République et canton de Genève
Grand Conseil
Séance du jeudi 12 février 2004 à 20h30
55e législature - 3e année - 5e session - 22e séance -autres séances de la session
La séance est ouverte à 20h30, sous la présidence de M. Pascal Pétroz, président.
Assistent à la séance: Mmes et MM. Martine Brunschwig Graf, Carlo Lamprecht, Laurent Moutinot, Micheline Spoerri, Pierre-François Unger et Charles Beer, conseillers d'Etat.
Exhortation
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, prenons la résolution de remplir consciencieusement notre mandat et de faire servir nos travaux au bien de la patrie qui nous a confié ses destinées.
Personnes excusées
Le président. Ont fait excuser leur absence à cette séance: M. Robert Cramer, président du Conseil d'Etat, ainsi que Mmes et MM. Bernard Annen, Luc Barthassat, Blaise Bourrit, Thierry Charollais, Nicole Lavanchy, Jacques Pagan, Jacqueline Pla et Pierre Schifferli, députés.
Le président. Mme Sylvie Droin, M. Pierre Bungener et Mme Linda Hainaut sont assermentés. (Applaudissements.)
Annonces et dépôts
Néant.
Interpellations urgentes écrites
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, vous avez trouvé sur vos places les interpellations urgentes écrites suivantes:
Interpellation urgente écrite de M. Hugues Hiltpold : concernant la date d'entrée en vigueur de la loi supprimant les droits de succession pour les conjoints et les parents en ligne directe ( IUE 65)
Interpellation urgente écrite M. Pierre Guérini ( IUE 66)
Interpellation urgente écrite de M. Gabriel Barrillier : Traversée de Vésenaz : le Conseil d'Etat peut-il s'opposer à l'application d'une loi votée par le Grand Conseil ? ( IUE 67)
Interpellation urgente écrite de Mme Anne Mahrer : Quelles directives pour les étudiant-e-s qui devraient s'inscrire dès maintenant dans les filières de l'EIG remises en question par le Conseil fédéral ? ( IUE 68)
Interpellation urgente écrite de Mme Laurence Fehlmann Rielle : Publicité pour une multinationale du tabac cautionnée par l'Etat ( IUE 69)
Interpellation urgente écrite de M. Robert Iselin : Lecture en classe de culture générale du livre «Le Grand Cahier» de Mme Agota Kristof ( IUE 70)
Interpellation urgente écrite de M. Michel Halpérin : Respect de la sphère privée ( IUE 71)
Interpellation urgente écrite de M. Alain Charbonnier : Dons et prestations gratuites de l'Etat de Genève ( IUE 72)
IUE 65, 66, 67, 68, 69, 70, 71, 72
Le président. Conformément à l'article 162D de notre règlement, le Conseil d'Etat, respectivement le conseiller d'Etat interpellé, répondra par écrit lors de la session suivante, à savoir celle de mars.
Mesdames et Messieurs les députés, nous reprenons le cours de notre ordre du jour.
Premier débat
Le président. Monsieur le rapporteur de majorité, avez-vous quelque chose à apporter à votre rapport ? Vous avez la parole.
M. Alberto Velasco (S), rapporteur de majorité. Merci, Monsieur le président. Je rappellerai simplement aux députés de ce Grand Conseil que le projet de loi qui nous est soumis aujourd'hui concerne le MAMCO, soit le Musée d'art moderne et contemporain. Ce musée, sous sa forme actuelle, a vu le jour en 1991, à l'initiative de quelques citoyens mécènes qui, depuis cette date, ont mis à disposition du musée une somme d'environ 20 millions, et la Ville de Genève, à l'époque, les locaux.
Ces deux dernières années, le fonctionnement était pratiquement assuré par ceux-ci et par le revenu de la feue SECSA pour un million par an. Comme vous le savez, la SECSA a disparu depuis, et le million aussi...
Il est donc question aujourd'hui, avec le projet de loi qui vous est soumis, de faire appel aux pouvoirs publics, notamment l'Etat de Genève et la Ville de Genève. L'Etat de Genève pour un montant de 1,25 million, soit un million pour le fonctionnement et 250 000 F pour les charges relatives à la Cellule pédagogique. Vous retrouverez le justificatif de ces chiffres dans les comptes de pertes et profits, aux pages 26 et 27 de mon rapport. Et vous verrez que le trou de un million de la SECSA demande à être comblé.
Par ailleurs, la Ville de Genève s'est engagée à verser un montant à raison de un million en 2004 - comme en 2003 - et la fondation de droit privé s'est engagée à modifier ses statuts en fondation de droit public et à verser également un million.
Je précise que le nombre d'entrées a été de 20'693 en 2000 et de 28'807 en 2003. (Brouhaha. Le président agite la cloche.)
L'indice de notoriété de ce musée est de 55%, c'est dire si ce musée a aujourd'hui sa place dans notre cité; c'est dire s'il participe à son rayonnement, c'est dire s'il est important de le maintenir !
Je dirai également que, contrairement à ce que certains pensent, un tel musée est nécessaire pour l'essor économique de la cité. Il est difficile de calculer la rentabilité exacte du musée sur le plan économique, mais l'incidence des musées - on l'a vu dans des villes comme Bilbao, Paris, Londres, New-York, etc. - est importante et contribue effectivement de manière non négligeable à l'essor de la cité, à tout point de vue, et économique aussi.
Le groupe socialiste votera ce crédit, et je vous encourage, Mesdames et Messieurs les députés, à le voter également.
M. Pierre Weiss (L), rapporteur. Dans le rapport de minorité que j'ai déposé, je relevais deux questions... J'en ajouterai une troisième aujourd'hui.
La première est la suivante: Genève a-t-elle besoin d'un Musée d'art moderne et contemporain ? La réponse est sans conteste affirmative !
La deuxième: le projet de loi, tel qu'il nous est présenté, est-il satisfaisant ? La réponse d'une minorité de la commission a été négative: il n'est pas satisfaisant, car il n'est pas assez précis. Manquent, par exemple, des subventions - que je n'appellerai pas «latentes» - qui ne sont en tout cas pas apparentes dans les comptes et les budgets qui nous ont été présentés. Et, aussi, parce que l'équilibre entre les trois piliers de ce musée ne sont pas assurés. Les trois piliers étant, d'une part, les mécènes - qui, depuis bon nombre d'années, ont contribué pour plus de 17 millions à ce musée - d'autre part, la Ville et, enfin, le canton - à qui l'on vient maintenant demander, compte tenu des conditions d'exploitation propres à un musée, d'assurer en quelque sorte sa viabilité à long terme. Mais, je le répète, l'équilibre n'est pas assuré entre ces partenaires, alors que le projet indique, ou plus exactement, affirme qu'il l'est.
Une troisième question m'est ensuite venue à l'esprit comme devant être posée ce soir... Ce musée ne mérite-t-il pas de notre part un effort particulier, un effort prenant la voie d'une solution d'ouverture rigoureuse proportionnée aux moyens de notre République, qui connaît actuellement pas mal de turbulences budgétaires ? Cela pour éviter de faire peser sur ce musée le risque du couperet de la guillotine...
Et c'est en ce sens, Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, que je vais proposer à votre attention un amendement limitant le montant versé au MAMCO par l'Etat à un million - au lieu de 1,25 million - afin de rétablir, précisément, cet équilibre, afin d'inciter le partenaire municipal à majorer l'effort qu'il consent en faveur de ce musée. A partir du moment où - je me permets de rappeler ici les échanges que nous avons eus en commission à ce sujet - cette proposition de compromis, qui avait fait en commission l'objet d'un assentiment de la part du rapporteur de majorité et de ceux qui le soutenaient, sera acceptée par ce Grand Conseil, je crois que nous aurons fait pour l'art contemporain à Genève un pas important qui permet d'assurer à long terme, et en tout cas pour 2004 - parce qu'après, eh bien, je suis persuadé que le département de l'instruction publique, l'Etat et la Ville, trouveront les solutions adéquates - la pérennité de cette forme d'expression plurielle de notre sensibilité artistique.
Le président. Je vous remercie, Monsieur le rapporteur de minorité. J'attends donc votre amendement. Apparemment un autre amendement allant dans le même sens est en voie de distribution... C'est celui-là ? Bien ! Je précise que vos amendements, qui modifient le montant octroyé, doivent porter sur tous les points concernés, à savoir le titre, l'article 1, mais aussi l'article 3, où il y a une ventilation du montant total: de 1 000 000 F et de 250 000 F. Je souhaite donc que vos amendements porte sur ces trois points.
Monsieur le député Robert Iselin, vous avez la parole.
M. Robert Iselin (UDC). Il est évident que nos réactions sont conditionnées par ce que nous avons pu vivre comme enfant, comme jeune homme...
J'ai eu la chance dans la vie - je pense que c'était une chance... - d'être élevé par une mère très intéressée par l'art moderne - c'était une amie de Le Corbusier et de quelques autres peintres - et d'avoir un grand-père qui était lui-même peintre. J'aurais donc un point faible pour une institution comme le MAMCO.
Mais il y a maintenant bientôt deux ans et demi - d'abord timidement, puis, ensuite, de plus en plus - que je me suis penché sur la situation financière de l'Etat de Genève... Et, une fois de plus, je dois vous dire - même si je sais que certains sont fatigués de l'entendre - que celle-ci est dramatique.
Alors, dans ces conditions, même si j'ai beaucoup d'intérêt pour l'art moderne, je m'opposerai à ce crédit. Il faut trouver d'autres solutions ! Ce n'est pas à l'Etat de subventionner ce musée vu sa situation financière - qui est très grave, mes amis, très grave !
En effet, j'ai dû, parce que je prépare un petit travail sur ce sujet, me pencher sur les résultats de l'Etat de Genève depuis 1982... Eh bien, pour quelqu'un - comme moi - qui a trempé dans la finance pendant longtemps: c'est tout simplement effrayant ! (Commentaires.)
Personnellement - et je pense que mes collègues de l'UDC me suivront - je suis opposé à ce crédit.
Mme Salika Wenger (AdG). Oui - oui ! - je suis d'accord... Le MAMCO devrait être une fondation de droit public pour pouvoir bénéficier de l'aide de l'Etat.
Oui, nous sommes mis devant le fait accompli... C'est vrai que les mécènes à l'ancienne, qui respectaient leurs engagements par-delà la mort, n'existent plus.
Oui, le recours systématique aux emplois temporaires est scandaleux... Mais je crois que le MAMCO - comme d'ailleurs le Palais de justice - sont les victimes d'une politique du personnel qu'ils n'ont pas choisie. Et quand j'entends parler de cette situation, c'est bien plus souvent pour stigmatiser les travailleurs que pour remettre en cause les institutions qui les emploient à bas prix ! Mais, enfin, c'est un autre débat, je suis d'accord avec vous.
Oui, l'Etat a des difficultés financières... Monsieur Iselin, je suis d'accord. Néanmoins, ce ne sont pas ceux qui assèchent systématiquement les finances de l'Etat qui doivent, en plus, utiliser cet argument ! Ce serait un tout petit peu fort !
Oui, j'ai bien entendu mes préopinants... J'ai bien entendu tous les arguments technico-financiers qui sont utilisés dans le rapport, mais j'entends encore plus nettement quelque chose: les non-dits !
La discussion entre les anciens et les modernes, elle est vieille comme l'humanité ! C'est vrai pour tous les champs de l'activité humaine, mais c'est surtout dans les arts que l'on voit ressurgir cette bagarre régulièrement: chaque fois qu'une nouvelle forme d'art ou une nouvelle forme d'expression voit le jour, des oppositions surgissent.
L'art contemporain n'a pas échappé à cette critique. Infantile, inachevé, prétentieux, élitiste, obscur - que sais-je encore ? - les qualificatifs n'ont pas manqué pour discréditer ce que certains ont du mal à comprendre... J'avoue que, moi-même, je ne suis pas une grande érudite en la matière et que, bien souvent, j'ai trouvé ennuyeuses et prévisibles les oeuvres qu'il m'était donné d'approcher.
Mais, même si les noms et les oeuvres d'artistes tels que Christo, Donald Judd, Sol LeWitt, Daniel Buren, Barbara Kruger ou Robert Lewis n'évoquent rien pour une grande partie d'entre nous, il n'empêche qu'ils sont reconnus dans le monde entier et que ce sont des artistes majeurs de notre temps. Or, non seulement les artistes que je viens de vous citer sont exposés par le MAMCO mais certaines de leurs oeuvres font partie du fonds et de la collection du MAMCO, qui est propriété inaliénable de la collectivité publique. Et ces oeuvres représentent un certain nombre de millions: ça n'est pas rien, Messieurs les députés d'en face !
Ce qui me gêne, c'est que, par pure radinerie ou par ignorance, nous refusions à nos concitoyens le droit d'accès à ces oeuvres... Cela s'apparente un tout petit peu à de la censure ! Parce que nous sommes incultes, conservateurs, frileux, il ne faudrait donner aucune place à cette forme d'expression ou, peut-être, la reléguer au rang d'expression mineure ?
Mesdames et Messieurs les députés, je vous pose encore une question: alors que toutes les capitales du monde entier chouchoutent leurs artistes... (L'oratrice est interpellée par M. Claude Blanc.)Oui, les capitales, en effet, Monsieur Blanc ! Mais vous ne devez pas savoir ce que c'est ! ... à Genève, nous serions encore assez rétrogrades pour ne pas intervenir au MAMCO et laisser mourir ainsi un espace de culture et de réflexion que bien des villes nous envient ? Je sais qu'il y aurait beaucoup à dire sur la méthode, sur la manière dont on nous a forcé la main... Qui s'apparente plus au pied dans la porte qu'à une véritable explication didactique dont notre inculture aurait eu besoin !
Mais, dans la manoeuvre dilatoire consistant à n'octroyer que le minimum vital au musée, et pour deux ans seulement, je soupçonne fortement ceux qui en sont les initiants de ne pas vouloir être identifiés comme les torpilleurs du musée. Ils occultent ainsi le fait qu'ils n'ont pas le courage de sanctionner le contenu des oeuvres exposées - parce que c'est de cela dont on parle, et c'est ce qui m'inquiète ! J'ai bien peur que ce soit de cela qu'il s'agit ! Je ne pense pas qu'ils veuillent sanctionner la forme de subventionnement ! C'est très hypocrite ! Bien que consciente de tout cela, par esprit de concorde, je ne présenterai pas d'amendement pour l'instant.
J'aimerais dire encore ceci. Chaque année des centaines d'enfants sont reçus gratuitement au MAMCO et la cellule pédagogique peut, dans le cadre du musée, faire le travail d'éveil et d'approche de l'art qui est le sien. Cela devrait être une raison supplémentaire pour soutenir cette institution. Car, comme nous le savons tous - je l'espère - le savoir est le meilleur rempart à la barbarie. C'est pour cela que nous ne voterons pas l'amendement de M. Weiss qui propose de retirer les 250 000 F destinés à la Cellule pédagogique.
Alors, Mesdames et Messieurs les députés, de grâce, ne vous alignez pas sur la position de l'UDC, que j'ai entendue tout à l'heure et que j'ai pu lire dans le rapport de M. Velasco, en page 17 ! Il est dit - c'est une phrase d'anthologie, alors j'aimerais vraiment que tout le monde en profite: «Le jour où l'Etat aura remboursé une partie de sa dette et où il fera un boni de 400 ou 500 millions, il sera temps de reprendre la question du MAMCO.»...
Si cette politique devait être appliquée à toute la culture...
Le président. Il faut conclure, Madame la députée !
Mme Salika Wenger. ... à Genève et dans notre canton, c'est le rayonnement de Genève qui s'en trouverait irrémédiablement terni ! La culture est bien trop importante, trop indispensable, pour que ces arguments puissent être repris par des personnes sensibles et intelligentes, comme j'en connais de nombreuses dans cette enceinte, sur les bancs de ce parlement, et ce, dans tous les partis... Exception faite peut-être de l'UDC, si l'on tient compte de ce que nous avons entendu et de la citation que je viens de vous faire !
Le président. Veuillez conclure, Madame la députée ! S'il vous plaît !
Mme Salika Wenger. J'ai fini...
Le président. Vous avez déjà parlé pendant sept minutes trente !
Mme Salika Wenger. Je conclus, Monsieur le président !
Le président. Brièvement, merci !
Mme Salika Wenger. Vous aurez donc compris que l'Alliance de gauche non seulement votera ce crédit, mais encore vous demande de l'accepter tel que sorti de la commission. Je vous remercie.
Le président. Madame la députée, vous avez effectivement conclu brièvement, et je vous en remercie.
M. Christian Bavarel (Ve). Mesdames et Messieurs les députés, ce projet de loi, comme c'est souvent le cas quand un projet passe à la commission des finances, pose un problème financier, mais, en l'occurrence et avant tout, il pose un problème de fond.
Le problème de fond est le suivant - mes préopinants l'ont dit: pourquoi un musée d'art contemporain à Genève ?
Nous sommes dans un monde qui se complexifie, avec de nouvelles technologies, qui nous laisse parfois un peu perplexes. Des chercheurs, à l'université ou ailleurs, apportent des réponses scientifiques à nos questions. Autour du MAMCO, nous avons des personnes qui nous donnent une approche sensible des choses et de notre futur... Suite à l'apparition de la photographie, il y a eu les impressionnistes, et personne ne donnait bien cher de leurs oeuvres, se demandant à quoi cela servait et comment cela servait... C'était simplement une réponse des artistes aux questions soulevées par la nouvelle technologie de l'image. Aujourd'hui, les questions sont plus complexes: nous sommes face à des domaines nouveaux comme la robotique, l'informatique, une transformation complète et rapide de notre monde, et nous devons nous pencher sur les questions que ces domaines soulèvent.
Le MAMCO est comme une bibliothèque vivante. Il ne peut pas être une bibliothèque fermée, une sorte de conservatoire qui n'évoluerait pas. C'est un lieu de réflexion, en ébullition, qui bouge, et qui nous fait bouger, nous particulièrement les politiques, sur les questions de normes. Il est certain que l'art conceptuel peut être dérangeant à certains moments, mais il nous demande systématiquement, à nous qui établissons les normes pour la société, jusqu'où celles-ci doivent aller et quelles sont-elles. Ne serait-ce qu'à notre usage, le MAMCO a déjà une utilité.
Il a aussi une part énorme de formation. La fréquentation par les écoles est importante. On a dénombré 28'607 visiteurs pour 2003, dont beaucoup - c'est vrai - entrent gratuitement, mais il s'agit principalement d'écoliers, de collégiens ou d'étudiants. Et parmi eux, les étudiants de la Faculté de médecine. Celle-ci s'est en effet rendu compte que les médecins, dont la formation est essentiellement scientifique, avaient quelques difficultés à répondre aux problèmes qu'ils rencontraient dans leur profession, et elle a demandé au MAMCO d'élaborer une formation à leur usage.
Il est important pour Genève de conserver ses racines... Je pense que tout le monde est d'accord sur le fait que le Musée d'art et d'histoire est essentiel. Mais les racines servent à pouvoir avancer, à croître, à se tourner vers l'avenir. Nous défendons la culture institutionnelle, et nous devons aujourd'hui défendre aussi la Genève qui se tourne du côté de l'avenir, avec le MAMCO.
Certaines personnes se demandent si le MAMCO est vraiment un musée, parce que sa collection ne leur semble pas être suffisamment importante... Je vous rappelle à cet égard que cette collection compte 2668 oeuvres - ce sont des chiffres très récents - qui sont sa propriété, dont certaines sont d'une importance réelle. Il y a en dépôt 2460 oeuvres qui sont prêtées par des collectionneurs et qui finiront peut-être bien par être achetées à un moment ou à un autre par le MAMCO, plus 523 oeuvres prêtées par des artistes. Il s'agit donc bel et bien d'une véritable collection, et le MAMCO est bel et bien un musée important et, de plus, un lieu d'élaboration.
Le montage financier de ce projet de loi me paraît extrêmement intéressant. Depuis un certain nombre d'années, nous avons un débat sur la culture à Genève, pour qu'elle soit aussi présente que possible pour le rayonnement de la Genève internationale, pour offrir des lieux de qualité à la portée de tous. Jusqu'à présent, la culture a été le fait soit de la Ville soit de mécènes. Les mécènes ont soutenu le MAMCO jusqu'à maintenant - une dizaine d'années - à bout de bras, montrant ainsi l'intérêt qu'ils avaient pour cette institution, lui permettant de vivre et d'être à disposition de notre collectivité. Cette fois-ci, le montage financier est réparti de la manière suivante: un tiers pour les privés, un tiers pour la Ville et un tiers pour le canton. Bien sûr, on pourra argumenter par rapport aux subventions indirectes, pour savoir ce qui en fait partie, comme les personnes en placement temporaire, le bâtiment, etc. Tout cela est à définir. Je rappelle simplement que les personnes mises actuellement à la disposition du MAMCO en emploi temporaire auraient dû être placées ailleurs.
La subvention que nous souhaitons pour avoir un musée d'art contemporain pérenne à Genève représente environ douze postes de travail. Ce n'est pas un investissement phénoménal pour l'Etat de Genève, vu la qualité du musée.
Je rappelle aussi que la Cellule pédagogique est extrêmement importante au niveau de la formation, car elle touche l'ensemble des écoles.
En conclusion, je dirai qu'il faut dire oui à une Genève tournée vers l'avenir, oui au Musée d'art moderne et contemporain !
M. Christian Grobet (AdG). Je ne vais pas intervenir longuement sur le bien-fondé que la collectivité soutienne ce musée...
Monsieur Iselin, il ne s'agit pas d'un musée d'art moderne... L'art moderne est moins controversé que l'art contemporain, sur lequel il y a certes beaucoup à redire... Si certaines oeuvres sont réellement intéressantes, d'autres sont le fait de ce que j'appelle, pour ma part, des «faiseurs» ! Mais il est difficile aujourd'hui de savoir quelles seront, à terme, les oeuvres artistiques qui seront reconnues... On sait que, dans le passé, il y a eu des expressions modernes qui ont été fortement critiquées et qui, aujourd'hui, sont reconnues comme des oeuvres de grande valeur. Cela signifie que nous devons, bien entendu, soutenir l'art contemporain.
Ce serait une grave faute politique de notre part que ce musée doive fermer ses portes, réduisant ainsi à néant les efforts qui ont été déployés toutes ces dernières années, quand bien même - et cela a été souligné tout à l'heure - le Musée d'art contemporain avait été le symbole de l'intervention des milieux privés de «Genève gagne», qui voulaient faire la démonstration que l'on pouvait se passer de l'aide des pouvoirs publics et que, dans un domaine particulier - mais oui, Madame Brunschwig Graf, je vous le rappelle: c'était à l'époque du gouvernement monocolore ! - l'initiative privée était à même de lancer certaines réalisations de façon durable. Cela me fait penser à la salle Patiño qui avait démarré grâce à une donation, et qu'il a fallu évidemment soutenir d'une manière substantielle par la suite. Il y a d'autres exemples plus frappants, comme le stade de La Praille. Il s'agit d'initiatives privées qui, finalement, se transforment en oeuvres publiques, parce que les personnes qui ont fait des promesses de soutien financier n'arrivent pas à les tenir...
Toujours est-il qu'il y a eu une impulsion pour lancer ce musée et que des fonds ont été investis, comme à Cressy, et il serait bien sûr dommage de les perdre. Du reste, M. Unger l'a bien compris... Il a su naviguer d'une manière extrêmement habile... Mais il est vrai que si, aujourd'hui, les pouvoirs publics doivent sauver les réalisations des mécènes qu'on avait portés au pinacle, la moindre des choses, effectivement, serait qu'elles deviennent des fondations de droit public ! C'est la condition sine qua non pour que nous les subventionnions ! Il n'est pas possible de continuer à jouer avec la double casquette, ce qui n'empêcherait pas, bien entendu, que des représentants de ceux qui ont été à l'origine du musée figurent dans le Conseil de fondation. Ils pourraient ainsi continuer à contribuer à son essor. Voilà pour le fond.
J'en viens à la subvention, Monsieur Weiss. Finalement, il n'est peut-être pas mauvais que ce dossier ait traîné et qu'il n'ait pas été traité plus tôt... Parce que je vois, au fond, une sorte de reconversion de votre part... Nous nous en félicitons, parce que si nous l'avions traité avant... (L'orateur est interpellé par M. Weiss.)Vous savez, chacun, à un moment donné, a le droit de changer d'avis ! Et je vous en félicite, du reste ! Au lieu de couler ce projet, comme cela aurait été le cas si nous avions traité ce projet il y a quelques mois, aujourd'hui, vous voulez le sauver !
Toutefois, vous tenez tout de même un double langage qui me gêne, car vous dites qu'il faut être partie prenante, mais vous y allez «à la retirette»... Vous suggérez de donner un million au lieu de 1,25 million ! Quel est le sauveur qui devra donner les 250 000 F manquants ? Vous avez trouvé la solution toute faite - on la connaît: la Ville de Genève ! Pourquoi pas ? Monsieur Weiss, nous aurons l'occasion d'en débattre dans un projet que nous devrons traiter un peu plus tard... Excusez-moi, Monsieur Weiss, j'ai beaucoup d'estime pour vous, mais, sur ce point, je trouve que vous n'êtes pas crédible du tout ! Vous présentez ce soir deux rapports au Grand Conseil... Pour la place des Nations, vous dites que l'Etat ne doit pas mettre un sou - ce qui veut dire que la Ville de Genève doit payer intégralement le projet - mais, par contre, dans ce dossier, vous pensez que l'Etat doit contribuer et la Ville de Genève aussi !
Ce n'est pas possible, Monsieur, il faut savoir ce que vous voulez ! Vous avez parlé de partenariat avec la Ville de Genève... Il n'y a pas de partenariat à sens unique ! Quand on veut un partenariat avec une collectivité publique, on s'efforce de trouver des répartitions équitables dans tous les dossiers !
Vous claquez la porte à la Ville de Genève d'une manière totalement incongrue dans l'affaire de la place des Nations - nous y reviendrons tout à l'heure - et vous pensez que la Ville de Genève devrait, après le camouflet que vous voulez lui infliger, verser 250 000 F de plus !
En ce qui me concerne, je ne suis pas citoyen de la Ville de Genève, mais, si c'était le cas, je serais le premier au Conseil municipal à refuser votre proposition face à l'arrogance insupportable dont font preuve certains représentants de l'Etat ! Vous devez choisir votre camp ! Soit vous pensez qu'un certain nombre de projets sont intéressants à la fois pour l'Etat et pour la Ville de Genève, et nous cherchons des solutions. Et pour la place des Nations, vous refaites le même chemin que vous avez fait depuis quelques mois pour le Musée d'art contemporain, c'est-à-dire que vous révisez votre point de vue et que vous nous dites publiquement que vous vous êtes trompé... (Exclamations.)... et que vous allez recommander, tout à l'heure, que l'Etat participe à cette réalisation ! Sinon, vous campez sur votre position - qui n'est pas crédible !
Et si vous faites une déclaration claire à ce sujet - et non pas des slogans sur le partenariat, exprimés avec mépris - indiquant votre volonté de partenariat avec la Ville de Genève, nous donnerons un peu de crédit à votre proposition ! Or pour le moment, nous ne lui donnons bien entendu aucun crédit !
Le président. Merci, Monsieur le député. Je dois dire que je suis impressionné, car vous avez parlé sept minutes zéro seconde... (Exclamations.)Pile !
M. Bernard Lescaze (R). Jean-Jacques Rousseau disait: «On dirait que mon coeur et mon esprit n'appartiennent pas au même individu.»...
Sans être atteint de schizophrénie - comme, peut-être, d'autres - je dirai aujourd'hui que je défends avec mon esprit la position du parti radical. Celle-ci est claire; elle est nette. Elle s'était exprimée notamment par notre représentant qui avait, comme M. Weiss, refusé ce crédit pour le MAMCO, alors que, pour ma part, je m'étais abstenu.
Et, pourtant, le groupe radical persiste dans sa décision. Je ne sais pas si les poignards de M. Weiss se sont émoussés... Je suis en tout cas très surpris de constater, alors qu'on défend un rapport de minorité clair et ferme - demandant à ce Grand Conseil de refuser ce projet de loi: c'est à la page 40 - que l'on revienne sur sa position, le jour du débat, en présentant un amendement ! Y aurait-il eu des influences occultes ? (Exclamations.)Je suis très surpris, parce que ça ne me paraît pas tout à fait correct.
Le problème est double. Sur l'un, je ne dirai rien: tout le monde sait que le MAMCO a une grande réputation. On peut croire ou ne pas croire au devenir des artistes qui y sont exposés: c'est une autre question. Mon préopinant vient de le dire: l'avenir tranchera !
Le problème que nous devons résoudre est beaucoup plus simple et beaucoup plus modeste. Faut-il que l'Etat - alors même qu'il désire s'investir davantage dans la culture genevoise - aujourd'hui et maintenant, dans la structure actuelle du MAMCO, accorde une subvention pour trois ans - qui serait soumise ensuite à l'examen d'une entité indépendante, comme l'a demandé et obtenu en commission M. Rodrik - ou faut-il qu'il ait une vision plus large sur les priorités de la communauté ? Je pense qu'un jour nous aurons de très bons arguments pour plaider la cause du MAMCO. Mais alors que nous n'avons pas de budget, qu'à chaque session du Grand Conseil on nous propose de nouveaux investissements, de nouvelles dépenses, je constate qu'un parti très important, dont l'influence peut être très grande sur les finances, qui ne cesse de se plaindre du déficit et déclare que Genève connaît une crise de la dépense, nous propose aujourd'hui de voter cette subvention ! C'est une grande contradiction, mais cette contradiction est aussi le fait du Conseil d'Etat. Car celui-ci avait des moyens pour aider le MAMCO sans forcément nous proposer une subvention. Il existe dans de nombreux pays - et pas seulement au-delà de l'Atlantique - des possibilités de déductions fiscales pour les généreux donateurs, qui font régulièrement des dons en argent. A Genève, et non sans peine, nous sommes arrivés à obtenir la dation. Mais les donateurs privés ne peuvent pas faire de véritables déductions, ou de peu d'importance seulement. En tout cas c'est loin de ce qui se fait aux Etats-Unis, c'est ce qui explique pourquoi il y a des musées privés.
Nous avons tous reçu la liste des donateurs qui continuent courageusement à s'engager pour le MAMCO -à la tête de patrimoines importants, qui, certes, sont écornés par les crises boursières - mais qui pourraient faire davantage d'efforts - nous les remercions toutefois de ce qu'ils ont fait - si les dons dans le domaine artistique pouvaient faire l'objet de plus fortes déductions fiscales. Le rapporteur de majorité vient nous dire que cette subvention consiste simplement à compenser la perte occasionnée par la SECSA, Société d'exploitation du casino de Genève... Permettez-moi de vous dire, mon cher collègue - je crois, d'ailleurs, que vous en étiez un des administrateurs... (Exclamations.)- qu'il faudrait vous tourner vers ceux qui ont coulé la SECSA et qui se trouvent plutôt parmi vos amis politiques que les miens ! Mais c'est là peut-être un débat qui nous entraînerait trop loin...
Je constate également - car il a été rappelé, à juste titre, l'importance du Musée d'art et d'histoire - que chaque visiteur qui y entre coûte 50 F à la collectivité. Avec le budget que vous avez prévu pour le MAMCO, chaque visiteur qui y entrera, coûtera 230 F ! (Exclamations.)Alors, je dois quand même dire qu'il y a là, de la part de personnes qui se flattent de bonne gestion, quelque chose d'un peu curieux !
Je dirai enfin en conclusion que, pour l'instant, nous n'avons pas vu la modification des statuts de droit public. Il est certes difficile de s'opposer aujourd'hui à cet objet qui est certainement intéressant. Mais, face à l'état des finances publiques, face à l'absence complète d'indications sur ce que pourra être le prochain budget, face au refus répété de voter certains projets de lois, certaines subventions, il ne convient pas, comme sans doute le rapporteur dit de «minorité» - mais dont je ne sais pas aujourd'hui ce qu'il rapporte, parce que je ne suis pas dans sa minorité... (Rires.)- de flatter quelques amis - d'ailleurs, sans doute passagers... (Rires.)- ou de vouloir se donner le beau rôle dans des chroniques de journaux. (Rires.)
Dans ces conditions, conformément à la décision du groupe radical, je dis que nous ne pourrons accepter ni la proposition du rapporteur de majorité ni celle du rapporteur de minorité. (Applaudissements.)
Des voix. Bravo !
Le président. Merci, Monsieur le député. Mesdames et Messieurs les députés, le Bureau vous propose de clore la liste des intervenants. Sont encore inscrits: M. Brunier, M. Mouhanna, M. Catelain, M. Mettan, M. Kunz, M. Koechlin et M. Bavarel. Les rapporteurs pourront encore s'exprimer s'ils le désirent, puis le Conseil d'Etat également, et, ensuite, nous voterons. Monsieur le député Christian Brunier, vous avez la parole.
M. Christian Brunier (S). Mesdames et Messieurs les députés, je crois que le rapporteur de minorité a soulevé les deux bonnes questions...
Une voix. Eh bien, voyons !
M. Christian Brunier. La première est la suivante: sommes-nous favorables ou non au Musée d'art contemporain à Genève ? Et, si oui, l'Etat doit-il intervenir financièrement ou pas ?
Nous avons entendu un certain nombre d'opposants à ce projet de loi nous dire qu'ils étaient tout à fait favorables à l'existence d'un musée d'art moderne... Je pense que M. Lescaze est honnête, car je connais sa passion pour la culture, mais, par contre, je pense que quelques personnes de la minorité ne font pas preuve de courage aujourd'hui... Ils en ont un peu plus à la buvette et dans les couloirs du Grand Conseil, où ils ne se gênent pas pour dire que les artistes d'art moderne sont des dégénérés qui font de l'art incompréhensible et qui se moquent de tout le monde ! Mais personne n'ose avouer ici son opposition au Musée d'art moderne... (L'orateur est interpellé.)Il y en a un ! (Rires.)Ça ne m'étonne pas, cela me rassure plutôt ! Et c'est la question cruciale. En effet, il est facile de dire qu'on est passionné de culture, qu'il faut un musée d'art moderne, tout en refusant de continuer à le subventionner, ce qui va tout simplement l'empêcher d'exister - c'est l'enjeu de ce soir.
Puisque vous ne voulez pas faire un débat sur l'existence ou pas d'un tel musée - vous préférez le faire en coulisse ou à la buvette... - nous allons faire le débat sur la deuxième question, à savoir s'il faut que l'Etat intervienne financièrement ou pas.
Parmi les arguments que vous avancez, il y a la faible fréquentation... Elle est évoquée du reste à de nombreux endroits dans le rapport pour faire ressortir que ce musée d'art contemporain intéresse peu de monde... Des chiffres - qui sortent de je ne sais où - sont donnés: on parle de 6000 entrées, alors que les chiffres officiels en indiquent 13'844 pour la première année et quelque 28'000 ou 30'000 ces dernières années... Par rapport au nombre d'habitants de Genève et de la région, c'est un succès ! En effet, le musée d'art moderne de Lyon, qui est cité comme modèle et qui attire prétendument beaucoup de monde - ce grand musée est situé à nos portes, il est proche de l'autoroute et dans un bâtiment très prestigieux - attire, par rapport à la population de Lyon, moins de monde que le MAMCO. C'est important de le dire.
Le deuxième argument porte sur la définition même de la culture... En parlant de la subvention pour le MAMCO - je cite un passage du rapport de minorité, dans lequel vous définissez la culture - vous dites: «Il lui appartiendra de rendre le verdict concernant l'efficience des dépenses en faveur du MAMCO, à savoir leur rapport coût/bénéfice.» Alors, vous connaissez la passion des socialistes pour la bonne gestion - nous l'avons prouvé plusieurs fois en matière financière... (Exclamations.)Mais, là, vous dépassez le critère de «bonne gestion» pour traiter la culture comme une simple valeur boursière, comme un simple produit financier ! En fait, vous êtes totalement dans la «marchandisation» de l'art, tant décriée par certains: c'est l'antithèse de la culture !
Pour ma part, je dirai que le MAMCO joue un rôle tout à fait important, original, en matière d'art contemporain. C'est un lieu qui est ouvert sur la société, ce qui ne veut pas dire qu'il serait une sorte de supermarché de l'art, où l'on ne ferait que du business et des... «flonflons» pour attirer la haute société genevoise... C'est donc un lieu original et, d'ailleurs, la presse le reconnaît. Peut-être aurez-vous pu le lire, le 22 janvier 2004 - c'est-à-dire il y a quelques jours - dans la NZZ qui consacrait tout un article au MAMCO, mettant en exergue son côté original... Et ce n'est pas tous les jours que les Zurichois mettent en avant les réussites genevoises ! Il me semble que nous ne nous sommes justement pas assez conscients du potentiel culturel que nous avons à Genève et qu'il faut le valoriser. Le MAMCO est original dans le sens où il rassemble de nombreux d'artistes très divers: des jeunes artistes et des artistes plus renommés, ce qui crée une émulation pour la culture et l'art moderne. Je pense que le monde politique doit s'en rendre compte aujourd'hui.
C'est aussi la renaissance d'un quartier... Et je salue le rapporteur de minorité qui, avant d'être converti par les mécènes - comme quoi les mécènes apportent de l'argent mais aussi, de temps en temps, de bonnes idées au parti libéral - disait que le MAMCO avait joué un rôle très important dans la revitalisation économique et sociale d'une partie d'un quartier de Genève abandonné par ses industries, et que cela méritait reconnaissance.
Ce dossier - et nous regrettons suffisamment le manque de collaboration au niveau culturel - est un exemple de collaboration culturelle. La Ville de Genève a déjà dit qu'elle était prête à investir un million dans le musée; il en est de même des communes, qui sont prêtes à investir - des plus petites sommes, naturellement - et aussi des privés. Il me semble donc que c'est le rôle du canton également de s'engager pour permettre à ce musée d'exister et à la cellule pédagogique de continuer son activité, extrêmement intéressante pour les élèves.
Avant de conclure, j'aimerais - pour une fois - féliciter les députés de l'UDC... Après deux ans d'inaction, vous avez réussi à faire - c'est peut-être de l'art moderne ? - de la géométrie variable ! En effet, vous dites que Genève a suffisamment d'argent, que nous pouvons nous permettre de multiplier les routes - inutiles, qui créent des bouchons - ou de faire des cadeaux fiscaux aux nantis... Par contre, pour la culture, le social, les congés maternité, l'enseignement, vous dites que les caisses sont vides et que les finances de l'Etat sont en danger!
Cela s'appelle de la politique à géométrie variable, mais c'est aussi de la politique antisociale et anticulturelle ! Et vous êtes très forts en la matière !
Bref, il faut voter cette loi, avec l'amendement qui est proposé. Je comprends les conditions de l'Alliance de gauche, mais je rappelle que la majorité étant restreinte, ces conditions risquent de signer la mort de ce musée ! Avant de refuser cet amendement, il faudrait compter les voix, car, à vouloir être plus royalistes que le roi, le projet risque d'échouer. Sauvons ce musée ! Il est important pour Genève, pour la culture, qu'on aime ou qu'on n'aime pas l'art contemporain ! (Applaudissements.)
Présidence de Mme Marie-Françoise de Tassigny, première vice-présidente
La présidente. Monsieur le député, vous êtes juste dans les temps ! Sept minutes exactement ! Monsieur le député Souhail Mouhanna, vous avez la parole.
M. Souhail Mouhanna (AdG). J'ai eu l'idée d'intervenir en relisant - je l'avais déjà lu, bien sûr - le rapport de minorité de M. Weiss. Ce rapport ne m'a pas étonné du tout, parce que ce n'est pas la première fois que les positions de M. Weiss sont incohérentes - c'est le cas sur de nombreux sujets - et je vais vous donner deux exemples de ses incohérences.
Vous dites, Monsieur Weiss, que seuls les naïfs ont pu croire que le musée ne coûterait pas un centime à l'Etat, comme cela avait été promis... Pourtant, vous avez dit - vous et les groupes politiques qui êtes les ardents défenseurs du «moins d'Etat» - que la baisse d'impôts ne changerait rien, et qu'au contraire les recettes de l'Etat allaient augmenter puisque les millionnaires allaient déferler sur Genève... Nous avions dit à l'époque que c'était complètement faux, que vous alliez vider les caisses de l'Etat pour pouvoir démanteler l'Etat social ! Et l'Etat social couvre beaucoup de domaines, dont la culture !
Deuxième incohérence, Monsieur Weiss, vous dites qu'il ne s'agit pas de 1,25 million, mais de 1,25 million, plus 740 000 F pour les emplois temporaires - plus 740 000 F pour les emplois temporaires rendus impossibles... Et vous venez nous dire maintenant que vous seriez d'accord de verser une subvention de un million, mais que la Ville de Genève doit allonger les 250 000 F pour qu'il y ait équilibre entre la Ville et le canton ! Il me semble que vous n'avez pas lu les documents montrant que la Ville de Genève a investi 22 millions dans ce bâtiment ! Comment se fait-il que vous comptabilisiez ce qui vous paraît être une subvention indirecte, 740 000 F, parce que des chômeurs travailleraient en occupation temporaire au MAMCO - et que vous ne traduisiez pas en subvention indirecte ce que représente la mise à disposition de bâtiments par la Ville de Genève, qui correspond à beaucoup plus d'argent que ces quelques centaines de milliers de francs dont vous parlez ?
Troisième point que j'aimerais évoquer: vous vous étonnez d'une certaine manière, en mettant les 740 000 F, représentant le coût des «chômeurs» - entre guillemets - dans les subventions indirectes, que le chômage coûte de l'argent... Oui, Monsieur Weiss, le chômage coûte de l'argent ! Et c'est d'autant plus révoltant que l'on constate aujourd'hui que les deux grandes banques de la place réalisent des bénéfices nets de plus de onze milliards... (L'orateur est interpellé.)Mais, heureusement ! Heureusement, pour vous, oui, bien sûr ! ... onze milliards de bénéfices nets, et ces banques suppriment des milliers d'emplois ! Les chômeurs, qui sont précisément le résultat de ces suppressions d'emplois, figurent comme des coûts à la charge des collectivités publiques, collectivités publiques que vous voulez pourtant étrangler financièrement ! Pour vous étonner ensuite de ce que ces collectivités publiques ne peuvent pas assumer leurs responsabilités, et vis-à-vis des chômeurs et vis-à-vis d'autres catégories de personnes...
Je voudrais également vous dire ceci: lorsque vous prétendez que le MAMCO n'est pas quelque chose de très important et que, par ailleurs, vous avez toujours ces mots à la bouche: «le rayonnement de Genève», j'ai l'impression que le seul rayonnement qui vous convienne, Monsieur Weiss, c'est le rayonnement virtuel ou aux rayons X d'un certain nombre de lingots dans les coffres des banques... C'est la seule chose qui vous intéresse ! Evidemment que nous sommes pour un autre type de rayonnement: pour une Genève véritablement rayonnante sur le plan culturel, sur le plan social, et nous voudrions qu'elle soit véritablement un exemple en la matière.
Derrière votre refus d'accepter cette subvention pour le MAMCO se cache une volonté de supprimer des emplois, une volonté d'empêcher Genève de jouer le rôle qui doit être le sien, de par sa place sur le plan international. En tout cas, vous prenez une très grave responsabilité, que nous dénonçons aujourd'hui ! Nous disons qu'il faut absolument que ce crédit soit voté et que le MAMCO soit transformé en fondation de droit public, tel que cela a été accepté par la commission, par le Conseil d'administration du MAMCO et par les mécènes, M. Darier en particulier. Tout le monde était d'accord avec cette proposition, et je pense que cela permettrait au MAMCO d'avoir des structures qui lui permettent de fonctionner dans les meilleures conditions possibles, en toute transparence.
Présidence de M. Pascal Pétroz, président
M. Gilbert Catelain (UDC). Je vois que le discours s'est un peu enflammé au cours du débat...
On se rend compte que le MAMCO a vécu jusqu'à maintenant essentiellement grâce à des recettes de nature privée, puisqu'en 2001, d'après ce que nous dit le rapport de la fiduciaire, les subventions se montaient à 180 000 F. Mais le rapport de l'organe de révision, daté du 8 janvier 2003 est éloquent, puisqu'il nous apprend les choses suivantes: d'une part, que la masse salariale est extrêmement élevée - ce sont leurs termes - à savoir 1,384 million. Ce montant divisé par le nombre d'entrées correspond à 40 F par personne, uniquement pour la masse salariale !
La rémunération de la direction est également jugée extrêmement coûteuse: plus de 236 000 F par an ! Une partie des dépenses n'est pas justifiée par des factures... L'impression générale est la suivante, je cite: «Est-il nécessaire d'avoir une pareille infrastructure pour faire trois vernissages par année (avec, certes, plusieurs artistes par vernissage) et pour organiser les visites et surveillance pendant six après-midi par semaine ?». Voilà l'impression générale de l'organe de révision qui figure dans le rapport.
On nous dit également que des oeuvres ont été achetées entre 1994 et 2001, pour un montant de 712 000 F... Je suis heureux d'apprendre de l'Alliance de gauche que ces oeuvres d'art valent maintenant des millions... Tant mieux ! On pourrait imaginer en revendre une partie pour financer à long terme l'existence du MAMCO... Apparemment, ce n'est pas le cas ! (Commentaires.)
En terme de fréquentation, on constate que le rayonnement de Genève ne transparaît malheureusement pas dans les chiffres... Prenons la fréquentation la plus faible, celle d'octobre 2001: 36 entrées payantes ! Octobre 2002: 22 entrées payantes ! C'est une dégradation. Et sur l'année, c'est guère mieux: 28'000 mille entrées tout compris, ce qui n'est pas énorme... Il y a environ 6000 à 7000 entrées payantes, ce qui fait grosso modo moins de 20 entrées payantes par jour, à 11 F l'entrée - selon les chiffres qui nous sont fournis... Cela ne paie même pas le quart des frais de personnel ! Ce bilan effectué par l'organe de révision montre en effet qu'il y a un gros problème de financement, ce qui conduit le MAMCO à se tourner vers l'Etat pour assurer le complément à hauteur de 1,25 million par année.
En clair, quand vous dites que ce musée a une portée d'intérêt général, ce n'est pas prouvé par les chiffres... On ne peut pas dire d'un musée sur la place de Genève qui a une moyenne de septante visiteurs par jour qu'il est d'intérêt général ! Et je suis étonné, Monsieur Brunier, vous qui défendez la classe populaire, qui se débat dans les difficultés économiques, qui n'arrive pas à payer sa prime d'assurance-maladie et son abonnement TPG, que le MAMCO soit une priorité pour vous ! J'ai de la peine à comprendre ! Je suis du reste persuadé que, si l'on faisait un référendum à ce sujet, la réponse serait négative.
Nous nous donnez des leçons par rapport à la fiscalité... Je vous rappelle que les votations de ce week-end montrent que 50% des personnes de vos partis sont favorables à une baisse des impôts. (Exclamations. Applaudissements.)Vous feriez donc bien de tenir compte des messages de votre électorat ! Vous ne fixez pas les priorités là où vous devez le faire ! (Exclamations.)Avec vos arguments, nous devrions financer le FC-Servette, qui en a bien besoin ! Mais lui, au moins, attire plus de spectateurs... (Exclamations.)... que le MAMCO ! (Applaudissements.)
Par conséquent, eu égard au faible nombre d'entrées payantes, à savoir six à sept mille par an, le groupe UDC - c'est évident - ne votera pas cette subvention de 1,25 million par an. Je crois que la République a bien mieux à faire, et je suis persuadé qu'en changeant la direction qui est à la tête de ce musée et le style des oeuvres exposées, peut-être que la fréquentation - notamment les entrées payantes - serait plus élevée.
Une voix. Bravo !
Le président. Merci, Monsieur le député. En tout cas, vous avez apparemment fait plaisir au président du Servette, qui s'est manifesté bruyamment tout à l'heure.
M. Guy Mettan (PDC). Je vais laisser les déclarations d'amour ou de haine pour le MAMCO à d'autres... Car nous en avons déjà assez entendu, ce soir !
Je voudrais simplement vous dire que, si le parti démocrate-chrétien soutient le MAMCO, c'est pour une raison qui a été peu évoquée ce soir, à savoir que l'art contemporain est un vecteur essentiel de la créativité et de l'innovation. Dans ce sens-là, pour une ville comme la nôtre, que je trouve personnellement trop tournée vers le passé - elle a des musées, certes tout à fait intéressants, mais ils regardent le passé et non l'avenir - je pense que nous nous devons - tous, si possible - ce soir, de soutenir ce musée tourné vers le présent et l'avenir, et qui stimule ainsi la créativité et l'innovation sans lesquelles nous n'avons pas d'avenir - Monsieur Lescaze, vous le savez comme moi !
Nous aurions souhaité faire plus pour le MAMCO, parce que nous pensons que ce musée le mérite - il est vrai que l'on pourrait toujours faire plus pour les oeuvres culturelles - mais, étant donné l'état des finances publiques, comme cela a été rappelé, nous nous rallierons à la proposition d'amendement de M. Weiss, qui a quand même le mérite d'assurer la survie du MAMCO, ce qui est une condition essentielle pour nous. En effet, on ne pourra pas nous reprocher de mettre le MAMCO en péril parce qu'on réduit la subvention de 250 000 F ! Pour nous, c'est tout ce qui compte ce soir.
C'est la raison pour laquelle je vous demande de voter cet amendement. Et je me tourne là vers la gauche qui hésite un peu à voter cet amendement - car je crois que la position des partis est en train de tourner - parce que, si vous ne le faites pas, le MAMCO risque bien de repartir ce soir les mains vides, sans un franc en poche, vu l'opposition de l'UDC et des radicaux.
Je vous demande donc non pas de voter l'amendement proposé par M. Weiss - car je comprends que vous ne puissez pas faire certaines choses - mais de voter l'amendement proposé par Patrick Schmied... (Rires.)... qui est cosignataire de cet amendement... (Commentaires.)... et qui, à ce titre, a fait oeuvre pie...
Je vous invite donc, comme moi, à voter l'amendement de Patrick Schmied ! (Rires et applaudissements.)
M. Pierre Kunz (R). Je ne suis pas, Monsieur Brunier, passionné d'art moderne... Probablement, Monsieur Mettan, parce que j'ai d'autres manières d'imaginer l'avenir !
Quoi qu'il en soit, et comme Bernard Lescaze l'a souligné, pas plus que moi le groupe radical ne s'érige en juge d'un MAMCO qui serait inutile ou élitiste, trop avant-gardiste, ou, encore, qui serait «le musée de trop»... Non, notre position ne découle aucunement d'un jugement de valeur ! Elle ne découle même pas - elle pourrait ! - du constat que la gestion du MAMCO est pour le moins discutable...
Mesdames et Messieurs, une évidence s'impose ou devrait s'imposer à tous: Genève n'a tout simplement plus les moyens de la générosité, je devrais dire la pseudo-générosité, puisqu'il est très facile de dépenser l'argent des autres, de nos concitoyens, en l'occurrence... La générosité affichée par le Conseil d'Etat - M. Beer en particulier - et certains députés. Et disons-le clairement: dans ce contexte, les radicaux ne sont pas vraiment étonnés par l'attitude des Verts et des socialistes. Par contre, ils s'étonnent de la position de leurs collègues de l'Entente, eux qui ont refusé le budget 2004 en exigeant des économies drastiques - des économes drastiques !
Mesdames et Messieurs les députés de l'Entente, où sont passées ces vertueuses exigences ? Question d'autant plus pertinente, que, comme l'a rappelé M. Catelain, nous ne parlons pas ce soir du sauvetage du Servette, un club sportif autrement imprégné de Genève et autrement enraciné dans Genève ! (Exclamations.)
Mesdames et Messieurs, les radicaux veulent en priorité retrouver l'équilibre des comptes et de la gestion de l'Etat et, pour cela, parce qu'il n'existe aucune autre méthode pour y arriver, il faut réduire les dépenses publiques et, surtout, ne pas engager de nouvelles dépenses, sauf si elles sont manifestement indispensables. Or, il est clair - et il faut le dire en toute honnêté, sans hypocrisie - le MAMCO ne s'inscrit pas dans la liste des dépenses nouvelles prioritaires ! Nous serons prêts, le moment venu, à reprendre ce dossier, mais, pour le moment, c'est impossible.
Et, dans l'intervalle, nous vous invitons - en particulier les députés de l'Entente qui ne veulent pas retourner leur veste... (Rires.)... à refuser le projet de loi, y compris l'amendement Schmied-Weiss ou Weiss-Schmied. (Applaudissements.)
Le président. Monsieur Koechlin, vous avez la parole.
M. Bernard Lescaze. Vingt minutes, maximum: c'est un grand débat ! (Rires.)
Le président. Monsieur Lescaze, s'il vous plaît ! Laissez parler M. le député Koechlin !
M. René Koechlin (L). Si M. Lescaze me laisse parler... Je serai plus bref !
René Huyghe, célèbre conférencier et critique d'art, disait, lors d'un exposé, que selon lui l'art moderne s'était interrompu aux dadaïstes... Je rappelle, pour ceux qui l'ignoreraient, que les dadaïstes ont sévi entre les deux guerres mondiales.
Eh bien, n'en déplaise à René Huyghe, l'art contemporain, lui, a continué, et il est allé bien au-delà du dadaïsme ! En ce qui me concerne, je m'en félicite, parce que je suis un passionné d'art contemporain. D'art, en général, mais, plus particulièrement, d'art contemporain. Maints artistes sont venus contredire la prédiction de René Huyghe, puisqu'on a vu s'épanouir les Rothko, les de Kooning, Nicolas de Staël, toute la créativité de Picasso - qui, lui, a continué, naturellement - les Gerhard Richter - plus récemment - les Liechtenstein, Hans Erni, Soulages - j'en passe des centaines. Et plus près de nous, ici, dans notre bonne ville de Genève, les Manuel Torres - dont vous pouvez admirer les sculptures un peu partout dans le canton - les Presset, Nicoidsky - qui a fait la Fontaine des Charmilles - Milshtein, Tinguely, Niki de Saint Phalle, Roger Pfund - que vous connaissez fort bien et avec lequel je m'amuse beaucoup en ce moment à dresser vos portraits... Mesdames et Messieurs les députés, toutes ces personnes ont démontré que l'art contemporain est bien vivant et qu'il produit des fruits tout à fait remarquables.
Depuis des décennies, votre serviteur aime l'art moderne, le soutient. Il a suivi attentivement la progression d'abord de l'AMCO, puis du MAMCO - le musée dont nous parlons ce soir. Eh, oui, je l'avoue humblement, j'aime ce musée et je le soutiens. Il possède une collection remarquable d'oeuvres contemporaines. Je déplore toutefois une chose - et là je m'adresse à ceux qui le régissent - c'est que trop de ces oeuvres, qui font partie de la collection du musée, ne sont pas présentées au public. Alors cela explique peut-être - peut-être, je n'en suis pas certain - la comptabilité des entrées payantes qui est un peu faible mais qui, à mon goût, demeure sordide... Pardon à mon voisin ! Quelle idée saugrenue de comparer le nombre de ces entrées à celles du Servette football club... (Rires.)Que j'aime aussi - j'étais moi-même «Servettien» dans ma jeunesse, et j'ai toujours été un passionné de football... Je n'aurais tout de même pas l'idée de comparer la fréquentation d'un musée d'art moderne avec celle d'un stade de football !
Une voix. Et pourquoi pas !
M. René Koechlin. Alors, pourquoi ne pas les comparer avec la fréquentation du Salon de l'auto ! (Le président agite la cloche.)Parce que le Salon de l'auto, Mesdames et Messieurs, détient tous les records d'entrées !
Une voix. C'est l'art automobile !
M. René Koechlin. En effet, en dix jours... (Brouhaha.)
Le président. Monsieur Barrillier, s'il vous plaît !
M. René Koechlin. ...il y a eu 700 000 entrées !
Une voix. Payantes !
M. René Koechlin. En ce qui me concerne, permettez-moi de ne pas comparer la plus belle des voitures à aucune oeuvre d'art contemporain ! Ce sont deux choses bien distinctes, et je maintiens cette distinction, ce qui me semble plus sain.
Je suis très surpris par la position paradoxale de notre collègue Lescaze. Il plaide pour le budget du Musée d'art moderne, le couvrant de compliments, mais il refuse de le soutenir par l'une ou l'autre des subventions proposées... Je ne le comprends vraiment pas ! Je suis trop idiot - peut-être - mais je n'ai pas très bien saisi, Monsieur Lescaze, quel était votre plaidoyer ? Il me parait totalement paradoxal ! Tant pis ! Chacun dit ce qu'il pense, et moi aussi !
Toute ville, Mesdames et Messieurs, qui a des prétentions culturelles possède un musée d'art moderne. Et tous ces musées, sans exception, méritent que la collectivité les soutienne. Parce que, bien souvent, ils en ont besoin. Ils sont un témoignage extrêmement important de la culture contemporaine, non seulement pour nous-mêmes mais pour notre descendance, et, pour cela, je pense que ce genre d'institution mérite notre soutien absolu et inconditionnel.
Je ne vous citerai pas tous les musées d'art moderne; je me suis préoccupé de certains d'entre eux, dont le «Momart», qui avait aussi des difficultés financières. J'ai eu l'occasion d'assister à une conversation entre mon ancien boss et Nelson Rockfeller, alors gouverneur de l'Etat de New-York, qui soutenaient tous deux le «Momart» et qui disaient: « I'm fed up !», ce qui signifie: «J'en ai assez» de soutenir ce musée et de devoir le subventionner chaque année... C'étaient des privés ! Et puis, ils ont eu des bonnes idées, notamment le frère de Nelson Rockfeller - David Rockfeller, qui était le patron de la Chase Manhattan Bank - en particulier, qui eut l'idée de développer les restaurants et les boutiques au rez-de-chaussée, ce qui fait que, dix ans plus tard, le Momart était the only museum in the world which was making benefits... (Exclamations.)Il faut donc connaître quelques «trucs»... Je donne ainsi des idées à la direction du Musée d'art moderne... (Exclamations.) ... car, en développant certains secteurs, elle n'aurait peut-être plus besoin, d'ici quelques années, de venir quémander notre soutien financier...
Mais, pour l'heure, Mesdames et Messieurs, je vous invite à voter dans l'enthousiasme - et pour l'art, au moins - la proposition de MM. Weiss et Schmied... (Rires.)Je ne ferai pas de distinction entre eux, si vous me le permettez ! (Applaudissements.)
M. Christian Bavarel (Ve). Je voulais revenir sur deux ou trois choses qui ont été dites ce soir...
Je voudrais tout d'abord rappeler à M. Lescaze que, quand il va au Grand théâtre, la place est subventionnée par la Ville de Genève à raison de 200 F environ...
Je rappelle également à M . Mouhanna que le Musée d'art moderne - le MAMCO - est d'accord de modifier son statut pour passer en fondation de droit public.
Il faut surtout s'intéresser à la progression du nombre des entrées et non au nombre d'entrées en lui-même... En outre, Monsieur Catelain, si on ne décompte pas de jours pour la période des vacances, on doit tout de même décompter les jours fériés. Et on arrive, à ce moment-là, à 115 quinze entrées par jour et non pas à 70. Ce n'est qu'un probléme arithmétique, mais cela méritait d'être souligné.
J'ai aussi été surpris de voir que les radicaux étaient opposés à la recherche et à la formation qu'ils ne veulent pas financer... En effet, le MAMCO n'est pas simplement un musée: il est un lieu de recherche ! (Commentaires.)Et nous devons comprendre le monde dans lequel nous vivons; nous devons comprendre l'avenir ! Il faut financer la formation... Il me semblait que, même dans les thèses les plus libérales, la formation et la recherche faisaient partie des domaines que l'Etat devait soutenir, d'autant que des privés sont aussi d'accord de les soutenir. J'apprend aujourd'hui que le parti radical considère que la formation et la recherche ne font pas partie des domaines que l'Etat doit soutenir de façon primordiale... (Remarques.)
Je conclus en disant aux députés qui tentent de rester raisonnables par rapport au MAMCO que nous avons un très bel outil à la disposition de toute la population et que nous avons le devoir de le soutenir, pour faire en sorte qu'il survive. (Applaudissements.)
M. Pierre Weiss (L), rapporteur de minorité. A l'issue de ce débat qui a été globalement serein, j'aimerais faire deux types de remarques. D'abord des remarques générales, puis des remarques par rapport à des propos tenus par tel ou tel de nos collègues.
Première remarque générale: je relève que le projet de loi qui est soumis ce soir à notre attention et à notre décision a été examiné non pas par une commission des affaires culturelles - comme cela aurait pu être le cas - mais par la commission des finances. Nous n'avons donc pas eu en commission des finances, même si les députés généralistes que nous sommes se sont en majorité exprimés sur la culture ce soir, un traitement préférentiellement culturel; il a été d'abord financier.
Je rappelle à cet égard, pour ceux qui douteraient de la volonté de rigueur qui nous anime - je pense en particulier aux membres de l'UDC - que le projet initial prévoyait quatre fois 1,25 million. Nous sommes arrivés en commission à deux fois 1,25 million, et nous proposons ce soir deux fois un million. En d'autres termes, passant de 5 à 2 millions, nous avons exprimé clairement et nettement notre volonté de rigueur financière. Une volonté de rigueur qui s'applique au secteur de la culture, qui ne doit donc pas l'exclure de certains sacrifices en ces temps difficiles, mais qui ne doit pas, non plus, la conduire à une extinction de ses activités, parce que serait une réaction disproportionnée.
Deuxième remarque générale: dans cette affaire, nous avons, les uns et les autres, pu prendre en considération la complexité de la situation que connaît le MAMCO, à la fois du fait que la décision a été procrastinée en quelque sorte - on ne doit pas le nier - mais aussi du fait que les éléments comptables qui ont été soumis à notre attention en commission n'étaient pas tous suffisamment clairs - ils ont d'ailleurs dû être complétés. J'en profite pour remercier la direction du MAMCO qui m'a fourni des éléments particulièrement clairs pour mon rapport de minorité, y compris les chiffres de fréquentation qui se trouvent à la page 44, notamment le nombre des entrées payantes. On dénombre quelque 6000 visiteurs payants, Monsieur Brunier, et non pas 28 000, comme vous le dites... Ce dernier chiffre concerne l'ensemble des visiteurs, mais il faut remarquer ici que, si le nombre des visiteurs payants est stable, celui des visiteurs non payants - majoritairement des élèves - est en forte augmentation. Ce qui, à terme, je crois - vous me m'en voudrez pas de le dire - constitue un excellent investissement.
Dernière remarque générale: dans cette situation, nous pouvons adopter l'une des trois attitudes possibles. Se ranger dans les rangs des nihilistes - ceux qui refusent tout simplement l'existence de ce musée - des absolutistes - ceux qui veulent l'intégralité du crédit demandé, mais qui ont évolué puisqu'ils ont déjà accepté de passer d'un crédit sur quatre ans à un crédit sur deux ans - et puis, entre les deux, de ceux que j'appellerai les optimalistes - ceux qui essayent de trouver le point optimum entre les possibilités financières de notre République et le besoin de conserver cette institution. Et c'est à cette tendance, vous l'avez bien compris, que j'essaie de m'accrocher, avec probablement un sens des nuances qui aura échappé à M. Grobet...
Je passe maintenant aux remarques particulières. Mme Wenger n'a pas - probablement parce qu'il y avait un sens elliptique dans la proposition d'amendement soumise à l'attention de chacun d'entre nous - remarqué que la diminution du crédit pour les deux années 2003 et 2004 à un million ne touchait nullement la Cellule pédagogique. Mais je crois que la chose a pu être rétablie, et elle s'en est rendu compte.
M. Grobet, qui se promène tel un prédicateur avec sa Bible en main... (Rires.)
M. Christian Grobet. C'est la «bible rouge» ! (Rires.)
M. Pierre Weiss. Je sais bien que dans votre cas la Bible est plutôt rouge que d'une couleur plus traditionnelle !
Je rappellerai que M. Grobet posait comme condition la fondation de droit public - si j'ai bien compris - à mon entrée en son paradis...
M. Christian Grobet. Je retourne à ma place, pour que vous n'attrapiez pas un torticolis...
M. Pierre Weiss. Merci, Monsieur ! Le statut de fondation de droit public a été accepté par la majorité de la commission, et il n'est donc nullement question de remettre cette décision en cause.
Pour ce qui est de sa comparaison avec d'autres positions - avec son sens de la polémique qu'il pratique à merveille - je crois qu'il n'a pas particulièrement bien saisi le fait que, si nous nous opposions actuellement au projet de la place des Nations, c'est parce que la Ville avait empêché en son temps d'autres réalisations ambitieuses pour cette même place... (L'orateur est interpellé.)Plus précisément certaines associations que M. Grobet connaît particulièrement bien ! (Exclamations. Le président agite la cloche.)
J'aimerais encore ajouter brièvement à l'intention de M. Mouhanna que la prise en considération des salaires réels m'a effectivement amené à augmenter les montants pour les emplois temporaires, parce que ceux-ci, en réalité, ne coûtent pas au MAMCO ce que coûteraient des collaborateurs payés au prix du marché. Je crois qu'il est inutile, au demeurant, de le prier de ne pas tout mélanger à ce sujet. (Brouhaha. Le président agite la cloche.)
Encore deux points pour terminer. La demande présentée par M. Catelain de renvoyer le directeur montre que non seulement il ne connaît pas le dossier, mais il ne connaît pas non plus le directeur du MAMCO ! Sinon, il saurait quels sont son enthousiasme et ses compétences !
Enfin, j'aimerais dire à M. Koechlin que, bien qu'amateur d'art moderne, je crains que les portraits des députés qui seront exécutés, dans un sens contemporain, par M. Pfund ne déçoivent ou ne fassent rire certains...
M. Claude Blanc. Rira bien qui rira le dernier !
M. Alberto Velasco (S), rapporteur de majorité. Je dirai tout d'abord que la Ville de Genève a versé un million pour 2003 et a officiellement annoncé qu'elle s'engageait à verser un million pour 2004. Cela est donc clair.
En ce qui nous concerne, nous nous rallierons à l'amendement qui nous est proposé, malheureusement - malheureusement, parce que je regrette que nous soyons arrivés à ce marchandage... Mais, c'est ainsi: il vaut mieux cela que rien du tout !
Monsieur Lescaze, votre discours est schizophrénique, mais cela est probablement dû à la mission que votre parti vous a déléguée... Il est vraiment surprenant venant de votre part. On sait en effet votre goût pour l'art, pour ce musée: vous nous dites tout le bien que vous en pensez, qu'il est nécessaire, et, finalement, vous vous opposez au crédit qui doit lui être alloué... C'est assez incroyable !
Et vous proposez une solution pour le moins assez insolite: que les mécènes puissent bénéficier de déductions fiscales lorsqu'ils font des dons, alors qu'ils sont toujours d'accord de verser 1,5 million - ils ne se sont pas désengagés - et ceci pour les quatre années à venir ! Eh bien, voyez-vous, Monsieur Lescaze, je préfère l'impôt républicain pour tous, même pour les mécènes, et que l'Etat, à travers ces impôts républicains, participe au fonctionnement de ce musée ! De cette manière, j'y participe aussi un peu.
En ce qui me concerne - comme mon groupe - je me rallierai à la proposition d'amendement Weiss-Schmied ou Schmied-Weiss - comme vous voulez - et je vous invite, Mesdames et Messieurs les députés, à faire de même.
M. Charles Beer, conseiller d'Etat. Il me revient d'abord de faire un rapide historique. Je tiens à vous rassurer. Il ne s'agit pas de l'historique du MAMCO ou du travail en commission, mais, plus modestement, du travail en plénière, ou, plus précisément, la difficulté de commencer le travail en plénière, puisqu'il aura fallu pratiquement neuf mois pour aborder ce point à l'ordre du jour. Est-ce pour le meilleur, est-ce pour le pire ? Nous le saurons à l'issue du vote.
Quoi qu'il en soit, j'aimerais relever à cette occasion quelques points qui me paraissent indispensables par rapport au MAMCO.
Premier point - cela a été relevé à juste titre par un certain nombre de députées et de députés, et de façon contradictoire - un musée d'art contemporain tel que celui-ci n'aurait pas pu voir le jour sans les investisseurs privés et il ne saurait survivre sans subvention de l'Etat.
Il y a donc une mixité de financement, une mixité d'audace et d'engagement, que devrait reprendre le contrat de prestations nous liant au MAMCO. La Ville, le canton de Genève, mais également les privés devraient continuer à s'engager dans le MAMCO: c'est quelque chose de raisonnable et de souhaitable.
Deuxième point important, Mesdames et Messieurs les députées et députés, c'est que Genève est une ville internationale qui mérite d'initier un certain nombre d'aventures, comme c'est le cas ici avec le MAMCO, et pas seulement de cultiver par tradition, quelques arts transmis de décennie en décennie.
Dernier point, il convient de mettre en phase le rayonnement local et international de Genève. A cet égard, je soulignerai que le MAMCO fait bénéficier son quartier - et aussi le quartier des Pâquis, avec les nombreuses galeries qui s'y sont ouvertes - d'initiatives, qui montrent à quel point ce musée est ancré localement et pas seulement à l'étranger.
Mesdames et Messieurs les députées et députés, sommes-nous véritablement en train de passer une heure à demie à discuter de la couverture financière du MAMCO, qui a d'ores et déjà été octroyée ? En effet, il faut bien le dire, la commission des finances, en prenant des décisions pour 2003 et 2004, a déjà autorisé le Conseil d'Etat à le financer.
J'aimerais dire aujourd'hui que si le Conseil d'Etat se contente de cette décision - c'est-à-dire une révision à la baisse dans la durée et dans le montant - c'est tout simplement parce qu'elle sauvegarde l'essentiel. Elle montre à quel point le Grand Conseil est attaché à un musée d'art contemporain. Elle montre également à quel point le Grand Conseil est attaché à l'existence d'une cellule pédagogique, qui permette des ponts entre l'école et la culture. Elle montre enfin à quel point il est profitable d'avoir eu ce type de discussion, de manière à pouvoir revenir demain pour financer, dans la durée, le Musée d'art contemporain qui mérite notre soutien.
Qu'il me soit permis ici de rendre hommage à toutes celles et ceux qui se sont engagés pour le succès de ce musée, principalement son Conseil de fondation et son directeur, Christian Bernard, qui a su conjuguer travail et talent au profit de la Genève internationale et de la Genève locale.
Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, je vous soumets la prise en considération de ce projet de loi au moyen du vote électronique. Le vote est lancé.
Mis aux voix, ce projet est adopté en premier débat par 65 oui contre 7 non et 3 abstentions.
Deuxième débat
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, nous sommes saisis de deux amendements dont un a déjà été développé tout à l'heure par M. Pierre Weiss, rapporteur de minorité. Le second est proposé par M. Bernard Lescaze, à qui je donne la parole.
M. Bernard Lescaze (R). Le but de mon amendement est de mettre en harmonie, indépendamment du chiffre qui vous est présenté par M. Weiss, le titre avec le reste de la loi, parce que je crois que cela a échappé à beaucoup de gens. La loi est claire: il s'agit d'un crédit pour 2003 et 2004 et la loi parle d'un crédit de fonctionnement de... - je laisse exprès le chiffre en blanc - en 2003, 2004, 2005 et 2006. Il s'agit donc bien, conformément à ce qu'ont dit et M. Velasco et M. Weiss, de laisser seulement 2003 et 2004.
J'en profite - je ne vais répliquer longuement à M. le député Koechlin, qui a parlé un peu plus que le temps de parole octroyé pour un projet de loi - pour lui rappeler, car il a fait étalage d'une grande culture, que le mouvement dadaïste est né à Zurich en 1916, avant la fin de la Première Guerre mondiale. Parmi les réalisations de ce mouvement, Marcel Duchamp, dans les années 20, présentait «l'Urinoir», qui était une sculpture... (Exclamations.)Et, aujourd'hui, vous pouvez admirer au Musée d'art moderne et contemporain une petite boîte de conserve, avec l'étiquette: «Merda d'artista»- oeuvre de Piero Manzoni de 1961 - qui est certainement dans la droite ligne de Duchamp...
Cela étant, le problème - et je réponds pour vous expliquer pourquoi ma position n'est pas paradoxale - n'est pas d'être pour ou contre l'art contemporain. Nous sommes de notre temps. Nous vivons en 2004. Nous sommes forcément, d'une manière ou d'une autre, baignés dans l'art de notre temps. Je vous félicite, Monsieur le député, d'acheter de l'art contemporain avec vos deniers privés. Dans une mesure bien moindre - parce que je n'ai sans doute pas vos moyens - je le fais aussi. Mais c'est ma vie privée ! Comme c'est la vôtre, et il n'y a pas à en faire étalage ici ! Le problème est aujourd'hui de savoir si nous avons les moyens, la volonté, de soutenir une nouvelle institution culturelle, et je crois que le groupe radical, par la voix de M. Kunz et par la mienne, a très clairement montré une position cohérente, et qui est cohérente sur toute la vie publique. Ce qui m'inquiète aujourd'hui, c'est de voir que, parfois, un parti de droite solide comme le parti libéral, vacille sur certains de ses principes ! (Exclamations et applaudissements. Le président agite la cloche.)
Le président. S'il vous plaît ! Voilà, voilà, voilà... Calmez-vous ! Tout va bien ! Respirez un bon coup ! Je crois que nous allons pouvoir continuer... Monsieur Mouhanna, vous avez la parole.
M. Souhail Mouhanna (AdG). Je ne vais pas citer une liste d'artistes contemporains et moins contemporains pour faire étalage de ce que certains pourraient appeler la culture... Pour moi, la culture, c'est d'abord une façon d'être, et, ensuite, elle doit conduire à l'humilité, que certains - il faut bien le dire - n'ont pas...
Je voudrais juste intervenir sur l'amendement de M. Weiss. Tout à l'heure, ce dernier a dit que la diminution de la subvention de 250 000 F avait pour but d'inciter la Ville à verser un complément à sa subvention initiale. Je rappelle qu'en Ville de Genève les camarades de parti de M. Weiss - et des membres des partis de l'Entente - invoquent ce qu'ils appellent «l'énorme dette de la Ville de Genève» pour dire qu'il faut diminuer les dépenses. Ils demandent simultanément, comme au niveau cantonal, une baisse des impôts, des centimes additionnels. Et maintenant, leurs camarades cantonaux disent que c'est à la Ville de verser ces 250 000 F ! C'est une incohérence de plus !
C'est la raison pour laquelle j'appelle à rejeter l'amendement de M. Weiss et à voter le projet de loi tel qu'il est issu des travaux de la commission.
Le président. Nous sommes saisis de deux amendements. Je vous propose de voter d'abord l'amendement présenté par M. Lescaze. Je viens de le recevoir, c'est pourquoi je n'ai pas encore pu vous le faire distribuer. Mais M. Lescaze vous l'a expliqué, il est extrêmement simple: il s'agit de biffer les termes «2005 et 2006» dans le titre, de manière à l'harmoniser avec l'article 1. Je vous soumets cette proposition d'amendement à main levée.
Mis aux voix, cet amendement est adopté.
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, nous allons maintenant voter sur l'amendement de M. Pierre Weiss et Patrick Schmied... (Brouhaha. Le président agite la cloche.)S'il vous plaît, Messieurs les radicaux, soyez attentifs ! Soyez attentifs, sinon je vais vous faire voter à l'envers, pour voir si vous suivez ! (Exclamations.)Je suis un petit plaisantin... (Commentaires.)Je sais...
Bref, je vous soumets la proposition d'amendement de MM. Pierre Weiss et Patrick Schmied, consistant à remplacer dans le titre et le préambule le montant de 1 250 000 F par 1 000 000 F, ce qui donne: «Projet de loi ouvrant un crédit de fonctionnement de 1 000 000 F en 2003 et 2004 au titre de subvention cantonale annuelle pour la Fondation du musée d'art moderne et contemporain». Nous allons procéder au moyen du vote électronique. Le vote est lancé.
Mis aux voix, cet amendement est adopté par 46 oui contre 16 non et 17 abstentions.
Mis aux voix, le titre ainsi amendé et le préambule sont adoptés.
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, à l'article 1, nous devons, pour la bonne règle, voter également sur la modification du montant, proposée par l'amendement de MM. Weiss et Schmied, ce qui donne: «Une subvention annuelle de 1 000 000 F est accordée à la Fondation du musée d'art moderne et contemporain en 2003 et 2004 au titre de subvention cantonale de fonctionnement...». Nous procédons au moyen du vote électronique. Le vote est lancé.
Mis aux voix, cet amendement est adopté par 48 oui contre 8 non et 27 abstentions.
Mis aux voix, l'article 1 ainsi amendé est adopté.
Mis aux voix, l'article 2 est adopté.
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, nous sommes saisis d'un amendement de MM. Weiss et Schmied à l'article 3. Il consiste à remplacer le montant de 1 000 000 F par 750 000 F, n'est-ce pas, Monsieur le rapporteur de minorité ? Très bien.
Le voici: «- accorder à la Fondation du musée d'art moderne et contemporain le soutien financier nécessaire au fonctionnement et au développement du Musée d'art moderne et contemporain (750 000 F);...». Nous procédons au moyen du vote électronique. Le vote est lancé.
Mis aux voix, cet amendement est adopté par 44 oui contre 16 non et 22 abstentions.
Mis aux voix, l'article 3 ainsi amendé est adopté.
Mis aux voix, l'article 4 est adopté, de même que l'article 5.
Troisième débat
La loi 8865 est adoptée article par article en troisième débat.
Mise aux voix, la loi 8865 est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 61 oui contre 12 non et 12 abstentions.
Débat
Mme Jocelyne Haller (AdG). Nous connaissons déjà, pour la majeure partie, l'effet que les réductions des subventions fédérales et cantonales vont exercer sur les institutions locales et sur leur fonctionnement.
En revanche, il est un aspect mal connu: celui que propose de mettre en exergue la motion 1564. Il s'agit de l'entrave que constituent ces restrictions budgétaires à l'ouverture de places de stage pour la HES travail social... (Brouhaha. Le président agite la cloche.)
Le président. Ne vous laissez pas distraire, Madame la députée ! Il est vrai que l'ambiance est un peu électrique...
Mme Jocelyne Haller. J'ai beau parler fort, je n'arrive pas à couvrir le bruit que font les députés... S'ils pouvaient s'arrêter, ce serait parfait ! (Commentaires.)
Le président. S'il vous plaît, Mesdames et Messieurs les députés, laissez parler Mme Haller !
Nous allons attendre que les personnes qui souhaitent sortir de la salle le fassent... Ainsi, vous pourrez vous exprimer dans la quiétude la plus absolue, Madame la députée. (Brouhaha. Un instant s'écoule.)
Mme Jocelyne Haller. Je crois que je vais reprendre... Si vous voulez bien m'écouter...
Faut-il rappeler ici à quel point il est indispensable de disposer de professionnels formés et compétents pour répondre aux besoins de populations en difficulté ? (Brouhaha. Le président agite la cloche.)Est-il vraiment nécessaire de redire ici que, sans lieux de formation sur le terrain, sans places de stage en suffisance, la formation des travailleurs sociaux se trouvera amputée d'un de ses piliers, à savoir l'expérimentation pratique ?
Comme il est indiqué dans les considérants de cette proposition de motion, de nombreuses institutions ont d'ores et déjà annoncé devoir renoncer à recevoir des stagiaires. Il y a fort à craindre, en raison des contraintes induites par la situation budgétaire de notre canton, notamment des réductions du subventionnement OFAS, que ces désistements fassent tâche d'huile et que d'autres institutions ne renoncent à recevoir des stagiaires. Il faut savoir, de surcroît, qu'il était auparavant déjà particulièrement difficile d'assurer une place de stage pour tous les étudiants en formation...
Que faire, face à cette situation ? Tout d'abord, identifier le phénomène dans toute son ampleur afin d'y remédier adéquatement. C'est pourquoi nous, motionnaires, demandons à ce que cette question soit étudiée et, surtout, que des solutions transitoires soient mises en place en urgence, afin d'assurer le financement nécessaire au maintien de places de stage suffisantes.
Enfin, nous demandons que les options prises en faveur d'un enseignement de qualité par le truchement d'une HES-S2 se traduisent dans les faits par la garantie de financements y relatifs.
Dans cette attente, je vous remercie, Mesdames et Messieurs les députés, de bien vouloir renvoyer la motion 1564 à la commission de l'enseignement supérieur. Et je ne vous remercie qu'à moitié de votre attention ! (Applaudissements.)
Présidence de Mme Marie-Françoise de Tassigny, première vice-présidente
M. François Thion (S). Je dois dire que je n'ai pas tout à fait bien entendu tout ce que vous avez dit, Madame la députée, parce qu'il y avait un tel brouhaha dans la salle que c'était un peu difficile... Mais je crois que nous sommes d'accord...
Cette motion concerne l'Institut d'études sociales et les étudiants qui sont entrés dans une structure HES depuis la rentrée 2002 et qui vont sortir en juin 2005 avec un diplôme, d'éducateur ou d'assistant social ou d'animateur socioculturel.
Ces étudiants suivent donc à la fois des cours à l'Institut d'études sociales et des stages à l'extérieur, dans des fondations ou des institutions. Mais il se trouve qu'ils rencontrent un certain nombre de difficultés à l'heure actuelle, en raison des restrictions budgétaires, qu'elles soient fédérales ou cantonales, ce qui entraîne non seulement des coupes dans le domaine social mais aussi dans la formation des personnes qui vont y travailler... Un certain nombre d'institutions ne disposent pas des fonds sur lesquels elles comptaient au départ, et nous allons peut-être devoir renoncer à un certain nombre de places de stage.
Dans la société dans laquelle nous vivons - société de consommation, société de concurrence pour tous les salariés, société où le chômage, notamment à Genève, ne fait que croître - il y a des gagnants, mais il y a aussi des perdants... Et, à mon avis, nous aurons malheureusement de plus en plus besoin d'assistants sociaux, entre autres.
Cette motion est importante. Il faut d'abord que le Conseil d'Etat puisse faire la lumière sur cette situation. La pénurie est-elle réelle ou pas ? Je pense que oui. Il faut prendre des mesures transitoires assez rapidement pour que tous les étudiants de l'IES puissent trouver des places de stage. Et je pose la question de fond suivante au Conseil d'Etat: avons-nous les moyens d'assumer à long terme une formation HES avec des stages de qualité en alternance aux cours qui sont donnés dans les écoles ?
Le parti socialiste souhaite que cette motion soit renvoyée en commission de l'enseignement supérieur.
M. Claude Aubert (L). Je souhaite poser une question par rapport au manque de places de stage. Est-ce un problème interne aux services publics ou concerne-t-il aussi le secteur privé ? Si c'est un problème interne aux services publics, il serait en effet intéressant d'en connaître les causes.
La présidente. Madame Haller, vous avez la parole.
M. Gabriel Barrillier. Encore !
Mme Jocelyne Haller (AdG). Décidément, Monsieur Barrillier, vous êtes bien dissipé ce soir !
Je vais répondre brièvement à la question de M. Aubert, mais je pense qu'elle sera reprise plus en détail lors des travaux de la commission. Le manque de places de stage concerne effectivement le secteur public, mais aussi le secteur subventionné, et les institutions privées ont également de la peine à recevoir des stagiaires.
La présidente. Merci, Madame la députée. La parole n'étant plus demandée, cette proposition de motion est renvoyée à la commission de l'enseignement supérieur... (La présidente est interpellée par M. Muller qui conteste cette décision.)Si, bien sûr, Monsieur Muller ! (Exclamations. M. Muller interpelle la présidente.)
Soit ! Alors, Mesdames et Messieurs les députés, je vous soumets la proposition de renvoyer cette motion à la commission de l'enseignement supérieur. Le vote électronique est lancé.
Mis aux voix, le renvoi de cette proposition de motion à la commission de l'enseignement supérieur est rejeté par 26 non contre 24 oui.
La présidente. Mesdames et Messieurs les députés, nous allons maintenant voter sur la motion... Oui, excusez-moi, Monsieur Pagani, je suis suis si occupée par... Je vous donne la parole.
M. Rémy Pagani (AdG). Je dois dire que je ne comprends pas... Il me semblait que l'objectif de cette motion était d'essayer de faire le tour de la question, d'auditionner un certain nombre des milieux privés et publics concernés et de les sensibiliser aux problèmex que pose le manque de places de stage pour les assistants sociaux et les éducateurs, dont nos institutions ont tant besoin.
J'aimerais que les personnes qui ont refusé de renvoyer ce projet de motion en commission nous disent quels sont leurs objectifs ! Soit elles veulent la renvoyer directement au Conseil d'Etat - ce à quoi nous ne sommes pas opposés - mais, pour ma part, je trouverais cela peu pertinent, car celui-ci ne pourra que prendre acte... Le Conseil d'Etat améliorera les choses à son niveau, mais il ne fera ni mieux ni moins bien que nous... Soit elles veulent la refuser - ce qui serait franchement ridicule, dans la mesure où la demande est réelle. Le besoin de places de stage est manifeste pour les éducateurs et pour les assistants sociaux - c'est un domaine que je connais très bien - et ces stages font partie intrinsèque de la formation. En somme, vous nous proposez simplement de mettre cette motion à la poubelle, sous prétexte que ces places de stage ne seraient pas nécessaires... Il faudrait que les personnes qui viennent de refuser de renvoyer ce projet de motion en commission nous expliquent ce qu'il en est, parce que je ne comprends pas vraiment leur position. Merci, Madame la présidente.
Le président. Avec mes excuses encore, Monsieur le député... Il s'agit de mon baptême du feu ! Je donne la parole à M. Jean Spielmann.
M. Jean Spielmann (AdG). Il semble que le plus sage serait de renvoyer cette proposition de motion directement au Conseil d'Etat, puisque le renvoi en commission a été refusé. Celui-ci nous présentera un rapport après avoir fait le tour du problème, de manière que nous puissions ensuite prendre une décision en toute connaissance de cause.
La présidente. Merci, Monsieur le député. Je donne la parole à M. «Souela Mouena».
M. Souhail Mouhanna (AdG). Merci, Madame la présidente. Heureusement, je me reconnais quand vous prononcez mon nom.
Je m'étonne juste de ce que les députés de droite s'opposent à cette motion qui ne demande rien d'autre que ce qu'ils prônent depuis toujours, à savoir qu'il faut absolument que les personnes qui suivent une formation professionnelle puissent accomplir des stages. Je suppose que c'est uniquement une réaction négative par rapport aux noms des signataires de cette motion...
Quoi qu'il en soit, je finirai par ne plus m'étonner du tout de la position des députés de droite... Au vu de ce qui est en train de se passer au niveau des HES, ce ne sont pas seulement les places de stage qui vont manquer, il n'y aura bientôt même plus de formation dans un certain nombre de secteurs ! Et c'est peut-être ce que souhaite la droite... Nous, nous voulons défendre la formation professionnelle ! (L'orateur est interpellé.)Prouvez-le !
Mme Jocelyne Haller (AdG). Je ne comprends vraiment pas ce qui a pu amener un certain nombre d'entre vous à refuser le renvoi en commission de cette proposition de motion...
Combien de fois certains d'entre vous n'ont-ils pas dit qu'ils s'étonnaient de la pénurie de travailleurs sociaux, d'infirmières et de tous ces métiers qui, aujourd'hui, peinent à recruter ?
Or, il est simplement question dans cette motion de permettre aux personnes qui le souhaitent de se former correctement ! En refusant cette motion, en refusant de prendre acte du fait qu'aujourd'hui il manque objectivement un certain nombre de places de stage, vous amputez la formation de tous ces métiers d'une partie de l'apprentissage !
Alors, il faut savoir ce que vous voulez: soit vous voulez des professionnels formés et compétents, soit vous ne leur donnez pas les moyens de se former, et vous allez au bout de votre raisonnement ! Mais prenez garde ! Avec ce type d'attitude - je le répète, je ne vois vraiment ce qui vous amène à refuser de vous pencher sur cette proposition de motion - vous allez véritablement à contresens ! Je vous prie donc de réfléchir et de bien mesurer la portée de vos actes !
A tout hasard, je propose à nouveau de renvoyer cette proposition de motion en commission, en espérant que vous aurez changé d'avis entre-temps.
M. François Thion (S). Je suis étonné que la droite ne veuille pas entrer en matière sur cette motion... Il faut peut-être reprendre les invites au Conseil d'Etat... Si vous regardez bien, elles ne vont pas très loin.
La première invite demande simplement: «à vérifier si cette pénurie de places de stage est effective et à en analyser l'ampleur le cas échéant;».
La deuxième demande: «à analyser les causes de cette pénurie, notamment à évaluer l'impact des baisses budgétaires sur cette problématique;». Mais peut-être est-ce cela qui vous gêne, parce que vous êtes toujours en train de faire des coupes dans les budgets !
La troisième stipule: «à mettre en place transitoirement des solutions rapides pour éviter de péjorer la formation des futurs travailleurs sociaux, notamment en débloquant des subventions extraordinaires à destination des places de stage, là où les fonds manquent;». Cela, s'il y a vraiment pénurie, il faut d'abord le vérifier !
La quatrième invite stipule: «à faire en sorte que l'engagement du canton en faveur d'une HES-S2 se concrétise dans les faits par des moyens mis à disposition, en cohérence avec l'intention énoncée;». Je fais partie de la commission de l'enseignement supérieur et je crois que nous avons toujours trouvé un consensus sur les HES, lesquelles supposent, évidemment, de faire des stages !
Et voici la dernière invite: «à rendre un rapport rapidement au Grand Conseil sur cette question.»
Tout cela ne me semble pas compliqué... En ce qui me concerne, si on m'avait demandé de signer cette motion, je l'aurais fait très volontiers !
Présidence de M. Pascal Pétroz, président
M. Claude Aubert (L). Il s'agit donc, dans le cadre des HES, d'avoir un potentiel de places de stage pour que les personnes en formation puissent le faire dans la pratique. La seule question qui se pose est de savoir si ce problème concerne la commission de l'enseignement supérieur ou s'il concerne clairement l'Etat en tant que pourvoyeur de ces places de stage - probablement un très grand nombre.
C'est pourquoi le renvoi de cette motion à la commission de l'enseignement supérieur ne nous paraissait pas du tout adéquat ! Cela ne veut absolument pas dire que le problème des places de stage ne se pose pas, mais nous pensons simplement que c'est un problème interne à l'Etat.
M. Rémy Pagani (AdG). Je ne comprends pas ce revirement...
En fait, la seule question posée par cette motion est de savoir si l'Etat doit se substituer à un moment ou à un autre aux carences de certains organismes, qu'ils soient privés ou publics... Pour notre part, nous trouvons essentiel d'en discuter en commission - à moins que le Conseil d'Etat n'ait la science infuse... - pour faire une analyse concrète de la situation, de manière à décider en toute connaissance de cause si nous invitons effectivement le Conseil d'Etat à s'engager davantage. Car, actuellement, ces stages sont pris en charge par des organismes publics et par le secteur privé. C'est le fond du problème, et c'est sur ce point que nous devons trancher.
Alors, que cette motion soit renvoyée à la commission sociale ou à la commission de l'enseignement supérieur... Ce n'est en définitive pas très important. Ce qui est important, c'est que la commission qui la traitera donne un signe. A moins que vous ne disiez aujourd'hui, maintenant sur le siège, que vous êtes d'accord que l'Etat s'engage davantage - ce qui ne pourrait que nous satisfaire... Ou à moins que vous ne vouliez simplement refuser cette motion, ce qui ne semble pas être le cas d'après l'intervention de M. Aubert.
Je reviens sur le fond... Si vous refusez fondamentalement cette motion - je le répète, ce n'est visiblement pas l'option que vous avez choisie - cela voudrait dire que le manque de places de stage ne vous intéresse pas, pas plus que le système de formation. En ce qui me concerne, je le trouve très pertinent, parce que les stages en emploi ont précisément une grande importance dans la formation des assistants sociaux et des éducateurs. Si cette motion est refusée, c'est l'Etat qui devra prendre en charge et assurer la formation concrète de ces personnes, soit en termes de stages soit en termes scolaire. Et, si tel est le cas, cela «coûtera bonbon" à l'Etat, si j'ose m'exprimer ainsi !
A mon avis, il serait plus judicieux de renvoyer cette motion soit à la commission sociale soit à la commission de l'enseignement supérieur - il ne faut en tout cas pas la renvoyer au Conseil d'Etat - pour discuter de la question de fond que pose cette motion et trancher.
M. Charles Beer, conseiller d'Etat. Nous sommes typiquement en présence d'un vote imprévisible du Grand Conseil, décidé tout à coup, sur la base d'aucun argument particulier: une petite envie du moment. Si on peut la comprendre, ses conséquences peuvent être dommageables pour la République, car cette motion est essentielle !
En effet, il s'agit aujourd'hui de développer et de mettre en place les Hautes écoles spécialisées et d'intégrer la HES-S2, c'est-à-dire celle relative au domaine social et à la santé, à la HES-SO, Hautes écoles spécialisées de Suisse occidentale. Et pour y arriver, il est indispensable de pouvoir offrir des places de stage. Nous en avons besoin pour réussir le passage aux Hautes écoles spécialisées.
Cette motion au caractère tout à fait raisonnable prévoit dans une disposition un élément qui peut être contraignant pour l'Etat: palier les carences qui proviendraient des pourvoyeurs de stages - c'est-à-dire les pourvoyeurs d'emplois de demain.
Si vous ne revenez pas sur votre position quant au renvoi en commission de cette motion, vous avez le choix aujourd'hui soit de nous inviter à prendre en charge, quoi qu'il arrive, le coût de ces stages, soit, tout simplement, de donner le message selon lequel les places de stage ne vous intéressent pas et ne nous concernent pas. J'estime que c'est un facteur suffisamment important pour que vous le preniez au sérieux et pour reconsidérer votre décision, de manière à l'examiner en commission, afin que le Conseil d'Etat puisse rendre sagement ses conclusions sur un travail élaboré, fourni et réfléchi.
Le président. Nous avons été saisis d'une deuxième demande de renvoi en commission. Je vous soumets tout d'abord la proposition de renvoyer cette motion à la commission de l'enseignement supérieur - et non à la sociale - au moyen du vote électronique. Si cette demande est acceptée nous en resterons là; si elle est refusée nous nous prononcerons sur le renvoi de cette motion au Conseil d'Etat. Le vote est lancé.
Mis aux voix, le renvoi de cette proposition de motion à la commission de l'enseignement supérieur recueille 37 oui, 37 non et 4 abstentions.
Le président. Puisqu'il y a égalité des voix, je dois trancher. J'ai appuyé sur le bouton, mais il ne se passe rien... (Le président est interpellé.)A votre avis ? Les paris sont ouverts ! (Rires et exclamations.)Oui ! Je suis pour le renvoi en commission... Allez hop ! (Applaudissements.)
Cette proposition de motion est renvoyée à la commission de l'enseignement supérieur.
Le président. Je vois que le système informatique fonctionne à nouveau... Nous passons maintenant au point 28 de notre ordre du jour.
Débat
Le président. Ce serait une bonne chose qu'un des motionnaires ou un des députés de l'AdG s'inscrive pour prendre la parole et développer cette proposition de motion... Non ? Vous renoncez ? D'accord, tout va bien ! (Exclamations.)
Monsieur Jacques Baud, vous avez la parole... On pourrait renvoyer cette motion en commission... Voilà ! (M. Rémy Pagani souhaite s'exprimer.)Merci, Monsieur Pagani, de prendre la parole.
M. Rémy Pagani (AdG). Malheureusement, nos collègues - qui ont élaboré cette motion avec les milieux du cinéma - sont absents. Pierre Vanek, comme vous le savez, n'est plus parmi nous et Nicole Lavanchy est absente. Je pense que nous sommes très efficaces à l'Alliance de gauche, mais, je le regrette, personne d'entre nous ne pourra présenter cette motion...
Quoi qu'il en soit, je propose le renvoi de cette motion à la commission de l'enseignement.
M. Jacques Baud (UDC). Cinéma ! (Rires.)«Cinéma», ce mot qui nous a tant fait rêver ! Qui m'a aussi fait rêver... C'est un rêve que j'ai pu réaliser pendant quinze ans à Paris et dix ans au Canada... Et avec un certain succès ! C'est un rêve que j'ai tenté de réaliser entre les années 60 et 80, à Genève, à Lausanne... Avec M. Kasper, nous avions même monté une revue de cinéma, pour laquelle nous avons eu un prix: le «Lion de Venise»...
Une voix. Bravo !
M. Jacques Baud. Je suis donc à même de vous parler du cinéma, à Genève et en Suisse romande. C'est une activité relativement impossible à mener, parce qu'il faut des distributeurs et que nous n'en avons pas ! Parce qu'il faut beaucoup d'argent et que nous n'en avons pas ! Oui, nous avons réalisé des courts métrages, des moyens métrages, des longs métrages, mais personne n'a jamais été payé, ni les techniciens ni les comédiens ! Il faut tout de même savoir qu'un court métrage coûte entre 100 000 F et 200 000 F.
Cette motion demande de subvenir à cette activité... Mais ce sont des millions qui seraient nécessaires ! Pour des films qui ne passeront dans aucun cinéma et qui seront vus, peut-être, en les poussant, voire en les payant, par cent ou deux cents spectateurs !
Alors, arrêtons de rêver ! C'est malheureux à dire, mais si l'on veut défendre la culture à Genève, il faut passer par la Télévision Suisse Romande !
Pour le cinéma, la seule solution est de passer par des coproductions, et je doute qu'un coproducteur français veuille défendre la culture de Genève... C'est ainsi... J'en ai fait l'expérience...
Alors, renvoyez cette motion en commission, si vous le voulez, mais je vous le dis d'ores et déjà: une subvention serait de l'argent jeté par les fenêtres ! J'en suis bien triste, mais - je vous le répète - je parle d'expérience, une expérience qui a duré quarante ans !
Le président. Merci, Monsieur le député. Mesdames et Messieurs les députés, nous sommes saisis d'une demande de renvoi en commission de l'enseignement. Nous allons voter à main levée...
Monsieur le député Blanc, vous voulez la parole ? Je vous la donne !
M. Claude Blanc (PDC). Je me demande, Monsieur le président, si la commission de l'enseignement est bien compétente pour examiner cet objet... En effet, il va essentiellement entraîner un engagement de l'Etat dans la durée... Il me semble donc qu'il serait plus pertinent de le renvoyer à la commission des finances.
Le président. Monsieur le député, faites-vous une demande formelle de renvoyer cet objet en commission des finances ?
M. Claude Blanc. Tout à fait !
Le président. Très bien ! Mesdames et Messieurs les députés, nous allons voter successivement sur ces deux propositions. Je vous soumets d'abord la demande de renvoi en commission de l'enseignement. Si cette demande est... (Le président est interpellé par M. Pagani.)La commission des finances vous convient, Monsieur le député ? Très bien !
Je vous soumets donc la demande de renvoi de cette proposition de motion à la commission des finances. Nous votons à main levée.
Mis aux voix, le renvoi de cette proposition de motion à la commission des finances est adopté.
Le président. C'est une écrasante majorité ! Quelques personnes s'y opposent, dont un député très alerte... Quelques abstentions...
Mesdames et Messieurs les députés, avant de nous quitter, nous allons encore traiter le point 29 de notre ordre du jour.
Préconsultation
M. Christian Grobet (AdG). Avec tout le respect dû au Conseil d'Etat, j'imagine qu'il n'arrive pas à lire dans le détail tous les projets de lois avant d'en être saisi... Je dois dire que présenter un projet de loi qui se fonde sur une expertise de 1998 me semble - je ne veux pas porter un jugement trop négatif - tout à fait dépassé !
Le marché immobilier, tout particulièrement dans la zone villas, a beaucoup évolué, et, en lisant cette expertise, on voit d'emblée que les valeurs sont erronées ! Le mètre carré de terrain à moins de 500 F en zone villas, c'est tout simplement introuvable aujourd'hui ! La valeur de 400 F le mètre qui a été donnée à ce terrain n'est - excusez-moi de le dire - plus du tout d'actualité, si tant est qu'elle l'était en 1998 ! Je ne pousse pas à l'augmentation du prix des terrains, au contraire, je souhaiterais qu'il soit le plus bas possible, mais, à partir du moment où les règles du marché s'appliquent, on ne peut pas se fonder sur des valeurs aussi anciennes ! Et le coût de la construction fixé à 400 F le mètre cube - là encore, excusez-moi - ce n'est pas sérieux ! Je veux bien admettre le taux de vétusté de 40%, qui paraît élevé pour une villa construite en 1960, mais construire aujourd'hui une villa de ce type à 400 F le mètre cube me semble ridiculement peu élevé, sachant qu'à cette époque déjà, ce n'était pas possible !
Alors, bien sûr, on se demande qui est à l'origine de cette expertise... On tourne la première page, et l'on voit que le mandant est un avocat ! Cela n'a rien d'inhabituel, je suis moi-même avocat, et les avocats sont là pour représenter des personnes qui le demandent. Toutefois, il serait intéressant de savoir qui cet avocat représente - peut-être pourra-t-on nous le dire... Représente-t-il celui qui veut acheter la propriété ? Ce n'est en tout pas un avocat qui agissait pour le compte de l'Hospice général ou de l'Etat, puisque ce bien n'était pas encore en déshérence... Je suis désolé, mais, la première des choses que le Conseil d'Etat devra faire, c'est de demander une nouvelle expertise pour qu'on ait une valeur qui soit crédible et qui corresponde aux conditions actuelles du marché.
D'autre part, je suis extrêmement gêné qu'on ait décidé d'attribuer cette vente à un citoyen, même s'il a une créance à faire valoir. Sans être, et de loin, un chantre des règles du marché, je pense que la moindre des choses serait de mettre cet objet sur le marché et de voir concrètement si d'autres personnes seraient prêtes à payer un prix supérieur à celui qui a été négocié... On nous a en effet assez dit que, quand le Conseil d'Etat nous présente des projets de lois pour l'aliénation de certains biens immobiliers de l'Etat, sans intérêt particulier pour lui, il fallait d'abord fixer un prix, que l'objet devait être mis sur le marché et qu'ensuite il était vendu au plus offrant !
Or ici, on n'est pas en train de vendre au plus offrant: on est en train de conclure un accord avec une personne qui fait valoir une créance, dont on dit, du reste, qu'elle n'est que partiellement admise ! Il y a des maisons, comme vous le savez, qui font l'objet d'un usufruit - on a traité mercredi devant la commission de contrôle de la Fondation de valorisation des actifs de la BCGe une villa dans ce cas... C'est évident que lorsqu'il y a une charge sur un objet immobilier, cela diminue son prix, mais, finalement, l'acquéreur décide du risque qu'il veut prendre en achetant. Et on ne vend pas à celui qui invoque la créance pour faire baisser le prix, à moins que personne ne soit prêt à s'aligner sur le prix du créancier. Pour ma part, je trouve qu'il y a là quelque chose de gênant...
Dernière chose. Je voudrais tout de même souligner - cela ressort implicitement de l'expertise qui comporte une conclusion sur la valorisation possible de cette parcelle - que la parcelle a une surface de 1152 m2, ce qui signifie, en d'autres termes, qu'il est possible, dans le cadre de deux villas contiguës, de réaliser 260 m2 de surface de plancher habitable, alors qu'actuellement elle n'est que de huitante et un mètres carrés...
M. Claude Blanc. Quatre-vingt un !
M. Christian Grobet. A chacun son dialecte cantonal ! (Exclamations.)Je reste attaché, Monsieur Blanc, à mon canton d'origine, comme vous êtes attaché à votre ville d'origine dans laquelle vous avez sévi un certain temps à l'exécutif...
M. Claude Blanc. Ma ville d'origine, c'est Lausanne !
M. Christian Grobet. Ah ! Eh bien, cela me rassure ! Mais alors, vous vous êtes naturalisé genevois entre-temps, si je comprends bien !
Une voix. Encore un étranger !
M. Christian Grobet. Et vous avez oublié votre origine !
Pour terminer, je ne connais pas l'implantation de la villa, parce que, malheureusement, le plan cadastral n'a pas été inséré dans les annexes, mais on peut imaginer qu'une villa contiguë pourrait être construite contre la villa existante, vu le potentiel à bâtir extrêmement important. C'est donc une affaire immobilière très intéressante, puisque la valeur est totalement sous-estimée !
Je demande, après le renvoi en commission, que le Conseil d'Etat demande une expertise, qu'il recherche qui était le mandant dans cette affaire et présente un projet complet devant la commission.
Présidence de Mme Marie-Françoise de Tassigny, première vice-présidente
La présidente. Je prends note, Monsieur Grobet, que vous demandez le renvoi en commission de ce projet de loi.
Je donne la parole à M. Velasco concernant le renvoi en commission.
M. Alberto Velasco (S). Mais, Madame, c'est un projet de loi !
M. Bernard Lescaze. Oui, et alors !
M. Alberto Velasco. Merci, Madame la présidente. Mais on intervient en préconsultation, alors le projet de loi sera automatiquement renvoyé en commission...
Effectivement, comme cela a été répété à plusieurs reprises en commission des finances, notre groupe s'opposera à la réalisation de ce type d'actifs, car nous pensons que l'Etat a aujourd'hui besoin de tels locaux... (Commentaires.)J'ai eu l'occasion de chercher des locaux pour des associations qui en avaient besoin, et le département m'a répondu qu'il n'y en avait pas...
Par conséquent, nous nous opposerons en commission en votant non à la réalisation de cet actif.
M. René Koechlin (L). Je signale d'abord - nous n'avons peut-être pas le même projet sous les yeux - que le nom des experts y est indiqué... (Exclamations.)Du mandant ? Ah, pardon !
Mais les experts figurent tout à fait nommément... Nous avons bien le même texte...
Je voulais simplement dire la chose suivante: il me semble positif qu'on n'ait pas le sentiment que M. Grobet et M. Velasco, de l'Alternative, soient les seuls à estimer que la valeur vénale de cette propriété est sous-estimée... Je le confirme: la lecture de ce projet de loi me conforte dans l'idée que tel est le cas. Cela paraît évident.
Donc, il faut que la commission des finances - j'imagine que c'est là que sera renvoyé ce projet de loi - se penche sur cette question. Cas échéant, elle demandera au Conseil d'Etat de procéder à une nouvelle expertise.
Présidence de M. Pascal Pétroz, président
M. Pierre-Louis Portier (PDC). Je serai bref. Je ne suis pas, comme M. Grobet ou M. Blanc, originaire de Lausanne... Vous connaissez mon origine ! (Exclamations.)
Je crois pouvoir dire que je connais bien cette région, et j'aimerais très simplement corroborer les propos des préopinants. En effet, ce terrain - ne serait-ce que lui, parce que je connais moins la villa - est très largement sous-estimé. Il y a donc lieu de revoir cette expertise avant de traiter cet objet en commission.
Le président. Merci, Monsieur le député. En ce qui me concerne, sachez que je suis originaire de Lutry, et que c'est là que nous nous rendrons pour la sortie du Grand Conseil, Mesdames et Messieurs les députés ! (Exclamations.)
Monsieur Moutinot, je vous donne la parole.
M. Laurent Moutinot, conseiller d'Etat. Si vous êtes unanimes à considérer que la propriété dont il est question dans ce projet de loi est sous-évaluée, je ne saurais vous contredire.
Il va de soi que je donnerai suite à votre demande et que la valeur même de cette propriété sera réévaluée. Mais nous aurons l'occasion d'en débattre en commission.
Monsieur Velasco, j'espère que, lorsque la valeur sera déterminée au goût du jour, vous renoncerez à une opposition purement dogmatique... (Remarques.)
Ce projet est renvoyé à la commission des finances.
(Remarque.)
Le président. Oui, c'est bien à la commission des finances que le renvoi a été demandé !
Bien ! Nous sommes convenus tout à l'heure de suspendre nos travaux. Nous nous retrouverons donc demain à 15h. Je vous souhaite une bonne rentrée dans vos foyers et une bonne nuit !
La séance est levée 22h50.