République et canton de Genève
Grand Conseil
Séance du vendredi 4 novembre 2005 à 20h30
56e législature - 1re année - 1re session - 3e séance
PL 9441-A
Suite du premier débat
Le président. Je vous rappelle que la liste est close, de sorte que les personnes qui s'inscrivent maintenant ne peuvent plus prendre la parole avant le vote d'entrée en matière. Monsieur Roger Deneys, je vous donne la parole.
M. Roger Deneys (S). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, mon collègue Alain Charbonnier vous a exposé, juste avant la pause, l'essentiel des motivations socialistes pour soutenir ce projet de loi et, également, nos petites - voire importantes - remarques concernant les dispositifs qui manquent dans ce projet de loi.
Pour mémoire et pour répondre à M. Kunz, notamment lorsqu'il préconise de subventionner le tourisme, je dirai que, si ce projet de loi modifiant la taxe sur le tourisme a vu le jour, c'est parce que les milieux concernés, les hôtels et les milieux économiques de la Rade, n'ont pas été capables de s'organiser entre eux pour assurer la promotion touristique de Genève. La Fondation pour le tourisme a donc été mise sur pied à la demande des milieux économiques pour, en quelque sorte, assurer un certain principe d'égalité entre tous les acteurs concernés, que ce soient les hôtels, les fournisseurs ou les autres milieux qui profitent de la manne touristique. (Brouhaha.) Dans ce sens, il est très clair pour les socialistes...
Le président. Excusez-moi, Monsieur Deneys ! Mesdames et Messieurs les députés, c'est M. Deneys, seul, qui a la parole !
M. Roger Deneys. Merci, Monsieur le président ! Il est très clair pour les socialistes que l'équité de ces taxes doit être avérée et que tous les acteurs concernés par le tourisme à Genève doivent contribuer à la promotion touristique genevoise: les hôtels de la Rade, principalement et directement, mais, également, les fournisseurs des commerces, puisque les commerces situés dans la zone de la Rade doivent aussi y contribuer. Il n'y a en effet aucune raison pour que ces fournisseurs ne soient pas soumis à cette taxe. Dans ce sens, le groupe socialiste souhaite maintenir ce qui s'appelle la «taxe fournisseurs», même si, sur le fond - c'est vrai - la cohérence fait défaut actuellement dans ce domaine. En effet, quatre taxes différentes pour la seule promotion touristique, ce n'est franchement ni simple ni pratique ! En tant que patron d'entreprise, je suis évidemment très sensible à ce genre de problèmes, dans la mesure où cela engendre des tracas administratifs inutiles. Néanmoins, il n'y a pas de raison qu'un fournisseur situé au Petit-Lancy ou à Plan-les-Ouates ne contribue pas à la manne destinée à Genève Tourisme, alors qu'un petit commerce situé aux Pâquis y contribue. A cet égard, le principe d'équité n'est pas obtenu avec le projet de loi actuel - en tout cas pas complètement. C'est presque anecdotique, parce qu'il s'agit de montants relativement modestes, mais cela nous dérange sur le principe.
Par contre, ce qui nous gêne beaucoup plus, c'est que Genève Tourisme, en tant qu'association subventionnée qui touche quand même 11 millions au total, via la fondation - je dis bien 11 millions: ce n'est pas ce qui est écrit dans le rapport, mais il s'agit bien de 11 millions ! - ne soit pas soumise au contrôle de l'Inspection cantonale des finances. Et cela nous semble extrêmement problématique. N'importe quelle association subventionnée dans la République et canton de Genève est tenue de mettre ses comptes à la disposition de l'ICF, et il n'y a pas de raison particulière que Genève Tourisme y échappe ! Certes, un artifice légal le lui permet, car c'est la fondation qui récolte l'argent et qui le reverse à Genève Tourisme... Et le département répond invariablement que la fondation, elle, est soumise au contrôle de l'ICF... Je suis désolé, mais la fondation lui sert de société écran ! Or, fondamentalement, ce qui nous intéresse, c'est de savoir comment est utilisé cet argent au niveau de Genève Tourisme.
En ce qui me concerne, j'ai également des doutes sur l'exactitude des chiffres avancés dans ce projet de loi... Ils ne me semblent pas tout à fait exacts, dans la mesure où Genève Tourisme touche, en plus, une somme de plusieurs centaines de milliers de francs de la part de la Loterie romande pour l'organisation des fêtes de Genève. Alors, certes, on peut dire que c'est la Loterie romande qui finance ces fêtes, mais cela prouve bien que Genève Tourisme touche des fonds en dehors de la fondation. Et puis, les montants totaux des taxes actuellement prélevées auprès des acteurs économiques ne suffisent pas à couvrir les dépenses en matière de tourisme, puisqu'un complément est versé par la Loterie romande. D'une certaine manière, ce n'est pas tout à fait normal. Il vaudrait mieux que les acteurs économiques reçoivent 12 millions par an, et non pas 11 millions, et qu'ils s'organisent entre eux et se répartissent les fonds. Ce n'est pas à l'Etat de les subventionner directement !
Dans ce sens, les socialistes soutiennent ce projet de loi parce qu'il représente tout de même des avancées importantes, notamment en matière de simplification, et, aussi, comme l'a dit mon collègue Charbonnier, parce qu'il introduit le principe de la carte Unireso qui sera mise à disposition des touristes dans les hôtels genevois, comme cela existe, par exemple, à Bâle, et qui, semble-t-il, a beaucoup de succès. Cela permettra à Genève de rattraper un tant soit peu son retard en matière d'accueil touristique de proximité. On ne peut que s'en réjouir.
Les socialistes vous invitent donc à voter l'amendement demandant que Genève Tourisme soit soumis au contrôle de l'Inspection cantonale des finances, parce que c'est une condition importante pour garantir la transparence des dépenses de cet organisme.
M. Christian Bavarel (Ve). Les Verts soutiendront cette loi, car nous trouvons qu'elle va effectivement dans le bon sens.
Lors des auditions, nous avons constaté que Genève Tourisme ressemblait un peu à une usine à gaz: les choses n'étaient pas très claires... Certains modes de perception étaient un peu compliqués et se trouvent simplifiés par ce projet de loi, ce que nous trouvons positif, mais nous souhaitons encore plus de simplifications à terme. Comme M. Deneys vient de le dire, la Fondation du tourisme joue un rôle qu'on nous a expliqué, et nous avons compris les raisons pour lesquelles aujourd'hui on ne peut pas faire sans. Mais il est vrai qu'on a toujours l'impression qu'il y a une structure de trop avec la Fondation du tourisme et Genève Tourisme. Je le répète, nous avons bien entendu les arguments du département à cet égard.
Nous nous réjouissons bien évidemment de la création de la carte Unireso. C'est une mesure qui va vraiment dans le bon sens, car elle permettra aux personnes qui veulent se rendre à Genève de partir du principe qu'elles pourront se passer de leur voiture. Genève doit pouvoir accueillir les touristes sans que cela génère davantage de circulation: il y a déjà suffisamment de bouchons comme cela ! Sachant qu'ils pourront traverser le lac en prenant la Mouette et éviter de prendre une voiture et de se retrouver coincés dans un bouchon du Pont du Mont-Blanc, les gens seront plus enclins à venir à Genève.
Voilà des mesures que nous sommes heureux de voir mises en place, et nous vous invitons donc à voter ce projet de loi.
M. Gilbert Catelain (UDC). Le projet de loi qui nous est proposé ce soir, et pour lequel le Conseil d'Etat a demandé l'urgence à la dernière plénière, est une sorte de bilan de législature pour le conseiller d'Etat sortant du PDC. De ce point de vue, je pense que l'on ne peut être que déçu.
En fait, il faudrait se demander à quoi servira cette modification de loi... Améliorera-t-elle l'efficacité de l'Office du tourisme à Genève ? La réponse est certainement non. Donnera-t-elle satisfaction aux acteurs du tourisme à Genève ? Globalement, la réponse est non ! Ce projet de loi permettra-t-il d'accroître la fréquentation touristique à Genève ? Nous n'avons aucune garantie que ce soit le cas. La réponse est probablement non ! Cette modification de loi permettra-t-elle d'augmenter la perception de taxes ? Oui, et c'est certainement pour cela que la gauche votera ce projet !
Une voix. Eh oui !
M. Gilbert Catelain. Ce projet de loi est-il directement lié à un contrat de prestation qui vous permettrait d'affecter un montant correspondant des taxes pour assumer cette prestation ? La réponse est non, nous n'avons pas de contrat sous les yeux ! Et, enfin, ce projet de loi est-il favorable ou non à l'emploi ? Malheureusement, la réponse est clairement non !
Je reviens sur le contrat de prestation. Dans les faits - si vous lisez le rapport - la fréquentation touristique à Genève a crû de 10% entre 1994 et 2003. Par contre, ce que ne vous dit pas le rapporteur de majorité, c'est qu'entre 1967 et 2003 la fréquentation touristique dans ce canton n'a que faiblement progressé - et uniquement en valeur absolue, pas en valeur relative !
Je m'explique. En 1967, 1,9 million de touristes sont venus à Genève; 1,9 million de nuitées. Vingt-huit ans plus tard, la fréquentation n'a augmenté que de 300 000 nuitées...
J'en viens à l'argent investi dans l'Office du tourisme, pour mesurer l'efficacité. En 1967, en francs constants, nous avons consacré 1 F par touriste et, en 2003, 4,5 F ! L'Office du tourisme a grossi, a voulu devenir, comme la grenouille, plus grosse que le boeuf - un peu à l'image de l'Etat de Genève qui grossit et qui grossit, mais dont on voit mal l'efficacité des prestations... Et l'on ne peut effectivement que mettre en doute l'efficacité en termes purement financiers !
Les chiffres cités dans ce rapport ne tiennent pas compte, s'agissant de l'argent qui est investi dans cet organisme, des actions de promotion particulières. Je veux parler des hôteliers qui sont sollicités, en plus de leur participation par rapport aux nuitées, pour financer, par exemple, des plaquettes, des catalogues référençant les hôteliers, etc. Les sommes que cela représente ne sont pas prises en considération dans les chiffres qui nous sont fournis.
Au niveau de la perception, le projet de loi qui nous est soumis est de nouveau fondé sur le principe de la vache à lait, à savoir que le touriste à Genève doit participer financièrement aux activités de l'Office du tourisme, alors qu'il apporte une valeur ajoutée au canton. La perception reste trop compliquée, elle n'est pas plus équitable qu'auparavant, et, de plus, elle pénalise l'emploi, puisqu'une des taxes est fonction du nombre d'employés dans les établissements.
Au niveau du fonctionnement, certains trouvent que le projet de loi représente une amélioration, mais nos contacts nous amènent à penser que, globalement, c'est plutôt l'inverse. En tout cas, de nombreux hôteliers ont manifesté, hors commission, leur mécontentement par rapport à ce projet de loi. J'ai fait un test ce soir, je me suis rendu dans l'établissement où va souvent dîner le parti démocrate-chrétien... (Exclamations.) ... qui se trouve à quelques dizaines de mètres d'ici. Il s'agit d'un magnifique hôtel avec un certain nombre d'étoiles... Eh bien, je peux vous dire que le patron de cet établissement n'était même pas au courant de la modification légale qui nous est proposée ce soir et il n'y est pas favorable du tout. Car, finalement, ce projet de loi ne prévoit qu'une seule chose: davantage de perception !
Et puis, certains hôteliers se montrent assez virulents vis-à-vis du fonctionnement de l'Office du tourisme, au niveau des horaires, par exemple: le lundi matin il n'y a personne, et le vendredi après-midi il n'y a personne non plus !
Le président. Monsieur le député, il vous reste une minute pour conclure !
M. Gilbert Catelain. Pas de problème, j'ai bientôt terminé ! Ils mettent également en cause le manque de dynamisme et le peu d'initiatives que prend l'Office du tourisme dans la gestion des foires à l'étranger où, généralement, les hôteliers sont les premiers sur place.
En conclusion, le groupe UDC souhaiterait, par rapport à cette modification de loi, ne pas augmenter les recettes de l'Office du tourisme sans contrat de prestation correspondant. Avec quelques députés, nous nous sommes rendus dans un pays d'Asie où l'office du tourisme local avait un objectif très clair: doubler la fréquentation touristique en cinq ans. Nous devrions profiter de cette modification de loi pour refondre l'Office du tourisme...
Le président. Il vous faut conclure, Monsieur le député !
M. Gilbert Catelain. ... qui est actuellement dirigé par une fondation qui est certainement très politisée, puisque de nombreux anciens politiciens y siègent. En résumé, le fonctionnement de cet organisme se caractérise par un aspect fonctionnariat, peu compatible avec l'économie privée que représente l'économie touristique.
Nous demandons donc le renvoi de ce projet de loi en commission.
Le président. Il est pris note de la demande de renvoi en commission. De toute façon, la liste étant close, n'interviendront maintenant que ceux qui étaient prévus. Monsieur Christian Brunier, vous avez la parole.
M. Christian Brunier (S). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, je ne reviendrai pas sur la position du parti socialiste quant à ce projet de loi, je voudrais juste intervenir sur deux points.
Premier point: certains députés ont prétendu que ce projet de loi était en fait la synthèse de trois projets de lois: un présenté par le parti radical, un présenté par le Conseil d'Etat, et le troisième présenté par le parti socialiste. Ils ont expliqué que la commission avait réussi à faire une synthèse de ces trois projets... Nous ne le pensons pas ! Certes, certains aspects de ce projet représentent un consensus de ces trois projets, mais certaines mesures préconisées dans le projet de loi du parti socialiste, n'ont pas été reprises dans ce projet.
J'en prendrai deux ou trois au hasard. Première chose: la transparence s'agissant de la délimitation des zones de taxation au niveau du tourisme. Vous le savez, certaines zones sont plus taxées que d'autres et certaines sont complètement exonérées... Ce découpage paraît mystérieux ! Par exemple, autour de la Rade, tous les commerces du quartier sont taxés d'un côté du lac, et, de l'autre, seuls les commerces qui se trouvent sur les quais sont taxés... Pourquoi cette différence ?
Autre chose bizarre: la taxe maximum s'applique sur toute la zone de l'aéroport - ce qui est normal, puisque c'est un secteur favorisé par le tourisme - mais la zone s'arrête juste au pied d'un hôtel qui accueille beaucoup de touristes. On peut se demander pourquoi la zone s'arrête juste à cet endroit... Il y a quand même des mystères !
Notre projet proposait un peu plus de transparence à différents niveaux, notamment que les modifications de zones soient publiées dans la «Feuille d'avis officielle» - sinon elles passent bien inaperçues - avec des possibilités de recours pour les milieux touristiques.
Deuxième chose: la transparence par rapport aux activités taxées. Certaines activités professionnelles sont plus taxées que d'autres. Il est assez légitime, sur le principe, que certaines professions qui bénéficient plus du tourisme soient davantage taxées que d'autres, mais il y a, sur ce point également, des mystères... Des professions qui étaient fortement taxées auparavant ne le sont quasiment plus; des corps de métier qui étaient complètement exonérés se trouvent tout à coup très taxés... Et on comprend mal sur quels critères ces modifications interviennent. A ce niveau également, le projet de loi socialiste préconisait beaucoup plus de transparence sur la taxation ou non de telle ou telle profession.
Troisième chose - pour une fois, nous étions d'accord, M. Kunz et moi: le projet de loi socialiste exonérait complètement les petits commerces. Certes, la taxe pour les petits commerces représente une somme qui peut sembler dérisoire à certains - 1000 à 2000 F - mais qui est énorme pour le patron d'un petit commerce, ou en tout cas suffisante pour plomber sa comptabilité en fin d'année. Nous pensons que ces commerces, même s'ils bénéficient du tourisme, doivent être complètement exonérés.
Nous ne demandons pas, comme M. Kunz, que tous les citoyens passent à la caisse à travers l'impôt, mais, étant donné que la taxe est plafonnée pour les entreprises qui gagnent, elles, beaucoup d'argent, nous voulions remonter le plafond. Cela permettrait de demander un peu plus de solidarité aux entreprises qui ont de gros revenus et d'exonérer les plus petits commerces. Cette suggestion est tombée à l'eau, puisque non reprise dans ce projet de loi, en tout cas pas suffisamment, et nous pensons qu'il faut revenir sur ces aspects.
Deuxième point. M. Kunz nous a dit que personne ne remettait en cause la politique du tourisme menée à Genève... Nous la remettons en cause ! Comme cela a d'ailleurs été le cas d'autres partis. Nous ne sommes pas sûrs qu'il faille régler tous les problèmes du tourisme par le biais de ce projet de loi, et son renvoi en commission est certainement peu souhaitable. Néanmoins, nous devons, en tant qu'autorités politiques, nous poser des questions par rapport à la politique du tourisme qui est menée à Genève; elle est relativement peu dynamique ! Les personnes qui sont venues à Genève il y a dix ans et qui reviennent maintenant voient peu de changement: la dynamique est faible dans ce secteur de l'économie; la politique touristique est basée essentiellement sur le tourisme de prestige. Certes, nous en avons besoin, mais nous devons aussi nous occuper des autres formes de tourisme. Je vous signale - et je crois que nous sommes l'une des seules régions du monde à travailler comme cela - qu'il n'y a aujourd'hui aucun représentant culturel au niveau de la politique du tourisme ! Dans toutes les autres villes, la culture est un facteur de dynamisme au niveau de la politique du tourisme, et on ne comprend pas que cela se résume chez nous à une sorte de conseil... D'ailleurs, il faudrait aussi revoir les principes de nomination de ce conseil, parce qu'il manque singulièrement de transparence ! Il est vrai qu'on a l'impression de retrouver un club de notables de certains milieux politiques et d'hôteliers, alors que bien des acteurs et des actrices de la politique touristique ne sont pas représentés. Il faut modifier cela au plus vite !
Mme Anne-Marie Arx-Vernon von (PDC), rapporteuse de majorité. J'aimerais reprendre quelques éléments évoqués par un député de l'UDC, qui sont, à mes yeux, une preuve de plus de sa mauvaise foi... (Protestations.)
Dans le cadre de la démonstration selon laquelle, dans les années 60, Genève investissait 1 F par touriste, il faut se demander combien ce touriste dépensait... Et quand on indique qu'en 2000 Genève a investi 4 F par touriste, il faut aussi se poser la même question pour pouvoir faire une comparaison. Il me semble qu'il dépense plus que dans les années 60. Il est donc important, quand on avance des chiffres, de les placer dans leur contexte et d'aller jusqu'au bout du raisonnement !
Il est également facile de parler du mécontentement de «certains» hôteliers... Il m'est tout aussi facile de parler de la satisfaction de «certains» hôteliers à l'idée de voir les procédures allégées et combien ils appelaient cela de leurs voeux. Alors, arrêtons avec les «certains»: nous pourrions passer la nuit à nous renvoyer des arguments de ce type !
Il a été question d'un éventuel renvoi en commission de ce projet de loi: c'est un non sens ! L'UDC aurait dû être attentive au rapport de leur commissaire UDC, qui a voté cette loi sans problème. C'est dommage qu'il n'ait pas pu restituer à son groupe les travaux auxquels il a participé !
S'agissant des amendements socialistes...
Le président. Si vous le voulez bien, Madame, nous reviendrons sur les amendements en deuxième débat - si cela ne vous fait rien !
Mme Anne-Marie von Arx-Vernon. Avec plaisir, Monsieur le président. Vous me redonnerez donc la parole ?
Le président. Oui, bien sûr !
Mme Anne-Marie von Arx-Vernon. Il va de soi que c'est un non-sens de renvoyer ce projet de loi en commission !
Le président. Je donne à présent la parole à M. le conseiller d'Etat Carlo Lamprecht.
M. Carlo Lamprecht, conseiller d'Etat. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés... (Brouhaha.)
Le président. Mesdames et Messieurs, puis-je vous prier de garder le silence et d'écouter les orateurs ? Ceux qui n'ont pas l'intention de les écouter peuvent facilement s'éloigner de cette salle pour se concerter entre eux ! Monsieur le conseiller d'Etat, la parole est à vous !
M. Carlo Lamprecht. Merci, Monsieur le président ! Il est facile, Mesdames et Messieurs les députés, après six mois de travaux en commission et alors que la plupart des personnes qui interviennent ce soir n'étaient pas présentes, de faire le procès de Genève Tourisme, de faire le procès des hôteliers, de faire le procès du département, bref, de tout remettre en cause ! Pourtant, pendant ces six mois, tous les membres de la commission ont eu l'occasion de s'exprimer, de faire des propositions, de procéder à des auditions, d'entendre les arguments des uns et des autres. Si ce parlement continue à travailler comme cela, je crains - comme le disait hier soir, M. le président du Grand Conseil - que nous ne soyons, une fois de plus, pas bien partis !
Je rappellerai tout simplement que cette loi sur le tourisme avait été mise en place il y a plus de douze ans par M. Jean-Philippe Maitre, mon prédécesseur, qui avait réussi à fédérer toutes les personnes qui bénéficiaient du tourisme d'une manière générale: les hôteliers - pour commencer, les commerçants - les transports privés, etc., ce qui représente, Monsieur Catelain, énormément d'emplois. Le tourisme est un des secteurs de l'économie le plus générateur d'emplois et de fiscalité. Ce projet, je le répète, a demandé six mois de travail en commission pour être mis sur pied.
Qu'a permis la loi instaurée il y a douze ans ? Elle a permis à Genève Tourisme - qui est une association de droit privé, c'est vrai - de se doter des moyens de promouvoir Genève dans le monde. Et aujourd'hui, vous le savez, les villes se font une concurrence très forte pour essayer d'attirer les touristes.
Vous le savez également, le tourisme à Genève est surtout un tourisme d'affaires, de congrès: ce n'est pas un tourisme de villégiature. C'est une particularité de Genève, et il faut donc, si l'on veut promouvoir notre ville, être présent là où se décident les congrès et les différentes réunions internationales qui peuvent y avoir lieu. Et cette loi avait justement permis à Genève Tourisme d'avoir les moyens d'agir.
On peut toujours comparer les résultats, bien entendu ! Une année est meilleure que l'autre... Vous savez, le nombre des nuitées n'est jamais identique... Le tourisme subit les crises de l'aviation civile, les conséquences indirectes des maladies qui sévissent dans des pays étrangers. Les résultats du tourisme ne sont pas forcément liés à la qualité de la promotion. C'est un secteur qui est tributaire des circonstances, de la conjoncture, des événements partout dans le monde.
Le département n'a pas voulu modifier cette loi, Mesdames et Messieurs les députés: ce projet de loi est le résultat de deux projets de lois issus de vos bancs ! L'un proposait tout simplement d'abroger les taxes pour le tourisme en préconisant que l'Etat prenne la promotion du tourisme en charge - ce serait vraiment le bon moment... L'autre demandait, entre autres, d'exonérer les petits commerçants de cette taxe...
De nombreuses propositions ont été faites, et il a fallu trouver un moyen qui tienne compte des critiques des uns et des autres, pour faire en sorte - c'était l'objectif - que Genève Tourisme continue à avoir les moyens de poursuivre son action - qui est importante pour la promotion de Genève - en essayant de tenir compte des desirata des uns et des autres.
Mais, par rapport aux petits commerçants qui paieraient trop, je vais vous dire très franchement ceci: en tant que président de la fondation - et je reviendrai sur la fondation - je n'ai reçu, en huit ans, qu'une ou deux lettres de commerçants qui se plaignaient de payer trop de taxes ! Ce sont les députés qui s'en plaignent, mais pas les premiers intéressés ! Il faut donc relativiser ce problème: même si tout un chacun connaît ici ou là un ami qui se plaint, il ne faut pas penser que c'est général. En tout cas, je le répète, je n'ai pas reçu de réclamation à ce sujet...
Toutefois, le département a bien été obligé de prendre les choses en main, dans la mesure où les propositions partaient dans tous les sens. Ce projet de loi va permettre à Genève Tourisme de bénéficier des moyens financiers adéquats pour accomplir sa tâche dans la durée.
Le projet de loi du Conseil d'Etat ainsi que les amendements votés en commission reflètent, à mon sens, un compromis raisonnable. Il est en effet difficile de faire un costume sur mesure à chacun ! Notre idée - puisque vous parlez des zones plus ou moins concernées par le tourisme - c'était bien de profiter de l'examen de cette loi pour essayer, bien sûr, de faire payer davantage - car la structure des zones, vous l'avez dit, a beaucoup changé, des hôtels qui n'existaient pas il y a douze ans existent aujourd'hui - tout en faisant en sorte que tout un chacun soit taxé raisonnablement. Et c'est ce que nous avons fait, tout en simplifiant les procédures ! Nous sommes partis du principe qu'il fallait examiner la pertinence des taxes pour le tourisme, perçues auprès de l'ensemble des secteurs économiques directement concernés, et s'il fallait les appliquer à d'autres. Je le répète, la perception a été améliorée, puisque les procédures ont été simplifiées. Du reste, M. le député Gros l'a relevé... Oui, Monsieur Charbonnier, vous pouvez rigoler: c'est sympa, moi je veux bien ! (Rires.) Donc, certains secteurs économiques paient davantage, ce sont les hôteliers, puisque ce sont eux qui bénéficient le plus du tourisme. Dans d'autres secteurs, les taxes ont été allégées: je veux parler des PME et des artisans. Nous avons tenu compte de certains critères, pour répondre, précisément, à certaines préoccupations du projet de loi 8835 qui visait à exonérer de la taxe additionnelle pour le tourisme les entreprises de moins de quatre personnes. Mais, comme je l'ai dit en commission: certaines entreprises de gestion de fortune gagnent beaucoup d'argent, alors qu'elles ne comptent que trois personnes. Ce n'est pas le nombre d'employés qui compte, c'est le bénéfice généré par l'entreprise ! Nous avons tenu compte de ce paramètre. Mais ce n'est pas facile, Mesdames et Messieurs ! Si vous avez mieux à proposer, recommencez tout le travail qui a été fait en commission ! (Protestations.)
Aujourd'hui, un projet de loi vous est soumis: il a été discuté en commission et examiné à fond. Alors, je vous demande, étant donné tout le travail qui a été effectué par les uns et les autres, de le voter pour accorder à Genève Tourisme les moyens d'agir, pour que nous soyons compétitifs sur le plan international !
J'en viens à la fondation. Des versions différentes ont été données. Certains demandent à quoi elle sert... Eh bien, elle sert précisément à demander des comptes à Genève Tourisme suite aux crédits que nous lui allouons, et un programme pour voter le budget ! Des chiffres ont été articulés... Genève Tourisme perçoit 8,9 millions environ, par le biais des taxes, et 900 000 F de l'Etat - ce qui est déjà pas mal par rapport aux difficultés financières que nous connaissons. L'Etat ne peut pas donner 5 millions !
Nous avons essayé, en élaborant ce projet de loi, de laisser tout ce qui était utile et de tenir compte, en partie - il n'est en effet pas possible de tenir compte de tout dans la mesure où certains propositions étaient tout à fait contradictoires - des suggestions qui avaient été faites. Vous pouvez recevoir encore une fois Genève Tourisme - je l'ai proposé - demander des comptes à son directeur et à son président, exiger davantage: c'est encore possible ! Mais, tout de même, ils étaient présents en commission, ils sont venus nous expliquer leur travail ! Vous êtes au courant de tout !
Je vous demande donc avec vigueur, Mesdames et Messieurs, dans l'intérêt de Genève, d'avoir le courage de voter cette loi ce soir !
Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs, nous sommes saisis d'une proposition de renvoi en commission de ce projet de loi que je vais vous soumettre. Si cette proposition n'est pas adoptée, nous passerons à la procédure de vote d'entrée en matière.
Mis aux voix, le renvoi du rapport sur le projet de loi 9441 à la commission de l'économie est rejeté par 63 non contre 19 oui. (Exclamations.)
Le président. Vous avez un problème, Mesdames et Messieurs les députés ? (Exclamations.) Monsieur Hodgers, vous voulez prendre la parole ?
Une voix. Oui ! (Rires.)
Le président. Je peux continuer la procédure de vote ? Bien ! Nous sommes à présent en procédure de vote sur la prise en considération.
Mis aux voix, le projet 9441 est adopté en premier débat par 82 oui contre 1 non et 1 abstention.
Deuxième débat
Mis aux voix, le titre et le préambule sont adoptés, de même que les articles 2 à 5.
Le président. Mesdames et Messieurs, nous sommes saisis d'un amendement à l'article 6, alinéa 3, proposé par M. Roger Deneys, Mme Mariane Grobet-Wellner et M. Alain Charbonnier. Monsieur Deneys, vous avez la parole.
M. Roger Deneys (S). J'ai bien entendu les propos du conseiller d'Etat en charge du département. Il est vrai que Genève Tourisme présente ses comptes à la fondation... Mais j'insiste sur le fait que le contrôle qui est effectué n'est pas équivalent à celui que ferait l'Inspection cantonale des finances et qui garantit une transparence complète de l'argent versé par la collectivité publique. Je tiens à souligner que les 11 millions en question représentent de l'argent public ! Prétendre que la subvention ne serait que de 900 000 F et que le reste viendrait du privé n'est pas exact, dans la mesure où les impôts payés par les contribuables, quels qu'ils soient, sont de l'argent public qui est redistribué par l'Etat. Dans ce sens, il s'agit bien de 11 millions qui sont donnés à Genève Tourisme, et confier le contrôle des comptes à une fiduciaire et à une fondation n'est pas suffisant !
Je vous invite donc à voter cet amendement.
Mme Anne-Marie Arx-Vernon von (PDC), rapporteuse de majorité. Je voudrais simplement préciser une chose, qui est déjà exprimée clairement dans le rapport: Genève Tourisme est une association de droit privé, et la Fondation pour le tourisme est déjà contrôlée par l'ICF. Vous êtes donc en train de proposer une mesure qui n'est pas justifiée !
Cet amendement ne peut pas être accepté.
M. Gilbert Catelain (UDC). Je voudrais en effet avoir la confirmation par le département qu'un contrôle est bien effectué par l'ICF. L'UDC - cela peut paraître paradoxal - est opposé à une étatisation de l'Office du tourisme: puisqu'il concerne une activité privée, il doit être géré de manière privée, sans intervention de l'Etat ! Ou alors, le tourisme à Genève doit être considéré comme une économie socialisée, ce dont nous ne voudrions surtout pas !
L'argument avancé par le parti socialiste tient tout à fait la route: la perception de cette taxe est obligatoire et l'argent recueilli transite probablement par les caisses de l'Etat, puisque 3% du budget sont consacrés au contrôle de cette perception. On peut donc dire qu'il s'agit, de facto, d'un subventionnement par le biais des éventuels bénéficiaires de l'activité touristique à Genève. Il nous paraît donc normal que l'ICF puisse contrôler ces comptes, mais si l'on nous confirme que c'est déjà le cas, nous n'aurions pas de raison de voter cet amendement.
Je voudrais revenir sur l'importance du tourisme à Genève. L'UDC est tout à fait en phase avec le chef du département pour dire que l'activité touristique est essentielle pour l'activité économique genevoise, mais je dirai surtout pour la Ville de Genève qui est la principale bénéficiaire. On pourrait même se demander à cet égard si l'Office du tourisme ne devrait pas être géré par la Ville de Genève plutôt que par le canton. (Brouhaha. Remarques.) Quelqu'un a parlé de l'aéroport... Je suis content de constater l'explosion de la fréquentation de l'aéroport, mais je dois aussi reconnaître que celle-ci n'est pas du tout liée à l'augmentation du tourisme à Genève, puisqu'en trente ans il n'y a eu que 300 000 nuitées de plus, alors que la fréquentation de l'aéroport, elle, a au moins doublé dans le même laps de temps. Il n'y a donc pas de relation de cause à effet entre la fréquentation de l'aéroport et le tourisme à Genève.
Tout cela pour dire que je suis très étonné, puisque le tourisme est si important pour le Conseil d'Etat, qu'il n'alloue que 900 000 F pour cette activité vitale, alors que le même Conseil d'Etat nous «balance» des projets de lois pour octroyer 230 000 F à l'Association VIRES; 500 000 F à l'Association F-Information, 600 000 F à Solidarité Femmes ! Alors, je pose la question: où sont les priorités du Conseil d'Etat ?
Parce que le système que l'on nous propose est coûteux, administrativement ! Car les procédures restent compliquées. Les taxes sont calculées en fonction des nuitées, et ces étoiles, c'est de la chicane administrative ! L'UDC demande des simplifications administratives à tous les niveaux pour favoriser l'activité économique en Suisse et dans le canton de Genève. Puisque cette activité est primordiale pour Genève, il serait beaucoup plus simple - et je suis d'accord avec M. le député Kung... Kunz, pardon ! (Exclamations.) ... puisque, de toute façon, il s'agit d'une subvention déguisée. Donc, il serait beaucoup plus simple que l'Etat subventionne directement l'Office du tourisme. L'affaire serait réglée, et nous économiserions les deux postes du département des finances qui sont chargés du contrôle de la perception et beaucoup de frais administratifs pour l'ensemble des acteurs du tourisme à Genève !
Avant de nous prononcer sur l'amendement, je demanderai que le département nous confirme si, oui ou non, l'Inspection cantonale des finances effectue un contrôle à ce niveau.
M. Christian Bavarel (Ve). Je vais essayer de me limiter uniquement à l'amendement. Cela sera peut-être plus simple... (L'orateur est interpellé.) Oui, il semblerait que c'est comme cela qu'il faut faire !
Ce que propose le parti socialiste me paraît assez intéressant. Effectivement, le problème était bel et bien d'avoir une fondation, qui, elle, est contrôlée, et, à l'échelon au-dessous, Genève Tourisme, qui n'est pas contrôlée, si ce n'est par la fondation, sachant que ce contrôle n'est bien sûr pas d'aussi bonne qualité que celui de l'ICF. Et puis, que l'ICF puisse avoir accès aux comptes ne signifie pas qu'elle doive forcément refaire tout le travail ! Ce qu'il faut, c'est qu'un contrôle sérieux soit véritablement effectué et que l'on puisse avoir accès aux comptes de Genève Tourisme, si nécessaire.
Le département a réussi à nous convaincre que l'organigramme devait rester tel quel, même s'il est un peu complexe, avec ses deux niveaux. Pour notre part, nous aurions souhaité simplifier cette structure, mais les arguments avancés par le Conseil d'Etat nous ont convaincus. Par contre, il me semble extrêmement raisonnable de se donner un outil, comme le propose le parti socialiste. Je vous demande donc de voter cet amendement.
M. Christian Brunier (S). Mesdames et Messieurs les députés, il me semble que nous sommes en train de nous «prendre la tête» pour pas grand-chose !
Tous les programmes des partis politiques ici représentés demandent la transparence financière de l'Etat. La plupart des partis ont été favorables à la création de la Cour des comptes. La transparence implique un principe élémentaire: dès que l'Etat donne de l'argent à une association, il a le droit de contrôle. En l'occurrence - comme par hasard - certains demandent pourquoi il faudrait contrôler cette association... Eh bien, simplement en vertu du principe de la transparence: si l'Etat alloue une subvention, l'Inspection cantonale des finances doit pouvoir contrôler les comptes de l'association qui en bénéfice ! C'est un principe qui me paraît tout à fait élémentaire, et je crois qu'il n'y a pas lieu de discuter plus longtemps sur cet amendement !
Il faut tout simplement le voter, pour être en cohérence avec notre envie de gérer les finances de l'Etat avec plus de transparence et d'efficacité.
M. Roger Deneys (S). Pour compléter les propos de M. Brunier et répondre en partie à M. Catelain - j'espère qu'il m'écoute... - je dirai ce qui suit. Dans le projet de loi actuel, c'est la Fondation pour le tourisme qui est soumise au contrôle de l'ICF et qui encaisse les taxes. Par contre, l'Association Genève Tourisme qui dépense l'argent n'est pas soumise au contrôle de l'ICF ! Et c'est bien sur ce point que réside le problème: on ne contrôle qu'une partie du processus, ce qui est - M. Brunier l'a dit - franchement inacceptable !
M. Carlo Lamprecht, conseiller d'Etat. J'ai précisé tout à l'heure quel était le rôle de la Fondation pour le tourisme: accepter un budget et vérifier les comptes pour voir si les choses correspondent. Un organisme privé peut contrôler les comptes de l'Association Genève Tourisme qui est une association privée. Comme dans toute association privée, un contrôleur aux comptes avalise les comptes s'ils sont exacts. Maintenant, si vous voulez que l'Inspectorat cantonal des finances ait la possibilité d'examiner les comptes, on peut toujours le demander ! Evidemment, il y a une contradiction entre le contrôle de la fondation et l'Inspectorat cantonal des finances, mais c'est quelque chose que nous pouvons très bien établir ensemble.
Le président. Merci. Vous avez redemandé la parole, Monsieur Brunier ?
M. Christian Brunier (S). C'est juste pour demander l'appel nominal, Monsieur le président !
Le président. Vous êtes soutenu ?
Des voix. Oui !
Le président. Très bien, il en sera fait ainsi ! Mesdames et Messieurs les députés, je vous soumets maintenant l'amendement proposé par M. Deneys à l'article 6, alinéa 3, à l'appel nominal, consistant à ajouter à la fin de la phrase: «...Genève Tourisme est soumis au contrôle de l'Inspection cantonale des finances (ICF).» Le vote est lancé.
Mis aux voix à l'appel nominal, cet amendement est adopté par 43 oui contre 35 non et 3 abstentions.
Mis aux voix, l'article 6 ainsi amendé est adopté.
Mis aux voix, l'article 7 est adopté, de même que les articles 8 à 14.
Le président. Mesdames et Messieurs, une proposition d'amendement est proposée à l'article 17, alinéa 1, visant à introduire une taxe fournisseurs, sous forme d'une lettre a). Monsieur Charbonnier, vous avez la parole.
M. Alain Charbonnier (S). Merci, Monsieur le président. Comme je l'ai déjà dit lors du premier débat, lors des travaux de la commission - sur le texte du département, je tiens à le signaler - le parti libéral a proposé l'abrogation de la taxe fournisseurs: taxe qui s'applique aux fournisseurs des hôtels principalement. Il s'agit de relativement grosses entreprises qui fournissent les hôtels en produits qui leur sont nécessaires. Je donnais l'exemple de la boulangerie, mais il y en a plein d'autres. Et nous pensons qu'il n'y a pas de raison que ces fournisseurs, qui profitent directement du tourisme et de la bonne marche de ces hôtels, ne soient pas taxés d'une façon ou d'une autre.
On nous dit qu'il est très difficile pour le département des finances de prélever cette taxe... Peut-être ! Mais les derniers chiffres montrent quand même qu'elle a produit 700 000 F ! Alors, au département des finances de faire l'effort ! Nous, nous pensons qu'il est tout de même normal que les grosses entreprises qui fournissent ces hôtels soient taxées, puisque les petites boulangeries - comme je l'ai évoqué tout à l'heure, par exemple au Petit-Saconnex - sont taxées comme «entreprises bénéficiant du tourisme».
Il faut savoir qu'une petite entreprise peut payer jusqu'à 1200 F par année... Or, avec l'abrogation de cet article proposée par le parti libéral, les gros fournisseurs d'hôtels ne seraient pas taxés !
Nous vous demandons donc de soutenir cet amendement pour revenir au texte du Conseil d'Etat et du département de l'économie.
M. Jean-Michel Gros (L). L'un des buts de ce projet de loi était justement de simplifier le prélèvement de ces taxes... Et la taxe fournisseurs était vraiment l'exemple même, avec la taxe additionnelle - dont je ne dirai pas encore plus de mal que j'en ai dit tout à l'heure - d'une taxe tout à fait incomprise par lesdits fournisseurs qui, la plupart du temps, viennent d'autres cantons... (Exclamations.) ... où cette taxe n'existe pas. C'est dire que cela représente un désavantage évident pour les hôteliers.
Maintenant, comment s'applique cette taxe ? Nous ne le saurons jamais, puisque le prélèvement de cette taxe est quasiment incontrôlable, et cela nous a été certifié en commission par le département des finances. Alors, je vous en prie: si, vraiment, vous voulez compliquer à nouveau tout ce qui a été simplifié en commission, autant revenir à la loi initiale sur le tourisme ! Mais le but ici était justement de simplifier le prélèvement de ces taxes en se bornant à limiter les ressources pour la Fondation pour le tourisme à deux taxes et une subvention de l'Etat. C'est tout !
Et je vous prie d'en rester au texte de la commission, car c'est bien dans un but de simplification qu'il a été élaboré !
Mme Anne-Marie Arx-Vernon von (PDC), rapporteuse de majorité. Je suis en train de me demander à quoi servent les travaux de commission pour qu'il y ait autant d'interventions en plénière, dès lors que nous avons déjà abordé tous les aspects de ce projet de loi dans le détail !
Les personnes - vous m'en excuserez, mais je tiens à le répéter - que nous avons auditionnées longuement nous ont démontré que cette taxe rapportait trop peu d'argent pour justifier de mettre en place des contrôles supplémentaires. De plus, elle va à fins contraires de tout ce qui a été demandé, à savoir la simplification des procédures !
Finalement, cet amendement revient à remettre une couche à un millefeuille qui n'en pouvait plus... Et cette loi apparaît enfin pleine de bon sens. Alors, s'il vous plaît, n'en rajoutez pas ! (Applaudissements.)
Le président. Merci ! Avant de donner la parole à M. le rapporteur de minorité, j'indique que nous avons clôturé la liste: M. Pierre Kunz, M. Maurice Clairet, M. Gilbert Catelain, M. Alain Charbonnier, M. Roger Deneys, M. Christian Bavarel sont encore inscrits. Monsieur le rapporteur de minorité, vous avez la parole.
M. Pierre Kunz (R), rapporteur de deuxième minorité. L'argumentation de M. Charbonnier pour justifier la taxation des fournisseurs des hôteliers, sous prétexte qu'ils seraient les bénéficiaires de l'industrie touristique, est tellement aberrante, intellectuellement parlant, que je ne peux m'empêcher de lui suggérer d'exiger un impôt sur tous les emplois de l'hôtellerie ! Après tout, les emplois de l'hôtellerie profitent aussi de l'industrie touristique ! Alors, taxons-les, pendant que nous y sommes !
M. Maurice Clairet (MCG). Monsieur le président, bonjour ! Messieurs les députés, bonjour ! Je suis un apprenti député...
Je suis artisan boulanger, et je suis tout à fait opposé à cette taxe. En effet, il faut savoir qu'en l'augmentant les hôtels vont automatiquement hausser leur prix. Cela fait boule de neige.
Par ailleurs, vous devez savoir que les livraisons ne rapportent rien du tout ! Si on les fait, c'est simplement pour maintenir les emplois ! Si vous le voulez, vous pouvez venir chez moi, je vous fournirai les chiffres de mon affaire. Croyez-moi, nous bossons dur, entre quinze et dix-sept heures par jour ! Tout à l'heure, à 2h30, je serai debout et je vais travailler au moins quinze heures !
En 1963, quand je suis arrivé en Suisse, il y avait dix pages de pâtissiers et dix pages de boulangers dans l'annuaire téléphonique... Aujourd'hui, il n'y a qu'une page, dont la moitié pour les grandes entreprises de la place de Genève ! Regardez le nombre d'artisans qu'il reste: trois fois rien ! La moitié de ces artisans travaillent avec des apprentis; l'autre moitié, avec des ouvriers. En ce qui me concerne, j'ai vingt-trois employés, et, croyez-moi, ce n'est pas facile de gérer tout ce monde ! (Applaudissements.)
M. Gilbert Catelain (UDC). Nous devons effectivement reconnaître un mérite à cette loi, c'est la simplification. Et 700 000 F pour autant de fournisseurs, cela ne doit pas faire grand chose comme recette par fournisseur. De facto, cette taxe n'a plus de raison d'être !
Par contre, je comprends tout à fait l'argumentation du parti socialiste - contrairement à M. Kunz... (Rires et exclamations.) Le parti socialiste a été très clair dans son discours...
Le président. Monsieur le député, je vous rappelle que vous vous adressez à la présidence, exclusivement ! (Rires.)
M. Gilbert Catelain. En effet, pendant toute la campagne électorale, le parti socialiste a toujours dit qu'il était favorable à plus d'impôts, plus de taxes, et, donc, plus de perception, pour alimenter l'effectif de la fonction publique...
J'admire aussi le discours de la rapporteure de majorité... J'ai presque cru entendre un discours UDC ! (Exclamations et rires.) J'ai pensé qu'elle allait peut-être virer de bord au cours de ces prochaines semaines... (Exclamations.)
Donc, je peux confirmer que nous ne soutiendrons pas cet amendement.
En réalité, la taxe fournisseurs représenterait une sorte de double imposition pour les fournisseurs, ce que ne prévoit d'ailleurs même pas la TVA ! En effet, le système de la TVA - approuvé par le parti socialiste, ces dernières décennies - perçoit la taxe uniquement lors de la vente finale, et c'est toujours le dernier fournisseur qui paye la taxe. Mais, avec une telle taxe, nous serions dans un système où, d'une part, le fournisseur payerait la taxe et, de l'autre, l'hôtelier payerait la taxe de la taxe, puisqu'il paye déjà une taxe sur la nuitée, en ayant déjà payé indirectement la taxe du fournisseur. Donc, cela reviendrait à une double imposition, ce qui n'est pas du tout conforme à la politique fiscale en vigueur dans ce pays.
M. Alain Charbonnier (S). A propos de cette taxe et, en général, de cette loi sur le tourisme, il me semble qu'on s'égare un peu... Certains n'ont pas très bien compris de quoi il s'agit...
M. le président Lamprecht l'a rappelé tout à l'heure, cette loi vient d'un arrangement entre les différents acteurs du tourisme à Genève, et elle a été élaborée à l'époque de son prédécesseur, M. Maitre, de façon que tous les acteurs bénéficiant du tourisme participent à sa promotion sous forme de taxes.
D'ailleurs, le département l'avait très bien compris, puisque l'amendement a été rédigé par le département qui nous l'avait proposé dans son projet de loi ! Cette taxe fournisseurs, dans le Chapitre II, du Titre III, était déjà une simplification de ce qui existait auparavant dans la première loi de 1994. Ce n'est donc pas une complication du tout ! Le but de cette taxe est de maintenir une certaine équité entre les différentes entreprises qui profitent du tourisme.
Tout à l'heure, notre collègue du MCG se plaignait de la situation des «pauvres petits commerçant qui ont de la peine à survivre»... Nous sommes tout à fait d'accord avec lui ! Mais, justement, ce ne sont pas les «pauvres petits commerçants» qui fournissent les grands hôtels: cela nous a été démontré en commission ! Ce sont les grosses entreprises qui ont absorbé les pâtissiers et les boulangers dont vous parliez tout à l'heure - qui les ont fait disparaître - et, maintenant, ce sont eux qui profiteraient plein pot de cette loi sur le tourisme et qui bénéficieraient de l'abrogation de cette taxe fournisseurs !
Le président. Monsieur Deneys, puisque votre micro - je ne sais pas pourquoi - est déjà allumé, je vous propose de prendre la parole... (Le président est interpellé.) Oui, je sais, mais le micro était allumé en même temps que le vôtre, je ne sais pas pourquoi... Alors, si M. Bavarel n'y voit pas un dommage irréparable, je donne la parole d'abord à M. Deneys dont le micro est allumé, puis à M. Bavarel.
M. Roger Deneys (S). Merci, Monsieur le président. Je voudrais plutôt intervenir sur la forme, car je ne veux pas répéter ce qui a été dit par M. Charbonnier.
Effectivement, cette mesure figurait dans le projet de loi initial du département. Monsieur Catelain, peut-être voyez-vous trop bien les socialistes, parce que nous sommes maintenant face à face... Cela vous donne des visions... Quoi qu'il en soit, vous lisez mal le programme socialiste ! C'est comme pour le projet de loi précédent qui avait été déposé - y compris le rapport - avant le vote sur les bilatérales !
Donc, il faut être clair: nous, les socialistes, nous faisons des propositions dans le sens d'une plus grande justice fiscale, mais cela ne veut pas dire que nous voulons absolument plus d'Etat pour plus d'Etat !
En l'occurrence, le projet de loi du Conseil d'Etat incluait cette taxe, et c'est un amendement libéral qui a proposé de la supprimer ! Et, pour répondre à Mme Anne-Marie von Arx-Vernon, je dirai simplement qu'en commission l'amendement libéral a été voté et que nous nous y sommes opposés ! Nous ne proposons rien de nouveau tout à coup, nous persistons simplement dans notre position ! Nous étions opposés à cette suppression: nous le sommes toujours, et nous maintenons simplement notre souhait que cette taxe soit à nouveau réintroduite dans le texte de loi. C'est tout à fait normal et nous sommes tout à fait cohérents avec nous-mêmes ! Nous estimons que tout le monde doit contribuer !
M. Christian Bavarel (Ve). Nous, les Verts, ne soutiendrons pas cet amendement pour une raison très simple, c'est que nous avons constaté que la perception de cette taxe était extrêmement compliquée.
Deuxième chose: certains fournisseurs voulaient bien la payer, d'autres ne la payaient pas, mais personne ne savait exactement qui faisait quoi. Et puis, si l'on veut percevoir cette taxe correctement et de manière équitable, le coût est plus élevé que ce qu'elle ne rapporte. Je vous donne un simple exemple: si vous allez faire des courses à la Migros pour un hôtel ou autre, il faut demander une autre facture, parce que, selon les cas, la taxe fournisseurs s'applique ou pas. Si vous achetez des taies d'oreillers pour un hôtel dans un grand magasin de la place, la facture est encore différente. Tout cela devient très compliqué. Pour acheter du matériel en Autriche ou ailleurs, il faut demander de percevoir cette taxe... Je le rappelle cette mesure implique une procédure extrêmement compliquée. Cette taxe fournisseurs s'applique à tout le monde, même aux fournisseurs de l'étranger... Les Verts sont favorables à une débureaucratisation de l'Etat. En l'occurrence, ce sujet est une véritable «usine à gaz» que l'on ne peut pas accepter !
Le président. Je vous remercie, Monsieur le député. Je vous soumets donc cet amendement proposé par M. Alain Charbonnier et M. Roger Deneys à l'article 17, alinéa 1, consistant à remettre la lettre a) taxe fournisseurs.
Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 64 non contre 16 oui et 1 abstention.
Le président. Messieurs les auteurs Charbonnier et Deneys, je suppose que je n'ai pas besoin d'entrer en matière sur votre proposition d'amendement au Chapitre II... D'accord, je vous remercie !
Mis aux voix, l'article 17 est adopté, de même que les articles 18 à 36.
Mis aux voix, l'article 1 (souligné) est adopté, de même que les articles 2 et 3 (soulignés).
Troisième débat
La loi 9441 est adoptée article par article en troisième débat.
Mise aux voix, la loi 9441 est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 76 oui et 7 abstentions.