République et canton de Genève
Grand Conseil
Séance du vendredi 20 septembre 2002 à 14h
55e législature - 1re année - 11e session - 59e séance
PL 8592-A
Premier débat
M. Alberto Velasco (S), rapporteur. Je tiens tout d'abord à préciser que ce projet de loi vise le lien entre différents services sociaux, éducatifs, droits parentaux, état civil, judiciaires, actes financiers et administratifs. C'est donc un projet de loi qui, par ce qu'il représente, est assez sensible. A ce titre, Monsieur le président, j'ai déposé un amendement, comme dans le projet précédent, en tant que rapporteur. Mais il est vrai que je n'aurais pas dû le faire en tant que rapporteur. Je le retire donc en tant que rapporteur, mais j'aimerais, Monsieur le Président, le reprendre en tant que député.
Le président. Il faut que vous m'expliquiez la nuance !
M. Alberto Velasco. Je ne peux pas le faire en tant que rapporteur de majorité, Monsieur le président, mais je peux le faire en tant que député. Rien ne l'interdit dans le règlement, Monsieur le président !
Le président. Non, mais vous irez à votre place pour présenter votre amendement de député !
M. Alberto Velasco. Parfaitement, Monsieur le président !
Mme Martine Brunschwig Graf, conseillère d'Etat. J'entends bien que l'on présente des amendements. Je n'ai pas encore vu si l'amendement de M. Velasco se rapportait au bon projet, mais ce n'est pas grave. Cela étant, il est toujours dangereux d'ajouter sur le siège ce type d'amendement pour la raison suivante. S'il est vrai que les systèmes d'information prévoient normalement ce type de disposition, il est tout aussi vrai que les problèmes peuvent s'avérer assez ardus dans certaines circonstances. Je trouverais particulièrement désagréable, pour ne pas dire autre chose, que de traiter sur le siège une telle disposition, rappelant qu'il existe une loi générique sur la protection des données, sur la protection de la sphère privée et sur un certain nombre de règles relatives notamment aux systèmes informatiques et à leur sécurité.
Je propose donc que nous n'adoptions pas cet amendement. Je propose en revanche à M. Velasco, à la commission des finances et dans le cadre des discussions sur le budget, d'interroger de façon plus formelle les responsables qui mettent en place et en oeuvre ce type de système pour voir quel genre de dispositions sont prises. Et si nous devions l'adopter un jour dans la loi - je rappelle que la loi sur la protection des données est en révision - nous pourrions à ce moment-là traiter cette problématique de façon plus précise.
Je demande donc que l'on rejette cet amendement, non sans dire qu'il revêt un souci légitime de protection de la sphère privée.
M. Alberto Velasco (S). Je ne sais pas, Monsieur le président, si l'on débat actuellement sur l'amendement ou s'il s'agit du débat d'entrée en matière... S'il s'agit du débat d'entrée en matière, j'aimerais préciser qu'il serait aussi souhaitable que le personnel soit associé à la mise en place de ce projet. L'utilisation et l'efficacité de ce projet doivent être garanties. A ce titre, il est important, très important même, au vu de l'expérience passée, d'associer le personnel.
Concernant l'amendement, je me demande, Monsieur le président, s'il ne vaut pas mieux que je le défende lorsque vous en serez à l'article concerné.
Le président. Je le passerai en deuxième débat, Monsieur Velasco.
Mis aux voix, ce projet est adopté en premier débat.
Deuxième débat
Mis aux voix, le titre et le préambule sont adoptés, de même que les articles 1 à 4.
Le président. Nous sommes donc saisis d'un amendement du rapporteur, qui, il faut bien le dire, Monsieur Velasco, n'a rien à voir avec le projet de loi étudié en commission. Cette pratique est absolument surprenante. Le projet de loi est un investissement et vous voulez y inclure un article éminemment politique, peut-être justifié, mais éminemment politique. Je ne peux pas faire autrement que de vous faire la remarque et de le soumettre au vote. Je demande donc à ce Grand Conseil de suivre la proposition de Mme Brunschwig Graf.
M. Claude Blanc (PDC). Vous m'avez un peu coupé l'herbe sous les pieds, Monsieur le président, mais, en tant que membre de la commission des finances, je trouve particulièrement détestable que M. Velasco dépose maintenant cet amendement. Il est vrai qu'il avait soulevé ce problème lors des travaux de la commission, mais il n'avait pas fait de proposition d'amendement à ce moment-là. Il n'en fait en tout cas pas mention dans son rapport. Ensuite, tout a été voté à l'unanimité. M. Velasco vient à présent, de son propre chef, proposer cet amendement, alors qu'il ne s'agit pas d'un rapport de majorité, mais d'un rapport d'unanimité, un amendement sur un sujet qui n'a pas été voté en commission. La moindre des choses eût été que vous nous fassiez voter en commission. On aurait refusé votre amendement et cela vous aurait donné le droit de revenir au Grand Conseil pour le présenter. Mais, entre parenthèses, cela ne vous donne pas le droit d'utiliser le rapport pour le faire. Vous avez des manières de travailler, Monsieur Velasco, qui deviennent de plus en plus difficiles. Il faudra vous reprendre un peu, sans quoi l'on ne pourra pas continuer comme ça et l'on ne pourra plus vous confier de rapports.
M. Alberto Velasco (S). Je me reprendrai, mon cher, je me reprendrai !
Je crois que je peux, en tant que député, déposer un amendement sur tout projet de loi discuté dans ce Grand Conseil. J'ai expliqué au préalable, Monsieur Blanc, que je retirais mon amendement en tant que rapporteur. Si vous voulez des excuses, je peux vous les faire, mais je n'ai par contre rien à me reprocher politiquement et je défendrai mon amendement.
Il est vrai, Monsieur le président, que l'on garantit, dans les objectifs visés, «la sécurité et la confidentialité des données». Il est aussi question d'automatiser et de sécuriser les échanges d'informations. Mon amendement parle d'autre chose. Il apporte un élément supplémentaire. Il est prévu dans le projet un système qui permette d'identifier a posterioriles personnes ayant accédé aux informations et qui garantisse la sphère privée. Dans le cadre d'un tel investissement, prévoir cet élément, Madame la conseillère d'Etat, Monsieur le président, ce n'est pas vraiment difficile. Ce qui est politique dans cette histoire, c'est la position du Conseil d'Etat et la position de certains députés, qui ne voteront pas cet amendement, non pas parce qu'il est illogique, mais sur la base d'une position strictement politique. Toute personne qui saisit vraiment l'importance de ce projet de loi, à qui il est adressé et les services concernés, comprendra aisément pourquoi je désire inclure cet amendement dans ce projet et ses garanties.
M. Claude Blanc (PDC). Sur le fond, Monsieur Velasco, on peut à la limite comprendre, s'agissant de cet amendement, que vous désiriez que cette garantie figure quelque part, mais pas dans ce projet de loi. Je suppose que ce genre de disposition existe. Je n'ai toutefois pas la législation dans son ensemble sous les yeux. Mais il est bien évident que toutes les applications informatiques de l'Etat sont soumises aux mêmes règles. On ne peut pas en soumettre une à l'occasion du vote sur un problème technique d'équipement. On ne peut pas ajouter un amendement sur la protection de la sphère privée. C'est une loi de portée générale, mais qui doit, sauf erreur, exister. Je ne l'ai toutefois pas en tête. Mais si elle n'existe pas, il faudra la rédiger. Il faudra élaborer une loi de portée générale qui englobera toutes les applications informatiques de l'Etat.
Dans le cas présent, il s'agit d'un investissement pour un système. Oubliez-vous alors tous les autres que nous avons déjà votés ? Pourquoi cette loi serait soumise à un système différent de l'ensemble des applications informatiques de l'Etat ? Je crois qu'il y a un vice de construction de l'esprit. Cela ne joue pas sur le fond, Monsieur Velasco ! Je ne sais pas si Mme la conseillère d'Etat peut peut-être nous rassurer à ce sujet ?
Mme Martine Brunschwig Graf, conseillère d'Etat. Je crois, Monsieur le président, que M. Blanc a tout à fait raison d'intervenir. La problématique générale est la suivante. Il s'avère obligatoire d'adopter les garanties nécessaires pour tous les systèmes d'information que nous mettons en place. C'est valable pour la protection de la jeunesse, mais aussi pour les systèmes de santé, tout comme c'est valable pour l'administration fiscale, à propos de laquelle j'ai relevé tout à l'heure que vous étiez moins inquiet, alors même que la loi actuelle nous contraint tout de même à la respecter. C'est donc valable pour l'administration fiscale comme pour les autres. Ce que dit M. le député Blanc est ainsi tout à fait frappé au coin du bon sens.
Je vous ai dit trois choses. La première, c'est qu'il y a une loi générale qui nous impose un certain nombre d'obligations. La deuxième, c'est que nous avons un règlement sur les systèmes informatiques, qui nous donne aussi quelques instructions et règles. La troisième, c'est que vous avez la possibilité, en commission, de vérifier la situation en examinant les crédits informatiques et, à l'occasion de la présentation du budget, avec le directeur général du Centre des technologies de l'information, et de voir la façon dont sont prises en compte de manière générale les précautions indispensables liées aux systèmes d'information.
En revanche, il n'y a pas de sens à ajouter dans des rubriques d'investissement, au gré d'un projet de loi ou d'un autre, des dispositions de ce type. Tout d'abord parce qu'elles sont lacunaires. Si vous voulez prétendre à la protection de la sphère privée, ce ne sont pas les seules dispositions qu'il s'agit de prendre dans un système. Ce qui laisse entendre que les autres ne sont pas nécessaires. Si, au gré de vos préoccupations, vous décidez d'ajouter dans chaque crédit d'investissement, au-delà des crédits à engager, des dispositions de ce type, nous n'en sortirons alors jamais. Je crois qu'il faut comprendre cela, Monsieur le député. Nous ne rejetons pas vos préoccupations. Nous vous engageons à en faire part dans le cadre du budget, au bon endroit. Nous vous demandons donc formellement de retirer cet amendement. Il laisse en effet entendre que tous les autres projets sont dispensés d'appliquer ces règles.
M. Alberto Velasco (S). Tout d'abord, j'aimerais dire à M. Blanc que je comprendrais s'il s'agissait simplement d'un équipement technique. Mais il ne s'agit en l'occurrence pas seulement d'un équipement technique. Il y a un logiciel et, derrière ce logiciel, une réflexion de l'esprit, de l'être humain, une construction de l'esprit humain. C'est à ce titre qu'il y a danger.
Je suis effectivement d'accord avec vous, Monsieur Blanc. S'il y avait une loi générale, peut-être bien : mais cette loi générale n'existe pas. En attendant que cette loi soit adoptée, je trouve important que l'on mette des garde-fous.
Ceci dit, Madame la présidente... Elle part... Madame la présidente !
Le président. Il y a une négociation entre votre chef et Mme Brunschwig Graf !
M. Alberto Velasco. Avant de déposer cet amendement, Madame la présidente, j'ai quand même passé une matinée avec les collaborateurs du CTI pour comprendre comment ce système était conçu et si ces garde-fous existaient effectivement. Je peux vous dire que mes propos et mon souci ont été largement compris par ces personnes, qui m'ont encouragé à aller dans ce sens-là, parce que cela leur permettait justement de prévoir ce système.
Ce que je veux dire par là aujourd'hui, Madame la présidente, c'est que cet amendement, pour lequel vous imaginez qu'il y aura des conséquences extraordinaires, mais dont on ne sait pas lesquelles - il n'y aura pas de conséquence - c'est donc que cet amendement encourage justement ce système à tenir compte de la sphère privée.
Je comprends votre souci, Madame la présidente, mais permettez-moi de maintenir mon amendement.
Mis aux voix, cet amendement est rejeté.
Mis aux voix, l'article 5 est adopté.
Troisième débat
La loi 8592 est adoptée en trois débats, par article et dans son ensemble.