République et canton de Genève

Grand Conseil

La séance est ouverte à 8h, sous la présidence de M. Michel Halpérin, président.

Assistent à la séance: MM. Pierre-François Unger, président du Conseil d'Etat, Charles Beer, David Hiler et François Longchamp, conseillers d'Etat.

Exhortation

Le président. Mesdames et Messieurs les députés, prenons la résolution de remplir consciencieusement notre mandat et de faire servir nos travaux au bien de la patrie qui nous a confié ses destinées.

Personnes excusées

Le président. Ont fait excuser leur absence à cette séance: MM. Laurent Moutinot, Robert Cramer et Mark Muller, conseillers d'Etat, ainsi que Mmes et MM. David Amsler, Luc Barthassat, Eric Bertinat, Maurice Clairet, Pierre Ducrest, Gabrielle Falquet, Sophie Fischer, Mariane Grobet-Wellner, Antonio Hodgers, Georges Letellier, Christian Luscher, Patrice Plojoux, Pierre-Louis Portier, Henry Rappaz, Pierre Schifferli, André Reymond, Louis Serex, Ivan Slatkine et René Stalder, députés.

Annonces et dépôts

Néant.

Le président. Nous allons aborder le point dominant d'aujourd'hui, le budget. Vous devriez avoir sur vos places le projet de budget 9677-A du Conseil d'Etat. Je passe la parole à M. le rapporteur de majorité.

PL 9677-A
Rapport de la commission des finances chargée d'étudier le projet de loi du Conseil d'Etat établissant le budget administratif de l'Etat de Genève pour l'exercice 2006 (D 3 70)

Premier débat

M. Alberto Velasco (S), rapporteur de majorité. En préambule, j'aimerais que l'on puisse ajouter une première page à mon rapport - je l'avais oubliée - où figurent les noms des personnes ayant participé à nos travaux et les remerciements qui leurs sont présentés. J'aimerais que cette page figure avant l'introduction.

Concernant le budget qui vous est présenté, et comme il l'est écrit dans mon rapport, il est important de retracer le contexte dans lequel nos travaux se sont déroulés - la minorité le fait aussi dans le sien. Il y a eu un changement de majorité au gouvernement, le parlement a été modifié dans sa composition politique et la commission a vu le groupe AdG partir et le groupe MCG arriver. Au mois de décembre, nous avons donc dû suspendre les travaux sur le budget de l'ancienne composition du Conseil d'Etat et attendre début janvier pour connaître les dispositions du nouveau Conseil d'Etat. L'exercice fut d'autant plus compliqué qu'il y a eu une modification des départements - des nouveaux départements ont même été créés - dans un contexte de douzièmes provisionnels, ce qui a vraiment compliqué la tâche du Conseil d'Etat et celle des députés. Nous nous sommes donc retrouvés dans des conditions très difficiles pour travailler sur le budget.

Néanmoins, il faut saluer le travail réalisé par le gouvernement et par les fonctionnaires de l'administration fiscale qui ont pu mettre à disposition les documents nécessaires pour que nous puissions aujourd'hui voter ce budget.

Concernant la chronologie financière, ce budget a été déposé en décembre 2005, avec, au départ, un déficit de 305 millions. Il est ensuite passé par une phase à 318 millions et, à un moment donné, on a même informé la commission des finances que le déficit pourrait dépasser les 400 millions, car le Conseil d'Etat a décidé de ne pas adjoindre au budget des recettes liées à un possible vote du peuple.

Au mois de décembre, le Conseil d'Etat annonçait qu'il y avait une possibilité pour que le déficit dépasse largement les 305 millions et atteigne en réalité 450 millions. Or, au mois de mai, nous avions un autre chiffre de 318 millions, et enfin de 305 millions. Il est évident que ce chiffre de 305 millions a pu être obtenu grâce à une réévaluation des recettes de l'Etat.

Le retrait du projet PL 9706 - un projet fiscal - a représenté une diminution de 126 millions dans les recettes de l'Etat, mais une actualisation des provisions fiscales a eu comme effet une augmentation des recettes de 110 millions, ce qui fait que l'on vous présente les chiffres que vous connaissez aujourd'hui.

De plus, une série d'amendements du Conseil d'Etat et de la commission des finances - vous les connaissez, car ils sont retracés dans mon rapport - totalise une somme de 11 millions. A la sortie de la commission des finances, le déficit s'élève donc à 294 millions.

Une voix. C'est déjà pas mal !

M. Alberto Velasco. Effectivement, c'est un déficit acceptable en regard de la LGAF, mais je dirai qu'il a été «amélioré» par la commission des finances. Ainsi, les charges de l'Etat se montent à 7,109 milliards - environ - et les revenus à 6,816 milliards. D'après les informations qui m'ont été données par le département des finances, les charges courantes sans imputations internes et subventions redistribuées sont en légère baisse de 1,7% et les revenus sans imputations internes et subventions redistribuées ont augmenté de 0,39%.

On va parler du rapport de minorité, puisqu'une partie de ce parlement n'a pas désiré suivre la majorité votante de ce budget. J'ai constaté que les éléments fondamentaux de discorde étaient plutôt des éléments de forme. Le rapport de minorité s'attache à nous dire que les conditions de travail dans notre commission ont rendu difficile le vote de ce budget, mais je peux vous dire que la raison fondamentale pour laquelle le groupe libéral n'a pas voté ce budget est surtout la reconduite partielle des mécanismes salariaux, car il a considéré cela comme inadmissible. C'est d'autant plus vrai que le rapporteur de minorité en question devait faire le rapport de majorité, et c'est au moment du vote final qu'il a pris la décision contraire. En somme, le groupe libéral n'a pas désiré voter ce budget pour les raisons que je vous expose, c'est-à-dire la reconduction des mécanismes salariaux.

Dans le contexte que nous connaissons aujourd'hui, si nous voulons obtenir une certaine stabilité de fonctionnement dans cette république, il est important d'appuyer le Conseil d'Etat dans cette initiative qui va dans le sens d'une politique de concertation et de voter l'attribution de ces 12 millions à des mécanismes salariaux.

En ce qui concerne l'UDC, la raison était toute autre. Ce groupe a considéré que les économies faites ou présentées n'étaient pas à la hauteur de ses espérances; il aurait souhaité voir beaucoup plus de coupes, même s'il n'a pas dit lesquelles à la commission des finances. C'est ce qui a conduit le groupe UDC à refuser ce budget.

Par conséquent, vous avez une majorité composée des Verts, des socialistes, des radicaux, du MCG et du PDC. Ces groupes n'ont pas voté le budget sans aucun a priori, puisqu'il y a quand même....

Le président. Monsieur le rapporteur, je voudrais vous rendre attentif à l'écoulement du temps. Il est déjà largement dépassé.

M. Alberto Velasco. Je termine. Toute une série d'éléments faisaient que tous ces groupes auraient aussi pu ne pas voter le budget, le problème de l'Hospice, la Solidarité Internationale, les fonds d'équipements, etc. Enfin, les uns et les autres auraient pu trouver suffisamment d'arguments pour ne pas voter le budget, mais il nous a semblé qu'il en allait d'une certaine responsabilité politique que de voter le premier budget de ce nouveau Conseil d'Etat et, surtout, il fallait affirmer la volonté de stabiliser les dépenses et arriver à un équilibre budgétaire. Il nous a donc semblé important de donner ce signal fort, signifiant l'appui à ce gouvernement, en votant le présent budget.

M. Renaud Gautier (L), rapporteur de minorité. Sans vouloir répéter les propos que m'accorde très généreusement le rapporteur de majorité, je voudrais quand même attirer votre attention sur un ou deux points qui m'ont l'air «cardinalement» importants, si tant est que cette expression ait encore cours à Genève.

L'une des missions fondamentales du parlement réside dans le contrôle des activités gouvernementales. Ce contrôle s'exerce notamment à travers le vote du budget et des comptes, comme l'indique très clairement l'article 2 de notre loi portant règlement du Grand Conseil. Les articles 137 à 139 de la même loi codifient le déroulement de ces votes, tandis que l'article 201 précise le rôle de la commission des finances chargée d'examiner les comptes du budget ainsi que les demandes de crédits supplémentaires extraordinaires. Le pouvoir donné au parlement est donc discrétionnel, car il a tout loisir d'accepter, de modifier ou de refuser le budget et les comptes d'Etat. Mais la loi B 101 se garde bien d'énoncer les critères qui pourraient présider au choix des députés; de tels critères n'auraient d'ailleurs pas leur place dans une telle loi. Pourtant, des critères qui conditionnent nos votes de députés existent et ils sont de deux ordres, j'aimerais les rappeler ici. Le premier relève du champ du politique: soit on accepte le budget parce que l'on appartient à la majorité gouvernementale et que l'on se doit d'avaliser un projet concocté par son bord, soit on refuse le budget parce que l'on est dans l'opposition et que c'est là une occasion fort belle de manifester son antagonisme. L'autre ordre des critères du vote relève de nos responsabilités personnelles. Comme nous sommes élus, nous nous engageons, à chaque séance, à remplir consciencieusement notre mandat et faire servir nos travaux au bien de la patrie qui nous a confié ses destinées. Il s'agit donc de dépasser les options partisanes pour travailler dans le réalisme le plus impartial à des choix profitables à tous. En l'occurrence, il faut se poser les questions de fond concernant le budget, comme celle de sa véracité, de sa pertinence, de sa viabilité, et celle de ses conséquences socio-économiques et des choix politiques que cela implique.

Les travaux de la commission des finances n'échappent pas à ces critères tant politiques que réalistes. Nous devons en commission nous forger une conviction en étudiant, en interrogeant, en débattant, et nous devons aussi essayer de trouver au sein de cette commission des majorités qui nous permettent in fine d'évaluer, de statuer, de recommander, afin de préaviser pour la séance plénière, le parlement étant le seul à décider des suites qu'il entend donner aux travaux des commissions.

Au-delà du jeu politique, les députés membres d'une commission parlementaire devraient donc théoriquement bénéficier de toutes les informations et de tous les moyens disponibles pour se prononcer de la manière la plus éclairée possible, si ce n'est en leur âme et conscience. Dans le cas contraire, il nous apparaît qu'il est du devoir desdits députés, hors de toute prise de position partisane, de refuser de se prononcer à l'aveuglette, ou tout au moins sans la clairvoyance désirée, sur un sujet aussi complexe que le budget de l'Etat.

C'est la situation dans laquelle nous nous trouvons avec le budget 2006. Le Conseil d'Etat nous demande de nous prononcer sans nous fournir tous les moyens de nous forger une conviction. Les décisions que nous devons prendre et les recommandations que nous devons faire ne se basent nullement sur des arguments objectivement vérifiables, mais sur la foi que l'on nous demande d'accorder aux promesses qui nous sont faites.

Par le passé, les autorités de cette république n'ont cessé de se ruiner en promesses; et même si les engagements pris par l'actuel gouvernement s'avéraient plus sincères, ils ne sont accompagnés d'aucune garantie de réalisation et ne sauraient donc représenter une base d'appréciation pour le budget 2006, encore moins un élément de décision pour l'approbation de l'avenir financier de l'Etat.

A ce stade, j'estime donc que la commission des finances n'est pas en mesure de se prononcer sur le budget 2006. Le faire malgré tout reviendrait à trahir notre mandat et la confiance des députés qui nous ont désignés, et donc aussi celle des citoyens qui nous ont élus et envers qui nous sommes redevables.

De la même manière, Mesdames et Messieurs les députés, vous allez devoir choisir entre une acceptation purement partisane ou l'examen critique et réaliste du projet du Conseil d'Etat. Dans le deuxième cas - ce qui nous prendra du temps - je n'ai aucun doute que vous rejoindrez rapidement mon point de vue. Le budget sous sa forme actuelle n'est pas recevable, dès lors qu'il n'est pas formulé d'une manière telle que nous puissions exercer notre mandat avec tout le discernement voulu.

Le président. Je rappelle que chaque groupe bénéficie d'un débat de prise en considération d'un total de dix minutes par groupe.

M. Gabriel Barrillier (R). Lorsqu'à la fin de l'année dernière le groupe radical a voté le renvoi de la première mouture de ce budget 2006 au nouveau Conseil d'Etat, j'avais indiqué clairement que nous attendions que soient mises en oeuvre des réformes structurelles de l'Etat que notre parti attend depuis très longtemps. Depuis lors, le gouvernement s'est mis au travail avec détermination et, semble-t-il, avec collégialité. Il a ouvert les chantiers les plus urgents pour être en mesure de rétablir d'ici fin 2009 l'équilibre des finances. Il n'a d'ailleurs pas le choix, puisque le peuple a maintenant voté un mécanisme tout à fait clair pour freiner le déficit des finances et réduire l'endettement faramineux de notre canton.

Durant ces six mois, le groupe radical a pu se convaincre que les sept magistrats s'étaient mis d'accord pour fixer le cap, tracer la route et définir les délais pour sortir Genève et ses finances de l'ornière dans laquelle elle se trouve depuis fort longtemps. Même s'il n'est pas de la même majorité que le parlement, nous observons que le Conseil d'Etat gouverne, fixe une politique et s'engage. Certes, il n'a jusqu'ici pas encore proposé les remèdes de cheval que nous appelions de nos voeux au mois de décembre... Le premier train de mesures P-1 relève plutôt de l'homéopathie. Nous attendons avec impatience, le second train P-2 qui doit, nous l'exigeons, accompagner le projet de budget 2007 de cet automne.

Pour l'heure, Mesdames et Messieurs les députés, notre confiance à l'égard de cette équipe volontariste est encore grande et permet à notre groupe de voter ce budget 2006, qui est cette fois un budget-vérité. Nous ne le faisons pas par manque d'esprit critique ou par faiblesse politique, nous le faisons parce que nous avons le sens de la continuité de l'Etat et de l'intérêt général et que nous prenons nos responsabilités: nous n'entendons pas jouer les Ponce Pilate en laissant les autres mettre les mains dans le cambouis pour réparer l'appareil d'Etat ! (Remarques.)

Dans son bref rapport, notre collègue Renaud Gautier a justement rappelé que l'une des missions fondamentales du parlement réside dans le contrôle des activités gouvernementales... Et notamment par le vote du budget. Plus loin, il explique pour quelles raisons les députés peuvent l'accepter ou le refuser. Selon lui, ce peut être un pur acte d'opposition, fondé sur un simple rapport de majorité gouvernementale, ou bien relever de nos responsabilités personnelles d'élus pour - et je souligne ce passage - dépasser les options partisanes et travailler dans le réalisme le plus impartial à des choix profitables à tous. Eh bien, Monsieur le député - il est parti... Je ne sais pas où il est... - c'est en nous conformant à ce second principe que nous avons décidé de voter le budget 2006, et nous ne comprenons pas pourquoi le groupe libéral ne fait pas la même chose. Mais attention, Messieurs les conseillers d'Etat, il ne s'agit ni d'un chèque en blanc, ni d'une manifestation de confiance éternelle. En effet, le déroulement des négociations - si on peut les appeler comme cela - entre l'Etat employeur et la fonction publique nous inquiète beaucoup et motive notre extrême méfiance à l'égard du PL 9833-A, sur lequel mon collègue Kunz s'exprimera tout à l'heure.

Enfin, notre groupe se déterminera durant le débat sur les amendements qui seront présentés, mais je vous informe d'ores et déjà que nous ne nous prêterons pas à des marchandages d'épiciers pour des queues de cerises. (Applaudissements.)

Le président. Merci, Monsieur le député. Cinq minutes seront décomptées au groupe radical. (Un problème de micro interrompt la séance pendant quelques minutes.)

Mme Laurence Fehlmann Rielle (S). Je suis contente de voir que les radicaux ont cédé la parole et le micro. En préambule, le groupe socialiste salue le travail effectué par la commission des finances pour la mise sous toit du budget 2006 qui, comme on le sait, a été réalisé dans des conditions très difficiles. Tout cela est relaté dans l'excellent rapport de notre collègue Alberto Velasco. Nous relevons également le travail de l'administration qui a dû s'adapter à la fois à la réorganisation des départements, au projet 2006 amendé et au bouclement des comptes.

Concernant le budget proprement dit, nous tenons à rappeler le leitmotiv du Conseil d'Etat, à savoir qu'il entend assainir les finances publiques à petits pas, sans baisses de prestations ni hausses d'impôts - cela a été dit à maintes reprises.

Les socialistes se reconnaissent dans une politique qui prône le rétablissement en douceur des finances publiques pour arriver à une gestion durable des finances de l'Etat. Mais au-delà des discours rassurants, il est à craindre que l'assainissement des finances de l'Etat ne puisse se réaliser avec seulement des mesures de rationalisation, dont certaines comportent des baisses de prestations déguisées - je fais référence aux septante-trois mesures dont un certain nombre n'ont pas encore été chiffrées. A notre avis, il faudra certainement trouver de nouvelles recettes, soit en comptant sur la reprise économique, soit en rétablissant une fiscalité plus équitable. Mais cela concerne le budget 2007.

Pour l'heure, nous reconnaissons également au Conseil d'Etat le mérite d'avoir renoué le dialogue avec la fonction publique, même si le rythme des négociations s'est ralenti ces dernières semaines - budget oblige - et si l'on attend toujours des propositions de sa part concernant les amendements au projet inique de la droite qui veut supprimer le statut de la fonction publique. Cependant, le rétablissement des mécanismes salariaux, même partiel, représente à nos yeux un signe très positif.

Pourtant, il y a quand même des points noirs dans ce budget. Nous constatons que la seule mesure d'économie a été faite au détriment des bénéficiaires de l'assistance. En effet, vous le savez, les forfaits vêtements et TPG ont été supprimés au premier janvier 2006. Cette mesure, qui sera couplée à l'entrée en vigueur des normes CSIAS, représente une économie de 18 millions pour l'Etat.

Les socialistes et les Verts ont récemment déposé une motion pour demander au Conseil d'Etat de revenir sur cette décision, parce qu'il nous semble tout à fait inacceptable de faire passer à la caisse les plus démunis si on ne demande pas parallèlement un sacrifice aux plus nantis de notre société. C'est une question de cohérence et de justice sociale ! Nous avons donc déposé un amendement qui sera défendu par la suite, quand on passera en revue les départements.

De la même manière, nous ne pouvons pas admettre les baisses de subventions qui concernent Solidarité Internationale. Je rappelle que notre canton dispose encore de ressources suffisantes et que nous sommes loin du 0,7% du budget de fonctionnement qui devrait être normalement affecté au soutien à des développements dans les pays du Sud. On constate, une fois de plus, que ceux qui se font les chantres de la Genève internationale n'hésitent pas à opérer des coupes quand il s'agit de soutenir concrètement certains projets, et cela est inacceptable.

Donc, malgré les réserves que nous émettons sur le budget et contrairement aux libéraux et à l'UDC qui, cette fois, font cause commune, les socialistes estiment qu'il est primordial d'avoir un budget 2006. Et c'est pourquoi nous entrons en matière sur ce projet. (Applaudissements.)

Le président. Merci, Madame la députée. Vous avez parlé pendant quatre minutes et dix secondes.

M. Claude Jeanneret (MCG). Le groupe MCG - ni gauche ni droite - a examiné le budget proposé avec impartialité. Nous avons eu le plaisir de constater une volonté manifeste du nouveau gouvernement de travailler de manière collégiale et dans la direction souhaitée, à savoir un retour à l'équilibre du budget par une approche intéressante qui se focalise principalement sur la gestion des coûts, c'est-à-dire sur ce qui peut être géré dans l'immédiat, avec une projection de diminution des coûts sur une période de quatre ans qui devrait conduire à l'équilibre du budget.

L'équilibre dépend aussi des recettes, et il est difficile de parler d'équilibre avant de savoir ce que l'on va recevoir comme recettes. Mais il est surtout important de dire que l'on neutralise l'évolution des coûts, et il est clair qu'à partir de là on peut travailler sur les recettes.

Du côté du MCG, nous portons notre attention sur les actions du nouveau gouvernement pour augmenter les recettes. Je pense notamment à l'accroissement des logements disponibles, pour conserver les travailleurs à Genève et qu'ils dépensent leur argent sur place. Par cette action, nous allons augmenter les recettes, ce qui est très important. Il ne faut pas oublier qu'aujourd'hui, si on fait une estimation - ce ne sont pas des chiffres précis - on peut dire qu'on exporte à peu près un quart de notre PIB hors du canton, autant dans le canton de Vaud qu'en France voisine.

Si l'on imaginait qu'une partie de ces recettes demeure à Genève, avec le mouvement d'accélération que cela génère, cela occasionnerait des profits et permettrait la création de petites entreprises, donc du travail sur place, et il faudrait également loger les gens.

La première phase du budget que nous acceptons aujourd'hui est une phase de contrôle des coûts, raison pour laquelle le MCG se montrera favorable à cette proposition de budget. Nous surveillerons avec attention le développement de l'activité de notre république, car nous attendons maintenant que les recettes s'accroissent, dans une politique de négociation avec nos différents partenaires, non par une augmentation ou modification des impôts, mais par l'accroissement des contribuables sur place.

Le président. Deux minutes et quarante secondes sont décomptées au MCG.

M. Gilbert Catelain (UDC). Le groupe UDC regrette les conditions dans lesquelles ce parlement a dû travailler en commission pour empoigner ce projet de loi sur le budget 2006. Nous regrettons que ce projet de loi ait été soumis tardivement à la commission et qu'un vrai travail de commission n'ait pas pu être effectué, car, version après version, les commissaires ont dû jongler et se contenter du minimum pour faire un choix important pour notre canton.

Dans le débat d'entrée en matière sur ce projet de loi 2006, je constate que la majorité des groupes va choisir de continuer à dévaler sur l'autoroute du surendettement qui se chiffre aujourd'hui à 13 milliards, uniquement pour l'endettement financier, sans compter les engagements de l'Etat. Ces différents groupes, parmi lesquels je compte les radicaux et certainement les démocrates-chrétiens qui vont, pour une fois, faire alliance avec la gauche et avec un Conseil d'Etat de gauche, vont donc nous endetter, et endetter les générations futures, et sur plusieurs générations, pour financer l'immobilisme de ce canton ! (Remarques. Brouhaha.)

Aujourd'hui, nous allons nous contenter de régresser du rôle de décideur politique, qui prend des options politiques en matière budgétaire, à celui de chambre d'enregistrement budgétaire. Observons ce qui se passe au sein de l'OCDE dans les pays occidentaux - le Canada, la Suède, la Nouvelle-Zélande, les Pays-Bas, et j'en oublie... (Rires.) Tous ces pays ont été confrontés à la même situation financière que notre canton, et ils sont parvenus à inverser la tendance et rétablir un équilibre budgétaire ! Il est quand même assez surprenant de voir que l'Espagne atteint un équilibre budgétaire - en plus, c'est un pays socialiste - avec une dette qui, en proportion du produit intérieur brut, est nettement inférieure à celle de notre canton. Tous les pays que j'ai cités ont été confrontés à ces difficultés d'endettement et de déficit budgétaire, ils ont dû prendre des décisions, et ils les ont prises. Ils ont pris une décision de principe: la réduction des dépenses publiques. Et depuis quatre ans que je siège dans ce parlement, je n'en ai jamais vu ! Depuis des années, ce canton ne cesse de vivre au-dessus de ses moyens: cette année, à hauteur de 5%, au moins, dans ses capacités financières, et dans les comptes cela évoluera négativement.

Nous n'avons apparemment pas pris la mesure de la menace à laquelle nous sommes confrontés. Nous devrions prendre une décision politique qui passe notamment par une réduction des dépenses budgétaires, car cela permet généralement de préparer le retour à la croissance et à la réduction du chômage. Il est d'ailleurs assez intéressant de relever que les cantons - notamment Genève - qui ont des déficits budgétaires et qui laissent exploser leur endettement sont confrontés à une faible croissance et à un taux de chômage élevé.

Ce que nous devons mettre en oeuvre par l'intermédiaire de notre politique budgétaire, c'est inciter à travailler davantage, restreindre l'Etat providence et imposer des normes de productivité et de modernisation à l'administration.

Le groupe UDC ne voit dans ce projet de loi aucune volonté d'assainissement, ni de préparation à la croissance économique, ni de retour au plein-emploi. Pour ces motifs, notre groupe sera contraint de ne pas voter l'entrée en matière de ce budget 2006.

Le président. Cinq minutes et vingt secondes seront décomptées à votre groupe.

M. Pierre Weiss (L). Le groupe libéral va s'opposer à ce budget, à regret, mais peut-être avec une prescience de ce que l'avenir, notamment le budget 2007 et l'action du Conseil d'Etat, va nous réserver. Je dois tout d'abord remercier M. Hiler et ses services pour avoir fait de leur mieux possible dans des circonstances difficiles, compte tenu du changement de gouvernement et dans la circonstance d'une restructuration des départements qui a modérément contribué à accroître la lisibilité de l'action de celui-ci et la compréhension par la commission des finances de ce qui était proposé. Il fallait donc des lunettes à plusieurs foyers pour réussir à voir où étaient les problèmes.

Il y a des chiffres; il y a aussi la signification des chiffres. Le déficit, on l'a dit, est environ de 300 millions, avec des retouches par amendement d'à peine une dizaine de millions de francs. C'est aussi, vous l'avez vu ce matin, non pas des queues de cerises, mais déjà 17 millions, ou davantage, d'amendements pour augmenter - à votre bon coeur - les dépenses de l'Etat, et souvent à des motifs sociaux, grâce à des gens que l'on connaît très bien et à des associations dont on est très proches et pour lesquelles on fait évidemment preuve de clientélisme.

Pourquoi allons-nous nous opposer à ce budget ? Parce qu'au fond une condition mériterait d'être remplie pour qu'il soit véritablement convainquant. Cette condition, le nouveau Conseil d'Etat l'a supprimée, car il a décidé de s'y opposer: c'est la question de la reprise des mécanismes salariaux. M. Velasco, excellent rapporteur de majorité, y a fait allusion tout à l'heure, et c'est effectivement la condition que les libéraux exigent pour l'adoption de ce budget, pour autant qu'il y ait entrée en matière - nous le verrons tout à l'heure - sur le projet de loi suivant qui concerne cette reprise. Là, on a affaire à un Conseil d'Etat qui a décidé de céder sur quelque chose d'important face à une pression, non pas de la rue mais une pression de ce qu'ils croyaient être la rue - un quarteron, trente-neuf personnes, peut-être quarante en moyenne pondérée horaire, qui se pressaient hier soir dans la rue de l'Hôtel de Ville...

Mais ce Conseil d'Etat a fait autre chose. Il a d'abord abandonné le précédent plan financier quadriennal qui avait le mérite d'exister. Il était accusé d'être un alignement de lois sur un bâton. Eh bien, pour le moment, le premier plan de mesures est un alignement de quelques chiffres partiellement articulés et inégalement précisés. Il faut effectivement louer la collégialité de l'action du nouveau Conseil d'Etat, mais c'est également le fait que ce Conseil d'Etat procrastine - en français courant «repousse» - les décisions. Il repousse, par exemple, la présentation du deuxième plan de mesures après la présentation du budget 2007, de même qu'il entend repousser la mise en vigueur du frein aux dépenses, avec des arguments juridiques qui, pour certains, ressembleraient à des arguties.

Ce budget se caractérise aussi dans la perspective de l'abandon du «ninisme» gouvernemental - le «ninisme», c'est pas de hausse d'impôts, pas de baisse de prestations. Mais - mais ! - on nous dit déjà qu'il y a des circonstances imprévues, des circonstances extérieures face auxquelles on ne peut rien faire... On ne peut rien faire quand la Confédération fait des erreurs de calcul, nous dit-on... Et nous fait passer de 1 million à 85 millions pour la nouvelle répartition des tâches... On additionne... Et on additionnera aussi, car, si la nouvelle loi fédérale sur les allocations familiales entre en vigueur, ce seront 30 millions que l'on devra additionner. Les conséquences... 17, 34, 51, au fil des ans. Dans deux ans, avec la reprise des mécanismes salariaux, ce n'est pas compliqué, ce seront 200 millions en plus - toute chose égale, par ailleurs - qu'il faudra considérer dans le total de l'addition.

On additionne d'un côté, de l'autre on se contente d'un protocole d'accords avec un cartel dit «de la fonction publique». Ce protocole d'accords n'a rien produit pour le moment. Pourquoi ? Les chefs de groupe des partis du centre et de la droite de ce parlement avaient demandé des indications au gouvernement, qui avait fixé un délai au 15 mai pour ces négociations et une annonce de résultats. Nous avons envoyé une lettre et, évidemment, nous n'avons pas encore reçu de réponse. Il y a toujours des retards, y compris dans les réponses aux lettres que l'on envoie ! Un simple accusé de réception de la part du Conseil d'Etat aurait pu sembler bien placé en la matière.

On nous dit que la dette se stabilise... Mais en réalité, il faut bien se rendre compte que cette stabilisation est faite partiellement d'artifices, ou d'aides extérieures, comme les 500 millions qui nous été versés par la Banque nationale, ou comme ce transfert d'actifs du petit et grand Etat au très grand Etat. Mais avec l'entrée en vigueur des normes IPSAS, nous nous rendrons bientôt compte que cela n'a rien changé à l'endettement général. Il est de 19 milliards, il sera de 20 milliards, voilà les chiffres ! Il faut le savoir. Alors évidemment, cela importe beaucoup moins que d'augmenter de 100 000 F les subventions à telle ou telle association caritative - le bon coeur dont je parlais tout à l'heure.

Un point pour conclure, Monsieur le président. L'Entente - l'UDC aussi - porte la même appréciation sur un futur qui n'est pas souriant. Et ce matin, j'avoue que je suis inquiet. La différence entre une partie de l'Entente et le parti libéral, c'est que nous nous sommes réveillés plus tôt, pour nous rendre compte que le budget 2007 - que certains considèrent comme le vrai test - est, dans son essence comme dans ses conséquences, déjà inscrit dans le budget 2006. On nous annonçait un retour à l'équilibre, mais c'est la poursuite d'une dérive. Et si la condition d'une reprise en main se marquant notamment par le stop à la reprise des automatismes salariaux n'est pas remplie, nous considérerons que la dérive est inscrite dans les faits et qu'elle va nous mener à la fin de cette législature vers un autre désastre, et c'est cet autre désastre que les libéraux veulent éviter au nom de leur conception de l'intérêt public (Applaudissements.).

Le président. Il est décompté sept minutes et cinquante secondes au groupe libéral.

M. Jean-Marc Odier (R). Cinq minutes pour retracer un peu plus de 6 milliards de budget, vous conviendrez que c'est chose impossible. Je m'en tiendrai donc à commenter trois aspects: les travaux de la commission, les chiffres et une position politique.

Tout d'abord, je souhaite adresser des remerciements aux commissaires de la commission des finances qui ont travaillé dans des conditions difficiles et qui l'ont fait de manière constructive. J'adresse également des remerciements à l'administration qui a dû, si vous me permettez l'expression, «mouliner» pendant quatre mois pour nous présenter des chiffres sur lesquels on pouvait travailler: la commission a travaillé durant un mois et demi au lieu des trois mois consacrés habituellement à n'importe quel budget. Ce furent donc des conditions difficiles. J'adresse enfin des remerciements aux rapporteurs: à M. Velasco, pour son rapport de majorité clair, facile à lire, et qui probablement vous présente, Mesdames et Messieurs les députés, un résumé tout à fait fiable des travaux de la commission et des chiffres; mes remerciements vont aussi à M. Gautier pour son rapport de minorité, qui exprime une position que je ne partage pas, bien entendu, mais qui s'est engagé dans ce rapport pour que tout le monde sache quelles étaient les positions des différents groupes.

La commission a adopté le principe de recevoir les documents trois jours avant de pouvoir les traiter et j'entends que ce principe soit respecté à l'avenir. C'est un souhait, mais cela devrait être le cas pour les commissaires qui présentent leur rapport, ainsi que pour l'administration qui nous présente les documents. Et si nous ne bénéficions pas d'un tel délai, nous ne pouvons pas travailler sérieusement.

Quelque chose de nouveau cette année: les subventions ont été votées par sous-rubriques. Il faut relever cela et y être attentif, pour que ce soit poursuivi en 2007.

Considérons les chiffres. Ce budget deuxième version n'est pas bien différent du premier, nous avons 300 millions de déficit. Vous me direz que c'est incroyable et comment cela se fait-il que les radicaux acceptent ce budget ? J'aimerais tout d'abord dire qu'il y a une grande différence: nous n'avons pas de projets de lois liés à la présentation du budget qui ne sont pas approuvés par le souverain. Et ça, c'est de l'ordre du bricolage, qui nous a été présenté par l'ancienne cheffe du département jusqu'à maintenant, et je m'étonne que les libéraux reprennent ce terme pour critiquer la version du budget actuel.

Si nous avons 100 millions de mieux, c'est qu'il s'agit de recettes fiscales sur les personnes morales. Et nous retrouvons la situation de 1998, quand Mme Calmy-Rey est arrivée au département des finances. Cette année, la différence est qu'un engagement du Conseil d'Etat de ne pas augmenter les charges pour les quatre prochaines années de plus de 1% est lié à ces recettes supplémentaires et, au cas où l'équilibre est retrouvé, l'engagement est de ne pas dépasser de plus de 1,5%, et ensuite - si les investissements sont autofinancés - de 2%.

Autrement dit, nous améliorons les recettes, mais nous bloquons les charges. C'est ce qui n'a pas été fait en 1998, et c'est ce que nous réclamions à Mme Calmy-Rey, car les recettes sont conjoncturelles et il ne faut pas engager de charges supplémentaires. Cela n'a pas été fait en 1998, et c'est pour cela que nous nous sommes retrouvés avec des déficits supplémentaires. Je remercie le Conseil d'Etat et le chef du département d'arriver enfin à cette situation.

Cependant, je regrette qu'un plan financier quadriennal n'accompagne pas ce budget. M. Hiler nous a confirmé que ce PFQ arriverait à partir de 2007. Soit, je l'accepte, mais je maintiens que c'est un bémol par rapport à ce budget. Vous avez quatre ans pour revenir à l'équilibre, et, normalement, nous aurions dû avoir cet engagement par PFQ, par projet de loi, qui venait...

Le président. Il va vous falloir conclure, Monsieur le député.

M. Jean-Marc Odier. Je conclus en disant que le groupe radical donnera sa confiance au Conseil d'Etat, pourvu qu'il poursuive dans cette direction, et je dirais aussi, Monsieur Hiler, que vous avez quatre ans pour remettre les finances de l'Etat en ordre.

Le président. Le groupe radical a maintenant épuisé son temps de parole.

M. Guy Mettan (PDC). Mesdames et Messieurs les députés, vous vous souvenez qu'il y a deux mois et demi, le parti démocrate-chrétien avait, pour une fois, joué les provocateurs en disant qu'il était content de ce budget. Beaucoup d'esprits forts s'étaient évidemment empressés de sourire à cette remarque, mais je me dois de vous décevoir, Messieurs les esprits forts, en disant qu'aujourd'hui aussi le parti démocrate-chrétien n'est peut-être pas ravi mais il reste content. Pourquoi ? Parce que j'aimerais quand même savoir d'où l'on vient. Je rappelle aux détracteurs de ce budget que, nous, nous avons toujours affirmé - déjà en décembre 2005 - qu'un déficit limité à 300 millions de francs pouvait nous satisfaire. Ce n'est pas que nous étions contents du déficit, c'est que nous étions contents que ce déficit soit limité.

J'aimerais vous rappeler que des chiffres énormes ont été évoqués. Pas plus tard qu'il y a quatre mois, on parlait d'un déficit de 400, de 500, de 600 millions de francs... Et là, Messieurs les libéraux et les UDC, nous aurions été tout à fait d'accord de vous suivre, si ces craintes s'étaient matérialisées: ce n'est pas du tout le cas. Depuis que ce gouvernement est entré en fonction, non seulement la limite du déficit a été contenue mais elle s'est même légèrement améliorée, en dépit de toutes les rumeurs extrêmes qui ont circulé sur le déficit budgétaire. Alors, vous m'excuserez du fait que le parti démocrate-chrétien refuse de considérer la grimace comme une marque de savoir-vivre dans cette république, et que, de temps en temps, nous conservions un petit sourire zen sur le coin des lèvres. Parce que j'aimerais aussi mentionner les points positifs contenus dans ce budget: si les 294 millions de déficit sont effectivement déplaisants, il faut aussi considérer les point positifs, et il y en a sept ou huit.

Premièrement, on a assisté à une réorganisation complète des départements qui a été prise en considération dans le nouveau budget amendé. Cela n'est pas simple de réorganiser de fond en comble les départements d'une administration que l'on sait extrêmement lourde et bureaucratique, et cela a été fait.

Deuxième chose, M. Odier en a parlé, c'est le blocage des charges. Très nouveau dans notre république, c'est aussi quelque chose qui est effectif.

Troisième chose: blocage de l'engagement de nouveaux fonctionnaires. C'est carrément une petite révolution, parce que c'est la première fois que cela arrive depuis au moins quinze ans. C'est donc aussi un fait positif à rappeler. J'étais rapporteur pour le budget 2004, où le déficit était supérieur à celui que l'on va accepter aujourd'hui mais où le nombre de nouveaux fonctionnaires était de 525... Aujourd'hui, il est de zéro. C'est un point qu'il faut prendre en considération.

Ensuite, M. Barrillier l'a rappelé, il s'agit d'un budget-vérité. On sait que l'on a pu apurer les comptes 2005 grâce à l'or de la Banque nationale et travailler sur des bases beaucoup plus claires, car tout cela était noyé dans un magma incompréhensible - d'ailleurs soigneusement élaboré pour que l'on n'y voie rien. Eh bien maintenant, nous pouvons y voir plus clair ! Car je défie quiconque à la commission des finances - ou même dans certains secteurs de l'Etat - de comprendre quoi que ce soit à cette nébuleuse budgétaire qui avait prévalu jusqu'ici. Et maintenant, cet effort de transparence est en cours.

Le plan de mesures est la cinquième raison positive. Ce plan de mesures vaut ce qu'il vaut et, effectivement, certaines mesures paraissent anecdotiques - mais d'autres sont beaucoup plus sérieuses. Il faudrait que ces mesures soient chiffrées, cela manque encore, mais enfin, ce plan de mesures a le mérite d'être concret et d'exister. Parce qu'un plan financier quadriennal sans mesures, comme vous le savez, c'est du bouillon pour les morts. Et au moins, des mesures, on peut en parler, on peut essayer de les chiffrer et de les mettre en pratique.

Autre avantage - qui n'est pas lié directement au budget - c'est l'adoption par le peuple du frein au déficit. Le Conseil d'Etat nous a dit qu'il le respecterait, et je sais qu'il le respectera. Et s'il ne le respectait pas, c'est nous-mêmes, au parlement, qui serions autorisés à prendre toutes les mesures nécessaires pour qu'il le soit.

Et enfin, une volonté politique. Ce n'est pas quelque chose de palpable, mais on a bien pu constater que, depuis six mois que ce gouvernement est entré en fonction, c'est aussi une première que de voir sept conseillers d'Etat avoir l'air unis - et à mon avis ils le sont effectivement - derrière des objectifs qui nous paraissent à tous assez clairs. Voilà pour les points positifs qui font que nous adopterons ce budget sans états d'âme, on reviendra plus tard sur les amendements.

Il existe aussi, il faut le reconnaître, des points plus négatifs, plus sombres. Depuis quelques semaines, on a l'impression que cette volonté de réforme gouvernementale s'enlise un peu dans les sables mouvants de la bureaucratie et de la gestion plus quotidienne, mais on sera rassurés dès le mois de septembre. Comme ce sera le moment de vérité, avec la présentation du budget 2007, je pense que nous devons maintenant nous focaliser sur l'avenir, c'est-à-dire sur ce budget 2007 et sur les comptes 2006 qui nous seront rendus l'année prochaine. C'est lors de ces deux étapes que le moment de vérité arrivera pour ce gouvernement et pour nous-mêmes. A ce moment, nous serons autorisés, si les engagements n'ont pas été respectés, à prendre nos ciseaux, et le parti démocrate-chrétien s'engage - si ces conditions ne sont respectées - à apporter une paire de ciseaux à chacun des députés de ce parlement.

Le président. J'espère que cela ne grèvera pas trop votre budget. Vous avez décompté sept minutes et vingt secondes sur le temps du PDC.

M. Pierre Losio (Ve). Bien des choses ont été dites, ce qui me permettra d'être un peu plus bref que prévu. Je tenais tout d'abord, au nom du groupe des Verts, à m'associer aux remerciements qu'a adressés notre président Odier à tous ceux qui ont contribué à ce travail budgétaire, au sein de cette commission. Ce fut un travail difficile pour des miliciens et compliqué pour l'administration des finances, et même le chef du département a déclaré que c'était à la limite de l'acceptable.

Le split des départements a touché un nombre considérable de personnes - plusieurs milliers - dès le début 2006. Pour arriver à la fin de ce travail budgétaire, il a fallu notamment - et ce n'est pas indifférent de le rappeler - assurer le suivi des comptes, l'historique des services et des départements qui ont été splittés, ouvrir l'exercice 2006 avec une nouvelle structure et, en même temps, avec un budget en douzièmes. Il a aussi fallu créer de nouveaux départements - le Grand Conseil, le pouvoir judiciaire et la Cour des comptes - avec un problème informatique qui a surgi, puisque l'application utilisée ne permettait que de gérer neuf départements alors que désormais il y en a dix. Il a fallu aussi boucler les comptes 2005 sur l'ancienne structure, les publier, puis les republier dans la nouvelle structure. Et enfin, il a fallu lancer la nouvelle procédure budgétaire. C'est dire le travail considérable auquel la commission des finances et toute l'administration ont été confrontées, et nous devons véritablement les saluer !

Evidemment, le Conseil d'Etat aurait pu prendre son temps et procéder à ce redécoupage des départements pour le budget 2007. Il a montré une cohérence avec son discours de Saint-Pierre, ainsi que de la détermination, et la volonté de son travail politique. On glose beaucoup sur la couleur politique de ce gouvernement, rose, vert, centre-gris... En ce qui me concerne, je le trouve fort teinté de bleu. Non pas bleu comme le bleu du ciel de l'été qui permet la rêverie - car aujourd'hui on n'est plus dans la rêverie mais face à de cruelles réalités à résoudre - mais un bleu beaucoup plus franc, net et gras. Un bleu comme les bleus de travail, comme les bleus de chauffe que le Conseil d'Etat a enfilés avec détermination pour descendre dans la salle des machines - j'allais dire dans la salle des grandes machines.

Qu'observe-t-on dans ce budget que les Verts soutiendront, mais que les Verts également amenderont ? Tout d'abord, un souci de réalité et de vérité dans la méthode. Il s'agit de ne plus déposer, dans le cadre des projets de budgets, des projets de lois qui présument de l'appréciation que pourraient donner le Grand Conseil ou le peuple. Le dernier exemple en date - catastrophique - étant celui du budget 2005 qui prévoyait un déficit de 293 millions alors qu'aux comptes 2005 l'ardoise affichait un déficit de 433 millions, notamment suite au vote populaire du 24 avril. Cette façon de faire nous permet donc d'avoir, pour 2006, un budget certainement plus fiable.

Qu'observe-t-on encore ? Un changement de cap politique. En sortant de la logique duelle «hausse d'impôts-baisse de charges», on marque désormais une volonté de gestion beaucoup plus entrepreneuriale. On constate une actualisation réaliste et proche de la volonté de vérité budgétaire des projections fiscales par rapport à la première version du budget: à la baisse pour le revenu et la fortune, à la hausse pour le bénéfice et le capital.

On observe un accord avec la fonction publique. Et là, je ne peux pas suivre les propos du préopinant libéral qui prétend que le Conseil d'Etat a cédé. Il n'a pas cédé, il a pris lui-même l'initiative de renouer les discussions avec la fonction publique. Cela nous paraît indispensable et raisonnable, car il est inconcevable que le Conseil d'Etat puisse ignorer la fonction publique dans le cadre des réformes entreprises à l'heure actuelle, et c'est un geste que nous saluons.

Nous constatons également des coupes sur les dépenses générales, le retrait des projets de lois sanctionnés en avril, la limitation de la croissance des charges de 1% inférieure aux comptes et un accroissement de 23 à 24 millions pour les mesures cantonales en matière d'emploi, tout cela associé à l'annonce de la présentation, à l'automne, d'une importante réforme concernant le traitement du chômage. L'affaire du fonds d'équipement cantonal et celle des SIG sont deux mesures discutables, parce qu'elles restent des expédients, mais, fort heureusement, elles ne s'inscrivent pas dans la durée. De plus, ce budget est conforme aux textes qui régissent les lois financières et budgétaires de notre république.

Nous ne voterons pas seulement ce budget. Il convient pour nous - et le Conseil d'Etat l'a montré - d'avoir une vision en perspective de la législature sur laquelle ce Conseil d'Etat a pris des engagements précis, fixé des objectifs clairs et présenté un échéancier. Une législature pour résorber le déficit de fonctionnement et stabiliser la dette, puis, dans un peu plus de trois ans, l'important et indispensable travail lié à la diminution de la dette. A ce propos, le groupe des Verts rappelle avec aigreur que les charges liées à cette dette représentent quelque chose comme 3000 postes de travail.

Nous ne soutiendrons pas seulement des chiffres mais une démarche qui s'annonce difficile: elle requiert l'appui responsable et déterminé des forces politiques qui souhaitent que notre canton ait des chances de s'en sortir à l'issue de cette législature. Le gouvernement est, à nos yeux, crédible et nous nous associons à sa démarche. Nous tenons cependant à dire très clairement - comme l'avait fait notre collègue Morgane Gauthier dans un débat budgétaire précédent - que nous nous opposerons toujours à toute mesure visant à priver de ressources les gens qui vivent dans la plus grande précarité.

On a longtemps entendu parler, dans la presse, dans le parlement, dans le monde politique - et de façon récurrente - du fameux «grand projet pour Genève». Finalement, ce grand projet pour Genève ne serait-il pas, simplement, le grand chantier entrepris par le Conseil d'Etat ? La réforme de l'Etat, longtemps annoncée, est maintenant empoignée avec énergie: l'assainissement des finances publiques pour assurer la pérennité d'un Etat social auquel la population a droit, et dont une partie toujours plus grande d'entre elle a besoin; une nouvelle manière de traiter le chômage, pour redonner rapidement dignité et motivation aux exclus de l'emploi; l'élaboration d'une nouvelle donne pour s'attaquer au problème du logement. Tout cela, bien sûr, dans le paysage, n'est pas aussi spectaculaire qu'un stade ou qu'un pont sur la Rade. Mais enfin, ces objectifs ne sont-ils pas véritablement un grand projet pour Genève ? De plus, cela représente une perspective assez réjouissante: toute la population est concernée par ces problématiques et pourra profiter des effets positifs que les chantiers ouverts courageusement par le Conseil d'Etat auront contribué à résoudre.

Nous pensons que ces objectifs seront atteints en fin de législature et, à ce sujet, il n'est peut-être pas inutile de rappeler le dernier rapport du LEA-Pictet qui prévoit une phase d'expansion de dix ans, ce qui pourrait être une chance supplémentaire pour le Conseil d'Etat. Je pense qu'à la fin de la législature ceux qui doutent maintenant reconnaîtront le positionnement politique de ce gouvernement. Ce sera à gauche - pas «A Gauche toute», comme d'aucuns le souhaiteraient - mais ce sera en tous cas à gauche du rêve et des illusions, et je dirais même à gauche de l'impossible, ou pour le moins, de ce que certains croient encore aujourd'hui impossible (Applaudissements.)

Le président. Neuf minutes sont décomptées à votre groupe.

M. Claude Marcet (UDC). J'ai entendu beaucoup de belles choses, beaucoup de grandes choses, beaucoup de mots, enfin, du verbiage. Le seul à mes yeux qui a dit quelque chose de correct, de sensé et d'intéressant dans le cadre de ce budget, c'est M. Weiss. Je me permets simplement de vous rappeler une chose, Mesdames et Messieurs, j'aimerais remettre le débat exactement au niveau où il se doit, en matière technique. C'est-à-dire de savoir ce qu'est un budget. C'est un ensemble de charges et un ensemble de recettes. Je vais prendre un exemple. Lorsque, dans votre ménage, vous faites un budget, le premier des budgets que vous faites, c'est lequel ? C'est le budget des recettes ! Et en fonction des recettes, vous déterminez ce que vous allez dépenser. L'Etat, depuis des décennies, fait le contraire ! Il dit ce qu'il va dépenser, et envisage éventuellement de pouvoir couvrir, par ci ou par ça, mais sans savoir réellement s'il a la capacité d'aller dans le sens de ce qu'il a envie.

J'aimerais bien que l'on remette un peu les choses là où elles se doivent d'être. Il y a un peu plus de dix ans, en 1993, on a fait des grandes théories sur l'avenir, on a voulu remettre les finances de l'Etat à flot et on a dit qu'on allait y arriver... Résultat: néant ! Pourquoi ? Parce que tout le monde croit que lorsqu'il a acquis quelque chose, c'est définitif. Rien n'est jamais acquis en ce bas monde, Mesdames et Messieurs ! Tout se gagne. Et en fonction de ce que l'on fait, pas en fonction de ce que l'on croit éventuellement avoir plus tard.

On a préparé le plan quadriennal, puis on l'a jeté aux orties ! Pourquoi ? Parce que, à nouveau, on parle dans cet hémicycle de grandes choses, de grands problèmes, de grands trucs, mais on ne se pose pas la question de savoir si nous avons les moyens d'agir et si nous avons les moyens de couvrir. On préfère, excusez-moi de vous le dire - je vais être assez direct - s'empiffrer pendant cinq ans, sans savoir si, après, on pourra manger, que de faire ce que nous devrions faire, c'est-à-dire de manger correctement sur la durée totale de notre vie. Nous avons des enfants et nous ne regardons même pas ce qu'ils devront assumer à cause de nos incohérences, à cause de notre verbiage, à cause de notre incompétence en matière de gestion de fonds publics !

J'ai entendu que ces budgets sont vrais. Mais vous me faites rigoler ! Et qu'est-ce que l'on fait ? On fait éventuellement ce que nous pouvons faire, mais en essayant de cacher ce que nous n'avons pas envie de montrer. Un exemple-type: pendant des décennies, on nous a soumis des budgets avec des amortissements que l'on nous a présentés comme corrects - je vous rappelle qu'un amortissement, c'est une rétention de fonds pour nous permettre de réinvestir. Que s'est-il passé ? Dès que nous avons eu les fonds de la BNS, on s'est empressés de passer tous les amortissements que nous n'avions pas faits - cela veut donc dire que nos bilans antérieurs étaient faux - pour les couvrir par l'argent de la BNS. Et on nous dit qu'il n'y a pas de problème et que notre endettement a diminué ! Mais il a diminué simplement par quelque chose d'exceptionnel, point barre ! Si nous n'avions pas eu l'or de la BNS, nous serions au-dessus des 13 milliards. Et c'est effectivement ce montant que nous devrions prendre en compte. On nous dit qu'on est descendu en-dessous des 12 milliards... Mais simplement parce qu'il y a eu une recette extraordinaire.

On me dit que ce budget est juste. Les caisses de retraite ?! On évacue chaque fois le problème. Je vous rappelle que dans une grande corporation publique de Genève, pour un écart très faible du taux technique, on a eu 23 millions d'augmentation des charges. L'Etat, c'est la même chose - nous sommes dans le même environnement, eux n'habitent pas à New-York et nous à Genève. Cela veut dire qu'à l'Etat c'est le même principe ! La diminution du taux technique, elle est où dans les comptes de votre budget ? Cela veut dire que, demain, ceux qui ne sont pas ici aujourd'hui devront prendre des mesures que nous sommes incapables de prendre maintenant, car nous sommes incapables de comprendre que nous sommes - excusez-moi de vous le dire - dans une merde financière épouvantable et nous n'avons pas la volonté politique de prendre les décisions qui s'imposent. Un jour, nous devrons prendre ces décisions ! Mais ce n'est pas nous qui le ferons, et ceux qui le devront diront que ceux qui étaient là avant eux étaient vraiment une bande de charlots. Je m'excuse, mais personnellement je n'ai pas envie...

Le président. Il vous faut conclure, Monsieur le député,

M. Claude Marcet. Je vais terminer. On nous parle des normes IPSAS, je me réjouis de voir quel argument avancera le gouvernement pour nous dire que dans tel et tel cas on ne peut pas les appliquer, parce que manifestement, on n'aura pas envie de nous montrer exactement ce qui se passe.

Le président. Il vous faut conclure !

M. Claude Marcet. Je terminerai sur une chose: je souhaiterais que ce gouvernement aille chercher les documents qui ont traité des faits qui se sont passés à New-York dans les années 70, car peut-être que dans les années 2010 nous serons à Genève dans la situation des années 70 des New-Yorkais.

Le président. Le groupe UDC a épuisé son temps de parole, et même dépassé.

M. Eric Stauffer (MCG). Comme vous l'avez entendu, le groupe Mouvement Citoyens Genevois va soutenir le budget. Néanmoins, ce n'est pas une carte blanche pour le gouvernement. Le MCG sera particulièrement vigilant... (Rires) ... en matière de logement, en matière de péréquation intercantonale. Parce que, comme vous le savez, Genève reverse énormément d'argent à la Confédération, et cela est sans doute à revoir - nous savons de source bien informée que le gouvernement s'est penché sur ce sujet pour voir ce qu'il faut faire. Ensuite, le MCG sera aussi très vigilant concernant certaines procédures en cours qui ont coûté quelques milliards aux contribuables genevois.

Maintenant, j'aimerais maintenant revenir très brièvement sur ce qui a été dit dans cet hémicycle. Nous avons entendu le groupe UDC qui va s'opposer à ce budget. Il a des arguments, mais j'aimerais quand même qu'il soit attentif à une chose: il faut retenir le contribuable sur le territoire genevois. Et si l'on allait, comme certains à l'UDC, habiter en territoire étranger, c'est-à-dire en France, eh bien, ce seraient 40% de la manne financière fiscale qui seraient reversés à l'Etat français ! Alors, quand on veut balayer devant la porte des autres, on ferait mieux commencer par la sienne.

Le groupe libéral refuse le budget: bien ! Mais, Monsieur le président, j'aimerais quand même relever que la dernière grande argentière MBG - Martine Brunschwig-Graf - était libérale. Qu'ont-ils fait, les libéraux, pendant ces années où ils étaient aux commandes des finances ?! Rien ! Ils ont fait des trous abyssaux...

Une voix. Ils ont payé leurs impôts !

M. Eric Stauffer. Et ils ont laissé des trous abyssaux aux contribuables ! Aujourd'hui, il faut saluer le travail du gouvernement qui essaie - avec un consensus - de remettre de l'ordre, et il est à noter que c'est la première fois qu'il y a une telle collégialité pour atteindre les objectifs.

Outre le fait que les libéraux ont trouvé des laquais en l'UDC - puisque ce sont les deux groupes qui refusent... (Exclamations.) ... le budget et qui sont les empêcheurs de tourner en rond de cette république - je dirais en conclusion: «Les gens vertueux se vengent souvent des contraintes qu'ils s'imposent par l'ennui qu'ils inspirent.» Je vous remercie.

Le président. Monsieur le député, cette citation mise à part, je vous rappelle à l'ordre: vous n'avez pas à traiter des groupes ou vos collègues de la manière dont vous l'avez fait il y a un instant ! Pas d'écart de langage, je vous prie ! (Remarques. Brouhaha.) Le temps décompté pour vous est de deux minutes et cinquante secondes, qui s'ajoute à ce qui a été décompté tout à l'heure.

M. Alain Etienne (S). Le groupe socialiste entend soutenir l'action du Conseil d'Etat visant un retour à l'équilibre des finances publiques. En effet, il n'est pas bon pour notre république de vivre avec le système des douzièmes provisionnels, surtout en ce début de législature avec le nouveau Conseil d'Etat.

Le parti socialiste tient à saluer la reprise des négociations avec la fonction publique et l'accord que le Conseil d'Etat a passé sur le rétablissement partiel des mécanismes salariaux. Tout à l'heure, M. Weiss a dénoncé ce protocole d'accord. Monsieur Weiss, expliquez-nous comment vous voulez appliquer des réformes dans la fonction publique sans le rétablissement de la confiance entre la fonction publique et le Conseil d'Etat ? Vous avez proposé le projet de loi sur le personnel de l'administration cantonale, mais avec ce projet vous cassez la fonction publique. Expliquez-nous, Mesdames et Messieurs du groupe libéral, comment vous voulez réformer l'Etat dans de telles conditions ?!

Dans le cadre de ce budget, les socialistes ne peuvent pas, non plus, accepter les atteintes aux allocations sociales des prestataires de l'Hospice, notamment en ce qui concerne la suppression du forfait pour les vêtements et du forfait TPG en faveur des personnes bénéficiaires du RMCAS.

Nous n'acceptons pas non plus la diminution des montants alloués à Solidarité internationale, et le parti socialiste soutiendra les amendements présentés au chapitre: «Prestations aux personnes physiques et aide aux pays en voie de développement.»

Le président. Il vous est décompté une minute et cinquante secondes.

M. Pierre Weiss (L). Je voulais - parce qu'il faut être objectif - rendre un hommage modéré au Conseil d'Etat sur un point. Il a fait, c'est vrai, un pas dans la bonne direction, alors qu'il fallait en faire trois ! Je ne peux donc pas me déclarer, comme M. Mettan, un adepte de la philosophie du contentement de Poliana, car c'est à cela que nous avons affaire quand on croit que l'action menée par le Conseil d'Etat est suffisante.

Je voudrais aussi rappeler que le problème essentiel réside dans le contrôle de la masse salariale. Ce contrôle est évidemment dicté par le nombre de collaborateurs - le Conseil d'Etat s'est engagé à le réduire de 5% d'ici à la fin de la législature - mais aussi par les traitements en eux-mêmes. De ce point de vue, le protocole d'accord n'a rien produit. La solution réside dans le projet de loi que l'Entente et l'UDC ont adopté sur la fonction publique - nous allons y revenir.

Nous avons parlé de la stabilisation des dépenses, ou plutôt de la stabilisation de la hausse des dépenses. Mais c'est la dette qu'il faut diminuer et pour cela je rappelle que nous aurons bientôt à débattre de l'initiative libérale sur la baisse de la dette.

Je terminerai par un seul point, Monsieur le président. Nous avons un débat genevo-genevois. Bien entendu, par rapport à certains moments du passé, nous pouvons nous féliciter, mais je rappelle que, dans les années 90, le nombre de collaborateurs de la fonction publique avait baissé de 2500 - M. Mettan l'avait oublié. Il y a une amélioration par rapport à certaines années récentes, mais sortons de nos frontières, regardons et comparons ce que font les autres cantons. Et là, nous verrons, Monsieur le président,...

Le président. Il va vous falloir conclure.

M. Pierre Weiss. ... que nous sommes dans une situation qui reste déplorable. Ayons donc un regard comparatif - c'est mon souhait - pour apprécier ce budget.

Le président. Le groupe libéral a épuisé son temps de parole.

M. Guy Mettan (PDC). Tout à l'heure, j'ai parlé du cadre général du budget, j'aimerais maintenant entrer sur deux petits problèmes de fond qui nous chagrinent encore trop pour que nous adoptions ce budget avec un large sourire, et non pas un petit comme tout à l'heure. C'est que le parti démocrate-chrétien, avec la collaboration d'autres partis, est très attaché à ce que nous améliorions encore le budget en adoptant - avec les Verts, les socialistes et les radicaux qui n'ont pas signé mais qui sont d'accord avec cette proposition - quelques amendements qui portent d'abord sur la solidarité internationale.

Nous souhaiterions rétablir la coupe qui avait été faite concernant la solidarité internationale, c'est-à-dire l'aide à la Fédération genevoise de coopération et l'aide aux pays du Sud. Cela paraît très important, d'autant plus que durant les débats budgétaires précédents nous avions déjà opéré des coupes dans ces deux lignes budgétaires. Pour des raisons à la fois humaines et philosophiques, je pense qu'il est bon que notre Conseil rétablisse la ligne originelle qui avait été prévue pour la solidarité internationale.

Le deuxième amendement concerne l'Université. Dans un accès de mauvaise humeur, la commission des finances avait enlevé 6,5 millions de francs à l'université. On a vu après coup qu'il est toujours peu indiqué d'agir dans la mauvaise humeur et que cette coupe n'était pas judicieuse. Pour une raison toute simple: si l'Université connaît des problèmes, et connaît effectivement quelques moutons noirs, il est totalement erroné de frapper les gens qui travaillent correctement. Or, c'est ce que font ces deux coupes: elles pénalisent les milliers de personnes - étudiants, professeurs, assistants, etc. - qui travaillent correctement, alors que, ce que nous devons faire, naturellement, c'est poursuivre et sanctionner les vrais auteurs de malversations ! Et pour cela, il faut évidemment attendre les résultats des enquêtes, et notamment de l'enquête pénale. En attendant, il nous paraît complètement faux de s'attaquer à toutes celles et tous ceux qui, dans notre université, travaillent correctement. Je voulais juste vous rendre attentifs à cela...

Le président. Il vous faut conclure, Monsieur le député.

M. Guy Mettan. Je termine. Je suis sûr que vous y prêterez la plus grande attention au moment du vote de ces lignes.

M. Alberto Velasco (S), rapporteur de majorité. J'ai entendu la position des minoritaires, notamment MM. Weiss et Catelain, qui reflètent ce que j'avais annoncé dans mon rapport de majorité. Ce qui a motivé fondamentalement le refus du parti libéral, ce sont les accords passés avec la fonction publique - les 12 millions - et pour le parti UDC, c'est ce catéchisme constant, la baisse de charges, etc. Malheureusement, Monsieur Catelain, vous n'écoutez pas: je vous ai dit dans mon intervention que ce sont des chiffres donnés par le département. Ce n'est donc pas moi-même qui les produis ! Les charges sont en baisse de 1,7% ! Donc, c'est davantage la gauche qui devrait se préoccuper de ces choses, à savoir ce qu'il se passe et pourquoi... Mais vous n'écoutez pas ! Je ne sais pas si vous voulez 20% de diminution de charges ou 30%... A un moment donné, il faut aussi que l'UDC sorte des chiffres dogmatiques et nous dise exactement ce qu'elle veut comme réductions, et où, et pourquoi, et comment ! Il ne suffit pas de déclarer: «baisses des charges !» constamment. Il est évident que l'Etat a des obligations à remplir et, pour cela, il faut qu'il se donne une politique de recettes: mais de manière solidaire, Monsieur Catelain - et votre groupe !

Ensuite, M. Weiss se comporte comme Cassandre... Il n'y a rien de positif dans son discours. Rien ! Pour lui, tout est mauvais ! Tout ce qui a été fait pendant ces mois avec ce Conseil d'Etat est mauvais ! Et pourquoi tout est mauvais ? C'est bizarre, car le parti libéral avait commencé les travaux en se proposant pour le rapport de majorité. Je vous le dis, c'est seulement au moment où l'on votait ce réajustement de la politique salariale - les 12 millions - que la chose a bifurqué. Le parti libéral veut-il que le Conseil d'Etat n'arrive pas à un accord avec la fonction publique ? On sait - et M. Weiss le devrait - qu'il faut bien que les gens soient rémunérés pour le travail qu'ils font ! On ne peut pas constamment, même dans une entreprise, année après année, péjorer le salaire des employés ! Tout le monde essaie d'obtenir une valorisation du travail qu'il effectue. Et tout le monde désire que son salaire soit reconsidéré à un certain moment. Pourquoi les fonctionnaires ne pourraient-ils pas avoir droit à de tels égards, comme tous les autres travailleurs du privé ? Et à ce propos, excusez-moi, Monsieur Weiss, mais vous êtes vraiment une Cassandre !

Mesdames et Messieurs les députés, je vous recommande donc d'accepter ce budget.

M. David Hiler, conseiller d'Etat. Quelques rappels pour répondre à un certain nombre d'interrogations ou de recommandations - recommandations contradictoires, comme il se doit, puisque nous sommes en démocratie - qui n'ont évidemment pas manqué, comme dans tout débat budgétaire.

Dans la perspective du discours de Saint-Pierre, le Conseil d'Etat a fixé un axe stratégique, le retour à l'équilibre pas à pas, avec une échéance en 2009 et une doctrine de base de ne pas s'en prendre à l'argent des citoyennes et citoyens de ce canton, ni en diminuant les prestations, ni en recourant à l'impôt, aussi longtemps que nous n'aurons pas réformé l'Etat, c'est-à-dire fait preuve que son organisation était optimale par rapport aux tâches que la loi lui confie.

Mesdames et Messieurs les députés, il est vrai qu'il a fallu deux mois au Conseil d'Etat pour affiner, développer ces axes et vous présenter le premier plan de mesures. Les fonctionnaires n'ont eu qu'un petit mois pour faire une première évaluation chiffrée des mesures sur quatre ans. Nous avons eu ce problème, très réel au niveau de l'administration, qui a compliqué la vie de la commission des finances - je peux me mettre encore pendant quelque temps à la place d'un commissaire à la commission des finances, après y avoir moi-même siégé onze ans, et comprendre ces difficultés.

Vous devez vous rappeler que l'administration a dû faire son premier bouclement avec la comptabilité financière intégrée. Cela, on l'oublie un peu. C'était le premier bouclement appuyé sur le nouveau système informatique, et tout en le faisant à double ! Une fois dans les structures anciennes et une fois dans les nouvelles structures. L'administration a donc dû procéder à des opérations de bilan qui sont un peu compliquées - on en reparlera lorsque nous discuterons des comptes au mois de septembre - et, sur la lancée, il a fallu faire un budget pour assurer la comparabilité entre le budget présenté au mois de septembre et les amendements qui doivent déboucher sur le budget dans la nouvelle structure. On a donc refait deux fois le budget.

En d'autres termes, cela signifie que les personnes - elles ne sont pas des centaines - de l'administration des finances de l'Etat et de la direction du budget qui ont travaillé sur le budget ont réalisé quatre fois le travail qu'elles font d'habitude sur la même période. Je souhaitais le rappeler et les en remercier. Et sachez que du côté de l'Office du personnel, qui travaille avec une application informatique qui fait frémir, ce sont des week-ends et des week-ends, des soirées et des soirées, avec très peu de collaborateurs, qui ont permis finalement de présenter à la commission des finances des documents dont, à vrai dire, le Conseil d'Etat n'avait pas disposé lorsque lui-même a reconstruit le budget 2006. Merci à eux et merci à la commission des finances !

Effectivement, les délais étaient courts. Dans certains cas, notamment avec telle ou telle institution du grand Etat, nous avons eu quelques difficultés à obtenir les documents dans délais raisonnables. Les directeurs financiers de chaque département ont beaucoup travaillé, eux aussi, pour être en mesure de répondre aux questions des commissaires, et je les en remercie.

Maintenant, entrons dans la partie peut-être un peu plus politique. Le Conseil d'Etat ne demande pas de chèque en blanc. Il demande une adhésion, ou un refus, à une politique qu'il a fixée, avec une feuille de route qui reste tout de même relativement précise: quatre ans pour atteindre l'objectif. En passant de 433 millions à 293 millions, nous avons parcouru largement plus du quart du chemin et j'espère qu'au vu des premiers chiffres sur le premier trimestre 2006, qui montrent des fondamentaux de l'économie très solides, nous ferons mieux. Mais, la confiance ne va pas plus loin que cela. Nous savons que nous devons faire plus que nos objectifs sur des années comme 2006 et 2007 qui sont prévues comme excellentes, mais nous n'avons pas l'intention, non plus, de changer à tout bout de champ, sous la pression des uns et des autres, le rythme que nous avons fixé.

J'en viens au plan financier quadriennal. Oui, en principe, et pour le Conseil d'Etat en premier lieu, il aurait été fort souhaitable que nous puissions présenter un véritable plan financier quadriennal qui permette de situer très précisément quelles sont les dépenses qui vont augmenter, celles qui pourraient diminuer et comment vont se comporter les recettes, et cela prestations par prestations, et en fonction de la situation économique, de la démographie, et de ce que l'on croit savoir de l'impact de nos mesures sur le marché de l'emploi et dans le domaine du logement. Je dois vous dire, Mesdames et Messieurs les députés, que nous étions en mesure de présenter deux ou trois pages A4, mais cela n'aurait été qu'aligner des chiffres sur un bâton... Nous y avons renoncé, dans la mesure où nous avons l'impression que ce travail est d'une importance à l'égal de l'outil que constitue un plan financier quadriennal qui sera, dès que nous présenterons une première version, amélioré et réajusté chaque année, de sorte à tenir compte des éléments nouveaux, dont M. Weiss prétend que nous ne faisons que prendre note... Oui, oui, oui ! Je peux citer l'exemple de la RPT. Et je dois vous dire qu'il y a quelques années le Conseil d'Etat avait pris position sur un certain nombre de points, et la manière dont on calcule l'indice de capacité financière ne nous est clairement pas favorable ! Si vous intégrez les frontaliers dans les calculs, mais que vous faites l'indice de capacité financière par habitant en ne prenant que les résidents, vous pouvez vous attendre à ce qu'à chaque augmentation du nombre de frontaliers nous ayons un indice de capacité financière qui nous desserve, c'est l'évidence !

Que peut-on encore faire ? Nous avons engagé un directeur de projet RPT pour la dernière étape. J'aimerais vous dire à ce propos que ce qui m'inquiète le plus dans cette affaire, c'est la perte de contrôle à peu près généralisée. Nous avons perdu le plus d'argent dans la RPT, certes, mais je peux vous assurer que la situation du canton du Jura est autrement plus préoccupante que la nôtre, dans la mesure où la variation qui le concerne est de 27 millions sur un total de 700 millions ! Selon toute apparence, de telles variations sont désormais possibles tous les deux ans, selon des formules de calcul dont je ne veux pas que le Conseil d'Etat ait l'exclusivité, et que j'aurai un grand plaisir à livrer à la commission de contrôle de gestion, de sorte qu'elle étudie, avec tout l'intérêt qu'elle porte aux questions de l'Etat, le facteur alpha et le facteur bêta. Personnellement, jusqu'à la page 20 de ce document, je crois avoir compris; je compte sur vous pour les 30 dernières pages ! Et c'est cela qui détermine la répartition des tâches !

D'ailleurs, nous ne faisons pas mieux, car le système d'évaluation fiscale que nous avons mis en place, où nous avons des évaluations sur les comptes, n'est pas facile pour l'Etat, d'où ces projections qui partent un peu dans tous les sens. Mais, pour les communes, c'est exactement la même chose que la RPT par rapport aux cantons. C'est un effet statistique que l'on connaît: les variations aléatoires sont plus fortes sur un petit groupe que sur un grand groupe. Nous avons donc des instruments de pilotage qui nous font penser qu'il faudra tout de même réfléchir au grand retour des politiques par rapport à l'économétrie et à la technologie.

Avons-nous cédé à la pression de la rue ? Je n'ai pas vu qui que ce soit dans la rue avant-hier - en fait, j'étais à l'assemblée des délégués de la CIA. Nous voulons renouer le dialogue et j'ajoute, car cela n'a pas été compris, que nous pensions aller plus vite. Et à vrai dire, à ce stade, nous n'avons pas commencé les négociations au sens strict: nous avons exploré des pistes en groupe de travail, cela a d'ailleurs pris un temps assez considérable au Conseil d'Etat pendant deux mois, et aujourd'hui, à partir de la prise de position du Conseil d'Etat dans sa dernière séance, qui sera communiquée la semaine prochaine, nous commençons une négociation sur les changements légaux et les changements réglementaires que nous proposons.

Enfin, concernant les normes IPSAS... M. Marcet se demande quelles arguties nous allons trouver pour ne pas les respecter. D'abord, je dirai à M. Marcet - je le lui ai déjà dit à quelques reprises, en privé et en commission - qu'effectivement, il n'était pas dans l'intention du Conseil d'Etat de chercher la certification pour l'année 2008, qu'il y aurait des dérogations et que la dérogation la plus probable concernerait la réévaluation des actifs pendant un certain nombre d'années, ce qui n'a pas eu l'air de le choquer outre mesure. Pour le moment, nous n'estimons pas - ce sont les techniciens qui le disent - être en dérogation vis-à-vis des caisses de pension. Monsieur Marcet, si vous le voulez bien, nous aurons l'occasion d'en discuter en commission de contrôle de gestion à la rentrée.

En revanche, je dois vous informer - vous recevrez un document - que nous sommes en train de partir un peu tous seuls: les cantons suisses dans leur majorité refusent la consolidation et refusent la réévaluation des actifs ! Et quand je dis que c'est dans leur majorité, c'est-à-dire tout le monde sauf nous. Le seul espoir viendrait de Zurich, où le travail technique est achevé mais où le parlement est, semble-t-il, un peu moins enthousiaste que le nôtre.

Alors, Mesdames et Messieurs les députés, nous avons une loi, nous commencerons le 1er janvier 2008 - sauf si vous la changez. J'attire votre attention sur le fait que si nous pouvions, avec un «IPSAS light», dans un premier temps, rester en phase avec le nouveau modèle des comptes des autres cantons suisses... Comment me disait-on ? «Voir au-delà de nos frontières»... Ce serait peut-être une bonne chose, mais c'est vous qui en déciderez, vous pèserez le pour et le contre.

Pour le reste, je terminerai par des faits et des chiffres. Oui, nous essayons d'aller de l'avant: les comptes étaient à 433 millions de déficit, le budget est à 293 millions, c'est un bel effort. Nous sommes aidés par la conjoncture, nous le savons, et nous savons aussi que l'année 2008 sera celle de tous les dangers, à cause de la RPT et des impacts IPSAS que nous maîtrisons encore mal au niveau de l'administration, et aussi parce que l'on peut imaginer que la conjoncture pourrait être un peu différente.

Pour toutes ces raisons, nous maintenons notre cap, nous demandons à être jugés par rapport à nos engagements et non par rapport aux souhaits des uns ou des autres. Et ces derniers temps, j'avais un peu l'impression d'une double contrainte: d'un côté, il fallait aller plus vite, parce qu'il était inacceptable que dans le cadre de la négociation nous n'ayons pas fini le 15 mai; d'un autre côté, on nous demandait s'il y avait assez de fonctionnaires pour mener à bien les projets. Et les mêmes personnes, d'ailleurs, nous demandaient enfin de diminuer les postes, tout en nous disant que nous devrions affecter plus de gens aux projets... Bien ! On ne fera pas tout cela à la fois, Mesdames et Messieurs les députés ! Je suis désolé de vous le dire ! Simplement, nous ferons humblement et du mieux que nous pourrons pour respecter le cadre que nous nous sommes fixé. Je vous remercie de votre attention. (Applaudissements.)

Mis aux voix, le projet de loi 9677 est adopté en premier débat par 70 oui contre 5 non.

Suite des débats: Session 10 (juin 2006) - Séance 48 du 23.06.2006

Le président. Nous passons au projet de loi 9833-A. Cette fois-ci, les groupes ont cinq minutes à leur disposition.

PL 9833-A
Rapport de la commission des finances chargée d'étudier le projet de loi du Conseil d'Etat modifiant la loi sur les augmentations annuelles dues aux membres du personnel de l'Etat ainsi que sur la progression de la prime de fidélité (B 5 17)
Rapport de majorité de M. Guy Mettan (PDC)
Rapport de minorité de M. Pierre Weiss (L)

Premier débat

M. Pierre Kunz (R). Le projet de loi 9833, contrairement à ce que croient ou prétendent croire certains, ne pose pas un problème financier ou de tiroir-caisse. Il pose un problème de management, un problème de gestion. Et cela, nos collègues libéraux en particulier semblent ne pas l'avoir compris. Ils n'ont pas compris que le projet de loi 9833, au vu des engagements stratégiques du Conseil d'Etat, n'a pas de lien comptable et financier avec le rétablissement du compte de fonctionnement.

Nous, les radicaux, mesurons bien la pression en forte augmentation sur l'ensemble des collaborateurs de l'administration cantonale et nous sommes conscients de la véritable révolution culturelle qui a commencé à intervenir au sein de l'administration publique. Car c'est bien d'une telle révolution qu'il s'agit. Et ceux qui, ici, à un titre ou l'autre, ont vécu ce genre de processus, savent combien sont considérables les efforts d'adaptation exigés de chacune des personnes concernées.

Le Conseil d'Etat demande beaucoup à ses cadres et à son personnel, c'est-à-dire à une fonction publique habituée à grossir année après année - plus 16% entre 1997 et 2005, 3500 collaborateurs supplémentaires en huit ans. Eh bien, le Conseil d'Etat dit à ses cadres et à ses collaborateurs: «Soyez imaginatifs, inventifs, dans l'accomplissement de vos tâches, soyez plus productifs, plus efficaces, car vous allez devoir faire face à la même masse de travail avec moins de moyens et moins de collègues. Soyez également économes dans l'accomplissement de ce travail.»

Nous les radicaux, nous sommes convaincus que ces exigences sont non seulement raisonnables, mais nécessaires. Mais nous sommes également convaincus que l'objectif ne pourra être atteint que grâce à l'adhésion de l'ensemble des collaborateurs de l'Etat. C'est le rôle du Conseil d'Etat d'emporter cette adhésion, en expliquant, en convaincant, en faisant naître l'enthousiasme. Mais aussi, en rémunérant équitablement ceux sur qui le Conseil d'Etat compte pour atteindre l'objectif que M. Hiler a rappelé tout à l'heure.

Dans ce contexte, quel est le rôle de chacun nous ? Puisque nous avons enfin un gouvernement qui s'engage, qui gouverne, il revient à chacun de nous décider s'il est d'accord avec les objectifs fixés et les moyens proposés pour les atteindre par ce Conseil d'Etat. Mesdames et Messieurs, les radicaux ont choisi: ils font, jusqu'à nouvel, avis confiance à ce nouveau gouvernement. Non parce qu'il y siège des gens qui sourient peut-être un peu plus que les précédents, ou parce qu'un radical y a retrouvé sa place...

Une voix. Non, non!

M. Pierre Kunz. Pas du tout. (Commentaires. Brouhaha.) D'ailleurs, je tiens à souligner ce point, parce que vous n'êtes pas sans vous souvenir qu'à l'époque des gouvernements de droite, libéralo-radicaux en particulier, où nous étions fortement représentés, nous n'avons - en tout cas certains d'entre nous - jamais hésité à contester la façon de fonctionner de ces gouvernements fantoches. (Brouhaha.)

Mesdames et Messieurs, pourquoi refuserions-nous donc de soutenir le projet de loi 9833, alors que le gouvernement s'est obligé - et c'est une première - à réduire la masse salariale de 5% sur une période de quatre ans, ceci indépendamment des niveaux salariaux accordés et du nombre de fonctionnaires ? Pourquoi refuserions-nous de soutenir ce projet de loi alors que ce gouvernement s'est engagé à maîtriser les charges dans une hausse annuelle de 1%, quelle que soit l'évolution des dépenses sociales et l'importance du report des charges de la Confédération ? Pourquoi refuserions-nous de voter ce projet de loi alors que celui-ci est limité...

Le président. Il va vous falloir conclure, Monsieur le député.

M. Pierre Kunz. Oui, Monsieur le président, j'achève. Ce projet de loi est limité à 2006. Eh bien, notre réponse est claire: il n'y a aucune raison. Par contre, et mon collègue Barrillier l'a rappelé, nous attendons le Conseil d'Etat au mois de septembre, avec un projet de budget cohérent, réaliste et honnête pour 2007, et nous l'attendons aussi sur sa prise de position concernant le projet de loi relatif au nouveau statut qui, à l'heure actuelle, est désastreux pour la fonction publique, en témoignent les taux d'absentéisme qui ont monté l'année dernière d'une manière vertigineuse.

Le président. Monsieur le député, je vous retire la parole. Je regrette de vous rappeler à l'ordre constamment, mais nous avons suffisamment de travail pour rester avec un oeil rivé sur le chronomètre. Le groupe radical a épuisé son temps de parole sur ce projet de loi.

M. Roger Golay (MCG). En quatorze ans, les mécanismes salariaux ont été versés intégralement quatre fois seulement. Uniquement pour l'indexation, il y a une diminution pour l'ensemble de la fonction publique de 12% du pouvoir d'achat depuis le début des années nonante. Ces 12% représentent une somme de 400 millions de perte salariale par année pour l'ensemble de la fonction publique. Les sacrifices salariaux de la fonction publique sont là, et nous pouvons estimer que l'effort a été consenti par celle-ci afin d'essayer de rétablir les comptes de l'Etat.

Parlons de la prime de fidélité qui sera tout à l'heure attaquée - comme d'habitude - par l'UDC. Pour bon nombre de fonctionnaires, il faut vingt ans pour obtenir l'équivalent d'un treizième salaire. Et aujourd'hui, il faut 23 ou 24 ans de service pour obtenir l'intégralité de cette prime de fidélité.

Lorsque les collaborateurs du service public regardent autour d'eux et voient que pratiquement toutes les autres administrations cantonales versent un treizième salaire, que peuvent-ils penser ?

D'autre part, on peut saluer l'accord salarial qui a été arraché au Conseil d'Etat par l'ensemble des organisations syndicales de la fonction publique. Pour avoir participé à ces négociations salariales, je peux vous dire que rien n'est facile, d'un côté ou de l'autre. Et je pense que l'employeur est encore le Conseil d'Etat, c'est inscrit dans la constitution. Nous pouvons faire confiance au Conseil d'Etat, s'il a accepté cet accord, c'est aussi pour redynamiser l'ensemble des fonctionnaires.

Que coûte cette démotivation ? Jusqu'à maintenant, il y a eu des effets. Quand M. Weiss parle du taux d'absentéisme, ce n'est pas très éloigné du peu de considération que les libéraux portent à la fonction publique. Il est vrai que la fonction publique est relativement satisfaite de cet accord, car elle y voit un signe de volonté politique, un encouragement par rapport aux autres sacrifices prévus dans le plan de mesures. Je vous rappelle qu'il n'y aura aucune augmentation de postes de travail par rapport à l'année 2005 et je ne pense pas qu'il y en aura dans les années à venir.

Le groupe MCG soutiendra donc le projet de loi 9833. En revanche, par respect de l'article 24, trois d'entre nous s'abstiendront lors du vote. Mesdames et Messieurs, pour redonner un signal fort à la fonction publique, pour repartir sur un meilleur pied, pour obtenir tout ce qui est prévu dans le plan de mesures, nous vous invitons à soutenir ce projet de loi sans tenir compte des divers amendements déposés.

Le président. La parole est au député M. Eric Stauffer à qui il reste une minute et dix secondes.

M. Eric Stauffer (MCG). Je vais être bref et revenir sur les promesses électorales que le groupe libéral a faites en 2001. Ils avaient promis de réduire le chômage, ils avaient promis de réduire la dette. Ils ont été aux commandes des finances pendant quatre ans et ils ont augmenté la dette, le chômage a augmenté, et cela, ce n'est pas tolérable et nous voulons saluer encore une fois l'effort du gouvernement qui a pris en considération la fonction publique. Comme nous l'avons dit, le groupe MCG soutiendra et continuera de soutenir la fonction publique.

M. Guy Mettan (PDC), rapporteur de majorité. Vous savez, Monsieur le président, que j'apprécie votre art consommé de présider notre assemblée, permettez-moi cependant de regretter que vous ayez transgressé les traditions en ne nous ayant pas accordé la parole, comme il se doit, en début de débat. Mais enfin, bref. Venons-en au fond. Si une majorité de la commission et une majorité de ce Grand Conseil - je l'espère - soutiennent ce projet de loi accordant des annuités sur six mois à la fonction publique, c'est parce que nous estimons que cela en vaut la peine pour au moins quatre raisons.

La première est que la charge qui nous est demandée aujourd'hui est de 12,3 millions de francs. Cette charge est évidemment lourde, mais elle nous paraît acceptable, car, dans une saine gestion de l'Etat, il nous paraît sain que l'employeur, en l'occurrence le gouvernement et le Conseil d'Etat, puisse garder la maîtrise de la rémunération de ses collaborateurs. Il n'y a seulement que des régimes socialistes de la pire espèce pour tout planifier et empêcher le patron de disposer librement de la masse salariale et du pouvoir de rémunérer ses collaborateurs. Dans l'économie privée - c'est un des avantages - une des prérogatives essentielles du patron de l'entreprise est de pouvoir décider lui-même de la marge de manoeuvre salariale qu'il veut avoir pour récompenser ses collaborateurs. Il nous semble indispensable que l'Etat-patron puisse bénéficier également de cette compétence.

Ensuite, il faut se rendre compte que l'indexation ne sera accordée aux fonctionnaires que si l'on vote le budget et que cette indexation n'est que de 0,4%, soit presque trois fois moins que l'inflation qui est à 1,1%. Il faut quand même que les collaborateurs de la fonction publique puissent, comme l'ensemble des salariés, bénéficier d'un certain rattrapage et puisque ce rattrapage n'est pas accordé dans son intégralité, nous pensons que le versement des annuités peut être une compensation utile.

Troisième raison. Il nous paraît un peu absurde - et c'est là où se trouve peut-être mon principal argument - de voter la défiance préalable du gouvernement. Cette nouvelle notion que mon collègue Pierre Weiss essaie de nous vendre aujourd'hui consiste à vouloir sanctionner le gouvernement pour sa gestion, avant même qu'il ait eu le temps de travailler et de nous fournir un résultat, puisqu'il n'a commencé son travail que fin décembre, début janvier. Nous devrions donc voter une sorte de défiance préalable en l'empêchant de jouer son rôle de patron. Mais cela n'est pas possible, car, à nos yeux, la sanction ne peut venir qu'après qu'on a commis une faute et non pas en supputant que, peut-être, une erreur de gestion sera commise.

Dernier argument. Dans cette législature, nous allons revoir - je l'espère - le statut de la fonction publique. Mon collègue Pierre Weiss est rapporteur d'un projet de loi - il nous a promis de déposer son rapport durant l'été - qui vise à réexaminer le statut de la fonction publique. Ce projet de loi sera déposé à l'automne prochain et c'est à ce moment que nous devrons mettre l'accent et porter toute notre attention. C'est un enjeu bien plus important que d'accorder, ou non, six mois d'annuités à la fonction publique.

Comme hier soir il n'y a eu que 39 manifestants pour protester contre ce budget, on peut constater que le Cartel n'a plus aucune légitimité au sein de la fonction publique. Cela n'est donc pas le moment de heurter l'immense majorité des fonctionnaires qui font correctement leur travail en les rejetant dans les bras exsangues du Cartel et en les vexant parce que nous ne voulons pas reconnaître la qualité de leur travail en leur accordant ces six petits mois d'annuités auxquels nous pensons qu'ils ont droit.

Le président. Merci, Monsieur le rapporteur, et désolé de vous avoir frustré de votre premier tour, mais, généralement, quand on veut la parole, on la demande, et je ne m'étais pas aperçu que votre timidité vous en avait empêché.

M. Pierre Weiss (L), rapporteur de minorité. Dans la vie, il faut arbitrer, y compris au Conseil d'Etat et pas seulement lorsque l'on se trouve en Allemagne pour des matchs de football très importants qui vont probablement mobiliser l'attention de certains cet après-midi. Il faut arbitrer entre l'intérêt public et l'intérêt de ceux qui sont au service du public. Et dans cet arbitrage, il faut être cohérent.

La cohérence de cette action - M. Mettan l'a rappelé fort justement - est de soutenir un projet de loi qui réforme un statut obsolète. Et, comme l'a dit M. Golay, ce projet de loi est d'autant plus nécessaire que la loi actuelle n'a pas pu être appliquée - complètement ou partiellement - depuis x années.

Il faut être cohérent. Or, nous avons affaire sur ce point à un manque de coopération larvé, pour dire les choses gentiment, de la part du gouvernement. On pourrait se mettre à sa place et craindre d'affronter le mécontentement, la démotivation, l'absentéisme et tous ces maux certes justifiés, mais qui résultent précisément de l'inadaptation du statut.

On pourrait espérer qu'ils réforment le statut en question, mais on voit bien que ces velléités sont freinées par la peur d'un ectoplasme. Il y a une contradiction dans ce projet, car la négation de la volonté de l'ancien Conseil d'Etat montre que de passer d'une majorité nominalement de droite à une majorité réellement de gauche, ce n'est pas bonnet blanc et blanc bonnet. Il y a des conséquences pour les citoyens qui se marqueront à terme en hausses d'impôts. Ce projet de loi est un marchepied vers les hausses d'impôts.

Aujourd'hui, il ne s'agit pas de voter une défiance préalable, comme l'a dit M. Mettan, mais il s'agit d'endiguer par une mesure un certain nombre d'incohérences. Le choix que nous avons à faire, c'est d'être rigoureux pour la République, et s'il le faut, rigoureux à la place du Conseil d'Etat qui, en la matière, comme toujours, fait les choses en partie dans la bonne direction, mais en partie seulement. Ou bien, on peut aller dans la voie du laxisme pour la suite de cette législature. Il s'agit de marquer un signe. Nous avons marqué un signe en acceptant d'entrer en matière sur ce budget dans le vote précédent. Mais nous marquerons aussi un signe si la position du rapport de majorité n'est pas suivie, en refusant le budget à la fin de ce débat.

Je vous adjure, Mesdames et Messieurs les députés, de vous rendre compte des responsabilités que vous prenez, des incohérences, des signes que vous donnez à la population, et des impôts que vous mettrez à la charge des contribuables et des citoyens de ce canton, soyez-en conscients aujourd'hui ! Monsieur Mettan, comprenez-le, s'il vous plaît.

M. Christian Bavarel (Ve). Les Verts voteront ce projet de loi pour une raison qui est très claire et très simple. On ne réforme pas l'Etat contre la fonction publique, on réforme l'Etat avec la fonction publique. Nous ne pouvons pas signer des contrats que nous ne respecterons pas. Quand vous engagez quelqu'un et que vous lui dites que des mécanismes salariaux vont s'appliquer, vous appliquez ces mécanismes, ou alors vous changez la règle. Aujourd'hui, c'est une fois oui, une fois non, suivant l'humeur du parlement et suivant la conjoncture, et c'est quelque chose qui n'est pas supportable en termes de droits. Nous prenons des engagements, nous entendons les respecter.

Un autre effet pervers que nous dénonçons depuis un certain temps quant au non-respect des mécanismes salariaux, c'est que le principe est de punir les derniers arrivés. Les collaborateurs récemment entrés dans la fonction publique ne touchent pas leurs annuités, alors que ceux qui travaillent depuis un certain nombre d'années et qui sont en fond de classe bénéficient de l'ensemble des mécanismes salariaux. La personne qui arrive et qui ne voit ces mécanismes se mettre en route qu'une fois ou l'autre est donc punie sur l'ensemble de sa carrière.

Cela est aberrant et il est temps de cesser ce jeu d'une fois oui, une fois non. Nous sommes très satisfaits de la volonté du Conseil d'Etat de rétablir le dialogue avec la fonction publique et de revenir à de meilleures pratiques.

Le président. Une minute trente secondes est décomptée à votre groupe.

M. Edouard Cuendet (L). Pour commencer, je ne peux pas m'empêcher de répondre très brièvement à mon collègue Stauffer qui s'en est pris vigoureusement aux libéraux, notamment par rapport à leur programme de 2001. Je rappellerais que depuis 2001, ce sont surtout les chefs d'entreprises libéraux qui, à Genève, ont créé des emplois dans différents domaines... (Exclamations.) ...financiers ou horlogers, et qui contribuent par leurs impôts au lourd fonctionnement de l'Etat. (Applaudissements.)

Deuxièmement, pour répondre à M. Golay qui s'est beaucoup lamenté sur le statut de la fonction publique genevoise. Elle fait un travail tout à fait remarquable et n'est certainement par critiquable, mais, en comparaison intercantonale, les fonctionnaires genevois - même si le coût de la vie est plus élevé à Genève - ne sont de loin pas à plaindre. Il ne faut donc pas non plus faire pleurer dans les chaumières, ce n'est pas très crédible.

Pour revenir au projet de loi particulièrement visé ici, ce qui est surtout reproché au Conseil d'Etat, c'est d'avoir capitulé devant le Cartel intersyndical dont on a vu l'influence limitée hier soir, comme l'a relevé M. Mettan. Ils étaient une grande quarantaine à manifester devant l'Hôtel de Ville, ce qui en dit long sur leur représentativité. On peut donc se demander ce qui a poussé le Conseil d'Etat à être aussi ouvert aux exigences du Cartel, alors que ce dernier ne représente que lui-même.

Je rappellerais tout de même que cet accord salarial représente certes une somme relativement modique en 2006, puisqu'on parle de 12 à 15 millions, mais l'explosion sera considérable en 2007, puisqu'on passe à 52 millions et que l'on arrive à 80 millions en 2008, sans compter les automatismes de cotisation aux caisses de pension de l'Etat. Si l'on ajoute cela à la RPT - 85 millions - et, si le référendum sur les allocations familiales n'aboutit pas, on rajoutera 30 millions et on arrivera en gros à 200 millions de charges supplémentaires en 2008.

Nous avons déjà eu à ce sujet quelques inquiétants indices en provenance du Conseil d'Etat avec l'abandon du «ninisme», évidemment au profit d'une hausse d'impôts. Et on nous a dit que, pour les 200 millions, même l'excellente tenue des entreprises libérales ne suffirait pas à compenser cette hausse de charges.

Donc, il est inquiétant que le Conseil d'Etat n'ait rien obtenu en échange de cette capitulation - on l'a bien vu dans la presse. Même pas une ouverture sur une réformette ou une toute petite réforme du statut de la fonction publique. Et le Cartel a répondu à ce cadeau bienvenu par des menaces de grève. C'est donc un exercice raté et, pour cette raison, le groupe libéral vous invite à refuser l'entrée en matière sur ce projet de loi, et, si l'entrée en matière est votée, de le rejeter.

Le président. Deux minutes et cinquante secondes sont décomptées au groupe libéral.

M. Gilbert Catelain (UDC). Fondamentalement, je suis persuadé que la grande majorité du personnel de la fonction publique a compris que ce canton ne pouvait plus continuer sur cette voie et engager davantage de charges sur le dos des générations futures sans se remettre en cause et assurer un meilleur fonctionnement de l'Etat. Le personnel est composé de personnalités qui sont toutes éduquées et qui savent faire la différence entre une addition et une soustraction.

Le groupe UDC en commission a voté non sur le projet de loi, ce qui ne veut pas dire - contrairement à ce qu'a dit M. Golay - que le groupe UDC va systématiquement s'opposer aux mécanismes salariaux. Si le groupe UDC a voté non en commission, c'est surtout et principalement parce que ce parlement a refusé de renvoyer en commission des finances le projet de motion 1688 qui est un projet consensuel qui aurait permis à la fois d'accorder les annuités et de demander une contribution de solidarité qui touche l'ensemble des fonctionnaires de l'Etat, sans toucher leur pouvoir d'achat.

Le groupe UDC prend ses responsabilités. Il considère que la situation budgétaire de ce canton ne permet pas d'alourdir la masse salariale versée dans ce canton et qu'en conséquence nous devons trouver d'autres pistes. Je regrette que dans le projet de loi qui nous est soumis ne figure pas le coût total de ces annuités, et le coût, non pas seulement pour 2006, mais à moyen terme. Je prierai donc le Conseil d'Etat - s'il m'écoute... apparemment ce n'est pas le cas - de bien vouloir nous indiquer quel est le coût total de ces annuités. (Brouhaha.)

Effectivement, M. Golay a raison, les mécanismes salariaux n'ont pas été versés intégralement ni même partiellement à de nombreuses reprises. Cela induit, comme l'ont dit MM. Bavarel et le rapporteur de majorité, des inégalités de traitement intolérables entre fonctionnaires de la fonction publique. Le groupe UDC l'avait lui-même mentionné dans le cadre de la motion 1688, mais M. Golay n'a pas dit qu'en contrepartie la fonction publique a trouvé une parade à l'absence de mécanismes salariaux en utilisant le principe des réévaluations de fonction qui ont coûté à ce canton - ce sont les chiffres du Conseil d'Etat - entre 30 et 50 millions par année. Ce sont donc des charges en plus pour la même prestation, à la charge du contribuable.

Nous regrettons que ce Conseil n'ait pas utilisé - ou au moins voulu étudier - la possibilité d'attribuer une allocation unique en complément des mécanismes salariaux. Nous regrettons que le Conseil d'Etat n'ait pas proposé de lui-même cette possibilité, car, à elle seule, elle aurait permis de réalimenter les caisses de pension et de réduire le déficit technique, ce qui représenterait globalement une économie de plus de 100 millions sur quatre ans, selon les indications du Conseil d'Etat.

Dans d'autres cantons, on ne supprime pas les mécanismes salariaux, c'est vrai, mais on réduit les postes de la fonction publique. Je rappelle que même dans le canton de Vaud, la police a dû réduire le nombre de ses inspecteurs pour atteindre «l'équilibre budgétaire», ou en tout cas réduire le désendettement, ce que je condamne. Je préfère avoir une mesure qui touche l'ensemble de la corporation, mais où l'on puisse conserver les ressources pour assumer les tâches de l'Etat.

Le président. Il vous faut conclure, Monsieur le député.

M. Gilbert Catelain. Je terminerai en indiquant que le projet de loi sur la fonction publique a été voté en commission. Si on avait été cohérents, on aurait dû avoir pour conséquence un refus du vote sur les mécanismes salariaux tels qu'ils sont appliqués dans ce canton, mais je rappelle aussi que le projet de loi n'interdit pas de rémunérer la fidélité et l'expérience des fonctionnaires.

Le président. Votre groupe a épuisé son temps de parole.

Mme Béatrice Hirsch-Aellen (PDC). J'aimerais apporter une clarification. Les députés démocrates-chrétiens qui s'abstiendront sur ce projet de loi le feront uniquement car ils y sont directement concernés. Il nous semble effectivement impossible de se prononcer sur un objet qui touche directement nos salaires.

Mme Loly Bolay (S). Le groupe socialiste salue la démarche du Conseil d'Etat qui consiste à entamer le dialogue avec la fonction publique. Ce n'est que rendre justice à des employés qui font un effort considérable, surtout à l'heure actuelle où la réforme de l'Etat est en marche. Elle est lourde et importante. Cette démarche est à saluer car ce sont les prémices indispensables à un dialogue constructif sur les statuts de la fonction publique.

Par contre, nous regrettons que ces mécanismes salariaux ne puissent pas s'appliquer au personnel des EMS, étant précisé qu'un budget quadriennal a été attribué aux EMS qui représente, pour les quatre années à venir, moins de 20 millions. C'est-à-dire que la convention collective de travail pour ces personnes ne pourrait pas être appliquée, à moins de baisser les prestations ou de diminuer le personnel de ces institutions.

Malgré ces réserves qu'il regrette, le parti socialiste votera ce projet de loi et suivra les conclusions du rapport de majorité.

M. Roger Golay (MCG). Lorsqu'on parle des 40 fonctionnaires qui ont manifesté avec le Cartel à l'entrée de l'Hôtel de Ville hier, je vous rappelle que le Cartel compte plus de 15 000 membres. Si l'on décidait d'amender, voire de bloquer de nouveau les mécanismes salariaux, ce ne sont pas 40 fonctionnaires, mais peut-être 10 000 ou 15 000 qui manifesteront à la rentrée, je peux vous l'assurer.

Lorsque M. Weiss...

Le président. Il vous faut conclure, Monsieur le député.

M. Roger Golay. Je vais bientôt terminer.

Le président. Non pas bientôt, mais maintenant, Monsieur le député.

M. Roger Golay. Je ne suis pas sûr des quarante secondes qui restaient. Le laxisme... Qui a fabriqué le déficit jusqu'à présent ? Avec la diminution de 12% des impôts ? Je pense que c'est un parti qui est représenté ici. (L'orateur est interpellé.) Oui, c'est le peuple.

Le président. Merci, Monsieur le député.

M. Roger Golay. J'ai tout de suite terminé...

Le président. Je regrette, le temps est le même pour tous les groupes et je ne peux pas commencer à en favoriser l'un ou l'autre. La parole est brièvement donnée au rapporteur de minorité, puis au rapporteur de majorité.

M. Pierre Weiss (L), rapporteur de minorité. Je voudrais tout d'abord rendre hommage aux fonctionnaires PDC qui siègent dans ce Conseil pour leur sens de l'étique. Apparemment, ce sens de l'étique n'est pas partagé par tous les groupes, n'est-ce pas Monsieur Golay ? (Exclamations.)

Ensuite, je souhaiterais indiquer à ce parlement que cette loi est obsolète. Tout le monde l'a dit. Néanmoins, certains vont voter la continuation d'une partie de cette loi. Rendez-vous compte de votre incohérence ! Face à cette incohérence, il faut refuser la position du Conseil d'Etat et d'une majorité de la commission, pour que nous puissions aller vers une approbation du budget beaucoup plus large et cette fois-ci beaucoup plus cohérente.

M. Guy Mettan (PDC), rapporteur de majorité. Je pense qu'avec tout ce qui a été dit, on tombera d'accord pour convenir qu'il faut accepter l'augmentation de ces annuités. D'une part, parce qu'elles sont minimes et ne portent que sur six mois. D'autre part, parce qu'elles compensent à peine le rattrapage de l'indexation et que chaque salarié, où qu'il soit, privé ou public, a le droit de voir son salaire suivre au minimum l'inflation.

Je salue la proposition de l'UDC qui n'est pas dénuée d'intérêt car elle porte notamment sur l'aménagement et la part que devraient payer les fonctionnaires pour la caisse de pension, mais je pense qu'il faut voter cette loi sans amendement. Il est prématuré de faire ce débat pour le projet de loi qui nous occupe aujourd'hui, mais à l'avenir, on pourrait entrer en considération sur ce type de projet, car il est logique que les collaborateurs financent leurs propres caisses de pension et ne comptent pas uniquement sur l'employeur, comme c'est encore un peu trop le cas à Genève.

Je voulais revenir sur les propos de M. Bavarel qui a dit assez justement qu'il ne fallait pas pénaliser les jeunes collaborateurs ou les nouveaux fonctionnaires. C'est parfaitement juste. Le système des annuités privilégie effectivement les anciens. Mais, dans ce cas, je lui demande pourquoi il n'a pas accepté l'amendement démocrate-chrétien que j'ai proposé en commission et qui visait précisément à accorder les annuités aux nouveaux arrivés et à ne pas les accorder aux anciens. Monsieur Bavarel, la prochaine fois, en commission, soyez attentif et soutenez les propositions intelligentes qui sont faites.

M. David Hiler, conseiller d'Etat. Je souhaiterais, à l'issue de ce débat, en l'honneur du rapport de majorité, remettre l'église au milieu du village. D'abord pour dire que les associations représentatives du personnel ont accepté par cet accord que 60% de l'indexation ne soit pas compensée. L'inflation est comprise un peu au-dessus de 1,1%, nous accordons 0,4%, et jusqu'à preuve du contraire, les associations représentatives du personnel ont accepté cet effort, puisque nous avons signé un accord pour 2006. Elles ont également accepté que l'annuité ne commence pas au début de l'année, mais au milieu, à la moitié. Enfin, elles ont accepté le non-versement de la prime de fidélité, sauf pour ceux qui étaient à zéro pendant cinq ans et qui auraient dû passer à 30% - ou 50% pour certaines classes salariales - et il a été jugé par le Conseil d'Etat qu'en effet il n'était vraiment pas équitable de bloquer ceux qui n'avaient rien du tout au titre de la prime de fidélité.

C'est cela qu'ont accepté les associations représentatives du personnel, conscientes des difficultés dans lesquelles se trouve notre canton. Voilà l'état actuel des négociations et je pense que c'est un bon accord. S'il n'y a pas eu foule dans les rues hier soir, cela s'explique aussi par le fait que la majorité des fonctionnaires a estimé que c'était un accord correct étant donné la situation financière très négative du canton.

J'aimerais rappeler aussi que le Conseil d'Etat a fixé une sorte de priorité, quel que soit le nouveau mécanisme salarial qui viendra. D'abord les annuités, ensuite l'indexation. Pourquoi ? Tout simplement parce que freiner les annuités, c'est effectivement ne toucher qu'une partie des collaborateurs. On a parlé des jeunes collaborateurs, Mesdames et Messieurs, mais si ce n'était que les jeunes ! C'est aussi tous ceux qui dans leur carrière ont demandé à occuper de nouvelles responsabilités. Vous savez que le secrétaire général du département des finances se retire à l'âge de soixante ans, après une carrière de plus de trente ans à l'Etat de Genève et qui l'a conduit à la direction d'un office. Annuités ? Huit. J'ai un directeur adjoint qui travaille depuis vingt-deux ans à l'Etat de Genève. Annuités ? Cinq. Pourquoi ? Parce qu'il a fait un apprentissage, qu'il est devenu comptable, qu'il a monté dans la hiérarchie des comptables et que, finalement, il a eu des responsabilités hiérarchiques. Vingt-deux ans à l'Etat de Genève, annuités: cinq. Alors, oui, je vous suis sur un point, on ne va pas garder ce système très longtemps. Il décourage effectivement des gens qui ont fait un parcours remarquable et à qui il faut rendre hommage.

Mais, pour le moment, tant que nous n'avons pas mis en place le nouveau système et accepté de prendre à la charge de l'Etat le coût de transition d'un système à l'autre, il faut rendre le système existant le moins injuste possible. Le système des annuités tel qu'il est pratiqué à l'Etat de Genève n'est pas un bon système. Et avec le système d'une annuité une année sur deux, le résultat est encore plus désastreux. Une majorité de ce parlement l'a compris et le Conseil d'Etat va de l'avant sur ces questions. Vous aurez à en discuter, car aucun changement de système n'est facile, ni ne peut se faire sans vous.

Mais, aujourd'hui, étant donné l'accord et la nécessaire adhésion de la part des employés de l'Etat de Genève et des entités autonomes, nous devons travailler par négociation - je l'ajoute à l'intention de certains. Dans ce domaine, comme dans d'autres, les passages en force ne donnent rien de très bon. On peut échouer dans des négociations, mais la moindre des choses est d'essayer de donner du temps. Le système de rémunération à l'Etat de Genève est parti à la dérive. Le système des annuités est mauvais.

Toutefois, je dois aussi vous dire qu'avec les ressources disponibles il y a un moment où l'on séquence pour arriver à des choses convenables. Et même le recours à des mandataires externes ne nous permettrait pas de faire des miracles.

Nous avons pris position. Nous ferons connaître notre position dans l'entrée de la négociation au prochain point de presse du Conseil d'Etat. Nous viendrons avec un projet de loi à l'automne. Mais, pour le moment, ce projet de loi doit être accepté tel qu'il est, c'est-à-dire comme une transition. Et comme dans d'autres domaines, la réflexion existe.

Vous aimerez ou n'aimerez pas les propositions du Conseil d'Etat, ce que je peux simplement vous indiquer, c'est qu'elles seront sans doute, pour des raisons de transition uniquement - et uniquement pour cela - un peu plus coûteuses que le projet de loi que vous vous préparez à voter maintenant.

Mis aux voix, le projet de loi 9833 est adopté en premier débat par 43 oui contre 18 non et 7 abstentions.

Deuxième débat

Mis aux voix, le titre et le préambule sont adoptés.

Le président. Il y a une proposition d'amendement à l'article 1 (souligné). Il s'agit de l'ajout d'un article 4: «Les 50% de la prime de fidélité sont affectés à la prévoyance LPP». Je passe la parole à M. Catelain.

M. Gilbert Catelain (UDC). Comme vous le savez, le fait d'augmenter le gain assuré par voie de prime de fidélité induit des obligations supplémentaires pour les caisses de retraite. Et plus on avance en âge et plus le salaire augmente, moins la durée de cotisation restante complétera le financement permettant à la caisse d'assurer de manière autonome le versement de la rente, et cela peut donc affecter la couverture de la caisse de pension.

Cet amendement vise simplement à élargir - parce que cela se fait déjà à l'Etat de Genève, notamment pour les classes supérieures à la classe 15 - une participation de l'employé au rattrapage du gain assuré de la caisse de pension. Cet amendement vise à permettre à l'employé d'améliorer la situation financière de sa caisse de pension en y affectant, la première année, les 50% du gain supplémentaire.

Au vu de la situation difficile des caisses de pension de l'Etat, je vous invite à soutenir cet amendement. Il vise à une plus grande solidarité entre les actifs et les pensionnés des caisses de pension de l'Etat. On sait que l'on verse probablement plus de rentes que n'entre d'argent des cotisations et, à terme, si l'on ne prend pas de mesures telles que celle-ci, ce sont les actifs d'aujourd'hui qui feront les frais du manque de recettes de demain.

M. Pierre Kunz (R). Dans certaines situations, d'aucuns utilisent un canon pour détruire un moustique, mais dans ce cas précis c'est l'inverse: on tire, à la sarbacane, une boule de gomme pour effacer un éléphant... (Brouhaha.) Mesdames et Messieurs, le déficit actuel des caisses publiques genevoises atteint près de 3 milliards... (Remarque.) Oui, 3 milliards ! Et les signataires entendent apporter un début de solution à ce découvert en «chipant» quelques millions - la moitié de l'augmentation que nous voterons tout à l'heure - pour combler, paraît-il, une partie du découvert. Tout cela, sans aucun plan pour la suite, sans le début de ce que j'appellerai l'ombre d'une solution au problème majeur constitué par le découvert des 3 milliards en question. Un découvert qui - je profite de le rappeler car ce n'est pas très clair dans l'esprit de certains - ne pourra être comblé que par trois mesures, complémentaires ou pas. 1) Réduction des prestations. 2) Augmentation des cotisations. 3) Comblement du découvert par l'impôt, c'est-à-dire par l'Etat, puis par l'impôt.

Alors, les radicaux vous recommandent de ne pas entrer en matière sur cet amendement. Par contre, ils apprécieraient que le gouvernement nous dise quand et comment il entendra faire face à cet énorme problème que constitue le découvert grave des caisses publiques de pension.

M. Roger Golay (MCG). L'UDC vous propose le miroir aux alouettes. Que représentent ces 50% de progression sur la dizaine de milliards - à peu près - de découvert des trois caisses de prévoyance de la fonction publique ? Quasiment rien. Simplement, l'UDC cherche à tout prix à entrer en conflit. Je vous rappelle cependant qu'il est plus facile d'entrer en conflit avec la fonction publique que de trouver une porte de sortie, Messieurs de l'UDC ! Et je pense que ce que vous proposez ne vaut absolument pas la peine, si ce n'est que vexer l'ensemble des collaborateurs du service public.

M. Gilbert Catelain (UDC). J'aimerais simplement rappeler que le système du deuxième pilier est fondé sur la solidarité. C'est la solidarité des actifs avec les rentiers, respectivement une solidarité des rentiers vis-à-vis des actifs. Cela marche pour la grande majorité des caisses de retraite où il y a une solidarité directe entre actifs et retraités, sauf dans ce canton, notamment au niveau des caisses de pension de l'Etat où la solidarité ne fonctionne pas totalement des actifs vers les rentiers, mais des contribuables vers les rentiers des caisses de pension de l'Etat de Genève, puisque le renchérissement des rentes n'est pas assuré par la caisse de pension, mais par l'impôt, et que le découvert des caisses de pension ne sera probablement pas couvert par les actifs - ce qui devrait être le cas par les rentiers - mais par les contribuables.

Donc, vous avez dans cette société une inégalité majeure de traitement entre des intouchables qui, quoi qu'il advienne, vont pouvoir bénéficier d'entre 60% et 75% de leur dernier salaire parce qu'ils ont un statut privilégié, et de l'autre côté il y a le tiers payant qui paie son deuxième pilier et la solidarité des rentiers de sa caisse de pension... Et en plus, par solidarité, il devra payer le découvert et l'indexation des caisses de pension de l'Etat de Genève.

En 2005, le groupe UDC a déposé une motion qui invite le Conseil d'Etat à revoir tout le fonctionnement des caisses de pension. Cette motion a été renvoyée en commission par ce parlement qui a compris l'intérêt de réformer ce système, mais elle dort en commission depuis maintenant deux ans. Au cours de cette période, les découverts techniques des caisses de pension ont augmenté et les charges futures - pour l'Etat - ont également progressé ! Cela fait qu'au niveau du bilan de l'Etat nous aggravons la situation, et nous ne sommes de loin pas dans la situation de retrouver un triple A. Je vous rappelle que la France, malgré sa situation catastrophique, a encore le triple A.

Par conséquent, il ne s'agit pas de tirer avec une sarbacane sur un éléphant, il s'agit simplement de prendre une première mesure qui vise à responsabiliser l'ensemble des acteurs de la fonction publique sur le fait que, à terme, et contrairement à ce qu'on leur dit aujourd'hui, leur retraite n'est pas du tout garantie et qu'il leur appartient aussi de participer financièrement à l'assainissement des caisses en prélevant le 50% de cette augmentation.

Je rappelle que si 200 millions étaient affectés cette année aux annuités - aux mécanismes salariaux - cela ferait 100 millions pour les caisses de pension; ce serait de l'argent directement versé aux principaux intéressés, les fonctionnaires. Et sur dix ans, cela ferait un milliard.

Mme Véronique Pürro (S). Beaucoup de choses ont été déjà dites, et je vois deux sources de problème: d'une part, au niveau de la fonction publique, d'autre part au niveau des caisses de pension et de la proposition qui nous est faite par l'UDC.

Le problème au niveau de la fonction publique - les collègues MCG l'ont dit - c'est cette attaque supplémentaire contre les collaborateurs de l'Etat, où l'on essaie de leur faire payer les déficits ou de les faire participer à revoir positivement la situation actuelle.

On vient de nous dire, par la voix de M. Hiler, qu'une négociation était en cours. Au niveau de la méthode, je crois qu'il faut que l'on fasse confiance au Conseil d'Etat et j'imagine que le sujet des caisses de pension fera partie des objets discutés - je ne vois pas comment cela pourrait être autrement.

Deuxième source de problèmes sur les caisses de pension... M. Catelain a rappelé que l'UDC a été à l'origine de propositions, mais elle n'est pas la seule. Ces propositions ont été largement débattues à la commission de contrôle de gestion et, contrairement à ce que vous venez de dire, le sujet n'est pas gelé ! Mais, comme nous avons pu le voir pendant les discussions, il est très complexe: il y a plusieurs caisses, plusieurs situations, les taux de couverture sont différents d'une caisse à l'autre. Et là aussi, le Conseil d'Etat nous a montré sa volonté d'aller de l'avant sur le sujet, de le prendre en compte et de nous faire des propositions. Mais il faut aussi discuter avec les caisses et, comme c'est le cas pour la fonction publique, c'est en négociant et non pas en imposant que l'on trouvera des solutions.

Donc, votre proposition est très mauvaise à tous les niveaux. Il faut la rejeter.

M. Pierre Weiss (L), rapporteur de minorité. L'amendement qui nous est soumis a un caractère modéré, lorsqu'on le prend pour une année en soi. Mais le caractère cumulatif a aussi été rappelé. Et de ce point de vue, cela rend sa prise en considération nécessaire. Je suis étonné du refus du premier pas - car, évidemment, il n'y a que le premier pas qui coûte, notamment dans un budget - énoncé par mon cher ami Pierre Kunz, dont je vois aujourd'hui que d'ange exterminateur qu'il était dans le passé, du temps de l'Ancien Testament, il s'est transformé, avec le Nouveau Testament, en bon berger... (Rires.) Eh bien, cher Pierre Kunz, là aussi, je souhaiterais que vous relisiez toutes les Ecritures avant de vous prononcer.

Certes, l'aspect technique de cet amendement est certainement perfectible, Mme Pürro a raison, et de ce point de vue le projet de loi sur la révision du statut de la fonction publique permettra d'y voir beaucoup plus clair, compte tenu en particulier des propositions que ne manquera pas de faire le Conseil d'Etat. Mais aujourd'hui il y a un signe de solidarité intergénérationelle à donner. C'est pour cela que les libéraux voteront cet amendement.

Le président. Monsieur Kunz, vous n'avez pas été mis en cause: on n'est pas mis en cause quand on est appelé «bon berger». Je passe la parole à M. Marcet.

M. Claude Marcet (UDC). Simplement pour répondre à une remarque qui nous est toujours faite lorsque nous venons sur le sujet: ce n'est absolument pas une atteinte à la fonction publique ! Il s'agit simplement de mettre les choses à plat, de dire la vérité, d'annoncer les faits tels qu'ils sont. C'est tout !

Je rappelle simplement que le déficit actuariel que nous devrons payer au travers de nos impôts, ce n'est que du salaire déguisé pour la fonction publique. Or, je le rappelle aussi, la fonction publique est pour certains un énorme lobby de 30 000 personnes - plus les familles, cela fait 45 000 personnes - et on se cache là derrière pare qu'on a la trouille de dire la vérité, car ces gens vont voter dans le sens de leurs intérêts. Mais que la vérité soit ! Que la vérité soit présentée et que l'on dise exactement ce qu'il en est et ce que cela coûtera plus tard ! A partir de là, remettons les pendules à l'heure !

Dans le privé, en primauté des cotisations, on a une retraite en fonction de ce que l'on a. A l'Etat, en primauté des prestations, quel que soit le montant que vous allez mettre, 60% ou 70% de votre dernier salaire est acquis. Et encore, on fait des petites combines parfois, comme monter de classe pour les deux ou trois dernières années, car cela fait une retraite plus intéressante ! Je ne rappellerais qu'un seul exemple. J'ai un vieux frère, un vieux papy de 82 ans qui a passé quarante ans dans la fonction publique; il a déjà reçu plus de trois fois en retraite ce qui a été accumulé dans les caisses de retraite pour lui, par lui et par l'Etat, intérêts capitalisés. Je suis désolé, mais techniquement, ce genre - excusez-moi d'être un peu vulgaire - de conneries nous amène droit dans le mur ! Et demain, lorsqu'il faudra dire à la fonction publique que nous n'avons plus les moyens de payer effectivement ce que nous avons promis, ceux qui actuellement ici ne sont pas capables de regarder la vérité en face devront se poser un certain nombre de questions, comme celle de savoir pourquoi ils n'ont pas voté au moment où ils devaient voter les assainissements qui s'imposent. Ce n'est pas une attaque contre la fonction publique, c'est un fait ! Il faut remettre les pendules à l'heure et dire la vérité. Mais cette vérité, certains ne veulent absolument pas l'entendre, parce qu'elle gêne leurs intérêts politiques et le copinage qui se cache derrière beaucoup des décisions qui se prennent dans ce parlement.

Le président. Je passe la parole à M. Stauffer. La liste est close.

M. Eric Stauffer (MCG). On entend que les fonctionnaires, c'est du lobbying qui représente 45 000 voix. Mais que dire du lobbying de la droite, du dernier orateur ? Ce lobbying qui favorise les milieux immobiliers... (Bruit de larsen. Brouhaha.) Excusez-moi, cela doit être mon natel... Voilà. Donc, lobbying qui favorise toute une série de castes genevoises, ce qui a ont provoqué, toutes ces dernières années, les déficits que nous connaissons. Et j'aimerais quand même attirer l'attention de la population qui nous écoute sur les mécanismes salariaux qui ont été «sucrés» à nos fonctionnaires. Et je ferai ce raccourci, certes un peu simpliste: avec la BCGe, combien d'annuités on aurait pu payer ? (Brouhaha.)

Le président. Monsieur le député, je pense que nous pouvons partir de l'idée qu'il y a longtemps que les auditeurs ont cessé de vous écouter. (Brouhaha.) Donc, si c'est à leur attention que vous vous exprimez, je pense que vous pouvez y mettre un terme.

M. Eric Stauffer. Bien sûr, Monsieur le président. J'aimerais terminer, si vous le permettez. Puisqu'ils prônent les PMI et les PME, j'aimerais aussi demander combien de PME auraient pu être financées avec ces mêmes «casseroles» ? Alors, encore une fois, Messieurs, ne parlez pas de lobbying: quand on veut faire le ménage ailleurs, on commence par balayer devant sa porte.

M. David Hiler, conseiller d'Etat. Je suis toujours impressionné, quelle que soit ma place dans cette enceinte, par l'infinie capacité de ce parlement à digresser. Parce que, malgré tout, aux dernières nouvelles, nous parlions d'une demi-annuité. Certains trouvaient que son coût était excessif, d'autres pas. Là-dessus vient un amendement qui déchaîne des flots oratoires sur la question des caisses de pension. C'est un sujet qui, vu son impact financier, mérite un certain nombre de débats. Mais je ne suis pas tout à fait sûr que le biais proposé soit adéquat et que le moment soit idoine.

Maintenant, j'aimerais rappeler, pour ceux qui connaissent peu ces questions, les enjeux principaux, concrets, auxquels nous sommes confrontés.

Le premier enjeu est de savoir si, à terme, avec le vieillissement et une croissance démographique générale au niveau du canton, qu'on attend comme plutôt modérés, nous pourrons encore payer des rentes dans vingt ans. Ce sont ces systèmes actuariels en place qui sont vérifiés périodiquement par les caisses de pension. Jusqu'ici, ça va. Il est vrai que, notamment à la CIA, les enfants du baby-boom vont arriver à la retraite les uns après les autres et que l'on peut imaginer que ce calcul actuariel sur vingt ans donne des résultats un peu moins encourageants que ceux que l'on a eus jusqu'ici. Ceci est une réalité de nature économique et ce n'est pas tout à fait pour rien que, dans la classification du premier plan de mesures, la fusion des deux caisses - CIA et CEH - était sous la rubrique «gestion des risques». Il y a donc un risque et il est identifié.

Il y a un deuxième risque, de nature législative. La question est de savoir que va décider le parlement fédéral concernant les taux de couverture des caisses de pension. L'ensemble de la Romandie et le canton de Berne connaissent des systèmes, où l'on fait du calcul à vingt ans et, tablant sur la pérennité de l'Etat, on n'estime pas qu'à chaque moment on soit en mesure de couvrir à l'instant T l'ensemble de ce qui est dû aux pensionnés. Cette manière de faire a été mise en place sous l'égide de Robert Ducret, et jusqu'ici le système mixte - qui a le défaut d'être assez peu répandu - a manifesté, lorsqu'il était bien géré, une bonne solidité. En d'autres cas - malheureusement, il faut le dire - dans le Valais et dans certains cantons suisses alémaniques, il y a eu des choses assez difficiles, comme il y a eu des grandes sociétés au niveau mondial qui ont disparu en absorbant et en perdant tout le capital des assurés - cela existe aussi. Donc, les deux systèmes ont leurs inconvénients.

Aujourd'hui, que peut-on dire à ce propos ? Les Chambres fédérales, dans le cadre de l'initiative Beck et de sa concrétisation, restent dans des limites raisonnables qui pourraient être de deux types: l'obligation pour les cantons de légiférer, comme l'a fait le canton de Fribourg, ou un taux de l'ordre de 70%. Là, nous sommes tranquilles sur des impacts à court terme et non pas sur le long terme, et c'est ce que nous devons préparer. J'aimerais vous signaler que nous devons voir... Comment déjà ? «Au delà de nos frontières».

Le canton de Berne a décidé, à un moment donné, de recapitaliser intégralement une caisse. Il y a mis un milliard - je vous donne ce nombre de tête - en 2000. En 2003, il avait perdu le milliard qu'il avait mis dans la caisse, pour cause de fluctuation boursière. Donc, il avait retiré sa garantie et recapitalisé. Je ne suis pas sûr que cela soit la bonne méthode, puisqu'à la fin le canton de Berne a remis sa garantie. Nous devons donc approcher cette question de façon extrêmement prudente... Je vous dis d'emblée que la fusion des caisses ne représente pas trois ou quatre semaines de discussions et de négociations: il faut trouver le cadre juridique, il faut trouver le plan de prestations idoine, il ne faut pas désavantager les pensionnés d'une caisse par rapport à l'autre, et tout cela prendra un certain temps. Quel est l'intérêt fondamental de la fusion ? C'est que les classes d'âge ne sont pas les mêmes dans les deux caisses au niveau de retraités: à la CEH la moyenne d'âge est de 66 ans et à la CIA c'est un peu plus, la pyramide des âges du personnel hospitalier étant très différente de celle du personnel enseignant, très marquée par le baby-boom - démocratisation des études exige.

Nous devons maintenant avoir une approche qui nous prévaut du risque. Quand deux risques sont identifiés et que nous réagissons sur les deux, il y a deux méthodes: prendre des mesures ou provisionner. L'idée du Conseil d'Etat est que nous pouvons encore éviter de provisionner, et j'aimerais dire à ce propos que la Conférence des directeurs des finances romands, qui comprend un socialiste, un Vert, des démocrates-chrétiens, un radical, un UDC, et M. Gasche de Berne, est unanime sur la défense du système mixte, si celui-ci est bien géré. Et ce sur quoi vous devrez vous prononcer, ce sont les calculs actuariels effectués sur des hypothèses «crédibles» quant à ce qui va se passer au cours de ces vingt prochaines années. Tout cela, nous allons en parler longuement.

Maintenant, c'est une autre question que de savoir s'il faut changer la répartition entre le salarié et l'employeur. Vous savez qu'elle est de deux tiers/un tiers. En moyenne, au niveau suisse, elle est de 60% - privés compris - pour l'employeur et 40% pour les employés. C'est une autre question, mais le Conseil d'Etat a déjà donné ses options dans le cadre de la CIA. Première mesure, la fusion...

Le président. Il vous faudrait conclure, s'il vous plaît.

M. David Hiler. Je terminerai par là. Première mesure: la fusion pour lisser les effets de classe d'âge. Deuxième mesure: une éventuelle prolongation de 38 à 40 ans de la durée de cotisation et troisième mesure: non indexation des prestations. Parce que le Conseil d'Etat n'est pas d'avis qu'avec un taux global de 24% de cotisations nous puissions encore augmenter la pression sur les actifs alors qu'un retraité - il faut tout de même se le rappeler - qui a l'ensemble des années de cotisation, gagne mieux que la personne qui commence le métier en annuité zéro, et en travaillant. Et là, il y aura des choses difficiles, douloureuses sur lesquelles nous devrons nous pencher, avec les intéressés ! Le premier risque, c'est l'abolition du système mixte au niveau fédéral, celui-ci nous coûterait la bagatelle de 4 millions de francs à provisionner en nos comptes, mais nous allons, si vous le voulez bien, commencer par... (L'orateur est interpellé.) Oui, pardon ! C'est évidemment 4 milliards. Nous allons, avec les autres cantons latins et le canton de Berne, essayer de prévenir ce premier risque qui mettrait tout la région lémanique à genoux sur le plan financier.

Le président. Je vais mettre aux voix la proposition d'amendement. Si vous le permettez, je vais numéroter cet article autrement que l'ont fait les auteurs, puisqu'ils lui ont donné le numéro 4 qui est celui d'un article existant déjà dans cette loi. Nous allons donc, s'il n'y pas de protestations de la part des auteurs de l'amendement, l'appeler article 3A.

Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 38 non contre 24 oui et 3 abstentions.

Mis aux voix, l'article 1 (souligné) est adopté, de même que l'article 2 (souligné).

Troisième débat

La loi 9833 est adoptée article par article en troisième débat.

Mise aux voix, la loi 9833 est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 40 oui contre 22 non et 6 abstentions.

Loi 9833

Le président. Nos travaux sont suspendus 10 minutes.

La séance est levée à 10h50.