente agite la cloche.) Nous savons aujourd'hui que les réviseurs demandent aux Services industriels de Genève une réserve de 60 millions de provision. Cela veut dire, en tout état de cause - et il y a dans cette salle d'éminents experts-comptables et d'éminents avocats qui ne pourront pas me contredire - que nous devons modifier le budget dans ce sens, puisque nous le savons d'ores et déjà, et pour qu'au moins il soit plausible.
Mesdames et Messieurs les députés, je vous invite donc à soutenir l'amendement présenté par le MCG, qui consiste à ajouter à l'article 1 une lettre f): «déduire la réserve demandée par les réviseurs des SIG de 60 millions de francs, relative à l'usine des Cheneviers.
La présidente. Merci, Monsieur le député. Je passe la parole à M. Pierre Kunz, à qui je demande de s'exprimer sur l'amendement.
M. Pierre Kunz (R). Madame la présidente, je... (Son strident. Brouhaha.)
La présidente. Monsieur le député, votre micro présente de toute évidence un problème et je vous remercie de bien vouloir changer de place.
M. Pierre Kunz. Merci, Madame la présidente. Je m'exprimerai sur l'amendement. M. Stauffer explique que nous devons être sérieux, il le dit d'ailleurs au moins dix fois par séance... M. Stauffer prétend être le défenseur des citoyens genevois, et il le dit aussi au moins dix fois par séance... Eh bien, j'aimerais vous demander, Madame la présidente, de lui rappeler qu'un député sérieux, un député qui se veut vraiment le défenseur des citoyens, est quelqu'un qui parle non pas en fonction de ce qu'il croit savoir, mais de ce qu'il sait vraiment !
Et cet amendement, Mesdames et Messieurs les députés, Madame la présidente, est l'illustration parfaite de ce que fait quelqu'un qui croit savoir, mais qui ne sait rien du tout ! (Exclamations.) Prenons les mots de cet amendement: «déduire la réserve»... D'abord, déduire de quoi ? Ensuite: «la réserve»... Mais une réserve ne se déduit pas, elle se constitue ! Et après: «demandée par les réviseurs»... Mais, Mesdames et Messieurs les députés, les réviseurs ne demandent jamais de constituer des réserves sur les budgets: ils demandent d'intervenir sur les comptes !
Donc, tout cela, Mesdames et Messieurs les députés, c'est de la foutaise ! (Rires.) Alors ne vous privez pas de le faire constater à M. Stauffer, en refusant cet amendement sans autre commentaire ! (Applaudissements.)
M. Roger Deneys (S). J'adhère aux propos de M. Kunz... (Commentaires.) ...tout en étant assez surpris de la cornemuse qu'il doit cacher dans sa poche. J'imagine qu'une soirée écossaise doit se préparer du côté des libéraux et des radicaux. Ce qui me fait penser à cela, d'ailleurs, c'est le déguisement de M. Jornot en Sherlock Holmes à l'occasion de l'Escalade... A mon avis, il y a un petit épisode anglais ou écossais qui se trame, mais je n'ai pas compris pourquoi... Nous aurons certainement des explications plus tard.
Pour ce qui est de l'amendement - et pour être sérieux... Monsieur Stauffer ! - je suis désolé, je vous le répète: nous ne pouvons pas amender le budget des Services industriels de Genève ! Nous pouvons demander des explications sur les comptes, mais nous ne pouvons pas amender le budget. Par conséquent, si votre amendement était accepté, il serait certainement illégal.
Je vous invite donc, Mesdames et Messieurs les députés, à refuser cet amendement par simple bon sens.
M. Francis Walpen (L). Mon excellent collègue Deneys vient de répondre à la question que je souhaitais poser au Bureau: avons-nous la possibilité de présenter un amendement ? Jusqu'à présent, ce n'était pas possible, mais je voulais avoir une confirmation. Je viens de l'obtenir grâce à M. Deneys, que je remercie.
La présidente. Vous avez raison, Monsieur le député, mais M. Cramer va nous répondre sur ce point. Au préalable, je donne à nouveau la parole à M. Stauffer. (Exclamations.)
M. Eric Stauffer (MCG). Merci, Monsieur Deneys ! Merci, chers collègues ! J'attendais ce moment, parce que, constitutionnellement - et c'était la démonstration que je voulais faire - vous avez raison, Monsieur Kunz, nous avons rédigé cet amendement en moins de trente secondes. Il fallait faire vite, et parce que nous le savons, mais je voulais que tout le monde soit au courant: nous n'avons pas le droit d'amender le budget des SIG ! (Exclamations.) Merci, Monsieur Deneys ! Merci, Messieurs ! Eh bien voilà ! C'est la démonstration de ce que nous avons qualifié comme étant un hold-up démocratique: nous sommes dans un couloir, dont nous ne pouvons pas sortir ! Cette logique est destructrice à tout point de vue.
Maintenant, Monsieur le conseiller d'Etat, je me réjouis de vos explications, car il est vrai - du reste, M. Renaud Gautier l'a rappelé - que, selon l'article 160 de la constitution, le Grand Conseil doit accepter le budget des Services industriels de Genève, c'est-à-dire qu'il doit l'accepter ou le refuser, mais il ne peut pas l'amender. Voilà dans quelle logique de bonne gouvernance nous sommes !
Et quand nous, administrateurs des Services industriels de Genève, nous posons des questions, on ne nous répond pas ou très tardivement ! Et quand nous, commissaires à la commission de l'énergie - cela a été relevé par notre collègue libéral et par M. Deneys - nous posons des questions, on ne nous répond pas ! Et après, on nous «bassine» dans ce Grand Conseil pour nous convaincre que tout va bien, que l'entreprise gagne des sous... Il ne manquerait plus qu'il en soit autrement, avec un monopole d'Etat et une clientèle captive ! Si l'entreprise perdait des sous, Messieurs, il faudrait qu'elle change d'activité ! Je le répète: c'est absolument détestable ! Mais c'est la démonstration qu'il y a quelque chose qui ne fonctionne pas dans notre démocratie ! J'en ai terminé, Madame la présidente, et je retire mon amendement.
La présidente. Nous l'avions bien compris ! Monsieur Cramer, d'autres personnes se sont inscrites... Voulez-vous répondre tout de suite ?
M. Robert Cramer, conseiller d'Etat. Si vous le voulez bien, Madame la présidente ! Il n'y a pas lieu d'épiloguer longuement. Je voulais simplement intervenir pour dire la chose suivante. Tout d'abord, historiquement, la question s'est posée à deux ou trois reprises pour des budgets des Services industriels de Genève qui étaient contestés. Je me souviens notamment, à l'époque où M. Jean-Philippe Maitre était conseiller d'Etat, que les Services industriels de Genève souhaitaient une augmentation des tarifs, laquelle était fortement contestée par le Conseil d'Etat. Eh bien, dans ce cas, il a toujours été admis que l'autorité qui s'opposait au budget - en l'occurrence, c'était le Conseil d'Etat, mais cela aurait pu être le Grand Conseil - pouvait renvoyer le budget à son expéditeur pour qu'il le refasse. Comme vous le comprenez bien, ce budget n'est pas uniquement constitué des quatre chiffres qui en sont le résultat: il représente tout un travail, ligne par ligne. Il a donc fallu le reprendre ligne par ligne pour le refaire: c'est ainsi que cela s'est passé. A-t-on fait juste ou pas dans le passé ? Je n'en sais rien ! En tout cas, l'usage est de considérer que l'on ne peut pas, au niveau du Grand Conseil, résoudre les questions budgétaires qui portent sur des chiffres importants. Si on n'est pas d'accord, on le dit, et l'entreprise refait une nouvelle proposition de budget - ce qui est normal - qui est ensuite validée par le conseil d'administration, avec le sérieux que l'on connaît à ces travaux.
Maintenant, je voulais revenir sur un deuxième point - mais ce n'est certainement pas pour revenir sur les propos d'expert de M. Kunz - c'est-à-dire sur le fond de cette proposition d'amendement. Quand bien même il a été retiré, il faut savoir ce qu'il signifie: il signifie simplement que cela augmente l'endettement de l'Etat de 60 millions ! Cela veut dire que l'on fait cadeau de 60 millions aux Services industriels de Genève, partant de l'idée que les réserves qui pourraient être faites par des réviseurs doivent être prises en considération et que les Services industriels de Genève pourraient verser 60 millions de moins à l'Etat, contrairement à des lois votées par ce Grand Conseil. Cela augmenterait donc l'endettement de l'Etat de 60 millions. Ou ne le diminuerait pas de 60 millions, ce qui revient au même. Ce n'est évidemment pas une très bonne idée. L'Etat a une dette qui s'élève à un peu plus de 12 milliards; si l'on peut éviter ce manque à gagner de 60 millions, c'est plutôt travailler dans le sens des intérêts de notre collectivité.
Quoi qu'il en soit, cet amendement étant retiré, j'espère que je n'aurais pas à revenir sur ces explications.
La présidente. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Trois personnes sont inscrites... Etant précisé que l'amendement est retiré, souhaitez-vous toujours prendre la parole, Monsieur Pétroz ? (M. Pascal Pétroz acquiesce.)
M. Pascal Pétroz (PDC). Je voudrais brièvement vous dire... Que je renonce à prendre la parole ! Puisque, avec mon collègue Bavarel, dans un souci de concordance extrême et de magnifique consensus, nous nous sommes mis d'accord sur une intervention, que j'espère être commune !
La présidente. Très bien ! (Rires.) Monsieur Bavarel, que dois-je comprendre ? Que vous parlez pour deux... voix ? Je vous laisse la parole.
M. Christian Bavarel (Ve). J'assumerai mes propos. J'espère qu'ils seront partagés par d'autres personnes dans cette salle.
Je tiens à dire que je suis stupéfait qu'un administrateur d'une entreprise puisse voter contre le budget proposé par celle-ci, dans la mesure où un administrateur a un devoir de fidélité envers cette entreprise. S'il n'est pas d'accord avec ce rôle, il peut démissionner et exprimer les raisons pour lesquelles il démissionne. Si les administrateurs se mettent à tirer sur les entreprises qu'ils sont censés défendre et représenter, cela veut dire qu'il y a un réel problème de gouvernance ! (Brouhaha. La présidente agite la cloche.) Il s'agit d'un véritable conflit d'intérêt au sein de ce Grand Conseil et, je le répète, cela me stupéfait ! C'est le contraire de ce que nous souhaitons en termes de gouvernance des entreprises publiques, et cela me pose vraiment un énorme problème quant au rôle de nos administrateurs au sein de ces entités. Je reste réellement sans voix devant ce qui est en train de se passer ! (Applaudissements.)
M. Claude Jeanneret (MCG). Effectivement, certains propos peuvent laisser perplexe si l'on considère qu'un administrateur est un représentant de la société qu'il administre. Mais il ne faut pas confondre les administrateurs nommés par des actionnaires d'une société dans le privé - ces actionnaires étant copropriétaires - avec les administrateurs qui sont désignés par les politiques et qui sont censés protéger les intérêts du peuple qui les a élus et qui désire qu'une surveillance soit exercée.
Certes, il est difficile de concilier les deux, mais je crois que nous ne devons pas faire ce type de comparaison, sauf, Monsieur Bavarel, si vous considérez que le fait d'avoir rendu ces entreprises autonomes leur donne les droits des entreprises privées. Ce n'est pas encore le cas ! Jusqu'à présent ces entreprises appartiennent à l'Etat. Certains représentants des partis sont élus. Ils ont pour mission d'assurer une bonne gouvernance, mais, aussi, de vérifier que les informations qui sont données soient justes. Et il s'avère, dans ce que nous avons entendu jusqu'à maintenant, que les administrateurs ne reçoivent pas les informations qu'ils demandent à la direction, parce qu'il y a des indépendants, parce qu'il y a des gens qui ne se sentent pas du tout concernés. Or, il ne s'agit pas d'une entreprise privée !
Il faut donc porter le débat au niveau du parlement, car il y a là une crise de gouvernance très grave ! Et peut-être serait-il bon, avant de déterminer le nombre d'administrateurs que doit compter un conseil d'administration, de définir les responsabilités de chacun à tous les niveaux. Quand cela sera fait, nous aurons une bonne gouvernance ! Pour le moment, je crois que l'administrateur qui s'oppose à un budget fait son devoir de citoyen, de citoyen élu et de représentant de son parti ! (Applaudissements.)
La présidente. Merci, Monsieur le député ! Monsieur Pétroz, désirez-vous quand même prendre la parole ? (M. Pascal Pétroz acquiesce.)
M. Pascal Pétroz (PDC). Je voudrais juste signaler que je n'ai absolument rien compris à ce qui vient d'être dit par mon préopinant. (Commentaires.) En essayant de décoder son intervention, j'ai cru comprendre que, parce que l'on n'est pas bien informé en tant qu'administrateur, on doit être ou devenir député pour obtenir l'information que l'on n'arrive pas à obtenir lorsque l'on est administrateur...
Il faut rappeler un certain nombre de principes élémentaires. Tout d'abord, un administrateur a une fonction et une obligation de contrôle sur la société dont il est administrateur ! Cela fait partie de ses prérogatives. Et, s'il n'est pas capable de taper du poing sur la table pour obtenir les informations dont il doit pouvoir disposer en tant qu'administrateur, il faut qu'il démissionne, c'est aussi simple que cela !
Ensuite, ce à quoi nous assistons ce soir valide totalement le débat qui a eu lieu il y a quelque temps sur l'incompatibilité entre le mandat de député et le mandat d'administrateur ! (Commentaires.) En effet, Mesdames et Messieurs les députés, nous pouvons disserter pendant des heures sur la teneur de l'article 24 qui réprime les conflits d'intérêt, nous pouvons disserter à l'envi sur les conflits de loyauté, le résultat est là: l'article 24 du règlement sur les conflits d'intérêt est foulé au pied et bafoué à chaque session ! C'est cela, la réalité ! (Brouhaha.) C'est cela qui se passe ! Et pour que cela change, il faut que cesse le mélange des genres entre administrateurs d'une entité publique et députés ! C'est cela la réalité, Mesdames et Messieurs les députés ! (Applaudissements.)
Je voudrais vous dire une dernière chose: on bafoue la démocratie...
La présidente. Monsieur le député, je suis désolée, mais il faut conclure !
M. Pascal Pétroz. J'en ai pour dix secondes ! Madame la présidente, j'en ai pour dix secondes. (Brouhaha.) Je voulais simplement dire, si vous m'y autorisez, que présenter un amendement alors que l'on sait pertinemment qu'il est illégal, c'est, à nouveau, une illustration de la manière dont certains députés jouent avec notre règlement ! J'en ai terminé et je vous remercie ! (Applaudissements.)
M. Ivan Slatkine (L). Je serai très bref. Mais je ne peux m'empêcher de réagir aux propos de M. Bavarel et aux applaudissements fournis du groupe des Verts suite à son intervention... Vous venez de nous prouver que les projets sur la gouvernance que nous avons votés il y a deux semaines sont des bons projets, et vous annoncez aujourd'hui dans la presse que vous soutenez les socialistes et les syndicats pour combattre ces mêmes projets que nous avons votés pour empêcher ce que vous venez de dénoncer !
Par ailleurs, je rappelle que nous avons pu lire dans «Le Temps» d'aujourd'hui que M. Vanek trouvait que les établissements publics autonomes ne doivent surtout pas être dirigés par des managers... On peut alors se demander par qui ils doivent l'être ! (Applaudissements.)
La présidente. Merci, Monsieur le député. Je vous demanderai, Mesdames et Messieurs les députés, de bien rester dans le projet de loi, car il me semble que vous avez quelque peu débordé du sujet !
M. Eric Stauffer (MCG). Je serai très bref - j'allais justement souligner ce que mon collègue, M. Slatkine, a dit. Je vous répondrai, Monsieur Pétroz, parce que je ne peux pas m'en empêcher, je ne peux pas y résister. Vous prônez la bonne gouvernance et un autre intervenant a parlé du devoir de fidélité à l'égard d'une entreprise... Ce parlement est composé de députés élus par le peuple; nous sommes donc là pour représenter les intérêts du peuple quelle que soit notre fonction de député: commissaire dans les commissions ou administrateur des établissements publics autonomes. Et vous trouveriez normal que je ne dise rien, en tant qu'administrateur, lorsque je constate que le conseil d'administration de la société va accepter, par exemple, des mécanismes salariaux parfaitement illégaux, avec un conseiller d'Etat qui ne dit rien, qui n'autorise pas, mais qui laisse faire - ainsi, il aura une porte de sortie pour pouvoir dire qu'il n'était pas au courant. Du reste, il a déjà déclaré dans la presse qu'il n'était pas au courant, ni pour les TPG ni pour les SIG. Si c'est cela, la bonne gouvernance que vous prônez, Messieurs du PDC, eh bien laissez-moi vous dire que votre place n'est pas ici ! Pour nous, la gouvernance, c'est la transparence, c'est la qualité des personnes qui sont dans les conseils d'administration et, surtout, c'est d'avoir le courage - le courage, Monsieur Pétroz...
La présidente. Adressez-vous à la présidence, Monsieur le député ! Je vous remercie.
M. Eric Stauffer. ...le courage de combattre ! Pas en se protégeant derrière son groupe. Ce qui n'est pas légal, par exemple, c'est que des personnes qui travaillent à 40% puissent gagner 368 000 F par année ! (Brouhaha.) Si c'est cela, la bonne gouvernance que vous défendez, Monsieur Pétroz, ce n'est pas l'avis du Mouvement Citoyens Genevois, dont je suis fier, ce soir, d'être le représentant ! (Exclamations.)
La présidente. Pour conclure, je passe la parole à M. le rapporteur.
M. Jean-Claude Ducrot (PDC), rapporteur. Je ne vais pas alimenter davantage le débat, tout a été dit ! Je crois surtout que M. Stauffer fait du nombrilisme... Tout ce qui a été relevé dans le cadre de ce projet de loi l'a été en commission. Si M. Stauffer avait ouvert un tant soit peu ses oreilles, il aurait pu tout entendre. J'arrêterai ici la polémique, par rapport à ce budget.
Il faut rappeler que les Services industriels de Genève vont investir plus d'un milliard de francs ces prochaines années pour la pérennité de nos installations. C'est un élément extrêmement important. Et il convient de rendre hommage à un homme qui va quitter les SIG, je veux parler du directeur général, M. Battistella, qui a conduit cette entreprise avec une volonté déterminée, de manière à lui donner une vision d'avenir. Je tenais donc absolument à lui rendre hommage.
Je vous remercie de votre attention et je vous invite à voter ce projet de loi.
La présidente. Merci, Monsieur le rapporteur. Mesdames et Messieurs les députés, je rappelle que nous étions en deuxième débat.
Mis aux voix, l'article 1 est adopté, de même que les articles 2 et 3.
Troisième débat
La loi 10166 est adoptée article par article en troisième débat.
Mise aux voix, la loi 10166 est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 47 oui contre 39 non.
Premier débat
Mme Michèle Künzler (Ve), rapporteuse. Voilà un projet de loi qui a été voté à l'unanimité, mais, en fait, il ne s'agit pas d'un projet sans histoire... C'est trompeur. S'il a été voté à l'unanimité, c'est parce que nous y avons été contraints. Nous avons simplement voulu éviter le pire, c'est-à-dire ne pas gaspiller davantage ce terrain de 15 000 m2, sinon il n'y aurait eu là que six ou sept villas.
Ce projet n'est pas bon, mais nous vous invitons malgré tout à le voter. Je vous explique pourquoi il n'est pas bon. Il s'agit donc d'un terrain de 15 000 m2, magnifiquement situé le long de la route de Chêne, à côté du tram, et qui peut faire l'objet d'une vraie densification, d'autant plus qu'il est situé à proximité de la ville. Et que fait-on de ce terrain nu ? On limite la hauteur des gabarits à 13,5 mètres, comme dans les villages. Tout cela parce que la commune de Chêne-Bougeries a déjà refusé un projet limitant cette hauteur à 15 mètres, estimant que c'était une atteinte énorme à son paysage ! Le conseil municipal à l'unanimité a refusé le projet initial. C'est pourquoi le Conseil d'Etat a diminué la hauteur des gabarits, pour éviter de nouvelles oppositions. Résultat: huit personnes contre sept ont accepté ce projet. C'est un pur scandale !
Maintenant - et je crois que la commission de l'aménagement tout entière était d'accord sur ce point - cela suffit, les choses doivent changer ! Les communes qui n'ont pas de grands ensembles - et certaines d'entre elles sont plus particulièrement visées, car elles n'ont quasiment pas accepté de logement social sur leurs terrains - doivent maintenant aussi participer à l'effort commun pour le logement. Nous estimons qu'il est inadmissible que ce projet de loi fasse l'objet d'une telle limitation, d'autant plus que nous nous sommes trouvés contraints de le voter en commission, hier soir. J'ai dû rédiger le rapport cette nuit pour que nous puissions le voter aujourd'hui pour éviter le pire. Nous ne voulons plus nous trouver dans ce genre de situation.
En parallèle, nous avons déposé une motion qui, nous l'espérons, rencontrera un accueil favorable. Elle demande, même si la hauteur est limitée à 13,5 mètres, que l'on se fixe certains objectifs, à savoir de ne pas réaliser un village le long de la route de Chêne, à proximité du CEVA, à proximité de l'arrêt de tram. Il faut, au minimum, déterminer une densité et construire au moins 150 logements. Or, les plans qui ont circulé ne correspondent absolument pas au projet de loi qui proposait 150 logements. Ils en comptaient à peine 125, souvent très grands, qui ne répondent pas aux besoins essentiels de notre population.
Il faut voter ces deux objets, mais, je le répète, nous ne voulons plus que l'aménagement soit fait au rabais ! Nous voulons un aménagement de qualité, surtout dans des périmètres qui devraient être la ville de demain.
La présidente. Merci, Madame la députée. Sont inscrits: M. Walpen, Mme Mahrer, M. Guénat, M. Etienne, M. Aumeunier, M. Ducret et M. Cavaleri. M. Cramer s'exprimera ensuite. Le Bureau vous propose de clore la liste des orateurs. Je vous rappelle que nous arrêterons nos travaux à 23h et que nous avons encore une motion à traiter. Je voulais vous rendre attentifs à cela. Monsieur Walpen, vous avez la parole.
M. Francis Walpen (L). Auriez-vous l'obligeance de faire mentionner au Mémorial que, compte tenu du mandat politique que j'exerce au sein de la commune concernée, et par déontologie, je ne prendrai part ni au débat ni au vote ?
La présidente. Je vous remercie, Monsieur Walpen. Madame Anne Mahrer, vous avez la parole.
Mme Anne Mahrer (Ve). Merci, Madame la présidente. Mesdames et Messieurs les députés, les deux commissaires Vertes à la commission de l'aménagement sont de fort mauvaise humeur... Mais elles ont, malgré tout, voté ce projet de loi. Elles sont de très mauvaise humeur, parce qu'elles ont découvert, lors de la deuxième séance de commission traitant de cet objet, qu'il fallait le voter en urgence en raison de l'échéance du délai du refus conservatoire, sous peine que ce périmètre ne reste en zone villas. Et ce n'est pas la première fois que cela nous arrive ! Nous avons donc demandé qu'une liste de tous les projets soumis à ce délai conservatoire nous soit présentée, comme le prévoit d'ailleurs l'article 11A, alinéa 5, de la loi sur l'aménagement du territoire, qui, finalement, n'est pas appliqué.
De très mauvaise humeur, encore, de constater que ce projet de loi précise en son article 2 une hauteur de gabarit à 13,5 mètres, alors que nous déclassons en zone de développement 3 ce périmètre desservi par les trams 12, 16, et bientôt 17, périmètre qui est pratiquement en ville et qui permet la réalisation d'une urbanisation exemplaire répondant aux critères du développement durable.
Mesdames et Messieurs les députés, nous voterons ce projet de loi, mais nous souhaitons que ce soit la dernière fois que nous ayons à travailler dans de telles conditions.
Vous avez aussi trouvé la proposition de motion 1801, qui exprime très clairement ce que ce déclassement devrait permettre, et nous vous invitons à lui réserver un bon accueil.
M. Philippe Guénat (UDC). J'avais promis que j'essaierais de rester calme, mais, chers collègues, ce soir j'hallucine ! Nul besoin de parler de la dépénalisation de la consommation du chanvre, pour vous écouter, les Verts ! Il n'y a pas si longtemps, M. Zbinden prenait la parole pour s'opposer énergiquement à tout rehaussement des bâtiments à Genève... Et aujourd'hui, vous vous lamentez à la pensée que ces bâtiments ne pourront pas dépasser 13,5 mètres !
Je voulais simplement faire remarquer qu'un jour vous voulez lancer un référendum contre la surélévation des bâtiments à Genève et, le jour d'après, vous vous plaignez que les immeubles ne puissent pas atteindre une certaine hauteur... C'est tout ce que je voulais dire.
Mesdames et Messieurs les Verts - j'ai pourtant une admiration sans borne pour vous, Madame Künzler... (Exclamations.) - je vous prie d'avoir un peu de cohérence et de consistance dans vos dires !
M. Alain Etienne (S). Nous sommes arrivés à un point tel que nous pouvons effectivement nous poser des questions, car nous nous trouvons dans l'urgence pour un périmètre qui a été identifié et que l'on nous propose de déclasser.
Le parti socialiste a toujours préconisé de suivre le plan directeur cantonal. Et si, depuis que le plan directeur cantonal est adopté, chaque groupe avait pris la responsabilité de l'appliquer dans son ensemble, nous ne nous trouverions pas dans la situation que nous connaissons aujourd'hui.
Effectivement, il y a urgence, car - cela a été dit - il y a un délai conservatoire. Nous, les socialistes, nous ne voulons pas de villas sur ce périmètre, c'est pour cela que nous soutiendrons ce projet de loi, même si nous ne comprenons pas pourquoi le gabarit des bâtiments est limité à 13,5 mètres et qu'il est inscrit dans la loi.
Nous pensons qu'il faut suivre les procédures et les processus habituels. Le plan directeur cantonal existe. Un déclassement de zone nous est proposé. Alors, nous devons voter le déclassement, et, ensuite, l'administration prépare le plan localisé de quartier. Puis, le Conseil d'Etat, avec le conseiller d'Etat en charge de l'aménagement, dirige les négociations avec les voisins et avec les propriétaires pour arriver à obtenir un maximum de logements, en fonction de la politique qui est indiquée dans le plan directeur cantonal. A savoir que, pour une zone de développement, l'indice d'utilisation du sol doit approcher le taux de 1,2. C'est la marche à suivre logique, et nous aimerions bien que les choses se passent ainsi.
Je suis donc très étonné de la situation. Certes un accord sur le logement est intervenu depuis... Je suis toutefois heureux d'apprendre que le parti libéral souhaite densifier ces périmètres au maximum. D'autant plus qu'à l'époque, au moment du projet Frontenex-La Tulette, l'Entente avait sorti du périmètre en question un petit mouchoir de poche pour réaliser quelques appartements, appelés «townhouses». Je ne me rappelle plus la densité, je crois que c'était au moins 1,2. Alors je le répète, je suis heureux de constater aujourd'hui que l'ensemble de ce parlement veuille appliquer le plan directeur cantonal et densifier au maximum les périmètres identifiés par le plan directeur cantonal.
En résumé, le parti socialiste votera le projet de loi tel qu'il est issu de la commission, ainsi que la motion.
M. Christophe Aumeunier (L). C'est une vraie colère qu'exprime ici l'unanimité de la commission de l'aménagement, pour des questions de forme et de fond. S'agissant de la forme, si ce soir nous sommes obligés de traiter ce projet en urgence, c'est tout simplement que la commission de l'aménagement a appris hier soir seulement qu'il faisait l'objet d'un délai conservatoire. Cela prouve, en définitive, un grave dysfonctionnement du département du territoire. Nous demandons au Conseil d'Etat de remédier à ce dysfonctionnement et de présenter la liste mentionnée tout à l'heure par la députée Anne Mahrer.
S'agissant du fond, oui, nous les libéraux, nous sommes réticents au déclassement de zones villas, parce que nous prônons, en définitive, la logique des zones, la densification de la zone de développement, la densification des zones 1 à 3. Cependant, le plan directeur cantonal, à certaines conditions, permet le déclassement de zones villas. Et, au regard de la pénurie de logements persistante, au regard de l'intérêt supérieur de construire du logement, nous sommes favorables au déclassement de certains périmètres, lorsqu'ils sont situés dans des zones urbaines, proches de voies de communication, lorsqu'ils sont d'une certaine importance quant à leur taille, lorsqu'ils sont libres de constructions, lorsque le propriétaire est d'accord de densifier. Lorsque ces conditions sont remplies, nous sommes effectivement d'accord de déclasser un périmètre pour pouvoir construire du logement.
L'ensemble de ces conditions étant en l'espèce réunies, il convient dès lors de déclasser. Mais alors, il faut déclasser comme il faut ! Et c'est la raison de l'énervement de la commission. Les conditions pour procéder à ce déclassement étant réunies, il faut déclasser comme il faut, c'est-à-dire en densifiant suffisamment ce périmètre, parce que densifier est générateur d'économies d'énergies et générateur d'économies d'eau. De plus, cela limite les transports publics et concentre en un lieu les prestations de l'Etat et les rentrées fiscales. En définitive, densifier répond à la logique que nous recherchons.
Mais, surtout, il faut prendre en considération que le sol est un bien qui n'est que très partiellement renouvelable, ce qui fait qu'il est rare et qu'il faut l'utiliser avec discernement. Déclasser pour limiter les gabarits à 13,5 mètres et prévoir une densité d'à peine 1, c'est du gaspillage ! Le département du territoire nous «gave» avec les écoquartiers et il nous propose un déclassement avec une densité d'à peine 1 ! La première des choses à faire pour réaliser des quartiers durables, c'est de densifier ! J'aimerais donc bien que le Conseil d'Etat prenne cet élément en considération et qu'il nous présente des dossiers plus denses.
La création de logements est génératrice de bien-être et de développement. Elle est génératrice de prospérité et de rentrées fiscales. Le Conseil d'Etat est responsable des densités appliquées dans les périmètres. Il doit faire savoir que cette notion est distincte de la qualité des projets et qu'en définitive les projets denses sont aussi des projets très agréables à vivre.
La commission à l'unanimité a été heurtée que des gabarits soient fixés dans une loi de déclassement. En effet, si l'on commence à introduire tout et n'importe quoi dans une loi de déclassement, ce ne sera plus une loi de déclassement, mais un animal juridique distinct: une sorte de plan, dont on ne sait pas très bien ce qu'il représente. Les déclassements doivent rester des déclassements: il faut déclasser certaines zones, mais il ne faut rien ajouter, notamment des restrictions quant aux gabarits.
Nous demandons donc au Conseil d'Etat d'agir avec vigueur et persévérance dans ce type de dossiers. Ce dossier est d'autant plus symptomatique, je le disais tout à l'heure, qu'il révèle un dysfonctionnement du département du territoire.
En résumé, vous l'aurez compris, nous sommes contraints de voter ce déclassement ce soir, si nous voulons que soient réalisés 125 à 150 logements. C'est ce que nous vous recommandons de faire.
M. Michel Ducret (R). Dans notre canton et depuis des dizaines d'années - c'est vrai - l'urbanisation se définit au travers des zones et celles-ci sont précisément caractérisées par les possibilités en gabarits de réaliser des constructions dans une zone donnée.
Vous constaterez donc que le fait de déclasser un périmètre en zone 3 de développement - qui suppose un minimum de réalisations, à 21 mètres à corniche selon les gabarits de cette zone - et limiter la hauteur des gabarits à 13,5 mètres, c'est nier le contenu potentiel d'une zone de développement 3 telle que nous la connaissons. Pourtant, nous ne pouvons pas nous permettre le luxe de retarder encore les constructions qui sont prévues sur ce périmètre, et c'est d'ailleurs inique par rapport aux investisseurs qui attendent de pouvoir aller de l'avant.
En conséquence, le groupe radical votera, bien entendu, ce projet de loi, mais il est d'avis que nous ne pouvons plus, Mesdames et Messieurs les députés, nous permettre le luxe de persister à gaspiller notre territoire en sous-occupant des terrains si proches du centre urbain, situés sur un axe majeur des transports publics.
Aussi nous souhaitons marquer notre désapprobation d'un tel choix en soutenant la motion déposée par Mme Mahrer, Mme Künzler et M. Aumeunier, laquelle, si elle reste certainement sans effet sur ce projet-là, manifeste le désir très partagé - en commission, en tous les cas - d'un meilleur urbanisme, et cela dans l'intérêt public. Un urbanisme de transition, qui permette de passer de zones très urbanisées à des zones qui le sont un peu moins, vers un urbanisme peut-être plus détendu, plus vert, un peu moins dense, qui permette quand même des réalisations sociales et écologiques, mais aussi attractives pour des personnes qui ne souhaitent pas forcément s'établir dans des villas et qui restent des contribuables intéressants sur les territoires fortement urbanisés de notre canton.
Vous l'aurez compris, l'aménagement du territoire ne doit plus, à nos yeux, être une somme de ce que nous ne voulons pas; il ne doit plus être une somme des égoïsmes des uns et des autres. Tout cela ne produit rien de bon pour notre avenir. Nous voulons un aménagement plus cohérent et plus moderne pour l'avenir de Genève.
Une voix. Très bien ! C'était parfait !
M. Mario Cavaleri (PDC). Le groupe démocrate-chrétien souhaite d'abord remercier Mme Künzler pour la célérité avec laquelle elle a rendu son rapport. En effet, comme cela a déjà été expliqué, il fallait absolument que notre Grand Conseil puisse prendre une décision ce soir.
Le groupe démocrate-chrétien s'associe également aux nombreuses doléances exprimées quant à la nécessité de traiter ce point en urgence, en fonction du délai conservatoire, qui a été rappelé très précisément par Mme Mahrer. J'ai envie de dire, au nom de tous les commissaires de la commission de l'aménagement, à l'adresse du Conseil d'Etat: «Plus jamais ça !» Plus jamais ça ! Il n'est pas possible de travailler dans de telles conditions: Monsieur le conseiller d'Etat, vous l'avez compris, et je vous en remercie ! Je le répète, il est vraiment tout à fait inadmissible que les députés doivent travailler dans de telles conditions !
En ce qui concerne la motion - que nous traitons, par économie de temps, avec le projet de loi - le groupe démocrate-chrétien n'a pas pu la cosigner précisément en raison du manque de temps, compte tenu de la nécessité de déposer le texte rapidement. Mais nous nous y associons, bien sûr, étant entendu que nous tenons également à insister sur la question de la mixité entre activités et logements, telle qu'elle est prévue dans le projet qui nous a été présenté d'une manière que je qualifierais d'officieuse, plus qu'officielle. Sans vouloir parler davantage de la motion, je voudrais tout de même dire que, pour ma part, je fais confiance au Conseil d'Etat pour ce qui est de la qualité des logements qui seront réalisés à cet endroit. Dans le cadre de la zone de développement, la direction du logement a la responsabilité de vérifier et les plans financiers et les plans techniques. Par conséquent, dès lors qu'il s'agit d'une zone de développement, les logements doivent répondre à un besoin prépondérant d'intérêt général - il s'agit - sauf erreur - de l'article 5 de la LGZD. Nous devons donc faire confiance au Conseil d'Etat pour que les plans des logements qui seront construits correspondent en effet aux objectifs et aux attentes de la population. C'est ce qui est très important.
Enfin, s'agissant des gabarits, nous ne pouvons également que déplorer les fourches caudines de la commune sous lesquelles il a fallu passer. Je regrette, mon cher collègue, d'avoir à le dire de cette manière, mais il est vrai que - et je reprends les propos de M. Ducret, du groupe radical - nous ne pouvons pas accepter, dans un périmètre qui doit être considéré comme quasi urbain - pour ne pas dire urbain, tout court - de telles contraintes en termes d'aménagement du territoire.
Vous l'avez compris, nous sommes aussi favorables à une utilisation économe de notre territoire et nous espérons que le Conseil d'Etat pourra aménager ce périmètre au mieux, dans le cadre des contraintes qui ont été relevées lors des travaux de commission, pour arriver à un résultat qui soit, en définitive, le plus satisfaisant possible.
Mme Michèle Künzler (Ve), rapporteuse. Je voudrais juste revenir sur la question de la densité et de gabarit. Nous sommes-nous opposés à la loi sur les surélévations ? Non ! D'ailleurs, elle sera bientôt votée. Mais nous nous trouvons dans une situation fort différente: aux Pâquis, la densité est de 4; dans le dossier qui nous occupe, nous ne sommes même pas à 1, et cela dans un périmètre tout aussi urbain. En ce qui nous concerne, nous voulons maintenant la création d'écoquartiers, des quartiers de qualité. En effet, non seulement il faut construire le plus de mètres carrés possible, c'est ce que l'on a toujours fait, mais en tenant compte du critère de qualité, avec, surtout, un espace public de qualité ! Car le biotope de l'être humain est un lieu construit, un lieu où les êtres humains peuvent avoir un lien social. Il ne s'agit pas seulement de mètres cubes juxtaposés. Et il faut véritablement que nous changions notre optique à Genève en matière d'aménagement. C'est pour cela que nous ne n'avons plus envie de construire: il suffit de penser à la Tambourine, ou à d'autres très mauvais exemples, qui sont des endroits que les gens n'aiment pas.
Nous devons construire en densifiant suffisamment les périmètres concernés et en réalisant des bâtiments de qualité, à proximité des transports publics. Il faut réaliser davantage de logements, et malheureusement ce projet n'en prévoit pas suffisamment. D'ailleurs, le préavis de la direction du logement est défavorable, parce que le projet prévoit des appartements de six pièces, de 180 m2, dans de petits immeubles, ce qui ne correspond pas vraiment aux besoins prépondérants de la population.
J'invite par conséquent le Conseil d'Etat à se pencher sur ce périmètre et à faire mieux, là et ailleurs aussi.
M. Robert Cramer, conseiller d'Etat. Tout d'abord, à la suite de l'administration, je tiens à exprimer tous mes regrets à ce Grand Conseil en ce qui concerne le couac qui s'est produit par rapport aux délais extrêmement contraints dans lesquels vous avez dû travailler en raison du délai du refus conservatoire et, pire encore, parce que l'administration n'avait pas réalisé qu'elle était tenue à des délais très brefs. Je le regrette infiniment ! C'est à juste titre que vous demandez la liste des refus conservatoires qui sont actuellement à l'examen. Nous vous la remettrons, bien entendu. J'exprime aussi toute notre gratitude au rapporteur de la commission, qui a rendu un rapport extrêmement fourni, précis et riche, tout cela en une nuit. C'est un véritable tour de force, et je m'incline devant ce travail. Merci infiniment, Madame la rapporteure !
Au-delà de cela et quel que soit le ton critique avec lequel l'un ou l'autre d'entre vous a pu s'exprimer, je tiens à vous dire que je jubilais en vous écoutant. Je jubilais parce que, à travers vos différentes interventions, vous avez réellement indiqué les critères, les conditions, qui devront dorénavant présider aux déclassements, lorsqu'il s'agira de périmètres situés à proximité de la zone construite. Je demanderai donc aux services de l'administration de lire très attentivement ces pages du Mémorial, en particulier l'intervention de M. Aumeunier - extrêmement fournie - ainsi que celles de M. Cavaleri, de M. Etienne, et, bien sûr, le rapport qui a été rédigé suite aux travaux de la commission.
Vous avez fixé des critères: j'en ai retenu quelques-uns. Le premier consiste, en matière de places de parking, à ne pas surcharger les coûts de construction en prévoyant 1,4 ou 1,6 place par logement, lorsqu'il s'agit d'un emplacement bien desservi par les transports publics.
Ensuite - et c'est le plus important - en matière de densité, il n'est pas acceptable de descendre en dessous de l'indice de 1,2. Et puis, il faut aussi se méfier de construire des logements trop grands. C'est aussi une façon de répondre à la crise du logement.
Enfin, vous avez rappelé à juste titre que ces critères se retrouvaient dans le concept d'écoquartier. Un écoquartier n'est pas un quartier composé de trois maisons qui se perdent dans la forêt: c'est un quartier dense situé en milieu urbain. Ces critères nous seront extrêmement précieux dans les discussions que nous devons avoir au quotidien pour réaliser des plans localisés de quartier.
Vous avez bien compris ce qui s'est passé dans ce projet ! Le premier projet du département correspondait, dans une certaine mesure, aux critères dont nous venons de parler. Ce projet a été refusé à l'unanimité par la commune, et, pour éviter de passer outre à ce refus, nous avons présenté un deuxième projet que la commune a accepté «par les poils». Mais, comme vous le dites, ce projet est mauvais.
Alors, quelle sera la suite des événements ? Il me paraît important de vous l'annoncer loyalement. Tout d'abord - bien sûr, en partant de l'idée que vous accepterez cette motion - nous nous efforcerons de la mettre en oeuvre. Mais je vous dis tout de suite qu'avec une limitation des gabarits à 13,5 mètres un indice de 1,2 ne sera pas facile à mettre en oeuvre. Il faudra donc voir dans quelle mesure il sera possible de revenir sur ce projet de loi par des procédures simplifiées. Des pistes sont évoquées dans le cadre du rapport, nous les examinerons. En tout cas, vous aurez une réponse à cette motion.
Au-delà de cela, Mesdames et Messieurs les députés - particulièrement vous, qui siégez à la commission de l'aménagement - vous allez avoir une nouvelle responsabilité. En effet, dorénavant, en cas de blocage, j'arrêterai de discuter avec les communes. Je susciterai des préavis négatifs des communes, et, ensuite, nous suivrons la loi. C'est-à-dire que nous reviendrons devant le Grand Conseil pour lui exposer le problème et lui demander de trancher entre le projet proposé par l'autorité - je pense notamment aux plans localisés de quartier - et le refus de la commune. Le Grand Conseil jouera le rôle d'arbitre. C'est très volontiers que je partagerai votre décision. C'est très volontiers aussi que je m'inclinerai si, ici ou là, l'administration devait être désavouée par rapport aux communes, mais je crois véritablement que ce débat, par la clarté de vos propos, nous donne des indications nouvelles dans les rapports que nous devons avoir avec les communes du canton. En outre, vous nous donnez aussi des indications quant aux projets acceptables à vos yeux qui nous permettraient de passer outre un certain nombre de refus.
C'est donc ainsi que nous procéderons, et je vous signale d'ores et déjà que le premier dossier concerné par ce mode de faire - et ce n'est pas un dossier mineur - sera celui des Communaux d'Ambilly, dont vous aurez connaissance dès le mois de janvier.
La présidente. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, je vous soumets maintenant la prise en considération du projet de loi 10127.
Mis aux voix, le projet de loi 10127 est adopté en premier débat par 65 oui et 4 abstentions.
La loi 10127 est adoptée article par article en deuxième débat et en troisième débat.
Mise aux voix, la loi 10127 est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 67 oui et 4 abstentions.
La présidente. Je vous soumets maintenant la proposition de motion 1801.
Mise aux voix, la motion 1801 est adoptée et renvoyée au Conseil d'Etat par 65 oui et 4 abstentions.
La présidente. Mesdames et Messieurs les députés, nous interrompons nos travaux. Je vous donne rendez-vous demain à 8h précises. Bonne nuit !
La séance est levée à 22h50.