République et canton de Genève
Grand Conseil
Séance du vendredi 17 mars 2006 à 16h
56e législature - 1re année - 6e session - 27e séance -autres séances de la session
La séance est ouverte à 16h, sous la présidence de M. Michel Halpérin, président.
Assistent à la séance: MM. Pierre-François Unger, président du Conseil d'Etat, Charles Beer, Robert Cramer, David Hiler et François Longchamp, conseillers d'Etat.
Exhortation
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, prenons la résolution de remplir consciencieusement notre mandat et de faire servir nos travaux au bien de la patrie qui nous a confié ses destinées.
Personnes excusées
Le président. Ont fait excuser leur absence à cette séance: MM. Laurent Moutinot et Mark Muller, conseillers d'Etat, ainsi que Mmes et MM. Caroline Bartl, Roger Deneys, Pierre Ducrest, Sophie Fischer, Christian Luscher, Jean Rossiaud, Pierre Schifferli et Damien Sidler, députés.
Mme Véronique Pürro (S). Nous avons déposé une motion. Elle vient d'être distribuée, c'est la motion 1676. Je souhaite demander son traitement en urgence, avec le point 43 de notre ordre du jour.
Mis aux voix, l'ajout à l'ordre du jour de la proposition de motion 1676 est adopté par 56 oui contre 4 non et 1 abstention.
Mis aux voix, le traitement en urgence de la proposition de motion 1676 est adopté par 58 oui contre 7 non et 1 abstention.
Le président. Ce point sera donc traité tout à l'heure, là où vous l'avez demandé, Madame la députée.
M. Christian Brunier (S). Hier, le parlement a refusé d'inscrire à l'ordre du jour la résolution sur Swisscom. Ne pas l'inscrire, c'est refuser un débat qui est un débat d'actualité. Je demande donc l'inscription de la résolution sur Swisscom à l'ordre du jour et son traitement en urgence. (L'orateur est interpellé.)
Le président. Nous ferons comme à l'instant, c'est-à-dire que nous voterons d'abord l'adjonction, puis l'urgence.
Mis aux voix, l'ajout à l'ordre du jour de la proposition de résolution 507 est rejeté par 37 non contre 30 oui.
Le président. Mme Corinne Chappuis Bugnon et M. Pascal Junod sont assermentés. (Applaudissements.)
Correspondance
Le président. Vous avez trouvé sur vos places l'énoncé de la correspondance reçue par le Grand Conseil. Cet énoncé figurera au Mémorial.
Lettre de M. HALPERIN Michel, Président du Grand Conseil, en réponse à la demande de Mme GAUTIER Fabienne, Présidente de la Commission de contrôle de la Fondation de valorisation des actifs de la BCGe, relative aux compétences de la commission en matière de contrôle de la Fondation de valorisation (C 2189)
Lettre du Tribunal fédéral octroyant une prolongation de délai dans l'affaire Gilles-André MONNEY, Genève et consorts, contre le Grand Conseil concernant l'initiative populaire IN 126. Le délai pour déposer la réponse au recours est prolongé, suite à la demande du 14 mars 2006, jusqu'au 5 mai 2006 (transmis à la Commission législative et à la Commission de l'énergie pour information) (voir correspondance C 2075, C 2160 et C 2180) (C 2190)
Duplique du Grand Conseil au Tribunal fédéral suisse concernant le recours de droit public et de droit administratif formés par RAMPINI & CIE SA c/ Arrêt du Tribunal administratif ATA/222/2005-GC du 22 novembre 2005, dans la cause RAMPINI & CIE SA c/ loi n° 9318, du 28 octobre 2004, modifiant les limites de zones sur le territoire de la commune de Vernier selon le plan n° 29098-540 (transmis à la Commission de l'aménagement pour information) (voir correspondance C 1950, C 1984, C 1997, C 2009, C 2035, C 2061, C 2062, C 2072, C 2073, C 2079, C 2096, C 2124, C 2139, C 2156 et C 2163) (C 2191)
Courrier du Collectif Urgence Palestine - Genève concernant la collaboration des services publics avec l'entreprise Connex Suisse SA (C 2192)
Courrier de Mme GAUTIER Fabienne, Présidente de la Commission de contrôle de la Fondation de valorisation des actifs de la BCGe concernant le PL 9239 - rapport de minorité de M. STAUFFER Eric - demande d'amendement déposée par les députés du groupe MCG (C 2193)
M. Christian Brunier (S). Je demande la lecture de la lettre du collectif Urgence Palestine.
Le président. Vous êtes soutenu ? Bien, cette lecture aura lieu. C'est le document dont le parti socialiste avait annoncé se dissocier ce matin.
M. Pierre Weiss (L). Evidemment, il y a une liberté d'expression dans notre pays. Il y a également une loi qui condamne l'antisémitisme. Le tract qui nous a été remis s'inscrit dans une correspondance d'une association dite Urgence Palestine, c'est bien de cela dont il est question. Le courrier qui nous a été adressé témoigne pour le moins d'un antisionisme patent et d'un antisémitisme larvé. Je tenais à le signaler.
M. Olivier Wasmer (UDC). Je souhaiterais la lecture de la lettre adressée par Mme Fabienne Gautier, présidente de la commission de la Fondation de valorisation concernant le PL 9239.
Le président. Vous êtes soutenu ? C'est bon.
M. Eric Stauffer (MCG). Je voulais demander la même chose que mon collègue Wasmer, mais je vais ajouter la lettre 2189, lettre que vous avez adressée à Mme la présidente de la commission de contrôle de la Fondation de valorisation des actifs de la BCGe.
Le président. Est-ce que vous êtes soutenu, Monsieur Stauffer ? Vous n'avez pas un appui suffisant pour la lecture de ma lettre. Je le regrette évidemment beaucoup, mais cela va alléger la tâche de notre secrétaire à qui je demande de bien vouloir lire les courriers 2192 et 2193.
Le président. Merci beaucoup, Madame la secrétaire, pour ce gros effort. Puisque ma lettre à la commission de contrôle de la Fondation de valorisation des actifs de la BCGe n'est pas lue, je la signale tout de même à votre attention parce qu'elle comporte pour vous, Mesdames et Messieurs les députés, une série de rappels concernant le fonctionnement des commissions en général et le fonctionnement de ce Grand Conseil en général, c'est-à-dire les tâches que nous assumons à titre individuel et celles que nous assumons à titre collectif. Le Bureau y a consacré beaucoup de soins et d'efforts et je souhaite donc que vous en preniez connaissance.
Annonces et dépôts
Néant.
Interpellations urgentes écrites
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, vous avez trouvé sur vos places les interpellations urgentes écrites suivantes:
Interpellation urgente écrite de M. Eric Leyvraz : Les pigeons de nos villes : trait d'union mortifère entre panzootie et pandémie ? (IUE 257)
Interpellation urgente écrite de M. Pierre Weiss : Le Conseil d'Etat peut-il renseigner ce Grand Conseil sur Harmos ? (IUE 258)
Interpellation urgente écrite de M. Pierre Kunz : L'Etat bouge mais ... (IUE 259)
Interpellation urgente écrite de M. Gilbert Catelain: Coût des périodes d'enseignement dans l'instruction publique genevoise (IUE 260)
Interpellation urgente écrite de M. Hugues Hiltpold : Qui prend en charge les frais de ramassage et recyclage des journaux gratuits ? (IUE 261)
Interpellation urgente écrite de M. Guy Mettan : Flux financiers entre l'Etat et les communes (IUE 262)
Interpellation urgente écrite de M. Gabriel Barrillier : CO de la SEYMAZ : l'entreprise fribourgeoise moins-disante et adjudicataire ne respecte pas les règles conventionnelles locales (IUE 263)
Interpellation urgente écrite de Mme Elisabeth Chatelain : Que fait Genève pour la Genevoise ? (IUE 264)
Interpellation urgente écrite de M. Eric Leyvraz : Sécurité intérieure : Militarisation de la surveillance de la zone frontalière (l'armée de milice comble les lacunes de la Confédération en matière de personnel) (IUE 265)
Interpellation urgente écrite de Mme Carole-Anne Kast : La nouvelle loi sur les violences domestiques reste-t-elle lettre morte ? (IUE 266)
Interpellation urgente écrite de Mme Anne-Marie Arx-Vernon von : La mixité est-elle garantie au sein des lieux d'animation, de loisirs et de sport dans le canton de Genève ? (IUE 267)
IUE 257 IUE 258 IUE 259 IUE 260 IUE 261 IUE 262 IUE 263 IUE 264 IUE 265 IUE 266 IUE 267
Le président. Conformément à l'article 162D de notre règlement, le Conseil d'Etat, respectivement le conseiller d'Etat interpellé, répondra par écrit lors de la session suivante, à savoir celle du mois d'avril.
Mesdames et Messieurs les députés, nous reprenons le cours de notre ordre du jour.
Premier débat
Le président. La parole n'est pas demandée. (Le président est interpellé.) Si ? Monsieur Stauffer, voulez-vous gagner la place du rapporteur, je vous prie ! C'est une surprise que nous traitions ce point maintenant ? Madame le rapporteur de majorité, vous avez demandé la parole ?
Mme Michèle Künzler (Ve), rapporteuse de majorité. Il s'agit par ce projet de loi de vendre à un médecin une arcade à l'avenue Blanc pour 450 000 F. Ce qui est contesté par M. Stauffer, c'est de verser une commission de courtage qui s'élèverait à 13 000 F. Voilà pour situer «l'ampleur» du problème. Il s'agit de 450 000 F pour une arcade et une commission de courtage de 13 000 F.
M. Stauffer, dans son rapport de minorité, accuse la Fondation de nous avoir menti. Il y a effectivement eu un petit problème de transmission de fiche, mais à l'origine, en 2002, la fiche déposée par la Fondation prévoyait 13 millions de pertes. Je l'avais déjà fait corriger au moment de la vente des autres éléments de ce dossier, puisque la Fondation disposait de plusieurs lots dans cet immeuble et des studios ont déjà été vendus. La fiche omettait de signaler la deuxième partie de la dette, mais, à ma demande, la Fondation a corrigé la fiche en 2004 déjà. En raison d'une erreur, l'ancienne fiche est revenue à la surface. Il s'agit d'une erreur puisque, depuis 2002, il était clair que, sur ce dossier, la perte serait importante, qu'elle serait de 13 millions. C'est ce qui a toujours été dit. De plus, à l'époque déjà, nous nous étions étonnés de cette perte. On nous avait répondu par une lettre en mai 2002, c'est dire que ce n'est pas récent et que cela ne dépend pas du rapporteur de minorité. Les gages avaient été surévalués en 1990. Ensuite, les intérêts n'ont pas été payés pendant plus de dix ans et la société qui détenait les actifs a fait faillite. Après quoi, les gages ont été transmis à des porteurs en 1997. En 2000, la créance a été reprise par la Fondation de valorisation, puis le portage a été repris en 2002. Il y a donc tout un historique, qui nous a été transmis en 2002 déjà. Voilà pour les éléments factuels. J'interviendrai plus tard, après M. Stauffer.
M. Eric Stauffer (MCG), rapporteur de minorité. Mesdames et Messieurs les députés, chers collègues, chers amis... (Brouhaha. Rires.) ...rassurez-vous, on en a quand même quelques-uns, heureusement ! Il est vrai que 13 000 F, c'est un montant ridicule, mais il ne s'agit pas aujourd'hui de décider du montant, il s'agit de se prononcer sur le principe. Mesdames et Messieurs, vous n'êtes pas sans savoir que, depuis quelques semaines, il y a eu un réveil salutaire de la part des autorités judiciaires en ce qui concerne l'intégralité de la débâcle de la BCGe.
Aujourd'hui, je vais vous lire quelques documents, je vais vous expliquer en fait que, encore une fois, ce n'est pas le montant de 13 000 F, qui peut paraître ridicule, qui est en cause aujourd'hui, mais c'est bel et bien le paiement de commissions à des sociétés dites de portage. Ces sociétés ont contribué à la débâcle à coup de milliards de francs à la charge de nos contribuables. Contribuables qui, je vous le rappelle, pour une grande partie, nous ont élus aux postes de députés que nous occupons aujourd'hui. A ce titre, chers collègues, nous avons l'obligation de protéger les deniers publics. Pour moi, d'un point de vue éthique, avant d'aborder l'aspect du droit, il est juste inconcevable que nous puissions encore nous payer le luxe de verser des commissions de courtage ou, pire encore, chers collègues, de verser, lorsqu'il y a un bénéfice sur les opérations dites de portage, 50% des bénéfices aux sociétés dites de portage. C'est juste inconcevable du point de vue de l'éthique. J'aimerais que tous ceux qui souffrent aujourd'hui à Genève, les fonctionnaires sur les mécanismes salariaux, les gens à qui on supprime des subventions, se demandent combien de PME et combien d'emplois nous aurions pu créer avec les trois milliards de pertes à la BCGe. Rassurez-vous, ces trois milliards ont quand même profité à environ 80 personnes sur le canton, c'est un fait avéré. J'aimerais aussi dire que nous ne sommes pas les seuls à penser comme cela. Je ne remets évidemment pas en question ici le rôle de la Fondation, qui est éminemment important, puisqu'il s'agit de valoriser au mieux et je dis bien valoriser au mieux les actifs catastrophiques de la BCGe. Ce que je remets ici en question, c'est la continuation du respect des contrats qui, très certainement, au vu de ce que je vais vous expliquer et au vu de ce que la justice va faire, pour la plus grande partie, seront déclarés illicites puisque l'utilisation même de ces contrats avait pour but de dissimuler les pertes dans le bilan, c'est-à-dire, de faire des faux bilans pour dissimuler les pertes qui n'avaient pas été provisionnées dans les comptes de la BCGe. Concernant l'état de faits, je vais vous lire très brièvement ce passage:
«La Banque cantonale, à l'époque, a organisé de nombreux contrats dits de portage. Les juges d'instruction genevois en charge du dossier BCG ont inculpé les anciens dirigeants de la Banque cantonale de gestion déloyale et de gestion déloyale des intérêts publics ainsi évidemment en raison du faux bilan ainsi généré au sein de la Banque cantonale de faux dans les titres. Certes, les dirigeants en question bénéficient de la présomption d'innocence. Cependant, prima facie, les contrats de portage sont analysés pour l'heure par la justice comme constitutifs d'actes illicites. Ils sont générateurs a minima d'infractions de gestion déloyale des intérêts publics et de faux dans les titres. Du côté des bénéficiaires, par exemple, les régies, des contrats de courtage on retrouve des régies administrées par les mêmes personnes physiques que celles qui administrent les sociétés dites de portage. La procédure en cours récemment ouverte par le Procureur général a pour vocation de mettre en évidence ou non la co-responsabilité pénale et civile de ces personnes physiques dans les actes de portage montés à l'époque par les dirigeants de la banque. Leur degré de connivence avec ceux-ci sera examiné par le Juge d'instruction si bien que si cette connivence était établie, ils seraient complices au plan pénal et au plan civil (article 50 du code des obligations) des actes illicites commis par les dirigeants de la banque. On ne saurait accepter dans ces conditions que l'Etat, désormais au courant de cette situation, accepte d'honorer des prestations qui seraient liées à la commission d'un acte de co-activité ou de complicité d'actes illicites.»
Donc, vous comprenez bien, Mesdames et Messieurs et chers collègues députés, qu'il ne s'agit pas ici de remettre en question un montant de 13 000 F. Il s'agit ici de quelque chose de beaucoup plus important: de remettre en question un principe, celui du respect des contrats jadis signés par la BCGe, qui ont coûté si cher à nos contribuables. Comme je vous le disais, certains groupes parlementaires ici pensent la même chose que le groupe MCG et j'aimerais citer quelques phrases de notre cher ami le député Gautier qui, dans son livre Le Bal des Eunuques...
M. Renaud Gautier. Excellent, excellent !
M. Eric Stauffer. ...nous dit ceci: «Le parlement, dépositaire d'un pouvoir qui lui a été confié par le peuple, ne représente plus qu'une chambre d'enregistrement de décisions souvent prises par ailleurs dans les arcanes du gouvernement et de l'administration sous la pression d'associations d'intérêts de droite et de gauche, ou encore, sous influence des médias de masse. Le législatif ainsi réduit à de vaines et futiles gesticulations, c'est l'ensemble de nos démocraties parlementaires telles que les pensaient John Locke et Montesquieu qui sont en danger.»
Donc, ce que je voulais dire c'est que c'est là que se trouve le problème et je vous demande aujourd'hui de ne pas prendre en considération le montant, qui est certes très faible en comparaison de la débâcle, mais le principe, Mesdames et Messieurs, car il est de notre devoir éthique, avant de parler de droit pur, de défendre les intérêts des contribuables.
Pour revenir à ce PL 9239, effectivement, Mme la rapporteuse de majorité dit qu'en 2002 ils avaient corrigé une certaine erreur. Vous m'excuserez, mais nous, MCG, Mouvement citoyens genevois, en 2002, nous n'étions pas là. Et moi, en ma qualité de commissaire, je pars du principe que je dois consciencieusement contrôler tous les documents qui me sont remis. Chose que j'ai faite lorsque j'ai pris ce rapport de minorité. Et là, comme par hasard, j'ai découvert qu'en lieu et place d'une perte ou d'un crédit initial de 12 millions...
Le président. Il va vous falloir conclure, Monsieur le rapporteur !
M. Eric Stauffer. Oui, bien sûr ! En lieu et place d'un crédit de 12 millions, c'était un crédit initial de 17,1 millions, pour un objet qui avait une valeur totale de 4 millions. Lorsque j'ai déposé mon rapport de minorité, c'est-à-dire lundi en début d'après-midi, comme par hasard, comme par enchantement magique, le lendemain...
Le président. Votre temps est échu, Monsieur le député.
M. Eric Stauffer. Je conclus, Monsieur le président. J'ai reçu de la Fondation de valorisation une lettre d'excuses à mon domicile, disant qu'ils s'étaient trompés. Eh oui, ils s'étaient trompés, pas de beaucoup, de six millions, Mesdames et Messieurs, et c'est là où je veux en venir, ...
Le président. La parole vous est retirée, Monsieur le député, le temps est dépassé.
Mme Fabienne Gautier (L). Vous me voyez prendre la parole, choquée par la teneur du rapport de minorité du député Stauffer, choquée par les débordements de ce dernier qui a l'outrecuidance de violer le secret de fonction de membre de la commission de contrôle de la Fondation de valorisation. En effet, M. Stauffer est tenu, par décision majoritaire de ladite commission, de garder l'anonymat des débiteurs et des personnes ou sociétés des contrats de portage de la Banque cantonale. Comme vous pouvez le constater, ce n'est le cas ni dans son rapport de minorité, ni dans l'amendement déposé par les députés du MCG.
Nous ne sommes pas ici aujourd'hui pour faire le procès de la Banque cantonale. Cette affaire est pendante devant la justice et nous ne pouvons pas nous substituer à celle-ci. Nous ne sommes pas ici non plus pour juger si la pratique des contrats de prêts partiaires, pratique utilisée à l'époque, est licite ou illicite. Jusqu'à ce jour, rien ne nous autorise à affirmer que ces fameux contrats de portage sont illicites.
Le député Stauffer ne désire pas se substituer à la justice, selon ses dires. On se demande après ce que l'on vient d'entendre si, vraiment, il ne se prend pas pour la justice... Mais en tous cas, il fait tout pour freiner les travaux de la commission de contrôle. La tâche principale confiée à cette dernière est de permettre l'étude des projets de lois du Conseil d'Etat afin que ceux-ci soient votés par le Grand Conseil et que les actifs de la Banque cantonale soient réalisés au plus vite.
Pour mémoire, la Fondation de valorisation des actifs de la Banque cantonale a été créée à la suite de l'entrée en vigueur en date du 25 mai 2000 de la loi 8194, constitutive, votée par l'assemblée de séant, accordant une autorisation d'emprunt au Conseil d'Etat pour financer l'acquisition d'actions nominatives et au porteur de la Banque cantonale. Ladite loi prévoyait également un crédit extraordinaire d'investissement pour la création du capital de dotation de la Fondation de valorisation, fondation de droit public, constituée, je cite l'article 5 de ladite loi: «afin de favoriser la gestion, la valorisation et la réalisation de certains actifs de la Banque cantonale de Genève». A l'article 7, on peut lire encore: «But et activités: la Fondation a pour but de gérer, valoriser et réaliser les actifs de la Banque cantonale de Genève qui lui seront transférés et, par là, de contribuer à l'assainissement de celle-ci». Cette même loi 8194, en son article 24, a institué une commission de contrôle que j'ai l'honneur de présider actuellement. Dans la foulée de l'entrée en vigueur de la loi 8194, l'Etat signait une convention tripartite avec la banque cantonale et la Fondation de valorisation, convention dans laquelle la Banque cédait en pleine propriété à la Fondation qui les acquérait tous les actifs correspondant aux créances en capital, ainsi que les contrats que la Banque avait conclus avec les sociétés de mise en valeur et les actifs et droits rattachés à ces sociétés.
A ce moment-là, l'Etat a provisionné une perte de 2,7 milliards pour le financement des pertes sur la vente des actifs de la Banque cantonale qui avaient été transférés à la Fondation de valorisation. Jusqu'à ce jour, la Fondation de valorisation a pleinement rempli son objectif de gérer, rentabiliser mais, surtout, valoriser et réaliser aux meilleurs prix les actifs qui lui ont été transférés par la Banque cantonale. A ce jour, Mesdames et Messieurs les députés, avec votre aide, puisque c'est vous qui votez les projets de lois qui vous sont soumis par la commission de contrôle, la Fondation a réalisé plus de la moitié des actifs de la BCGe pour une perte estimée en son temps à plus de 50% mais qui est en fait bien moindre actuellement. Aujourd'hui, même si nos travaux sont ralentis à cause de l'interventionnisme systématique du député Stauffer, la commission de contrôle souhaite mener à bien sa mission, dans le but que la Fondation de valorisation puisse profiter du marché actuel de l'immobilier, qui est très porteur. La commission souhaite continuer à réaliser les actifs de la Banque cantonale au meilleur prix afin de diminuer toujours plus les pertes et ainsi préserver, Monsieur Stauffer, l'argent des contribuables. Tout retard pris dans la réalisation desdits actifs coûte effectivement très cher aux contribuables, nous coûte très cher. C'est pour toutes ces raisons, Mesdames et Messieurs les députés, que je vous demande de voter oui au projet de loi qui vous est présenté. (Applaudissements, bravos.)
Le président. Sont encore inscrits: M. Olivier Wasmer, Mme Véronique Pürro, M. Pascal Pétroz, les deux rapporteurs et M. Claude Jeanneret ainsi que M. Olivier Jornot. La liste est close.
M. Olivier Wasmer (UDC). Je crois que ma collègue Fabienne Gautier a tout dit sur cette commission, comme d'ailleurs, la rapporteuse ou la rapportrice, j'ai perdu mon français ! (Chahut.)
Mme Michèle Künzler. La rapporteure !
M. Olivier Wasmer. Je sais qu'il y a eu une période où il y a effectivement eu une égalité; j'ai perdu mon vocabulaire, vous m'excuserez. Donc, Mme la rapporteure est venue nous dire dans quelles circonstances on vendait ce bien immobilier. Or, une de nos autres collègues députées, que je ne citerai pas aujourd'hui, m'a dit: «Tiens, M. Stauffer est devenu le Zorro de la commission !». Effectivement, c'est la question qu'on se pose aujourd'hui: que vient faire M. Stauffer ? A l'encontre de tout ce qui peut se dire, effectivement, parfois, il y a des gens qui prêchent dans le désert et qui ont raison. En l'occurrence, ce n'est manifestement pas le cas.
En effet, M. Stauffer fait un amalgame de tout et de rien pour faire parler de lui, d'ailleurs vous avez vu qu'il a tout de suite bénéficié de la télévision quand il a pris la parole - je ne suis pas jaloux du tout - on parle de lui dans la presse, à la télévision... (L'orateur est interpellé.) ...et je crois que c'est ce qui lui importe. Parce qu'aujourd'hui, Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, et les spectateurs qui nous regardent, si le scandale de la BCGe n'est effectivement pas encore réglé, c'est parce qu'il se trouve entre les mains de la justice. Dans un Etat démocratique, dans un Etat de droit, c'est la justice qui tranche les litiges qui méritent d'être jugés. Le parlement édicte des lois et en aucun cas il ne peut y avoir de confusion. Or, M. Stauffer aujourd'hui, dans son rapport de minorité et, on le verra plus loin, dans le projet de loi déposé par le MCG, essaie de se constituer en juge qui trouve que la justice ne va pas assez vite, en juge qui décide que le contrat de courtage est illicite, en juge qui considère que les commissions dues à un courtier ne sont pas valables puisque les contrats de portage sont illicites... Eh bien, Mesdames et Messieurs les députés, le Conseil d'Etat vous a répondu hier sur ce point en considérant à l'unanimité que les contrats de portage étaient licites, que les commissions étaient dues.
A ce sujet, je vais préciser une chose, pour le cas où certains députés voudraient suivre M. le député Stauffer: les contrats de courtage ont été négociés par la Fondation de valorisation dans le but de faire vendre les immeubles. Tout travail mérite salaire. Tous ces courtiers, quels qu'ils soient, même si certains pouvaient être impliqués initialement dans la débâcle de la BCGe, ont travaillé, ils ont vendu des immeubles pour le bien de la Fondation et en aucun cas on ne peut les priver du fruit de leur travail. Or, le député Stauffer nous dit dans son rapport de minorité qu'il ne faut plus payer de courtage, il nous donne des éléments très vagues, en faisant des amalgames de tout et de rien, comme je vous l'ai dit, en s'appuyant sur les contrats de la BCGe pour dire que la Fondation ne doit pas payer. Non, Monsieur Stauffer, aujourd'hui, le parlement ne vous suivra pas, parce que malheureusement il y a des lois. La Fondation a été créée par une loi du 15 mai 2000... (L'orateur est interpellé.) Il y a des lois et ces lois doivent être respectées.
Le président. Je salue la présence à la tribune de nos anciennes collègues, Mmes Jocelyne Haller et Mireille Gossauer-Zürcher. (Applaudissements.)
Mme Véronique Pürro (S). M. Stauffer a raison sur plusieurs points. (L'oratrice est interpellée.) Eh oui ! N'en déplaise à certains, Monsieur Gautier ! Effectivement, dans les années 1980-1990, la Banque cantonale de Genève a mené une politique de prêts qui a largement contribué, en favorisant une spéculation immobilière inacceptable, à augmenter les loyers dans notre canton, ce qui a placé de nombreux genevois dans l'incapacité de payer des loyers tellement ils étaient élevés. Ce n'est qu'une des conséquences, il y en a eu bien d'autres.
M. Stauffer a également raison quand il laisse entendre que les sociétés de portage, et les socialistes l'ont dénoncé à plusieurs reprises, ont largement contribué à cette spéculation immobilière. Le choix du parlement de sauver la Banque cantonale de Genève - et je donne raison également à M. Stauffer - a coûté, et coûte, cher, même très cher. En effet, depuis plusieurs années, les comptes de l'Etat sont plombés et, en bout de course, c'est bien le contribuable genevois qui va payer pour les problèmes qu'a traversés la Banque cantonale genevoise. Les socialistes, Mesdames et Messieurs les députés, n'ont eu de cesse, que ce soit au gouvernement, au parlement ou dans des associations telles que l'Asloca, de dénoncer cette spéculation immobilière et de défendre les locataires et leurs intérêts. Par contre, et c'est là que le chemin de M. Stauffer et le nôtre se séparent...
Des voix. Aaaah !
Mme Véronique Pürro. Par contre, les moyens qu'utilise M. Stauffer ne sont pas les bons. D'une part, les choses qu'il dénonce ont eu lieu avant la création de la Fondation de valorisation, la plupart de ces choses, Monsieur Stauffer, vous l'admettrez. D'autre part, la justice a été saisie de nombreuses plaintes et elle examine, comme M. Wasmer l'a rappelé tout à l'heure, tous les documents, tous les actes et tout ce qui s'est passé à l'époque de ces prêts, disons, éhontés.
Aujourd'hui, M. Stauffer, par tous les moyens qu'il essaie d'utiliser, bloque, comme l'a dit Mme Gautier, la présidente de la commission, les travaux de cette commission. Cela, nous ne pouvons l'accepter. Nous y reviendrons au point 43, puisque cela fait l'objet de deux motions, vous venez d'accepter le traitement en urgence de l'une d'entre elles. Venir nous dire maintenant qu'en refusant systématiquement les projets de lois on va contribuer à améliorer la situation et que les contribuables auront moins à payer, c'est faux, Monsieur Stauffer. Vous avez probablement besoin de sujets pour apparaître. Celui-ci, c'est vrai, est facile, puisqu'il est tellement gros ! Nous sommes assez d'accord pour dire que tous les milliards qui ont été encaissés par certains et perdus pour d'autres, en particulier, pour les contribuables, c'est une injustice. Et on espère bien que justice sera faite. Une fois de plus, les moyens que vous utilisez pour dénoncer tout cela ne sont intellectuellement et politiquement pas corrects, Monsieur Stauffer.
Si, vous l'avez vu à la lecture du rapport de M. Stauffer, un socialiste a accepté de vous suivre et l'autre, c'est moi-même, s'est abstenu, c'est parce que jusqu'à présent, nous n'avons pas obtenu de réponse à deux de nos questions: est-ce que nous pouvons dénoncer ces fameux contrats de portage et, si oui, quelles sont les conséquences financières pour l'Etat de Genève, puisque, là aussi, il en va des intérêts du contribuable. C'est parce que nous n'avons pas encore réponse à ces deux questions importantes que je me suis abstenue et que je crois que mon groupe va s'abstenir aujourd'hui sur ce rapport. Ce n'est en aucun cas parce que nous sommes d'accord de suivre les méthodes de M. Stauffer.
M. Pascal Pétroz (PDC). Le groupe PDC votera le projet de loi qui vous est ici proposé tel qu'il est, sans l'amendement déposé par le MCG. Le groupe démocrate-chrétien s'associe aux propos de Mme Fabienne Gautier, présidente de la commission, et est particulièrement choqué que les noms de certaines personnes figurent dans les documents qui nous ont été remis hier soir. C'est totalement scandaleux. On cite des noms, on soumet des gens à la vindicte populaire sans qu'ils puissent se défendre. C'est totalement scandaleux et nous ne devons pas tolérer ce genre de méthode. On nous parle d'éthique dans ce parlement. L'éthique, c'est fantastique, c'est quelque chose que tout le monde doit avoir et vous ne trouverez personne dans ce parlement qui sera contre cette notion d'éthique.
Simplement, certaines questions se posent dans ce dossier: comment est-ce que certains documents viennent à la surface tout à coup, maintenant, par quel biais ? Monsieur Stauffer, vous vous livrez à des spéculations, vous produisez certaines pièces, sans les produire toutes, tout cela est très intéressant. On peut se demander si vous ne produisez pas seulement les pièces qui vous arrangent. J'aimerais d'ailleurs bien savoir où vous vous les procurez. Il faudra peut-être nous le dire: est-ce que ces pièces ne proviennent pas de certains débiteurs anciens ou actuels de la Banque ? Il faudrait que vous nous le disiez, il faudrait que vous nous expliquiez aussi les liens que vous avez avec des personnes qui sont responsables de la débâcle de la Banque cantonale de Genève, j'aimerais beaucoup vous entendre à ce sujet. Je dois franchement vous dire que si nous pouvions mettre en évidence des accointances entre le rapporteur de minorité et des personnes responsables de la débâcle de la Banque cantonale de Genève, cela nous permettrait de voir tout cela sous un jour tout à fait particulier.
S'agissant du domaine qui nous occupe plus précisément, ce projet de loi, l'idée, Mme Pürro l'a bien rappelé, n'est pas de prétendre que tout le monde est honnête et qu'il n'y a pas de magouilles. Bien sûr que dans n'importe quelle société, dans n'importe quel groupe, dans n'importe quelle activité, il y a des gens «bien» et il y a des gens «pas bien». Il y a des choses «bien» qui se font et des choses «pas bien». Ce qui, moi, me gêne, dans la démarche qui est ici proposée, c'est cette technique de l'amalgame, qui consiste à dire: «Tous pourris !», à parler de complot et à accréditer la thèse que les sociétés de portage seraient composées de voyous, de personnes sans aucune éthique. On oublie qu'une société de portage est une société de valorisation et que la Fondation de valorisation n'est rien d'autre qu'une société de portage à très grande échelle. Cela, il faut aussi le dire, Mesdames et Messieurs les députés, il faut être honnête dans l'analyse et dire que oui, certains portages ont été et sont peut-être encore aujourd'hui inadmissibles. Quand un portage est confié à un débiteur défaillant de la Banque, honnêtement, ce n'est pas normal. Mais il y a d'autres conditions où une mise en valeur de ce que d'aucuns ont appelé les casseroles de la BCGe a pu être effectuée et il faut aussi le dire... (L'orateur est interpellé.) ...je vous ai écouté, Monsieur Stauffer, ne me coupez pas la parole, s'il vous plaît ! Il faut être honnête jusqu'au bout.
Fort de toutes ces considérations, les conclusions sont assez simples. Il y a eu une débâcle de la Banque cantonale. Une procédure judiciaire est en cours. Cette procédure judiciaire est diligentée par quatre juges d'instruction à plein-temps. Des auditions sont faites chaque semaine par des gens qui sont formés pour cela, alors que nous, nous n'avons pas de formation spécifique et nous n'avons pas de temps pour nous occuper de ces questions, parce que nous ne sommes pas des professionnels. Les responsables de la débâcle de la BCGe devront être châtiés, c'est une question de justice, mais nous, dans le cadre de la séparation des pouvoirs... (Chahut.) ...nous devons rester à notre place.
S'agissant maintenant des sociétés de portage, d'après les informations en ma possession, l'instruction pénale porte aussi sur cet objet, de sorte que, si des choses «pas bien» ont été faites dans le cadre de ces portages, il appartiendra aussi à la justice de nous le dire. Pas au parlementaire X ou Y sur la base de certaines pièces dont on ignore d'où elles viennent et sans qu'on ait le dossier complet. Ce n'est pas au parlementaire X ou Y de venir nous expliquer ce genre de choses. C'est la justice qui devra nous dire qui a tort et qui a raison et c'est la justice qui devra faire payer ceux qui sont coupables.
Cela étant, s'agissant plus spécifiquement de l'amendement de M. Stauffer, qui a eu l'honnêteté de rappeler qu'il s'agissait effectivement d'un montant de 13 000 F. C'est vrai qu'on peut discuter du principe, mais je m'associe aux propos de M. Wasmer qui a très bien rappelé qu'une commission de courtage, c'est une commission de vente. Pour qu'une commission de courtage soit versée, il faut qu'il y ait une vente. Sans vente, pas de commission de courtage. Si une commission de courtage a été versée, c'est bien qu'une vente a été effectuée par l'entité qui bénéficie de la commission de courtage. C'est tout à fait logique. La question qu'on pourrait se poser ensuite, c'est: est-ce que pour des objets dont la Fondation de valorisation s'occupe, il est nécessaire de faire appel à des courtiers, alors que peut-être, dans le marché immobilier actuel qui est très porteur, il y aurait d'autres moyens de procéder à la vente. C'est une question que nous devrons nous poser à l'avenir, mais remettre en question avec effet rétroactif les commissions de courtage qui doivent être versées à des gens qui ont fait une activité qui a débouché sur une vente, c'est totalement hors de propos, et totalement illégal. Je rappelle à toutes fins utiles que, si nous devions nous lancer sur cette voie, cela poserait toute une série de problèmes et je vois d'ici les demandes en justice totalement justifiées qui pourraient pleuvoir sur l'Etat de Genève. Je crois que nous avons aujourd'hui suffisamment de soucis à essayer de régler les casseroles de la BCGe sans partir encore dans cette voie. Raison pour laquelle, Mesdames et Messieurs les députés, le parti démocrate-chrétien vous recommande de voter ce projet de loi tel qu'issu des travaux de la commission.
Une voix. Bravo !
Le président. Bien calculé, Monsieur le député, vous étiez juste au bout de votre temps de parole, c'est admirable !
M. Claude Jeanneret (MCG). J'ai entendu plein de choses. Si certaines personnes ont été choquées, moi aussi. Il est évident que M. Stauffer a parfois une méthode de travail qui peut surprendre. J'aimerais quand même préciser une chose: ce qui me choque le plus, c'est que, pendant très longtemps, on a été très passifs. Les enquêtes sur la BCGe ont dormi. Il est temps de les réveiller aujourd'hui, avant la prescription.
De plus, je suis choqué par la passivité de la commission de contrôle de la Fondation de valorisation qui n'a pas fait état de ce que, comme dirait M. Stauffer, en créant cette Fondation de valorisation, on a tout à coup oublié tout ce qui s'était passé du côté de la Banque cantonale. On ne veut plus le savoir, la Fondation n'ayant pour objet que de valoriser des biens immobiliers sans que l'on cherche pour autant à savoir si ces biens ont été l'objet d'opérations correctes ou incorrectes. Je vais simplifier le problème: ce qui me gène, c'est que nous en arrivons maintenant à voter des lois permettant la vente d'objets alors qu'on n'en a pas la traçabilité. C'est un peu comme si un objet qui a disparu pendant longtemps et dont l'origine serait douteuse était présenté au mont-de-piété par un porteur. Le porteur se fait octroyer un crédit, on oublie pendant un certain temps de rembourser la dette, cet objet de haute valeur est vendu aux enchères, si l'enchère permet de faire un bénéfice, on le partage, si c'est une perte, c'est l'ameneur d'affaire qui la prend à sa charge et, après la vente, cet objet redevient parfaitement net pour tout le monde... C'est ce qui me gêne: nous n'avons pas suivi, nous n'avons pas forcé, à l'origine, l'enquête pour savoir si, au niveau de la BCGe, il y avait eu des malversations. Les gens mandatés maintenant pour vendre ou pour porter ont-ils participé à l'époque à des opérations illicites ? On ne le sait pas, on n'a pas enquêté, donc on ne peut pas juger. Je pense que c'est sur ce point que M. Stauffer a raison. Il met le doigt sur quelque chose de délicat: la Fondation de valorisation, hormis le fait qu'elle vend ses immeubles le mieux possible, ne permet pas de mener l'enquête qu'il faut sur l'historique de ce qu'elle vend.
M. Olivier Jornot (L). Nous avons l'occasion cet après-midi de nous adonner à ce qui semble être devenu un grand fantasme collectif, celui de ces célèbres portages. Il est sûr que les portages - puisqu'il est désormais convenu de les nommer ainsi - posent un problème tout à fait sérieux, et M. Pétroz a rappelé à juste titre que ce problème concernait avant tout les organes de la banque qui sont aujourd'hui aux prises avec une procédure pénale.
M. Stauffer va un peu vite en disant que les organes en question seront bien entendu condamnés. Disons qu'ils ont au moins été inculpés et qu'une procédure pénale suit son cours avec des moyens considérables.
Mais cela ne veut pas encore dire que, du côté des porteurs, la situation est la même. On rappellera que le pool des juges d'instruction qui enquête sur l'affaire de la banque cantonale n'a pour l'instant prononcé aucune inculpation dans ce domaine, alors qu'il est saisi de l'ensemble de la problématique. Et ce ne sont pas les récentes dénonciations déposées à ce sujet - et malgré un battage médiatique dans la meilleure presse - qui vont y changer grand-chose, parce que les porteurs, Mesdames et Messieurs, n'avaient aucune obligation de veiller à ce que la banque respecte ses obligations de provision.
Cela étant, il y a peut-être deux ou trois choses à dire sur les allégations qui figurent dans le rapport de minorité et dans l'amendement dont nous aurons à traiter tout à l'heure. Mme Gautier a rappelé les circonstances dans lesquelles la Fondation a été créée. On peut ajouter qu'aussitôt que la Fondation a été créée et qu'elle s'est mise au travail elle a étudié la problématique des portages et elle les a tous - je dis bien : tous - résiliés, pour l'ensemble des biens qui se situent sur le territoire de Genève. Elle a repris elle-même la propriété de l'ensemble de ces biens immobiliers. Et, pour celui qui nous occupe aujourd'hui, le rapport de majorité apporte la précision que c'est le 30 juin 2002 que la Fondation a repris la propriété de ce bien. Tout cela signifie que l'on peut ergoter pendant des heures, mais nous ne sommes pas en train de parler d'un dossier de portage.
Le rapport de minorité et l'amendement nous posent quelques questions à propos des différents contrats. On parle de ce fameux contrat de prêt partiaire - ce nom qui a aussi fait rêver. Je vous rappelle que le prêt partiaire était un moyen pour la banque cantonale de s'assurer une part du bénéfice en cas de revente du bien. Le prêt partiaire avait donc précisément pour objectif de sauvegarder les intérêts de la banque. Inutile de dire que la Fondation de valorisation n'a conclu aucun contrat de prêt partiaire.
Les autres contrats concernés sont un contrat de gérance, pour permettre à la Fondation d'encaisser les loyers des objets dont elle est propriétaire, et un contrat de courtage dans le cadre de la vente. Un contrat de courtage non exclusif, contrairement à ce qui nous est expliqué - et vous savez très bien comment cela se passe. Il suffit d'aller sur le net pour constater que les objets mis en vente par la Fondation doivent obligatoirement passer par là. Cela signifie que vous pouvez acquérir des biens de la Fondation sans que la moindre commission de courtage soit payée. Lorsqu'il s'agit d'un objet de mauvaise qualité qui a de la peine à partir, la Fondation bénéficie de l'activité d'un courtier et, comme tout travail mérite rémunération, elle le paie au moyen d'une commission de courtage.
Pour jouer les Fouquier-Tinville, il faut avoir une guillotine bien aiguisée ou, pour le moins, vérifier ce que l'on dit. Or, il y a trop d'incompréhensions, d'erreurs, d'inexactitudes, de pataquès et de confusion. Non, Monsieur Stauffer, le portage n'est pas illicite. Ce qui est illicite, c'est le comportement des organes de la banque qui ont utilisé le portage pour éviter de provisionner. Non, Monsieur Stauffer, il n'y a plus de portage à ce jour pour l'ensemble des biens immobiliers situés sur le canton de Genève. Non, la Fondation n'a pas conclu de contrat de prêt partiaire. Non, Monsieur Stauffer, malgré tout le battage que vous organisez à votre profit dans cette affaire, vous ne parviendrez pas à jeter l'opprobre - en tous cas, c'est ce que je souhaite et ce que souhaite le groupe libéral - sur une Fondation et sur des acteurs de l'immobilier qui se battent pour réduire les conséquences de la débâcle de la Banque cantonale. En d'autres termes, Monsieur Stauffer, vous ne parviendrez pas à augmenter la perte que va subir la Fondation, la perte que garantit l'Etat et, en définitive, la perte que doit supporter le contribuable que vous prétendez - bien à tort - défendre ici. (Applaudissements.)
M. Eric Stauffer (MCG), rapporteur de minorité. C'est parce que la vitesse de la lumière est supérieure à celle du son que certains paraissent brillants avant d'avoir l'air con. Excusez-moi, Monsieur le président, ce que je veux dire...
Le président. Monsieur le rapporteur, voulez-vous, je vous prie, surveiller votre manière d'exprimer les choses.
M. Eric Stauffer. Je me suis laissé emporter, je présente mes excuses à M. Jornot.
Une voix. Vous aviez préparé votre affaire, vous n'êtes pas capable d'imaginer une phrase pareille.
M. Eric Stauffer. Je me suis excusé auprès de M. Jornot, car, comme tout le monde le sait, la vérité n'est pas dans les «Jornot». Bien...
Le président. Monsieur le rapporteur, nous connaissons déjà bien vos talents de comédien, ils sont importants, publics, et nous vous prions d'en faire un usage tempéré dans cette enceinte. Nous savons aussi que la BCGe et ses multiples vicissitudes sont un fonds de commerce inépuisable pour les politiciens, mais nous avons un ordre du jour qui est important et nous souhaiterions pouvoir nous épuiser aussi sur d'autres choses.
M. Eric Stauffer. C'est bien entendu, Monsieur le président. J'aimerais rectifier plusieurs choses, dans l'ordre chronologique. Je n'ai nullement l'intention de refuser la vente de cet objet, soyons bien clairs sur les termes. Je vous ai expliqué que c'est un vote sur le principe de ne pas continuer à respecter des contrats qui ont plombé les comptes de la République.
Partant de ce principe, certaines inexactitudes ont été mentionnées par les différents intervenants. Comme, par exemple, «Tout travail mérite salaire». Je peux être d'accord, mais, dans certains cas - je ne dis pas que c'est le cas de ce projet de loi - des contrats signés avec la BCGe donnaient l'exclusivité au porteur. Et quand bien même le porteur n'avait pas vendu l'objet, il percevait une commission. Oui, c'est arrivé, et Mme Künzler le sait mieux que quiconque, car elle était la présidente lors de la dernière législature. Ce que je veux dire, c'est que nous savons qu'un certain nombre de dossiers vont produire des problèmes juridiques dans un avenir relativement proche. J'en veux pour preuve la réponse que le gouvernement lui-même a donné à mon interpellation urgente écrite. Je vous citerai deux brefs passages en conclusion : «Le rapport entre le montant de la garantie et le montant des risques globaux est de un à trois. Dans ces conditions, il était impossible, dès le début de l'opération, de couvrir l'ensemble des risques de ce dossier par cette garantie.» Le financement était une opération totalement spéculative et fictive : «L'opération financière montée par la BCGe en tant que telle était donc viciée dès le départ.» Je m'arrêterai là. Ce que je veux dire, c'est qu'il y a plein de dossiers qui seront très certainement déclarés illégaux. Et je vous demande d'appliquer - pour assumer notre responsabilité de député - un principe de précaution, car nous savons d'ores et déjà que l'application de ces contrats dits de portage servait à camoufler, à dissimuler les pertes dans le bilan de la banque qui, par ailleurs, n'étaient pas provisionnées. Si les pertes avaient été provisionnées, il n'y aurait eu aucun problème. Mais ce n'était pas le cas, sinon la Banque cantonale aurait fait faillite.
Je vous demande, Mesdames et Messieurs, devant les gens qui nous ont élus, le vote nominal sur cet objet. Est-ce que vous suivez ? (Rires. Brouhaha.) Le vote nominal ! Partant de ce principe, il faut que nous puissions faire évoluer ces mentalités. Il faut que nous arrêtions ces clivages gauche-droite. J'entends bien que certains intervenants ont peut-être des intérêts divergents de ceux du MCG, mais j'aimerais seulement que l'on s'élève au-dessus de cela. C'est une question de principe, d'éthique, avant même de parler de droit. Nous sommes le pouvoir législatif, c'est le plus grand pouvoir qui est à Genève. C'est à nous de décider si nous voulons continuer à payer ces commissions qui accroissent le déficit à la charge du contribuable ou pas.
Le président. Merci, Monsieur le rapporteur. Je vous signale que - comme corps législatif - nous faisons des lois et donc du droit. La morale, c'est autre chose, et je ne suis pas sûr que cela relève de nos aptitudes.
Mme Michèle Künzler (Ve), rapporteuse de majorité. Tout d'abord, j'aimerais dire que personne dans cette salle ne trouve que toute l'affaire de la BCGe a été quelque chose de positif. Il faut en être conscient: il n'y a pas que vous qui avez dénoncé les faits. Je crois qu'on peut rendre hommage à certaines personnes de l'Alliance de gauche et à certains Verts... (Réactions de l'assistance.) ...qui avaient dénoncé à l'époque le manque de provisions. A l'époque, c'était quelque chose de contesté. Personne ne nie la gravité des faits.
Maintenant, on se situe à un autre moment. La Fondation de valorisation a été créée par une décision de ce Grand Conseil. On aurait pu faire autrement. On aurait pu faire tomber la Banque en faillite. Eh bien, cela aurait coûté beaucoup plus cher à la collectivité. Donc, la décision de créer la Fondation de valorisation a déjà limité un peu les pertes, qui sont extrêmement importantes. J'aimerais que vous lisiez aussi le reste de la réponse du Conseil d'Etat à votre interpellation urgente. Il est écrit: «Il est important de noter que la Fondation n'a conclu aucune opération de portage, mais elle a été tenue de respecter les clauses des contrats conclus par la BCGe. Le portage [et là, c'est important] n'est pas la cause de la perte, il est un moyen pour tenter de l'atténuer.» Je pense que cette phrase est vraiment essentielle: pourquoi est-ce qu'on fait appel à un porteur ? C'est que le trou est déjà creusé, ce n'est pas pour le creuser davantage !... (Brouhaha.) C'est bien cette mécanique qu'il faut comprendre. Je pense que ce ne sont pas les sociétés de portage qui auraient contribué le plus fortement aux pertes enregistrées, mais il y a soixante débiteurs, soixante personnes physiques qui sont débitrices de la Fondation de valorisation et qui causent un dommage de 1,3 milliard de francs. Ces personnes-là, ce ne sont pas des porteurs et là, vous ne dites rien. Mais ces personnes, on pourra les poursuivre.
Est-ce que c'est une question d'éthique de ne pas payer ? Moi, je pense que, comme cela a été dit, tout travail mérite salaire. Faire le métier de courtier, c'est un travail et il faut le payer. En l'occurrence, je pense que le travail a été accompli puisque la vente dans la PPE a été faite. Il faut aussi penser à la séparation des pouvoirs: refuser de payer, c'est faire justice soi-même, c'est juger sans procès ni inculpation et c'est grave ! Ce n'est pas notre rôle ici. Si nous voulons avoir de l'éthique, commençons par respecter simplement les règles du jeu ! Chacun doit faire selon ses compétences et c'est cela qui est important.
Je vous invite vraiment à voter ce rapport, à refuser l'amendement, parce qu'il est inadéquat, et à ne pas retarder encore les ventes parce qu'actuellement la Fondation accuse un retard de ventes de cent millions. Est-ce que nous pourrons le rattraper cette année ? J'en doute. Maintenant, agissons ! (Applaudissements.)
M. David Hiler, conseiller d'Etat. Tentons une synthèse de cet intéressant débat. Pendant les années 1980, et surtout à la fin des années 1980, deux établissements, non pas la Banque cantonale de Genève, mais la CEG et la Banque hypothécaire du Canton de Genève ont, avec d'autres, consenti un certain nombre de prêts très exagérés par rapport à la valeur des gages. Ce n'est vraiment pas un scoop. C'est ce que nous savons tous, ce que sait tout le monde. Il s'en est suivi des pertes considérables pour ces deux établissements, comme pour d'autres grands établissements, qui, eux, étaient privés et qui avaient au moins un avantage: celui d'avoir les reins assez solides pour supporter une perte de plusieurs milliards sur une ou deux années. Les établissements dont nous parlons, la Banque hypothécaire et la CEG, au contraire, s'étant joints tardivement au jeu de l'avion, puisque c'est de cela qu'il s'agit, c'est-à-dire que, dans bien des cas, c'étaient des prêts qui pouvaient être remboursés si le débiteur arrivait à vendre, mais en aucun cas en termes de valeur de rendement. Ces établissements ont subi des pertes considérables.
Dès lors, il s'est passé des choses dont personne ne parle. Je pense qu'il faut être complets. Donc, dès lors, il a été annoncé que des provisions à hauteur de plus d'un milliard devaient être constituées et il a aussi été admis par ce parlement, par le peuple de Genève, qu'il fallait fusionner ces deux établissements - sur la base d'informations qui ont changé considérablement entre le moment de la décision de ce parlement, en 1993, et la fin de l'année 1999. On est d'accord avec cet exposé.
Je comprends l'irritation des Genevois à au moins un sujet, même si nous devons l'accepter. Ceux qui ont accordé des crédits de manière dangereuse pendant les années 1980, entraînant ainsi des pertes aujourd'hui estimées à 2 milliards 500 millions, ce qui n'est pas tout à fait une paille, ceux-là, Mesdames et Messieurs les députés, ne seront pas poursuivis. Ils ne seront pas poursuivis. Pas pour des raisons de prescription, mais tout simplement parce que la nature de leurs agissements ne relève pas du droit pénal. Que l'on soit furieux, je le conçois. Qu'on l'accepte mal, je le conçois encore. On ne peut pas pour autant nier la réalité du droit, car celui-ci changerait-il que de toute façon il ne serait pas rétroactif. Jusque là, nous sommes d'accord.
A partir de là, les établissements en question, avant la fusion et après, on réalisé un certain nombre d'opérations de portage. On en arrive à la réponse du Conseil d'Etat à l'interpellation, et j'aimerais bien insister là-dessus. Le portage a pour but de ne pas obliger la banque, dans un processus de saisie du bien immobilier, à se retrouver propriétaire du bien et à devoir le solder à bas prix parce que, pour une banque, le fait d'être propriétaire d'un bien immobilier est une source de consommation de fonds propres: cinquante fois plus de fonds propres consommés pour la même somme qu'un prêt à l'Etat. Cinquante fois plus ! C'est la raison qui aurait pu, on va revenir à la vraie histoire, conduire à rendre parfaitement admissible ce type d'opération, si elles avaient eu pour but d'éviter de «passer à la caisse». Dans le jargon, «passer à la casse», c'est aller aux enchères pour se débarrasser rapidement d'un bien. Les opérations de portage devaient avoir pour but d'éviter cela, dans une période où le marché était déprimé de 30% par rapport aux valeurs usuelles que l'on connaît à Genève, que l'on a retrouvées, soit dit en passant, et dépassées. Hélas, et c'est la réponse du Conseil d'Etat, les inculpations montrent, et la perte le montre d'ailleurs aussi, qu'il ne s'agissait pas que de cela. Ces opérations auraient été parfaitement correctes s'il y avait eu une provision dans les comptes de la Banque, constituée au montant exact de la perte avec une marge d'appréciation, mais une marge d'appréciation qui ne peut pas être de 500% ! Elle peut aller jusqu'à 30%, à vrai dire. Ce n'est pas totalement illégitime; c'est risqué, mais pas totalement illégitime.
C'est là que la justice entre dans la danse. C'est elle qui doit finir ce travail, c'est elle qui doit dire ce qui est du domaine pénal et qui implique des faux dans les titres, mais peut-être bien d'autres choses. Depuis cinq ans, ce qui est un deuxième motif d'exaspération, les gens attendent le procès. La procédure est extraordinairement complexe et ce procès n'a pas encore eu lieu. Pourtant, dans d'autres cantons, où l'on a découvert plus tardivement des opérations du même type, les procès ont commencé, parce que la méthode choisie, semble-t-il, malgré la volonté ou en tous cas les déclarations des deux procureurs, la méthode choisie dans les autres cantons est de s'attaquer à des affaires précises. Pour le moment, ici, on est en train de continuer d'instruire l'ensemble du dossier.
Le président. Monsieur le conseiller d'Etat !
M. David Hiler. La justice s'engage à rendre des procès en 2007. Nous n'avons pas d'autre possibilité que d'attendre. Nous sommes bien d'accord. Et c'est là que se pose le problème suivant...
Le président. Monsieur le conseiller d'Etat, je dois vous rendre attentif au fait que votre temps est largement dépassé.
M. David Hiler. Oui, je voudrais quand même juste terminer sur un ou deux points, quitte à moins intervenir dans le débat suivant sur la Banque. De ceci, vous pouvez critiquer la justice, chacun peut penser ce qu'il veut. En tous cas, ce n'est ni le Conseil d'Etat ni le Grand Conseil qui dira ce que la justice doit faire. Pas plus que vous admettriez que la justice vienne ici nous dire ce que nous avons à voter. Ce n'est pas comme cela dans la séparation des pouvoirs. Raison pour laquelle vous ne pouvez pas prétendre que la Fondation n'était pas liée par des contrats signés. Parce que, pour que ces contrats aient un caractère pénal du côté du porteur, il faudrait - et c'est l'une des inculpations qui existe au niveau du pénal - que le porteur, sachant les difficultés de la Banque, en profite pour lui extorquer des fonds considérables pour rendre le service demandé, contraignant par là même la personne qui signerait un tel accord du côté de la Banque à faire de la gestion déloyale, manifestement. Il y a des inculpations de ce type. Des personnes ont été emprisonnées pour ce motif.
Nous n'avons qu'une chose à faire, c'est nous armer de patience. Vous n'êtes pas patient, Monsieur Stauffer. Je ne le suis pas non plus, mais je pense que rien ne sert de s'exciter dans le vide pour des choses qu'on ne maîtrise pas. Essayons de nous occuper de ce que nous maîtrisons ! J'en viens à la Fondation de valorisation: que peut-on dire de la Fondation de valorisation ?
Le président. Il va falloir conclure, Monsieur le conseiller d'Etat, je suis désolé, mais le temps de parole est le même pour les députés et pour les conseillers d'Etat.
M. David Hiler. Je vais conclure, mais je dois dire que le fait que le Grand Conseil puisse raconter des fadaises sur la Fondation et la Banque pendant 25 minutes sans que le gouvernement puisse y répondre me paraît difficile. J'en finis. Pour la Fondation de valorisation, un défaut a été observé: un mauvais contrôle interne, qui a permis à 300 000 F d'être dérobés par un collaborateur. En revanche, on observe aussi la dissolution d'une provision à hauteur de 200 millions pour bonne vente. D'un côté, des erreurs factuelles, une communication parfois un peu difficile, de l'autre, je m'excuse, encore à ce stade, un bilan comptable qui est excellent.
Reste, Monsieur Stauffer, la situation créée, et cette fois j'en termine, institutionnellement. Nous nous trouvons dans la situation où un député a dénoncé le directeur de la Fondation de valorisation. Le 14 mars, ledit directeur a attaqué le dénonciateur pour dénonciation calomnieuse. Au milieu de cela, il y a une commission du Grand Conseil, qui doit arriver à travailler de sorte que nous ne perdions pas encore quelques centaines de millions à cause d'un blocage. Mon attente, Monsieur le président, à l'égard de ce Grand Conseil, à l'égard de M. Stauffer, à l'égard de la présidente de cette commission, à l'égard de tous les membres de ce Conseil, c'est qu'une solution soit trouvée pour que l'on puisse faire le travail qui doit être fait. Nous nous sommes engagés, le Conseil d'Etat s'est engagé, hors du processus normal, à répondre à toutes les questions, relevant, à la limite, de la curiosité, sur comment les dossiers avaient été constitués avant 2000. Nous le faisons chaque fois que nous le pouvons.
Mais, de grâce, dissocions dans nos travaux l'intérêt porté au passé et la nécessité que la Fondation continue à vendre et surtout, à exister, à embaucher. Parce qu'on sent la Fondation quelque peu fragilisée: un collaborateur la vole, deux autres démissionnent pour des motifs qui n'ont rien à voir avec cette affaire... De plus, elle n'a qu'une durée de vie de quatre ans, ce qui n'est pas facile pour embaucher, et l'on sent malgré tout une sorte de difficulté à défendre le bilan.
Est-ce que nous voulons diminuer la perte de 2 milliards 500 millions à 2 milliards 200, ce qui est encore possible, ou est-ce que nous voulons bloquer le processus ? Distinguons les projets de lois, Mesdames et Messieurs, et le reste de l'activité, sur lequel le Conseil d'Etat, même si cela a un prix, est prêt à donner tous les renseignements que l'on voudra chaque fois qu'ils ne sont pas couverts par le secret bancaire. En effet, le secret bancaire est opposable au Conseil d'Etat. Pour le reste, Monsieur Stauffer, la justice est la justice, le parlement est le parlement, et le Conseil d'Etat est le Conseil d'Etat. Aucun d'entre nous n'a le pouvoir absolu, heureusement pour le bon peuple de Genève ! (Applaudissements.)
Le président. Monsieur le conseiller d'Etat, vous ne pourrez pas dire que le parlement ne vous prête pas une oreille attentive, vous avez eu deux temps de parole...
M. David Hiler. Merci, Monsieur le président !
Le président. ...quand les députés doivent se contenter, sous la férule de la présidence, d'un seul. C'est dire avec quel soin bienveillant nous vous accueillons ici.
Une voix. Et nous sommes cent !
Le président. Nous sommes cent et vous êtes sept... Je vous remercie, Monsieur le conseiller d'Etat. Nous avons tous écouté avec soin les voeux que vous avez formulés. Je crois qu'ils sont partagés par un grand nombre de membres de cette assemblée. Il est vrai qu'en politique on est parfois obligé de s'emparer des objets qui passent à portée de main pour faire son lit... Nous sommes maintenant en procédure de vote. C'est le vote nominal, comme cela a été demandé.
Mis aux voix à l'appel nominal, le projet de loi 9239 est adopté en premier débat par 83 oui et 5 abstentions.
Deuxième débat
Le président. Madame Pürro, vous avez demandé la parole ? Non ? Alors il faut effacer Mme Pürro, qui n'a pas demandé la parole.
Des voix. Oh non !
Mis aux voix, le titre (nouvel intitulé: 450 000 F) et le préambule sont adoptés.
Le président. Nous sommes saisis d'un amendement à l'article 1. Mesdames et Messieurs les députés, soyez attentifs à la procédure de vote ! Une demande d'amendement motivée, signée par un certain nombre de députés, a été déposée sur vos places hier. Puis, tout à l'heure, M. Stauffer, après lecture de la lettre de Mme la présidente de la commission de contrôle de la Fondation de valorisation, frappé peut-être par la pertinence d'une partie des éléments qu'elle contient, soucieux de montrer au Bureau du Grand Conseil qui va devoir se pencher sur les questions que lui soumet Mme la présidente de la commission, a mis en circulation un texte amendé, qui ne change pas les amendements eux-mêmes, mais les considérants, notamment dans l'idée d'appliquer les concepts nouveaux de journalisme où les noms vrais disparaissent au profit de noms imaginaires et très imaginatifs. Quoi qu'il en soit, nous ne votons pas les considérants, mais le texte des amendements eux-mêmes. Vous avez sous les yeux les propositions d'amendement d'hier soir qui, s'agissant des alinéas 1 et 2, sont sans modification. Je vais donc, puisque nous en sommes à l'article 1, comme le veulent les proposants de l'amendement, mettre aux voix d'abord l'amendement de l'alinéa 1.
Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 73 non contre 8 oui et 6 abstentions.
Le président. Je mets aux voix la proposition d'amendement de l'alinéa 2.
Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 75 non contre 8 oui et 3 abstentions.
Le président. L'article 1 est soumis aux suffrages. Monsieur Etienne, vous avez demandé la parole ? Non. Monsieur Stauffer, vous avez demandé la parole ? Non. (Brouhaha. Rires.)
Mis aux voix, l'article 1 est adopté, de même que les articles 2 et 3.
Troisième débat
Le président. Monsieur Stauffer, vous avez demandé la parole ?
M. Eric Stauffer (MCG), rapporteur de minorité. Brièvement, simplement pour dire que, dans l'amendement que nous avons déposé, l'article 1 était la vente du projet de loi et il a été refusé. J'ai une question par rapport à cela : l'amendement à l'alinéa 1 a été soumis au vote et a été refusé par les députés, est-ce qu'il faut en déduire que la vente est refusée ?
Le président. Non, Monsieur le député, rassurez-vous. Je suis reconnaissant que vous veilliez avec un soin aussi attentif au bon fonctionnement de ce Conseil, mais tout de suite après l'écartement de vos deux propositions d'amendement, cette assemblée s'est prononcée sans opposition sur l'article 1, tel qu'issu des travaux de la commission. Le vote nominal a été adopté au moment de la prise en considération et n'a pas été réclamé depuis lors. Nous avons donc à voter le troisième débat.
La loi 9239 est adoptée article par article en troisième débat.
Mise aux voix, la loi 9239 (nouvel intitulé) est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 68 oui contre 8 non et 11 abstentions.
Premier débat
Mme Christiane Favre (L), rapporteuse de majorité. J'ignore si l'on ose affirmer qu'il existe une loi parfaite, aussi, je peux facilement admettre que ce projet soit encore perfectible. Mais, tel qu'il est, il donne d'indispensables outils pour une meilleure gouvernance de l'Hospice général, c'est un projet indispensable, attendu, et qui va dans le bon sens. Comme vous avez pu le lire dans le rapport, il est défendu par le Conseil d'Etat et soutenu par la majorité de la commission. Il a été examiné par l'actuel Conseil d'administration qui en a largement approuvé les principes. Ces qualités ont été saluées par la direction qui souligne de réelles avancées dans les propositions qui sont faites.
Dans le rapport, vous avez pu lire aussi certains avis contraires et nous en débattrons. Mais l'un d'entre eux, récurrent, exprime une volonté de rattachement de l'Hospice à l'Etat, au principal motif que cette institution, dans sa fonction d'assistance publique, n'a pas de dimension entrepreneuriale. Il est vrai qu'on n'y fabrique rien et qu'elle n'a aucune vocation commerciale, si ce n'est l'administration de ses biens immobiliers. L'Hospice général a la tâche fondamentale, historique, d'appliquer la politique sociale voulue et garantie par le Grand Conseil et le Conseil d'Etat.
Même si les arguments de coût, de souplesse de gestion, d'esprit d'entreprise et de contrôle démocratique plaident largement en faveur de son autonomie, on peut avoir l'idée d'en discuter. Il n'en reste pas moins que, aujourd'hui comme hier, faire fonctionner cette institution a toujours été une démarche entrepreneuriale au sens premier du terme. C'est pourquoi, pour bien fonctionner, l'Hospice a besoin d'un statut clair, d'un rôle défini, d'une direction efficace et d'un conseil d'administration compétent et éclairé qui tienne compte de la diversité des sensibilités mais qui ne soit pas perturbé par la politique politicienne. En précisant un certain nombre d'éléments essentiels, ce projet avance dans cette excellente direction. La commission des affaires sociales vous recommande, Mesdames et Messieurs, de lui réserver un bon accueil.
Mme Laurence Fehlmann Rielle (S), rapporteuse de deuxième minorité. Je vais expliquer en quelques mots les raisons qui ont conduit le groupe socialiste à refuser ce projet de loi. Je souhaite rappeler que l'Hospice général est un instrument de la politique sociale de notre canton. Il a pour principale mission de distribuer des prestations sociales et cela est dicté par la loi. Son fonctionnement, à notre sens, doit être repensé dans le cadre d'un débat général sur l'action sociale, parallèlement avec le fonctionnement des CASS et avec les effets de la loi sur l'aide à domicile. Pour nous, la démarche qui consiste à bétonner le devenir de l'Hospice général dans une loi ad hoc est erronée et nous ramène au XIXe siècle. Il est vrai qu'à l'époque les problèmes étaient un peu moins complexes qu'aujourd'hui... Je rappelle que le Conseil d'Etat, lors de la précédente législature, a déposé un projet de loi sur l'aide sociale individuelle et il est indispensable que nous discutions de ce projet, qui doit aussi être placé dans le cadre du débat général sur l'aide sociale que nous voulons pour notre canton aujourd'hui. Ce débat est indispensable et nous regrettons donc que la démarche ait été inversée. Voilà pour la méthode.
L'autre aspect concerne l'autonomie de l'Hospice général. Je le répète: la mission principale de l'Hospice général est de distribuer les prestations sociales à la population bénéficiaire, ce qui est une obligation légale. Cette mission n'obéit à aucune logique commerciale et, en ce sens, l'Hospice général ne peut pas être comparé à d'autres institutions comme les SIG ou les TPG. En plus, l'histoire récente nous a montré que l'Etat intervenait sans cesse dans les affaires de l'Hospice général. Pas plus tard qu'au mois de février l'Hospice général a subi les remontrances du conseiller d'Etat M. Longchamp, comme cela avait été le cas auparavant avec M. Unger, quand il s'est agi du déficit suite à la question des avances AI. Or, la mission de faire ces avances AI a précisément été confiée à l'Hospice général par le Conseil d'Etat et apparemment, on lui avait refusé d'inscrire des provisions suffisantes pour parer aux incertitudes liées à cette question des avances AI. Vous le savez, certaines ne sont pas honorées et, en définitive, c'est l'Etat, en l'occurrence, l'Hospice général, qui doit essuyer les pertes. D'un côté, on donne à l'Hospice général une mission précise et, de l'autre, on l'empêche de l'accomplir. Ensuite, on l'accuse de mauvaise gestion.
Il est vrai qu'il y a eu de réels problèmes de gestion, notamment au niveau de l'informatique, nous ne le nions pas. Mais, depuis lors, nous avions cru comprendre qu'une nouvelle direction avait été nommée, que les choses commençaient à aller mieux et voilà qu'à nouveau on accuse l'Hospice général d'incompétence. Je crois qu'à vouloir continuer ce petit jeu, et à exposer perpétuellement cette institution qui a été passablement chahutée, eh bien, on finit par décourager les travailleurs et les travailleuses de cette institution, qui doivent déjà faire face à une surcharge suite à l'augmentation des dossiers d'assistance.
Parler d'autonomie de l'Hospice général dans ces conditions, c'est aberrant. Nous pensons qu'il faut que ces hypocrisies cessent. Enfin, nous rejoignons ceux qui dans cette enceinte souhaitent réfléchir sérieusement à l'opportunité de rattacher cette institution d'aide sociale directement à l'Etat. Pour conclure, je dirai que ce projet de loi n'aboutira pas à mieux responsabiliser soit l'Etat, soit l'Hospice général, mais qu'on risque de perpétuer le réflexe du «C'est pas moi, c'est l'autre» qu'on a vu se manifester ces dernières années. Au bout du compte, on oublie que ce sont les bénéficiaires qui risquent d'en faire les frais. Voilà ce que je voulais dire en préambule. J'interviendrai par la suite, quand on discutera plus concrètement du projet de loi.
M. Christian Bavarel (Ve), rapporteur de première minorité. Depuis la présentation de ce projet sur la gouvernance de l'Hospice général, les Verts ont dit très clairement qu'ils ne pensaient pas qu'aujourd'hui l'Hospice général devait rester autonome. Pour nous, il est clair qu'il y a un échelon de trop, celui du Conseil d'administration. Nous voyons que l'Hospice général, dans sa fonction d'assistance publique, ne comporte vraiment pas de tâche entrepreneuriale. Les différentes conditions de l'assistance publique sont complètement de compétence étatique.
Nous sommes face à une institution autonome et je crois que nous sommes le seul Etat dans lequel cela fonctionne de cette manière-là. Généralement, l'assistance publique est parmi les tâches essentielles de l'Etat. L'Hospice général a certes des logements, des immeubles en gestion et d'autres activités qui pourraient tout à fait être détachées de la partie assistance publique. Mais, concernant l'assistance publique, qui est la tâche principale de l'Hospice général, depuis qu'on dit et qu'on répète qu'elle doit être rattachée à l'Etat, on sent que le front en face qui voulait l'autonomie de l'Hospice général est en train de se lézarder. Parce que nous sommes confrontés à une difficulté institutionnelle d'architecture et de périmètre de compétences de l'Hospice général et de l'assistance publique.
Nous le disons très simplement: nous ne sommes pas face à un problème de gouvernance de l'Hospice général, mais à un problème de périmètre et de rattachement. C'est pour ces raisons que nous vous demandons de refuser ce projet de loi.
Mme Sandra Borgeaud (MCG). Ce projet de loi demande que la gouvernance de l'Hospice général soit réduite. Or, aujourd'hui, nous constatons qu'il y a plus de 45 millions de déficit. L'Etat est chargé du sort des chômeurs en fin de droit et des demandeurs d'emploi qui n'entrent plus dans les statistiques cantonales du chômage et qui se retrouvent de ce fait à l'Hospice général. Comme vous le savez, le chômage est exponentiel à Genève et nous avons le triste privilège d'avoir la palme d'or dans ce domaine au niveau national. L'Hospice doit aussi se charger du sort des requérants d'asile qui n'ont aucun autre moyen d'obtenir de l'aide financière et dépendent intégralement de l'Hospice général à Genève.
C'est au Grand Conseil de décider des dépassements de crédit à octroyer à l'Hospice général, ce qu'il a fait régulièrement ces dernières années. Il s'agit là de l'argent du contribuable, car, comme chacun le sait, les donations faites à l'Hospice général ne sont malheureusement pas suffisantes pour assurer le bon fonctionnement financier de cette institution.
Je tiens à rappeler que l'Hospice général est une institution publique. De ce fait, elle doit dépendre de l'Etat uniquement. Il y a certainement de très bonnes solutions à envisager et à mettre en application, sans pour autant réduire le Conseil d'administration. Il n'est pas normal vis-à-vis du peuple que tous les partis politiques représentant le peuple genevois ne puissent pas être présents afin de s'assurer de la bonne gestion des deniers publics. C'est pourquoi, Mesdames et Messieurs, je vous invite à rejeter ce projet de loi, qui ne répond pas à la problématique financière de cette institution publique.
Présidence de M. Jacques Baudit, deuxième vice-président
Mme Marie-Françoise de Tassigny (R). Ce projet de loi est un petit pas vers une meilleure gestion de la politique sociale de notre canton. En effet, ce secteur, au regard de la part importante des deniers publics consacrés aux plus défavorisés, doit être géré avec compétence et esprit de prospection.
Ce projet de loi a occupé la commission des affaires sociales pendant de longues séances. En effet, dans un contexte toujours d'actualité, l'Hospice général paraissant difficilement maîtriser ses dépenses, la solution proposée par le Conseil d'Etat semblait pour certains insuffisante ou frileuse. Néanmoins, le mandat de prestations, la nouvelle gouvernance et les nouvelles directives en matière de contrôle interne sont des étapes indispensables vers une amélioration du pilotage de ce paquebot. Le mandat de prestations est un passage incontournable pour mieux définir le cadre et les critères d'attribution du budget d'assistance. La nouvelle gouvernance repose aussi sur une équipe de pilotage réduite, choisie pour ses compétences indispensables en matière de management, et qui est surtout moins politisée. Ce nouveau Conseil d'administration devra accompagner le changement de gestion de l'Hospice général, qui est une vieille dame qui a besoin d'un lifting.
Cette opération est une première tentative, soutenue par les deux députés radicaux de manière différente, mais avec le même objectif: un meilleur contrôle et l'optimisation de l'attribution de l'assistance sociale. Le groupe radical votera donc cette loi.
M. Eric Bertinat (UDC). Depuis de nombreuses années, l'Hospice général connaît de grands dysfonctionnements et il est urgent de se pencher sur cet établissement autonome de droit public que de nombreux Genevois regardent avec beaucoup de méfiance, d'autant plus que le trou de 60 millions de francs de trésorerie enregistré en 2003, tout comme le récent déficit annoncé de près de 14 millions de francs sont encore dans toutes les mémoires. Rappelons que l'Hospice coûte au contribuable 233 millions de francs, dont 190 millions sont consacrés à l'aide sociale.
Le Conseil d'Etat a donc fini par proposer une loi moderne de gouvernance. La commission des affaires sociales s'est penchée en priorité sur ce sujet et a cherché à élaborer rapidement cette loi, que l'UDC soutiendra. Mais notre groupe, comme de nombreux autres, semble-t-il, tient à préciser qu'il partage les soucis déjà formulés l'an dernier par la commission de contrôle de gestion du Grand Conseil lorsqu'elle rendait public le rapport intermédiaire sur l'institution et soulevait la question des rapports entre le Conseil d'administration et l'Etat. Le rapport concluait que le double échelon de pouvoir entre l'ancien département de l'action sociale et de la santé et l'Hospice général: «n'a [je cite] jamais été aménagé et des rapports de pouvoir de fait compliquent la cohérence de gestion».
L'Hospice général ne serait-il pas plus performant en étant intégré directement à l'Etat ? Cette question, à l'évidence, est à l'esprit de nombreux députés, mais il reste que le projet de loi sur lequel nous nous penchons aujourd'hui centre le débat sur la seule gouvernance de l'Hospice général. Rien n'empêche d'accepter ce projet de loi et de revoir dans un avenir proche le statut juridique de l'Hospice général. La plupart des modifications qu'apporte cette loi conviennent au groupe UDC qui, cependant, tient à relever l'article 4, dans lequel est traité le mandat de prestations. Il va être bien difficile de définir le contenu de ce contrat, puisque les prestations sont mal définies, que le personnel de l'Hospice général n'a jamais caché sa réticence à l'égard de cet instrument et que la garantie de déficit inscrite dans la constitution diminue fortement les bénéfices que l'on peut retirer du mandat de prestations.
Reste que l'idée d'établir des indicateurs utiles notamment au département et à la commission des finances est de première importance pour que les responsables puissent gouverner correctement. L'UDC acceptera donc ce projet de loi qui va vers une amélioration de la gouvernance de l'Hospice général.
Mme Gabrielle Falquet (S). Aujourd'hui, il ne s'agit pas simplement de dire si l'on aime ou si l'on aime pas l'Hospice général; il s'agit de trouver le meilleur moyen, la meilleure façon de gérer les problèmes de l'assistance. Comment adapter l'aide aux circonstances actuelles, comment favoriser la réinsertion ? Actuellement, c'est le Conseil d'administration de l'Hospice général, entre autres, qui est chargé dans le cadre de veiller à ce que l'aide sociale soit apportée, avec, bien sûr, l'appui des collaborateurs et des collaboratrices. Sans eux, les personnes dans la précarité ne pourraient vivre dans notre société, elles ne seraient entendues. Ces personnes ont des droits, Mesdames et Messieurs, et elles doivent être respectées.
Pour que les décisions de notre parlement soient appliquées, le Conseil d'administration de l'Hospice général doit être représentatif des différentes tendances politiques de ce parlement et il doit aussi comprendre des représentants du personnel, qui sont à même d'apporter les éléments du terrain afin que le Conseil d'administration puisse répondre de façon adaptée aux besoins.
C'est pour cela qu'aujourd'hui on ne peut pas simplement accepter la proposition faite par le Conseil d'administration dans le cadre de ce projet de loi. Le choix du nombre n'a aucun sens, aucun fondement. On a simplement l'impression d'assister à un marchandage. On le ressent aussi dans d'autres commissions qui traitent de gouvernance.
Mesdames et Messieurs les députés, un peu de sérieux, un peu de décence: refusons cette loi ou, au moins, suspendons-la jusqu'à ce qu'on puisse discuter de l'ensemble des prestations sociales, de l'ensemble des décisions que notre parlement devra prendre concernant, entre autres, la loi sur l'aide sociale individuelle. Et soyons conscients, Mesdames et Messieurs, que c'est un domaine sensible, que c'est un domaine qui représente l'ensemble des personnes que nous soutenons et auxquelles nous voulons permettre de vivre décemment. Mesdames et Messieurs les députés de la majorité, ne galvaudons pas cet outil qu'est l'Hospice général et n'oublions pas que nous parlons essentiellement des personnes qui sont en grande difficulté dans notre société.
Une voix. Bravo !
M. Ivan Slatkine (L). En préambule, j'aimerais préciser que je suis administrateur de l'Hospice général, que j'ai été élu par ce Grand Conseil il y a deux ans au sein du Conseil d'administration et qu'en conséquence je m'abstiendrai lors du vote final sur ce projet de loi. J'ai longuement hésité à prendre la parole, mais je crois quand même nécessaire de commenter les deux rapports de minorité, car il y a certains points qu'il me semble important de corriger.
Dans le premier rapport de minorité, comme dans le deuxième, d'ailleurs, on débat - on vient d'en parler - de l'autonomie de l'Hospice général. Ce projet de loi, Mesdames et Messieurs les députés, n'est pas là pour traiter de ce point, mais pour traiter de la gouvernance de l'Hospice général. Si vous souhaitez un débat sur l'autonomie de l'Hospice général, je propose que les groupes qui soutiennent cette proposition déposent un projet de loi constitutionnel - constitutionnel, car l'autonomie de l'Hospice général est inscrite dans la constitution - et qu'on ait un vrai débat sur ce point, mais qu'on ne mélange pas gouvernance et autonomie. Aujourd'hui, on parle de la gouvernance de l'Hospice général pour permettre à l'Hospice général de mieux fonctionner.
Dans le rapport de M. Bavarel, j'aimerais quand même relever certains points. J'ai de la peine à comprendre ses arguments... Il nous dit qu'il faut séparer l'assistance sociale de l'assistance aux requérants d'asile alors qu'à l'Hospice général ces deux aides sont séparées. Il dit qu'il faudrait intégrer les structures d'hébergement au sein du DIP, mais le Conseil d'administration souhaite exactement la même chose; il dit qu'il faut différencier le logement social des immeubles de rente, et là il faudrait préciser parce qu'on a de la peine à comprendre ce qu'il veut dire. Je passerai sur les derniers points. Quand vous argumentez ensuite sur les propos de M. Pasquier, Monsieur Bavarel, il semble que nous ayons une lecture complètement différente de l'exposé de M. Pasquier. La rapporteuse de majorité a mis en annexe à son rapport, aux pages 63 à 66, l'exposé qu'a fait le professeur Pasquier. Si on lit ce document, on arrive exactement aux conclusions inverses de celles auxquelles vous aboutissez dans votre rapport. Là aussi, il faudrait qu'on m'explique, parce que j'ai l'impression que les propos de M. Pasquier ont été légèrement déformés. Pour conclure sur ce rapport, vous dites qu'un rattachement à l'Etat permettrait, par exemple, d'instaurer le système de cash pooling. Je tiens juste à préciser que ce système a été mis sur pied il y a quatre ans pour l'Hospice général. Il y a certains points sur lesquels des éléments semblent vous manquer et, si l'on veut un vrai débat sur l'autonomie, il faudrait que chacun de nous se renseigne et qu'on traite cela en lien avec un projet de loi ad hoc.
Quant au deuxième rapport de minorité, je comprends que Mme Fehlmann veut un grand débat général sur l'assistance publique à Genève. On y mettrait tout: les CASS, la LAsi, l'Hospice général, son autonomie, etc. Il faudra qu'on m'explique comment on fera, parce que cela va être très compliqué. Aujourd'hui, ce qu'il faut, c'est donner des outils à l'Hospice général pour l'aider à sortir la tête de l'eau et je peux vous dire qu'il est déjà en train de sortir la tête de l'eau. Ce qui m'a marqué dans votre rapport, Madame la députée, c'est que vous ne vous posez pas la question de savoir si, finalement, ce qui manque à l'Hospice général, ce n'est pas justement plus d'autonomie. Et peut-être que là où le Conseil a failli, c'est en n'affirmant pas assez son autonomie. S'il l'avait fait, peut-être qu'on ne rencontrerait pas aujourd'hui les problèmes qu'on a avec l'Hospice général, problèmes qui sont en voie de résolution.
Peut-être que pour avoir plus d'autonomie, il faut avoir un Conseil plus restreint avec des gens plus responsables, qui instaurent un dialogue avec le Conseil d'Etat, et je suis persuadé que l'Hospice pourrait tout à fait fonctionner de la sorte. Pour mémoire, effectivement, l'Hospice général a connu beaucoup de problèmes depuis 2001. Problèmes informatiques, vacance de la direction générale pendant une année, arrivée d'un nouveau réviseur dont les options étaient nettement plus strictes que celles des réviseurs précédents. Mais il faut noter que depuis deux ans, avec la nouvelle direction générale, l'Hospice général est en train de redresser la tête. Alors, cela fait mal, certes, parce qu'aujourd'hui les chiffres, il faut les nettoyer, mais, au moins, on a un Hospice qui est convenablement dirigé, avec des collaborateurs qui se battent tous les jours sur le terrain, et les résultats sont là, puisque depuis maintenant plusieurs mois, l'assistance publique est en stagnation, le nombre de dossiers a cessé d'augmenter chaque mois. Je crois qu'on doit féliciter la nouvelle direction générale et les collaborateurs pour le travail qu'ils font. Bon, j'entends des gens qui soupirent, mais c'est la réalité et je regrette que, dans tous ces rapports, on omette tout le travail qui est réalisé par la nouvelle direction de l'Hospice général et par ses collaborateurs.
Pour conclure, je voulais juste dire qu'il ne faut pas se tromper de débat: ce soir, il s'agit simplement de donner à l'Hospice général les moyens d'être mieux gouverné. Quant au débat sur l'autonomie, venez avec un projet de loi constitutionnel et on en débattra, mais ne gelez pas tous les travaux parce que soit vous voulez qu'il n'y ait plus d'autonomie, soit vous voulez un grand débat général sur l'assistance publique à Genève. Parce que de la sorte vous découragez tout le monde de travailler dans le bon sens et vous ne résoudrez aucun problème au niveau de l'assistance publique à Genève.
M. Gilbert Catelain (UDC). Je tiens tout d'abord à rappeler les buts de ce projet de loi. Ils sont au nombre de trois, dont un qui est essentiel, c'est de redéfinir la gouvernance de l'institution, son rôle, ses responsabilités au niveau de ses organes internes, ses relations avec l'Etat et le système de prise de décisions. Voilà les objectifs qui sont fixés dans ce projet de loi.
Effectivement, on s'est aussi posé la question du statut de l'Hospice - devait-il rester autonome ou pas ? - pour la simple et bonne raison de savoir si on entrait en matière sur le projet de loi. Le groupe UDC, comme les Verts et le MCG, était partagé sur cette question. Mais, comme les Verts et le MCG, qui, pendant tous les débats en commission, se sont abstenus sur tout, il n'a pas présenté d'amendement ni de projet de loi constitutionnel puisqu'en effet le statut autonome de l'Hospice est fixé dans la constitution. Nous avons pris nos responsabilités, nous avons décidé d'entrer en matière sur ce projet de loi, d'accepter que cet Hospice reste un établissement autonome. Si d'aventure le projet de loi que nous allons voter aujourd'hui ne devait pas donner satisfaction, nous pourrons revenir ultérieurement, dans quelques années, avec un projet de loi constitutionnel. Il est vrai, et il faut le souligner, que cet Hospice est historiquement de nature privée, qu'il bénéficie de dons privés et que s'il devait être sous la coupe de l'Etat, on pourrait imaginer les incidences financières. Pour ce qui est des recettes privées, je crois que n'importe quel pékin renoncerait à donner ses économies à l'Hospice par manque de confiance à l'égard de la gestion de l'Etat.
Nous devons aussi rappeler que le rapport de la commission de gestion sur la gestion de l'Hospice général était très sévère. Il s'agissait du rapport d'une députée socialiste, malheureusement disparue. C'était un rapport au vitriol. Effectivement, on apprenait un certain nombre de dysfonctionnements, notamment des chèques qui étaient délivrés sans contrôle. A partir de là, le Conseil d'Etat a décidé, vu la dérive financière de l'Hospice, d'engager une réforme de fond.
Pour ce qui nous concerne, il n'y a aucun motif pour refuser d'adopter ce projet de loi puisqu'il est verrouillé par l'article 33, qui prévoit qu'une évaluation sur les impacts de la loi devra avoir lieu. Ce parlement aura donc toute latitude de corriger les défauts de jeunesse de cette loi sur la base du rapport d'évaluation prévu. Pour le reste, je crois qu'on ne peut que se référer aux propos du professeur Pasquier qui nous a énoncé certains principes, qui sont valables dans énormément de cantons, à savoir notamment qu'il était préférable, je cite, «qu'il n'y ait pas de politisation dans les instances d'exécution». Les débats politiques doivent avoir lieu au Grand Conseil et non au Conseil d'administration. Le professeur Pasquier, je le rappelle, a dit clairement que les rôles de l'Etat et de l'Hospice doivent être clairement séparés, les membres du Conseil d'administration doivent être élus selon des règles de nomination précises. Pour ce faire il est nécessaire de dépolitiser au maximum le Conseil d'administration.
Nous aurons l'occasion au cours du débat d'intervenir sur différents points. Je crois que pour le débat d'entrée en matière, il faut prendre conscience que ce n'est pas avec ce seul projet de loi que nous allons rétablir les finances de l'Hospice général. Nous avons fait aujourd'hui la moitié du chemin. Nous ferons la deuxième moitié lorsqu'il s'agira de modifier la loi sur l'assistance publique, parce que les dérives de l'Hospice sont aussi dues aux largesses de l'Etat dans le domaine de l'assistance publique... (Commentaires.) ...et pour ceux qui auraient des doutes à ce sujet, je les renvoie aux manifestations qui se déroulent depuis quelques jours en France, où les étudiants qui bénéficient d'un master doivent se battre pour des contrats première embauche payés au SMIG. A ce titre-là, ils auraient tout intérêt de venir à Genève pour bénéficier de l'assistance publique.
Le président. Le Bureau a décidé de clore la liste. Ont encore demandé la parole Mme von Arx-Vernon, M. Velasco, M. Weiss, M. Gautier, M. Letellier, M. Bavarel, M. Charbonnier, M. Pétroz et Mme Fehlmann Rielle.
Mme Anne-Marie Arx-Vernon von (PDC). Mesdames et Messieurs les députés, il semble très important pour le parti démocrate-chrétien de rappeler l'essentiel de cette loi. Il s'agit d'un contenant, il s'agit d'un cadre. Les contenus, qui ont d'ailleurs été relevés comme étant extrêmement importants, sont notamment l'aide sociale individuelle et le fonctionnement des Centres d'Action sociale et de Santé, qui seront traités à part. Ce sont les contenus.
Ici, je vous en prie, tenez compte du fait que c'est un contenant qu'il a fallu redéfinir. Il a fallu redéfinir également et, grâce à ce projet de loi, c'est possible, des outils de gestion plus exigeants en termes d'anticipation et de contrôle. Ce ne sont pas des tabous, ce n'est pas pour embêter les personnes qui travaillent dans le cadre de l'Hospice général, ni son Conseil d'administration qui a certainement essayé de faire le mieux possible. Mais, aujourd'hui, on a besoin d'autres outils de gestion, plus exigeants, qui permettent une meilleure anticipation et un meilleur contrôle. Il s'agit également, et ce n'est pas non plus un tabou, de réduire le nombre des membres du Conseil d'administration.
Si des représentants de chaque parti, si un Conseil d'administration qui semblait pléthorique permettait de faire un meilleur travail, cela se saurait. On sait aujourd'hui, et ce n'est pas seulement parce que cela a été exprimé dans des concepts de bonne gouvernance, mais on le sait de manière pragmatique, qu'il y a besoin de personnes qui peuvent prendre des décisions rapidement, être opérationnelles rapidement et surtout ne pas faire de la politique au sein du Conseil d'administration. Parce que, Mesdames et Messieurs, c'est ici qu'on doit faire de la politique, et nous ne devons pas nous laisser affaiblir, quels que soient les partis. Evidemment, les partis qui ne sont pas représentés, on peut le comprendre, ont envie de l'être. Quant aux autres partis, qui risquent d'être moins représentés, ou plus du tout, mais dont les tendances seront représentées, ils vont perdre des jetons de présence. Est-ce que c'est un tabou ?
Maintenant, il y a le mandat de prestations. Je pense, en tant que professionnelle du social, que le mandat de prestations est une très bonne chose. (Brouhaha.) Monsieur le président, s'il vous plaît, je voudrais pouvoir être entendue ! Je vous remercie. Le mandat de prestations est quelque chose d'extrêmement important. C'est un outil qui permet d'être plus vite opérationnels lorsque les besoins qui n'ont pas pu être identifiés, n'ont pas pu être anticipés, comme on pourrait tous le souhaiter ici, à froid, en raisonnant de manière tout à fait théorique. Le mandat de prestations permet de s'adapter aux besoins, d'augmenter le financement - cela non plus, ne doit pas être un tabou, pour les personnes qui sont très sensibles à cette notion ! Il doit y avoir la possibilité d'augmenter les prestations sociales si c'est nécessaire et, éventuellement bien sûr, de les diminuer lorsqu'il y en a moins besoin. Et cela se fait avec les mandats de prestations.
Quant à l'autonomie, Monsieur le président, Mesdames et Messieurs, une chose extrêmement importante: c'est avec l'autonomie que l'on attire les dons et les legs qu'aucun service de l'Etat ne recevra jamais. Pour ce qui est de la formation, il faut savoir que l'Hospice général représente le fleuron de l'aide sociale, dans lequel chaque étudiant de l'Institut d'études sociales prévoit de parfaire sa formation. Chaque étudiant souhaite pouvoir inscrire dans son C.V. le passage dans cette illustre et noble institution. J'insiste là-dessus, parce que cette institution bénéficie d'une réputation magnifique, et l'esprit de Genève se reconnaît dans l'Hospice général. Avant de se spécialiser, les étudiants peuvent développer avec l'Hospice général des formations qui sont renforcées par son autonomie. Et l'autonomie permet de développer une culture d'entreprise qui fait que les gens s'identifient à une mission de l'Hospice général, et pas seulement avec une mission de l'Etat qui peut parfois sembler vague.
C'est pour toutes ces raisons que ce projet de loi paraît sensé et pragmatique et que le PDC vous invite avec force et détermination à le voter.
Le président. La parole est au député Velasco.
Une voix. Monsieur Velasco ! (Rires. Commentaires.)
Le président. Monsieur Velasco, pardon !
M. Alberto Velasco (S). Tout d'abord, j'aimerais dire que les propos tenus par M. Catelain sur les étudiants français sont indignes. Ils sont indignes, parce que, Monsieur Catelain, si vous aviez été ne serait-ce qu'une fois à l'Hospice général pour vos besoins, vous ne parleriez pas comme cela. Vous prétendez que les gens qui vont à l'Hospice général le font parce que ce qu'ils vont recevoir est tellement conséquent qu'il vaut mieux aller à l'Hospice que travailler. C'est ce que vous avez prétendu. Donc, vous encouragez les étudiants français à venir à Genève parce qu'ils auront des vacances. C'est totalement indigne, surtout de la part d'un député.
Concernant les problèmes financiers de l'Hospice, j'ai entendu ici des personnes avancer des chiffres avec lesquels, Monsieur le président, je ne peux pas être d'accord. (Brouhaha.)
Une voix. On n'entend pas !
M. Alberto Velasco. Monsieur le président, est-ce que vous pourriez mettre de l'ordre dans la salle, conseiller à mes collègues de partir dehors, au bistrot ?
Le président. Un peu de silence, s'il vous plaît ! (Commentaires.)
M. Alberto Velasco. Concernant les chiffres qui ont été énoncés ici, les pertes que l'Hospice a eues année après année et qui ont été débattues à la commission des finances - et il y a aussi des députés à la commission des finances - ces pertes, on les avait enregistrées parce qu'on savait qu'elles allaient venir. Elles sont la conséquence de la dégradation du climat social à Genève. Ces pertes sont induites parce que l'Hospice a une mission, qui lui est donnée par la constitution. Quelle que soit l'attitude des uns et des autres ici au Grand Conseil, il doit remplir la mission qui lui est confiée, et c'est dans ce cadre-là que les déficits nous ont été présentés à la commission des finances. Par conséquent, on ne pouvait que les voter... (Chahut.) Ces déficits ne dépendent pas de la bonne ou mauvaise gestion de l'Hospice. Ils dépendent de la situation qui se dégrade à Genève. Vouloir imputer ces pertes à l'Hospice pour cause de mauvaise gestion, Mesdames et Messieurs les députés, c'est totalement incorrect, c'est malhonnête, ce serait malhonnête intellectuellement de prétendre que l'Hospice, s'il avait été bien géré, n'aurait pas été en déficit. Monsieur le président, je défie quelqu'un de me dire que si l'Hospice avait été bien géré, il n'y aurait pas eu ces pertes. C'est totalement faux, donc je récuse ces arguments.
Le deuxième point que j'aimerais essayer de développer, c'est que les socialistes, pendant les travaux en commission, se sont abstenus concernant un très grand nombre de points de ce projet de loi. Nous n'avons refusé que des points fondamentaux, c'est-à-dire, concernant la mission de l'Hospice, le statut du personnel et la composition du Conseil d'administration. Ce qui veut dire, Monsieur le président, et vous le savez très bien pour avoir suivi nos travaux, que nous, les socialistes, et nous l'avons montré dans nos votes, sommes tout à fait d'accord avec toute une série d'articles de lois qui, effectivement, améliorent, je suis d'accord avec vous là-dessus, la gestion de l'Hospice. Le seul point sur lequel nous n'avons pas été d'accord, et on l'a montré dans les débats, c'est que nous considérons que le nombre des conseillers au sein du Conseil d'administration n'est pas un critère.
Je tiens ici à développer les raisons pour lesquelles nous prétendons que le nombre n'est pas un critère. Le problème de l'efficacité du Conseil d'administration que certains ont soulevé ici, est une réalité. Mais l'efficacité, Monsieur le président, c'est la direction de l'Hospice, l'efficacité de la gestion de l'Hospice général doit être assurée par la direction de l'Hospice, Mesdames et Messieurs, pas par le Conseil d'administration. Le Conseil d'administration doit élaborer la stratégie de la politique de l'Hospice. Il y a là deux missions différentes et on les confond, il y a des députés ici qui les confondent et qui veulent que la question de l'efficacité de la gestion soit assumée par le Conseil d'administration, mais c'est faux. C'est faux. C'est du ressort de la direction. Par conséquent, Mesdames et Messieurs les députés, qu'il y ait neuf administrateurs, ou quinze administrateurs au Conseil d'administration, cela ne change strictement rien. Mais rien, à l'efficacité de l'institution.
Lors de l'audition de M. Pasquier en commission, conjointe avec les transports publics, que nous a-t-on dit ? Qu'il semblait normal qu'effectivement, s'agissant d'un établissement de droit public, la composition du Conseil d'administration puisse refléter les représentations politiques. M. Pasquier l'a dit textuellement, vous pouvez le lire dans les p.-v.; il a dit que, quand il s'agit d'un établissement public, il est normal et même souhaitable qu'à l'intérieur de cet établissement il y ait une certaine représentation des différentes compositions politiques. Mais cela, vous ne le dites pas ici. Et il l'a dit. Alors, Mesdames et Messieurs les députés, qu'il y ait neuf députés au lieu de quinze, à la limite, sincèrement, cela ne me gène pas du tout, le nombre de députés ne me gène pas du tout. Ce que je souhaiterais, pour le bien de l'Hospice et pour le bien de la République, c'est que tous les intérêts qui sont représentés au sein de ce Grand Conseil figurent dans ce Conseil. C'est cela qui est important, ce n'est pas le nombre. Si on me garantit demain, Monsieur le président, qu'avec onze administrateurs, vous allez, disons, faire en sorte que les intérêts représentés dans ce Grand Conseil aient leur place dans le Conseil d'administration, je voterai le nombre. Mais rien ne garantit dans le projet actuel que ce sera le cas. Et c'est une des raisons pour lesquelles, et c'est dommage, nous ne voterons pas ce projet de loi.
Deux questions se posent ici: la question du statut de l'Hospice - rattaché à l'Etat ou indépendant - qui peut faire l'objet d'un projet de loi, et la question de la gestion, dont nous débattons aujourd'hui. Il est dommageable, je dis bien, dommageable, que le débat sur la question du nombre d'administrateurs et de sa représentativité n'ait pas permis de dégager un consensus, parce que nous aurions pu le faire.
Présidence de M. Michel Halpérin, président
M. Alberto Velasco. Mesdames et Messieurs les députés, le parti socialiste... (Brouhaha.) ...en ma personne et celle de Mme Laurence Fehlmann Rielle, a déposé un amendement qui demande...
Le président. Il va falloir conclure, Monsieur le député.
M. Alberto Velasco. Je le ferai, Monsieur le président, vous savez que je m'exprime très peu ces derniers temps, alors soyez indulgent ! (Il rit.)
Le président. Vous savez que je réserve mon indulgence exclusivement aux conseillers d'Etat !
M. Alberto Velasco. Donc, nous demandons qu'un membre par parti représenté au Grand Conseil soit au Conseil d'administration. Nous défendrons l'amendement tout à l'heure. Ce qui nous semble important, à nous, les socialistes, c'est que la représentativité à l'intérieur du Conseil d'administration puisse garantir les voix de tous les partis siégeant dans ce Grand Conseil.
Le président. Merci, Monsieur le député. Désolé d'avoir interrompu votre élan final... Il était bien tout de même.
M. Pierre Weiss (L). Avant de présenter brièvement quelques trois points: l'autonomie de l'Hospice, les tâches et la composition du Conseil d'administration, j'aimerais féliciter le Conseil d'Etat. Après tout, il donne tant de verges au Grand Conseil que, pour lui montrer que nous ne sommes pas, loin s'en faut, pleins de méfiance et d'esprit de vindicte à son égard, j'aimerais le féliciter de la cohérence du projet de loi qu'il a déposé et relever au passage la célérité avec laquelle nous lui avons répondu, montrant ainsi notre bienveillance.
En ce qui concerne les tâches qui sont recensées dans ce projet de loi, je crois qu'il convient tout d'abord de dire que ce projet a le grand mérite de recentrer l'Hospice sur deux tâches fondamentales: d'une part, l'aide, d'autre part, l'assistance. Il laisse la possibilité de développer d'autres tâches en fonction des besoins; par exemple, l'information, mais l'on sait aujourd'hui que l'information peut être sujette à certaines dérives, et le Conseil d'Etat en est parfaitement conscient. Aussi est-ce un bien d'avoir ainsi recentré les tâches, de les avoir recentrées notamment en permettant que des moyens adéquats soient consacrés à leur accomplissement, en particulier, la communication des données entre les services de l'Etat. La CEPP avait à plusieurs reprises relevé combien les problèmes de communication insuffisante, d'opacité, nuisaient au bon accomplissement des tâches de l'Hospice général.
Ensuite, en ce qui concerne l'autonomie de l'Hospice, dont mon collègue Slatkine a relevé avec opportunité qu'elle n'était pas l'objet du présent débat, je voudrais toutefois relever que je fais également confiance à la nouvelle direction de l'Hospice général, que j'attache de l'importance, et tout le groupe libéral aussi, à la décentralisation qui est nécessaire. Cela relève d'ailleurs de notre conception des tâches de l'Etat. Certaines ne doivent pas être exécutées par le petit Etat, mais doivent au contraire être laissées à des institutions que l'Histoire nous a léguées. Au surplus, la haute surveillance du Conseil d'Etat doit être suffisante pour vérifier si ces tâches sont exécutées avec précision et conscience. De plus, le Conseil d'administration doit lui aussi veiller à ce que le travail se fasse de façon adéquate.
Précisément, sur l'objet essentiel de la controverse, à savoir, la composition du Conseil d'administration, il convient de rappeler la logique dans laquelle la majorité de la commission a voulu oeuvrer. D'abord, dépolitiser ce conseil. Là, je dois dire que l'opération est globalement réussie. Elle est d'ailleurs à poursuivre dans le sens des quatre projets de lois déposés par le parti libéral qui concernent d'autres institutions publiques dont, avec nos collègues de l'Entente, nous allons oeuvrer à la dépolitisation. Il y a également dans la dépolitisation un point important: rendre incompatible le mandat de membre du Conseil d'administration avec celui de député. Notre collègue Slatkine, qui s'est exprimé tout à l'heure, est tout à fait d'accord qu'un hara-kiri collectif soit prononcé à ce sujet par ce Grand Conseil.
Il faut aussi une réduction du nombre de membres afin d'arriver à une efficacité majeure des travaux du Conseil d'administration de l'Hospice, en veillant à ce que les membres cantonaux soient supérieurs à la moitié du total des membres. Par membres cantonaux, j'entends les membres qui sont nommés soit par le Conseil d'Etat, soit par le Grand Conseil, par opposition à des membres qui, dans le cas présent, sont nommés par l'Association des communes genevoises ou par le personnel, ou encore à des membres qui, dans d'autres conseils, seraient nommés par nos collègues vaudois, français, par l'Association des médecins, que sais-je encore...
Deux points encore, concernant la composition du Conseil et sa logique. D'abord, le fait que la présidence ne soit pas assumée par un conseiller d'Etat, précisément au nom d'une séparation dans l'exercice des fonctions, est bienvenu. Et enfin, peut-être le seul élément sur lequel, d'un point de vue libéral, nous avons quelques regrets, à savoir qu'il y ait une confusion permettant à au moins un membre du Conseil d'administration, celui qui représente le personnel, d'être juge et partie. Autant il nous semble logique qu'il y ait un représentant du personnel au sein d'un Conseil d'administration, avec voix consultative, expression d'une commission du personnel efficace et représentative au sein des établissements en question, autant il nous semble regrettable que celui-ci ait le droit de vote. Toutefois, par esprit de compromis, bien connu du parti libéral... (Chahut.) ...nous ne nous opposerons pas à cette composition.
En d'autres termes, Mesdames et Messieurs les députés, Monsieur le président, je conclurai en demandant que nous adoptions ce projet de loi qui veille à préserver l'Hospice général d'une étatisation bureaucratique.
M. Renaud Gautier (L). Evidemment, comme d'habitude, mon lot sur cette terre est de parler après Pierre double U Weiss, et ce n'est pas très facile... Je vais donc réduire ce que je voulais dire à deux points. D'abord, je suis étonné que dans ce débat qui porte sur la gouvernance, non pas sur la politique sociale, certains s'accrochent à la représentation d'un membre par parti de ce Grand Conseil. Mesdames et Messieurs, soyons démocratiques: pourquoi ne pas mettre par exemple des gens de l'AdG; il y a eu une excellente administratrice AdG, qui a été un personnage marquant du Conseil d'administration de l'Hospice. Pourquoi s'arrêter aux membres représentés dans le Grand Conseil si l'on cherche une bonne gouvernance ?
Ensuite, si l'on cherche une bonne gouvernance, je vais devoir m'éloigner du sens du compromis de M. Pierre double U Weiss pour dire que non, si on veut une bonne gouvernance, il n'y a aucune raison que les représentants du personnel siègent au Conseil d'administration. Il y a d'autres lieux que le Conseil d'administration pour régler les problèmes employeur-employés et dans le cadre d'une bonne gouvernance, cela ne s'impose pas.
Mesdames et Messieurs, c'est un projet très large qu'on vous a proposé, avec la possibilité pour le pouvoir politique, celui-ci ou celui qui se trouve une marche au-dessus de nous, de nommer deux administrateurs. Il n'y a donc aucune raison d'avoir un débat sur la représentation politique. Ce qui est demandé enfin, c'est que ce soient des critères d'efficience qui soient déterminants pour l'élection au Conseil d'administration de l'Hospice général, et non pas l'appartenance à un parti. Pour reprendre à l'envers ce que dit l'un des rapports de minorité, peut-être que des gens bardés de diplômes sont extrêmement mauvais, mais il y a aussi dans ce parlement des gens qui n'ont aucun diplôme et qui ne sont pas meilleurs !
M. Alain Charbonnier (S). Je suis quand même un peu effaré d'entendre M. Gautier, M. Slatkine ou M. Weiss nous dire qu'on traite ce soir uniquement de la gouvernance de l'Hospice général. Je ne sais peut-être pas lire, mais je vois que le projet de loi s'intitule: «Projet de loi du Conseil d'Etat sur l'Hospice général». Si on ouvre et qu'on regarde les différents articles, on s'aperçoit que ce projet de loi traite des buts et des missions de l'Hospice, du statut du personnel et de bien d'autres choses en plus que de ce qui est strictement de l'ordre de la gouvernance, donc de la composition du Conseil d'administration et des missions de ce Conseil d'administration.
Ce projet de loi est beaucoup plus large qu'on veut nous le faire croire. Je crois que nos adversaires tentent de nous faire croire qu'on traite uniquement de la gouvernance, histoire de ne pas être cohérents et de refuser ce débat, comme l'a si bien proposé M. Slatkine en disant: «Mais qu'est-ce que vous voulez traiter du social en général ?» Eh bien oui, c'est ce que nous désirions faire en commission, c'est ce que nous avons demandé à plusieurs reprises au début des travaux, c'est-à-dire de traiter aussi bien de la loi sur l'assistance sociale individuelle, qui est pendante devant la commission, que des problèmes posés par les CASS, révélés par le premier rapport sur la loi des CASS, évaluation qui a été faite et rendue l'année passée. La majorité de la commission a refusé en disant: «Non, non, on traite uniquement de la gouvernance !». Je le rappelle, ce projet de loi prévoit de réduire les missions de l'Hospice général par rapport à ce qui était prévu dans l'ancienne loi. Il vise, entre autres, tout le volet de la prévention, ce qui paraît quand même un peu gros à nos yeux.
M. Slatkine est administrateur - au niveau de l'éthique, je lui laisse la responsabilité de son choix de prendre la parole: on a un article 24, on l'applique ou on ne l'applique pas, c'est à chacun de décider. Il est donc administrateur de l'Hospice général, mais c'est bien qu'il ait pris la parole, en effet, que vient-il de dire ? Que depuis une année, dix-huit mois, depuis que la nouvelle direction est en place, tout va mieux, tout va bien au sein de l'Hospice. On est très contents. Mais cela avec le Conseil d'administration actuel, c'est-à-dire, un membre par parti, ce qu'on réclame comme amendement dans ce projet de loi aujourd'hui. Est-ce qu'il vaut vraiment la peine de changer, est-ce que la gouvernance de l'Hospice général est une catastrophe, puisque les choses vont mieux depuis que la direction générale s'est attelée à améliorer la situation et qu'on a mis en place des contrôles internes pour avoir une vision plus claire du pilotage de l'Hospice ?
Sur les interventions du Conseil d'Etat au sujet de l'Hospice général, est-ce que cela changera quelque chose ? Je ne suis vraiment pas sûr. On l'a encore vu dernièrement, quand le nouveau conseiller d'Etat M. Longchamp s'est épanché dans la presse à plusieurs reprises... (Huées.) Oui, tout à fait, pour dire son courroux à l'égard de l'Hospice général en raison du déficit, qui a en fait été imposé il y a quelques années par le Conseil d'Etat. Mme Fehlmann Rielle l'a rappelé tout à l'heure. (L'orateur est interpellé.) Monsieur Unger, vous êtes bien placé pour le savoir, vous qui avez aussi exprimé votre courroux chaque fois que les chiffres rouges apparaissaient. C'est vraiment de l'hypocrisie complète: l'Hospice général est obligé de faire ces avances AI, on ne voit pas comment il pourrait faire autrement. Que vous veniez chaque fois au printemps dire: «Oh ! là là, quelle horreur, encore une facture à payer !», c'est de l'hypocrisie.
Au niveau du partenariat, vous pensez introduire un mandat de prestations. Quand on voit comment d'autres institutions du canton qui sont en partenariat sont traitées, on peut se poser des questions. Je pense aux EMS, Monsieur Unger, qui se voient «ratiboiser» leurs subventions, que ce soit sur la formation ou alors carrément la subvention de fonctionnement, dont vous n'avez attribué cette année que 60%, vous laissant le choix de décider à la tête du client d'accorder ou non le reste de la subvention. En attendant, ces EMS sont contraints par l'OCPA de présenter des budgets de fonctionnement très déficitaires, puisqu'il leur manque les 40% des subventions. Je reviens à l'Hospice général. Le partenariat, c'est bien joli... (Chahut.) ...encore faut-il qu'il soit appliqué correctement, en toute légalité et conformément au contrat ou au mandat de prestations...
C'est pour cela que nous vous invitons à refuser ce projet de loi et à repenser la politique sociale du canton dans toutes les lois qui existent actuellement et dont la modification est pendante devant la commission des affaires sociales.
M. Pascal Pétroz (PDC). En préambule, ce parlement a eu une réaction assez forte durant l'intervention de mon préopinant. Je peux comprendre la violence de cette réaction; je dois dire que ce que je ne comprends pas très bien, c'est à quel titre un conseiller d'Etat n'aurait pas le droit de s'exprimer sur des sujets qui touchent à son dicastère. Et quand on dit ce genre de choses, on devrait peut-être balayer devant sa propre porte. Je me rappelle qu'au cours du débat sur les notes, que nous avons eu il y a un mois, le conseiller d'Etat de votre parti était en pleine page durant les trois jours qui ont précédé les débats de notre Grand Conseil. Cela n'a posé problème à personne, raison pour laquelle il faut, plutôt que de parler de polémique, parler du fond du problème.
Le fond du problème n'est pas très compliqué: nous avons aujourd'hui trois possibilités concernant l'Hospice général, quant aux principes et à l'entrée en matière de ce projet de loi. Nous pouvons décider du statu quo. Cela, d'après ce que j'ai cru comprendre des débats en commission, personne n'en veut. Il nous reste deux possibilités: soit le projet de loi qui vous est soumis, c'est-à-dire, un Hospice établissement public autonome avec mandat de prestations, soit l'intégration de l'Hospice général dans le giron de l'Etat. C'est ce que souhaitent les rapporteurs de minorité et les partis qui les soutiennent.
Alors là, cela pose un problème. Je l'ai dit plusieurs fois en commission et cela a été rappelé tout à l'heure pendant le débat: la constitution dit, à l'article 169: «Les organismes chargés de l'assistance publique sont : a) l'Hospice général, institution genevoise d'action sociale, b) les autres organismes publics ou privés auxquels la loi attribue de telles tâches.» Cela veut dire que vous ne pouvez pas intégrer l'Hospice général dans l'administration publique, parce que ce serait un peu facile de faire un tour de passe-passe en créant un service de l'Hospice général au sein de l'administration publique, ce n'est de toute façon pas possible aujourd'hui. Pour intégrer l'Hospice général dans l'administration cantonale, il faudrait modifier la constitution. Il me semble, je ne connais pas tous les points à l'ordre du jour et les points votés ces derniers temps, mais je pense pouvoir être formel sur le fait que nous n'avons été saisis d'aucune proposition d'aucun parti dans cette assemblée allant dans le sens de la modification ou de la suppression de l'article 169 de la constitution. Nous sommes donc face à la donnée de base suivante: la constitution nous dit que l'aide sociale, c'est l'Hospice général, raison pour laquelle la proposition des rapporteurs de minorité est tout simplement inconstitutionnelle.
Dès lors que personne ne veut du statu quo et puisque la proposition de rattacher l'Hospice général à l'administration publique est illégale car anticonstitutionnelle, on ne peut faire qu'une seule chose, c'est parfaitement logique: choisir la voie qui vous est proposée ce soir, à savoir, l'établissement public autonome avec mandat de prestations. Il me semble que la démonstration est tellement logique que je ne comprends pas très bien comment on pourrait arriver à un autre résultat.
Maintenant, la deuxième pierre d'achoppement est la composition du Conseil d'administration... (Brouhaha.) Il faut faire un peu d'histoire, de temps en temps. Je suis un jeune député, mais je me suis renseigné, j'ai demandé aux anciens ce qu'il en était et on m'a répondu que le phénomène de la présence d'un membre de chaque parti représenté au Grand Conseil au sein des différents conseils d'administration était une pratique relativement récente - cela ne fait pas cent ans que cela dure. On m'a expliqué également que cette pratique d'un représentant par parti avait été mise sur pied pour combler le déficit d'organisation de certaines entités publiques ou para-publiques qui avaient été accusées de placer les gens en fonction de leurs liens avec la personne qui les nommait plutôt qu'en fonction de leurs compétences. Pour faire face à cela, on a décidé de tout contrôler, en demandant qu'un représentant par parti siégeant au Grand Conseil soit présent, pour être sûrs que rien ne puisse être caché, puisque chaque parti était informé par un membre du Conseil d'administration de ce que l'institution avait essayé de cacher. C'est comme cela qu'on est arrivés à une représentation d'un membre par parti représenté au Grand Conseil. Après, on s'est rendu compte qu'au sein des partis politiques les gens qui étaient envoyés au sein des conseils d'administration... (Chahut.) ...étaient souvent bons, mais pas toujours, et que le fait d'avoir ce type de représentations politisait souvent à outrance quelque chose qui relevait plus de la gestion que de la politique.
C'est la raison pour laquelle il vous est proposé aujourd'hui cette voie médiane entre la situation qui prévalait il y a vingt ans et une intégration dans le giron de l'Etat. La proposition est la suivante: «On ne place plus les copains, on ne place plus un représentant par parti, mais on place des gens en fonction de leurs compétences spécifiques». Je me réfère en cela à l'article 11 alinéa 1 du projet de loi qui vous est soumis, qui dit ceci: «Le conseil d'administration de l'Hospice général comprend des membres aux compétences spécifiques dans les différents domaines d'activité de l'établissement ainsi qu'en matière de gestion d'un établissement de cette importance.» Il me semble que c'est une voie qui n'est pas doctrinaire, pas politique, qui est celle du bon sens, et qui est celle qui doit prévaloir. Je peux comprendre l'opposition de certains partis envers ce type de répartition. C'est vrai que le fait d'avoir un représentant par parti était un moyen commode de toucher des jetons de présence...
Le président. Il va vous falloir bientôt conclure, Monsieur le député.
M. Pascal Pétroz. Je conclus, Monsieur le président. Cette solution permettait aux partis, qui ont souvent de réels problèmes de financement, de toucher des jetons de présence, mais la solution au financement des partis politiques n'est pas celle d'avoir des représentants dans les conseils d'administration des établissements publics autonomes; il doit y avoir une solution spécifique, mais ce n'est pas l'objet du présent débat.
Par conséquent, Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, le groupe démocrate-chrétien soutiendra avec enthousiasme cet excellent projet de loi.
M. Christian Bavarel (Ve), rapporteur de première minorité. J'aimerais revenir simplement sur quelques points qui ont été abordés lors de ce débat. Le premier concerne l'intervention de M. le député Ivan Slatkine: quand on travaille sur un projet qui touche à l'organisation de l'Hospice général, pour moi, la première question qu'on doit se poser, c'est celle de l'autonomie, celle du sens du projet de loi. Très clairement, nous, les Verts, remettons en cause cette autonomie. C'est bien pour cela que j'ai fait mon rapport de minorité dans ce sens.
Vous posiez une autre question, Monsieur Slatkine, par rapport à la différence entre le logement social et le logement de rentes. J'entends parfaitement que certains immeubles propriété de l'Hospice général aujourd'hui, étant des objets d'un certain standing, soient loués à des gens qui ne sont pas bénéficiaires de l'aide apportée par l'Hospice général. Mais le but est bien que ces immeubles rapportent de l'argent et j'appelle ceci du logement de rentes. Je pense que cela doit être géré différemment des logements sociaux et nous sommes partisans, chez les Verts, de l'idée que l'on trouve des solutions de type fondations immobilières pour gérer ces logements de manière professionnelle, selon leur fonction.
Je rappelle, toujours à M. le député Ivan Slatkine et à cette assemblée, que M. Pasquier a donné à la commission une audition sur le problème de la gouvernance et sur différents projets de lois. Deux commissions étaient réunies et vous n'avez pas dans le rapport l'intégralité de son exposé, mais une partie seulement, qui est pertinente par rapport à ce projet de loi. Le professeur Pasquier avait cité cinq critères, en nous disant que s'ils n'étaient pas tous réunis, il ne fallait pas rendre l'institution autonome. Je les ai simplement reproduits et je vous pose simplement la question, concernant chacun de ces points, pour que vous sachiez si vous trouvez que toutes les réponses sont données pour l'autonomie de l'Hospice général. Pour le cash pooling, sur lequel vous aviez des interrogations, Monsieur le député, je rappelle que le circuit aujourd'hui est quelque peu compliqué parce que, pour pouvoir discuter avec l'Hospice général, il faut passer par son département de tutelle, mais que le département des finances, au lieu de parler directement, fait un détour un peu compliqué, alors que si l'Hospice était vraiment au sein de l'Etat, il n'y aurait pas besoin de ces méandres pour arriver au résultat du cash pooling. Le but du cash pooling, c'est quand même qu'il se fasse de manière directe, et non pas après une série de jeux de billard à trois bandes.
Monsieur le député Pétroz, je suis extrêmement surpris de votre dénigrement des politiques, même si je ne partage pas l'avis des socialistes sur le fait qu'il faudrait une représentation parti par parti - moi, j'aurais tendance à dire tendance par tendance. Ce dénigrement de la qualité des politiques à l'intérieur des Conseils d'administration ! (Chahut.) Je trouve que le politicien a le don de se tirer systématiquement une balle dans le pied, en disant qu'il est mauvais, qu'il fait mal son travail, etc. Je vois dans cette assemblée, que je fréquente depuis un certain temps, des gens de qualité, qui ont des compétences, qui consacrent du temps et de l'énergie à faire leur mission le mieux possible. Je ne comprends pas cette volonté de toujours dire que les politiciens sont nuls... (Brouhaha.) ...ce n'est pas vrai ! Les politiques essaient de travailler le plus correctement possible. Je suis un peu fatigué d'entendre ce genre de dénigrements.
Le dernier point que je voulais soulever est celui des dons à l'Hospice général. Vous savez qu'il y a une garantie de déficit faite par l'Etat: chaque fois que vous donnez un franc à l'Hospice général, vous savez que le déficit va diminuer d'un franc. Que vous le donniez à l'Hospice général ou à l'Etat, c'est à peu près équivalent. C'est mathématique. Si on voulait faire une fondation pour recevoir les dons, on pourrait toujours l'appeler Hospice général, si on voulait, ce serait possible. Je vous rappelle également, Monsieur le député, qu'on pourrait aussi déléguer l'assistance publique à l'Etat et garder une entité s'appelant Hospice général, qui serait autonome et qui serait là pour gérer les fonds et, peut-être, pour gérer d'autres choses, cela serait aussi possible.
Mme Laurence Fehlmann Rielle (S), rapporteuse de deuxième minorité. Je voulais aussi répondre à certains propos, notamment de M. Slatkine. Je suis très surprise que, en tant qu'administrateur, il ne voie pas le lien entre ce projet de loi, qui est dit de pure gouvernance, mais qui, à notre avis, est tout sauf un simple projet technique, et l'ensemble de la problématique de l'aide sociale à Genève. Je crois qu'on peut être d'accord sur le fait que l'Hospice général est l'instrument de la politique sociale du canton. Vouloir détacher les missions de l'Hospice général de l'ensemble de l'aide sociale à Genève, du fonctionnement des CASS et de la question de l'aide à domicile est un peu aberrant et je suis surprise de la position de M. Slatkine.
Peut-être met-il en oeuvre la tactique du saucisson à laquelle on nous a déjà rendus familiers, notamment dans le cadre de l'aménagement du territoire, où on essaie de réviser les projets de lois petit bout par petit bout pour mieux faire passer la pilule. Je pense qu'il est bien normal que l'on puisse parler d'une façon globale de ces questions. Je rappelle une fois de plus que le Conseil d'Etat a déposé un projet de loi sur l'aide sociale individuelle, dans lequel il est question d'un contrat d'aide sociale individuelle qui est en train d'être mis en place alors qu'il n'a aucune base légale. Je pense qu'il est urgent que l'on puisse en parler parce que, si cette démarche est intéressante, elle mène peut-être aussi à certaines dérives, comme l'aide sociale au mérite, et je crois qu'il faut qu'on soit extrêmement attentifs. C'est notre rôle de politiques de nous en préoccuper.
Concernant l'intervention de M. Pétroz sur la logique pure qui voudrait qu'on ne puisse pas détacher l'aide sociale de l'Hospice général pour la remettre à l'Etat et que personne ne voudrait le statu quo, nous sommes parfaitement conscients du fait que, si ce projet de loi était refusé, comme nous le souhaitons, eh bien nous reviendrions au statu quo. Rien ne nous empêche de reconduire pour quelques années un Conseil d'administration qui serait renouvelé selon l'ancienne formule en attendant qu'on ait ce vrai débat sur l'aide sociale. Je ne vois pas en quoi maintenir le statu quo poserait un problème, sauf pour renouveler le Conseil d'administration, mais, certains l'ont bien dit, il y a beaucoup moins de problèmes, étant donné qu'il y a maintenant une nouvelle direction à l'Hospice général.
Finalement, j'ai été scandalisée que M. Catelain, qui n'est plus là, ait réussi à introduire dans son intervention qu'il y aurait des largesses prodiguées par l'Hospice général envers des personnes qui ne seraient pas vraiment dans le besoin. Je trouve que ces propos sont vraiment déplacés quand on connaît le taux de chômage et le nombre de personnes qui ne retrouvent pas d'emploi et qui deviennent dépendantes de l'aide sociale. Accuser une fois de plus le personnel de l'Hospice général de manquer de rigueur et de distribuer des largesses est inacceptable.
M. François Longchamp, conseiller d'Etat. Le débat qui nous occupe ce soir est un débat important, un débat vaste, un débat ciblé. C'est un débat important parce qu'il traite de l'organisation d'une des missions les plus essentielles de toute communauté humaine, à savoir, l'attention qu'elle porte aux plus démunis de ses membres. C'est un débat important, parce qu'il traite de l'Hospice général, qui est une institution de taille, qui apporte son appui à 16 000 personnes dans notre canton, dans laquelle travaillent 1 000 personnes et qui est l'objet d'un effort public de près de 230 millions par année.
Le débat qui nous occupe est aussi un débat vaste, car il s'inscrit dans la longue histoire d'une institution, histoire qui a commencé le 14 novembre 1535, à l'époque où cette institution était à la fois un hôpital, un organisme d'assistance et une prison. L'Hospice général, qui en est issu, en a gardé la grandeur, les servitudes et aussi parfois les strates et les errances.
Enfin, ce débat est ciblé et il faut rappeler ici de quoi il traite. Non, il ne traite pas du problème des avances AI. Non, il ne traite pas du problème des déficits. Non, il ne traite pas de la paupérisation réelle ou supposée de notre canton. Il a pour but d'adapter aux exigences de notre temps le fonctionnement de l'Hospice général en faisant jouer mieux les relations entre ce dernier et l'Etat et en modernisant les règles de gouvernance. Adapter les relations entre l'Hospice général et l'Etat, c'est procéder, comme ce projet le propose, par le biais d'un mandat de prestations attribué par l'Etat, qui définisse des critères de qualité, qui définisse des indicateurs, qui fixe un plan financier pluriannuel, qui contrôle les prestations et qui impose un contrôle interne. Et puis, moderniser les règles de gouvernance, c'est simplifier celles-ci, c'est permettre au Conseil d'administration de jouer mieux son rôle, dans une composition réduite, mais mieux responsabilisée, avec des compétences affirmées, avec des attributions précisées, avec un fonctionnement dépolitisé - non pas, Monsieur Bavarel, je partage votre avis, parce que les politiciens ont des qualités inférieures à d'autres gens, mais, comme l'a dit Mme von Arx, parce que ce n'est pas au Conseil de l'Hospice général de définir la politique sociale de ce canton, mais bien à votre Conseil et au gouvernement de Genève.
Sur tout cela, j'observe qu'un consensus s'est établi. Aucun groupe n'a vraiment défendu, à part peut-être le parti socialiste, le statu quo. Chacun est conscient que le système est à bout de souffle. Lors des auditions du président du Conseil d'administration de l'Hospice général et de son directeur général, ce constat a été fait et rappelé. Même les membres du Conseil d'administration et son président sont aujourd'hui conscients que les règles qui président au fonctionnement du Conseil ne sont pas suffisantes, ne sont pas acceptables, ne sont pas en rapport avec les exigences de notre temps.
Enfin, parce que ce projet est ciblé, il faut garder à l'esprit qu'il n'a jamais eu la vocation de régler tous les maux de la politique sociale genevoise, mais qu'il représente une solution concrète à un certain nombre des problèmes qui se posent très concrètement. Faut-il aller plus loin, faut-il rattacher l'Hospice à l'Etat ? Plusieurs groupes l'ont défendu, à gauche, au centre, à droite.
Bien sûr, il y a des dispositions constitutionnelles, M. Pétroz l'a rappelé, mais on pourrait en donner des lectures différentes de celles qui ont été faites. J'aimerais rappeler, quand on parle de l'autonomie de l'Hospice, qu'il y a un article dans la constitution, le premier de ce chapitre, qui indique que l'assistance publique est placée sous la direction générale et la surveillance du Conseil d'Etat et, plus spécialement, sous le contrôle du département qui en a la charge. Mesdames et Messieurs, il ne faut pas oublier les responsabilités, précisées par la constitution, du Conseil d'Etat, plus précisément du département que j'ai l'honneur de présider, qui doit exercer la surveillance d'une institution qui imprime aujourd'hui dans le budget de l'Etat une des plus grandes dotations; on l'a dit, près de 230 millions. Faut-il donc aller plus loin ? Faut-il imaginer rattacher un jour l'Hospice à l'Etat ? Le Conseil d'Etat, qui en a débattu, partage l'idée que la formule qui vous est proposée est la plus pragmatique, est la plus possiblement solide pour régler actuellement les problèmes qui se posent à l'Hospice général. Mais rien n'indique non plus que, si les nouvelles règles de gouvernance ne déploient pas les effets positifs qu'on en attend, le Conseil d'Etat ne reviendra pas sur ce débat.
Car si nous avions à construire aujourd'hui l'organisation sociale et l'organisation de l'assistance publique ex nihilo, il est à peu près certain que personne, personne dans ce parlement ne défendrait l'organisation actuelle. Mais nous n'en sommes pas là aujourd'hui. Ce débat interviendra s'il le faut et s'il est démontré, ce que le Conseil d'Etat ne souhaite pas, que le projet qu'il vous invite à voter ce soir ne déploie pas les effets positifs attendus.
Enfin, il faut le faire, Madame la rapporteure de minorité, il faut le faire maintenant, précisément parce que la législature se termine, précisément parce que le président actuel de l'Hospice général a demandé à ne pas voir son mandat prolongé. Il a dû assumer, dans des circonstances difficiles, et je suis placé pour le savoir, la présidence de cet Hospice. Il y a plusieurs autres administrateurs qui ont demandé à être déchargés de leurs fonctions et il s'agit maintenant de composer, selon des règles qui soient plus efficaces, un conseil qui soit capable de donner un nouveau souffle et une nouvelle orientation à l'Hospice.
Le président. Monsieur le conseiller d'Etat, je vais devoir vous prier de raccourcir la conclusion.
M. François Longchamp. Monsieur le président... (Chahut.) ...c'est la première intervention que je fais dans cette enceinte depuis que j'ai été élu... Comme vous le savez, je n'ai pas siégé longtemps comme député et c'est effectivement la première fois que j'ai le plaisir de parler devant vous. J'aurais aimé, Monsieur le président, et je suis sûr que vous l'apprécierez, j'aurais aimé vous raconter une petite anecdote... (Rires.) ...que je tire d'un livre historique sur l'Hospice général, qui est un livre de qualité, Monsieur le président, puisqu'il est dû à la plume experte d'un de vos prédécesseurs, M. Bernard Lescaze.
Ce livre narre l'histoire d'un de mes prédécesseurs, M. Guillaume Fuzier-Cayla, membre du Petit Conseil, c'est-à-dire, conseiller d'Etat de l'époque, qui, en 1791, a eu l'idée d'étatiser complètement l'hôpital - l'Hospice d'alors - en lui enlevant toute autonomie et en remettant sa gestion à des fonctionnaires. Ce Guillaume Fuzier-Cayla, qui était sans doute un homme fort apprécié, passait, la définition historique le rappelle, pour l'un des hommes les plus charitables du canton, car il distribuait généreusement les deniers publics pour venir en aide aux plus indigents. Le tribunal révolutionnaire, en 1793, dans une période un peu trouble de notre histoire, a déterminé que ce conseiller d'Etat de l'époque corrompait le peuple par ses bienfaits. Il a donc prononcé son exécution, qui a eu lieu à la Place Neuve le 27 juillet 1794. (Chahut.)
Mesdames et Messieurs, pour ces raisons-là déjà, nous n'entendons pas vous demander d'aller aussi loin, ce d'autant moins que vous apprécierez le fait qu'une année après, dans cette période trouble, l'argent venait à manquer, autre point commun avec notre moment, et figurez-vous que l'Hospice général a été contraint de se résigner à recourir à des expédients forcés comme la vente d'immeubles. Mesdames et Messieurs, là aussi, je vois des choses fort actuelles et, Monsieur le président, si vous me permettez encore d'abuser de mon temps de parole, je ne manquerai pas de vous dire, car cela me mettra en lien avec le débat précédent, que cette vente d'immeubles s'est heurtée malheureusement à une autre décision des tribunaux révolutionnaires, celle qui consistait déjà à l'époque à contrôler les loyers. L'Hospice ayant dû vendre ses immeubles, il s'est trouvé, par ces édits révolutionnaires qui fixaient de manière autoritaire le montant des loyers, avec des valeurs estimées en revenus capitalisés, qui étaient diminuées.
Voilà... (Chahut.) ...Mesdames et Messieurs, qui nous ramènera à une certaine modestie quant à notre rôle et nous permettra de constater que ce qui semblait vrai en 1793 le paraît encore deux siècles plus tard. Pour être plus sérieux, je vous demande aujourd'hui au nom du Conseil d'Etat de voter ce projet de loi parce qu'il est pragmatique, parce qu'il permet aujourd'hui à l'Hospice de dépasser une étape. J'aimerais en vous demandant de le faire, et ce sera ma conclusion, avoir pour vous, Madame la rapporteure de majorité, mais aussi pour vos deux collègues, une gratitude toute particulière. Vous avez dû rédiger avec talent un rapport conséquent qu'il importe, précisément pour les raisons que je viens de mentionner, de faire figurer dans les livres d'histoire, car il sera assurément lu dans deux siècles... Vous l'avez fait avec un talent d'autant plus remarquable que vous n'aviez assisté qu'à la moitié des séances de la commission des affaires sociales. Mesdames et Messieurs les députés, je vous invite à suivre la position du Conseil d'Etat et à voter ce projet, car il participe d'une meilleure gestion de l'Hospice général. (Applaudissements nourris.)
Le président. Monsieur le président, vous constatez que l'assemblée a plébiscité votre première opération de séduction dans cette salle, qui est parfaitement réussie, ce qui montre ce que nous savions déjà, dans l'assemblée que j'ai le privilège de présider: que l'art oratoire transcende largement la comptabilité horlogère. En ville de Genève, réussir à faire mieux que les horlogers, c'est très très bien !
Mis aux voix, le projet de loi 9575 est adopté en premier débat par 45 oui contre 30 non et 10 abstentions.
Deuxième débat
Mis aux voix, le titre et le préambule sont adoptés, de même que les articles 1 à 8.
Le président. Nous sommes saisis d'une proposition d'amendement de M. Alberto Velasco et de Mme Laurence Fehlmann Rielle, qui vise à modifier la lettre B de l'alinéa 1 en remplaçant «deux membres désignés par le Grand Conseil» par «un membre par parti représenté au Grand Conseil».
M. Alberto Velasco (S). Tout d'abord, j'aimerais rectifier un élément de l'intervention de M. le conseiller d'Etat: vous avez dit tout à l'heure que le groupe socialiste voulait le statu quo, ce n'est pas vrai puisque - et vous le savez très bien - notre groupe a fait d'autres amendements que celui-ci, notamment en ce qui concerne l'audit interne. C'est-à-dire que nous ne voulons pas le statu quo tel quel. Nous sommes conscients que des réformes de la gouvernance sont nécessaires...
Des voix. L'amendement !
M. Alberto Velasco. ...mais pas celle qui consiste à ne pas représenter les membres du Grand Conseil. Donc, l'amendement qui vous est présenté, Mesdames et Messieurs les députés, consiste à revenir à une représentation des intérêts présents dans ce Grand Conseil. Quant à l'argument qui a été énoncé par notre collègue Weiss et par le conseiller d'Etat aussi, qu'il est essentiel que le Conseil d'administration soit dépolitisé, je suis désolé, mais est-ce que vous prétendez, chers collègues, que le Conseil d'administration, par exemple, de Nestlé, est dépolitisé ? Moi, j'en doute beaucoup ! Je doute beaucoup que le Conseil d'administration de l'UBS ou du Crédit suisse soit dépolitisé ! Dans tous ces conseils, il y a un élément politique fondamental, il y a des représentations d'intérêts, d'intérêts financiers, d'intérêts politiques, oui, Mesdames et Messieurs ! Et on voudrait qu'au sein de l'Hospice il n'y ait pas de représentation d'intérêts, alors qu'au sein de ce Conseil il y a des intérêts différents. Monsieur le conseiller d'Etat, comment allez-vous faire pour choisir les représentants de ce Conseil d'administration ?
Une voix. On les tire au sort !
M. Alberto Velasco. Comment allez-vous faire pour qu'il soit dépolitisé, c'est-à-dire, qu'il ne fasse aucune politique et qu'il n'ait aucun «teint» politique. On peut être un excellent administrateur, un excellent financier, un excellent gestionnaire et avoir des idées politiques. Nous maintenons notre amendement et nous vous recommandons, Mesdames et Messieurs, de suivre notre proposition. (Applaudissements.)
Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 46 non contre 33 oui et 5 abstentions.
Mis aux voix, l'article 9 est adopté, de même que les articles 10 à 36 (souligné).
Troisième débat
La loi 9575 est adoptée article par article en troisième débat.
Mise aux voix, la loi 9575 est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 46 oui contre 33 non et 5 abstentions.
Le président. Nous reprendrons nos travaux à 20h30.
La séance est levée à 19h.