République et canton de Genève
Grand Conseil
Séance du vendredi 25 mai 2007 à 17h
56e législature - 2e année - 8e session - 39e séance -autres séances de la session
La séance est ouverte à 17h, sous la présidence de Mme Anne Mahrer, présidente.
Assistent à la séance: MM. Charles Beer, président du Conseil d'Etat, Laurent Moutinot, Pierre-François Unger et François Longchamp, conseillers d'Etat.
Exhortation
La présidente. Mesdames et Messieurs les députés, prenons la résolution de remplir consciencieusement notre mandat et de faire servir nos travaux au bien de la patrie qui nous a confié ses destinées.
Personnes excusées
La présidente. Ont fait excuser leur absence à cette séance: MM. Robert Cramer, David Hiler et Mark Muller, conseillers d'Etat, ainsi que Mme et MM. Guillaume Barazzone, Marcel Borloz, René Desbaillets, Pascal Pétroz, Véronique Schmied et René Stalder, députés.
Discussion et approbation de l'ordre du jour
La présidente. Mesdames et Messieurs les députés, je vous informe que le Bureau et les chefs de groupe ont décidé de traiter le point 29, pétition 1597-A, avec le point 45, proposition de motion 1759. Ces objets concernent le département des institutions.
Annonces et dépôts
Néant.
La présidente. Interpellations urgentes écrites
La présidente. Mesdames et Messieurs les députés, vous avez trouvé sur vos places les interpellations urgentes écrites suivantes:
Interpellation urgente écrite de M. Gilbert Catelain : Criminalité dans notre canton: quelle est l'analyse du Conseil d'Etat ? (IUE 420)
Interpellation urgente écrite de Mme Anne Emery-Torracinta : 5ème révision de la LAI, ou comment tenter de convaincre l'électeur de voter oui ? (IUE 421)
Interpellation urgente écrite de M. Eric Leyvraz : Traversée de la Rade (IUE 422)
Interpellation urgente écrite de M. Pascal Pétroz : Quel avenir pour la police de sécurité internationale ? (IUE 423)
Interpellation urgente écrite de M. Claude Marcet : Pour quand le vote sur l'interdiction de fumer dans les établissements publics ? (IUE 424)
Interpellation urgente écrite de M. Claude Marcet : L'anglais utilisé de manière inacceptable par l'Etat de Genève (la suite, encore loin de la fin) ou comment notre cité va être proposée en France pour la prochaine promotion de la Carpette anglaise, à titre étranger (IUE 425)
Interpellation urgente écrite de M. Luc Barthassat : relative à l'implantation du TCMC à Meyrin (IUE 426)
Interpellation urgente écrite de M. Guy Mettan : relative à l'aménagement de l'avenue de la Feuillasse et du giratoire Feuillasse/Lect/Mategnin à Meyrin (IUE 427)
Interpellation urgente écrite de M. Hugo Zbinden : Le climat idéal pour vivre, habiter et travailler ? (IUE 428)
IUE 420 IUE 421 IUE 422 IUE 423 IUE 424 IUE 425 IUE 426 IUE 427 IUE 428
La présidente. Conformément à l'article 162D de notre règlement, le Conseil d'Etat, respectivement le conseiller d'Etat interpellé, répondra par écrit lors de la session suivante, à savoir celle des 14 et 15 juin.
Mesdames et Messieurs les députés, nous reprenons le cours de notre ordre du jour.
Deuxième débat
La présidente. Mesdames et Messieurs les députés, je vous rappelle en préambule que ce projet de loi a été renvoyé en commission le 12 octobre 2006 suite au vote du premier débat. Comme convenu avec les chefs de groupe, chaque formation politique aura trois minutes pour s'exprimer avant que je procède à la lecture de la loi, article par article.
Mme Ariane Wisard-Blum (Ve), rapporteuse. Ce document fait suite au premier rapport très complet sur le projet de loi 9346, rédigé par M. Weiss, dans lequel il relatait l'aspect historique des cimetières à Genève, la genèse de ce projet et, bien sûr, le débat de fond qui occupa plusieurs mois la commission des affaires communales, régionales et internationales.
Je ne reviendrai que brièvement sur le passé pour vous rappeler que le projet de loi initial du Conseil d'Etat prévoyait la création de cimetières privés et que le texte sorti de commission y ajoutait la possibilité de créer des carrés confessionnels dans les cimetières publics. La commission était alors arrivée à une majorité que l'on peut désormais qualifier «de circonstance», puisqu'elle s'effrita lors de la séance plénière du Grand Conseil, le 12 octobre 2006.
En effet, la solution des cimetières privés suscita de fortes réactions et oppositions, et la majorité du Grand Conseil décida avec sagesse de renvoyer ce projet de loi en commission en relevant qu'une solution consensuelle devait être trouvée. Nous étions face à deux contraintes: respecter l'article 15 de la Constitution fédérale sur la liberté de conscience et de croyance, comme nous le suggérait un avis de droit des professeurs Rouiller et Auer, et éviter un référendum des partisans de la laïcité.
Dès la reprise des travaux de commission, une présentation par M. Tornare du projet de la Ville de Genève prévoyant des quartiers confessionnels au sein du cimetière de Saint-Georges intéressa hautement les commissaires qui prirent conscience qu'un projet déjà très avancé et négocié avec les communautés religieuses n'attendait plus que le vote d'une loi au Grand Conseil pour être concrétisée.
Malheureusement, les choses n'allaient pas être aussi simples. Tandis que le Conseil d'Etat avait préparé un amendement général basé sur des amendements émanant de députés de différents partis, les libéraux et le parti démocrate-chrétien avaient quant à eux déposé leur propre projet de loi. Face à ces trois textes, le travail de commission devenait impossible et il fallut une rencontre entre M. Moutinot et les chefs de groupe pour trouver un terrain d'entente et se remettre au travail sereinement.
Revenus à de meilleures dispositions, les commissaires trouvèrent très vite un accord autour de l'amendement du Conseil d'Etat, autorisant des quartiers sous le régime des concessions dans les cimetières publics pour les tombes nécessitant une orientation différente. Les députés privilégièrent également la variante qui permet au Conseil d'Etat d'autoriser ce type d'aménagement à toutes les communes qui le souhaitent plutôt qu'à la seule commune de Genève. En effet, pour la majorité, même si la commune de Genève est, pour le moment, la seule à avoir un projet presque abouti, il est préférable de laisser cette ouverture aux communes qui désireraient à l'avenir entrer dans cette démarche et respecter le principe d'équité entre les communes et leurs habitants.
Soucieux de trouver une solution pour le cimetière juif de Veyrier, les libéraux proposèrent un amendement pour autoriser l'implantation de tombes sur la parcelle genevoise du cimetière. Il faut rappeler qu'actuellement il est possible d'enterrer les défunts juifs uniquement sur la partie du cimetière située en France et qui représente les deux tiers du terrain. Sur le tiers genevois restant se trouve un oratoire, un parking et 1000 m2 de terres inoccupées.
Cette proposition libérale pouvait faire craindre une reprise des hostilités... Heureusement, l'état d'esprit de la commission avait profondément changé et un débat constructif aboutit à accepter cet amendement à une large majorité. L'exiguïté de la parcelle concernée a certainement été l'élément déterminant qui fit changer d'avis les farouches opposants à toute privatisation des cimetières. Mais le fait d'annexer le plan au rapport, dans le but de bien délimiter le périmètre concerné par l'extension, fut aussi un gage suffisant pour éviter toute interprétation erronée de la loi.
Après un vote final presque unanime, puisque persistaient encore une abstention et une opposition radicales, la commission accepta pourtant de rouvrir le débat suite à une demande du parti radical souhaitant revenir sur la rédaction de l'article concernant le cimetière juif de Veyrier. En effet, pour les radicaux, le texte voté n'était pas suffisamment précis et ils craignaient que sa rédaction n'ouvre la porte à la création d'un cimetière privé...
Sur ce point, je dois apporter un rectificatif à mon rapport. En effet, si c'est bien le parti radical qui souhaitait revenir sur la rédaction de l'article sur le cimetière juif de Veyrier, sans explicitement le reformuler, c'est un amendement proposé par le député Pierre Weiss qui permit aux radicaux de se rallier à la majorité et, ainsi, d'obtenir un vote unanime de la commission sur ce projet de loi.
Je tiens ici à relever l'attitude constructive des députés de la commission des affaires communales, régionales et internationales. Cet état d'esprit positif a prévalu tout au long de nos travaux, au-delà de tout clivage politique. Je crois que les députés qui ont oeuvré pour aboutir à ce projet de loi peuvent être fiers de leur travail: arriver à une unanimité relevait de l'utopie ! Et c'est bien la preuve que, même sur des sujets sensibles, qui nous divisent, les personnes qui s'ouvrent au dialogue, écoutent et comprennent les arguments des autres trouvent des accords et des solutions. Certes, chacun y a perdu un peu de son idéal, chacun a fait des concessions, mais cela a été effectué dans le souci de l'intérêt général.
Au nom de toute la commission, j'espère que, ce soir, nous allons pouvoir répéter cette unanimité autour de ce projet de loi qui permettra bientôt à bon nombre de concitoyennes et de concitoyens de vivre leur deuil dans le respect de leur croyance, et ainsi Genève respectera la liberté de conscience et de croyance exigée par la Constitution fédérale.
Dans cet esprit d'ouverture et de tolérance, je vous prie, Mesdames et Messieurs les députés, d'accepter ce soir ce projet de loi.
M. Eric Leyvraz (UDC). Le projet de loi 9346 a été déposé le 24 août 2004. Suite à un nombre impressionnant de séances de la commission des affaires communales, régionales et internationales, d'auditions, de discussions, nous arrivons au terme d'une véritable histoire sans fin...
Combien restent fortes les sensibilités face à la mort et ses rituels ! Difficile pour une commission de trouver le juste milieu, en faisant fi, parfois, de ses propres convictions.
On critique volontiers le parlement et ses lenteurs, mais il faut relever combien les débats de la commission, parfois vifs, ont su rester constructifs: dans l'écoute de l'autre et dans la certitude qu'il fallait trouver une solution pour adapter notre loi sur les cimetières aux exigences fédérales. La commission des affaires communales, régionales et internationales - et, à travers elle, notre parlement - a fait preuve de sa capacité de dialogue, quels que soient les opinions et les partis, pour construire dans l'intérêt de tous. Chacun y a mis du sien: ceux qui ne voulaient aucun changement ont accepté ce qui leur paraît le maximum tolérable et ceux qui étaient très ouverts se sont contentés du minimum acceptable, dans un but commun de réussir et avec un esprit de tolérance qu'il faut également relever.
Le résultat d'aujourd'hui donne satisfaction aux communautés religieuses qui n'avaient plus de possibilité de procéder aux enterrements selon leurs rites. Les musulmans auront leur quartier avec la juste orientation des tombes et l'on va mettre fin à l'hypocrisie de la situation du cimetière juif de Veyrier, qui a son entrée en Suisse et ses tombes sur France, en rendant possible, dans le strict périmètre existant, l'utilisation de la partie herbeuse sur Suisse pour recevoir des corps.
Après le succès historique d'hier sur le logement, je ne doute pas que ce parlement va montrer une fois de plus qu'il peut, dans un débat démocratique clair, accepter un compromis qui donne satisfaction à tous les citoyens de ce canton. Le groupe UDC votera donc avec satisfaction ce projet de loi qui fait honneur au sens d'ouverture de notre République.
M. Guy Mettan (PDC). Le parti démocrate-chrétien est très satisfait du projet qui nous est soumis ce soir, pour quatre raisons.
La première est que le principe des carrés confessionnels, même s'il ne figure pas tel quel et sous ce nom-là dans la loi, est respecté. C'était l'un de nos souhaits, et nous tenions à le voir inscrit dans la loi. La deuxième est que nous avons échappé au principe de la privatisation des cimetières. La troisième est que l'accord des communes est sollicité, puisque c'est à l'initiative des communes que l'on pourra, le cas échéant, octroyer des concessions. Et puis, évidemment, la quatrième raison est qu'une solution a été trouvée pour le cimetière de Veyrier: une solution élégante et, en même temps, comme la rapporteure l'a souligné, une solution qui précise très bien les limites d'octroi de l'agrandissement possible du cimetière de Veyrier.
Je remercie également la rapporteure d'avoir souligné la sagesse qui a présidé au renvoi de cet objet en commission... En effet, c'est notre parti qui, constatant qu'aucun accord n'était possible au moment du débat, avait suggéré, en octobre dernier, son renvoi en commission. Et dans la foulée, nous avons déposé nous-mêmes un amendement au projet de loi, dont l'essentiel a été repris dans la mouture du Conseil d'Etat.
Par conséquent, je crois effectivement que la solution - juste pour terminer sur une note un peu humoristique - de consensus et de concordance qui a été trouvée est une solution très démocrate-chrétienne et conforme à l'esprit de notre parti. Je tiens à vous en remercier ! (Remarques.)
M. Antonio Hodgers (Ve). Dans ce débat, les principes fondamentaux ont été posés. Il s'agit pour nous de garantir la liberté religieuse, dont les rites funéraires sont une des expressions, cela dans un cadre public et, par conséquent, laïc. Mais, comme toujours avec les grands principes, c'est la mise en musique qui pose problème. Et, il faut l'avouer, elle a donné beaucoup de travail à la commission et, également, à ce parlement.
Les Verts sont aujourd'hui satisfaits du résultat qui a été trouvé. Il répond à divers enjeux qui, pour nous, étaient fondamentaux. Tout d'abord, d'un point de vue philosophique, le principe que les religions minoritaires font partie intégrante de notre cité est respecté. Nous ne sommes pas dans une approche où un groupe identitaire local s'ouvre à des groupes extérieurs. Nous reconnaissons ici que notre société est composée de différentes religions et que celles-ci participent toutes à l'identité qui est la nôtre.
Cela implique que la laïcité ne peut pas se résumer à l'expression des modalités de la religion majoritaire. Et c'est la critique que nous faisons à la situation actuelle. Donc, la laïcité est aujourd'hui adaptée pour qu'elle puisse intégrer les modalités différentes qui font la richesse des différentes religions.
Par ailleurs, Il nous paraît important de ne pas résumer les citoyens d'une confession à leur communauté organisée. Les chrétiens catholiques sont liés au pape: pourtant beaucoup de catholiques se permettent d'avoir des opinions différentes sur le divorce, l'avortement ou la contraception. De même, concernant les juifs et les musulmans: ils sont, bien sûr, liés à leur corps religieux, mais ils se permettent d'avoir des avis différents. Et il est important qu'il y ait une distance entre la communauté organisée et l'ensemble de ses membres. Cela n'implique pas de réduire le rôle social important de cette communauté - ce rôle qui a été pris en compte par l'Etat - mais on ne peut pas demander à des citoyens de passer exclusivement par leur communauté pour bénéficier d'une prestation qui serait celle d'un cimetière public. En ce sens, le nouveau projet de loi répond tout à fait à cette attente.
Enfin, et c'était aussi très important pour nous - et c'est aussi pour cela que les Verts ont adapté leur position - un consensus sur ce genre de question est indispensable. Il s'agit vraiment d'une responsabilité politique pour éviter qu'un débat de ce type ne dérape sur la place publique. Et donc, à cet égard, je me réjouis vraiment qu'un accord ait pu être trouvé autour de la proposition de M. Moutinot, que je remercie de son action.
M. Gabriel Barrillier (R). L'exercice politique auquel se sont livrés le Conseil d'Etat et notre Conseil pour réviser cette loi sur les cimetières était délicat, voire périlleux.
Le projet initial du gouvernement - cela a été rappelé par Mme le rapporteur - avait imprudemment ouvert la porte aux cimetières privés et à des pratiques communautaires trop strictes. Ce faisant, il s'est d'emblée heurté à une large opposition d'une majorité du Grand Conseil attachée aux principes et pratiques qui datent de 1876. Quels sont ces principes ? L'égalité face à la mort; une sépulture digne, tenant compte des convictions des défunts et de leur famille; l'interdiction de tout communautarisme excessif, tout en respectant les coutumes funéraires des différentes confessions. Le tout, je vous le rappelle, sous la ferme mais bienveillante surveillance de l'Etat laïc et républicain, garant de l'ordre et de la paix entre les différentes confessions.
Dans leur recherche d'une solution acceptable, les commissaires ont fait preuve de dignité, de responsabilité et de respect vis-à-vis des pratiques et rituels qui accompagnent les défunts des différentes confessions.
Les radicaux se sont ralliés aux solutions proposées, dans la mesure où les principes que je viens de rappeler n'ont pas été remis en cause mais seulement adaptés pour répondre à l'évolution du paysage confessionnel du canton, tout en mettant la loi genevoise en conformité avec la Constitution fédérale.
La loi précise mieux les pouvoirs respectifs du Conseil d'Etat et des communes, en particulier en ce qui concerne l'extension de cimetières sur le territoire genevois et la possibilité d'utiliser des systèmes de sépulture nécessitant une orientation ou un aménagement des fosses différent, y compris dans les quartiers réservés aux concessions. Ces mesures ont reçu un accueil favorable - cela a été dit - des différentes communautés religieuses, en particulier - j'aimerais le souligner ici - de la communauté juive.
Tout en restant une norme générale, cette révision permettra - nous l'espérons vivement - de répondre de façon satisfaisante et durable aux souhaits manifestés par plusieurs communautés religieuses. Puisse-t-elle constituer pour longtemps le fondement de la paix entre les diverses communautés religieuses qui se côtoient à Genève !
Aussi, au nom du groupe radical, j'ai le plaisir de remercier et de féliciter chacune et chacun des commissaires qui ont mis un peu d'eau dans leur vin...
M. Jean-Michel Gros. Quelle horreur ! (Rires.)
M. Gabriel Barrillier. ...en soulignant en particulier l'apport constructif et conciliant de M. Laurent Moutinot - et j'insiste sur ce point - qui a joué les Nicolas de Flue, sans omettre la présidence de la commission, assurée par Mme de Tassigny, et le travail de rapporteur de Mme Wisard-Blum, sanctionnant la seconde phase des travaux de cette commission.
Nous voterons ce projet de loi.
M. Pierre Weiss (L). Il aura fallu trois ans de débats à ce Grand Conseil pour arriver à affirmer la prééminence du droit en faveur de la dignité humaine. Et ne serait-ce que pour cette raison, il convient aujourd'hui de saluer tous ceux qui y ont concouru - le rôle de M. Moutinot vient d'être rappelé, mais j'aimerais aussi évoquer celui des Verts et, en particulier, celui de Mme Ariane Wisard dont nous voyons aujourd'hui l'excellence du rapport.
Il convient d'aborder ce sujet sous trois angles. D'abord, les résultats juridico-factuels... Nous avons réussi en quelque sorte, même si c'est de façon modeste, une quadrature du cercle. En effet, nous avons affirmé le maintien de la laïcité cantonale et, en particulier, de la neutralité confessionnelle; nous avons aussi respecté la nouvelle Constitution fédérale en ses articles concernant la liberté religieuse dans ses effets indirects et, enfin, nous avons également respecté la dignité humaine à laquelle je me référais. Et puis, nous avons renforcé l'autonomie communale, puisque - d'ailleurs, à la suite d'un amendement déposé par nous-mêmes - nous avons fait en sorte que les communes aient la possibilité de demander que des espaces, conformément à ce qui a été défini dans la loi, puissent être affectés aux fidèles de certaines confessions souhaitant que leurs rites particuliers soient respectés.
Grâce à cela, d'un point de vue factuel, nous sortons à la fois d'une situation alégale et d'une situation illégale: elle était alégale en Ville de Genève, où des enterrements avaient lieu sans qu'une base légale n'existe; elle était aussi illégale, puisque des enterrements ne pouvaient avoir lieu pour, par exemple, des fidèles de la religion juive.
Mais il y a aussi des résultats politiques que je voudrais souligner. D'abord, une démonstration de l'intégration des diverses composantes de notre société dans leur diversité. Et la recherche réussie - comme cela doit se faire dans un parlement, et le débat que nous avons ce soir le démontre à l'envi - d'un plus petit dénominateur commun où chacun perd un peu non pas de ses idéaux, mais de ses exigences au profit du réalisme. Et puis, enfin, la promotion des droits de l'homme, ce n'est pas une mince victoire, en particulier pour les libéraux qui, depuis deux siècles, combattent en leur faveur.
Mais il y a aussi des résultats éthiques, et, dans un domaine tel que celui-ci, ces derniers comptent probablement plus que tous les autres. D'abord, c'est la fin de l'intolérance qui se manifestait par ce refus de la réalité et des besoins de deux religions. Ensuite, c'est également la fin de l'hypocrisie qui consistait à expulser de Genève des concitoyens de l'autre côté de la frontière le jour où ils venaient à décéder. Mais derrière cela, il y a le respect de la mort, et il est bon que notre parlement, qui se préoccupe souvent des vivants, sache aussi montrer à l'égard des morts - c'est-à-dire ceux qui représentent la perpétuation de notre société - le respect qui leur est dû.
Voilà les raisons qui nous poussent, nous libéraux, à adhérer pleinement - même si le résultat est modeste - à ce projet de loi. Il va de soi que, lorsqu'il sera entré en vigueur, nous retirerons le projet de loi 9957 que nous avions déposé, qui était certes plus ambitieux, mais qui, au fond, n'aurait pas pu être adopté aujourd'hui avec le consensus qui nous réunit et dont je vous remercie tous.
Madame la présidente, Mesdames et Messieurs les députés, je tiens, encore une fois, à me féliciter de ce résultat, qui montre combien notre parlement, sur des questions importantes, est capable d'arriver au but de sa détermination. (Applaudissements.)
M. Christian Brunier (S). Le parti socialiste est très content de la solution trouvée. Depuis le début, une grande majorité du parti socialiste cherchait l'équilibre entre une laïcité moderne et la liberté de conscience. Et, depuis le début, le parti socialiste affirme que cet équilibre passait par les quartiers confessionnels: il n'y avait pas d'autre solution possible !
Je vous le rappelle, le statu quo était impossible. Déjà, d'un point de vue légal, il était contraire à la Constitution fédérale, contraire à la liberté confessionnelle garantie par cette constitution. Mais qui pouvait imaginer qu'une loi de 1876 pouvait encore être d'actualité ?! Cette solution n'était donc pas imaginable, et nous l'avons combattue dès le départ.
La solution des cimetières privés ne nous convenait pas, car nous avions peur d'une privatisation des cimetières et, surtout, d'un cloisonnement des différentes confessions et nous pensions que ce n'était pas la bonne solution.
Très vite, et déjà lors du premier débat, nous avons recommandé l'élaboration et la mise en place de quartiers confessionnels, de quartiers confessionnels ouverts - le débat a aussi porté sur ce point précis en commission, certains suggérant de prévoir des entrées séparées, d'ériger des murs ou de planter des haies... Non ! Nous voulons que les gens qui vivent dans la même collectivité, celle de Genève, puissent être enterrés dans un lieu commun, mais selon leurs propres rites, leurs propres croyances, leurs propres valeurs.
Nous avons trouvé un compromis - j'appellerai cela une bonne solution - dans un esprit constructif. Tous les groupes qui se sont exprimés ont salué cet état d'esprit, qui émane, je pense, de l'ambiance qui règne dans cette commission. En effet, la commission des affaires communales, régionales et internationales travaille depuis des années dans une ambiance conviviale, et j'imagine que cela a joué un rôle déterminant sur un sujet qui pouvait s'avérer délicat.
Certains ont félicité le Conseil d'Etat. Il a joué son rôle, et il s'est adapté puisque le texte final est assez loin de la première version du projet de loi du Conseil d'Etat. Néanmoins, il a accompagné les travaux et repris le leadership quand il le fallait. Chaque groupe politique a également joué son rôle. Quelques-uns ont abandonné un certain nombre de leurs idées de départ pour essayer de trouver un compromis. Et je féliciterai bien entendu la «rapporteure d'unanimité» qui a fait un excellent travail.
Enfin, je remercierai aussi les communautés religieuses. A l'heure où les médias n'arrêtent pas d'évoquer les conflits entre les religions, les communautés religieuses à Genève ont également fait des compromis, et cela depuis le départ. Elles se sont assises ensemble autour d'une table; elles sont parfois venues ensemble réclamer leur liberté de conscience. Il me semble que nous pouvons leur dire bravo, car elles ont fait un travail d'ouverture que peu de communautés font à travers le monde.
Et puis, le travail de terrain a été important. En ce qui me concerne, j'aime le travail de terrain, et je pense que les politiques devraient aller plus souvent sur le terrain. Cela a certainement contribué à sauver ce projet de loi. Par exemple, lorsque la Ville de Genève, par l'intermédiaire de Manuel Tornare, nous a invités à visiter Saint-Georges, certains députés avaient des positions encore assez divergentes. Et, sur le terrain - finalement, nous sommes en train de mettre dans la loi la pratique de la Ville de Genève - on a constaté que l'on pouvait trouver très facilement des compromis, des solutions adaptables et satisfaisantes pour tout le monde. Cette visite à Saint-Georges a donc été importante dans l'élaboration de nos travaux: nous pouvons remercier la Ville de Genève à cet égard.
Une autre visite a été importante: celle du cimetière juif de Veyrier. J'étais de ceux qui ne voulaient pas rouvrir la porte à d'éventuels cimetières privés, et certains ont eu peur lorsque le parti libéral a présenté son amendement... En se rendant sur place, nous avons constaté que c'était tout simplement une question de bon sens ! Il y a un cimetière juif à Veyrier, qui est historique, et, en fait, nous donnons à la communauté juive la possibilité d'installer quelques tombes sur une bande d'herbe. S'opposer à cela aurait été une bêtise ! Dans ce cas aussi, la visite sur le terrain a été très importante et elle a permis de montrer que nous voulions traiter les communautés de la même façon, ce qui était l'un de mes soucis. En effet, en donnant la possibilité à la communauté juive d'installer des tombes dans ce cimetière, nous courions le risque que les autres communautés réagissent. Mais les communautés religieuses ont manifesté une grande sagesse sur ce point aussi.
Donc, nous arrivons à une bonne solution, à un bon projet de loi, dans une ambiance, que l'on peut qualifier d'«assez exceptionnelle». Bien sûr, je recommande le vote de ce projet de loi. Je conclurai ainsi: nous avons été très constructifs par rapport à ce projet de loi qui porte sur la mort; j'espère que nous le serons encore plus pour des projets de lois concernant les vivants !
M. Eric Stauffer (MCG). En tant que catholique, et fier de l'être, même si je ne suis pas un fanatique absolu de notre sainte mère l'Eglise, je me dois d'intervenir dans ce débat pour remettre les choses à leur juste place. Que nous acceptions différentes cultures en Suisse, c'est à mon avis très bien. La tolérance est un principe inaliénable du peuple suisse !
Une voix. Mais...
M. Eric Stauffer. J'ai beaucoup réfléchi à la question des cimetières... En Suisse, nous devons réaliser que toute personne qui pratique une religion différente - cela doit faire partie de notre contrat moral - a droit à une sépulture selon les rites inhérents à sa religion. Pour quelle raison ? Parce que le passage dans l'au-delà est très important chez nous. Il ne s'agit pas d'autoriser l'incinération du style Bénarès au bord du Gange, mais de permettre aux proches du ou de la défunte de l'enterrer avec l'orientation convenable et avec leurs pairs de même religion, et de respecter les rites et croyances de chaque religion.
Ces personnes qui sont nées en Suisse ou sont venues de l'étranger et qui sont de confessions différentes ont droit au respect. C'est déjà très dur de perdre un proche, que ce soit en Suisse ou à l'étranger, en dehors du cadre traditionnel et confessionnel. Alors, soyons généreux et donnons le droit à nos amis de confession différente, qui sont résidents genevois, de procéder à leur manière, avec un minimum de tracasseries religieuses, financières et administratives ! Notre contrat avec eux doit aussi intégrer un libre-passage dans l'au-delà selon leurs convictions. Que Dieu vous bénisse ! Amen !
M. Laurent Moutinot, conseiller d'Etat. Il aura fallu à peu près deux ans de travaux préparatoires au Conseil d'Etat et trois ans à votre parlement pour trouver un accord sur la question des cimetières confessionnels. Si quelquefois la lenteur politique est exaspérante, contreproductive et ne permet pas de réagir comme il conviendrait à l'urgence, dans le cas précis, le temps a été un bon conseiller.
Il fallait très certainement que toutes les positions possibles sur cette question s'expriment. Il fallait que chacun aille au bout de son raisonnement, au bout de ses idées, et les confronte avec celles des autres. Avec la volonté - et c'est cela qui a sauvé le projet - de trouver une solution, bien sûr ! Car s'il est des conflits négatifs, il en est aussi qui sont positifs.
Il s'est produit une chose tout à fait remarquable: au fur et à mesure que les commissaires de la commission respectaient et comprenaient la position des autres députés, ils comprenaient davantage la nécessité de respecter les croyances religieuses des autres confessions. Il y a eu, en quelque sorte, un mouvement interne à la commission: le respect des députés les uns envers les autres; et externe: de respect à l'égard des communautés qui souhaitent pratiquer des rites différents de ceux que nous connaissons usuellement.
Finalement, il n'y a eu ni gagnants ni perdants. Personne n'a dû renier ses valeurs. En revanche, un équilibre a été trouvé entre ces deux principes fondamentaux de notre Etat que sont sa laïcité, d'une part, et le respect des croyances et liberté religieuse, d'autre part.
Il n'y a pas eu - et j'insiste sur ce point - de plus petit dénominateur commun ! Cela aurait été une solution de facilité. Ce projet de loi a intégré fondamentalement la laïcité, qui est elle-même garante de la liberté religieuse, puisque dès lors que l'Etat est laïc, qu'il se situe hors du champ religieux, il permet, par là-même, à chacun, à titre individuel, de pratiquer sa religion en toute liberté.
Un équilibre a été trouvé sur les grands principes, mais aussi sur les petits détails, puisque, au mètre carré près, nous avons déterminé l'agrandissement du cimetière de Veyrier. Et puis, ce cimetière représente à mon avis un très beau symbole. Nous savons tous que la mort est une frontière définitive pour nous. Ce cimetière transfrontalier - probablement le seul au monde - où la mort transcende, en l'occurrence, les frontières étatiques et les difficultés que nous avons eues à nous mettre d'accord sur cette question, restera le symbole de l'accord que vous avez trouvé et dont je vous remercie ! (Applaudissements.)
La présidente. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Je vous rappelle, Mesdames et Messieurs les députés, que nous sommes en deuxième débat.
Mis aux voix, le titre et le préambule sont adoptés.
Mis aux voix, l'article 1, alinéa 3 (nouvelle teneur) est adopté.
La présidente. Monsieur le député Jean-Claude Ducrot, vous voulez intervenir sur l'article 7: je vous donne la parole.
M. Jean-Claude Ducrot (PDC). Merci, Madame la présidente. Je veux exprimer ma satisfaction quant au maintien, dans cet article 7, de la présence des ministres des cultes, quand bien même il y a eu quelques velléités qui auraient pu rallumer des flammes dans le cadre des travaux de la commission. Il est extrêmement important que, notamment, les ministres des cultes puissent figurer dans la loi.
Qui plus est - puisque j'ai la parole, je vais l'annoncer: le parti démocrate-chrétien retirera le projet de loi qu'il avait également déposé antérieurement.
Mis aux voix, l'article 7 (nouveau) est adopté, de même que les articles 8, alinéa 2, lettre c) (nouvelle) et 8, alinéa 3 (nouveau).
Mis aux voix, l'article unique (souligné) est adopté.
Troisième débat
La loi 9346 est adoptée article par article en troisième débat.
Mise aux voix, la loi 9346 est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 76 oui et 2 abstentions. (Applaudissements à l'annonce du résultat.)
Projet de loi de Mmes et MM. Olivier Jornot, Pierre Weiss, Christiane Favre, Beatriz de Candolle, Fabienne Gautier, Francis Walpen, Jean-Michel Gros modifiant la loi sur les cimetières (K 1 65) (PL-9957)
Le Grand Conseil prend acte du retrait, par ses auteurs, du projet de loi 9957.
Projet de loi de Mmes et MM. Guy Mettan, Anne-Marie von Arx-Vernon, Guillaume Barazzone, Jacques Baudit, Michel Forni, François Gillet, Béatrice Hirsch-Aellen modifiant la loi sur les cimetières (K 1 65) (PL-9958)
Le Grand Conseil prend acte du retrait, par ses auteurs, du projet de loi 9958.
Débat
M. Guy Mettan (PDC). Vous vous en souviendrez peut-être, il y a quelques mois notre parti avait déposé une motion qui allait un peu dans le même sens et qui demandait que l'Etat de Genève accorde des rabais d'impôt aux parents qui plaçaient leurs enfants dans les écoles privées... Vous l'aviez refusée, parce que vous ne l'aviez pas trouvée vraiment juste, vous disiez que les écoles privées - je me souviens de quelques objections qui avaient été formulées dans notre enceinte - étaient des écoles pour les riches...
Or il se trouve que, sur la centaine d'école privées qui existent à Genève, des milliers de parents, ou en tout cas des centaines, mettent leurs enfants dans les écoles privées, et il s'agit de familles qui ne sont pas riches du tout. A titre d'exemple, je peux citer l'Ecole Steiner, à Confignon, où se trouve ma fille. Cette école est essentiellement fréquentée par des enfants dont les parents font partie des milieux populaires; du moins, ils ne font pas du tout partie des classes favorisées. Ces parents se trouvent contraints de placer leurs enfants dans une école privée essentiellement pour des raisons pédagogiques difficiles à trouver ailleurs.
Le but de cette motion n'est donc pas du tout - comme certains voudraient le faire croire - de s'attaquer à l'école publique: au contraire ! M. Beer a eu l'occasion de se rendre à l'Ecole Steiner - l'année dernière, je crois - et il a pu constater de visu le type de pédagogie intéressant que l'on y pratique. L'école publique ne peut pas offrir un tel type de pédagogie, parce qu'elle doit s'adapter au plus grand nombre: elle a des contraintes que n'a pas une petite école.
Nous avons donc reformulé notre motion pour demander que l'aide que nous préconisons ne soit accordée qu'aux familles les plus défavorisées, ce qui, je crois, peut être accepté par tout le monde.
Je vous demanderai simplement de renvoyer cette motion à la commission de l'enseignement pour que nous puissions l'étudier dans le détail. Cela nous donnera l'occasion de voir ce qu'apportent les écoles privées et d'examiner combien de familles seraient concernées par cette aide.
Il me semble que la problématique soulevée par cette motion mérite réflexion, d'autant que...
La présidente. Il vous faut conclure, Monsieur le député !
M. Guy Mettan. Oui, j'ai terminé, Madame la présidente ! ...les écoles privées sont également sous la responsabilité du département de l'instruction publique. Il est donc logique qu'une fois de temps en temps la commission de l'enseignement puisse également évaluer ce qui se fait dans les écoles privées genevoises.
Mme Janine Hagmann (L). En fait, cette motion traite d'un sujet récurrent, dont nous avons déjà parlé à plusieurs reprises dans cette enceinte... Et si nous en avons déjà parlé à plusieurs reprises, c'est parce que ce sujet n'est pas anodin. D'une certaine manière, il met en exergue la notion de libre choix, alors que ce libre choix n'existe pas réellement. En effet, si votre enfant a des besoins particuliers - soit qu'il rencontre des difficultés importantes, soit qu'il a beaucoup de facilités, et que l'école ne peut pas répondre à ses besoins - vous n'avez pas réellement la liberté de choisir, pour la bonne raison que, si vous n'en avez pas les moyens, vous ne pourrez pas envoyer votre enfant dans une école privée.
Il s'agit presque d'un monopole... L'Etat, ayant le monopole de l'instruction, devrait pouvoir offrir une solution à tout, que les enfants rencontrent de grosses difficultés ou qu'ils aient beaucoup de facilités. Et, à mon avis, si l'Etat ne remplit pas totalement sa mission, il a le devoir d'aider autrement - par exemple, comme le demande la motion, financièrement - les parents pour qu'ils puissent envoyer leurs enfants dans une école plus adaptée. Tout le monde paye des impôts - enfin, presque, puisque à peu près le quart de la population n'en paye pas - et ces impôts doivent permettre à chacun de bénéficier de la possibilité générale d'accéder à l'excellence. Or, malgré le fait que le département a des écoles qui sont «au top», il n'offre peut-être pas l'école adéquate pour tout le monde. Certains dans cette enceinte vont probablement chipoter - ou «pignocherait», comme dit Gide - et diront que le privé et le public n'ont pas à être complémentaires...
Il me semble que la commission de l'enseignement peut tout à fait étudier ce sujet. Le groupe libéral vous recommande donc de renvoyer cette motion à la commission de l'enseignement.
Mme Sylvia Leuenberger (Ve). Il est évident que cette motion ne peut pas être rejetée d'emblée, mais nous voyons les choses sous un angle plus restreint que Mme Hagmann et M. Mettan. En effet, nous ne voudrions pas forcément parler de complémentarité entre le privé et le public, même si - il faut le reconnaître - l'accès à quelques structures privées serait une bonne chose pour certains enfants. De par ma profession de logopédiste, je côtoie des enfants qui sont en très grandes difficultés d'apprentissage de la lecture et qui ont une intelligence normale. Et j'ai effectivement constaté que les structures scolaires publiques adaptées à ces enfants manquent parfois et qu'ils peuvent bénéficier d'un enseignement plus favorable dans le privé. D'ailleurs, l'AI participe aux frais d'écolage de certains de ces enfants. Mais, attention, ces cas sont très rares: il s'agit peut-être d'une dizaine ou d'une vingtaine d'enfants par an !
Quoi qu'il en soit, il n'est pas question pour nous d'entrer en matière pour aider tous les parents qui voudraient que leurs enfants bénéficient d'une autre forme de pédagogie que celle offerte par le public. Par contre, pour cette dizaine d'enfants qui ne peuvent pas s'épanouir à l'école publique, nous pensons qu'il vaut la peine de renvoyer cette motion en commission pour y être étudiée. Nous pourrons demander l'inventaire des enfants concernés par cette situation et voir ce qu'il est possible de faire.
Je le répète, il n'est pas question pour nous de trouver de nouveaux financements pour aider les parents qui mettent leurs enfants à l'école privée. Par contre, cette aide peut concerner un nombre limité de cas, et ces quelques cas valent que nous discutions tout de même de cette motion en commission.
Mme Véronique Pürro (S). Le parti socialiste est clairement - très clairement - opposé à cette motion ! Tout d'abord, nous ne partageons pas le constat que vous venez de faire, Madame Hagmann, selon lequel l'excellence n'existe que dans l'école privée et que l'Etat doit donner la possibilité à chacun de pouvoir y accéder... C'est un constat d'échec de l'école public auquel nous ne pouvons souscrire !
Pour nous, il est important de réaffirmer trois choses dans le cadre de ce débat. Tout d'abord: nous sommes en faveur d'une école républicaine, laïque, obligatoire, ouverte à tous les enfants. Et, dans ce sens, l'Etat doit garantir que tous les enfants, y compris ceux qui ont des difficultés, puissent trouver une réponse à leurs besoins et s'intégrer dans l'école publique.
Enfin, si des ressources supplémentaires sont nécessaires, c'est pour adapter cette école aux nouveaux besoins, pour permettre à ces enfants qui ont des difficultés d'y être accueillis en prenant en compte leurs difficultés. Ce n'est en aucun cas pour permettre aux parents qui le souhaitent de payer des écoles privées à leurs enfants ! (Applaudissements.)
M. Gilbert Catelain (UDC). Dans le cadre du débat en commission sur les initiatives 134 et 138, les professionnels, les commissaires et le département ont convenu que, finalement, de tels problèmes n'étaient pas liés à des problèmes de structures. Or, cette motion semble faire accroire que, au fond, dans une structure privée différente, ces problèmes seraient résolus... Je n'en suis pas forcément convaincu !
L'invite qui nous est proposée, à savoir d'«étudier la possibilité d'accorder une allocation d'étude aux familles dont les enfants doivent intégrer l'enseignement privé pour des raisons pédagogiques et qui n'ont pas les moyens financiers d'assumer seules les frais d'écolage» concerne beaucoup d'enfants. En effet, environ 50% des enfants ne sont pas à l'aise dans le système hétérogène ! Il conviendrait par conséquent de les aider, pour qu'ils puissent intégrer des établissements privés qui offrent des systèmes à sections ou à options, ou une autre structure. Certes, il me semble sensé que les enfants surdoués, issus de familles modestes, puissent être aidés par l'Etat pour intégrer un établissement spécialisé romand. Cela me paraît tout à fait logique, mais alors il faudrait redéfinir ou mieux cibler l'invite de la motion !
Je suis assez d'accord avec les propos de mes précédentes interlocutrices par rapport à la mise en cause de l'école publique. Nous savons bien que l'école publique fait ce qu'elle peut, avec les moyens du bord et les difficultés qu'elle rencontre. Mais je rappelle que certains établissements publics ont des particularités, des structures différentes: pensez au lycée Henri IV à Paris, qui est un lycée public, élitiste ! Des enfants issus de familles modestes, mais qui ont des capacités, peuvent y avoir accès: ils sont tirés vers le haut, accompagnés, motivés, suivis sur la base d'entretiens, et arrivent à atteindre de brillants résultats.
Donc, je ne crois pas que l'objectif visé par cette motion réside uniquement dans le fait de permettre à des élèves en difficulté d'intégrer un établissement privé. Mais ce n'est pas le lieu de porter un jugement sur cette motion. La problématique soulevée par cette motion est particulièrement intéressante: elle s'inscrit dans les différents débats qui ont actuellement lieu en commission de l'enseignement sur l'échec scolaire. Il serait donc logique de la renvoyer à la commission de l'enseignement. Par contre, elle soulève aussi un aspect fiscal, et il faudrait tout de même se demander si cette motion ne devrait pas également transiter par la commission des finances pour en mesurer l'impact.
M. François Gillet (PDC). J'aimerais rassurer certains de nos collègues sur les intentions de cette motion... Notre parti n'a nullement l'intention de proposer un choix entre l'école publique et l'école privée ! Pas du tout !
Il est évident que la qualité de l'école publique genevoise doit continuer à s'améliorer, et nous allons dans ce sens.
Cette motion concerne - comme Mme Leuenberger l'a dit - des cas très particuliers, peu nombreux, mais qui existent néanmoins. Chaque année, dans l'école publique genevoise, un certain nombre d'élèves, pour des raisons pédagogiques, se trouvent à un moment donné de leur cursus scolaire en difficulté et ont besoin, pour une période réduite, d'intégrer une structure qui applique une pédagogie différente, que l'école publique n'a pas forcément la possibilité de mettre en place.
Durant les nombreuses années d'enseignement que j'ai derrière moi, j'ai connu plusieurs cas d'élèves qui ont quitté temporairement l'école publique pour faire un petit séjour d'une année ou deux à l'école privée. Ils sont revenus dans le circuit public et certains ont ensuite brillamment réussi leurs études. Pour des raisons pédagogiques, en effet, un élève peut tirer profit d'un passage à l'école privée, mais, malheureusement pour certaines familles, ce passage utile est impossible pour des raisons financières. Nous proposons donc, pour ces cas particuliers et pour des raisons pédagogiques, de permettre, grâce à une allocation d'étude, à des familles qui ne pourraient pas assumer ce passage temporaire à l'école privée de pouvoir le faire.
J'aimerais aussi rassurer le groupe socialiste. Le parti démocrate-chrétien n'a nullement l'intention de remettre en cause le projet de loi sur l'intégration des élèves à besoins spéciaux. Nous sommes convaincus qu'il faut travailler dans ce sens également. Cette motion ne fait pas concurrence à ce projet important que nous devons mener et qui doit effectivement aboutir. Cette motion porte sur un domaine particulier et bien délimité de l'enseignement public, et c'est dans un esprit de complémentarité entre l'école publique et l'école privée que nous l'avons déposée.
M. Gabriel Barrillier (R). Tout à l'heure, nous nous sommes mis d'accord sur la paix des cimetières... J'ai bien entendu mon collègue Gillet expliquer que cette motion ne remettait pas en cause les principes qui ont été rappelés: l'école est laïque, publique, obligatoire et gratuite. Je le répète, parce que je constate qu'à peu près une fois par an - ou tous les deux ans - une motion est déposée par certains groupes politiques, parfois pour demander une exonération fiscale, parfois pour octroyer une allocation à des familles qui devraient placer leur enfant surdoué ou sous-doué pendant quelques semaines dans une école particulière.
Nous étudierons en commission notamment quelles sont les raisons pédagogiques qui entrent dans ce cadre, car il faudra bien fixer des critères pour déterminer qui aura droit ou pas à une telle allocation.
Pour ma part, je vous mets en garde, car cette motion n'est pas aussi anodine que cela... Cela m'étonne d'ailleurs que le groupe PDC ait déposé une telle motion, dans la mesure où il a toujours défendu le principe de l'école publique, lui faisant sa confiance. En ce qui nous concerne, nous sommes favorables à l'école publique, mais nous n'interdisons pas les écoles privées. Le groupe radical n'a pas changé d'opinion et il n'en changera pas: les familles qui veulent placer leurs enfants dans une école privées doivent en supporter le coût, et il n'y a pas de raison de leur accorder une aide ou une exonération fiscale !
Alors, étudions cette motion en commission: il y a peut-être, en effet, quelques cas - vous êtes un spécialiste en la matière, cher collègue, puisque vous êtes enseignant - qui sont justifiés ! Mais je renouvelle ma recommandation de faire attention à l'égard de cette ixième tentative de s'attaquer à la prééminence de l'école publique, qui doit, à notre avis, être maintenue.
M. Henry Rappaz (MCG). Quelle drôle de proposition que cette motion 1700, qui souhaite accorder des allocations d'étude pour aider des élèves de l'enseignement public à intégrer l'enseignement privé pour des raisons, entre autres, disciplinaire ou pédagogiques !
Il faut rappeler aux auteurs de cette motion que l'école publique genevoise ne se trouve que très rarement dans l'impossibilité de proposer une structure d'échange adéquate. Les surdoués, par exemple - qui ne sont pas légion - ont déjà la possibilité de demander au DIP des dispenses d'âge. C'est une solution qui peut permettre à l'élève surdoué d'avancer plus rapidement dans les programmes.
Etant donné l'intérêt fort limité de cette motion, le Mouvement Citoyens Genevois ne lui accordera pas sa voix.
La présidente. Merci, Monsieur le député. La parole est à Mme Virginie Keller Lopez, à qui il reste une minute quarante...
Mme Virginie Keller Lopez (S). Cela va être trop court, Madame la présidente, après tout ce que j'ai entendu ! (Rires.) Ce qui m'étonne beaucoup de la part de celles et ceux qui ont déposé cette motion - c'est-à-dire le parti démocrate-chrétien - c'est qu'elle fait montre tout de même d'une grande méconnaissance de ce qu'est l'école ! (Rires.)
Il nous est dit que les classes seraient hétérogènes dans l'école publique et qu'elles ne le sont pas dans l'école privée... Mais vous vous trompez complètement, Mesdames et Messieurs les députés: vous ne connaissez pas l'école publique ! J'ai travaillé pendant de nombreuses années dans l'école privée, et je peux vous dire qu'il y a autant de niveaux d'enfants, de différences, de diversité dans les écoles privées que dans les écoles publiques ! Cela n'existe pas des écoles privées de même niveau ! C'est vrai, il y a des écoles privées réputées plus sélectives que d'autres, mais vous trouverez autant d'hétérogénéité dans les écoles privées que dans les écoles publiques ! C'est la première chose.
Vous dites également que l'école publique ne propose au fond qu'un système et qu'il faut pouvoir proposer des systèmes complémentaires ou d'autres choix... Mais, Mesdames et Messieurs les députés, vous avez été à l'école publique de ce canton ! Vous avez eu des maîtres ou des maîtresses: certains mettaient des notes, d'autres pas; certains pratiquaient la pédagogie active, d'autres étaient très sélectifs... Vous le savez très bien: dans chaque école, chacun va être, dans sa vie d'élève, confronté à des enseignants qui ont des méthodes d'éducation différentes, tout cela dans un cadre relativement homogène, il est vrai - dans le cadre d'une loi - mais les enseignants n'ont pas tous la même manière d'enseigner; ils ne mettent pas tous les mêmes choses en avant ! Un enfant qui fait son cursus dans l'école publique a des chances de trouver des enseignants qui lui correspondent, peut-être pas tous les ans, c'est vrai, mais c'est aussi cela...
La présidente. Il va falloir conclure, Madame la députée !
Mme Virginie Keller Lopez. Oui, je vais conclure ! ...l'apprentissage de la vie: c'est l'école publique, la diversité avec les autres !
Enfin, aux Verts qui ont une position très étrange dans ce domaine, je signale tout de même - puisqu'ils s'inquiètent pour quelques dizaines, ou une dizaine, d'enfants - qu'un dispositif existe déjà. En effet, la Guidance infantile s'occupe de ces enfants en grande difficulté et offre un système de bourse qui permet à certains de ces enfants vraiment en grande difficulté d'accéder à d'autres types d'écoles.
La présidente. Il vous faut conclure !
Mme Virginie Keller Lopez. Je vous remercie, Madame la présidente ! Et j'espère bien que l'ensemble des députées et des députés en commission rejetteront cette motion, qui est vraiment très mauvaise.
M. Charles Beer, président du Conseil d'Etat. Il est de coutume dans ce parlement d'accepter d'étudier toute motion dont le bon sens apparaît a priori...
Il n'en demeure pas moins que cette motion - j'ai presque envie de le dire ainsi au parti démocrate-chrétien - est la suite directe de l'échec de sa motion concernant l'aide à l'ensemble de celles et ceux qui scolarisent leurs enfants dans le privé, et qui a été refusée le 15 décembre 2005 par ce même Grand Conseil. Vous revenez aujourd'hui avec un projet plus cadré, libellé différemment, mais vous persistez à dire qu'il faut remettre en cause d'une manière générale l'actuel partenariat entre le privé et le public, qui veut que le secteur public soit ouvert à tous, gratuit pour tous, laïc et républicain. Cette motion propose - encore une fois, mais de manière différente - que l'argent public participe au financement de places choisies dans le secteur privé.
Or, je le répète, si le secteur privé existe, c'est bien parce qu'il apporte une complémentarité - et je pense que c'est une bonne chose, il faut le relever - mais il revient à celles et ceux qui en font le choix d'en assumer les coûts !
Vous me permettrez de dire, en ce qui concerne l'offre publique du département et, donc, de l'Etat de Genève, que celle-ci n'a jamais été aussi diversifiée, que celle-ci n'a jamais été aussi individualisée. Or, Mesdames et Messieurs les députés, on souhaite plus de normes, plus de cadre - le même pour tous - et, en même temps, on réclame toujours davantage de prise en charge individuelle dès que l'on remarque tel ou tel problème d'adaptation ! Non, Mesdames et Messieurs, la politique éducative est matière d'équilibre: il faut faire en sorte que l'offre publique s'adapte à la fois au plus grand nombre et permette en même temps à un certain nombre d'enfants en difficultés de trouver des solutions individualisées.
A cet égard, je relève que le concordat - qui est à l'étude en ce moment - sur l'enseignement spécialisé et qui reviendra devant ce Grand Conseil en même temps que le projet de loi sur l'intégration, nous montre tout simplement que nous devons abandonner certains aprioris, notamment au sujet des classifications - et je pense en particulier à celles des assurances sociales - pour revenir aux élèves à besoins spécifiques, pour lesquels il faut trouver des solutions individualisées.
Non, Mesdames et Messieurs, n'empêchez pas le secteur public de s'adapter à la prise en charge des enfants qui rencontrent des difficultés: ils doivent trouver des solutions à l'intérieur du service public ! En proposant de les transférer dans des structures privées, vous ne faites que ressurgir - malheureusement - le vieux débat sur l'équilibre entre l'école publique et l'école privée !
Mesdames et Messieurs les députés, je suis sûr que les travaux en commission permettront de clarifier la situation, tout en mettant en évidence, peut-être, un certain nombre d'éléments sur lesquels le secteur public doit encore évoluer.
Mis aux voix, le renvoi de la proposition de motion 1700 à la commission de l'enseignement et de l'éducation est adopté par 53 oui contre 18 non et 1 abstention.
Débat
La présidente. Mesdames et Messieurs les députés, je vous rappelle que nos débats sont en catégorie II et que chaque groupe dispose de trois minutes pour s'exprimer.
Mme Anne-Marie Arx-Vernon von (PDC). Cette motion est représentative du bon sens dont veut faire preuve le parti démocrate-chrétien en proposant l'installation de distributeurs de nourriture saine dans tous les collèges du canton. (Brouhaha. La présidente agite la cloche.)
Nous avons bien évidemment pris en compte le souci de tous les parents en sachant que leurs enfants, au moment des pauses, consomment des produits qui sont beaucoup trop gras, beaucoup trop sucrés et qui ne sont évidemment pas du tout bénéfiques pour leur santé. Nous le savons maintenant, les pourcentages d'enfants obèses sont extrêmement inquiétants, et nous devons pouvoir leur proposer, en tant que communauté politique responsable, une alternative non seulement valable, mais aussi agréable et goûteuse. Nous pensons donc, avec cette proposition de motion, répondre à un réel besoin.
Cela nous permet également de faire la promotion des produits genevois; c'est un élément auquel nous tenons beaucoup, et nous savons que nous ne sommes pas les seuls.
C'est pour ces raisons que nous vous invitons, Mesdames et Messieurs, à accepter cette motion et à la renvoyer à la commission...
Une voix. De l'enseignement !
Mme Anne-Marie von Arx-Vernon. ...de l'enseignement ! Bien évidemment, Madame la présidente !
Mme Brigitte Schneider-Bidaux (Ve). Je remercie les initiants d'avoir déposé cette motion, qui pose un vrai problème. La suralimentation et la «malbouffe», comme Mme von Arx-Vernon vient de le dire, sont effectivement des causes des nombreux problèmes de santé publique, mais elles ne sont - et de loin - pas les seules, la précarité étant aussi une autre cause. Proposer d'autres produits que des mets gras et des boissons super sucrées aux adolescents est une bonne chose.
Un tel projet est actuellement en cours d'évaluation dans deux établissements du canton: à Claparède et à l'ECG Jean Piaget. Une évaluation sera faite d'ici à fin juin. Des problèmes de maintenance des appareils frigorifiques et de respect des normes d'hygiène se posent, ce qui a un coût en termes d'argent et d'énergie. Ce n'est donc pas un projet aussi simple que cela à mettre sur pied. Alors, attendons le résultat des deux expériences qui sont en train d'être faites. J'ai discuté récemment avec l'une des diététiciennes qui procède à l'évaluation de ces expériences: je pense que des éléments très intéressants pourront être repris par la suite.
Je vous engage par conséquent à renvoyer cette motion à la commission de l'enseignement et de l'éducation pour que nous puissions étudier cette problématique globalement.
Mme Christiane Favre (L). Bien que je n'aie moi-même pas toujours su calculer soigneusement mes calories, je vais essayer de peser mes mots pour ne pas alourdir un sujet qui devrait quand même rester léger !
La «malbouffe» et l'obésité sont de vrais problèmes... Mais le plus difficile aujourd'hui, ce n'est pas de trouver de la nourriture saine, c'est de trouver un endroit où il n'y a rien à manger ! Notre société est ainsi faite que, où que nous soyons, tout le monde agit comme si nous allions mourir de faim sur place ! On nous alimente aussi régulièrement que des nourrissons prématurés et aussi solidement que des marathoniens menacés par le dessèchement et la déshydratation ! Réussir ses études demande des efforts soutenus, c'est entendu, mais cela ne nécessite probablement pas que l'on mette les collégiens sous perfusion alimentaire par distributeurs interposés !
Ce dont ils ont besoin, en revanche, c'est de repas équilibrés, pris assis de préférence, à des heures normales, en famille ou dans une cafétéria. Imaginer qu'ils puissent s'en passer et se nourrir d'une poignée de fraises achetées dans un distributeur de nourriture saine: c'est illusoire, voire dangereux ! A l'inverse, espérer que des adolescents repus, mais pas encore rassasiés, puissent craquer pour un kiwi ou des bâtonnets de carottes, c'est angélique ! (Rires.) Et même s'ils le faisaient, s'ils remplaçaient des chips par un paquet de pruneaux secs, il resterait cette idée qu'il faut absolument pouvoir manger partout et à tout moment de la journée ! La société nous y conduit, hélas, mais ce n'est pas à l'école d'encourager ce genre d'habitudes. L'école primaire ne le fait pas: c'est très bien ! Le cycle ne le fait plus: c'est tant mieux ! Si les collèges doivent renoncer à leurs distributeurs de nourriture, les collégiens y survivront aussi, j'en suis persuadée !
C'est la raison pour laquelle nous n'allons pas soutenir cette motion. (Applaudissements.)
M. Eric Leyvraz (UDC). La «malbouffe», les repas pris à n'importe quelle heure, les boissons sucrées et les petits encas engendrent le surpoids et les maladies de l'âge liées à cette manière de vivre.
C'est tout jeune qu'il faut apprendre à apprécier les nourritures variées et saines. Une récente étude montrait que certains jeunes ne mangeaient en famille qu'une fois tous les dix jours... C'est pour cela que l'offre la plus accessible de nourriture doit présenter un équilibre diététique, une qualité nutritionnelle. C'est aussi un état d'esprit. Des jeunes en études aux USA me disaient qu'ils ne trouvaient que des boissons sucrées, même pas un verre d'eau plate, au restaurant de leur collège ! On voit peu à peu s'installer chez nous ce mauvais côté de l'American way of life !
Des distributeurs de nourriture saine, c'est une idée à creuser, un bon placement pour l'avenir, car une bonne santé, c'est le plaisir de vivre, et cela ne coûte rien à la collectivité !
Le groupe UDC soutiendra le renvoi de cette motion en commission de l'enseignement et de l'éducation.
La présidente. Merci, Monsieur le député. Je donne la parole à M. Gilbert Catelain, à qui il reste une minute.
M. Gilbert Catelain (UDC). Merci, Madame la présidente...
La présidente. Deux minutes, excusez-moi !
M. Gilbert Catelain. Hier, la majorité de ce Grand Conseil a voté contre le renvoi de la motion sur les uniformes en nous disant, avec justesse, que ce n'est pas parce que les élèves porteront des uniformes que cela les empêchera de se rendre à l'école avec des accessoires, des chaussures de marque, etc.
Ici, nous sommes exactement dans le même contexte, à savoir que ce n'est pas parce que l'on interdira la distribution de nourriture et de boissons sucrées dans les établissements que les élèves n'apporteront pas ce type d'aliments dans les écoles. En effet, les écoles étant ouvertes dans notre canton, les élèves ont le loisir de sortir pour faire des courses dans le magasin du coin. On peut même imaginer que des marchands ambulants viennent approvisionner les élèves sur place...
Cela étant dit, le fond de la motion est totalement justifié. C'est vrai, nos jeunes ont de gros problèmes de consommation, de gros problèmes de surpoids: leurs capacités physiques sont en diminution depuis des années, et il convient sérieusement de faire quelque chose.
Je ne suis pas convaincu que l'invite qui nous est proposée apportera une amélioration quelconque. Quoi qu'il en soit, vous pouvez être sûrs que de la publicité pour le Coca-Cola sera faite via ces distributeurs - comme pour le tabac. Il y aura certainement du light, mais la publicité sera une incitation supplémentaire à aller en acheter à la sortie de l'école, et cette fois du sucré ! Il vaudrait mieux interdire les distributeurs et promouvoir la consommation du savoir à l'école !
Je ne vois pas pourquoi cette motion devrait être traitée en commission de l'enseignement: il s'agit d'un problème de santé publique. Alors, si vous voulez la renvoyer en commission, choisissez plutôt la commission de la santé.
M. Jacques Follonier (R). Voilà enfin une motion PDC d'une vraie portée et d'une grande envergure: nourrir des enfants avec de l'eau et des fruits secs pour lutter contre l'obésité et la surcharge pondérale... On ne peut qu'applaudir ! C'est vraiment une idée du XXIe siècle !
Je ne suis pas certain que ce soit la nourriture la plus appropriée pour les neurones de nos jeunes élèves, mais ce que je peux en tout cas dire, en lisant dans la motion que l'on ne peut pas supprimer les distributeurs automatiques parce que ce serait une solution trop «radicale»... (Remarques.) ...c'est que nous aurons de la peine à soutenir cette position, vous le comprendrez bien !
Cependant, je vous rappelle quand même que, grâce aux SI - les Services Industriels de Genève - nous avons la plus pure de Genève, la plus cristalline de Suisse, et que, qui plus est, celle-ci est gratuite ! Alors, fort de tous ces constats, je me demande quand viendra la motion PDC pour créer autour des écoles des zones d'interdiction concernant pour les McDonald's... On peut craindre tout et n'importe quoi si l'on entrait dans ce genre de démarche !
Je ne suis pas persuadé non plus, comme M. Catelain, qu'il faille renvoyer cette motion à la commission de l'enseignement. En effet, nous avons déjà suffisamment de travail dans cette commission et le problème que cette motion soulève relève plutôt de la santé. Alors, si l'on veut nourrir la santé de ce genre de choses, j'y souscrirais... comme hier, peut-être du bout des lèvres.
Mme Laurence Fehlmann Rielle (S). Les invites de cette motion ne mangent pas beaucoup de pain , si j'ose dire... (Rires.) ...néanmoins, elle a le mérite de mettre en exergue les problèmes d'alimentation et de «malbouffe» qui se généralisent. C'est vrai, comme le disait Mme Favre, les trois quarts du monde ne mangent pas à leur faim et le quart restant mange mal. Donc, cela mérite tout de même une réflexion et quelques mesures.
Comme cela est indiqué dans la motion, deux établissements ont déjà introduit ces distributeurs qualifiés de «futés» parce qu'ils proposent des aliments dits «sains». Je pense donc qu'il serait intéressant d'entendre, lors d'auditions en commission, les diététiciennes du Service de la santé de la jeunesse qui sont chargées de ce projet. (Brouhaha.) Cela nous permettra de comprendre les obstacles et les résistances qu'il peut y avoir, car je me suis laissé dire que des problèmes de type économique se posaient aussi. (Brouhaha. La présidente agite la cloche.) Les distributeurs traditionnels engendraient en effet des bénéfices et permettaient de créer des emplois pour les restaurants scolaires. Il faudrait par conséquent approfondir également cet aspect-là, en plus du problème de santé publique que cela représente.
Je saisis l'occasion d'aborder le sujet de l'alimentation pour rappeler que, dans la plupart des établissements du postobligatoire, le label «Fourchette Verte» a été introduit dans les restaurants scolaires. Il permet justement de proposer au moins un plat du jour équilibré et, dans ce sens, c'est aussi une mesure de prévention et de promotion de la santé dont il faut vraiment tenir compte. (Brouhaha. La présidente agite la cloche.) L'aspect sensibilisation à l'alimentation saine, à l'alimentation équilibrée se développe: par exemple, le Service santé de la jeunesse fait circuler une exposition et propose des ateliers santé. Peut-être faudrait-il en faire plus ? Différents types de mesures peuvent être prises: plus incitatives ou de sensibilisation. Quoi qu'il en soit, je crois qu'il faut aborder ce problème avec une vision globale des choses.
Cela dit, je suggère que cette motion soit renvoyée à la commission de la santé, comme l'ont souhaité quelques préopinants, parce qu'elle soulève surtout un problème de santé publique, même si des aspects d'éducation entrent en ligne de compte.
La présidente. Monsieur le député Roger Deneys, voulez-vous vous exprimer pour le temps qui reste, soit quarante-cinq secondes ? (M. Roger Deneys acquiesce.) Bien, je vous donne la parole.
M. Roger Deneys (S). Je voulais juste poser une question très précise à Mme von Arx-Vernon: j'aimerais savoir si, en hiver, les distributeurs comporteront, parmi les produits genevois, des longeoles et du gratin de cardon ? (Rires.) La réponse m'intéresse beaucoup.
La présidente. Cela tombe très bien: je dois passer la parole à Mme Anne-Marie von Arx-Vernon, qui va sans doute vous répondre.
Mme Anne-Marie Arx-Vernon von (PDC). Oui, bien sûr ! C'était une de mes préoccupations... M. Deneys avait pensé si fort à sa question que j'avais déjà préparé la réponse.
Madame la présidente, permettez-moi de rebondir sur les propos de Mme Favre qui sont tout à fait frappés au coin du bon sens. Je ne peux que lui donner raison... Quoi que - sauf que - si les distributeurs étaient supprimés, Madame Favre, ces mêmes jeunes, qui sont aujourd'hui accros aux produits sucrés, aux produits trop gras, les emporteront avec eux à l'école !
Alors, en proposant cette alternative aux jeunes, de leur offrir la possibilité de consommer des produits sains, nous prétendons - très modestement - participer à l'amélioration de leur alimentation. Parmi les produits genevois, Monsieur Deneys, nous pourrions leur proposer des pommes, des poires...
Des voix. Et des scoubidous ! (Brouhaha.)
Mme Anne-Marie von Arx-Vernon. C'est vous qui l'avez dit, ce n'est pas moi ! ... et aussi des gâteaux façon grand-mère ! Alors, en ce qui concerne les produits genevois, je me permets d'interpeller nos collègues radicaux et libéraux. En effet, ce sont les grands défenseurs de ces produits et je ne comprends pas pourquoi ils se défaussent devant une telle proposition, qui a trait aussi à l'une de leurs préoccupations. Mais voilà...
Madame la présidente, nous, nous voulons faire confiance aux jeunes en leur proposant d'autres produits. Vous savez, les jeunes évoluent ! Ils sont aujourd'hui confrontés à d'autres goûts - beaucoup de restaurants, les cantines, même les crèches... A propos de crèches, nous devons rendre hommage aux crèches de la Ville de Genève qui proposent des «ateliers goût» pour les enfants, précisément pour les sortir des schémas trop sucrés, trop salés, qui déforment le goût.
Madame la présidente, pour conclure, nous pensons qu'il est beaucoup plus raisonnable de renvoyer cette motion à la commission de la santé. (Brouhaha.)
M. Georges Letellier (Ind.). Je trouve que cette proposition de motion est une aberration, comme je n'en ai jamais entendue dans ce Grand Conseil ! (Applaudissements. Rires.) C'est le comble du ridicule ! Comment voulez-vous contrôler les marchandises de ces distributeurs, alors que, pour pouvoir les commercialiser, il faut une date de fabrication et une date de péremption sur chaque emballage ? Comment voulez-vous faire ?! Votre proposition est irréalisable, c'est tout ! Il est tout à fait inconscient de proposer des motions pareilles !
M. Charles Beer, président du Conseil d'Etat. On peut le constater, l'école doit être de plus en plus contrôlée, surveillée et, finalement, absolument imperméable à l'influence extérieure... A l'heure de la «malbouffe», des déréglementations tous azimuts, on voudrait le retour de l'uniforme - qui n'a jamais existé - et qu'aucune nourriture autre que «labellisée» n'entre dans les écoles !
Plaisanterie mise à part, je tiens à évoquer le fait qu'il y a une forme de surenchère, non pas forcément dans les demandes mais, surtout, dans les effets d'annonce qui les accompagnent.
Mesdames et Messieurs les députés, vous savez ce qui est en cause. Il n'y a aucune boisson sucrée ni aucun mets sucré dans les écoles primaires. Au cycle d'orientation, tous les distributeurs de boissons sucrées ont été supprimés. Certes, il existe encore à l'orée du cycle d'orientation des ventes de petits pains qui ont de plus en plus tendance à être remplacés - c'est déjà le cas dans de nombreux cycles d'orientation - par des distributions de pain de seigle. de fruits secs, d'eau, etc. Et puis, dans les bâtiments du postobligatoire, il y a des boissons sucrées. Mais aujourd'hui, deux établissements font l'objet d'une étude, puisque des distributeurs de boisson saine, c'est-à-dire que de l'eau, et de nourriture saine ont été introduits.
Je pense que les initiatives sont nombreuses. En réalité, nous tendons aujourd'hui déjà vers ce que vous demandez, à savoir un très grand contrôle dans ce domaine. En effet, le Conseil d'Etat est très attaché à la lutte contre l'obésité: il compte beaucoup sur une grande consommation d'eau - d'eau de qualité; il compte aussi sur une distribution de nourriture saine - le cas échéant, par le biais de distributeurs de repas ainsi que par des promotions de produits du terroir, comme la distribution de pommes dans l'ensemble de nos écoles à la rentrée 2005.
Mesdames et Messieurs les députés, vous avez certainement tous de nombreuses bonnes intentions, mais je pense qu'il vaudrait la peine, avant de lancer des motions, de prendre en considération l'ensemble des éléments - et quelquefois les questions permettent de les intégrer - pour savoir si elles sont absolument nécessaires.
Quoi qu'il en soit, Mesdames et Messieurs les députés, il y a un certain nombre de limites à l'exercice qui veut que l'école soit complètement imperméable au reste du monde, alors que celui-ci évolue dans un sens exactement - j'allais dire «radicalement» - différent ! (Applaudissements.)
La présidente. Mesdames et Messieurs les députés, je vous soumets la proposition de renvoyer cette motion à la commission de la santé.
Mis aux voix, le renvoi de la proposition de motion 1702 à la commission de la santé est rejeté par 36 non contre 28 oui et 3 abstentions.
La présidente. Je vous soumets donc le renvoi de cette motion au Conseil d'Etat.
Mise aux voix, la proposition de motion 1702 est rejetée par 51 non contre 17 oui et 2 abstentions.
Débat
M. François Thion (S). Cette motion concerne les élèves qui fréquentent les classes d'accueil du cycle d'orientation. Je rappelle que ces classes d'accueil sont destinées aux enfants migrants, non francophones, domiciliés dans notre canton. L'objectif de la classe d'accueil étant d'intégrer au plus vite les nouveaux arrivants, la plus grande partie des cours est consacrée à l'apprentissage du français. Des cours dans la langue maternelle des élèves sont également prévus, de même que, pour compléter le programme hebdomadaire, sont dispensées des connaissances du milieu environnant, des connaissances de mathématiques et de langues: l'allemand et l'anglais. Dès que possible, les élèves rejoignent une classe ordinaire, selon le préavis des maîtres de classe en accord avec les parents et la direction du collège. (Brouhaha. La présidente agite la cloche.)
Pour certains de ces élèves, le fait de devoir rattraper le niveau d'allemand et celui d'anglais - tout en apprenant le français et en se perfectionnant dans leur langue maternelle - pose un problème extrêmement important. Cela représente pour eux un obstacle souvent insurmontable qui peut compliquer leur avenir scolaire et, également, je tiens à le souligner, leur intégration en Suisse.
Rappelons au passage que l'allemand est maintenant enseigné depuis la troisième primaire, ce qui fait que des élèves de 14 ans qui arrivent au cycle d'orientation en huitième année doivent reprendre tout le programme depuis la troisième primaire, ce qui est souvent insupportable.
La motion que je vous propose de renvoyer en commission de l'enseignement demande au Conseil d'Etat: «d'étudier la possibilité de supprimer l'obligation d'apprendre l'allemand pour les élèves qui débutent l'école à Genève en classe d'accueil au moins dès la 8e;». Elle demande également d'étudier la possibilité de développer des cours d'appui d'anglais qui seraient destinés tout particulièrement aux élèves des classes d'accueil. Cette dernière demande a pour objectif de permettre à ces élèves d'avoir rattrapé le niveau d'anglais à la fin de leur scolarité obligatoire. (Brouhaha.)
Cette motion vous est proposée suite à des entretiens que j'ai eus avec des responsables de classes d'accueil qui m'avaient exprimé leurs inquiétudes pour l'avenir de leurs élèves.
En ce qui concerne les coûts, cette motion n'engendre aucun coût supplémentaire, parce que les économies qui seraient faites sur les cours d'allemand pourraient compenser les dépenses pour les cours de rattrapage d'anglais.
Je vous prie donc, Mesdames et Messieurs les députés, de bien vouloir renvoyer cette motion à la commission de l'enseignement pour qu'elle y soit étudiée.
M. Henry Rappaz (MCG). Le Mouvement Citoyens Genevois pense que la suppression de l'obligation d'apprendre l'allemand pour les élèves qui débutent l'école à Genève en huitième année dans les classes d'accueil n'est pas une excellente idée... Pas plus, d'ailleurs, que de vouloir augmenter les heures d'anglais pour quelque motif que ce soit. L'allemand reste une de nos langues nationales, et il n'y a aucune raison de favoriser, en échange, l'anglais qui déjà dévore notre propre langue au quotidien.
Pour ces raisons, le MCG ne soutiendra pas cette motion. Danke vielmal !
Mme Sylvia Leuenberger (Ve). Je serai brève... Nous allons exactement dans le même sens que M. Thion, qui a été très complet - je ne vais donc pas répéter tout ce qu'il a dit. De plus, un élément nous conforte dans notre position: lors d'une audition à la commission de l'enseignement, la direction du cycle d'orientation a tenu les mêmes propos. Il faut en effet savoir que les enfants qui fréquentent ces classes d'accueil sont souvent en grande difficulté et, la plupart du temps, ils n'iront pas au postobligatoire, au collège. Ne pas leur imposer d'étudier l'allemand ne va donc pas leur porter préjudice.
Nous soutenons donc le renvoi de cette motion à la commission de l'enseignement.
Mme Janine Hagmann (L). Il ne me semble pas que cette motion soit une bonne idée, pour la bonne raison que l'on est en train de mélanger les rôles: en somme, on enjoint le chef du département de l'instruction publique de prévoir tel ou tel cours dans la grille horaire... Mais depuis quand les députés doivent-ils se mêler de l'organisation de la grille horaire ? Si nous demandions à chaque groupe de cette enceinte ce qu'il veut inclure dans la grille horaire, je suis persuadée qu'il «pignoterait» et se plaindrait de ne pas avoir obtenu ce qu'il voulait... Non, il ne faut quand même pas mélanger les rôles !
De plus, tout le monde sait très bien que l'intégration passe par l'étude de la langue de l'endroit où l'on vit. Et puis, vous pouvez imaginer qu'un pourcentage, même minime, de ces enfants en classe d'accueil peut ensuite faire une très bonne scolarité ! Et vous voudriez qu'on leur enlève la possibilité d'être au même niveau que les autres ?! Mais c'est scandaleux ! C'est les «ghettoriser» ! Même si je n'ai pas de conseils à donner au conseiller d'Etat sur ce que doit comporter la grille horaire - car c'est lui et ses fonctionnaires qui s'en chargent - je pense que ce n'est pas une bonne idée de différencier les enfants de chez nous des enfants des classes d'accueil. Et la meilleure façon de s'intégrer est de bénéficier des mêmes conditions que les gens d'ici.
C'est pourquoi le groupe libéral refusera cette motion.
M. François Gillet (PDC). La motion qui nous est présentée soulève un réel problème que nous rencontrons au cycle d'orientation avec les élèves non francophones qui entrent en classes d'accueil. Il n'est en effet pas évident pour un jeune élève qui ne maîtrise pas le français de consacrer encore du temps à l'apprentissage de l'allemand et de l'anglais. Ce problème est réel.
Les solutions qui sont proposées méritent en tout cas réflexion. Si nous reconnaissons la difficulté, nous savons que, déjà aujourd'hui au cycle d'orientation, il est possible de déroger à l'obligation d'étudier l'allemand; en tout cas temporairement, pour permettre à l'élève de renforcer ses connaissances en français - ce qui est effectivement prioritaire. Maintenant, généraliser cette possibilité mérite réflexion. Il serait paradoxal, dans un souci d'intégration, de pénaliser l'avenir des jeunes non francophones en leur interdisant la possibilité d'apprendre l'allemand. Car certains élèves qui sont passés par les classes d'accueil - et j'ai connu des cas - poursuivent ensuite brillamment leurs études dans un cursus normal. Et il pourrait être dommageable pour eux qu'ils ne puissent pas intégrer des filières d'études qui nécessitent l'allemand.
C'est la raison pour laquelle nous sommes prêts à étudier cette question en commission, tout en n'étant pas convaincus que la solution proposée soit forcément la meilleure.
M. Philippe Guénat (UDC). Autant pour nous, UDC, l'allemand est important - vous pouvez bien l'imaginer - autant il est clair que l'anglais est un atout et un avantage, surtout pour des jeunes qui habitent Genève et qui cherchent du travail, étant donné l'évolution de l'économie. (Brouhaha. La présidente agite la cloche.) C'est pourquoi nous pensons que cette motion est intéressante et qu'elle mérite d'être développée.
L'allemand doit-il être complètement abandonné ? Pour ma part, en tant qu'employeur qui rencontre régulièrement des étrangers, qui sont venus s'établir à Genève et qui y ont suivi leur scolarité tant bien que mal, je souhaiterais que l'on mette un accent important sur le français et sur l'anglais. L'anglais est vraiment la première langue étrangère utilisée à Genève et aujourd'hui nous manquons cruellement de personnes qui parlent l'anglais dans notre secteur d'activité.
Je soutiendrai cette motion et j'aimerais qu'elle soit renvoyée dans une commission de l'enseignement, si c'est possible, Madame la présidente.
Mme Sandra Borgeaud (Ind.). En ce qui me concerne, je ne suis pas vraiment du même avis. Nous sommes sans doute un petit pays, mais nous avons l'avantage d'avoir quatre langues nationales... Même si l'anglais est au goût du jour et qu'il est important de le parler pour pouvoir travailler dans la plupart des multinationales, j'aimerais toutefois que ne soient pas négligés l'italien et l'allemand qui sont nos langues.
Une personne qui vit en Suisse romande et qui aurait envie de faire un stage ou d'être mutée dans une filiale en Suisse allemande ou en Suisse italienne pourrait être désavantagée de ne pas connaître pas l'allemand. Vous savez tous ici, en tant que députés, et je m'adresse à celles et ceux qui auraient envie de devenir conseillers nationaux,... (Rires.) ...que l'allemand et l'italien sont des langues plus importantes que l'anglais, qui n'est pas pratiqué au Palais fédéral. (Rires.) Il faut donc que nous privilégions nos langues nationales. Et je suis tout de même choquée de constater qu'à Zurich on privilégie l'anglais par rapport au français.
Alors, renvoyez cette motion en commission, essayez de trouver un équilibre et de faire de faire en sorte que les langues nationales de notre pays ne soient pas abandonnées.
Mme Virginie Keller Lopez (S). Je crois que le groupe libéral n'a pas bien lu cette motion... Elle ne vise en aucun cas à empêcher les enfants qui sont en classe d'accueil et qui en ont envie ou qui en ont les moyens d'étudier l'allemand au cycle d'orientation ! Elle supprime seulement l'obligation d'étudier l'allemand ! Je le répète: Il n'est nullement question de les empêcher d'étudier l'allemand !
Et puis, je suis étonnée d'entendre Mme Hagmann et Mme Borgeaud nous expliquer que l'étude de l'allemand est un moyen d'intégration... Je ne sais pas si vous vous êtes amusées à parler allemand à des enfants qui, à la fin de la neuvième, ont fait trois années d'allemand - je ne parle pas de ceux qui sont en classe d'accueil... Leur niveau de connaissances en allemand n'est, de loin, pas ce que vous imaginez ! Et ce n'est certainement pas sur ces connaissances que les jeunes en classe d'accueil vont avoir la capacité de s'intégrer ou non au cycle d'orientation !
De plus, un enfant qui ne choisirait pas d'étudier l'allemand en classe d'accueil du cycle d'orientation, mais qui, à l'âge de 18 ou de 19 ans, aurait tout à coup besoin, pour une question professionnelle, de parler l'allemand, n'aurait qu'à s'immerger en Suisse allemande pendant trois mois ! Tout le monde sait que cela rattrape facilement quatre ou cinq ans d'allemand à l'école obligatoire ! (Brouhaha. La présidente agite la cloche.)
Alors, cette motion est une proposition pragmatique destinée à des enfants qui sont en difficulté et je vous remercie de la renvoyer en commission pour l'étudier.
M. Georges Letellier (Ind.). J'aimerais m'adresser à M. Thion - que j'aime bien, par ailleurs... Monsieur Thion, il est primordial de maintenir l'unité nationale de la Suisse, pour préserver notre identité, et supprimer l'allemand est tout simplement une aberration idéologique.
Bien sûr, je ne conteste pas l'utilité de l'anglais, qui est indispensable dans les rapports internationaux, toutefois nous devons faire un effort pour nous mettre au niveau des Suisses allemands et des Allemands !
Voilà, Madame la présidente, c'est tout ce que j'ai à dire ! (Exclamations.)
M. Charles Beer, président du Conseil d'Etat. Je serai extrêmement bref. Je tiens d'abord à dire qu'en cas de besoin nous pouvons déjà, Mesdames et Messieurs les motionnaires, libérer de l'apprentissage de l'allemand les élèves qui sont en classes d'accueil en 8e et en 9e. Cet élément est quand même important à rappeler, puisque c'est l'une de vos demandes. Actuellement, l'apprentissage de l'anglais est obligatoire et, de cas en cas, les élèves qui sont en classe d'accueil peuvent être libérés de l'apprentissage de l'allemand.
Pour clarifier l'ensemble de ces pratiques et pour que sachiez exactement de quoi il s'agit, je pense qu'il faudra également tenir compte de cette préoccupation, au moment où nous menons une réflexion sur la politique des langues sous tous ses aspects.
La présidente. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, je vous soumets le renvoi de cette motion à la commission de l'enseignement.
Mis aux voix, le renvoi de la proposition de motion 1711 à la commission de l'enseignement et de l'éducation est adopté par 35 oui contre 29 non et 2 abstentions.
Débat
M. Jacques Follonier (R). Vous savez tous que le système de Bologne exige maintenant cinq ans d'études pour obtenir le master ès sciences de l'éducation permettant d'enseigner. Vous savez aussi qu'une part peu importante est allouée à la formation pratique et que nous sommes actuellement devant un choix de société, à savoir quelle formation nous voulons donner aux enseignants de l'école enfantine et de l'école primaire.
Et nous, au parti radical, nous voulons - c'est l'un de nos souhaits - harmoniser le plus possible la formation des enseignants, pour le moins au niveau romand. HarmoS va bientôt entrer en ligne de compte. La Convention romande prévoit déjà que la formation continue des enseignants se fasse au niveau romand. Il nous a donc paru judicieux que ces formations soient elles aussi harmonisées, pour pouvoir faire comme nos autres cousins cantonaux, c'est-à-dire former nos enseignants de la même manière, soit sur trois ans et dans une HES. Pourquoi ? Tout simplement parce qu'une formation plus courte peut se révéler beaucoup plus attractive, ce qui veut dire que plus de personnes embrasseront cette profession. Et puis, vous le savez comme moi, nous avons un immense besoin d'enseignants.
Par ailleurs, cette harmonisation permettra aussi une meilleure mobilité. Nous avons besoin de certains enseignants et il ne serait pas judicieux que nous ne puissions pas engager des enseignants d'autres cantons, tout cela parce qu'ils n'auraient pas la même qualité de formation que celle que nous exigeons à Genève - et c'est nous que nous pénaliserions en formant nos futurs enseignants de cette manière.
Pour toutes ces raisons, je vous demande de bien vouloir renvoyer cette motion à la commission de l'enseignement supérieur.
Mme Sylvia Leuenberger (Ve). Le sujet est d'actualité, puisque mercredi M. Beer a présenté son projet pour l'école primaire, dans lequel figurait un point sur la révision de la formation du primaire. D'autre part, il existe un projet de loi libéral sur la réforme de la formation des enseignants du primaire, projet qui est pendant à la commission de l'université et qui avait été gelé dans l'attente d'un rapport du Conseil d'Etat. Ce sujet est donc tout à fait d'actualité.
Mais les Verts n'ont pas encore de religion à propos de l'aspect exact que devrait revêtir la formation des enseignants, si ce n'est que nous pensons que le volet concernant les stages pratiques devrait être renforcé. Par ailleurs, d'autres questions se posent: le nombre d'années d'études, le type d'école - université, HES, HEP, institut - la possibilité de masters pour des spécialisations, par exemple. A notre avis, tout cela mérite un débat en profondeur et nous pensons que ce n'est pas par la voie de cette motion - proposant déjà une solution, demandant un projet de loi et n'évoquant que les HES - que nous allons résoudre l'ensemble de cette problématique.
Le département va certainement présenter des projets sous peu et nous préférons attendre ce moment-là pour nous déterminer. Nous nous opposerons donc à cette motion.
M. Henry Rappaz (MCG). Il est une vérité incontournable: nous manquons cruellement d'enseignants. Et nous le savons. Aussi, la proposition de créer une Haute école pédagogique genevoise est une excellente idée. En effet, cela permettrait d'obtenir un bachelor en enseignement au bout de trois années seulement, au lieu des cinq années d'études prévues par le système de Bologne pour obtenir un master en enseignement. Sans aucun doute, il faut accepter cette proposition !
Par conséquent, le Mouvement Citoyens Genevois est favorable à cette motion et propose de la renvoyer à la commission de l'enseignement supérieur.
Mme Janine Hagmann (L). Mardi dernier, le dernier débat des rendez-vous de l'instruction publique, auquel Mme Pürro et moi-même avons participé, a été très intéressant. Il a débuté par la question suivante: qu'est-ce qu'un bon enseignant ? Et, pendant deux heures, les gens se sont affrontés et ne sont pas parvenus à trouver une formule définissant ce qu'était un bon enseignant. Par contre, tous les débatteurs dans la salle ont reconnu que pour être un bon enseignant - à part certains qui naissent avec une étiquette «enseignant» sur leur berceau - il fallait une bonne formation. Et aujourd'hui, nous parlons de formation.
Comment les choses se passent-elles actuellement ? Les enseignants font une licence en quatre ans. Mais je rappelle que Genève a une spécificité: notre République forme partiellement ses enseignants du primaire à l'université, depuis 1929. Certains se souviennent peut-être de l'Institut Rousseau, dirigé par Piaget et Rossello, où les étudiants passaient leur certificat propédeutique pour pouvoir enseigner au primaire.
Puis, en 1995, une loi a été votée à l'unanimité dans cette enceinte pour que les futurs enseignants du primaire puissent recevoir une formation universitaire à la FPSE en partenariat avec le DIP, afin d'y suivre des cours et des stages.
Actuellement, des modifications sont en cours. C'est vrai, certaines personnes ont contesté la FPSE. Et l'on peut tout de même constater une chose négative: c'est que la FPSE compte beaucoup de sociologues et bientôt plus de pédagogues. Et il est certainement dommage que les futurs enseignants soient davantage formés par des sociologues que par des pédagogues. C'était juste une parenthèse que je tenais à faire.
M. Follonier nous fait part de sa volonté d'harmoniser la formation... Bien sûr, nous la voulons tous ! Mais, Mesdames et Messieurs, il ne faut pas l'oublier: qui peut le plus peut le moins ! Et, puisque nous avons la chance que la formation des enseignants se fasse à l'université, ne serait-il pas dommage de la sacrifier au profit d'une formation en HES ? Cette question sera posée à la commission.
A mon avis, pour qu'une formation soit vraiment valable, elle doit être conçue pour favoriser l'articulation entre les savoirs théoriques et les savoirs d'action, entre les pratiques professionnelles effectivement mises en oeuvre et l'analyse de leur pertinence du point de vue des enseignants apprenants, et puis, également, elle doit dispenser les notions de l'enseignement qu'il faudra apprendre aux élèves.
Pour finir, il faut se demander ce qui est le plus important...
La présidente. Il va falloir conclure, Madame la députée !
Mme Janine Hagmann. ... est-ce la structure que l'on va mettre en place ou son contenu ? C'est dommage qu'il faille conclure, car c'est un sujet vraiment intéressant ! M. le président Charles Beer nous a proposé, à la commission de l'enseignement, mercredi...
La présidente. Il faut conclure !
Mme Janine Hagmann. ... de nouvelles possibilités de formation dans un institut qui verra le jour en 2008.
Je vais conclure - puisque j'ai malheureusement épuisé mon temps de parole - en vous disant ceci: il ne faut surtout pas raccourcir le temps de formation pédagogique des futurs enseignants: ils en ont trop besoin ! Mais soyons raisonnables: nous savons qu'une formation sur quatre ans est suffisante !
La présidente. Merci, Madame la députée. Monsieur Weiss, il ne vous reste plus de temps de parole, Mme Hagmann l'ayant épuisé. Je donne la parole à Mme Virginie Keller Lopez.
Mme Virginie Keller Lopez (S). Tout comme Mme Hagmann, le groupe socialiste ne souhaite pas aujourd'hui brader une formation qui, somme toute, fait la fierté de Genève depuis un siècle.
Il semble que la proposition qui nous est faite aujourd'hui n'a pas vraiment pour objectif de discuter du contenu de ce que doit être une formation d'enseignant, elle s'attache uniquement au coût de cette formation. Et, en ce qui me concerne, je trouve un peu dommage d'aborder cette question de la formation, essentielle aujourd'hui, uniquement sous cet angle.
Le parti radical nous parle d'harmonisation... C'est évident, le parti socialiste souhaite également l'harmonisation des formations, pour que nos enseignants puissent enseigner ailleurs et pour que nous puissions accueillir d'autres enseignants lorsque nous en avons besoin ! Mais M. Follonier nous propose d'harmoniser la formation dispensée à Genève avec les autres cantons romands... Nous, ce que nous vous proposons, c'est que cette harmonisation s'effectue avec le reste de l'Europe, avec le reste du monde - où la plupart des formations d'enseignants ont lieu dans le cadre universitaire ! On le sait, dans les autres cantons suisses, la tendance est plutôt d'aller de l'avant et de dispenser ces formations à l'université - pourquoi pas ? - plutôt que de reculer. En cherchant aujourd'hui à harmoniser notre système de formation en fonction de ceux qui sont, précisément, en train de discuter d'un éventuel changement, je pense que nous faisons là un bien mauvais calcul !
Et notre faculté - Mme Hagmann l'a rappelé, et je crois que l'histoire a son importance - a une réputation mondiale, Piaget aussi, et nous devons absolument la conforter. Nous devons plus que jamais donner des moyens pour que cette formation soit de qualité et, peut-être, pour l'adapter en fonction des critiques qu'elle a reçues. On sait en effet que la question des stages est fortement discutée et je pense que c'est essentiel dans la formation des enseignants.
Aujourd'hui, nous voulons bien, nous les socialistes, ouvrir le débat sur ce sujet - nous sommes d'accord - mais nous refuserons cette motion, parce qu'elle propose une solution que nous n'approuvons pas. Nous savons très bien que le débat est déjà ouvert au sein du département, d'ailleurs un projet de loi est actuellement pendant à la commission de l'enseignement supérieur et la discussion sera ouverte à son sujet lorsque nous le souhaiterons.
Par conséquent, Mesdames et Messieurs, nous n'avons pas besoin de cette motion - qui représente un retour en arrière de la formation des enseignants aujourd'hui - pour avoir un débat que nous savons indispensable !
M. Eric Bertinat (UDC). Permettez-moi de poser deux questions suite au dépôt de cette motion. La motion du groupe radical tombe-t-elle à côté ou, même, fait-elle double emploi ? Ce sont les questions que l'on peut se poser, puisque ce même groupe a déposé le projet de loi 9500 en 2005, demandant que l'on offre à Genève une formation d'enseignement primaire avec un baccalauréat universitaire !
Une telle possibilité aurait déjà bien des similitudes avec la formation en HEP. Ce projet de loi est en attente devant la commission de l'enseignement supérieur et nous savons que le DIP étudie une proposition de bachelor pour cet enseignement.
Est-ce la réponse du Conseil d'Etat qui figure dans le rapport divers 585 qui pousse les radicaux à relancer ce débat ? Sans doute ! Parce que le Conseil d'Etat nous laissait entendre que la formation telle que dispensée à Genève était du même niveau que les nouvelles HEP. En conclusion, le Conseil d'Etat se prononçait contre la création d'une Haute école de pédagogie et mettait en avant l'existence d'infrastructures à l'université et les coûts importants que cela impliquerait. Il jugeait donc cette idée inutile.
Mais la question reste ouverte, et elle est importante parce que, soit nous allons choisir de maintenir la formation à l'université, soit elle s'effecturera en HES, comme proposé ici.
Il convient donc d'étudier cette motion en commission de l'enseignement supérieur, en la joignant bien évidemment au projet de loi 9500 qui est en attente.
M. François Gillet (PDC). C'est vrai, la question de la formation des enseignants est centrale pour notre instruction publique. Et il est évident - M. Follonier l'a rappelé - que, dans le cadre de l'harmonisation scolaire romande, la question de l'harmonisation de la formation des enseignants est également importante.
Faut-il pour autant harmoniser les structures de formation ? Faut-il pour autant que les établissements de formation soient les mêmes partout ? Nous n'en sommes pas convaincus, en tout cas pas à ce stade de la réflexion !
Nous pensons qu'il est nécessaire d'étudier cet objet en commission. Nous pensons qu'il est nécessaire de comparer cette variante à d'autres propositions qui pourraient être faites, mais nous ne sommes pas convaincus pour l'instant que la HES soit forcément la structure adéquate pour la formation de nos enseignants à Genève.
Par ailleurs, nous attirons votre attention sur le fait que notre groupe a déposé une motion - qui sera peut-être étudiée tout à l'heure, si nous en avons le temps - qui traite de l'amélioration de la formation des enseignants en matière de langues. Sur ce point, nous préconisons plutôt une collaboration avec la FPSE. Et il est possible que cette question puisse orienter notre position dans un sens ou dans un autre.
M. Charles Beer, président du Conseil d'Etat. J'aimerais juste ajouter quelques mots à ce débat, puisque cet objet sera certainement renvoyé en commission. Du reste, il y rejoindra le projet de loi 9500, comme cela a été évoqué, et il sera également rejoint, comme vous le savez, par le projet de loi du Conseil d'Etat.
Aujourd'hui, nous travaillons à la structuration de la formation des enseignants, dans l'optique que celle-ci permettre aux futurs enseignants d'acquérir dans le même type de lieux un certain nombre de compétences et de connaissances. Je pense évidemment au niveau universitaire, à un centre interfacultaire prenant la forme d'un institut universitaire de formation des enseignants, où les futurs enseignants du primaire et du secondaire - au niveau de la maîtrise - pourraient être formés. Cela viendrait probablement compléter une démarche déjà effectuée pour les enseignants du primaire au niveau du baccalauréat.
Mesdames et Messieurs les députés, sans vouloir trancher d'ores et déjà cette question importante, j'aimerais dire que, si l'on conçoit la formation initiale des enseignants comme étant quelque chose de très important, celle-ci doit forcément être élargie - au moment où la formation continue pour tous, tout au long de la vie, est chose normale - par la formation continue et, également, par le perfectionnement professionnel permettant notamment d'assurer la formation des cadres et des directions scolaires. A cet égard, nous travaillons à un projet d'envergure complet, qui donnera la possibilité, en particulier au niveau du perfectionnement professionnel, d'y associer un certain nombre de partenaires romands, dont l'IDEAP que vous connaissez tous et qui est basé dans le canton de Vaud.
Mesdames et Messieurs les députés, le débat pour savoir si la formation des enseignants doit se faire à l'université ou en HEP est, à certains égards - permettez-moi de le dire - extrêmement réducteur ! J'en veux pour preuve que la HEP du canton de Zurich est reliée à l'université. Il s'agit donc pratiquement d'un institut universitaire, ce qui ressemble finalement, sous certains aspects, à ce qui est prévu aujourd'hui par le Conseil d'Etat.
Mesdames et Messieurs les députés, attention aux «fausses bonnes idées» ! Renoncer aujourd'hui à une formation universitaire et créer une HEP de toute pièce serait, à mon avis, tout simplement revenir à une notion particulièrement désastreuse pour le canton de Genève: il faudrait dépenser beaucoup plus pour faire un peu moins bien !
Mis aux voix, le renvoi de la proposition de motion 1716 à la commission de l'enseignement supérieur est adopté par 40 oui contre 29 non et 1 abstention.
La présidente. Mesdames et Messieurs les députés, nous nous retrouvons à 20h30. Je vous souhaite un très bon appétit.
La séance est levée à 19h.