République et canton de Genève

Grand Conseil

PL 8808-A
Rapport de la commission des finances chargée d'étudier le projet de loi du Conseil d'Etat établissant le budget administratif de l'Etat de Genève pour l'exercice 2003 (D 3 70)

Suite du deuxième débat (budgets de fonctionnement)

CHAPITRE 2: FINANCES (suite)

Opération Banque cantonale et Fondation de valorisation (Rub. 23.03.00)

Mme Loly Bolay (S). Madame la conseillère d'Etat, permettez-moi de vous interroger au sujet d'une affaire dont la presse parle beaucoup, soit l'implication de la BCGe dans l'affaire du Prestige. Je m'explique: le Prestige a sombré au large des côtes de Galice en créant un désastre écologique et économique sans précédent - désastre bien plus important que pour l'Erika, car ce ne sont pas moins de 77 000 tonnes de fuel qui se seraient déversées ou qui seraient en train de se déverser sur la Galice. Je m'étonne personnellement en lisant dans la presse - si tout ce que l'on lit dans la presse peut être considéré comme exact - que les responsables de la banque prétendent tout ignorer du bateau sur lequel était transporté ce fuel. En effet, il semblerait que le propriétaire du Prestige ne soit pas un inconnu, puisqu'il s'agit du même individu qui était propriétaire en 1992 du bateau «El Mar Egeo», qui avait provoqué un premier désastre en Galice, désastre tel que le littoral avait été asséché pendant cinq ans. Les pêcheurs n'ont d'ailleurs toujours pas touché leurs indemnités à ce jour !

Je m'étonne du manque d'informations au sujet de ce dossier, et cela d'autant plus que la banque, lorsqu'elle octroie des crédits aux PME, se montre draconienne et demande un maximum de renseignements. Or, il s'agit ici d'opérations de tradingqui rapportent énormément à la banque. L'on a donc l'impression qu'il y a deux poids, deux mesures.

J'aimerais par conséquent vous poser les questions suivantes: en premier lieu, est-ce vraiment le rôle d'une banque cantonale de financer de telles opérations à risque, et quel est le montant engagé par la BCGe dans ce financement ? On nous parle de quelques 16 millions, mais il s'agit du montant global. En second lieu, ne trouvez-vous pas, Madame la conseillère d'Etat, qu'eu égard aux engagements pris par le canton de Genève dans le cadre de l'Agenda 21, la BCGe a un rôle social, éthique, moral et environnemental à jouer dans les opérations qu'elle mène ?

Mme Micheline Calmy-Rey, conseillère d'Etat. Je suis désolée de vous décevoir, mais je ne répondrai pas à votre interpellation. Je la transmettrai à la BCGe afin qu'elle vous fournisse les informations nécessaires.

Le budget de fonctionnement du département des finances est adopté.

CHAPITRE 3: INSTRUCTION PUBLIQUE

Office de la jeunesse (Rub. 36.00.00)

M. Rémy Pagani (AdG). Je commencerai par expliquer la situation dans laquelle nous nous trouvons: un certain nombre de phénomènes touchant durement la jeunesse de notre canton sont apparus depuis quelques années. J'en veux pour preuve le nombre croissant d'adolescents qui sont envoyés à Champ-Dollon. Il y a une dizaine d'années, une moyenne de dix jeunes étaient envoyés à La Clairière; aujourd'hui ce sont en moyenne trente jeunes par mois qui sont incarcérés à la prison de Champ-Dollon et une dizaine à La Clairière. Le nombre d'adolescents mis en prison a donc presque quadruplé. Nous avons par ailleurs constaté un certain nombre de «faits divers» qui sont en réalité des drames sociaux terribles: l'histoire de la petite Cosette, le drame de Meyrin ou encore le fait qu'une assistante sociale ait été récemment prise dans des méandres administratifs ubuesques.

Ceci étant, nous estimons, et nous l'avons toujours dit, que le service de la protection de la jeunesse a, depuis de nombreuses années, fait les frais de coupes linéaires, et ceci y compris lorsque le Conseil d'Etat avait mis un terme à ces restrictions budgétaires. Les coupes linéaires ayant été poursuivies dans ce service; cela a créé un manque considérable d'assistants sociaux. Bien qu'un effort relativement important ait été fourni cette année de la part de la présidente du DIP - ce dont je tiens à la remercier - nous jugeons cet effort insuffisant. C'est la raison pour laquelle nous vous présentons un amendement afin d'augmenter d'au moins dix postes, la rubrique «office de la jeunesse», cette augmentation étant destinée à l'engagement de travailleurs sociaux.

Il nous semble également indispensable de mener une réflexion et de lancer une réforme au niveau de cet instrument qu'est la protection de la jeunesse. (Brouhaha.)En effet, il règne actuellement une certaine confusion des rôles: la justice demande au service de la protection de la jeunesse d'effectuer un travail quasiment policier, alors que les assistants sociaux sont là non seulement pour nouer des contacts, mais également pour entretenir une relation de confiance avec les parents qui viennent présenter les problèmes rencontrés avec leur adolescent et demander des conseils en toute sincérité et humilité. Or, l'on demande à ces assistants sociaux de jouer en même temps le rôle de la police. Il est donc nécessaire, de mon point de vue, qu'une réflexion, voire un changement de loi, soit envisagé pour unifier les mandats de la protection de la jeunesse. On ne s'en sortira pas en continuant de demander au service de la protection de la jeunesse d'effectuer un travail de recherche quasi judiciaire alors que, et je le souligne, nous avons donné aux juges du tribunal tutélaire, notamment dans le cadre de la réforme du droit du divorce, tous les moyens - y compris financiers - pour auditionner les enfants et faire leur propre travail d'enquête judiciaire.

Le Conseil d'Etat devrait donc mener une réflexion en profondeur sur le rôle du service de la protection de la jeunesse et s'attacher à mieux définir les mandats des assistants sociaux - notamment les mandats professionnels - en écartant, dans un premier temps, tout mandat judiciaire. Cela permettrait à ce service d'aider véritablement parents et enfants afin que ces dernier vivent leur adolescence dans les moins mauvaises conditions possibles compte tenu de la paupérisation croissante de notre population.

Mis à part cette réflexion de fond, nous proposons de mettre immédiatement au budget les dix postes prévues par Mme la présidente dans le cadre d'un plan quadriennal, afin que ces postes soient réellement attribués dans les six ou neuf mois à venir. Au vu de la forte pénurie d'assistants sociaux et de travailleurs sociaux en général, il faudrait nous donner tous les moyens, y compris budgétaires - et ceci même si ces postes ne sont pas pourvus dans l'année à venir - pour répondre aux difficultés que traverse l'ensemble des familles de notre canton. Il s'agit d'une mesure de prévention qui nous semble préférable à des investissements destinés à augmenter la capacité d'accueil de La Clairière, voire de Champ-Dollon, car elle permettrait de limiter les dégâts et d'empêcher l'augmentation des personnes incarcérées du fait de la délinquance de notre jeunesse.

Le président. La parole est à M. Thierry Apothéloz. Il est normal, Monsieur Apothéloz, que le proposant de l'amendement prenne la parole le premier, bien qu'il se soit inscrit après vous.

M. Thierry Apothéloz (S). J'aurais souhaité prendre la parole en premier pour des raisons d'honnêteté intellectuelle. Je ne souhaitais en effet pas m'exprimer sur le service de la protection de la jeunesse mais un autre sujet, que vous me permettrez de présenter. Nous avons récemment appris par la presse un transfert des foyers pour jeunes de l'hospice général «Le Pont», «Les Ecureils Doret» et «Les Ecureuils Guéry», au département de l'instruction publique. La présidente du département pourrait-elle nous confirmer ce transfert et nous préciser quelles fondations sont concernées et quelles seront les incidences financières de ce transfert pour le département ?

M. Jacques Baud (UDC). Je donne totalement raison à M. Pagani: il est vrai que la protection de la jeunesse ne fonctionne pas - ou très mal. Il est évident qu'il s'agit là d'une réalité. Ce n'est pas en y allant à coups de millions que la situation va évoluer. Il faudrait d'abord que les responsables fassent de l'ordre dans ce service, qui connaît de graves dysfonctionnements. Nous saurons seulement après s'il faut leur donner une subvention supplémentaire ou s'il faut augmenter le nombre des postes de travail: en l'occurrence, non !

M. David Hiler (Ve), rapporteur. Il y a certainement dans ce budget des services qui ont une dotation insuffisante, et je crains que cela ne puisse être totalement évité. Quant à la tâche de définir quels sont actuellement les besoins les plus urgents, elle aurait relevé, me semble-t-il, de la commission des finances; j'ai personnellement soulevé le problème de l'office cantonal de la population, qui me paraît rencontrer des problèmes assez lourds et qui est en contact avec une partie non négligeable de la population genevoise. Mais l'on ne peut guère commencer à faire, et surtout à accepter, maintenant des amendements qui n'ont pas été étudiés en détail en commission ! Et si l'on procédait ainsi, je pourrais pour ma part mentionner de multiples structures pour lesquelles il faudrait, pour des raisons sociales, faire plus et mieux immédiatement. Je suggère donc que la réflexion induite par M. Pagani ait lieu dans le cadre de la commission concernée, éventuellement sur la base d'un projet de loi ou d'une motion, et que, si cette discussion entraîne à l'évidence le besoin urgent de nouveaux engagements, l'on en passe par la procédure ordinaire de dépassement de crédit à la commission des finances.

Je souhaite que, de façon générale, les amendements soient étudiés en commission avant d'être débattus ici. En effet, hormis le fait d'apparaître très sympathique parce que l'on prend telle mesure ou très antipathique parce qu'on ne la prend pas, je vois mal sur quelle base factuelle l'on établit un besoin ici plutôt qu'ailleurs, puisqu'une cinquantaine de services souhaite obtenir des effectifs supplémentaires. Je ne suis pas non plus certain que l'hôpital cantonal, dont personne ne niera l'utilité, ne souhaiterait pas, lui aussi, obtenir quelques postes supplémentaires - et il s'agit là souvent d'une question de vie ou de mort.

M. Christian Brunier (S). Je souhaite seulement signaler qu'il y a actuellement un débat croisé, puisque certains débattent de l'amendement, tandis que d'autres posent des questions sur l'office de la jeunesse. Je propose de finir le débat sur l'amendement et j'interviendrai ensuite.

Le président. Mesdames et Messieurs les députés, je vous prie de limiter vos interventions à l'office de la jeunesse et à l'amendement déposé par M. Pagani.

Mme Alexandra Gobet Winiger (S). Je rebondis sur les propos du rapporteur général pour dire que la réflexion sur l'adaptation des effectifs dans cet office ne relève pas, comme il pourrait sembler, d'une initiative personnelle de M. Pagani, mais d'un travail qui a été effectué à la commission de contrôle de gestion. Puisque, de fait, cette démarche est extrêmement avancée - comme le sait M. Pagani, et mieux encore sa collègue Mme de Haller - j'aimerais dire ici qu'il paraît nécessaire, en l'état, de ne pas aller au-delà de l'adaptation des effectifs qui a été vérifiée par le département, et d'attendre le résultat de l'étude qui sera conduite aussi bien à l'initiative du Conseil d'Etat qu'à la demande de la commission de contrôle de gestion. Si les dotations apparaissent effectivement inégales, le Grand Conseil pourra à ce moment se prononcer en toute connaissance de cause sur les modifications qu'il y a lieu de faire.

Je dénonce pour ma part le caractère opportuniste de cette proposition. Il est toujours plaisant pour la population de s'entendre dire qu'aujourd'hui l'on rase gratis. Nous aurons le courage de dire que peut-être demain l'on rasera gratis, mais pas aujourd'hui ! (Applaudissements.)

M. Rémy Pagani (AdG). Je ne trouve pas les propos de Mme Gobet Winiger très... gentils ! (Brouhaha . Le président agite la cloche.)J'essaie de mesurer mes propos, Mesdames, Messieurs.

Bien que la commission de contrôle de gestion ait pris en main ce dossier, le service de la protection de la jeunesse connaît depuis des années une crise latente, non seulement en termes d'objectifs institutionnels, mais également en termes de personnel. Comme d'autres services, il a été saigné - oui, Madame la présidente ! - par des mesures de réduction linéaire de postes. Quant à l'étude dont on nous parle, elle ne parviendra pas au Grand Conseil avant six mois; celui-ci prendra ce dossier en charge durant les six mois suivants, et l'on ne votera l'augmentation de postes qu'au budget de l'année prochaine: j'en mets ma main à couper !

J'estime quant à moi qu'il faut faire face en urgence à un certain nombre de demandes, non pas des assistants sociaux, mais de familles en difficultés; il s'agit de régler ce problème non pas une fois pour toutes, mais de revenir au statu quo ante, qui visait à mettre à disposition des familles un certain quota d'assistants sociaux. Il ne s'agit nullement de faire de l'opportunisme, Madame Gobet Winiger - ce que je sais faire lorsque cela est nécessaire... (Brouhaha.)Mais tout à fait, comme vous, Messieurs et Mesdames!

Toujours est-il que nous estimons qu'il s'agit là d'une priorité. Je vous ferai par ailleurs remarquer qu'après avoir voté cette augmentation de postes dans le budget de l'année prochaine, il nous faudra trouver des assistants sociaux, ce qui nous prendra six mois supplémentaires au vu de la pénurie qui subsistera dans deux ans. Ce n'est donc que dans une année et demi que l'on sera en mesure de répondre à une demande actuellement essentiel !

J'assume mes responsabilités. J'espère, Madame Gobet Winiger, que vous les assumerez également au moment du vote !

Mme Martine Brunschwig Graf, conseillère d'Etat. J'hésitais quant au bout par lequel prendre cette affaire. Le flot de paroles ambiant me permet de la traiter en deux temps: j'aborderai en premier lieu la protection de la jeunesse, puis je me pencherai sur les amendements de M. Pagani, qui méritent quelques commentaires.

Je reconnais, quant à la protection de la jeunesse et à tous les services - dont je rappelle qu'ils sont particulièrement exposés puisqu'ils doivent faire face aux grandes difficultés de la population avec laquelle ils traitent - qu'il y a bien sûr lieu d'améliorer la qualité des prestations, qu'il est bien sûr indispensable de se reposer quelques questions par rapport à la mission telle qu'elle est définie et aux prestations telles qu'elles peuvent être accomplies. Je souhaite cependant rendre hommage à toutes celles et ceux qui, tout au long de l'année, font face aux difficultés constantes d'autrui auxquelles ils apportent des solutions.

Il est rare que celles et ceux qui fréquentent ces services soient particulièrement ravis de l'Etat. Pourquoi cela ? Parce que dans la plupart des cas, il s'agit de personnes qui, notamment pour cause de décisions de justice, ne jouissent pas de la pleine faculté de leurs droits et qui se trouvent dans des situations d'assistance, de conseil, d'accompagnement ou dans des situations difficiles, de sorte que les services de l'Etat sont interpellés. Or, c'est souvent sur ces services que l'on transpose son propre sentiment de révolte, alors que cette révolte pourrait venir d'ailleurs et se reporter ailleurs. Je trouve regrettable que le débat qui s'est ouvert ne serve pas ceux que vous croyez servir, Monsieur Pagani, mais ouvre la porte à toutes sortes de commentaires qui, fatalement, par leur aspect réducteur, ne rendent pas hommage au travail quotidien de toutes ces personnes.

J'aborde maintenant le deuxième point de mon intervention. Celles et ceux qui ont eu l'envie, le temps ou la curiosité d'ouvrir le budget de l'instruction publique, publié chaque année avec une source de détails importante, découvriront à la page 167 que la protection de la jeunesse reçoit sept postes et demi supplémentaires. Celles et ceux qui ont participé aux travaux de la commission de contrôle de gestion auront en outre pris acte du fait que, depuis ces dernières années, nous renforçons ces services en prenant en compte, non pas les réductions linéaires dont vous parlez, mais les diminutions de postes que tout l'Etat de Genève a dû assumer, y compris pour ses propres services, durant le début des années 90. Il est donc faux, Monsieur Pagani, de prétendre qu'il n'y a pas d'augmentation de postes pour la protection de la jeunesse, ou de le faire par omission: vous ne l'avez pas dit expressément, je le reconnais. Vous avez cependant laissé entendre qu'il n'y aurait pas de nouveaux postes à la rentrée. Or, tel sera le cas à la rentrée civile.

Il est certes nécessaire, je peux le reconnaître, de faire des efforts de recrutement. Mais croyez-vous vraiment qu'un service de quatre-vingt personnes puisse absorber sans autre, en une année, dix-sept personnes et demi supplémentaires ? Cela est-il véritablement raisonnable par rapport à des travaux internes à la protection de la jeunesse, dont vous connaissez le déroulement et la restitution, et dont je devrai débattre avec le personnel le 17 décembre prochain ? Vous ne faites aucune mention, ni des travaux voulus par le personnel, ni des observations qui sont faites, et encore moins des travaux de la commission de contrôle de gestion, qui s'inscrivent dans une vision plus large ! J'ai eu à dire moi-même récemment au personnel qu'il s'agissait de modifier la loi à terme, mais que pour la modifier, il fallait effectivement avoir une réflexion politique plus large. Or, cette réflexion ne peut se faire ni à coups de slogans, ni à coups d'amendements.

Pour terminer, je vous ferai remarquer, si vous souhaitez véritablement une couverture financière à votre amendement, que vous êtes loin de l'avoir obtenue, car vous n'avez pas proposé d'amendement tout à l'heure, lorsque le département des finances étaient à l'examen. De surcroît, si vous aviez vraiment fait voter votre amendement, vous auriez privé l'Etat d'un million de recettes supplémentaires, puisque cet amendement porte sur l'adaptation faite en termes de recettes augmentées suite à l'application de la LACI: vous avez donc trouvé cette très curieuse démarche d'enlever un million à cet amendement pour tout potage !

Vous avez plaidé tout à l'heure pour une augmentation des postes de juristes au service du Grand Conseil: je propose que, parmi les postes vacants, vous engagiez également un comptable ! (Rires et applaudissements.)

Le président. Merci, Madame la présidente. J'ai moi-même fait demander à M. Pagani où se trouvait son amendement, et j'ai abouti exactement aux mêmes conclusions sur la manière d'assurer la couverture financière.

Monsieur Pagani, vous avez droit à la parole pour la troisième et dernière fois. (Protestations.)Parfaitement, pour la troisième et dernière fois dans ce département.

M. Rémy Pagani (AdG). Je me suis enquis, au niveau comptable, de la question de la couverture financière auprès des services de Mme Calmy-Rey. Vous reprochez donc indirectement, Madame Brunschwig Graf, aux services de Mme Calmy-Rey de m'avoir indiqué une fausse rubrique ! Je trouve cela pour le moins spécial !

Contrairement à d'autres, Madame Calmy-Rey, je m'enquiers auprès de spécialistes pour savoir comment assurer la couverture financière, car je sais que je ne peux pas être compétent en tout. Je n'aurais certes pas dû mettre un «moins» à cette couverture budgétaire telle qu'elle m'a été indiquée, mais un «plus» - je reconnais là mon erreur.( Chahut.)

Je vais vous expliquer à quoi correspond ce «plus»: la loi sur le chômage, à laquelle nous nous opposions, a été votée. Or, cette loi permet d'économiser toute une série de dépenses concernant le salaire du personnel et de faire rentrer toute une série d'impôts, puisque les entreprises dégageront davantage de bénéfices. De fait, il y a là environ trente millions à ce que l'on m'a dit. Je maintiens donc que cette couverture financière existe, même si elle oscille, selon les uns et les autres, entre six et trente millions. Si vous trouvez que cette couverture budgétaire n'est pas suffisante, il demeure possible de puiser dans le bénéfice de treize millions et quelques milliers de francs. Voici pour l'aspect comptable de la question et pour la couverture financière de notre amendement.

Je n'avais pas à rentrer dans le détail sur le fond. Il est évident que les sept postes que le personnel a revendiqués, que l'administration a soutenus et que vous avez défendus sont acquis, et j'espère qu'ils seront rapidement pourvus. (L'orateur est interpellé.)Faites-nous grâce des mesures de rétorsion habituelles ! (Exclamations.)Enfin tout de même ! Qu'est-ce que cela signifie, Madame la présidente ? Vous dites que vu mon amendement vous vous demandez si ces postes seront attribués ! Ce n'est pas correct: ces postes sont inscrits au budget !

Mme Martine Brunschwig Graf, conseillère d'Etat. Vous proposez un million de moins.

M. Rémy Pagani. Il ne s'agit pas d'un million en moins. Je viens de rectifier en indiquant que c'est un million en plus ! Ceci étant, je maintiens que dix postes de plus, soit dix-sept postes supplémentaires au total, seraient nécessaires. Je vous renvoie, Madame la présidente, à la demande du personnel, qui était d'un minimum de dix-huit postes, demande qui a été réduite à sept postes. Il ne s'agit même pas de développer une demande supplémentaire, mais simplement de combler ce qui n'a pas été fait durant ces dix dernières années. Cet amendement est donc à mon sens tout à fait justifié si l'on veut se donner les moyens, sur les deux ans à venir, de combler les manques dans ce service, avant d'envisager d'autres mandats et une discussion sur le fond de ce que doit devenir le service de la protection de la jeunesse. Ces postes me semblent vitaux tant pour le fonctionnement de ce service que pour la défense du service public que doit donner cette administration aux enfants et aux parents qui le consultent de manière spontanée.

Le président. La parole n'étant plus demandée, je mets aux voix l'amendement de M. Pagani qui se formule ainsi : «Rub. 36.00.30: + 1 million»

La rubrique passerait donc de 77 007 000F à 78 007 000F. Cette somme serait destinée à créer dix postes de travail en faveur de la protection de la jeunesse.

Mis aux voix, cet amendement est rejeté.

Le président. Nous continuons la discussion sur l'office de la jeunesse. La parole est à M. Brunier.

M. Christian Brunier (S). Je crois que tout le monde s'accorde sur un point: il y a actuellement une pénurie au niveau de l'accueil de la petite enfance, tant les crèches que les jardins d'enfants et les autres institutions n'arrivant pas à couvrir la demande. Il y a quelques mois, la Fédération «Genève enfants» a lancé une campagne de recrutement par rapport aux familles d'accueil de jour, campagne financée et soutenue par le département de l'instruction publique. J'ai appris par cette fédération que quatre cent cinquante personnes ont marqué leur intérêt en renvoyant un questionnaire à ladite fédération; ces demandes ont ensuite été soumises à la protection de la jeunesse. Or, selon la PDJ, seules vingt-deux familles ont été agréées ! Je m'étonne de ce chiffre au vu du manque de familles actuel pour garder des enfants ! Je sais que des contrôles sérieux doivent être effectués, contrôles auxquels je ne m'opposerai naturellement pas, car l'on ne peut pas confier des enfants à n'importe quelle famille. Mais de là à ne retenir que vingt-deux familles sur quatre cent cinquante, il me semble qu'il y a excès de zèle ou, du moins, excès de prudence !

J'aimerais donc, d'une part avoir une confirmation de ces chiffres, d'autre part connaître les raisons de ce manque de familles agréées, et ceci d'autant plus que lorsqu'on n'agrée pas les familles, on ne fait que développer une seule chose, à savoir la garde au noir.

Le président. Merci. Madame la présidente, voulez-vous répondre ?

Mme Martine Brunschwig Graf, conseillère d'Etat. Il m'arrive d'être surprise par les questions: c'est le cas pour celle-ci. Je ne connais en effet pas les détails de cet objet. Je m'engage bien entendu à récolter les renseignements nécessaires pour vous répondre.

J'aimerais simplement rappeler que j'ignore totalement la qualité des personnes - en termes de compétences pouvant être offertes. Je rappelle également que nous sommes pris entre deux feux: d'une part il s'agit d'assurer, dans ce canton, un accueil pour la petite enfance. Dans ce cadre-là, tous les moyens, y compris les mamans de jour, constituent des éléments importants du dispositif. D'autre part, et vous l'exigez vous-même à juste titre Monsieur le député, c'est que nous soyons assez stricts sur l'agrément lui-même pour savoir ce qui peut être fait en termes d'adéquation. J'ignore un troisième élément: l'entier des demandes a-t-il été traité ou ne s'agit-il là que d'une partie des demandes traitées et des premiers agréments ? Cela mérite d'être contrôlé, car nous pourrions fort bien nous trouver dans ce cas de figure. C'est la raison pour laquelle je vous donnerai des renseignements complémentaires sur cet objet.

M. Christian Brunier (S). J'ai une deuxième question, qui aurait certes pu être posée sous les rubriques «cycle d'orientation» ou «office de la jeunesse», mais je prends la parole tout de même. Ma question concerne l'intégration des jeunes handicapés au cycle d'orientation. Vous savez qu'en 1994, l'APMH, Association genevoise de parents et d'amis de personnes mentalement handicapées, avait déposé au Grand Conseil une pétition munie de 5641 signatures, qui demandait l'intégration des jeunes handicapés au cycle d'orientation. En juin 1995, ce Grand Conseil a voté à l'unanimité une motion sur le même thème. Quatre ans plus tard, le Conseil d'Etat a répondu à cette motion en refusant toute idée de classe intégrée, mais en affirmant la nécessité d'encourager l'amélioration des intégrations individuelles. Il faut pourtant reconnaître que peu de mesures sont actuellement prises, puisqu'il n'y a que de rares intégrations individuelles sur des périodes très courtes - l'on estime cette durée d'intégration à environ deux heures par semaine, ce qui est relativement peu. La commission consultative de l'intégration scolaire, formée de toutes les composantes de l'instruction publique et des milieux associatifs, a créé un groupe de travail sur ce thème. Ce groupe de travail recommande à l'unanimité une meilleure intégration des enfants, non seulement par actes isolés de l'intégration individuelle, mais aussi par la formation éventuelle de classes d'intégration des enfants handicapés au cycle d'orientation.

En juillet, le département a reçu une délégation de parents; le directeur général du cycle d'orientation a déclaré à cette occasion que l'une des causes de ce blocage était budgétaire. Je me suis étonné de cette remarque, car sur un budget de 1,7 milliard, l'argument budgétaire m'a semblé un peu léger:l'on ne parle en effet de quelques dizaines, voire quelques centaines de milliers de francs. Convaincu que d'autres éléments expliquaient ce blocage, j'ai posé la question à la commission de l'enseignement. Or, votre secrétaire général, Madame la conseillère d'Etat, m'a répondu que l'argument financier n'en était pas un, qu'il y avait d'autres raisons, et que des problèmes d'intégration devaient être réglés avant de pouvoir passer à l'acte. Je souhaite que vous me confirmiez qu'il n'y a pas de problème budgétaire, ce qui nous permettra déjà d'écarter un problème - car nous pourrions autrement voter quelques dizaines de milliers de francs sous forme d'amendements pour permettre aux jeunes handicapés d'être intégrés au cycle d'orientation.

Mme Martine Brunschwig Graf, conseillère d'Etat. Je dois rappeler que, lorsque nous avons reçu les parents, la discussion n'a en aucun cas porté sur la question de savoir si nous avions les moyens budgétaires d'assumer cette charge ou non. Une fois de plus, les propositions qui ont été faites en matière de classes intégrées ne répondaient pas aux conditions contenues dans le rapport présenté par le Conseil d'Etat et adopté par votre Conseil. Ce rapport soulignait que, pour qu'une classe intégrée dispose de bonnes conditions, il fallait en premier lieu que ce projet soit justifié du point de vue pédagogique pour les élèves concernés; il fallait en outre que le cycle concerné et les enseignants y soient préparés, et que toutes les conditions soient réunies. Or, les propositions qui sont arrivées sur ma table à la fin du mois d'avril ne prévoyaient aucun de ces éléments, et le cycle d'orientation visé n'avait en aucun cas, ni la préparation, ni même le début d'une possibilité d'intégration de ce type dans les délais, et ceci sans compter que l'appréciation pédagogique faite dans l'intérêt des élèves n'allait pas dans le sens préconisé. Cela m'a amenée à dire aux parents concernés qu'aucune des conditions réunies pour pouvoir assurer cette forme d'intégration n'était là dans le cas de figure présenté. Nous avons en revanche pris une nouvelle fois l'engagement que nous allions veiller aux intégrations individuelles et que nous ferions le bilan de ces dernières pour en rendre compte, et à l'association, et à la commission de l'intégration. J'ai moi-même souhaité rencontrer cette commission, et j'ai fait contacter son président, comme je m'y étais engagée. Ce dernier m'a fait savoir que la commission n'avait pas agendé cette question à ce jour. Je devrais toutefois rencontrer cette commission au début de l'année prochaine.

Pour en finir avec le budget, je me dois de vous dire qu'une intégration réussie, que ce soit individuellement pour des élèves, ou collectivement avec des classes, ne représente pas une dizaine de milliers de francs ! Je rappelle que pour des intégrations réussies, il faut en général compter deux professionnels pour cinq enfants si l'on veut faire un travail correct d'accompagnement et de suivi. Ce sont en tous cas les calculs que nous faisons dans ce type de cas. Il s'agira, le cas échéant, d'en discuter sur la base de projets. Mais ne présentez pas cela en termes anodins, car ce n'est pas le cas ! Pour l'heure, ce n'était cependant effectivement pas la raison pour laquelle nous ne sommes pas entrés en matière. Je vous ai exposé ces raisons à l'instant.

Enseignement des professions de la santé et de la petite enfance (Rub. 37.00.00)

Mme Jeannine De Haller (AdG). Je voudrais juste demander à Mme Brunschwig Graf quelles sont les mesure qu'elle entend prendre pour pallier au manque de personnel dans le secteur de la petite enfance.

Mme Martine Brunschwig Graf, conseillère d'Etat. Comme certains d'entre vous le savent, nous avons commencé par doubler l'accueil des effectifs pour la petite enfance, soit pour la filière à plein temps proposée par le centre d'enseignement des professions de la santé, et ceci pour la rentrée 2003. Simultanément - mais déjà maintenant - nous avons commencé à mettre en place des formations complémentaires qui permettent à des personnes qui avaient d'autres diplômes ou qui sont proches d'obtenir une formation complémentaire correctement. Nous avons donc ouvert des cours et nous allons encore les renforcer. Troisièmement, et là nous aurons besoin cette fois des institutions elles-mêmes, nous sommes à la recherche de stages pour permettre le développement des formations. J'ai eu l'occasion de répondre ces jours à Mme la députée De Tassigny, qui m'interpellait au nom du service de la petite enfance de la Ville de Genève. Ce sont là les premières, mais sans doute pas les seules mesures que nous serons amenés à prendre. Nous restons attentifs à ces dispositifs.

Le budget de fonctionnement du département de l'instruction publique est adopté.

CHAPITRE 4 : JUSTICE, POLICE ET SECURITE

Corps de police (Rub. 44.00.00)

M. Antonio Hodgers (Ve). Madame la conseillère d'Etat Spoerri, nous soutenons bien évidemment la création des trente-huit postes administratifs de la police, ce qui libérera plus de temps aux policiers, qui pourront ainsi être davantage sur le terrain. Cet accroissement de la police sur le terrain doit cependant se faire, selon nous, dans un cadre bien précis: celui de la prévention. En effet, les actes de violence sont restés plus ou moins stables ces dernières années, mais c'est surtout le sentiment d'insécurité qui, comme vous le savez, a progressé de manière importante dans notre République. C'est de fait une police de terrain préventive, proche de la population et des commerçants, que nous voulons.

J'ai dès lors quelques questions à ce sujet. Quand la police déclare dans la presse qu'elle est passée de vingt-neuf à sept cent cinquante-et-un îlotiers en moins de six mois, qu'est-ce que cela signifie exactement ? Que chaque policier est un îlotier, ou que plus aucun d'entre eux n'est spécifiquement dédié à cette tâche ? Quelle est, selon vous et selon la police, la fonction exacte d'un îlotier ? Quelle formation reçoivent-ils pour accomplir cette tâche spécifique ? Quels espaces-horaires leur sont aménagés pour qu'ils puissent se consacrer à leur travail de contact et de présence dans les quartiers auprès des commerçants ? En une phrase, quels sont les objectifs fixés en termes d'îlotage au sein de la police genevoise, et quel en est le bilan ?

Je souhaite par ailleurs savoir pourquoi vous avez affaibli les agents dits «RDBH» - règlement débits de boissons et hôtels - en les plaçant dans des unités d'action sans leur réserver le temps nécessaire pour être sur le terrain, soit dans les bars, dancings et hôtels... (Brouhaha.)...avec la prévention que cela amène en termes de réseaux de drogue et de prostitution. Pourquoi, après les avoir créés, avoir supprimé les îlotiers ethniques, et sur quel bilan ? Leur travail en termes de médiation a permis d'éviter que des dizaines de cas n'aillent devant la justice, entraînant des frais et des complications supplémentaires. Et pourtant, ces derniers se trouvent aujourd'hui coupés de toute formation et de tout moyen pour poursuivre leur mission. Puisque notre discussion porte sur le budget, j'ajouterai que le travail de médiation fait par ces îlotiers ethniques entraîne des économies, puisqu'une médiation réussie constitue autant d'appels à la police évités, autant de procédures administratives et pénales évitées. Nous ne comprenons donc pas les raisons de la réduction du travail de ces îlotiers.

Je souhaite savoir, en conclusion, si le travail préventif de la police de proximité sera renforcé par la création de ces nouveaux postes, ou si le temps libéré pour les gendarmes servira plutôt à mener des actions répressives.

M. Gilbert Catelain (UDC). Je comprends effectivement les soucis du parti écologiste de ne pas trop réprimer à Genève; il faut en effet trouver un équilibre satisfaisant entre répression et prévention. Or, nous disposons cette année d'une expérience intéressante que plusieurs cantons ont vécue, à savoir Expo.02. Que s'y est-il passé ? Il a été demandé aux cantons de faire preuve de collégialité; chaque canton a donc détaché un certain nombre de gendarmes pour assurer la sécurité d'Expo.02. Or, après quatre mois d'exposition, nous avons pu constaté une baisse significative du nombre des délits pour l'ensemble des cantons concernés, et ceci pas uniquement sur le site d'Expo.02, mais aussi aux alentours de ces sites, soit dans les villes de Neuchâtel, Bienne etc. Cela signifie que, dès l'instant où vous mettez des individus en uniforme dans la rue, peu importe qu'ils appartiennent à la gendarmerie, à la police municipale ou à d'autres formations, les gens se sentent sécurisés... (Chahut.)...et vous prévenez les délits !

Le choix fait par le département de libérer des gendarmes pour les mettre dans la rue et les libérer des tâches administratives nous paraît être une mesure positive, et nous soutenons cette politique. Nous regrettons en revanche que là où l'on peut recruter, notamment auprès de la police judiciaire, l'on ne fasse pas l'effort d'étoffer les effectifs. L'Alliance de gauche a tout à l'heure fait remarquer qu'il était normal de faire évoluer le budget en fonction de l'augmentation de la population. Je trouverais dès lors tout à fait normal que le personnel du DJPS, comme le personnel hospitalier ou le personnel enseignant, augmente en fonction de la population, sans quoi nous aurons des problèmes pour assurer la sécurité publique de cette dernière !

Mme Micheline Spoerri, conseillère d'Etat. Je peux vous annoncer que le Conseil d'Etat a adopté, lors de sa dernière séance, un projet de réorganisation de la police. Ce projet sera renvoyé devant votre Grand Conseil le plus rapidement possible - au mois de janvier - j'espère qu'il sera pris en considération dans le cadre de la commission judiciaire, qui a ici et là plusieurs objets en suspens tous liés au même sujet. Pour ma part, je crois que nous pourrons, sur la base de ce projet de loi, commencer par le commencement - si je peux m'exprimer ainsi - à savoir l'identification et l'amélioration des problèmes de base rendant indispensable une révision de la qualité et de la complexité de la prestation du policier en général, et ceci notamment à travers le profil de carrière, le statut du policier, sa formation ainsi que sa formation continue.

D'autre part, vous savez bien - et c'est aussi l'une des raisons de revenir sur cette organisation - que nous sommes en sous-effectif grave par rapport aux missions assignées aux cantons, et ceci d'autant plus que les objectifs du canton de Genève sont légèrement plus complexes que ceux d'autres cantons: nous devons en effet nous montrer à la hauteur à la fois par rapport à l'ensemble de la communauté genevoise et lors d'événements internationaux. Nous disposons, il est vrai, d'un certain nombre de compétences et de policiers; il nous faut cependant, compte tenu de ce sous-effectif, réaffecter transitoirement des effectifs en fonction d'autres priorités. Ceci est précisément l'objet de la fameuse motion 1296, qui entrera en vigueur dès demain - pour autant que notre budget soit adopté - car nous avons fait les travaux accompagnants pour la réaliser.

Beaucoup de choses ont été dites aujourd'hui au sujet de l'îlotage. Cela est probablement dû au vide relatif dans l'expression, peut-être de ma part ou de celle de la hiérarchie de la police. Je ne m'engagerai pas sur ce sujet, car nous sommes actuellement à la recherche d'une identité adaptée à la police de proximité dans ce canton. Nous ne revenons ni sur le principe, ni sur l'avenir des postes d'îlotiers qui ont été créés. Quant aux contrats de quartiers qui ont également été initiés par mon prédécesseur, bien qu'ils aient subi quelques turbulences ces derniers mois, ils sont à mon sens déjà prêts à repartir dans le cadre du quartier pilote choisi - Vernier; des contrats sont en outre déjà demandés dans d'autres communes. C'est vous dire, Monsieur le député, que nous ne renonçons en tous cas pas à ce que vous appelez l'aspect préventif.

Pur le reste, vous avez évoqué, toujours dans le cadre de la prévention et notamment de votre souci vis-à-vis des mineurs, le manque de contrôle effectué notamment -je dis bien «notamment» par la police quant au débit de boissons. J'ai à cet égard eu l'opportunité d'annoncer devant la commission des finances - mais également devant d'autres commissions - une réorganisation du service des autorisations et patentes. Les mois qui se sont écoulés m'ont en effet permis d'observer l'insuffisance des travaux menés en matière de contrôles que nous sommes tenus de faire, contrôles qui ne relèvent pas uniquement du service des autorisations et patentes, mais aussi d'un certain nombre d'unités de la police. Or, je suis sensible à ce que les choses se fassent correctement dans ce domaine. Je ne peux cependant pas, en l'état actuel du service des autorisations et patentes, imaginer une amélioration de la collaboration entre la police et le SAP dans l'état actuel du service des autorisations et patentes. Cela fera partie des objectifs qui seront mis en oeuvre dès le 1er février prochain.

Prison de Champ-Dollon (Rub. 45.02.00)

M. Rémy Pagani (AdG). J'interviens concernant la prison de Champ-Dollon, car j'ai lu dans la presse des déclarations de Mme la président Spoerri relatives à l'augmentation de la capacité de cette prison, et notamment à la prise en charge des enfants se trouvant dans cette prison. Nous avions depuis trois, voire quatre ans, reçu un rapport d'Amnesty International - je crois - rapport qui faisait état de l'impossibilité de maintenir la promiscuité entre les enfants de douze à dix-huit ans et les détenus de ladite prison. Or, force est de constater qu'aujourd'hui encore, trente adolescents se trouvent en état de «symbiose» - si j'ose dire - avec les détenus, même si ces adolescents ont été isolés dans un quartier spécial; l'on m'a par ailleurs dit que ce quartier était situé à côté de celui des pédophiles ! Même si ces adolescents ont été mis à l'écart, il n'en demeure pas moins que cette promiscuité est impossible à perpétuer. Je m'étonne de ces déclarations - si elles sont exactes - relatives à l'augmentation de la capacité de Champ-Dollon, car il s'agissait jusqu'à maintenant d'augmenter la capacité d'accueil et les moyens de la prison de La Clairière. Des délais et des garanties avaient d'ailleurs été donnés à ce Grand Conseil concernant la construction et la rénovation de La Clairière pour pouvoir accueillir ces adolescents; il me semble que ce délai était fixé à la fin de cette année. Or, l'on apprend maintenant qu'il faudra un, voire deux ans de plus, ce qui est inadmissible ! Tous les psychologues et psychiatres de la planète nous disent que si l'on maltraite nos enfants aujourd'hui, ils nous maltraiterons demain. Alors, si vous voulez faire de ces délinquants des véritables gangsters, continuez ainsi, maintenez-les en présence de grosse délinquance, et vous verrez demain les effets de cette promiscuité avec les adultes !

Je demande donc formellement à Mme la président de s'engager une nouvelle fois - bien que ce ne soit pas elle, mais M. Ramseyer qui se soit précédemment engagé - à faire rapidement ces travaux et à mettre à disposition des moyens éducatifs permettant d'absorber cette nouvelle délinquance, qui prend malheureusement actuellement de l'ampleur. Ceci étant, le problème de fond demeure inchangé: si nous ne nous donnons pas les moyens de mettre en place une véritable politique d'aide gratuite et volontaire aux parents, et ceci depuis le nourrisson jusqu'à l'adolescence, nous ne parviendrons pas à faire face à la montée de la violence, qui est le fait d'une société de plus en plus dure.

M. Jacques Baud (UDC). Il est vrai que Champ-Dollon constitue un véritable problème: cette prison est plus que surchargée, et nous y voyons une vingtaine de mineurs du fait que l'on repousse indéfiniment l'agrandissement de La Clairière. J'ignore quand ces travaux démarreront, mais je vous rappelle qu'ils devaient commencer cet automne, qu'ils ont été repoussés au mois de février, et je ne sais pas s'ils démarreront véritablement en février.

Il y a là des problèmes graves, d'autant plus que des événements préoccupants se produisent à La Clairière. Quant à Champ-Dollon lui-même, la situation des mamans ayant des enfants me semble particulièrement problématique: bien qu'ils ne soient guère nombreux, il est en effet extrêmement gênant de voir ces enfants en cet établissement. Il est donc temps de songer à un agrandissement de cet établissement, afin que ces enfants, même s'ils sont très jeunes, ne soient plus en contact avec des délinquantes qui font figure de très mauvais exemples. Des travaux urgents doivent en outre être faits. Je pense notamment à la toiture, qui prend l'eau depuis des année, et dont les travaux nécessaires à la réfection n'ont toujours pas été réalisés. Je pense également à la surpopulation croissante ainsi qu'au danger que représentent certains groupes de détenus par rapport à d'autres détenus.

Au vu de tous ces problèmes, il est temps que l'on se préoccupe d'agrandir de manière sérieuse Champ-Dollon, que l'on commence les travaux d'agrandissement de La Clairière et que l'on pense également aux femmes dont les enfants se trouvent malheureusement à Champ-Dollon.

Mme Micheline Spoerri, conseillère d'Etat. J'espère, Monsieur Pagani, que vous avez lu ceux de mes propos qui étaient dans la «Feuille d'avis officielle» car ce sont les seuls propos que j'ai tenus. Le reste n'était que commentaires, auxquels je n'entends même pas ici apporter mon propre commentaire.

Vous avez, je l'espère, pris conscience qu'il s'agissait d'examiner le problème de la détention dans toutes ses dimensions, problème dont je me suis efforcée de faire l'inventaire à l'occasion de l'anniversaire de Champ-Dollon. Dans cet inventaire figure effectivement la surpopulation de la prison, qui constitue un grave problème car, comme vous le savez, nous ne sommes pas en mesure d'accueillir les détenus de façon correcte. Les risques d'émeutes se trouvent par ailleurs évidemment accrus. L'aspect de la détention, qui se veut notamment une sécurité prise vis-à-vis de la population dans son ensemble, n'est donc pas forcément assurée. L'autre point évoqué concerne les mineurs. Je regrette que les travaux n'aient pas pu commencer à la date prévue, mais je peux vous assurer que ni moi, ni la direction de l'office pénitentiaire n'en sommes responsables.

Nous n'avons pas évoqué le problème de l'article 43 cher à la commission des visiteurs de prison, à mon collègue Unger et à moi-même; nous n'avons pas non plus évoqué la pré-prison, qui est un véritable problème. Mais c'est dans son ensemble qu'il convient d'examiner les choses. Je suis pour ma part le plus préoccupée par la part des récidivistes dans les établissements de détention en général; cette part importante démontre bien que les problèmes liés à la prévention, notamment pour les mineurs, ne sont pas suffisamment pris en main. Je souhaitais - je sais fort bien que l'on ne pourra pas faire tout en même temps, et je sais également que l'on parle de tout cela depuis fort longtemps - dans le cadre de cette déclaration, sensibiliser les autorités politiques, et notamment le Grand Conseil, à ces problèmes. Nous devrons effectuer un choix parmi les différents axes que j'ai retracés et faire un calendrier de travail. Il faudra également, si ce n'est à ce budget ce sera au prochain, planifier l'amélioration des établissements pénitentiaires.

Certains événements récents qui se sont produits à La Clairière nous causent énormément de soucis, et nous redoublons d'attention. Il est certes fort malheureux que nous devions héberger des adolescents à Champ-Dollon, mais nous n'avons pas le choix. Je vous rassure au sujet de la proximité de ces adolescents avec des détenus pédophiles: je ne suis en effet pas convaincue que ce que l'on vous a dit soit correct, et je peux vous assurer que l'on prend les plus grandes précautions pour que ces mineurs soient détenus dans les meilleures conditions possibles. Il y a cependant une aggravation dans les faits de violence actuellement, ce qui est fort préoccupant. Comme je l'ai déclaré, je ferai tout ce qui est en mon pouvoir pour que la situation avance. Votre Grand Conseil devra cependant aussi prendre ses responsabilités à un moment donné.

Le budget de fonctionnement du département de justice, police et sécurité est adopté.

CHAPITRE 5: AMENAGEMENT, EQUIPEMENT ET LOGEMENT

Le budget de fonctionnement du département de l'aménagement, de l'équipement et du logement est adopté.

CHAPITRE 6: INTERIEUR, AGRICULTURE, ENVIRONNEMENT ET ENERGIE

Le budget de fonctionnement du département de l'intérieur, de l'agriculture, de l'environnement et de l'énergie est adopté.

CHAPITRE 7: ECONOMIE, EMPLOI ET AFFAIRES EXTERIEURES

Présidence et secrétariat général (Rub. 71.00.00)

M. Rémy Pagani (AdG). Nous avons appris par la presse les difficultés rencontrées par le Conseil d'Etat pour mettre en place, durant ces huit derniers mois, le nouveau conseil de prospective économique qui est censé remplacer le conseil économique et social. Deux problèmes se sont en effet posés au Conseil d'Etat: d'une part, trouver des personnes prêtes à siéger dans ce conseil; d'autre part, trouver un budget. Ce deuxième problème a d'ailleurs occasionné la démission d'une majorité de ce conseil. Nous avions pour notre part déjà dit au moment de voter un budget de 400 000 F l'année passée, tant en commission qu'en plénière, que nous trouvions assez particulier que le Conseil d'Etat construise un comité spécial chargé de donner des mandats pour engager des études de prospective économique plutôt que de se donner les moyens d'engager des mandataires pour mener ces études de prospective économique. En outre, la première piste donnée par le Conseil d'Etat à ces «sages» (Brouhaha.) -enfin, à ces personnalités - pour faire une étude de prospective économique a été: «Comment voyez-vous la Genève économique de 2020 ?». Je trouve quant à moi la définition d'un tel mandat quelque peu large, si vous me pardonnez l'expression !

Nous avions donc déjà soulevé cette problématique, et la réalité nous incite à maintenir notre avis selon lequel, si le Conseil d'Etat veut faire des études de prospective économique en fonction de questionnements et d'interrogations précises - par exemple pour connaître l'avenir économique de l'industrie dans notre canton - il dispose de tous les moyens pour définir des mandats et donner à des institutions privées ou publiques - je pense ici à l'Université - les moyens financiers de le faire. Ce nouveau CES n'a donc, de notre point de vue, aucune raison d'être. Il suffit de voir les difficultés rencontrées par ce conseil.

Nous avions également soulevé un deuxième problème: comme je l'ai affirmé à de nombreuses reprises, y compris en plénière, nous pensions que le budget donné à cette nouvelle structure serait complètement obsolète, puisque tout ce budget serait dépensé par des charges salariales. La majorité du conseil a bien saisi cela, puisqu'elle a donné sa démission en affirmant qu'elle n'avait pas les moyens de réaliser la mission que lui avait confiée le Conseil d'Etat, la plus grande part des 400 000 F de budget venant à être mangé par les charges salariales.

Ceci étant, nous prenons acte du fait que le Conseil d'Etat a enfin fait ce qu'il aurait dû faire depuis une année, à savoir dire au personnel de l'ancienne structure qu'il n'était plus possible de poursuivre ainsi et de leur proposer de les intégrer ou de les réintégrer dans l'administration - ce dont nous nous réjouissons. Toujours est-il que le problème demeure. Sur le fond, nous maintenons que, si le Conseil d'Etat souhaite faire des études prospectives, il doit s'en donner les moyens. Notre amendement propose donc de supprimer la rubrique budgétaire destinée au conseil de prospective économique et d'allouer, dans un premier temps, 200 000 F au Conseil d'Etat sous une nouvelle rubrique budgétaire: cette allocation lui donnerait les moyens de définir un mandat et de le proposer à une institution publique ou privée.

Voici ce qu'il en est de notre amendement. J'espère qu'il sera pris en considération par cette plénière.

M. David Hiler (Ve), rapporteur. Le conseil économique et social a finalement été, comme d'autres objets, institué par une loi. Bien que faisant personnellement partie des opposants à ce conseil, je vous rappelle que l'on ne peut pas, sur le plan institutionnel, supprimer par un procédé budgétaire une institution prévue par une loi. Un tel procédé est impossible et risquerait de nous mener assez loin par la suite: cela signifierait en effet qu'une série de lois, concernant par exemple les prestations sociales, pourrait se voir annulée par un amendement budgétaire, et ceci sans que la question ne soit soumise au peuple. C'est pourquoi je demande à ce Grand Conseil, pour des raisons purement institutionnelles, de rejeter l'amendement, et ceci bien que je ne sois toujours pas convaincu par le conseil économique et social. En effet, s'il faut changer quelque chose, c'est la loi !

Par ailleurs, compte tenu des services administratifs et des lignes pour honoraires et mandats dont dispose M. Lamprecht, il me semble que, si ce dernier doit mandater des experts, l'enveloppe budgétaire est actuellement suffisante.

M. Rémy Pagani (AdG). Je m'étonne une nouvelle fois de la remarque de M. Hiler. Ma collègue évoque l'exemple de l'hôpital, mais il est de nombreuses autres institutions de notre République pour lesquelles nous votons des budgets et des places qui ne sont pas utilisés ou pour lesquelles nous enlevons des financements sur des places pour les transférer ailleurs. Invoquer la loi existante et la nécessité de la respecter m'apparaît dès lors un peu particulier.

La signification de notre amendement ne me semble en outre pas avoir été comprise par M. Hiler: ce n'est pas à M. Lamprecht, mais au Conseil d'Etat, que l'on octroierait ces 200 000 F ! La majorité de ce Conseil a en effet, jusqu'à preuve du contraire, accepté la création du conseil de prospective économique en se basant sur le fait que le Conseil d'Etat disait avoir besoin de cet instrument et de ses spécialistes pour lui indiquer la direction dans laquelle aller par rapport aux mandats. Nous estimons que cette demande est fondée. et nous donnerions au Conseil d'Etat les moyens, par cet amendement, de mettre en oeuvre cette volonté. Je saisis donc mal en quoi le département de M. Lamprecht se trouve impliqué dans ces études de prospective économique.

Ceci étant, l'on se retrouvera une fois de plus avec le même problème l'année prochaine, car le conseil de prospective économique risque de mal fonctionner - ou de ne pas fonctionner du tout car, d'après ce que j'ai entendu, les personnes ayant démissionné ne sont pas disposées à se remettre dans la course.

La loi et le budget relatifs à ce conseil me paraissant inutiles, je vous demande, dans un souci d'efficacité, de voter cet amendement.

M. Carlo Lamprecht, conseiller d'Etat. J'aimerais tout d'abord dire vous dire, Monsieur Pagani, que le conseil de prospective économique et social a été voté par ce Grand Conseil et que, comme l'a fort justement rapporté M. le rapporteur, l'on ne peut pas balayer ce conseil en enlevant la subvention attribuée à l'ancien conseil. Je rappelle également que l'on s'est donné la peine de mettre sur pied un nouveau conseil de prospective qui n'est pas un conseil de prospective économique, comme vous venez de le répéter à de multiples reprise lors de votre intervention, mais un conseil de prospective de manière générale. Le mandat que nous avions donné à ce conseil était d'étudier le développement de Genève en 2020 - ou en 2010, peu importe - non pas dans une perspective strictement économique, mais en intégrant de multiples thèmes. Preuve en est que le Conseil d'Etat a pu obtenir, dans le choix des membres de ce nouveau conseil, la participation de personnes actives dans les mondes artistique, culturel, social, caritatif, ecclésiastique, et pas uniquement économique.

C'est donc cette prospective-là, sur laquelle d'autres villes et régions sont également en train de réfléchir, que nous souhaitions faire. Ainsi nous avons pu obtenir la participation d'une équipe d'individus compétents, expérimentés et, si je puis le dire ainsi, prêts à mouiller leur chemise tant ils étaient emballés par ce projet. Il est vrai que les événements dont vous avez relaté l'existence - un secrétariat dont ils ne voulaient pas, une organisation dont ils voulaient faire à la fois les frais et l'organisation - ont poussé ces personnes à démissionner. Cette décision a peut-être été en partie motivée par les hésitations du Conseil d'Etat, mais elle découlait également de la volonté de respecter le personnel actuellement en place, et non de licencier; vous avez d'ailleurs rappelé, Monsieur Pagani, que vous teniez également aux postes de travail et à une certaine justice en la matière.

Je vous demande pour ma part, Mesdames et Messieurs, de conserver ce budget. Je suis en effet persuadé qu'un grand nombre de personnes pourra continuer à faire partie de ce conseil et, si quelques démissionnaires ne revenaient pas sur leur décision, nous trouverons d'autres personnes évoluant dans le même domaine de connaissances pour les remplacer. Je souhaite également que l'on puisse conserver la même somme. Le Conseil d'Etat étant en train de régler le cas du personnel de l'ancien conseil, je vous demande de refuser l'amendement proposé par M. Pagani.

Le président. M. Pagani nous propose donc deux amendements qui sont liés, dans la mesure où le second tombe si le premier est rejeté. Le premier amendement se formule ainsi: «Rub. 71.00.00.364.06: - 405 000 F». Le second vise à augmenter le budget du Conseil d'Etat de 200 000 F sous une nouvelle rubrique.

Mis aux voix, cet amendement est rejeté.

Le président. Le second amendement tombe donc automatiquement. Nous poursuivons l'examen du département.

Office cantonal de l'emploi (Rub. 74.01.00)

M. Rémy Pagani (AdG). Comme vous l'avez constaté, le peuple suisse a rejeté le référendum contre les modifications de la loi sur l'assurance-chômage; nous avons en revanche constaté que plus de 57% de la population genevoise tenait à conserver les modalités actuelles de la gestion du chômage. Nous sommes pour notre part essentiellement, voire même totalement acquis à cette dernière idée. Nous estimons ainsi qu'il faut préserver le système qui consiste, d'une part à donner cinq cent indemnités fédérales aux chômeurs - indemnités qui passeraient avec la nouvelle loi à quatre cent - d'autre part à proposer une offre de travail dans l'administration afin de redonner droit à une nouvelle période d'indemnité de quatre cent jours. (Brouhaha.)S'il y a deux cent jours de perdus, il existe toutefois un mécanisme au niveau fédéral qui peut être demandé par les cantons à partir d'un taux de chômage de 4 ou 5 %. Au vu du taux de chômage relativement élevé de notre canton - il a, je crois, dépassé les 6% - nous pensons que le département de M. Lamprecht va faire marcher ce mécanisme. Toutefois, le retour du balancier de ce mécanisme impose aux cantons la prise en charge d'une partie de cette somme qui serait allouée aux chômeurs pour combler le trou existant aujourd'hui. Ceci dit, il faut le faire rapidement car, comme vous le savez, certains chômeurs qui étaient entre la 400ème et la 500ème indemnité voient tout d'un coup se réduire immédiatement, d'un jour à l'autre, enfin le 1er janvier... Non ? Enfin, il faudra que vous nous expliquiez cela ! (L'orateur est interpellé.)En juillet, exactement: les chômeurs qui seront en fin de droit se retrouveront à ce moment immédiatement au RMCAS, ou pris en charge par l'Hospice général.

C'est pourquoi nous vous proposons un amendement qui vise simplement à ajouter 2 millions à la rubrique 74.01.03. Cette fois-ci j'ai mis un plus voyez-vous, Madame la présidente du département des finances. Les services du M. Lamprecht m'ont indiqué que la somme nécessaire serait plutôt de 1,8 millions, mais il faut être conscient que le chômage va malheureusement augmenter ces prochains mois et cette prochaine année.

Nous vous proposons donc de voter immédiatement ce budget pour que nous puissions faire marcher le mécanisme confédéral et que le vote de la population genevoise soit acquis pour les chômeurs de notre canton.

Cet amendement se formule ainsi: «Rub. 74.01.03: + 2 000 000 F».

M. Souhail Mouhanna (AdG). M. Pagani a dit l'essentiel. J'aimerais simplement exprimer le voeu que le Conseil d'Etat concrétise la volonté des citoyennes et des citoyens genevois lors du vote au sujet de la LACI: une majorité de nos citoyens a en effet opté pour le maintien des prestations de l'assurance-chômage. De plus, le Conseil d'Etat a lui-même évalué les charges qui résulteront de l'application de la LACI au niveau des prestations du canton pour les chômeurs à 1 800 000 F pour 2003. J'ai donc été étonné de constater que, lorsqu'il s'agit d'amendements proposant un certain nombre d'engagements budgétaires, l'on nous demande de trouver la compensation ailleurs. En revanche, bien que le Conseil d'Etat ait évalué à 1 800 000 F les frais occasionnés par le transfert sur les organismes sociaux et les organismes de l'Etat des effets pervers de cette LACI, il n'a pas prévu de charges en conséquence !

C'est la raison pour laquelle je vous invite, Mesdames et Messieurs les députés, à accepter cet amendement. Si le chômage en venait à diminuer - ce que nous souhaitons - de l'argent apparaîtra en boni au niveau des comptes, et cela sera tant mieux ! Cette mesure n'alourdit en rien notre budget: il s'agit au contraire d'une mesure de prudence, qui permet au Conseil d'Etat de disposer des moyens financiers pour concrétiser la volonté de la population genevoise.

Le président. Je relève que le Conseil d'Etat n'est pas soumis, concernant l'alourdissement des charges, aux mêmes impératifs que les députés. La parole est au conseiller d'Etat Lamprecht.

M. Carlo Lamprecht, conseiller d'Etat. Vous savez quelle a été ma position par rapport à la révision de la LACI: je suis aussi préoccupé que vous par rapport aux prestations et à la perte de ces prestations. J'aimerais simplement vous rappeler que, lors de sa dernière séance avant le dépôt des amendements à la commission des finances, le Conseil d'Etat a décidé que ces dépassements - qui pourraient être, comme l'a dit M. Mouhanna, de 1,8 million - seraient traités en dépassement de crédits. L'on ne sait d'ailleurs pas encore actuellement s'il s'agira de 1,8 de 2,5 ou de 1,3 millions ! Cette décision a donc été prise par le Conseil d'Etat et présentée à la commission des finances le 11 décembre dernier, qui en a décidé ainsi: les dépenses excédentaires seront traitées en dépassement de crédits.

Je m'engage pour ma part dès aujourd'hui à présenter au Conseil d'Etat la demande à la Confédération, puisque nous dépassons le taux de chômage de 5% prévu dans la loi, afin qu'à partir du mois de juillet, date à laquelle cette mesure entrera véritablement en vigueur, nous soyons assurés par la Confédération d'avoir le 80% des sommes nécessaires - puisque nous en paierons le 20%.

Je conclurai en rappelant que tant le Conseil d'Etat que la commission des finances m'ont donné la garantie que l'on traiterait cela en dépassements de crédits.

Le président. Je mets donc aux voix l'amendement de M. Rémy Pagani... Monsieur Pagani, vous reprenez la parole ? Il ne faudra pas vous plaindre ensuite ce soir pour le contrat de prestation ! J'essaie d'aller assez vite que possible, mais je vous rends attentifs au fait que nous n'avons pas encore fait les investissements et que, techniquement, les vingt-trois projets en deux débats prendront en tous cas une heure.

Monsieur Pagani, en avant !

M. Rémy Pagani (AdG). Merci, Monsieur le président. Je me pose simplement la question de savoir si cela vaut la peine de maintenir cet amendement dans la mesure où le Conseil d'Etat a pris la décision formelle de traiter ce problème en dépassement de crédits, ce que j'ignorais. (Brouhaha.)Je prends donc acte de cette décision et je retire mon amendement.

Solidarité internationale (Rub. 79.04.00)

M. Robert Iselin (UDC). Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, je suis un peu chiffonné par l'image que l'on s'amuse à donner de l'UDC, (Brouhaha.)que ce soit ici, dans les élucubrations de Mme la vice-présidente du Conseil fédéral hier soir ou dans d'autres situations encore.

La proposition qui a été faite s'explique simplement ainsi: en dépit des efforts méritoires et remarquables de Mme Calmy-Rey, le canton a encore dix à douze milliards de dettes. (Protestations.)Avec la banque cantonale, c'est à peu près cela ! Je constate par ailleurs que le gouvernement fédéral n'a pas hésité à raboter récemment l'aide au développement, mesure qui a été voté par les partis bourgeois dans leur ensemble.

Je ne comprends personnellement pas, même si je suis prêt à faire beaucoup de choses pour l'étranger le jour où mes finances seront à peu près en ordre, comment l'on peut allègrement dépenser douze millions pour l'étranger alors même que le peuple de la Confédération helvétique en donne déjà beaucoup de sa propre poche.

C'est la raison pour laquelle nous avons déposé cet amendement qui se formule ainsi: «Rub. 79.04.00: - 11 953 209 F».

Le président. Merci Monsieur le député. Un certain nombre d'orateurs sont inscrits. L'on interrompra le débat à midi et on le reprendra à 14 h.

Mme Anne-Marie Von Arx-Vernon (PDC). Par cet amendement, nous avons la preuve que l'UDC ne possède aucune vision politique dans le domaine de la solidarité. Nous savions que cela était déjà le cas à l'intérieur du pays, mais l'on constate aujourd'hui que c'est également le cas à l'extérieur du pays, ce qui démontre une incohérence immense. En effet, si l'on refuse la solidarité pour l'étranger à l'intérieur de notre pays, l'on peut espérer au moins rentrer dans une logique d'aide aux pays en voie de développement sur place. Eh bien non ! L'UDC s'enferme dans une arrogance qui renie même la beauté de notre devise, fondatrice de notre pays - auquel elle, je pense, attachée - qui est «Tous pour un, un pour tous».

Par ce type d'amendements, Messieurs et Mesdames de l'UDC, vous voulez isoler encore davantage la Suisse et la fossiliser dans un rôle indigne des valeurs que la majorité de ce parlement partage. Quant à l'aspect économique de l'aide au développement, il faut savoir qu'un franc investi à l'étranger dans l'aide internationale rapporte un franc quarante en Suisse et confirme vingt mille emplois. C'est la raison pour laquelle le PDC rejettera avec force et sagesse cet amendement ! (Vifs applaudissements.)

Mme Micheline Calmy-Rey, conseillère d'Etat. Je souhaite répondre à M. Iselin: la dette du canton de Genève n'est pas de dix, douze, treize ou quatorze milliards, mais de 9 200 000 000 F. L'on ne peut de surcroît pas ajouter sans autres la dette de la banque cantonale, car cette dernière n'a pas de dette: le canton va prendre en charge les deux milliards sept cent millions de francs de pertes liés au transfert des créances douteuses, mais ces 2 700 000 000 F ne constituent pas une dette à l'heure actuelle. Le canton paie au fur et à mesure des réalisations de la Fondation et n'a, pour l'instant, pas encore dû emprunter un seul franc pour financer les pertes de la banque cantonale. Les additionner à la dette du canton constitue donc une erreur, Monsieur Iselin !

Par ailleurs, le discours que votre parti tient sur l'immigration est un discours dur et fermé, qui vise au renvoi d'un certain nombre de personnes. Je ne comprends dès lors pas comment, dans votre logique même, vous pouvez ne pas penser à faire quelque chose dans les pays concernés, et donc affecter des crédits dans ces pays afin d'être cohérent avec la politique que vous défendez en matière d'immigration. Je vous le dis, même si cela n'est pas ma manière de voir les choses.

Je vous demande en conclusion, Mesdames et Messieurs les députés, de bien vouloir, pour des raison de cohérence, de logique et de solidarité, refuser l'amendement présenté par M. Iselin. (Applaudissements.)

M. Jean-Michel Gros (L). Mme la conseillère fédérale Calmy-Rey a plus ou moins dit ce que je souhaitais dire. Je désire cependant insister sur le fait que je n'ai pas découvert l'UDC dans ce Grand Conseil, mais que je l'ai pratiqué pendant douze ans à Berne. Or, même l'aile dite «dure» zurichoise n'a jamais osé tenir un tel langage demandant la suppression de l'aide internationale !

Mesdames et Messieurs de l'UDC, il conviendra d'être un peu cohérent! Vous pour qui les réfugiés sont devenus une quasi obsession, vous qui voulez viser les faux réfugiés - en d'autres termes, les réfugiés économiques - vous devriez réaliser que, pour que ces réfugiés économiques ne se trouvent pas à nos frontières, c'est dans les pays où ils sont qu'il convient de les aider. En supprimant cette solidarité internationale, vous ne faites que renforcer l'attractivité des pays riches pour ces personnes. C'est la raison pour laquelle le groupe libéral votera contre votre amendement. (Applaudissements.)

M. Souhail Mouhanna (AdG). J'ai écouté avec beaucoup d'attention M. Iselin concernant le «coût» de l'aide internationale: il parlait de douze millions et disait que cela était inacceptable pour les Suisses. Mais nous savons tous, d'après les évaluations faites par les milieux bancaires, que les montants se trouvant dans les banques et les institutions bancaires suisses de gestion de fortune avoisinent ou dépassent largement les trois mille milliards: trois mille milliards ! Nous savons également fort bien qu'une bonne partie de ces trois mille milliards provient de pays étrangers et ont été placés en Suisse par des gens n'en étant pas légitimement les propriétaires et à cause desquels beaucoup de populations se sont vues honteusement spoliées par ces mêmes milieux. Lorsque l'on compare ces douze millions - à supposer qu'il s'agisse bien de douze millions - à ces milliers de milliards, il ne s'agit même pas d'une goutte d'eau ou d'un petit pourboire par rapport aux sommes qui ont été envoyées dans nos banques et dont vous vous enorgueillissez en prétendant que c'est la place financière suisse qui nous procure des milliers et des dizaines de milliers d'emplois. C'est justement de l'argent étranger, Monsieur Iselin !

Le minimum de la décence voudrait que l'on ristourne à la population qui a été spoliée ne serait-ce qu'une toute petite partie de cet argent. Et douze millions, c'est trop peu de choses par rapport à ce que l'on a pris à ces gens-là.

Je profite de cette intervention pour déposer une motion d'ordre, puisque vous voulez avancer: je suggère que l'on cesse les débats et que l'on passe au vote.

Le président. Je donne d'abord la liste des orateurs. A part M. le conseiller d'Etat Lamprecht, sont encore inscrits MM. les députés Iselin, Pagan, Catelain et Marcet. (Brouhaha.)La motion d'ordre, qui nécessite l'approbation des deux tiers de l'assemblée, consiste à passer directement au vote. Je vous prie de regagner vos, car nous voterons par vote électronique. Chacun est à sa place ? Monsieur Kunz, vous ne prenez pas votre place ? Vous sortez ?

Mise aux voix, la motion d'ordre est adoptée par 45 oui, contre 9 non et 1 abstention.

Le président. Je mets en conséquence immédiatement aux voix l'amendement qui vous est soumis. Je rappelle sa formulation: «Rub. 79.04.00: - 11 953 209 F».

Mis aux voix, cet amendement est rejeté.

Le budget de fonctionnement du département de l'économie, de l'emploi et des affaires extérieures est adopté.