République et canton de Genève
Grand Conseil
Séance du vendredi 27 janvier 2006 à 17h
56e législature - 1re année - 4e session - 18e séance
PL 9655-A
Premier débat
Le président. Nous avons déjà traité tout à l'heure la dizaine de projets de cette commission, à l'exception de celui-ci qui comporte un rapport de minorité. Monsieur le rapporteur de majorité, je vous donne la parole.
M. Guillaume Barazzone (PDC), rapporteur de majorité. Merci, Monsieur le président. La vente couverte par le projet de loi 9655 concerne un immeuble mixte, sis 7, rue de Montchoisy, de quatre étages plus combles sur rez, construit en 1900 et rénové en 1967, sur une parcelle d'environ 300 m2. Vingt-quatre appartements totalisant cinquante-six pièces sont réparties dans cet immeuble. Je précise qu'un restaurant, un magasin et deux arcades sont situés au rez-de-chaussée.
Il convient de préciser aussi que l'état du bâtiment est assez précaire extérieurement et nécessite une intervention lourde, une réfection de l'enveloppe.
Le prix de vente s'est élevé à 4,260 millions et la perte estimée s'élève à 4,943 millions, soit une perte de plus de 53%, ce qui est assez élevé.
Les représentants de la Fondation de valorisation ont confirmé que cet objet avait, selon la procédure ordinaire, été signalé à l'Etat et aux fondations immobilières - qui n'ont pas souhaité acquérir l'objet...
Cette proposition de vente a été acceptée par sept oui, un non - Vert - et une abstention du Mouvement citoyens genevois.
Forte de ce constat, la majorité de la commission vous recommande, Mesdames et Messieurs, d'accepter ce projet de loi ainsi amendé.
J'aimerais encore faire une remarque sur votre rapport de minorité, Madame Künzler. Vous écrivez à la deuxième page, je cite: «Mais, surtout, les citoyens verront avec amertume que, comme ailleurs, on socialise les pertes et on privatise les bénéfices.» Je ne peux vraiment pas vous laisser dire une chose pareille, même si je respecte votre proposition de loi, qui est actuellement à l'étude dans une autre commission, et qui concerne précisément l'acquisition par l'Etat d'éventuels biens immobiliers que vendrait la fondation !
Il faut rappeler que la loi, comme à l'accoutumée, nous impose et impose à la fondation de valoriser un maximum de biens et de les vendre au plus haut prix. Je ne peux donc pas vous laisser dire que nous «socialiserions les pertes» ! Lorsqu'on vend un bien au maximum du prix possible, le contribuable y gagne, puisque, ce faisant, on diminue les pertes ! Je le répète, je ne peux pas vous laisser dire une chose pareille !
Je vous laisserai développer votre position, comme d'habitude. (Exclamations et rire de Mme Künzler.)
Mme Michèle Künzler (Ve), rapporteuse de minorité. Je remercie le rapporteur de majorité de me laisser la parole...
Il me semble important de réagir. Il s'agit peut-être du dernier rapport, puisque le projet de loi concernant les rachats des immeubles de la Fondation de valorisation est actuellement en suspens. Un frémissement se fait sentir du côté du Conseil d'Etat, on constate que les choses bougent... Au fond, je reste quand même persuadée que ces immeubles seraient vraiment utiles pour le logement social pérenne.
Si j'ai écrit dans mon rapport: «on socialise les pertes et on privatise les bénéfices», c'est parce que, en fin de compte, l'acquéreur de cet immeuble aura un objet tout à fait rentable: avec plus de 5,5% net, ce qui est déjà un bon rapport. Et c'est le rendement d'un immeuble qui est important pour l'acquéreur !
En ce qui nous concerne, nous n'avons jamais remis en cause les fondements de la Fondation de valorisation, nous estimons qu'il faut vendre au mieux.
Nous avons en effet déposé un projet de loi pour combler la différence entre le prix du marché et le prix que cela coûtera pour en faire du logement social et nous considérons que ces immeubles, situés en ville, non connotés socialement, sont idéaux pour faire du logement social pérenne. Il faut absolument que les fondations immobilières de droit public puissent les racheter ! Ces immeubles, dont le loyer est tout à fait correct, pourraient avantageusement remplacer certains immeubles HLM dont la construction est très chère et qui sont situés dans des cités à l'extérieur de la ville. C'est pourquoi notre vision de la politique du logement social doit être élargie dans ce sens.
Comme nous l'avons déjà évoqué, nous aimerions bien régler définitivement et en une seule fois le sort de tous ces objets pour éviter d'avoir à chaque fois la même discussion. J'ai l'impression que le débat a avancé, que le nouveau Conseil d'Etat a compris le message et qu'il s'agit peut-être du dernier rapport de minorité... (Exclamations.) Peut-être !
M. Alberto Velasco (S). Je suis étonné qu'un objet de ce type soit traité en plénière... En effet, pas plus tard qu'il y a une semaine ou deux, nous étions à l'assemblée générale des fondations immobilières avec, justement, le chef du département du département des constructions et technologies de l'information, l'ancien DAEL, et le président du Conseil d'Etat. A cette occasion, M. Unger a déclaré très officiellement qu'il fallait faire du logement social au centre-ville, sans construire, en achetant des immeubles déjà existants. J'ai été évidemment tout à fait surpris et intéressé...
Je suis intervenu ensuite pour dire que nous étions tout à fait d'accord avec lui, qu'un projet de loi allant dans ce sens avait été déposé par les Verts, avait été examiné en commission, qu'il se trouvait précisément à l'ordre du jour du Grand Conseil, et qu'il suffirait donc de voter le crédit de 20 millions pour que la fondation puisse acquérir les immeubles en question à moindre coût. J'ai ajouté que cette opération permettrait de réaliser un millier de logements sociaux et que c'était très intéressant par rapport à la somme à débourser.
Ensuite, le président du département - CTI - est intervenu dans ce sens, en disant que ces projets de lois pourraient être intégrés à celui actuellement en discussion dans le cadre du nouveau projet de logement social pérenne, et qu'à ce titre nous pourrions effectivement accepter de suspendre leur traitement. Je lui ai donc fait savoir que le groupe socialiste souhaitait tout de même avoir la garantie que des objets immobiliers de la fondation ne soient plus vendus. En effet, si des objets qui peuvent servir à du logement social pérenne continuent à être vendus, il n'y en aura plus à acheter lorsque le projet en question sera traité en plénière...
Et, aujourd'hui, Mesdames et Messieurs les députés, on nous propose à nouveau de vendre un immeuble ! J'espère, Monsieur le conseiller d'Etat Muller, que vous allez nous faire une déclaration à ce sujet, parce que, pour nous, c'est très important. (Commentaires.) Ou M. Hiler, en l'occurrence !
En principe, nous adhérons au fait d'intégrer tous ces travaux dans le cadre plus général du logement social pérenne, mais nous voudrions tout de même avoir l'assurance que les ventes de ces objets vont être freinées. Sinon, il vaudrait mieux demander que ces projets soient mis à l'ordre du jour pour être débattus rapidement.
Mesdames et Messieurs les députés, je vous propose de ne pas voter ce projet de loi et de vous rallier au rapport de minorité, parce qu'il est justement très important d'aller dans le sens des propositions du Conseil d'Etat.
M. David Hiler, conseiller d'Etat. Je confirme à Mme Michèle Künzler que le Conseil d'Etat frémit... C'est exact !
Je confirme également à M. Velasco que la problématique du logement social, du point de vue de sa pérennité et de son emplacement, est en train de faire l'objet de décisions politiques.
Il n'empêche que c'est ce parlement qui, en dernière analyse, décidera, puisqu'il nous faut, dans tous les cas d'espèce une base législative pour agir, qu'il s'agisse du projet de loi déposé pour combler le déficit entre les exigences du logement social et le prix de rachat de cet objet - qui est en effet ajourné - ou qu'il s'agisse encore d'une acquisition d'un périmètre conséquent d'immeubles se prêtant au logement social à l'intérieur de l'agglomération déjà construite. Cela exige - et nous sommes pleinement d'accord au Conseil d'Etat sur ce point - une vue d'ensemble. Il faut mener une politique d'acquisition et une politique dans les zones de développement. Et ces deux politiques doivent se modifier simultanément.
La deuxième étape, si cette décision est prise, consiste à définir un périmètre. Ce périmètre existe - il a été défini et présenté en commission - et une liste a été établie. Or, cet immeuble ne figure pas sur cette liste. C'est la raison pour laquelle il n'y a aucun motif particulier, étant donné l'abondance de ce type de biens - car il y a d'autres périmètres, qui ne figurent pas sur cette liste, qui représentent beaucoup d'immeubles - que le Conseil d'Etat stoppe ces ventes toutes affaires cessantes.
Quoi qu'il en soit, le Conseil d'Etat veut en effet que ce périmètre soit tracé rapidement - mais pas de façon improvisée - et prendre des mesures sur le plan financier pour déterminer quels seront les acteurs qui procéderont aux acquisitions - l'Etat lui-même, la Fondation pour l'habitat coopératif et bon marché, les fondations immobilières HBM, d'autres collectivités publiques ? Ce processus doit être suivi avec ordre et méthode si nous voulons arriver à augmenter le volume de logements construits et à constituer rapidement le socle de logements pérennes. Sinon, nous n'obtiendrions que des résultats ponctuels et symboliques.
C'est pour cette raison que le Conseil d'Etat - même s'il garde tout à fait à l'esprit qu'il est nécessaire et urgent de fixer la politique en la matière sur de nouvelles bases et dans un esprit de consensus - ne vous prie pas aujourd'hui d'interrompre le cours normal des choses concernant cet objet particulier.
Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, je vous soumets maintenant la prise en considération de ce projet de loi.
Mis aux voix, le projet de loi 9655 est adopté en premier débat par 52 oui contre 29 non et 2 abstentions.
Deuxième débat
Mis aux voix, le titre et le préambule sont adoptés, de même que les articles 1 à 3.
Le président. Le troisième débat est-il demandé ? (M. Roger Deneys répond affirmativement.) Il l'est ! M. Deneys n'étant pas encore conseiller d'Etat, vous me permettrez d'écouter d'abord M. Hiler. (Rires.)
Troisième débat
La loi 9655 est adoptée article par article en troisième débat.
Mise aux voix, la loi 9655 est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 54 oui contre 29 non et 3 abstentions.
Le président. Je salue la présence à la tribune de trois de nos anciens collègues: Mme Salika Wenger, M. Chaïm Nissim et M. Pierre Vanek. (Applaudissements.)
Nous passons au point 154 de notre ordre du jour, qui est un point fixe.