République et canton de Genève

Grand Conseil

IN 132
Initiative populaire 132 "Pour la réalisation du projet RHINO en Ville de Genève"
IN 132-B
Rapport de la Commission législative chargée d'étudier la validité de l'initiative populaire 132 « Pour la réalisation du projet RHINO en Ville de Genève »

Débat

Le président. La commission vous demande de déclarer cette initiative irrecevable. La parole n'étant pas demandée, je mets aux voix la prise... (Exclamations.) Nous étions déjà en procédure de vote, et j'aimerais que vous soyez attentifs ! Ce n'est pas ma faute si les débats sont trop longs ! Madame Künzler, vous avez la parole.

Mme Michèle Künzler (Ve). Il vaut peut-être mieux ne pas se taire, puisque c'est l'unique occasion que nous aurons encore de traiter cette initiative. Sans doute va-t-elle être déclarée irrecevable ou invalide... Comme nous l'avons déjà relevé la fois précédente, je voudrais dire que nous soutenons le logement alternatif, le logement pour les jeunes, le logement pour les artistes - cela doit être maintenu. Tout ce qui a été positif dans l'expérience RHINO, dans le sens d'un logement différent, d'un logement collectif, d'un logement pour artistes, doit être soutenu.

Mais cette initiative doit être invalidée, parce qu'elle ne respecte pas le droit supérieur: elle constitue par conséquent une incohérence qui ne doit pas être soutenue. Nous ne la soutiendrons donc pas, même si nous sommes favorables aux objectifs poursuivis par l'Association RHINO qui sont louables. Nous pensons qu'il faut les poursuivre, mais pas forcément à cet endroit.

Mme Virginie Keller Lopez (S). Excusez-moi, Monsieur le président, je n'étais pas très concentrée, mais le beau match que l'on peut voir dans la salle juste à côté rend nos travaux quelque peu difficiles...

Le président. Je peux faire fermer l'écran, si vous le désirez !

Mme Virginie Keller Lopez. Non, non ! J'imagine qu'il y a un but car j'entends des hourras...

Concernant l'initiative RHINO, le parti socialiste est un peu déçu de la façon dont se sont déroulés les travaux en commission. Nous pensons en effet que nombre d'arguments n'ont pas été donnés au cours de l'audition de l'Association RHINO, qui était manifestement mal préparée. Il nous paraît également que la complexité de la jurisprudence en matière d'expropriation, l'ambiguïté de certains textes, semblent finalement avoir eu raison, beaucoup trop vite, des débats à la commission législative. Celle-ci n'a finalement pas vraiment fait son travail, c'est-à-dire essayer jusqu'au bout de démontrer qu'il était possible d'interpréter cette initiative de manière à prouver sa compatibilité avec la loi.

Nous aimerions quand même reprendre trois points qui nous semblent avoir été étudiés superficiellement. Tout d'abord, l'argumentation du Conseil d'Etat et de la commission, qui, en fait, n'a pas vraiment réétudié la question et s'est bornée - on l'a vu dans le rapport de M. Luscher - à reprendre la totalité des arguments du Conseil d'Etat. Cette argumentation part du principe que l'initiative n'est pas conforme à la loi sur l'expropriation pour cause d'utilité publique, notamment en son article 25. Selon cet article, seul le Conseil d'Etat - ou une commune - aurait la possibilité de demander une expropriation.

Selon les interprétations que l'on fait de cet article 25, il semble que nous pourrions tout à fait imaginer que le Conseil d'Etat s'est fondé non pas sur la lecture de la loi, mais sur une habitude, parce qu'en général - c'est vrai - les expropriations sont présentées par le Conseil d'Etat ou par une commune. Toutefois, il n'est inscrit nulle part dans la loi que le peuple ne pourrait pas, à travers une initiative, proposer lui-même une expropriation.

Nous avons trouvé - au parti socialiste - que la manière dont le Conseil d'Etat interprétait la loi à l'endroit de cet article 25 - et, donc, la commission - était finalement extrêmement restrictive et ne permettait pas réellement d'essayer de faire coïncider cette initiative avec la loi.

Le deuxième argument, avancé par le Conseil d'Etat et repris par la commission, concerne l'alinéa 2 de l'article 25, qui stipule que rien ne peut obliger le Conseil d'Etat à prononcer une expropriation... Mais, Mesdames et Messieurs les députés - relisez le texte de l'initiative - il n'est en aucun cas question d'une quelconque obligation du Conseil d'Etat ! Il est simplement indiqué que le Conseil d'Etat «peut» procéder à l'expropriation une fois, évidemment, qu'il aura terminé soit de négocier un éventuel autre arrangement avec les propriétaires, soit après avoir mis l'expropriation à l'enquête publique.

De ce point de vue aussi, nous avons le sentiment - nous, les socialistes - que le Conseil d'Etat et la commission ont fait une interprétation bien trop restrictive.

Enfin, et ce sera notre dernier argument en faveur de cette initiative, le Conseil d'Etat et la commission décrètent que l'expropriation sollicitée ne répond pas à un intérêt public suffisant compte tenu de la législation cantonale... Il s'agit de la question de l'intérêt public de l'initiative RHINO. Mesdames et Messieurs les députés, il faut vraiment rappeler ce qu'est le projet RHINO ! C'est d'abord de faire sortir des immeubles du marché spéculatif, qui ont été, en fin de compte, soustraits à la location pour la population, et c'est ensuite de garantir du logement social pérenne, qui appartiendra finalement à la collectivité publique, puisque le projet prévoyait de vendre les immeubles à la Ville de Genève pour qu'elle puisse ensuite les mettre en droit de superficie à l'Association RHINO.

Si l'on se réfère à l'avis de droit demandé par la Ville, que l'on trouve dans le rapport de M. Luscher à la page 17, on peut voir que: «... le Tribunal fédéral a constaté que: la création de logements à loyer modéré est effectivement d'intérêt public, quand bien même les prestations de l'Etat en vue de la construction d'habitations servent en premier lieu les intérêts privés des personnes admises à occuper ces logements.» Nous pouvons donc constater que mettre du logement social sur le marché du logement est reconnu d'utilité publique par le Tribunal fédéral lui-même !

Le projet RHINO entre bien dans ce cas de figure. Si les septante habitants de l'Association RHINO devaient être évacués, les loyers des appartements qui seront mis sur le marché à travers le projet défendu par les propriétaires seront effectivement plafonnés et soumis au contrôle de la LDTR pendant cinq ans, mais, après ce délai, nous savons bien que ces loyers atteindront des sommes très importantes étant donné le quartier concerné.

Si vous permettez ce soir au projet RHINO de se réaliser - bien que ce soit un voeu pieux des socialistes - vous contribuerez à augmenter le parc de logements à loyer modéré à Genève. De plus, ce ne sont peut-être pas seulement les douze mille signataires de l'initiative qui salueront cet acte courageux, mais toute la population !

Enfin, Mesdames et Messieurs les députés, nous vous demandons de voter la recevabilité de cette initiative. Vous permettrez ainsi non seulement la création de logements sociaux pérennes - cela ne concerne pas seulement les habitants de RHINO, mais la plupart des projets qui visent à lutter contre la spéculation immobilière - mais, aussi, la poursuite de l'expérience exceptionnelle, qui dure depuis dix-huit ans, des habitantes et habitants de RHINO, du logement associatif, de la Cave 12, lieu culturel apprécié et reconnu, en bref, de toutes ces expériences qui font aussi que notre ville a cette réputation d'ouverture et de diversité qui fait son rayonnement. (Applaudissements.)

M. Pascal Pétroz (PDC). Qu'il soit rappelé ici, à toutes fins utiles et une fois de plus, qu'il ne s'agit, pour cette quatrième initiative que nous traitons ce soir, que de se prononcer sur sa recevabilité.

J'aimerais dire à ma préopinante que je suis un peu surpris de sa remarque... Elle a - si j'ai bien compris - indiqué que les représentants du Comité d'initiative étaient mal préparés pour leur audition à la commission législative, dont le but, précisément, était de disserter sur la recevabilité de cette initiative. Il ressort du rapport qu'ont été auditionnés Me Marco Ziegler, Me Pierre Bayenet, Mme Gisèle Thievent, Mme Miriam Kerchenbaum et M. Maurice Pier. J'en déduis donc que deux avocats, sur les cinq personnes convoquées, ne s'étaient pas préparés à répondre à des questions de droit s'agissant de la recevabilité de cette initiative... Honnêtement, cela me laisse songeur !

D'autre part, s'étant déjà longuement exprimé lors du débat de préconsultation - soit avant que cette initiative soit renvoyée en commission législative - sur les problèmes que cette initiative soulevait au niveau de la recevabilité, le parti démocrate-chrétien est satisfait que la commission ait décidé de la déclarer irrecevable.

Il sollicite de votre Grand Conseil d'en faire de même.

M. Christophe Aumeunier (L). Certains cherchent des buts louables là où il y a des actes illicites... Le groupe libéral cherche des appartements louables ! (Applaudissements.)

Des voix. Bravo !

M. Christophe Aumeunier. L'initiative 132 est contraire au droit: elle est clairement contraire à la loi sur l'expropriation pour cause d'utilité publique; elle fait fi des règles imposées en cas d'expropriation, qui nécessitent des procédures d'enquêtes publiques et des procédures d'opposition qui en découlent, préalables et nécessaires à un vote déclarant d'utilité publique l'expropriation d'un immeuble.

Au surplus, lorsqu'une utilité publique doit être constatée en vue d'une expropriation dans l'intérêt d'une commune, l'initiative de l'ouverture de la procédure d'expropriation appartient à la commune. Et la saisine du Grand Conseil appartient, ensuite de la procédure d'enquête publique mentionnée précédemment, uniquement au Conseil d'Etat.

Enfin, de manière superfétatoire, j'indiquerai qu'il faut constater que l'initiative 132 ne peut en aucun cas relever d'une utilité publique, puisqu'elle fait fi des règles établies, des règles démocratiques et des règles qui ont été mises en place pour contrôler et, éventuellement, autoriser une mesure extrêmement grave, puisqu'il s'agit d'une mesure confiscatoire.

En réalité, il faut relever que cette initiative vise à procurer un avantage qui est de nature purement individuel, et ce à l'encontre d'un propriétaire légitime. Il ne faut pas s'en étonner: l'initiative vient des squatters !

En conséquence, nous vous invitons à invalider l'initiative 132. (Applaudissements.)

M. Christian Bavarel (Ve). Les séances plénières servent à rendre publiques les positions des uns et des autres. Michèle Künzler a donné la position des Verts... Il se trouve que le groupe des Verts compte deux dissidents: Jean Rossiaud et moi-même.

Je vais donc juste vous expliquer pourquoi nous allons voter la recevabilité de cette initiative. Nous pensons que la commission aurait pu traiter cette initiative en adoptant une autre position - mais cela n'a pas été le cas - en considérant RHINO sur un plan culturel, comme un monument de la culture, pour ce qu'il a apporté à la vie culturelle genevoise, mais aussi comme un monument au niveau de la lutte politique à Genève et au niveau du mode de vie. Notre point de vue est donc purement culturel. Il ne répond pas à une logique de légalité pure et dure, mais à une logique culturelle, et c'est pour cette raison que nous accepterons la recevabilité de cette initiative. (Applaudissements.)

Le président. Merci, Monsieur le député. Je salue la présence à la tribune de notre ancienne collègue Mme Marianne Mathez-Roguet... (Applaudissements.) ... et je salue à ses côtés la femme du bien-aimé président du Conseil d'Etat, Mme Unger. (Applaudissements.) La parole est à Mme la députée Sandra Borgeaud.

Mme Sandra Borgeaud (MCG). Merci, Monsieur le président. Le groupe MCG ne soutiendra pas l'initiative RHINO, pour la simple et bonne raison qu'elle ne respecte pas le droit. Un avis de droit établi par la Ville de Genève va exactement dans le même sens, ainsi que l'avis du conseiller d'Etat, en son temps.

Nous avons auditionné plusieurs personnes concernant RHINO, mais, malheureusement, force est de constater qu'elles ne nous ont pas convaincus ni donné d'éléments qui auraient éventuellement pu porter la réflexion un peu plus loin.

Nous ne pouvons, bien évidemment, pas nous substituer au droit, et nous ne parlerons pas du fond ici.

C'est la raison pour laquelle nous vous invitons, Mesdames et Messieurs les députés, à refuser cette initiative.

M. Damien Sidler (Ve). En tant que président de la commission, j'aimerais tout de même réfuter ce qui vient d'être dit par Mme Virginie Keller Lopez quant au travail et à la qualité du travail effectué par la commission. Cette commission travaille tous les vendredis soirs où nous ne siégeons pas en plénum. Nous devons traiter ces temps-ci un nombre incroyable d'initiatives, avec des délais - vous le savez tous - très serrés. Mais nous avons tout de même fait tout ce qui devait l'être pour cette initiative, notamment l'audition des initiants.

Nous avons tous constaté - cela figure dans le rapport - le manque flagrant de préparation des personnes auditionnées. Pour ma part et en tant que président, j'ai réagi, puisque, avec le service du Grand Conseil, nous avons préparé une lettre à l'attention des auditionnés pour les rendre attentifs aux questions qui leur seront posées dorénavant et aux points précis examinés par la commission. Nous ne pouvons pas faire plus ! Madame Keller Lopez, j'estime que vous pouvez adresser vos critiques aux membres du parti socialiste, qui font partie de la commission et qui se sont abstenus lors de ce débat, mais pas à la commission !

Mme Carole-Anne Kast (S). Je voudrais apporter une précision pour répondre à mon préopinant à propos de l'argumentation de ma camarade Virginie Keller Lopez...

En aucun cas, me semble-t-il, il n'a été question de critiquer la préparation de la commission, mais bien celle des personnes auditionnées. Et nous devons pouvoir reconnaître qu'elles auraient pu avancer des arguments juridiques pointus, comme ceux que, en quelques mots, Virginie nous a exposés tout à l'heure et qui ont démontré - recherches juridiques à l'appui - que tout n'est pas aussi simple que le rapport du Conseil d'Etat a bien voulu le faire croire, quant à la recevabilité et la conformité au droit supérieur.

Maintenant, j'aimerais encore préciser, à l'attention de Me Pétroz - il n'est pas dans la salle, mais ce n'est pas grave - que ce n'est pas parce que deux avocats sont auditionnés qu'ils vont forcément être bien préparés et dire des choses de grande qualité... La preuve, c'est qu'il y a plein d'avocats dans cette salle, ce n'est pas une garantie ! (Commentaires.)

Je ferai une dernière remarque. Il est évident que cette mauvaise préparation a fait les affaires d'une certaine majorité de la commission, qui ne peut pas voir l'intérêt public dans le projet RHINO, puisqu'elle pose en dogme la propriété privée. C'est la raison pour laquelle elle ne peut admettre la moindre limitation de celle-ci, même pour protéger une expérience de dix-sept ans, même pour dénoncer des cas de spéculation flagrants d'il y a quinze ans, alors que certaines personnes abusaient véritablement, voire «crassement», de la situation de pénurie de l'époque. (L'oratrice est interpellée.) C'est peut-être fini, mais c'était le cas ! Et RHINO s'est mis en place dans ce contexte-là ! Les habitants de RHINO ont prouvé - bien qu'ils ne soient pas les sacro-saints propriétaires que certains, dans ce parlement, s'acharnent à défendre - qu'ils ont été capables d'en faire un lieu de vie, un lieu culturel, un lieu d'habitation, et d'entretenir ces immeubles ! Et les entretenir probablement mieux que certains propriétaires privés qui perçoivent pourtant des loyers pour cela et qui ne le font pas ! (Applaudissements.)

M. Gabriel Barrillier (R). Je n'avais pas l'intention d'intervenir dans ce débat, mais il se trouve que j'étais remplaçant lors des auditions effectuées par la commission législative au sujet de RHINO... C'était vraiment pitoyable ! Je suis désolé d'avoir à le dire: la moitié des personnes auditionnées - je ne vais pas donner leur nom - ne savaient pas pourquoi elles étaient là. Notamment un avocat connu de la place, qui se débat pour des problèmes de transports publics, ne savait pas pourquoi ni à quel titre il était auditionné !

Par ailleurs, le rapport montre clairement que, pour le vote final sur la recevabilité, il n'y a eu aucune voix favorable: sept voix contre - dont les Verts, et M. Sidler, le président de la commission fait partie du groupe des Verts - et deux abstentions socialistes.

Certes, on peut changer d'avis en plénière, mais, franchement, nous voyons bien que les initiants tirent toutes les ficelles de nos institutions démocratiques - absolument toutes ! C'est un véritable dévoiement institutionnel et démocratique ! Comment l'Alternative peut-elle défendre cette initiative en plénière ? Ayez une fois pour toutes le courage de suivre vos commissaires ! Jusqu'à maintenant, vous ne l'avez pas eu, et c'est mauvais signe ! (Exclamations.)

Nous refuserons la recevabilité de cette initiative.

M. Christian Luscher (L), rapporteur. Je m'étonne également des propos tenus ce soir et je m'inscris en faux, au même titre que M. Sidler, sur ce qui a été dit tout à l'heure par le parti socialiste. Le parti socialiste est représenté en commission législative par deux membres qui, après les auditions, que nous avons décidées conjointement et communément, ont décidé de ne pas voter en faveur de la recevabilité de cette initiative.

Vous semblez aujourd'hui reprocher à la majorité de ne pas voir l'intérêt public que représente l'expérience RHINO... Ce n'est pas la majorité qui considère qu'elle ne constitue pas un intérêt public, ce sont les autorités judiciaires !

En effet, faut-il le rappeler, dans l'avis de droit qui a été produit en annexe à mon rapport il est dit ceci: «La mesure préconisée par l'initiative est destinée à bénéficier à une petite poignée de personnes dont le statut juridique aujourd'hui est semble-t-il celui d'occupants illégaux des immeubles litigieux. Il convient de rappeler à ce sujet que le Tribunal administratif a, à plusieurs occasions, jugé que ces personnes qui se maintiennent de façon illicite dans des immeubles n'ont pas qualité pour recourir: «L'intérêt évoqué à la jouissance d'un habitat qu'ils se sont procuré au mépris du droit (...) ne saurait dès lors être considéré comme digne de protection au regard de l'ordre juridique en vigueur...».

C'est probablement pour cela également que le Tribunal de première instance, dans sa grande sagesse, a dissous l'Association RHINO, car il s'agit d'une association illicite. Et, comme le disait M. Olivier Jornot, lors du débat de préconsultation, une association qui est dissoute pour son illicéité est, en réalité, une association de malfaiteurs: il faut le dire ! (Exclamations.)

Mesdames et Messieurs les députés, vous avez voulu entrer sur le terrain du débat politique - je m'étais totalement abstenu de le faire dans mon rapport, qui est d'une totale neutralité - vous avez décidé de donner à ce débat une coloration politique, eh bien, nous répondrons aussi, ce soir, par des arguments politiques ! J'en ai terminé !

Des voix. Bravo !

Mme Virginie Keller Lopez (S). Je voudrais juste vous répondre, Monsieur Luscher sur la question de la qualité pour agir et sur la manière dont le tribunal traite aujourd'hui l'ordonnance d'évacuation du Procureur général, qui a été déclarée inégale, suite à un recours de l'Association RHINO. Et j'ose imaginer que si le Tribunal administratif a déclaré l'évacuation illégale, sans jugement ordonné par le Procureur général, c'est que dans les milieux de la justice on considère quand même que l'Association RHINO, forte de ses septante membres et de ses dix-huit ans d'action politique a une certaine légitimité, même si vous ne voulez pas la reconnaître ! Elle est effectivement illégale. (Exclamations.) Mais elle est parfois et peut-être souvent considérée comme légitime quand, dans une période de crise du logement, certains abusent à laisser des immeubles vides alors que la population entière souffre de la crise du logement. (Brouhaha.) A Genève, depuis longtemps, les tribunaux ont reconnu la qualité pour agir de ces associations-là, qui se battent pour que du logement social au centre-ville soit conservé pour toutes et pour tous. (Applaudissements.)

M. Mark Muller, conseiller d'Etat. Le Conseil d'Etat prend acte de la décision de la commission législative de déclarer cette initiative irrecevable, ainsi que le Conseil d'Etat l'avait proposé. Je ne dirai pas que le Conseil d'Etat est satisfait de cette décision - on n'est jamais satisfait de l'irrecevabilité d'une initiative, car, d'une certaine façon, c'est un échec. Cela étant, c'est maintenant votre choix.

Sur le fond, je voulais donner quelques indications sur la suite des opérations, parce que le Conseil d'Etat imaginait, il y a quelques semaines, lors du débat de préconsultation, que cette initiative deviendrait rapidement sans objet, puisque le Conseil d'Etat avait fait des propositions de relogement très généreuses aux habitants de RHINO pour leur permettre de quitter cet immeuble de leur plein gré et dans de bonnes conditions.

La proposition était la suivante: il s'agissait de leur mettre à disposition, contre rétribution - bien sûr, pas gratuitement - des locaux d'habitation à Loëx, une région magnifique. Certes, elle n'est pas un centre urbain, mais elle présente d'autres avantages, notamment il s'y trouve des animaux, dont des hérissons... (Rires.) Par ailleurs, nous leur avions également proposé de reloger un certain nombre d'étudiants au Carlton, dans l'hypothèse où ce dernier aurait été affecté à du logement pour étudiant, ce qui n'est en revanche par certain.

Malheureusement, les occupants de RHINO n'ont pas choisi de retenir notre proposition: ils ont préféré demeurer dans leur immeuble et continuer à utiliser les moyens juridiques et politiques à leur disposition pour rester sur place. Résultat des courses: de mon point de vue, la situation n'est pas favorable pour les occupants de RHINO, car ils ne bénéficient plus de proposition de relogement, et l'attitude de l'administration va probablement se durcir puisqu'ils sont répréhensibles à divers titres. Vous avez longuement parlé d'occupation illicite des locaux, mais ils violent aussi la loi dans cet immeuble en termes de protection des bâtiments, en termes de police des constructions, en termes de sécurité, en termes de fiscalité, en termes d'autorisations et patentes. Toute une batterie de dispositions légales cantonales ne sont pas respectées. Alors, si les occupants de RHINO veulent utiliser des moyens juridiques pour s'y maintenir, eh bien, l'administration appliquera dorénavant la loi avec beaucoup plus de sévérité et de rigueur que jusqu'à présent ! Malheureusement, personne ne sortira gagnant de cette situation. (Applaudissements.)

Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, nous sommes en procédure de vote. Je mets aux voix la proposition de la commission concernant l'unité de la forme... Celles et ceux qui, avec la commission unanime, estiment que l'unité de la forme est respectée par l'initiative 132 votent oui, les autres votent non ou s'abstiennent ?

Mise aux voix, l'unité de la forme de l'initiative 132 est adoptée par 42 oui contre 10 non et 18 abstentions.

Le président. L'unité du genre est-elle réalisée en l'occurrence ? La commission a répondu à l'unanimité par l'affirmative. Je mets la proposition de la commission aux voix: celles et ceux qui acceptent de reconnaître l'unité du genre votent oui, les autres votent non ou s'abstiennent.

Mise aux voix, l'unité du genre de l'initiative 132 est adoptée par 43 oui contre 3 non et 24 abstentions.

Le président. Ces abstentions sont sans doute constructives... Nous passons à l'unité de la matière. La commission la constate à l'unanimité. Je soumets cette recommandation à vos suffrages.

Mise aux voix, l'unité de la matière de l'initiative 132 est adoptée par 46 oui contre 5 non et 18 abstentions.

Le président. Nous devons à présent nous prononcer sur la conformité de l'initiative au droit supérieur. La commission l'a refusée à l'unanimité moins deux abstentions.

Mise aux voix, la conformité au droit supérieur de l'initiative 132 est rejetée par 60 non contre 11 oui et 3 abstentions.

Le président. Par souci et scrupule d'exactitude juridique, je vous soumets néanmoins la question de l'exécutabilité de l'initiative 132. Celles et ceux qui considèrent que cette initiative est exécutable voteront oui, celles et ceux qui comme la commission, à peu près unanime à trois abstentions près, pensent que cette exécutabilité n'est pas donnée voteront non ou s'abstiendront.

Mise aux voix, l'exécutabilité de l'initiative 132 est rejetée par 56 non contre 11 oui et 7 abstentions.

Le président. Nous passons au vote d'ensemble sur la recevabilité. Celles et ceux qui déclarent l'initiative recevable votent oui, les autres votent non ou s'abstiennent.

Mise aux voix, la recevabilité de l'initiative 132 est rejetée par 58 non contre 11 oui et 2 abstentions.

Le Grand Conseil déclare donc invalide l'initiative populaire 132.

Le Grand Conseil prend acte du rapport IN 132-B et du rapport IN 132-A.

Le président. Mesdames et Messieurs les députés, nous passons à l'initiative suivante, point 79 de notre ordre du jour.