République et canton de Genève

Grand Conseil

PL 8867
Projet de loi du Conseil d'Etat modifiant la loi sur l'assistance publique (J 4 05)

Préconsultation

Mme Jocelyne Haller (AdG). L'assistance publique se présente en quelque sorte comme une vénérable vieille dame, désuète à certains égards. Elle n'en demeure pas moins un des piliers de l'action sociale dans notre canton. Elle mérite donc à ce titre toute notre attention, car elle en a bien besoin. Après avoir malheureusement vu refuser en mai dernier le revenu minimum de réinsertion, qui aurait pu constituer une véritable cure de jouvence, nous en sommes réduits aujourd'hui à quelques soins d'urgence. Que l'on ne se méprenne pas ! Il n'entre pas dans notre intention de disqualifier le projet de loi qui nous est soumis par le Conseil d'Etat. Il demeure une démarche appréciable. Nous tenons néanmoins à en relever le caractère partiel compte tenu des enjeux majeurs de l'avenir de l'aide sociale et du rôle important qu'elle sera appelée à jouer dans un contexte économique et social qui ne cesse de se dégrader.

Cela dit, inscrire la suppression de la dette d'assistance dans la loi de l'assistance publique n'est pas un acte anodin. Cela ne se réduit pas à une mise au goût du jour ou au simple fait de renoncer à demander de l'argent à quelqu'un qui n'en a pas. Il ne s'agit pas moins que d'instituer, au titre de la solidarité, le devoir de l'Etat de garantir à chaque citoyen les moyens de subvenir à ses besoins.

Il n'est pas inutile ici de rappeler la finalité de l'assistance publique. Elle vise à la réintégration sociale et professionnelle des personnes qui la sollicitent. Car enfin, ce qui convient, c'est moins de solliciter le remboursement d'une aide auprès d'une personne qui est peu ou pas solvable, ou de l'assurer de sa bienveillance, que de mettre cette dernière durablement à l'abri du besoin par la réalisation d'un projet d'insertion. Cette orientation nécessite cependant dans un premier temps, il ne faut pas l'occulter, un investissement en forces de travail et en moyens matériels pour développer des alternatives à la désinsertion. C'est également par cette voie que l'on pourra prétendre agir sur les prestations indûment perçues.

Enfin, prévoir des dispositions pour faire face aux prestations versées au titre d'avance sur des prestations d'assurance sociale peut sembler nécessaire pour les situations particulières où l'on ne peut empêcher ce mécanisme. Mais elles ne peuvent et elles ne doivent en aucun cas entériner cette distorsion qui veut que, en raison de complexification et de retards de procédure outranciers, l'Hospice général soit contraint de procéder à des avances et à faire office de banquier de la sécurité sociale.

En ce sens, nous proposons, Mesdames et Messieurs les députés, de renvoyer cet objet à la commission des affaires sociales et de réserver le même sort aux propositions de motions 1497 et 1467 qui portent sur la même problématique (Applaudissements.)

Mme Anne-Marie Von Arx-Vernon (PDC). Je serai brève. Il est important pour le PDC de pouvoir dire que ce projet de loi est le signe que l'on entre dans un modèle de société où la justice sociale, garante de la dignité humaine, peut remplacer la charité. Ce projet de loi est un outil utile pour renforcer la place de chacun et de chacune dans la société. C'est pourquoi nous vous recommandons d'envoyer ce projet de loi à la commission des affaires sociales.

M. Thierry Apothéloz (S). A Genève, l'Hospice général prend en charge l'assistance publique. Il intervient ainsi à différents niveaux, que ce soit en matière d'aide sociale et financière, de complément pour une finance familiale, d'aide à un placement de mineurs et, surtout, d'aide à l'insertion professionnelle et sociale, dont parlait Mme Haller tout à l'heure. L'aide financière ainsi avancée était constitutive d'une dette. Mais force est de constater aujourd'hui que de plus en plus de personnes n'arrivent tout simplement pas à pouvoir rembourser cette dette. Le groupe socialiste se réjouit ainsi de discuter les mérites de ce projet de loi, à la lumière, je dois quand même le dire, de ce que les adversaires du RMR ont pu mettre en évidence lorsqu'il a fallu combattre le projet que j'ai nommé tout à l'heure et qui a malheureusement échoué.

Ce projet de loi ne doit pas être considéré comme un remplaçant du RMR. Il conviendra de revisiter l'assistance publique dans son sens large, car le système actuel ne convient pas - j'ai presque envie de reprendre le titre de la motion de l'Entente sur la fiscalité que nous avons reçue aujourd'hui - pour qu'une assistance publique juste et résolument moderne puisse naître à Genève ! Nous serons donc attentifs à ce que nous puissions étudier ce projet de loi dans un sens large et nous nous réjouissons de le faire à la commission des affaires sociales.

M. Ueli Leuenberger (Ve). Les Verts étudieront avec intérêt ce projet de loi en commission sociale. Nous saluons le projet de suppression de la dette d'assistance et regrettons que le nouveau projet de RMR, qui était quelque part promis par les partis de l'Entente, qui avaient repéré des défauts dans le projet, ait malheureusement été refusé par le peuple, mais également par le Conseil d'Etat qui s'était engagé lors de cette campagne à présenter un autre projet.

Nous en discuterons donc en commission. Nous demandons quand même au Conseil d'Etat à quel moment il soumettra un nouveau projet de RMR. Nous serons heureux d'en débattre à ce moment-là.

M. Pierre-François Unger. Vous l'avez soulevé, ce projet est à la fois un petit projet - parce qu'il n'est que le premier d'une série de projets qui vont tendre à moderniser l'aide sociale, vous l'avez toutes et tous dit - et un pas significatif tout de même. D'abord parce que c'est le premier engagement que j'avais pris au soir même du vote négatif sur le RMR, pour dire que l'on pourrait commencer par ce premier pas-là, qui cesserait d'étouffer un certain nombre de personnes dont la réinsertion est particulièrement difficile et précisément rendue parfois impossible par le simple fait de savoir que leur premier devoir, en retrouvant un emploi ou une insertion dans la société, serait de rembourser leur dette.

On a longtemps cru aux vertus rédemptrices du remboursement de l'assistance. Mais les faits sont là et les faits sont têtus. Il n'y a pas de vertus rédemptrices au remboursement de l'assistance. C'est donc ce premier pas, tout à fait modeste, que je vous propose d'étudier en commission. Pendant ces travaux en commission, nous pourrons vous donner les perspectives d'un groupe de travail que j'ai mandaté, avec un certain nombre de directives, pour une refonte plus complète de l'aide sociale qui s'articulera d'ailleurs avec des projets de mon collègue Carlo Lamprecht s'agissant de la perte d'emploi. L'un et l'autre ne sont évidemment pas complètement superposables. Seule une partie de ces populations est superposable. Nous entendons proposer une vue plus cohérente de l'ensemble du dispositif des gens en difficulté, dont nous pourrons d'ores et déjà vous donner quelques aperçus à l'occasion de cette première discussion.

Ce projet est renvoyé à la commission des affaires sociales.