République et canton de Genève
Grand Conseil
Séance du vendredi 26 janvier 2007 à 20h30
56e législature - 2e année - 4e session - 20e séance
M 1720 et objet(s) lié(s)
Débat
La présidente. Je vous rappelle que nous traitons conjointement les points 28, 79 et 81. A ce titre, il sera consacré soixante minutes au total, à raison de six minutes par groupe. Chaque auteur, c'est-à-dire le premier ou la première signataire, peut s'exprimer six minutes également. Je passe la parole à Mme la députée Morgane Gauthier.
Mme Morgane Gauthier (Ve). N'étant pas au nombre des auteurs de cette motion, je vais peut-être laisser ces derniers s'exprimer avant moi.
La présidente. Tout à fait, je vous remercie... (Brouhaha. Remarques.) Ils n'y sont pas obligés, ils s'inscrivent à l'instant... M. Hiltpold, je vous donne la parole. (Remarque.) Non, vous n'êtes pas auteur non plus, mais cela ne fait rien. Si les auteurs ne s'inscrivent pas, tant pis ! On va continuer comme cela... (La présidente est interpellée). Alors, je passe la parole à Mme von Arx Vernon.
Mme Anne-Marie Arx-Vernon von (PDC). Concernant la motion 1720, le parti démocrate-chrétien propose de réfléchir et de travailler ensemble sur un point absolument essentiel qui a entravé jusqu'à maintenant la construction de crèches dans le canton de Genève.
Dans cette motion, nous demandons un assouplissement des normes de construction des institutions pour la petite enfance, parce que ces dernières ne correspondent absolument pas à la réalité: elles sont dans bien des cas le fait du prince, le fait du magistrat. J'en veux pour preuve un exemple absolument flagrant en ville de Genève, où la crèche du CICR a coûté à peu près la moitié du prix que celle de Montbrillant, et tout cela parce qu'il y avait deux magistrats différents pour piloter chaque projet ! Cela n'a donc rien à voir avec la sécurité que nous devons garantir aux enfants, ni avec la qualité des matériaux ou de l'encadrement, je dirai même de l'encadrement esthétique, qui doivent être toujours au plus haut niveau.
C'est pourquoi nous vous demandons, pour pouvoir travailler de manière absolument concertée, de lever ces tracasseries administratives dans les normes de construction, qui découragent les communes et les entreprises pourtant prêtes à construire des crèches.
Nous vous demandons d'envoyer cette motion à la commission de l'enseignement afin de l'étudier de manière concertée. J'insiste sur cet aspect, parce que nous avons tous intérêt à ce que des crèches se développent à Genève, ce qui permettrait aux femmes de reprendre une activité professionnelle.
M. Hugues Hiltpold (R). Je voudrais tout d'abord rappeler que la politique de la petite enfance a été instituée par Guy-Olivier Segond, puis développée par Michel Rossetti, tous deux magistrats radicaux en Ville de Genève, à qui je rends hommage ce soir, c'est important. (L'orateur est interpellé.) Monsieur Etienne, certains gouvernent, d'autres administrent !
Je voudrais vous dire que personne ne remet en cause la politique de la petite enfance, mais force est de constater que, dans un certain nombre de communes, toutes n'agissent pas avec le même engouement. A la Ville de Genève, la politique de la petite enfance est bien engagée, elle est constante et cela fonctionne très bien. En revanche, dans un certain nombre d'autres communes, cela ne fonctionne pas de la même façon et l'on peut se poser deux ou trois questions par rapport à cela.
On peut se poser la question du coût. Dans certaines communes - les plus petites, en l'occurrence - la petite enfance a un certain coût. Et c'est dans cet état d'esprit que cette motion PDC réunit les deux autres motions qui traitent de la même chose - parce que je crois, Madame la présidente, que nous débattons l'ensemble des trois motions sur cette thématique.
En gros, il y a deux types d'invites. Les premières invites concernent les normes. On peut remettre en question les normes d'encadrement et les normes de construction. Nous aurons ce débat sur les crèches, mais nous devrions aussi l'avoir à propos d'autres bâtiments publics - je pense notamment à l'école - mais c'est un autre débat que nous aurons peut-être un jour.
L'autre invite proposée par la motion radicale demande l'instauration d'une fondation de droit privé, pour donner une impulsion et faire un lien, afin que les communes les moins bien loties financièrement puissent également pratiquer une politique de la petite enfance.
C'est pour toutes ces raisons que nous vous invitons, Mesdames et Messieurs les députés, à renvoyer ces trois motions à la commission de l'enseignement. Nous devons avoir un débat général sur la question des normes d'encadrement et de construction, de façon que nous puissions nous déterminer sur ce que nous voulons en matière de politique de la petite enfance.
Mme Gabrielle Falquet (S). Ce n'est pas sans une certaine émotion, et surtout une grande joie, que je prends la parole sur ce sujet. En effet, lire dans cette enceinte trois motions à propos de la petite enfance me fait penser que, enfin, le parlement a décidé de mener une vraie politique de la petite enfance. Bien évidemment, ces trois textes m'ont amenée à un certain nombre de réflexions que je me permets de vous livrer ce soir.
Se préoccuper de la petite enfance au niveau politique, ce n'est pas seulement s'occuper des normes de construction et d'encadrement. Se préoccuper de la politique de la petite enfance, c'est aussi affirmer la volonté de donner une place dans notre société à l'enfant de moins de quatre ans; c'est donner la possibilité aux femmes et aux hommes de travailler, d'apporter leur contribution à l'économie, et c'est aussi donner aux employeurs la possibilité de compter sur des collaboratrices et des collaborateurs déchargés du souci de savoir si leur enfant est bien ou mal encadré. La petite enfance, c'est aussi et surtout les enfants. Des enfants qui se construisent, des enfants qui se socialisent et des enfants qui se développent ! La petite enfance, ce n'est pas seulement - malgré l'ironie et comme j'ai pu le lire, entre l'écart des crochets des lavettes ou des linges - les normes d'encadrement.
Mesdames et Messieurs les députés, j'espère que ce parlement fera un choix politique sur ce sujet, un vrai choix digne de ce nom, et non un choix au rabais ! Si je me permets d'utiliser ces termes, c'est que certains éléments de ces trois textes me font quelque peu souci. Vous parlez des normes de construction, j'entends, mais je vous rappelle que les crèches sont ouvertes - si l'on parle uniquement du bâtiment - tous les jours ouvrables, pendant douze heures d'affilée... Et certains enfants passent onze heures d'affilée dans ces structures; ils y dorment, ils y jouent, ils y mangent. Et il faut leur offrir des locaux adéquats, dignes de ce nom, on ne peut pas simplement les installer dans des petits parcs de quelques mètres carrés.... Je me permets de vous rappeler que les communes sont aussi à l'origine de certains coûts financiers exponentiels. Permettez-moi d'ironiser, mais chaque commune est libre - oui ou non ? - de choisir des robinets en or... C'est comme pour les écoles.
La petite enfance me fait aussi souci quand vous parlez des normes d'encadrement, Mesdames et Messieurs ! Les normes d'encadrement sont définies par des règlements, par des normes qui ne sont pas seulement genevoises. S'occuper des enfants, c'est une responsabilité ! S'occuper des enfants dans notre société, c'est aussi leur donner un avenir, c'est garantir le respect du développement individuel de chaque enfant. On parle aussi d'une certaine insertion, d'une certaine adaptation et d'une certaine solidarité... Rappelons-nous que l'enfant est une personnalité.
La troisième réflexion concerne le personnel. J'ai remarqué dans l'une des motions que l'on parle beaucoup de ce personnel, qualifié ou non. Peut-on engager des bénévoles ou des personnes au chômage ? Je vous rappelle que, pendant de nombreuses années, il y a eu une lutte, importante, pour reconnaître l'ensemble des métiers de la petite enfance ! Et ce n'est pas aussi lointain que cela. L'ensemble du personnel qualifié qui s'occupe aujourd'hui de l'avenir des enfants de 0 à 4 ans est quelque chose d'important.
Mesdames et Messieurs, je vous livre simplement ces quelques réflexions, puisque ces motions seront renvoyées. Mais ne restez pas uniquement sur votre siège, en commission de l'enseignement ou dans une autre, écoutez les gens du terrain; recevez les professionnels ! Surtout, ayez le courage de participer, de faire un stage dans les structures de la petite enfance ! Afin que l'on puisse dire à Genève que l'on veut une politique de la petite enfance, avec un parlement qui mènerait une vraie politique dans ce sens, sans clivages, pour le bien de notre société.
Mme Beatriz de Candolle (L). La proposition de motion 1720 pour un assouplissement des normes de construction des institutions de la petite enfance ainsi que la motion 1721 demandant un accueil élargi de la petite enfance font écho à ce que les libéraux ont toujours demandé: l'allégement des normes de construction et d'encadrement pour les structures de la petite enfance.
Comme mes préopinants l'ont relevé, il est évident que la situation actuelle décourage aussi bien les collectivités publiques - les communes - que les privés à créer des crèches. Quand on sait que le prix d'une place de crèche coûte en moyenne 25 000 F et qu'il est égal au coût annuel de la même place en exploitation, vous conviendrez que ceux qui nous écoutent peuvent comprendre la raison de la pénurie des places pour leurs enfants. Je rassure Mme Falquet: l'allégement des normes ne signifie pas forcément une qualité d'accueil moindre.
La motion 1717 propose quant à elle une innovation en la matière, qui mérite d'être étudiée en commission.
Raison pour laquelle le groupe libéral vous encourage à renvoyer les trois motions à la commission de l'enseignement. (Applaudissements.)
Mme Morgane Gauthier (Ve). Pour notre groupe, nous nous exprimerons à deux voix. Je ne m'exprimerai que sur la motion 1720 qui traite des normes de construction des institutions de la petite enfance.
La motion demande d'assouplir certaines règles ou critères techniques qui figurent dans un «livre blanc», tel que nommé par les motionnaires.
Ce qui semble important pour notre groupe est que chaque famille puisse avoir le choix du mode de garde pour ses enfants. Il est vrai que les places en crèche sont aujourd'hui insuffisantes, et trouver une solution passe souvent par la commune où l'on habite, qui est elle-même en charge de ces dossiers.
Ce qui pose problème, c'est bien le désengagement de certaines communes qui envoient les jeunes enfants dans les communes avoisinantes. Une première mesure consisterait donc à contraindre les communes à offrir des places à leurs propres enfants.
Il faut donc réfléchir en termes de péréquation communale, et cette dernière doit être revue car le problème principal des crèches se situe bien à cet endroit.
Pour nous, les normes de construction peuvent être revues et discutées, mais cela suppose un examen minutieux, et c'est pour cela que nous vous demandons le renvoi de cette motion - bien précise - sur les normes de construction à la commission des travaux et le renvoi des deux autres à une autre commission. Il faut bien distinguer les problèmes, et c'est pourquoi cette motion 1720 doit être renvoyée à la commission des travaux.
M. Gilbert Catelain (UDC). Ce thème de la petite enfance a été largement débattu ces dernières années en commission de l'enseignement et très récemment - l'an dernier - à la commission de l'économie. D'ailleurs, la motion PDC sur l'assouplissement des normes de construction est directement issue des travaux de la commission de l'économie, lorsqu'on a traité le thème des crèches d'entreprises. C'est donc une motion opportuniste - que nous soutenons par ailleurs, car le fond est juste - mais le débat a déjà eu lieu en commission et les commissaires sont parfaitement au courant. C'est donc une motion que l'on pourrait transférer directement à la commission des travaux.
Ces différentes motions nous disent quoi ? Que les coûts de fonctionnement des crèches sont trop élevés et qu'il y a pénurie des places de crèche. Et dans tous les domaines d'activité, si vous voulez élargir l'offre, vous devez réduire les coûts ! Pour cela, il y a deux manières: agir sur les structures, sur le bâti. Le bâti, ce sont les normes de construction; les structures, ce sont les normes d'encadrement et les conventions collectives. Il faut savoir qu'à Genève nous avons la convention collective la plus généreuse de Suisse - ou du monde - avec sept ou huit semaines de congé par année. Tant que l'on aura des structures aussi rigides et tant que, chaque fois que l'on ose parler de toucher à ces conventions il y a une levée de boucliers dans les médias par lettres de lecteurs interposées, jamais on aura une politique de la petite enfance dans ce canton !
Je rappelle que la politique de la petite enfance ne se limite pas aux crèches, il s'agit aussi de développer l'emploi de proximité pour les mamans de jour. Et nous pouvons développer plusieurs centaines, voire plusieurs milliers d'emplois grâce aux mamans de jour, puisqu'on se dispense de payer les infrastructures en finançant ce type d'activité. C'est l'une des pistes des deux candidats à l'élection présidentielle française - surtout de la socialiste Ségolène Royal - et c'est un potentiel d'emplois très important dans une économie où les deux parents travaillent. En résumé, nous devrions élargir le débat aux autres possibilités de garde d'enfants.
Pour le reste, je propose que la motion 1717 soit renvoyée directement au Conseil d'Etat; que la motion 1721 consistant à revoir les normes d'encadrement soit aussi renvoyée directement au Conseil d'Etat et que la motion 1720 soit, quant à elle, renvoyée à la commission des travaux.
Mme Sandra Borgeaud (Ind.). Je soutiens bien évidemment le renvoi de ces trois motions dans les commissions proposées et, puisque ces objets sont liés, autant faire le travail en une seule fois et correctement, on gagnera du temps.
Effectivement, Genève manque cruellement de crèches, ce n'est un secret pour personne. Une grande majorité de mamans ne peuvent malheureusement pas cesser de travailler, ce n'est pas forcément par choix mais souvent par obligation, pour des raisons financières - et, la plupart du temps, ces mères ont beaucoup de mal à se séparer de leurs enfants, surtout quand ils sont tout petits.
Quant à la construction des crèches, je suis également d'avis qu'il faut alléger les conditions pour en construire un peu plus, que ce soit au niveau public ou privé. Mais il faut surtout être très vigilants en ce qui concerne la sécurité; il ne faut pas construire n'importe comment, car il en va de la sécurité de nos enfants. Et nos enfants sont notre avenir.
Pour conclure, je relève dans la motion 1721 une idée très intelligente à explorer. Bon nombre de personnes âgées - pas des centenaires non plus, mais des personnes âgées qui sont encore en très bonne forme, en bonne santé, qui sont seules, délaissées parce que leurs propres enfants ne s'occupent plus d'elles - auraient probablement beaucoup de plaisir à s'occuper de petits enfants, ce qu'elles ne peuvent peut-être pas faire au sein de leur famille, si elles en ont une. Et pourquoi pas aussi des jeunes chômeurs ou chômeuses ? Cela pourrait leur permettre de faire un stage, de ne pas rester à la maison à ne rien faire. Evidemment qu'une formation devrait être suivie, pour des questions de sécurité, car on ne peut jamais quitter un enfant des yeux. Il faudrait effectuer une sélection des personnes à qui l'on confie la vie de nos enfants, cela pour préserver la sécurité de ces derniers, c'est ce qui nous importe le plus.
M. Eric Stauffer (MCG). Il me semble que l'on n'a pas très bien ciblé le débat et, si vous me le permettez, je vais vous dire pourquoi.
Tout le monde l'a relevé, tout le monde est unanime, Genève manque de crèches; on n'a pas inventé la poudre en le répétant. Par contre, j'ai entendu dire que les femmes ont droit au travail... Oui, bien sûr, mais je crois que le débat est complètement faussé. Ce n'est pas qu'elles n'ont pas droit au travail, c'est que malheureusement, dans la société dans laquelle on vit, tous les maris ne gagnent pas 10 000 F par mois pour subvenir aux besoins de leur famille... Et leurs épouses sont obligées de travailler. Pour survivre. Alors, ce n'est pas un droit, c'est une obligation ! Et c'est donc une obligation pour l'Etat de construire des crèches en suffisance, ne serait-ce que pour faire tourner l'économie. Encore une fois, les chiffres sont révélateurs: en 2005, 70 000 Genevois ont demandé un délai de paiement pour leurs impôts; la même année, il y a eu 257 000 commandements de payer. Ouvrons les yeux, Mesdames et Messieurs les députés ! Les crèches sont une nécessité pour que l'économie fonctionne.
J'ai entendu des couples qui disaient: «Oui, on va faire un enfant, mais il faut d'abord qu'on s'inscrive à la crèche pour savoir si on aura une place, car on ne peut pas ne pas travailler tous les deux, sinon on n'arriva plus à payer nos factures.» Où en est-on arrivé ? C'est lamentable ! Aujourd'hui, c'est le niveau de construction des crèches qui va déterminer le taux de natalité sur le canton de Genève ! Mais au secours !
Les citoyens en ont assez de ces sempiternels discours qui durent des mois et des années: ils veulent de l'action ! Et l'action, c'est construire des crèches, donc de simplifier les mesures, évidemment en respectant les normes de sécurité. Il faut constuire des crèches, c'est juste l'avenir et la prospérité de notre République ! Raison pour laquelle le Mouvement Citoyen Genevois soutiendra le renvoi direct au Conseil d'Etat.
Mme Anne-Marie Arx-Vernon von (PDC). Vous me connaissez brève dans mes interventions. Donc, je prends la parole concernant la motion 1717, laissant ainsi à mes collègues un temps de parole toujours très utile pour dire combien, pour le parti démocrate-chrétien, la petite enfance est aussi importante que l'université. C'est aussi important, parce que tout ce que l'on investi dans le domaine de la petite enfance produit réellement un retour sur investissement. C'est pouquoi nous allons soutenir la motion 1717 de nos collègues radicaux, d'autant plus que notre excellente motion sur les crèches d'entreprises a déjà été étudiée et soutenue.
Nous sommes donc particulièrement attachés à tout ce qui permettra aux entreprises de construire des crèches - on sait qu'il faut à peu près un pool de 400 employés pour développer une crèche d'entreprise. On peut encourager le regroupement des entreprises et, quand on parle de PPP - ici ce serait plutôt CEP: communes, Etat et partenaires privés - eh bien, nous ne pouvons qu'encourager ce qui facilite la vie des familles et renforce effectivement l'économie genevoise.
Cet objet est donc à renvoyer à la commission de l'enseignement.
La présidente. Je passe la parole à Mme Véronique Pürro. Il vous reste, Madame la députée, une minute et trente secondes.
Mme Véronique Pürro (S). Très rapidement, je crois que l'on ne peut pas nier le problème. Il n'y a pas suffisamment de places dans les structures d'accueil existantes et les réalités, notamment en termes d'horaires de travail, ne sont pas assez prises en compte dans l'offre actuelle. Et n'oublions pas - je crois que cela n'a pas encore été dit - qu'il n'y pas suffisamment de personnel qualifié aujourd'hui dans notre canton pour permettre de développer le nombre de places de crèches.
C'est vrai que le problème existe, mais les solutions que nous proposent ces deux motions... Je n'irai pas jusqu'à dire que ce sont des motions opportunistes, comme l'a fait M. Catelain, mais que les solutions proposées sont une farce... Parce que ce qu'il faut - et on le sait tous - ce sont des moyens supplémentaires pour, précisément, créer de nouvelles structures et pour former davantage de personnel qualifié.
Laisser entendre qu'en assouplissant les normes d'encadrement on va régler toutes les questions et tous les problèmes, c'est une farce ! Il faut que nous prenions nos responsabilités en tant que canton et que les communes prennent aussi les leurs, cela a été dit. Certaines, à l'image de la Ville de Genève, font un effort considérable; d'autres s'en lavent les mains, puisqu'elles renvoient sur la Ville ou ailleurs les parents qui ont des enfants.
Finalement, il y a un dernier acteur: les entreprises. Là aussi, je crois qu'elles doivent prendre leurs responsabilités ! Parce que, comme l'a dit M. Stauffer, les crèches coûtent, mais elles rapportent. Et elles...
La présidente. Il va falloir conclure, Madame la députée.
Mme Véronique Pürro. Je conclus. Elles permettent aussi à certaines familles de tomber dans la pauvreté. C'est donc un investissement utile qui rapporte.
Aussi, Mesdames et Messieurs, le meilleur service que nous pourrions nous rendre pour développer les crèches, ce sont des financements supplémentaires au niveau cantonal et au niveau communal.
Mme Michèle Künzler (Ve). Concernant le domaine de la petite enfance, je pense qu'il faut aller vers une solution beaucoup plus globale, et il y en a plusieurs. On parle de mamans de jour, mais il faut aussi les rémunérer, et pas 4 F de l'heure comme actuellement ! Il faut plus de crèches, mais peut-être faut-il aussi réfléchir à prolonger le congé maternité. On nous donne un prix de 30 000 F en moyenne, mais la réalité c'est qu'une personne qualifiée ne peut s'occuper que de quatre bébés de quatre mois, et c'est logique - tous ceux qui ont des enfants le savent. Donc, si vous prolongez le congé maternité - même à une année - cela libère tout de suite le double de places de crèche. Il y a là des possibilités et des réflexions plus globales sont nécessaires dans ce domaine.
Il est frappant de voir que, pour un travail qui a été accompli principalement par des femmes - et accompli en silence - on ne disait rien... Personne ne s'étonnait du coût ! Mais il existait ce coût ! Or maintenant ce coût apparaît, et il n'est pas trop élevé pour un travail qualifié. Et toutes les femmes qui l'ont effectué auparavant l'ont fait gratuitement ! Alors, on ne va pas continuer à effectuer ce travail sans qu'il y ait une reconnaissance.
Il y a une autre chose importante, c'est l'intégration des bénévoles... Mais où est-ce que vous allez trouver ces centaines, ces milliers de bénévoles nécessaires ?! On ne peut pas imaginer que des bénévoles s'engagent huit heures par jour, chaque jour de la semaine ! Ce n'est simplement pas possible ! Et pour ce qui est des chômeurs, il faut qu'ils puissent quitter à tout moment ce travail de bénévolat pour reprendre un emploi: ils y sont tenus ! C'est donc aussi une fausse solution.
Je vous invite à aller en commission, et vous verrez que les propositions contenues dans la motion 1721 ne permettront pas d'économiser beaucoup... Alors, étudions-les - nous pouvons discuter de tout, nous n'avons pas de tabous - mais je ne crois pas que ce qui est proposé ici apportera la moindre solution. Renvoyez ces motions à la commission de l'enseignement !
Mme Véronique Schmied (PDC). J'aimerais simplement répondre aux deux préopinantes du groupe socialiste: oui, on veut une politique de la petite enfance dans les communes; non, ce n'est pas en travaillant sur les normes que l'on va régler tous les problèmes, c'est clair. Mais on va en régler quelques-uns.
Ce que l'on aimerait bien, c'est mettre en place dans ce canton une politique réaliste de la petite enfance. Je pense que les communes qui sont responsables de mettre en place des infrastructures sont entravées par toutes les normes auxquelles elles sont soumises - dont je ne vais pas faire la liste, ce serait extrêmement fastidieux. Il faudrait ensuite justifier cette liste et ce serait incompréhensible pour la plupart des téléspectateurs qui nous regardent en ce moment. (Brouhaha.)
Il y a un problème: les communes n'ont souvent plus la capacité de répondre aux besoins que représente cette demande énorme des familles. Elles n'en ont plus les moyens soit sur le plan financier pour la construction, soit une fois qu'elles sont construites. Mesdames et Messieurs, je suis actuellement en charge du dicastère des affaires sociales et de la jeunesse dans ma commune de Versoix où l'on a construit une crèche. Mais on ne va pas pouvoir la remplir, parce qu'on ne peut pas payer les salaires... On ne peut pas prendre les 2 millions de subventions nécessaires au fonctionnement de cette crèche et payer les salaires, ce n'est pas possible ! Donc, on va ouvrir vingt places l'année prochaine, peut-être vingt autre l'année d'après, on ne sait pas... Et l'on attend de voir quelles seront les recettes fiscales... C'est inadmissible !
Dans cette situation, on rend les communes complices d'une situation de non-accueil en crèche, car, une fois que l'on a vraiment rempli tout le cahier des charges pour que les enfants soient accueillis de manière optimale dans une crèche, voire dans les familles d'accueil - et là, il y a encore des choses à discuter - eh bien, il y a encore des dizaines ou des centaines d'enfants qui, sur la commune - des enquêtes anonymes auprès de la population le prouvent - sont gardés de façon tout à fait aléatoire ! Et cela dans toutes les communes, parce que c'est à peu près partout la même chose, plusieurs enquêtes dans plusieurs communes l'ont démontré.
Donc, si l'on peut placer un enfant, parce qu'on a une place en or - et je le dis au sens propre comme au sens figuré, car Dieu sait si les familles ont besoin de ces places - eh bien, il y en a deux autres qui sont placés à la va-comme-je-te-pousse: un jour chez une voisine; un jour chez une grande soeur qui va rester parce que l'enfant est malade; un jour à droite, un jour à gauche... Et les communes sont rendues complices à cause de ces lois et de ces règlements d'application extrêmement exigeants !
Alors, Mesdames et Messieurs, voyez aussi que qui commande paie ! Et qui commande en l'occurrence ? Ce sont les communes. Ou bien, qui paie commande... Cela marche dans les deux sens. Qui commande actuellement ? C'est l'Etat ! Qui paie ? Ce sont les communes ! Là, il y a un hiatus. Je sais qu'actuellement l'Etat met à disposition environ 2 millions de subventions par année et les communes en versent 60 millions... Et elles n'ont absolument pas leur mot à dire sur la façon dont elles peuvent réaliser ces places de garde !
On peut donc se bercer de bons sentiments et trouver que c'est bien de pouvoir accueillir les enfants dans des conditions idéales - bien sûr qu'on aimerait le faire - mais on n'en a pas les moyens. Alors, on fait quoi ? On ne crée pas de places, et on a des quantités d'enfants gardés d'une manière dont on ignore les conditions. Pour garder 100 enfants dans une crèche, si au même prix on pouvait en accueillir 150, ou même 130, on aurait gagné quelque chose ! Et c'est juste cela que cette motion demande. (Brouhaha.)
En ce qui concerne le bénévolat, et je terminerai par là, c'est clair qu'il ne suffit pas de claquer des doigts pour avoir des bénévoles compétents, sympathiques, à disposition, etc. ! Mais il y a dans ce canton toutes sortes de réinsertions dans le monde du travail, pour diverses de personnes, telles que des préretraités qui se meurent d'ennui tous seuls chez eux et qui dépriment... Ce sont des gens qui auraient envie de s'investir et on les en empêche. Et cela, c'est du protectionnisme - peut-être syndical, disons en tout cas professionnel - qui empêche ces gens d'aller dans des structures dans lesquelles ils se rendraient utiles. Je dirai qu'ils pourraient favoriser une «double détente» dans le domaine social: créer des places supplémentaires et rendre service à ces gens sur la touche. (Applaudissements.)
Mis aux voix, le renvoi de la proposition de motion 1720 à la commission de l'enseignement et de l'éducation est adopté par 40 oui contre 30 non.
Mis aux voix, le renvoi de la proposition de motion 1717 à la commission de l'enseignement et de l'éducation est adopté par 73 oui et 1 abstention.
Mis aux voix, le renvoi de la proposition de motion 1721 à la commission de l'enseignement et de l'éducation est adopté par 69 oui contre 3 non et 1 abstention.