République et canton de Genève
Grand Conseil
Séance du vendredi 28 juin 2002 à 8h
55e législature - 1re année - 10e session - 49e séance -autres séances de la session
La séance est ouverte à 8 h, sous la présidence de M. Bernard Annen, président.
Assistent à la séance: Mmes et MM. Micheline Calmy-Rey, présidente du Conseil d'Etat, Martine Brunschwig Graf, Carlo Lamprecht, Micheline Spoerri et Pierre-François Unger, conseillers d'Etat.
Exhortation
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, prenons la résolution de remplir consciencieusement notre mandat et de faire servir nos travaux au bien de la patrie qui nous a confié ses destinées.
Personnes excusées
Le président. Ont fait excuser leur absence à cette séance: MM. Laurent Moutinot et Robert Cramer, conseillers d'Etat, ainsi que Mmes et MM. Esther Alder, Caroline Bartl, Jacques Baudit, Marie-Paule Blanchard-Queloz, Jean-Claude Dessuet, Hubert Dethurens, Erica Deuber Ziegler, Anita Frei, Christian Grobet, Mariane Grobet-Wellner, Michel Halpérin, André Hediger, Antonio Hodgers, Sami Kanaan, René Koechlin, Georges Letellier, Christian Luscher, Claude Marcet, Pascal Pétroz, Patrice Plojoux, Pierre Schifferli, Ivan Slatkine et Pierre Weiss, députés.
Discussion et approbation de l'ordre du jour
Mme Sylvia Leuenberger(Ve). Je voudrais demander l'urgence pour le point 57, rapport de la commission des finances chargée d'étudier le projet de loi 8533 du Conseil d'Etat indexant les allocations d'études, d'apprentissage et d'encouragement à la formation dès l'année scolaire et académique 2001-2002, qui concerne la rentrée d'automne. Pour savoir si nous l'acceptons, il faut pouvoir en discuter. Je propose donc de l'agender pendant les comptes, au chapitre du département de l'instruction publique.
Le président. Je pense que c'est une bonne idée et j'ajoute que Mme Brunschwig Graf est d'accord avec cette proposition.
Mise aux voix, cette proposition est adoptée.
M. Christian Brunier(S). Nous avons déposé une motion 1466 qui a trait aux offices des poursuites et faillites et qui vise à mettre en adéquation les sanctions et les fautes commises. Nous demandons donc de traiter cette motion en urgence vu l'actualité du sujet.
Mise aux voix, cette proposition est adoptée.
Mme Stéphanie Ruegsegger(PDC). Je demanderai que soient traités en urgence trois projets de lois qui reviennent de la commission de contrôle de la Fondation de valorisation des actifs de la Banque cantonale. Ce sont les projets de lois 8689-A, 8768-A et 8762-A. Il y aura un rapport oral de Mme Künzler.
Le président. Concernant la BCGe, c'est l'urgence par définition...
Mise aux voix, cette proposition est adoptée.
M. Charles Beer(S). Conformément à ce que nous avions dit lors de la dernière séance du Grand Conseil et tel qu'annoncé au Bureau, nous demandons l'urgence pour la résolution 459 à propos d'une demande de permis humanitaire pour une famille menacée de renvoi.
Mise aux voix, cette proposition est adoptée.
Le président. Après les comptes et avant les extraits de l'ordre du jour, nous traiterons les points urgents que vous venez d'évoquer. Nous commencerons par les projets de lois, nous traiterons ensuite la motion et enfin la résolution.
Annonces et dépôts
Néant.
Premier débat
Le président. La parole est au rapporteur. Monsieur Gautier, avez-vous quelque chose à ajouter?
M. Renaud Gautier (L), rapporteur. Je n'ai rien à ajouter à cet excellent rapport... (Rires.)...si ce n'est qu'il ne tient pas compte du rapport de l'inspection cantonale des finances sur les comptes d'Etat arrêtés au 31 décembre 2001, dans la mesure où l'avons reçu hier en fin d'après-midi.
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, je vous rappelle que le temps de parole est de dix minutes par groupe, plusieurs intervenants pouvant prendre la parole pour un groupe. La parole est à M. Roulet.
M. Jean Rémy Roulet (L). Permettez-moi tout d'abord quelques considérations politiques sur les comptes 2001 et ensuite sur le budget 2003. Je laisserai le soin à mon collègue Alain Meylan de compléter cette présentation libérale de dix minutes.
Les libéraux acceptent les comptes, conformément à ce que nous avions annoncé dans ce cénacle il y a deux mois, lorsque Mme Calmy-Rey nous les avait présentés. Quatre objectifs primordiaux pour les libéraux ont en effet été atteints : premièrement l'équilibre financier, deuxièmement la réduction de la dette, troisièmement le maintien de la capacité d'investir et enfin la hausse des dépenses sociales qui atteint près de 9% par rapport à l'exercice 2000, plaçant notre canton en tête de liste suisse comme étant le plus social et... le plus généreux, merci Monsieur Froidevaux. Tout ceci se déroule dans un contexte favorable, avec une hausse des rentrées fiscales de plus de 4,5%, malgré, ou à cause - selon le bord politique que l'on prend - d'une diminution des impôts de 12%, plébiscitée par le peuple il y a quelques années. Comme quoi l'augmentation des revenus fiscaux et la baisse de la fiscalité ne sont pas toujours antinomiques.
Attardons-nous, si vous le voulez bien, sur les deux derniers points, à savoir la hausse des dépenses sociales et la diminution des impôts. Cette hausse de 9% atteint, en faisant abstraction de la subvention de près de 700 millions accordée aux hôpitaux, le montant de 1 243 000 000 F pour 2001. Si mes comptes sont bons, cela représente, en plus d'autres subventions, près de la moitié des dépenses de l'Etat.
J'en viens maintenant aux considérations politiques ayant trait au budget 2003. Le groupe libéral demande instamment à ce que les subventions soient, pour les années à venir, contrôlées, maîtrisées et canalisées. On pourrait innover avec le concept de traçabilité de la subvention, comme il existe la traçabilité des aliments. De même que chaque consommateur cherche à savoir d'où vient la nourriture qu'il ingurgite, nous aimerions savoir d'où proviennent et à qui sont destinées les subventions, et ce, au gré d'un parcours du combattant auquel est astreint l'administré. Nous demandons une gestion pointue, accrue et surveillée, de ce qui représente le poste de dépenses le plus élevé de notre canton. Cela ne signifie ni de faire des économies bêtes et méchantes ni de tailler dans le vif, mais simplement de mieux gérer et de mieux contrôler. Je crois que cet exercice est possible, qu'il n'est pas vain et qu'il est générateur d'économies substantielles.
J'aborde le dernier point de ma présentation, à savoir le contexte fiscal. Tout ceci n'est possible, aux yeux de certains, que si les recettes fiscales maintiennent aussi leur train haussier. Les libéraux estiment en revanche qu'il n'est pas concomitant d'augmenter les impôts pour assurer l'ensemble des prestations sociales, notamment délimitées par les subventions. Nous aimerions donc, pour les budgets à venir, qu'il soit tenu compte de baisses fiscales qui n'impliquent pas, et nous l'avons prouvé de manière factuelle, une baisse des prestations sociales. A partir de là, je crois que nous pourrons continuer à respecter les quatre objectifs tenus pour les comptes 2001 : l'équilibre financier, la réduction de la dette, une capacité d'investissement préservée et la hausse des dépenses sociales. Je vous remercie.
M. Christian Brunier (S). Bien évidemment les socialistes vont voter ces très bons comptes. Je vous rappelle quelques chiffres significatifs : 297 millions d'excédent avant opérations exceptionnelles, 5,2 millions d'excédent après opérations exceptionnelles et une diminution de la dette de plus de 212 millions. Je crois que personne n'aurait osé envisager de tels résultats il y a à peine cinq ans. Malgré un lourd héritage en matière de finances publiques, que malheureusement nous ne pouvions pas répudier, malgré des projets démagogiques et excessifs de diminutions d'impôts... (Brouhaha.) ...vous l'avez dit: 12% de moins qui ont bénéficié principalement aux plus aisés de ce canton, malgré une instabilité fiscale, puisque à chaque fois les règles du jeu changent, ce qui rend très difficile le travail de prévision du département, et malgré la débâcle des ex-dirigeants de la Banque cantonale de Genève, le département des finances et sa présidente, avec un large soutien de ce parlement, mais aussi de la conjoncture, sont arrivés à sortir ce canton des chiffres rouges. Ceci était inespéré et nous tenons à féliciter les acteurs et les actrices de la fonction publique qui ont joué un rôle déterminant dans ce redressement financier. Je crois qu'ils ne sont pas suffisamment valorisés et que leur action n'est pas suffisamment soutenue.
Ces bons résultats ne doivent cependant pas nous faire tomber dans une euphorie trop grande. Notre canton, et nous le savons toutes et tous, est fortement axé sur le tertiaire. Cette dépendance extrême le place dans un contexte qui peut être très difficile. Alors qu'un fléchissement, voire une crise, s'annonce dans le tertiaire, Genève est en situation fragile. Avec notre niveau d'endettement, les réductions d'impôts que vous avez préconisées, et que la population a soutenues, peuvent mettre terriblement en danger notre canton. Je crois qu'il faut donc faire très attention dans une perspective de gestion à long terme.
Un autre sujet de préoccupation de notre parti est la diminution des prestations. Nous n'avons en effet pas complètement comblé les conséquences négatives et néfastes des diminutions budgétaires linéaires préconisées à l'époque par le régime monocolore. De plus, les budgets n'ont pas toujours été adoptés en fonction de l'augmentation de la population. Dans bien des secteurs, les prestations sont ainsi en baisse sensible. Je vous rappelle quelques exemples. L'école a aujourd'hui de la peine à répondre aux problèmes multiples et complexes de la société. Les soins hospitaliers se dégradent aussi continuellement, particulièrement au niveau de la relation humaine, si importante pour la qualité de la santé publique.
Pour l'avenir, le monde politique doit définir véritablement des priorités courageuses pour pouvoir axer les prestations en fonction des besoins de la population.
Pour les socialistes, les priorités sont le renforcement de l'enseignement; l'humanisation accentuée des soins hospitaliers; un effort conséquent en faveur du logement social pour répondre à la crise que vit actuellement la population de notre canton; le développement des transports publics, qui est le seul moyen de relever le défi de l'explosion des déplacements; enfin une politique solidaire de terrain qui permettra notamment une collaboration accrue entre les travailleurs sociaux et la police, pour répondre au sentiment d'insécurité, justifié ou non, de la population.
Les socialistes préconisent aussi, pour mieux répondre aux besoins de la population, d'agir au niveau de la mobilité du personnel de l'Etat, mais aussi au niveau des moyens financiers de l'Etat. Le cloisonnement entre les différents départements est inacceptable, très coûteux pour la société et paralysant pour l'Etat. Un Etat efficace et vivant doit agir plus transversalement et être capable de mobiliser les moyens et les talents là où ils sont les plus utiles. Aujourd'hui, il faut bien reconnaître que la solidarité interdépartementale est quasiment nulle, en tout cas insuffisante, chacun gérant un peu sa chapelle en pensant, avant tout, à préserver son pré carré, sans penser globalement à un projet de société. Nous devons donc aussi accroître l'optimisation de certains services dont les défaillances de fonctionnement sont connues. Les offices de poursuites et faillites, l'office de la jeunesse ou le centre de formation de la police, par exemple, doivent être profondément améliorés.
Un autre souci du groupe socialiste est le fossé toujours plus grand entre les plus favorisés et les plus défavorisés de ce canton. Nous avons vu au niveau des rentrées fiscales qu'il y a de plus en plus de personnes qui gagnent bien leur vie dans ce canton, tant mieux, mais il y a aussi de plus en plus de gens qui vivent dans la précarité. Ceci ne doit pas laisser le monde politique insensible et je suis très inquiet en entendant M. Roulet dire que notre canton est trop généreux. Il n'est pas trop généreux mais répond aux besoins de la population. Nous devrions donc être fiers d'avoir les prestations sociales les plus efficaces de ce pays.
Finalement, gare à l'excès des investissements ! Certains promettent de construire des tranchées couvertes un peu partout, une traversée de la rade ou de nouvelles voies autoroutières, alors que nous entreprenons actuellement des chantiers gigantesques, tels que le stade de Genève, le tunnel Eaux-Vives-La Praille ou l'agrandissement de Palexpo. Ces personnes qui promettent la lune à la collectivité publique, soit mettent en danger les finances publiques, soit se comportent comme de simples vendeurs d'illusions, ce qui est tout aussi dangereux.
En résumé, je félicite les gestionnaires des finances publiques. A l'avenir, soyons cependant vigilants et ne cédons pas à la démagogie de ceux qui veulent baisser les impôts et augmenter les investissements sans discernement. Le rôle de la politique n'est pas de faire des coups médiatiques électoralistes, mais bien de gérer l'avenir avec sérénité. (Applaudissements.)
M. Robert Iselin (UDC). L'exercice qui nous occupe, soit l'approbation ou la non-approbation du compte administratif de l'Etat et de la gestion du Conseil d'Etat pour l'exercice 2001, requiert que chaque parti représenté dans ce Conseil expose sa position et ses opinions sur le projet de loi 8720-A. Je ne vous ferai pas l'injure de reprendre en détail les points saillants du compte de fonctionnement courant de l'Etat de Genève. Une brochure résumée, fort bien faite par ailleurs, évite d'avoir à patauger dans ces deux compendia que sont les deux ouvrages jaunes que nous recevons au début du printemps, et oriente de manière très claire le commun des mortels. Elle facilite grandement la tâche des spécialistes les plus avertis, lorsqu'ils doivent se faire une religion. Je ne puis donc que recommander la lecture de l'opuscule «Comptes 2001 de l'Etat de Genève» à tous ceux d'entre vous qui ne l'auraient pas déjà parcouru.
Qu'en retire donc un pur produit du secteur privé et qui plus est un banquier, représentant cette race honnie entre toutes, source - il n'y a qu'à écouter M. Brunier - de tous les malheurs de l'humanité et qui ne mérite que d'être vouée aux gémonies ? En bref, j'en retire le niveau élevé des principales provisions et réserves, l'augmentation des investissements nets - augmentation de plus de 100 millions par rapport à l'an 2000 -, la hauteur vertigineuse des prestations sociales quoi qu'en dise M. Brunier, ce qui est fort bien tant que nous pouvons nous les offrir. Je note également la magnifique liste de quelques dotations de l'Etat - il faut savoir être généreux quand cela est possible - et la croissance apparemment irrésistible des revenus assurés par l'impôt et j'en passe.
Si le résultat 2001 n'avait pas été oblitéré par l'apparition d'une perte inattendue en provenance de cet enfant de malheur qu'est la Banque cantonale, ne permettant de ce fait qu'une attribution très faible à la réserve conjoncturelle, le résultat 2001 aurait été presque brillant.
Etant donné que je suis un représentant du secteur privé, lequel après tout, n'en déplaise à mes collègues féminines et masculins des bancs d'en face, est à l'origine quasi unique du pactole que nous connaissons, je voudrais vous rappeler que nous sommes ici pour nous prononcer sur la politique générale poursuivie par le gouvernement et pour sa gestion au cours de l'exercice écoulé. La tâche de gérer l'Etat, je l'ai dit au début de la législature, est titanesque. On ne doit donc pas se laisser emporter par l'euphorie du moment, d'autant que la conjoncture est plutôt sombre.
En bref, il apparaît à l'UDC que si certains efforts ont été déployés, la conjoncture économique en 2001 a facilité dans une bonne mesure la tâche de notre gouvernement. Tant mieux, mais si gouverner c'est prévoir, notre parti ne peut que déplorer que les efforts qui devraient être déployés pour mieux gérer et mieux organiser l'Etat n'aient pas été plus enthousiastes. Nous sommes des personnes du dehors, je parle ici de vous-mêmes, Mesdames et Messieurs les députés, et de moi, en ce sens que nous ne connaissons pas l'administration de l'Etat de l'intérieur. Mais les témoignages que l'on entend de-ci de-là sont trop nombreux pour ne pas être gagné par l'impression que bien des deniers pourraient être économisés en organisant plus efficacement le corps étatique. En fait, il paraît à l'UDC qu'elle n'est probablement pas la seule à entretenir cette idée. Il n'est que de voir les efforts parfois pathétiques de bien de nos collègues en vue d'une limitation des dépenses, qui est le seul axe sur lequel nous pouvons agir, alors que des économies beaucoup plus substantielles pourraient être faites - c'est la loi inéluctable de toutes les grandes institutions humaines - en rendant les rouages de l'institution plus efficaces. Les députés de l'UDC, avant de débarquer sur ces rives souvent hospitalières, subodoraient cet état de choses. Leurs expériences au cours des huit premiers mois de cette législature les ont confirmés dans cette impression. N'ayant au surplus pas participé à l'élaboration du budget 2001 et n'ayant de ce fait pas pu faire entendre sa voix, le groupe parlementaire UDC s'abstiendra lors du vote sur le PL 8720-A, tout en assurant le gouvernement de son soutien le plus positif, s'il venait à empoigner - et, chose étrange, je suis en train de dire la même chose que M. Brunier - avec vigueur le problème aux facettes multiples de la réorganisation de l'Etat de Genève.
M. Jean Spielmann (AdG). Le représentant de l'UDC vient de dire qu'il représentait ici l'économie privée et les intérêts privés; je revendique, quant à moi, de représenter la population la plus laborieuse, celle qui a des difficultés dans cette société. Il me semble important qu'elle soit aussi représentée dans ce parlement.
Je vais faire une première observation au niveau de la méthode de travail et de la manière avec laquelle nous pouvons analyser les comptes et examiner les dossiers qui nous sont présentés. Nous avons reçu hier après-midi, comme il a déjà été signalé, le rapport de l'ICF, le contrôle financier de l'Etat, analysant l'ensemble des comptes. Il s'agit évidemment d'un dossier très important mais que nous avons très souvent négligé parce qu'il venait longtemps après les débats sur les comptes. Aujourd'hui, je trouve quand même paradoxal que la commission des finances analyse les comptes davantage au niveau de la comptabilité - et nous y consacrons beaucoup d'heures - qu'au niveau politique. Il me semble important que nous séparions mieux les travaux, afin de pouvoir examiner à l'avance le rapport de l'ICF - ce qui constitue la partie technique de l'examen des comptes - et de pouvoir consacrer plus de temps à ce qui est notre tâche et à ce que la population attend de nous, c'est-à-dire une analyse politique des comptes, permettant de donner une orientation à la gestion de l'Etat et de faire un certain nombre d'observations.
En ce qui concerne l'ensemble du dossier, je crois qu'il est quand même important de rappeler ici - on verra bientôt la pertinence de ces observations - que la courte majorité de gauche a réussi pendant quelques temps à corriger le tir au niveau des finances cantonales. Nous avons ainsi la possibilité de réduire aujourd'hui de 200 millions la dette de l'Etat, malgré le plombage des comptes dû à la Banque cantonale. Je rappelle que 2,7 milliards de francs de réserves ont dû être constituées. Je rappelle aussi le problème de fond qui est posé par cette débâcle, à savoir la manière avec laquelle certains ont géré ou mal géré les comptes de la Banque cantonale.
Je ne veux pas rappeler ici toutes les interventions que nous avons faites, qui ne nous ont valu, de la part des bancs d'en face, que des sarcasmes, des accusations et des insultes. Aujourd'hui la situation est telle, et les citoyens de ce canton doivent le savoir, que 20% de leurs impôts servent à rembourser les dettes de la Banque cantonale. 20% des impôts qu'ils payent sont ainsi consacrés aux dépenses occasionnées par ceux qui géraient cette Banque cantonale. Il y a là bien sûr un problème de fond qui se pose, celui de la confiance de la population vis-à-vis de l'Etat et de son fonctionnement.
Il faut savoir aussi que la courte majorité de gauche a renversé complètement toutes les tendances au niveau financier, grâce à une gestion totalement différente. Et pendant cette période où nous étions majoritaires, j'ai entendu, pour la première fois depuis que je suis dans ce Grand Conseil, les députés des bancs d'en face s'opposer aux budgets et aux comptes au prétexte que les économies effectuées étaient trop faibles ou en raison d'une soi-disant mauvaise gestion. Et ces députés persistent à faire ce genre de déclarations alors que nous sommes dans une période de conjoncture favorable ! Mesdames et Messieurs les radicaux et les libéraux, vous avez voté des comptes et des budgets avec des déficits extraordinaires en période de haute conjoncture, vous êtes responsables de cela. Nous avons réussi à renverser la vapeur, à mieux gérer l'Etat et à boucler sur des comptes bénéficiaires, et vous venez pour la première fois parler de les refuser et faire des critiques acerbes sur la gestion de l'Etat. Je suis un peu étonné et la population le sera autant que moi quand elle constatera, après quelques mois de gestion par la nouvelle majorité, le retour des chiffres rouges. Je vous donne donc rendez-vous pour les prochains comptes.
Maintenant, sur le fond, il est bien clair que la charge sociale comme vous dites - je dirais plutôt la charge d'assistance - pèse très lourd sur le budget de l'Etat parce que la société est toujours plus inégalitaire. Le fossé s'accroît entre les nantis et ceux qui ont à peine de quoi survivre. Nous devons tirer des enseignements de cette réalité politique et sociale. Cela ne sert à rien de gémir, à chaque présentation des comptes ou du budget, sur les dépenses sociales, alors qu'il s'agit de dépenses d'assistance. Il vaut mieux renverser la vapeur et mettre en place les dispositifs qui permettront à chacun de vivre correctement, c'est-à-dire rééquilibrer les salaires en faveur de celui qui produit quelque chose de ses mains plutôt qu'au profit de celui qui spécule; en faveur de celui qui travaille dans cette société à améliorer la situation, plutôt qu'au bénéfice de celui qui profite du travail des autres pour s'enrichir. Cette réalité sociale ne vous permettra plus, ces prochains temps, de tirer en corner ou d'employer vos anciens arguments.
Nous avons vu avec la dernière votation sur la solidarité fiscale pour les gros revenus - le résultat devrait vous faire réfléchir - que des fossés énormes se creusent entre les diverses couches de la population. Celle-ci commence heureusement à comprendre la situation et finira bien par changer d'attitude par rapport à la fiscalité.
Quand on parle de gestion de l'Etat, il faut bien sûr aussi parler du fonctionnement des services publics. Pendant des années un frein à l'engagement a été mis, réduisant considérablement les effectifs alors que la population et donc les besoins augmentaient. Aujourd'hui, la première question que nous devons nous poser est : quels sont les besoins de la population ? Il faut en faire l'inventaire et mettre en place, au niveau de la collectivité, les dispositifs qui permettent d'y répondre dans des domaines comme l'enseignement ou la santé, par exemple. Il a été dit tout à l'heure qu'il fallait comprimer et réduire les coûts dans ces domaines. Je considère au contraire qu'il faut davantage analyser les besoins de la population pour y répondre au niveau de la prévention, plutôt que de devoir ensuite dépenser des millions pour l'assistance. Il y a là des orientations à changer.
Il y a aussi le problème des services publics en général. Vous pouvez voir dans la presse les conséquences des privatisations, de cette fuite en avant. Citons le fameux Arthur Andersen que vous avez appelé à la rescousse pour contrôler et essayer de mieux gérer les affaires de l'Etat. On a vu ce que donne ce type d'orientations politiques : la privatisation et le démantèlement des services publics, avec tous les problèmes que cela pose pour la population et pour l'économie. Je vous renvoie par exemple au dossier Swissair.
Nous sommes là pour être attentifs à ces problèmes et développer un service qui réponde aux besoins de la population. Il faut également mettre en place une politique qui permette à notre canton de se développer harmonieusement aux niveaux économique, politique et social. Malheureusement, sur les bancs d'en face, les intérêts privés l'emportent. Monsieur Iselin, vous avez dit clairement ce qu'il fallait dans ce parlement : oui, vous représentez les milieux privés et travaillez pour eux. Je pense qu'il faut être aujourd'hui davantage à l'écoute de la population, faire plus de social et de promotion économique pour permettre à ce canton de répondre aux besoins de la population. C'est dans ce sens que nous approuverons les comptes. Ils seront malheureusement parmi les derniers à être bénéficiaires parce qu'ils gardent les traces d'une majorité de gauche responsable et qui a montré à la population qu'elle sait mieux gérer les affaires publiques que les partis de l'Entente.
M. Jean-Marc Odier (R). L'examen des comptes n'aura pas apporté d'éléments fondamentalement nouveaux de nature à modifier notre point de vue, si ce n'est les remarques dans des domaines précis que mes collègues feront au moment de l'examen par département.
Entre le budget et les comptes, et hors provisions, les charges n'augmentent que de 1,4%. On pourrait dire que l'exercice de maîtrise des coûts est presque réussi. Ce taux serait d'autant plus admissible que cette différence est largement couverte par les recettes qui sont de 4,6% plus élevées aux comptes qu'au budget. Admettre cette augmentation des charges reviendrait cependant à faire abstraction de deux éléments, à propos desquels les radicaux expriment à nouveau leur forte préoccupation s'agissant des risques à venir. Premièrement, les 9,2 milliards de la dette cantonale coûtent 385 millions d'intérêts par année. Deuxièmement, l'Etat continue d'augmenter ses dépenses sous la forme notamment d'engagements fixes à long terme qui sont financés par des recettes fiscales rendues incertaines par les fluctuations de la conjoncture.
Le seul retour à des comptes positifs ne doit par conséquent pas nous faire crier victoire. Certes, Mme Calmy-Rey a su, contrairement à son prédécesseur, réorganiser l'administration des contributions publiques, mais indépendamment de cela, la conjoncture s'est améliorée de façon spectaculaire. De 1993 à 1997, les recettes fiscales n'ont évolué que de 17 millions alors que de 1997 à 2001 les recettes ont augmenté de 1,2 milliard. Par rapport à la déclaration très polémique de M. Spielmann, il faut réaliser qu'une augmentation de 35% des recettes n'a rien à faire avec une gestion de gauche ou de droite. Il est en effet facile à n'importe quel patron d'entreprise, dans de telles conditions, de redresser ses finances.
Si la même croissance se poursuit, tout continuera à fonctionner comme ces quatre dernières années. Cependant, dans le cas d'un ralentissement économique, une augmentation de 0,5% du taux d'intérêt pèsera 192 millions d'intérêts supplémentaires sur la dette. Quant aux recettes fiscales issues de l'activité des entreprises, de leurs collaborateurs et de la consommation générale, une perte de vitesse de l'économie provoquerait immédiatement leur diminution.
Aujourd'hui, la politique du département des finances consiste simplement à mieux gérer la trésorerie et à augmenter les provisions et les réserves afin d'amortir les éventuels mauvais résultats futurs. Il vaudrait mieux se concentrer sur le remboursement de la partie de la dette correspondant à dix années de déficits budgétaires, qui se chiffre à environ 6,5 milliards, en limitant les dépenses de fonctionnement.
La priorité de l'Etat, pour prévenir les effets du retour de la mauvaise conjoncture, doit être la maîtrise des coûts et la recherche des possibilités de diminution des dépenses, pas nécessairement du niveau de celles-ci mais plutôt dans leur étendue.
Il est vrai toutefois que déterminer où sont possibles les diminutions de dépenses est un exercice qui s'approche de la quadrature du cercle. Les conseillers d'Etat protègent respectivement les budgets de leur département, alors qu'ils devraient avoir un rôle d'arbitrage. Le parlement quant à lui ne vote que des lois engendrant des dépenses nouvelles. Il n'est pourtant pas normal de constater que les dépenses par habitant s'élèvent à 17 000 F à Genève alors qu'elles ne sont que de 12 000 F dans la moyenne suisse.
Mesdames et Messieurs les députés, les comptes 2001 sont bouclés. Qu'ils soient satisfaisants ou non, les remarques d'aujourd'hui ne les modifieront pas. Le groupe radical se tourne donc déjà vers le budget 2003 et l'étude du projet de loi radical 8704 pour la réduction de l'endettement et le frein à l'accroissement des dépenses.
M. Alain Meylan (L). Comme l'a dit M. Jean Rémy Roulet, le groupe libéral n'acceptera pas ces comptes de gaieté de coeur. Nous tenons à émettre de sérieuses réserves, presque aussi importantes que celles effectuées par le département des finances pour cacher quelques résultats comptables de ces comptes 2001...
Il est en effet logique d'accepter ces comptes du côté des charges, puisqu'il s'agit de francs dépensés. Les plus grandes craintes existent cependant quant aux recettes. Les revenus sont basés sur une large estimation qui est de nature à nous poser quelques problèmes. Tout d'abord pour une question technique : une large confusion est créée entre les provisions et les réserves. Les provisions sont en effet inscrites au bilan pour nous garantir de risques dont on ne connaît pas exactement les montants, tandis que les réserves concernent des risques connus que l'on doit prévenir. Cette grande confusion dans les comptes ne laisse pas de nous inquiéter et n'a pas facilité la lecture des comptes.
En outre, les actifs transitoires, Mesdames et Messieurs les députés, sont à notre avis largement surévalués. Le risque concerne non pas l'approbation des comptes 2001 - ils sont bouclés comme l'a dit très justement M. Odier - mais le budget 2003, sur lequel nous allons commencer les travaux. Nous ne connaissons en effet pas encore toutes les indications sur les revenus 2000, 2001 et, naturellement, 2002. Il y a de ce fait un grand risque à établir un budget 2003 sur des comptes 2001 dont les recettes ne sont qu'estimées et encore, de façon discutable. Notre groupe adopte donc une position très prudente concernant le budget.
Notre groupe doute aussi de l'évaluation effectuée des provisions pour débiteurs douteux, notamment concernant les impôts encore impayés. Le département nous a expliqué comment étaient effectuées ces estimations. D'une certaine manière, nous sommes dans la même situation que l'année dernière lors de l'examen du projet de loi LIPP V. Nous avions fait confiance alors au département et nous voyons aujourd'hui le résultat. C'est pourquoi nous avons quelques doutes sur les modalités d'évaluation de cette provision.
Les comptes effectivement sont bons, la dette a pu être résorbée... (Exclamations. Applaudissements)
Le président. Partiellement !
M. Alain Meylan. ...le problème lié aux réserves et aux provisions nous place toutefois sous une épée de Damoclès. Effectivement, en termes de liquidités, la dette a pu être résorbée. Par contre, si ces réserves et ces provisions devaient être actionnées - pour des raisons de cycles économiques qui ont déjà été évoquées - cela aurait un effet relativement important et négatif sur les comptes.
En conclusion, le budget 2003 sera approuvé avec une grande prudence par le groupe libéral. Un budget basé sur des estimations fait peser un grand danger sur les comptes futurs et le groupe libéral y sera par conséquent attentif.
Le président. La parole est à M. Mouhanna. M. Spielmann ayant parlé huit minutes pour l'Alliance de gauche, il vous en reste deux, Monsieur le député.
M. Souhail Mouhanna (AdG). Je remercie mon camarade Jean Spielmann de m'avoir laissé deux minutes. Je vais donc essayer de parler en langage télégraphique.
Je dirai, par rapport à ces comptes et à ce que j'ai entendu, que les représentants de la droite ne nous surprennent plus guère. Nous savons quels sont les thèmes qui vont être systématiquement déclinés, à longueur de législature : que ce soient les chômeurs qui sont au chômage parce que c'est de leur faute, les vieux à l'assistance qui vivent trop longtemps, les travailleurs qui sont trop payés, ou les prestations sociales qui doivent être mieux ciblées, etc. Maintenant, nous savons à quoi nous attendre et cela nous a été confirmé par le publication des 300 mesures proposées par economiesuisse, l'ex-Vorort.
Pour ma part, je relèverai simplement que les comptes sont bons, comme cela a été dit. J'ai perçu beaucoup de déception de la part d'un certain nombre de représentants de la droite, précisément parce que ces comptes sont enfin passés dans les chiffres positifs. Cela, nous le devons à Mme la cheffe du département des finances qui s'est engagée, comme elle a pu et avec beaucoup d'efficacité, dans une politique des caisses pleines, au contraire de la politique des caisses vides menée quelques années auparavant. Je me souviens de son prédécesseur qui répétait qu'on était dans la cible, que le déficit soit de 300, de 400 ou de 500 millions. Combien de fois l'avons-nous entendu dire qu'on était dans la cible ? Mme Brunschwig Graf se souvient certainement de ces fameuses séances.
Mesdames et Messieurs, vous êtes, je le sais, très embêtés parce que vous voulez qu'il y ait de grands déficits pour vous attaquer aux travailleurs et au progrès social. Vous devrez cependant compter sur nous pour défendre le progrès social, parce qu'il fait l'honneur de Genève. Nous voulons effectivement que Genève assure à ses ressortissants des conditions de vie et de salaire décentes qui soient dignes des êtres humains que nous voulons qu'ils soient.
M. Philippe Glatz (PDC). J'ai eu le privilège, en qualité de président de la commission des finances, de conduire les travaux de cette dernière sur les comptes 2001. Le président agit un peu à l'instar d'un chef d'orchestre et il doit imposer un rythme à ses talentueux interprètes que sont les membres de la commission, comme aux prestigieux solistes que pourraient être les magistrats invités, lors de l'examen de leur département respectif. Tous ces interprètes auraient sans doute aimé pouvoir jouer piano, si ce n'est pianissimo, tant le rythme que nous avons eu à tenir a été ardu et rapide.
Il convient de souligner que, sans aller jusqu'à l'accord parfait, les débats se sont déroulés tout à fait harmonieusement et que les fausses notes ont été rares. Je dois également souligner que nous avons pu bénéficier de l'excellent travail de l'ensemble des collaborateurs du département des finances et de la présence constante de Mme la présidente du département des finances qui, malgré sa lourde charge de présidente du Conseil d'Etat cette année, a été de toutes nos séances pour répondre à toutes nos questions. Il convient aussi de rendre un hommage particulier à M. Pangallo, que chacun d'entre vous connaît. Lui aussi a soutenu le travail de chacun des commissaires. Nous savons pouvoir compter sur cet appui précieux et très constructif.
Il convient de souligner que nous avons effectué un travail de fond. Aujourd'hui, il pourrait être de bon ton de faire la fine bouche et de dire que nous ne sommes pas tout à fait satisfaits, que ceci n'est pas bien, que cela est moins bien, ou que ceci pourrait être différent. Globalement, il faut admettre que les comptes 2001 sont bons - je crois que les uns et les autres l'ont confirmé - et s'en réjouir. Je dirai aussi que le travail de notre parlement aujourd'hui, comme celui de la commission des finances avant, a été d'examiner le rapport de gestion et donc la gestion du Conseil d'Etat tout au long de cette année. Nous devons reconnaître que la gestion du Conseil d'Etat fut bonne; elle a été acceptée et reconnue comme valable. Nous pouvons ainsi mesurer, à l'aune des années qui passent, les progrès qui sont accomplis dans la gestion et dans la maîtrise de l'outil qu'est l'appareil d'Etat aujourd'hui.
Nous avons constaté, pour ceux qui sont ici depuis quelques années, que, certes, les progrès ont été réalisés en particulier au département des finances, puisque c'est celui qui nous occupe aujourd'hui, mais aussi dans chacun des départements, que nous avons eu l'occasion d'examiner dans le détail.
Sachons dire que les choses s'améliorent. Certes nous pouvons souhaiter que cela aille encore plus loin, et c'est là notre mission, mais cessons donc de faire la fine bouche sur les progrès qui sont accomplis. Sachons aussi motiver l'ensemble des collaborateurs et reconnaître les progrès qui ont été réalisés afin d'en permettre d'autres qui iront plus loin.
De manière générale, l'examen des comptes 2001 a été l'occasion de revenir sur le principe des réserves et des provisions, dont l'interprétation est divergente, ce qui aurait pu entraîner quelques dissonances.
Un certain nombre de points sont à revoir, comme les priorités à déterminer en matière d'investissement, notamment en ce qui concerne les bâtiments scolaires. Nous savons que la construction de six cycles d'orientation ou collèges est d'ores et déjà planifiée entre 2003 et 2010, pour une facture globale supérieure à 300 millions.
La commission a aussi été préoccupée par la pratique en matière de crédits supplémentaires. Ici je dirai, puisque j'entre dans les détails, que la commission des finances songe à refuser à l'avenir les demandes qui seront présentées par les départements après l'échéance du 31 décembre de chaque année. Elle rappellerait ainsi la règle selon laquelle ces demandes sont en fait des autorisations de dépenses, ainsi que le fait que les départements n'ont donc pas le droit d'y procéder avant l'accord formel du parlement.
Nos travaux ont été aussi l'occasion de traiter de thèmes majeurs comme la dette et l'impératif absolu de la réduire, qui demeure au premier plan des préoccupations de chacun. Vous avez d'ailleurs constaté que les méthodes préconisées peuvent parfois diverger. L'essentiel est d'être d'accord sur les finalités. Le problème des subventions et la difficulté croissante d'en maîtriser la distribution - je vous rappelle que ces subventions se montent à 2,8 milliards - n'ont pas non plus laissé la commission indifférente. Elle souhaite à l'avenir que l'Etat puisse avoir un contrôle plus grand sur la distribution de ses subventions et sur leur utilisation.
L'évolution des recettes fiscales a aussi été une préoccupation, puisque nous savons, non seulement examiner le passé, mais aussi nous projeter dans l'avenir. Nous avons admis et compris que si la conjoncture a été favorable dans les années passées, elle risque de l'être moins dans le futur. Nous avons également constaté que l'augmentation de la population de 4,1% enregistrée entre 1999 et 2001 laisse augurer la nécessité d'investissements cosidérables, si nous voulons répondre aux besoins d'infrastructures qui se feront jour. Cela pose aussi la question des effectifs de l'administration et de leur éventuelle progression afin de maintenir la qualité des prestations fournies. Pour le parti démocrate-chrétien, à cet égard, s'il est clair que le manque d'effectifs dans certains services ou départements pose déjà problème aujourd'hui et risque de poser problème demain, il serait constructif de se pencher sur les différentes dotations et de revoir l'affectation des moyens en fonction des secteurs d'activité et de leurs besoins.
Enfin, en contrepoint à ces différentes questions, nous avons été soucieux de participer aux progrès accomplis au fil des années et nous avons traité de la question de la gestion centralisée des liquidités. L'éventualité de regrouper au sein du département des finances tous les flux financiers de l'Etat pourrait être une solution intéressante dans le cadre d'une gestion à flux tendus des liquidités permettant ainsi d'amoindrir les charges liées à la dette.
En conclusion, le parti démocrate-chrétien votera sans hésiter les comptes 2001. J'ai dit au début que nous avons constaté que les comptes sont bons, que la gestion est bonne et en progrès. Le parti démocrate-chrétien réitère cependant son souci de voir encore plus de moyens mis en oeuvre pour réduire la dette et améliorer l'efficacité des services de l'Etat, mais il sait aussi admettre que nous sommes sur la bonne voie. Ceci ne signifie pas que nous devons nous croiser les bras et arrêter de travailler les uns et les autres, mais simplement qu'il faut aussi reconnaître le travail qui a déjà été accompli dans ce cadre. Je vous remercie de votre attention.
M. David Hiler (Ve). Chacun l'a dit avec plus ou moins de satisfaction, les comptes sont bons. Tout d'abord parce que la conjoncture économique est bonne depuis plusieurs années, ensuite parce que l'actuelle ministre des finances s'efforce d'avoir un appareil de taxation et de prélèvement des impôts qui fonctionne, ce qui aide à rendre concret ce qui pourrait n'être que virtuel, puisque les impôts qui nous intéressent ici sont ceux que nous levons effectivement. Enfin les comptes sont bons parce que nous nous appuyons sur certains sacrifices faits durant les années 90. Nos comptes seraient-ils si bons si ce parlement n'avait pas diminué de 12% le pouvoir d'achat de la fonction publique ces dix dernières années ?
Nous nous joignons donc, avec plaisir, aux compliments faits à Mme Calmy-Rey, mais nous aimerions aussi remercier ceux qui ont accepté - puisqu'il s'agit en partie d'une négociation - une diminution de leur pouvoir d'achat, ce qui permet aujourd'hui à l'Etat de disposer d'une certaine solidité. Une partie de ces sacrifices ont été et seront, à l'avenir, compensés par des augmentations particulières pour des groupes qui étaient jusqu'ici mal rémunérés par rapport à leur qualification et à la difficulté de leur travail. Il n'empêche aujourd'hui que, dans plusieurs secteurs de l'économie privée, nous assistons à des rattrapages par rapport à ce qui a pu être cédé par les salariés à certains moments. Aujourd'hui, l'Etat de Genève s'appuie sur ces 12% qui sont une des clés de l'équilibre de ce budget.
Je tiens aussi à rappeler qu'une myriade de petites associations ont vu l'aide qui leur était accordée diminuer, parfois sans compensation. Par ailleurs, pendant les années 90, le rapport entre le nombre de personnes qui ont le statut de fonctionnaire et le nombre d'habitants a évolué dans le sens d'une diminution du ratio.
Nous arrivons aujourd'hui à une situation qui, sur le plan des moyens, n'est pas désastreuse du tout. Beaucoup de choses ont été compensées au niveau des ressources, mais il reste quelques endroits, et non des moindres, où un effort doit encore être consenti et c'est une des leçons que nous tirons de l'étude de ces comptes. Cela concerne l'hôpital au premier chef. Nous avons l'impression - M. Unger n'y est pour rien - que ces dernières années l'hôpital aurait mérité un meilleur sort dans les «redotations» de personnel. Sa tâche est difficile et nous avons le sentiment que, par rapport à d'autres services, l'intensité du travail y est très forte. Il y a là une réflexion à suivre.
Si les comptes sont bons, la gestion l'est-elle aussi ? Je crois qu'il faut être un peu plus mesuré. L'Etat de Genève a rencontré passablement de difficultés. Au-delà du procédé facile consistant à mettre la faute sur tel ou tel conseiller d'Etat, on remarque quand même qu'un certain nombre de services de l'Etat sont en voie de réforme pour fournir les prestations que nous attendons d'eux et dont ils ont les moyens. On citera évidemment, parce qu'il s'agit du premier qui vient à l'esprit, l'office des poursuites et faillites. On peut aussi mentionner l'office cantonal de l'emploi, pour lequel la «Tribune de Genève» a sonné le grelot récemment concernant la qualité des prestations qu'il offre, notamment dans les approches qualifiantes ou formatrices. Nous sommes très loin de ce que l'on pourrait attendre, en termes d'efficacité, d'un service qui a une dotation qui est assez conséquente. Dans certains autres secteurs, les réformes sont lentes et difficiles, par exemple au service du Tuteur général, qui nous a occupés il y a quelques années. Tout n'y est de loin pas résolu aujourd'hui, même s'il y a des progrès. Nous savons qu'il reste des progrès à faire, il est donc inutile de continuer l'énumération.
D'un autre côté, il est peut-être plus inquiétant qu'il existe un découragement ou un mécontentement larvé de la part de collaborateurs d'un certain nombre de secteurs du service public, notamment à l'Hospice général. Je pense aussi à une partie des gens qui travaillent à l'instruction publique et qui rencontrent des conditions difficiles. Nous avons encore l'indice indirect de la difficulté de la police à trouver de nouveaux fonctionnaires.
Il y a ainsi un certain nombre de problèmes qui ne sont pas seulement une question de moyens, mais d'organisation du travail et peut-être de valorisation et de représentation. On ne m'ôtera pas de l'idée que la chasse aux économies, qui s'est accompagnée, durant les années 90, d'un travail assez fort de dénigrement des fonctions exercées dans le cadre de l'Etat, a eu des conséquences sur la représentation que les gens ont de leur travail. Aujourd'hui, nous devons donc rappeler et dire dans ce parlement que les fonctions exercées ne sont pas des dépenses inutiles : il n'est pas inutile de dépenser de l'argent pour l'enseignement à condition de bien le dépenser. Nous avons aussi une chance extraordinaire d'avoir un hôpital comme le nôtre. Il en va de même pour les soins à domicile, même si, pour le coup, il s'agit d'un secteur mal organisé. L'état de tous ces services n'est pas catastrophique au point de vue des comparaisons intercantonales; au contraire, il est positif pour l'avenir de Genève.
Nous devons dire que si nous avons des bons comptes, c'est aussi parce que certains ont accepté un sacrifice de leur pouvoir d'achat. Nous devons leur dire que le travail qu'ils font est essentiel. Nous devons dire que le but est d'avoir de bons services publics, et non pas de dépenser le plus d'argent possible pour le plaisir. En conséquence, l'exigence d'une gestion rationnelle est toujours là, mais elle se pose essentiellement sur la base de la motivation des collaborateurs et de la transformation des systèmes pour les adapter à ce que les gens attendent aujourd'hui de leur employeur. Nous approuvons donc volontiers ces comptes, avec cet arrière-fond en tête.
Nous ne sommes pas pessimistes pour le budget 2003, mais nous savons, comme chacun, que les belles années ont toujours une fin et qu'il convient donc dans le futur de ne pas s'engager au-delà du possible.
M. Robert Iselin (UDC). Je ne pensais pas reprendre la parole mais, comme M. Spielmann a fait une peinture injustifiée d'un certain milieu, j'aimerais tout de même redresser les choses. Je crois que M. Spielmann ne réalise pas à quel point les petits entrepreneurs et pas mal de managers des grandes affaires s'usent au travail en y consacrant beaucoup de leur temps. Certes, ils ont des compensations, mais ils se dépensent sans compter pour faire marcher l'économie de cette République.
Si M. Spielmann me permet, je lui raconterai un petit épisode de ma propre vie professionnelle. La banque que je dirigeais était spécialisée dans les emprunts internationaux. Vous pouvez imaginer que pendant les 48 heures qui précédaient le lancement de l'emprunt, la tension était au maximum. Nous avions 150 millions sur les bras qu'il fallait placer. A l'époque où existait encore le «Journal de Genève», je suis allé corriger les épreuves des prospectus d'émission à 2 h du matin. Croyez-moi, Monsieur le député, ce n'étaient pas des collaborateurs qui étaient avec moi, mais les typographes du «Journal de Genève» avec lesquels, une fois l'épreuve corrigée à 3 h du matin, nous sommes allés boire une bonne bouteille.
Je regrette beaucoup qu'on essaye de faire croire que la partie travailleuse de cette ville qui gagne beaucoup d'argent ne fiche rien, est assise dans des fauteuils et ouvre simplement ses poches. Il s'agit d'un bobard de première grandeur.
Au surplus, pour ce qui est des adaptations de salaire, je crois que l'UDC n'est pas contre le fait de bien payer les employés de l'Etat, mais alors notre parti trouve, à tort ou à raison, qu'il faut que leur productivité augmente. Je ferai observer que la Confédération helvétique, de 1990 à 2002, a augmenté son budget de 60% tandis que le budget du personnel n'a augmenté que de 6%. Il ne faut pas essayer de me faire croire que mes compatriotes suisses alémaniques, dont la dureté de tête est bien connue, vont avaler ce genre de truc sans raison valable.
M. Pierre Kunz (R). L'Etat de Genève est en effet une grosse entreprise qui n'est pas facile à gérer. Mais de là à dire, comme l'a fait M. Glatz - et je rejoins les propos de M. Hiler - que l'Etat de Genève doit être considéré comme une entreprise bien gérée, il y a un pas que je ne franchirai pas. Je ne le ferai pas notamment parce que, au cours des six dernières années, je vous le rappelle, les dépenses se sont accrues de 24,5%. Peut-être que certains considèrent cela comme de la bonne gestion, en tout cas ça n'en est pas pour les radicaux.
Il n'est pas juste non plus de dire que les bons chiffres que nous avons aujourd'hui devant les yeux sont dus aux sacrifices de la fonction publique. Manifestement ils sont dus d'abord à l'amplification des recettes fiscales.
Ceci m'amène à parler, vous vous y attendiez sans doute, de la dette. Le Conseil d'Etat explique dans son exposé introductif aux comptes que «la théorie économique ne permet pas de déduire un niveau optimal pour l'endettement public». Qu'il me permette de le contredire quelque peu. Les spécialistes sont en effet unanimes pour considérer qu'un endettement dépassant 60% du PIB est intolérable, comme en témoignent les critères de Maastricht. Les spécialistes considèrent aussi qu'un taux raisonnable d'endettement pour un canton ou une nation se situe à 35% du PIB. Cela représente pour Genève quelque chose comme 7 ou 7,5 milliards. Un tel taux est même favorable à l'activité financière privée.
Quoi qu'il en soit, il est sûr qu'en prenant en compte l'endettement réel du canton, à savoir la dette publique avérée qui figure dans les comptes, les exigibles différés de payement à court et à moyen terme qui figurent hors bilan, et la part genevoise à la dette fédérale, nous nous trouvons largement à la tête des cancres de ce pays. C'est en effet à près de 20 milliards que se situe la dette réelle qui pèse sur les citoyens de ce canton, c'est-à-dire pas loin de 100% du produit cantonal brut. Il faut alors savoir gré à Mme Calmy-Rey d'avoir mis en lumière cette situation grâce à une présentation nettement plus claire et plus complète que celle de ses prédécesseurs. Chacun peut en effet désormais se rendre compte, s'agissant en particulier des engagements hors bilan, que près de 250 millions de francs ont été empruntés par des établissements publics autonomes à des conditions inutilement onéreuses. 2,5 milliards, voire un peu plus, devront être aussi absorbés dans les années à venir par l'Etat en couverture des déficits des caisses de pensions. Je pense d'ailleurs que cela se fera de la même manière que pour la problématique des enseignants du primaire, en demandant aux députés de passer à la caisse. Vous savez aussi que 2,5 à 3 milliards seront absorbés à l'avenir par les opérations de la Fondation de valorisation.
Contrairement à M. Glatz, on ne peut donc que regretter que le Conseil d'Etat, dont les comptes montrent une nouvelle progression considérable des dépenses, ne manifeste pas plus de rigueur dans la gestion de son ménage.
Les radicaux aimeraient que le Conseil d'Etat, et sa ministre des finances en particulier, nous dise ce qu'il entend entreprendre pour amener enfin cette rigueur dans la gestion. Nous aimerions notamment savoir si, comme le demande les radicaux dans le projet de loi mentionné par M. Odier, le budget que vous nous présenterez dans quelques semaines sera muni d'un excédent de 250 millions après les amortissements des dépenses et des pertes de la fondation.
J'aimerais aussi demander à Mme Calmy-Rey, au nom des principes d'intégralité et de saine gestion des comptes, pour améliorer encore la transparence à laquelle, je le sais, elle attache de l'importance et pour laquelle nous lui savons gré, de renoncer avec effet immédiat à la procédure curieuse et coûteuse qu'elle a imaginée pour ne pas rembourser à la BCGe les pertes avérées, réalisées et concrètes, sur les objets rachetés par la Fondation de valorisation. La BCGe a en effet besoin de cet argent pour améliorer son volume d'affaires et sa rentabilité. Merci d'avance de vos réponses.
Monsieur le président, s'il me reste du temps, je le donne volontiers à M. Mouhanna...
Le président. Vous donnez quelque chose que vous n'avez plus, Monsieur Kunz: vous avez épuisé votre temps.
M. Dominique Hausser (S). Je dois dire que j'ai écouté les différentes interventions ce matin en ayant un peu l'impression de regarder les Guignols sur Canal +... (Brouhaha.)Je suis stupéfait par les discours des députés de l'Entente - à part M. Kunz qui est monomaniaque, qui n'a qu'un seul discours qui s'éloigne toujours plus de la réalité en prenant de plus en plus la tangente, et qui visiblement ne sait pas lire les chiffres. Bref, soit les représentants de l'Entente sont des girouettes, soit - et je pense quand même qu'ils ont l'intelligence suffisante pour le faire - ils sont obligés, malgré leur refus du budget 2001, d'accepter ces comptes, parce qu'ils sont vraiment bons. Les comptes sont non seulement bons en termes de chiffres, mais ils reflètent aussi la qualité du travail de l'administration et des associations qui remplissent des tâches d'utilité publique. Je crois que cet élément-là est extrêmement important.
Nous aurons l'occasion d'examiner tranquillement le budget 2003 à partir du mois de septembre ou d'octobre et nous verrons alors ce qu'il faut en faire. Il est toutefois nécessaire de travailler avec prudence si nous voulons pouvoir l'examiner dans de bonnes conditions. Je crois que les différents projets de lois que les libéraux ont déposés en matière de fiscalité ne devraient pas être examinés, même si un ou deux points sont intéressants. Il faudra être d'une prudence extrême et ne pas les accepter si nous voulons avoir un budget 2003 qui soit raisonnable et qui permette de répondre aux demandes, aux besoins de la population et simplement à l'augmentation naturelle de la population, tout en maintenant des prestations cohérentes.
J'espère, Mesdames et Messieurs les députés de l'Entente, que l'été vous sera favorable et que vous retirerez vos projets ineptes.
Mme Micheline Calmy-Rey, présidente du Conseil d'Etat. Les comptes 2001 se caractérisent par leur bonne santé. L'Etat de Genève est géré correctement. Les dépenses sont tenues et, en particulier, les charges d'exploitation diminuent par rapport aux dotations budgétaires. Les investissements sont autofinancés et la dette diminue.
Je me demande, Mesdames et Messieurs, pourquoi certains d'entre vous n'acceptent pas ces comptes avec enthousiasme. Je me demande en effet à quel moment vous accepterez des comptes avec enthousiasme, si ce n'est pas ceux de 2001. Faudra-t-il que nous ayons 500 millions de déficit pour vous donner de l'enthousiasme ?
Les comptes sont constitués d'un certain nombre d'écritures comptables, dont l'inspection cantonale des finances a examiné la conformité. Je reconnais que le rapport de l'ICF arrive trop tard dans le processus d'examen des comptes par la commission des finances, mais je tiens à vous rassurer : l'ICF vous demande de bien vouloir approuver les comptes de l'Etat de Genève pour 2001. Ceci étant, au-delà des écritures comptables, les comptes indiquent aussi un certain nombre d'orientations en termes de gestion et de politique.
Concernant la gestion de l'Etat de Genève, le Conseil d'Etat a trois priorités. Premièrement, la poursuite d'une politique en matière de provisionnement et de réserves pour des raisons de prudence financière. Deuxièmement, l'amélioration de la transparence, en particulier sur la situation financière des satellites de l'Etat - c'est-à-dire les institutions autonomes ou publiques qui gravitent autour de l'Etat - par l'introduction progressive des normes de comptabilité internationales, les normes IAS. Troisièmement, l'amélioration de l'efficacité, au travers du suivi budgétaire, des instruments de contrôle et de gestion, et en particulier l'amélioration de la gestion des liquidités. Il est évident toutefois que l'Etat de Genève peut encore mieux faire en matière de gestion et de management. Nous progresserons grâce à votre appui et je vous en remercie.
Maintenant, en termes politiques, l'objectif du Conseil d'Etat est de pouvoir financer durablement l'ensemble des prestations publiques, de ne pas être soumis régulièrement aux aléas de la conjoncture en devant périodiquement revoir, à la baisse ou à la hausse, les prestations publiques. Par opposition à un mécanisme automatique de frein à l'endettement, dont les défauts apparaissent aujourd'hui au niveau de la Confédération, nous avons plutôt choisi une série de mesures visant à mieux maîtriser les dépenses mais aussi à utiliser l'instrument des provisions et des réserves. Le débat pour savoir s'il s'agit de provisions ou de réserves importe d'ailleurs peu, puisque ce débat comptable n'est pas clos. Par contre, sur le fond, la mise en place de façon massive de provisions et de réserves - je vous rappelle que nous sommes le seul canton à procéder de cette façon - vise à pouvoir financer durablement les prestations publiques.
Nous vivons aujourd'hui, comme l'ont dit plusieurs d'entre vous, des temps instables au niveau conjoncturel. L'économie genevoise se caractérise par son ouverture aux vents de l'extérieur et par sa dépendance par rapport au secteur tertiaire, où les rémunérations sont parfois variables et dans une proportion non négligeable. En cas de mauvaise conjoncture, la part variable des rémunérations a alors tendance à diminuer, voire à disparaître. Ceci conduit à des diminutions extrêmement rapides en termes de recettes fiscales. Pour cette raison, nous sommes attentifs et travaillons avec les instruments des provisions et des réserves. Certains d'entre vous considèrent que c'est suffisant et d'autres non. Moi, je considère qu'il faut encore faire un effort dans ce sens si nous voulons pouvoir survivre à des conjonctures plus difficiles à l'avenir.
Mesdames et Messieurs, je crois pouvoir dire que l'objectif général du Conseil d'Etat, et donc de notre collectivité, est de pouvoir financer année après année les prestations publiques et sociales. Il est vrai que la moitié des dépenses de l'Etat sont des subventions et qu'un bon tiers de celles-ci concernent les dépenses de la santé et du social. Le canton de Genève est cependant fier de pouvoir assumer ses dépenses sociales et d'être généreux. La situation anormale n'est pas l'augmentation des dépenses sociales, mais le fait qu'il existe dans notre canton une population en difficulté financière dont le nombre est encore trop important. Dépenser et pouvoir financer les dépenses sociales ne constitue par conséquent pas un problème mais notre fierté.
Je ne peux pas manquer d'évoquer la dette qui pèse sur nos capacités de financement. Elle s'élève aujourd'hui à 9,2 milliards et génère des intérêts passifs à hauteur de 375 millions. Notre objectif est bien entendu de continuer à diminuer la dette en chiffres absolus, comme nous l'avons fait en 1999, en 2000 et en 2001. J'espère donc pouvoir continuer à le faire les années suivantes, malgré l'impact financier lié au sauvetage de la Banque cantonale de Genève. Cet impact apparaît d'ailleurs clairement dans la comptabilité : 67,4 millions de pertes payées ont été décaissées en 2001 et 91,3 millions ont été des avances à la fondation, remboursables par la BCGe. Au total, 158 millions de francs ont donc été décaissés en 2001 pour sauver la BCGe.
Ces décaissements ne touchent cependant pas aux résultats du compte de fonctionnement puisque la charge liée aux pertes payées est compensée par la dissolution de provisions que nous avons faites, vous le savez, en l'an 2000. Les résultats ne sont par conséquent pas affectés par ces décaissements. Quant aux avances, elles ne figurent pas dans le compte de fonctionnement puisqu'elles sont remboursables par la Banque cantonale de Genève.
Je précise encore pour M. Kunz que les montants décaissés n'augmentent en aucun cas la dette du canton de Genève, quelle que soit la manière dont nous comptabilisons ces chiffres, puisque nous n'empruntons pas pour payer les pertes liées à la BCGe. Nous le faisons sur nos excédents de liquidités et nous n'emprunterions de toute façon pas pour payer ces pertes, étant donné que nos excédents de liquidités nous permettent de payer les pertes.
Il est quand même possible de dire que ces coûts pèsent sur la diminution de la dette, d'où l'importance que j'accorde, vous le savez bien, à une bonne gestion des liquidités. Il ne s'agit d'ailleurs pas du seul moyen de l'Etat de Genève pour avoir une bonne santé financière, contrairement à ce que certains ont dit, mais cela reste un moyen important. Je remercie ici la commission des finances de bien vouloir aider le Conseil d'Etat dans sa volonté de gérer de façon professionnelle les liquidités de l'Etat de Genève. Cela garantira une diminution de la dette mais aussi de son coût, c'est-à-dire des intérêts passifs.
Je tiens aussi à remercier la commission de finances pour son appui, ainsi que l'ensemble de la fonction publique, qui contribue, il faut le dire, à la bonne santé financière du canton de Genève. C'est la raison pour laquelle, dans les comptes successifs, vous constatez l'introduction du paiement d'une prime, qui est une sorte de rattrapage sur les sacrifices consentis les années précédentes. Je reconnais toutefois que cela reste insuffisant. La fonction publique, par sa manière de fonctionner et par les sacrifices qu'elle a consentis, est ainsi partie prenante de la bonne santé financière de l'Etat de Genève.
Je tiens ici publiquement à remercier la fonction publique genevoise pour la qualité de son travail. Je vous engage donc, Mesdames et Messieurs les députés, à accepter les comptes d'Etat et à approuver la gestion du Conseil d'Etat. Je vous remercie.
Le président. Nous sommes arrivés au terme de ce premier débat. Je vais faire voter la prise en considération de ces projets, comme cela a été convenu.
Mis aux voix, le PL 8720-A est adopté en premier débat.
La loi 8733 est adoptée en trois débats, par article et dans son ensemble.
La loi 8734 est adoptée en trois débats, par article et dans son ensemble.
Le président. Mesdames et Messieurs, je vous suggère une petite pause. Nous reprendrons nos travaux à 9 h 40. Nous commencerons le deuxième débat avec la lecture des comptes département par département. Un de mes vice-présidents, M. Egger je crois, me remplacera. A tout à l'heure.
La séance est levée à 9 h 25.