République et canton de Genève
Grand Conseil
Séance du jeudi 13 juin 2002 à 20h30
55e législature - 1re année - 9e session - 43e séance
PL 8752 et objet(s) lié(s)
Préconsultation
Le président. A l'unanimité des chefs de groupe et du Bureau, il a été décidé que chaque groupe disposerait de quinze minutes, avec plusieurs intervenants s'il le désire, pour s'exprimer. Le Conseil d'Etat également.
Avant de donner la parole à Mme Calmy-Rey, je salue notre ancienne présidente, Mme Reusse-Decrey, qui nous fait l'amitié d'être parmi nous ! (Applaudissements.)Elle s'apercevra vite que c'était plus facile sous son règne que sous le mien !
Mme Micheline Calmy-Rey, présidente du Conseil d'Etat. J'ai déclaré le 17 mai dernier, dans une interview, que le Conseil d'Etat entendait déposer un projet de loi au Grand Conseil avant l'été, projet de loi qui porterait sur deux axes. Le premier, pour lisser la bosse du barème B, car les couples mariés sont en effet pénalisés par le barème d'imposition, qui connaît une très forte progression pour la tranche de revenu imposable se situant entre 45 000 et 60 000 F. Ce phénomène est un héritage de l'ancien droit. Le deuxième, afin d'augmenter le montant déterminant pour les charges de famille, de même que les frais de garde.
Nous avons tenu nos promesses. Et même plus, puisque nous avons ajouté aux mesures annoncées celle de l'augmentation des revenus des enfants mineurs ou majeurs à charge.
En nous conformant aux exigences de la loi fédérale d'harmonisation, contraignantes pour tous les cantons, le canton de Genève a dû diminuer le nombre de ses déductions. Il a dû supprimer la déduction partielle des rentes AVS-AI, la déduction pour allocations familiales, mais aussi la déduction pour versement sur les carnets d'épargne des enfants, la déduction pour mariage, la déduction pour veuvage, la déduction pour frais de déplacement des enfants. Et nous devrons supprimer la déduction LPP à partir de l'année fiscale 2002. Le droit fédéral se traduit aussi par un changement important dans le calcul de la valeur locative des biens immobiliers. Je me souviens qu'une personnalité libérale très influente m'avait interpellée à l'époque par voie de presse, expliquant en substance que Mme Calmy-Rey ne pourrait pas faire autrement, avec l'harmonisation à la loi fédérale, que d'augmenter fortement l'impôt de tous les retraités... (L'oratrice est interpellée.)...M. Coutau !
Eh bien, Mesdames et Messieurs, nous avons fait autrement. En faveur des propriétaires, nous avons assuré une réduction des éléments de revenus et de fortune de 4% par année d'occupation et nous avons limité la valeur locative à 20% des revenus bruts du contribuable. La situation des rentiers et celle des familles avec enfants a pu être améliorée grâce au rabais d'impôt, qui permet de bien cibler les modifications d'impôts sur des groupes de contribuables déterminés. En outre, étant donné qu'il suppose un avantage constant pour les contribuables possédant les mêmes caractéristiques familiales, son introduction a permis une baisse des barèmes bien plus importante que celle qu'aurait permise un système de déduction sur le revenu brut. Genève s'est donc beaucoup battu pour limiter les effets de hausse de l'impôt des contribuables dus à l'harmonisation à la loi fédérale. Le système du rabais d'impôt et la baisse des barèmes se sont montrés performants, puisqu'ils parviennent à limiter à 25% les contribuables subissant une augmentation d'impôt, 75% d'entre eux devant au contraire connaître des diminutions d'impôt.
Il est évident, Mesdames et Messieurs, que nous pouvons faire mieux. A l'époque, nous avons été limités par la contrainte que nous nous étions nous-mêmes fixée, à savoir celle de la neutralité financière. Finalement, nous constatons aujourd'hui que le barème B, c'est-à-dire celui qui s'impose aux couples et aux personnes mariées, corrige moins fortement que le barème A. C'est la raison pour laquelle j'ai souhaité présenter un projet de loi en faveur des familles et en particulier en faveur des familles de la classe moyenne.
Le projet de loi qui vous est présenté ce soir contient quatre modifications de la loi sur l'imposition des personnes physiques, qui conduisent à corriger l'impôt des familles. Tout d'abord, une modification du barème de l'impôt sur le revenu du couple - splitting. Le nouvel article de loi propose le lissage de la bosse dans l'idée d'élargir la phase de transition entre les taux qui définissent le splitting. La zone de passage entre les deux pôles du splitting est élargie à l'intervalle de 45 000-140 000 F de revenu imposable au lieu des 45 000-60 000 F aujourd'hui. La diminution d'impôt qui en résultera sera en moyenne de 322 F par contribuable. Elle ne touche que les contribuables imposés au barème B. Deuxième mesure, l'augmentation du montant déterminant pour la première charge de famille, qui passe de 4 500 F à 7 000 F. Troisième mesure, l'introduction d'une déduction pour frais de garde pour toutes les familles. A l'instar de la déduction actuelle pour les familles monoparentales, la modification de la prise en compte des frais de garde a un double effet. D'une part, elle met sur pied d'égalité les familles mariées ou concubines avec les familles monoparentales en matière de déductibilité des frais de garde de leurs enfants de moins de 12 ans, en accordant à toutes les familles les avantages consentis jusque-là aux seules familles monoparentales. En corollaire de cet ajustement, la déduction forfaitaire des frais de garde de 2 500 F, qui se trouvait dans le rabais d'impôt, disparaît. Quatrième mesure, l'augmentation des montants de revenus des enfants mineurs ou majeurs. Nous avons souhaité, avec cette modification, doubler les montants de revenus pour les enfants mineurs ou majeurs. Ces montants constituent les critères de définition de la charge de famille et n'ont pas été adaptés depuis des années. Ils passent de 6 800 F pour une charge entière à 13 600 F, et de 10 200 F pour une demi-charge à 20 400 F. Ces dispositions entreraient en vigueur avec effet sur l'année 2001.
De fait, le projet de loi propose des mesures transitoires pour 2001. Pour cette année-là, il s'agit non seulement d'améliorer le sort des familles avec enfants, mais aussi de faire en sorte qu'aucun dommage rétroactif ne soit infligé à quiconque, que les avantages consentis jusque-là aux familles monoparentales soient préservés, tout en assurant une faisabilité des modifications pour l'administration fiscale cantonale.
Les effets financiers de la loi sont une perte supplémentaire pour l'Etat, une moins-rentrée des recettes fiscales, évaluée à 40 millions pour l'année fiscale 2001 et à 50 millions pour l'année fiscale 2002. Ces évaluations sont fondées sur 186 000 contribuables et 60% de la masse fiscale. Ces chiffres doivent donc encore être majorés pour obtenir une évaluation plus réaliste.
Le projet de loi permet, pour les familles imposées au barème B, de diminuer leur imposition à revenu brut égal à partir de 40 000 à 50 000 F de revenu imposable. Pour les autres, elles sont protégées par le rabais d'impôt.
Le projet de loi du Conseil d'Etat cible les familles et favorise en priorité les classes moyennes. Je vous demande de bien vouloir le renvoyer en commission afin qu'il puisse être examiné par la commission fiscale.
M. Christian Grobet (AdG). Comme Mme Calmy-Rey vient de le rappeler, nous avons dû modifier voici deux ans notre loi sur les contributions publiques pour l'adapter aux exigences du droit fédéral en matière d'harmonisation fiscale, ce qui a eu pour conséquence la suppression d'un certain nombre de déductions, notamment pour les personnes âgées et pour les familles. Il y avait également une rectification de la valeur locative, qui touche directement les propriétaires qui seront à l'avenir un peu moins favorisés par rapport aux locataires. Mme Calmy-Rey l'a expliqué, c'était le minimum des minimums en vertu des exigences impératives du droit fédéral.
Toute cette opération avait été présentée, en tout cas ici, devant ce Grand Conseil et dans les rapports de la commission, comme devant être une opération blanche. Pas seulement en ce qui concerne les rentrées fiscales. Sur le plan global, il était prévu qu'il y aurait une petite perte fiscale, mais il ne devait pas y avoir d'augmentation d'impôts pour la plupart des contribuables, à revenus constants bien entendu, par rapport au système applicable précédemment. Or, de fait, il s'est avéré cette année que de nombreux contribuables ont eu une augmentation d'impôts. Certains, ce qui était tout à fait normal, en raison d'une augmentation de revenus, mais un certain nombre d'autres contribuables sans qu'il n'y ait eu une augmentation de revenus. On a parlé d'environ 25% des contribuables, ce qui n'est pas rien.
Y a-t-il eu une erreur dans la mise au point du système correctif adopté par le Grand Conseil voici deux ans pour compenser la suppression des déductions fiscales, ou est-ce que l'on a renoncé à procéder à certaines rectifications pour que certaines catégories de contribuables, plus particulièrement les familles avec enfants, restent dans une situation constante ? Je ne veux pas ouvrir ici le débat de savoir s'il y a eu erreur ou pas. Nous prenons acte des déclarations de Mme Calmy-Rey. Mais il est patent qu'il y a en tout cas des rectifications qui doivent être apportées si l'on veut que certaines catégories de contribuables ne subissent pas une augmentation d'impôts par rapport au système antérieur.
A ce sujet, nous saluons le dépôt du projet de loi du Conseil d'Etat, visant précisément une catégorie particulière de contribuables qui a effectivement besoin d'une rectification, à savoir les familles. Nous restons dans l'expectative en ce qui concerne les personnes âgées. Nous ne sommes pas toujours convaincus, Madame Calmy-Rey, que la situation est véritablement prévue pour l'avenir, mais nous ne demandons pas mieux que d'en être convaincus. C'est la raison pour laquelle nous avons déposé une motion, visant à ce que les experts puissent travailler avec des représentants qualifiés des différents partis siégeant au Grand Conseil. Je vous remercie d'avoir d'ores et déjà donné suite à cette demande. Pour nous, il est impératif que nous soyons absolument certains des implications de la réforme complémentaire qui nous est proposée ce jour. Nous ne pourrons pas voter la tête dans le sac. Je l'ai déjà dit lors de la dernière séance du Grand Conseil.
Je voudrais enfin demander le renvoi de notre projet de loi en commission, qui aura certainement eu le mérite de faire accélérer le dépôt du projet de loi du Conseil d'Etat. Nous demandions, du reste, que celui-ci le fasse pour le 15 août, et nous vous remercions là aussi, Madame Calmy-Rey, d'avoir fait diligence.
Je vous rappelle que ce projet de loi contient une clause essentielle, que nous avons fait figurer délibérément, à savoir que la réforme porte sur le même type d'approche qu'il y a deux ans et pas sur des réductions linéaires qui favorisent évidemment les hauts revenus par rapport aux petits. Deuxièmement, nous demandons que les correctifs entrent en vigueur pour les déclarations d'impôts de cette année, c'est-à-dire avec effet rétroactif. Si nous avons prévu cette clause dans notre projet de loi, c'est qu'il semblait - mais peut-être avez-vous été mal interprétée par la presse - que cela vous paraissait difficilement réalisable. Entre-temps, vous avez rectifié le tir en expliquant très clairement que vous étiez d'accord avec cette application à titre rétroactif - cela figure dans le projet de loi - nous y sommes également sensibles. Or, nous pensons que notre projet de loi a contribué à ce dénouement favorable, même s'il n'est que provisoire, puisque nous n'en sommes qu'à la présentation du projet de loi. C'est la raison pour laquelle nous demandons que notre projet de loi soit renvoyé, au même titre que celui du Conseil d'Etat, en commission.
Mme Janine Hagmann (L). Erreur fatale, couac ou pas, parodiant Gavroche sur les barricades, j'aimerais dire: «Je suis tombée par terre, c'est la faute à Voltaire, le nez dans le ruisseau, c'est la faute à Rousseau, submergée de soucis, c'est la faute à Calmy» !
En effet, moi qui étais à la commission fiscale, fière et heureuse d'avoir voté à l'unanimité une loi fiscale novatrice, je suis vraiment tombée par terre, le nez dans le ruisseau, lorsque j'ai appris par la presse les soucis provoqués par cette loi. Avais-je été trompée ? Mal informée ? D'où venait l'erreur d'appréciation ?
Il y a quelques mois, Mme Calmy-Rey annonçait un scoop à la commission fiscale: elle réservait une surprise aux contribuables, qui s'appelait «GEtax». Il s'agissait d'un CD-Rom, très convivial selon l'appellation habituelle, qui permettait non seulement de remplir sa déclaration d'impôt, mais encore de prendre connaissance tout de suite du total obtenu par l'informatique. Et c'est là que les surprises commencèrent. Etonnement, stupéfaction, puis doute. Cette augmentation fiscale était-elle possible, réelle ? Le rabais d'impôt et sa neutralité promise étaient-ils un leurre ? En commission - souvenez-vous, Madame la présidente - les libéraux avaient tapé sur la table. Non seulement ils voulaient une neutralité globale, mais encore une neutralité par catégorie de contribuables, admettant, il est vrai, plus ou moins 2% de différence. J'entends encore notre très estimé collègue Nicolas Brunschwig vous dire: «Mais, Madame la présidente, vous savez que nous pouvons accepter 2% en plus ou en moins, mais nous voulons cette neutralité pour toutes les catégories.»
Vous nous dites maintenant que les revenus ont augmenté en deux ans. Mais heureusement qu'ils ont augmenté ! Nous nous en réjouissons tous ! Seulement, je me pose une question : lequel de vos experts a essayé de remplir le CD-Rom avec les chiffres de 99 ? Si un seul l'avait fait, il se serait rendu compte que quelque chose ne jouait pas avec le rabais d'impôt, puisque, à chiffres équivalents, le résultat ne l'était plus. M. Grobet a dit que 25% des gens avaient enregistré une augmentation d'impôt. C'est vrai, mais un contribuable sur quatre, c'est tout de même pas mal ! Je n'admets pas que l'on me réponde que c'est la faute à pas de chance si ceux qui appartiennent à une famille avec trois enfants, qui sont propriétaires et qui ont déposé 500 F sur le carnet d'épargne de chaque enfant, accumulent malheureusement les augmentations.
Je ne pense pas que ça va être votre fête ce soir, Madame la présidente, mais je vous assure que la lecture du total indiqué en bas du CD-Rom n'a pas permis à bon nombre de familles genevoises de faire la fête. Dépêchons-nous donc de corriger cela, car c'est bien d'une correction qu'il s'agit ! Renvoyons en commission tous les objets qui nous sont soumis ce soir, afin que la commission fiscale puisse les étudier à fond, avec des experts extérieurs, à qui elle demandera des renseignements précis.
Les libéraux ont été les premiers à réagir aux articles de journaux. Ils ont pondu un projet de loi qui devra aussi être étudié. Si bien que nous demandons à cette assemblée de renvoyer le tout en commission fiscale. (Applaudissements.)
M. David Hiler (Ve). Lorsque nous avons changé de loi fiscale à Genève, nous ne l'avons pas fait simplement parce qu'il y avait des idées dans l'air. Nous l'avons fait pour répondre à une obligation extrêmement claire, qui était celle de l'harmonisation fiscale au niveau fédéral. Lorsque nous avons commencé nos travaux, et lorsque nous les avons finis, il y avait un certain nombre de choses que nous savions, notamment une qui vient d'être évoquée par Mme Hagmann, à savoir la question de la valeur locative. Nous savions que la loi fédérale était beaucoup plus rigoureuse que ne l'était auparavant la loi genevoise. Nous savions pertinemment aussi qu'un certain nombre d'éléments du revenu - les allocations familiales et un certain nombre de rentes - seraient taxés ou taxés différemment. J'aimerais quand même qu'on se rappelle que chaque groupe, à l'exception de l'UDC qui n'était pas dans cette enceinte, le savait ! Comme nous savions qu'un certain nombre de personnes allaient perdre et qu'un certain nombre de personnes allaient gagner.
Ce sont là les faits de base qu'il faut rappeler. Nous avions un système très différent de celui qui a été adopté par les Chambres fédérales. Cela nous a obligés à beaucoup plus de corrections que d'autres cantons. A partir de là, si vous connaissez un changement de système fiscal où il n'y a que des gagnants, vous me le présenterez ! Lorsqu'on change l'architecture... (L'orateur est interpellé.)Non, ça, ce n'est pas un changement de système fiscal, c'est un changement de barème, Monsieur ! Et comme vous le savez aussi, cela profite plus à certains qu'à d'autres.
Ceci dit, il est évident que lorsque vous n'avez plus la possibilité légale, par une décision des Chambres fédérales, d'opérer certaines déductions, vous allez à l'évidence avoir des gagnants et des perdants. Nous le savions quand nous avons commencé nos travaux et nous le savions quand nous les avons finis. Ce qui nous a été dit à l'époque, d'après les simulations présentées par le département, c'était qu'il y aurait plus de gagnants et que ce serait, effectivement, plutôt dans les classes de revenus les plus élevés que nous trouverions les perdants, mais pour des moyennes relativement faibles. C'est la situation telle que nous la connaissions.
Depuis lors, il y a eu une déclaration de Mme Calmy-Rey, expliquant que quelque chose n'allait pas dans ce système pour les familles. Je l'ai, pour ma part, lue attentivement dans la «Tribune». Ensuite, un certain nombre de docteurs sont venus se pencher au chevet du malade, comme toujours, avec des solutions miracles qu'ils avaient inventées dans les douze dernières heures, ce qui montre une créativité assez intéressante ! Nous n'avons pas voulu, à vrai dire, nous précipiter sur ce type de solutions. En revanche, je dois quand même constater que le passage des premiers chiffres et des premières données en commission fiscale a tout de même provoqué un malaise. Sur un échantillon de déclarations assez faible il est vrai, il semble que, si l'on applique la même méthode de calcul, nous obtenions effectivement les résultats qui pouvaient être prévus, c'est-à-dire un certain nombre de gens qui gagnent et un certain nombre de gens qui perdent. Le contribuable, lui, ne voit pas ça, parce qu'il y a bel et bien augmentation de revenus. Or, je ne suis pas sûr que nous ayons entièrement pris conscience du fait qu'il y avait, en adoptant le rabais d'impôt - qui est une formule que nous soutenons, soyons très clairs là-dessus - un problème dans la pente du barème fiscal. C'est-à-dire que pour des personnes qui améliorent légèrement leur situation, l'impact fiscal est assez fort, et c'est probablement quelque chose de discutable.
Maintenant, nous ne prétendons pas être de grands spécialistes de ces données, mais nous n'avons pas entendu - et ça, je m'en rappelle tout de même - malgré la qualité des intervenants, que ce soit M. Clerc ou M. Brunschwig, de véritables contre-propositions qui auraient permis de faire beaucoup mieux que le projet du Conseil d'Etat.
Ce qu'on est en train de nous demander, et que je trouve un peu gênant, c'est de corriger des erreurs qui, par ailleurs - et j'aimerais tout de même le signaler - ne sont pas avérées par les chiffres et ne sont plus reconnues par le département des finances, ni par les experts dont vous avez pu lire la prise de position dans la presse. Ils ont procédé à une démonstration sur un petit échantillon et ont expliqué qu'ils estimaient que leurs prévisions étaient justes.
Ce premier point pour dire que les deux motions qui demandent un rapport, au-delà d'autres mesures, soit la motion libérale et la motion de l'Alliance de gauche, doivent à notre avis être renvoyées aujourd'hui au Conseil d'Etat, sans plus de discussion en commission. En effet, quelle que soit notre couleur politique, nous sommes tous intéressés à connaître ce rapport. Mais il y a un bémol. Je vois mal comment nous aurons ce rapport avant la fin de l'année, puisqu'il faudrait effectivement pouvoir comparer les résultats attendus avec les résultats finaux.
On nous propose maintenant un certain nombre de mesures en faveur des familles. Nous souscrivons - à vrai dire en dehors de toute analyse sur le résultat et sur la neutralité ou non des mesures prises - à une augmentation de la déduction pour le premier enfant. Le système que nous avons retenu, c'est-à-dire - Monsieur Barrillier, je vous l'explique au passage - une déduction plus forte pour le deuxième, le troisième, le quatrième et le cinquième que pour le premier enfant, n'est pas un bon système. Il est intellectuellement peu défendable. C'est ici que la neutralité financière a pesé de tout son poids. Il faut changer ce système et nous pouvons le changer rapidement.
Le deuxième point, c'est que l'on n'a pas indexé les barèmes comme on aurait dû. Ainsi, lorsqu'un adolescent ou un jeune adulte gagne de l'argent, il fait perdre une possibilité de déduction à ses parents à partir d'un certain niveau de revenu. Là encore, il y a une certaine pingrerie, qui a des effets désagréables, il faut le reconnaître.
En revanche, faut-il aller beaucoup plus loin ? Faut-il revoir la courbe du barème B, celui des couples mariés ? Faut-il, sur la lancée, revoir celui du barème A ? Faut-il changer les taux d'imposition ? Sur ces derniers points, nous nous permettons de vous dire que nous aimerions être informés, car nous avons passé, la dernière fois, soixante ou quatre-vingts heures à étudier. Et il paraît que le parlement a mal fait... C'est possible, mais ce n'est pas certain à ce jour. Le fait de partir à l'assaut pour changer tout le système ne nous paraît pas constituer d'emblée une excellente chose. Nous sommes donc prêts à prendre des mesures ponctuelles, du moment que nous sommes certains d'en avoir les moyens. Quant à toucher à toute l'architecture du système, nous ne le ferons qu'avec des données complètes. Or, nous savons que nous n'aurons ces données qu'en fin d'année. En ce qui concerne notre doute sur le barème B, sur les modifications proposées, il peut être levé. En effet, sur ces questions, il faut bien le reconnaître, ce n'est que lorsqu'on a passé plusieurs heures avec une machine à calculer que l'on commence à avoir les idées plus claires, et pas avant.
En définitive, Mesdames et Messieurs, au stade actuel, nous sommes défavorables à la proposition du parti libéral, car nous ne voyons pas en quoi une baisse généralisée corrigerait certains effets pervers du nouveau système. Nous ne le voyons pas et nous n'irons donc pas dans ce sens. En ce qui concerne le projet de loi de l'Alliance de gauche, dont le grand mérite était de dire que le Conseil d'Etat allait déposer un projet... (Rires.)...nous pouvons estimer à ce stade qu'il a perdu quelque utilité, puisque le Conseil d'Etat a bel et bien déposé ce projet, quoi qu'on en pense. Mais nous savons comment cela se passe au parlement : personne ne retire jamais un projet de loi avant qu'il ait emprunté tout le circuit. L'Alliance de gauche fera la même chose que chacun d'entre nous, et ce n'est pas grave. En revanche, nous souhaitons travailler sur les propositions du Conseil d'Etat, lorsque celles-ci pourront être considérées sans référence aux erreurs éventuelles, constatées ou non. Dans ce cas, nous sommes prêts à aller rapidement de l'avant. Dès lors qu'il s'agit d'une remise en cause d'un système, cela nous paraît plus compliqué.
J'aimerais préciser pour finir que nous savions, tous les partis savaient, qu'il y avait une distribution sociale différenciée parmi les gagnants et les perdants. Au moment où tout le monde crie haro sur le baudet, nous sommes, en ce qui nous concerne, tout de même très contents d'avoir monté un système qui n'a pas péjoré la situation de gens qui ont déjà bien assez de difficultés comme cela dans la vie. Ce point-là, nous l'avons obtenu par le rabais d'impôt et nous y resterons fidèles. Pour le reste, tout est question maintenant d'analyses et d'études. La précipitation dans ce domaine serait aussi grave que la précipitation dans la communication de Mme la conseillère d'Etat. Ses effets seraient tout aussi négatifs.
M. Robert Iselin (UDC). Je suis trop jeune dans cette enceinte pour savoir si ce parlement a souvent l'occasion de se prononcer sur des affaires dans lesquelles l'esprit de justice doit prévaloir avant tout. Mais il est certain que dans le problème qui nous occupe aujourd'hui - à savoir quel soutien économique est-on en droit d'exiger des citoyens vis-à-vis de leur Etat, de leur République ? - il incombe que cet esprit prévale de la manière la plus étendue possible. Or, cela ne semble pas être le cas.
Le projet de loi qui nous est soumis, certes, cherche à protéger, à épargner les familles avec enfants, les relativement jeunes et les plus jeunes encore, qui sont au début de leur ascension économique. C'est bien dans l'esprit de cette Cité. Les nouvelles générations sont l'avenir de notre société, et elles doivent être soutenues autant que faire se peut.
Aussi, le projet qui nous est soumis se préoccupe-t-il principalement, je dirais même uniquement, de cette classe de nos concitoyens. Voyez sur ce point les correctifs apportés par l'article 7, soit les déductions pour frais de garde des enfants, et par l'article 14, alinéas 3 et 5 de la bientôt fameuse LIPP V.
L'UDC n'a rien à objecter à ces mesures qui encouragent une institution, pilier de notre société, qui nous est chère, la famille. Par contre, une tranche de la population de ce canton semble avoir été complètement oubliée, en dépit de la neutralité de la loi garantie à l'époque de son introduction. Il s'agit d'une certaine section des contribuables, à savoir tous ceux d'entre nous qui ont dépassé l'âge de 65 ans, c'est-à-dire ces citoyennes et citoyens qui, pour la plupart, vivent de pensions qui ne sont que peu ou pas du tout adaptées à l'évolution du coût de la vie. Ce sont eux qui, par un travail acharné, ont créé en un bon siècle, et plus particulièrement depuis cinquante ou soixante ans, l'armature et la prospérité helvétique que le monde entier nous envie. Ce sont eux qui, à la sueur de leur front, ont créé la Suisse moderne. Ce sont eux qui ont élevé ces enfants, parfois jusqu'à 4, 5, 6 ou plus, qui, grâce à l'éducation reçue, peuvent prospérer et vivre une vie meilleure que celle de leurs parents. Et maintenant, ce sont eux - du moins est-ce l'impression que laisse la loi et les commentaires qui nous sont soumis - qu'on oublie et qu'on considère, excusez l'expression, comme des serfs, taillables et corvéables à merci ! Car ces concitoyens et concitoyennes-là ne peuvent plus se défendre en changeant de place de travail ou en se recyclant ! Un plaisantin de mes amis m'a précisé : «Sauf à entrer au Grand Conseil» ! Ils ne peuvent plus augmenter leur charge de travail, car ils n'en ont plus la force, ni d'ailleurs l'occasion. Et ils ne peuvent plus émigrer vers des cieux plus cléments, car ils n'ont plus la capacité d'adaptation pour ce faire, et parce que leurs intérêts familiaux sont ici, sur place, et qu'ils ne veulent pas devenir des personnes déplacées, sans racines locales.
Celui qui vous parle a cherché à déchiffrer - je l'ai fait avec bonne volonté, aidé par quelques connaissances fiscales emmagasinées à l'université et affinées pendant quarante ans de vie professionnelle - les commentaires accompagnant la loi qui nous est proposée. Si je vous disais qu'une chatte, même si elle a fait trois ans de droit fiscal, n'y retrouverait pas ses petits, je n'irais pas trop loin ! Le moins que l'on puisse dire est que ces textes ne brillent pas par leur clarté et ne sont guère limpides. J'admets bien volontiers que je peux me tromper. Par contre, avant d'entériner un projet de loi qui semble boiteux et incomplet, je pense que ce Grand Conseil a le droit d'exiger que sa lanterne soit mieux éclairée. S'il ne parvenait pas à cette conviction, il ne remplirait pas sa fonction de législateur.
Il me paraît donc urgent et absolument nécessaire que la réforme envisagée soit examinée par des experts indépendants, qui devront travailler rapidement, en accord avec la commission fiscale, soit, mais qui devront examiner en tant que spécialistes fiscaux la portée de cette loi sur le plan politique, où elle se meut avant tout.
La majorité de l'UDC - je crois pouvoir le dire - est donc favorable à la désignation, sous une forme ou sous une autre, d'un expert par parti, d'un groupe qui sera chargé, le cas échéant d'entente avec la commission fiscale, d'examiner la portée de cette loi et les remèdes à y apporter, afin d'éviter un nouveau pataquès. Et qu'ils n'oublient pas, ce faisant, que les sociétés humaines qui ont illustré positivement l'histoire et qui sont demeurés des exemples pour les générations qui ont suivi, sont celles qui ont révéré et respecté leurs anciens, reconnaissant que les têtes blanches ont souvent une sagesse qu'elles n'ont pas encore. «Senatus populusque romanus», disaient les Romains de la République, «le Sénat et le peuple romain», marquant bien par là le respect qu'un Etat dont nous sommes encore les héritiers devait aux plus anciens de ses concitoyens. Malheur au peuple d'une république qui n'observe pas ce principe. Je vous remercie de m'avoir mal écouté !
M. Michel Halpérin (L). Mesdames et Messieurs les députés, nous voici donc en face d'une véritable rafale de textes, que le groupe libéral va naturellement vous proposer de renvoyer tous ensemble à la commission fiscale.
Ce que disait tout à l'heure M. Hiler du sort qu'il faudrait réserver aux motions n'est évidemment pas faux, mais nous avons tous un certain sentiment d'urgence face à cette situation. Nous ne voyons donc pas vraiment l'intérêt d'attendre la fin de l'été, et à plus forte raison la fin de l'année, Monsieur Hiler, pour savoir ce que pense le Conseil d'Etat des causes et des effets, à plus forte raison s'il peut répondre à cette question en même temps que nous essayons de résoudre ces problèmes. Par conséquent, il vaut mieux que tous ces textes partent ensemble. Certains sont de trop, mais nous nous en apercevrons à la fin, cela n'est pas grave.
La deuxième remarque que je voudrais faire, c'est que nous sommes saisis, depuis deux jours, d'un texte très remarquable. Je dis qu'il est remarquable, d'abord parce qu'il émane du Conseil d'Etat et qu'il faut saluer l'effort fait par ce Conseil pour corriger les insuffisances de notre copie antérieure, ensuite et surtout parce qu'il a été fait dans des délais records. Mesdames et Messieurs les députés, je n'ai pas souvenir d'avoir vu un texte élaboré avec une telle vélocité par nos autorités. Il faut donc saluer l'administration et lui rendre cet hommage. Quand il le faut, elle le peut. Il faudra que nous nous en souvenions à l'avenir, lorsqu'on nous exposera que des difficultés techniques ou autres rendent improbables l'aboutissement d'un projet avant des lustres. (Rires.)
La troisième remarque que je voudrais faire, c'est que l'on n'a évidemment pas toujours le temps de faire court lorsqu'on va vite. Le résultat est pour le moins touffu. Quand j'observe que le projet que nous propose le Conseil d'Etat et que l'on nous invite, à juste titre, à traiter très rapidement, ne compte pas moins de 25 pages d'exposé des motifs, avec graphiques réservés aux initiés seulement, je me dis qu'il va falloir un très gros effort de préparation pour maîtriser la matière, si nous ne voulons pas commettre à notre tour des erreurs que nous devrons nous reprocher à nous-mêmes par la suite. Cela, vous en conviendrez, nous fâcherait. Par conséquent, quand je fais la comparaison entre la simplicité presque évangélique du projet libéral et la complexité du projet de l'autorité exécutive, j'ai une petite sympathie pour le projet libéral, pas seulement par adhésion naturelle, mais parce que, là au moins, on est à peu près sûr de ce que l'on fait ! (Rires.)
Cela a l'air d'être une galéjade, mais ce n'en est pas une, pour une raison très simple. La loi que nous avons adoptée, avec les assurances du gouvernement concernant la neutralité de cette loi dans ses effets, n'était pas destinée à procurer une nouvelle recette au canton. Si, pour obtenir un résultat neutre, il faut baisser le barème, c'est une simplification. Et le chiffre que nous avons retenu un peu au hasard ne semble nullement démenti par les statistiques que nous a présentées Mme la cheffe du département. En conséquence de quoi - nous l'avons déjà dit et je le répète ici - s'il apparaissait, à l'examen, que le projet de loi libéral favorisait trop de contribuables - et il suffit, pour que nous en soyons convaincus, que l'on nous fasse la démonstration qu'une partie seulement des contribuables ciblés est touchée par cette hausse d'impôts involontaire - nous serons d'accord de réduire à cette catégorie-là. Si on nous fait la démonstration, Madame la présidente du Conseil d'Etat, que le projet du Conseil d'Etat est meilleur et plus rapidement réalisable, nous pourrions nous y rallier. Mais nous avons un doute, parce qu'il tend à ancrer dans le marbre des textes qu'on ne peut plus jamais changer, notamment le système de rabais d'impôt dont M. Hiler est très content, mais qui ne nous a jamais fait très plaisir.
Nous allons donc voir ce qui se passe au cours des travaux de commission. Je voudrais rappeler ici, puisqu'on a beaucoup crié haro sur le baudet et autres mots peu gentils pour notre ministre des finances, qu'en ce qui nous concerne, parce que nous sommes libéraux, nous avons toujours eu une application très rigoureuse du principe de la présomption d'innocence. S'agit-il d'une erreur fatale ? S'agit-il d'une faute ? S'agit-il d'un propos délibéré, voire d'un traquenard ? S'agit-il de rien du tout, comme on nous l'a expliqué récemment, mais d'un rien assez coûteux ? Il faut bien le reconnaître, nous ne le savons pas, et nous n'allons par conséquent pas vous le dire aujourd'hui, Madame, étant donné l'amitié que nous vous portons. Nous nous bornons à réserver notre jugement sur ce point. Nous allons cesser d'écouter vos experts dans la presse, pour les entendre, eux ou d'autres, peut-être un peu plus détachés de leur copie, dans les travaux de commission. (Applaudissements.)
Mme Stéphanie Ruegsegger (PDC). Le parti démocrate-chrétien, comme les autres groupes et de nombreux contribuables, a été choqué lorsqu'il a découvert à quelle sauce certains contribuables genevois étaient mangés avec le nouveau système LIPP. Vous me permettrez de revenir brièvement sur les deux ans de travaux en commission que nous avons menés au sujet de cette LIPP.
Durant ces deux ans, tout d'abord, nous savions sur quels éléments nous devions travailler et quelles contraintes nous avions pour mener à bien nos travaux, notamment la contrainte de la LHID. Invoquer aujourd'hui la LHID pour nous dire que c'est ce qui a mené à cette situation, n'est pas très honnête, car nous connaissions ces contraintes et nous avons mené, durant deux ans, des travaux qui visaient à une neutralité de la réforme pour chaque catégorie de contribuables. On nous avait garanti cette neutralité en vote final, et je vous rappellerai, Madame la présidente, que vous nous disiez encore, lors du débat en plénum, que la réforme était globalement neutre pour chaque catégorie de contribuables, sauf peut-être dans les marges. Or, il se trouve que ce ne sont pas les marges qui ont été touchées, mais le milieu, puisque c'est la classe moyenne, et notamment les couples et les familles, qui est pénalisée en priorité par cette réforme.
Le parti démocrate-chrétien avait voté une réforme neutre pour chaque catégorie de contribuables, et il entend que cette neutralité soit aujourd'hui garantie, d'où sa colère.
Je m'exprimerai ici sur la motion, mon collègue Blanc s'exprimera sur les projets de lois qui nous sont proposés. La motion, de l'Entente en l'occurrence, demande que soient connues les causes qui ont provoqué la situation que nous connaissons aujourd'hui, que des corrections soient apportées à cette situation et, enfin, qu'un bilan un peu sérieux et approfondi sur la LIPP soit fait. En ce qui concerne les causes, nous avons déjà eu une séance de commission au cours de laquelle le département, comme à son habitude, nous a fourni force tableaux - auxquels nous n'avons pas toujours tout compris, il faut l'avouer, tellement ils étaient obscurs - pour nous indiquer que cette réforme était en fait conforme à ce que nous avions voté il y a bientôt deux ans. Permettez-nous de vouloir poursuivre les travaux en commission, pour aller un tout petit peu plus loin, car, comme l'a dit Mme Hagmann, nous avons toujours des doutes sur la neutralité de cette réforme pour chaque catégorie de contribuables. En effet, en reprenant les chiffres de 1999, on arrive apparemment à des différences conséquentes. En outre, l'augmentation des revenus n'est en aucun cas une explication suffisante à cette augmentation d'impôts.
Quant aux corrections, le Conseil d'Etat nous propose aujourd'hui un projet de loi. Nous nous en réjouissons. Nous nous réjouissons également du fait que ce projet de loi propose des corrections en priorité pour les familles, car vous savez que le parti démocrate-chrétien est particulièrement attaché à la famille. Par contre, nous serons attentifs en commission à ce que la neutralité soit garantie pour chaque catégorie de contribuables, et pas seulement pour les familles.
Pour le parti démocrate-chrétien, ce projet de loi est donc le bienvenu, mais il n'est qu'une mesure d'urgence... (L'oratrice est interpellée.)Non, non, tu auras encore besoin de parler, Claude, tu as d'excellentes propositions à faire tout à l'heure ! Ce ne sont que des mesures d'urgence. La motion demande d'aller un tout petit peu plus loin, puisqu'elle demande un bilan de la LIPP et notamment un bilan des conséquences du rabais d'impôt en général pour les contribuables genevois. La motion demande donc non seulement des correctifs d'urgence, un pansement, mais également un diagnostic plus complet de cette réforme, et je pense que ce sont deux projets qui peuvent évoluer en parallèle. Nous voterons bien évidemment le plus rapidement possible les mesures d'urgence, mais avec un travail sérieux en commission. Nous ne voterons pas à la hussarde. Et nous demanderons également que ce bilan approfondi de la LIPP soit fait.
Je terminerai juste sur la motion de l'Alliance de gauche, par rapport à sa proposition de réactiver la commission d'experts. Il me semble que cette commission a produit certains chiffres qui, aujourd'hui, ne sont pas vérifiés. Si nous repartons avec une commission d'experts, il serait peut-être bon que nous en revoyions la composition.
Mme Maria Roth-Bernasconi (S). Mesdames et Messieurs les députés, avant de vous exposer les raisons qui poussent le parti socialiste à accepter les mesures proposées par le Conseil d'Etat, je profite de l'occasion pour affirmer qu'il est de notre devoir d'expliquer que l'impôt progressif est le moyen le plus juste pour assurer la redistribution des richesses. En effet, seul l'impôt direct prend en considération la capacité contributive, les moyens dont chacun dispose. C'est tout simple: les riches paient plus que les pauvres. Il faut que les citoyens et les citoyennes fassent le lien entre les impôts et les prestations de l'Etat. L'école qui fonctionne, les hôpitaux qui permettent de soigner chacun et chacune, les routes sur lesquelles nous roulons, les bus qui sont à l'heure, tout cela profite à toutes et à tous. Il faut comprendre que l'impôt direct est l'instrument le plus juste pour assurer ces prestations.
Mais venons-en au problème qui nous occupe aujourd'hui. Il y a deux ans, ce parlement a modifié les lois fiscales pour les rendre compatibles à la loi fédérale sur l'harmonisation fiscale. Cette loi a permis à notre canton de faire de l'ordre dans sa réglementation. En effet, nous savons toutes et tous que la baisse d'impôt est un argument électoral de poids, qui donne des illusions aux contribuables en faisant croire que leur vie sera meilleure si on diminue les impôts. Ainsi, chaque groupe politique veut introduire des déductions favorables à ses électeurs et à ses électrices, que ce soient les personnes âgées, les locataires, les propriétaires, les indépendants, etc. En l'occurrence, de nombreuses déductions incompatibles avec la nouvelle loi fédérale se trouvaient dans la loi genevoise. La loi fédérale a permis de supprimer les inégalités criantes qui découlaient de ce favoritisme électoral. En effet, on ne voit pas pourquoi un rentier AVS ne serait taxé que sur la moitié de son revenu, alors qu'une vendeuse élevant seule ses enfants est imposée sur la totalité de son modeste revenu.
L'entrée en vigueur de la nouvelle LIPP a donc diminué les possibilités de déductions ou les a introduites dans le rabais d'impôt. Presque toutes les catégories sociales se voient retirer certains avantages fiscaux. Ce qui peut provoquer une certaine grogne. Mais pour atténuer les effets de cette suppression pour certaines catégories de personnes, le département a introduit le rabais d'impôt.
Le rabais d'impôt favorise fortement les personnes à revenu modeste et constitue de ce fait un instrument de politique sociale juste, soutenu depuis toujours par le parti socialiste.
Cela étant, la cheffe du département des finances a annoncé, il y a quelques jours, que les déclarations d'impôt qui sont revenues jusqu'à présent laissent prévoir que les rentrées seront supérieures à ce qui avait été prévu. Elle aurait pu se taire et ne rien dire. Cela aurait évité que certains partis politiques ne s'engouffrent dans la brèche pour crier haut et fort que c'était injuste, avant d'examiner réellement la question. Elle a préféré jouer franc jeu, afin de pouvoir faire profiter de cette manne les personnes les plus touchées par le coût élevé de la vie, soit les familles avec des enfants à charge. Dans ce sens, Mesdames et Messieurs, la présidente vise juste. En effet, on sait qu'aujourd'hui le facteur le plus courant pour tomber dans la pauvreté est d'avoir un enfant. Notre société riche n'a pas encore réussi à proposer une politique familiale digne de ce nom. Toutes les mesures favorisant cette catégorie de la population doivent donc être saluées, car il s'agit de notre avenir à toutes et tous.
Par ailleurs, Mesdames et Messieurs, nous avons été convaincus que les simulations proposées aux députés avant le vote de la nouvelle LIPP étaient correctes. Les raisons des rentrées fiscales supérieures aux prévisions découlent de plusieurs éléments qui ont déjà été expliqués. Je renonce donc à le faire.
Le groupe socialiste salue les propositions de modifications contenues dans le projet de loi du Conseil d'Etat. En effet, la modification du barème marginal du splitting permet d'atténuer des hausses d'impôt pour une catégorie de familles qui font déjà un grand effort pour la collectivité publique. L'augmentation du montant déterminant pour la première charge de la famille et l'introduction d'une déduction des frais de garde pour toutes les familles font partie des mesures de politique familiale exigées depuis longtemps par notre parti. En dernier lieu, il est également juste d'adapter les montants des revenus des enfants mineurs ou majeurs, car ce sont souvent les enfants de familles modestes qui gagnent déjà tôt leur croûte.
Pour toutes ces raisons, Mesdames et Messieurs, le parti socialiste sera partie prenante dans les travaux de la commission fiscale et y participera avec toute son énergie et sa compétence, pour que nous puissions soumettre le plus rapidement possible aux contribuables citoyens et citoyennes une loi fiscale tenant compte de la réalité des familles d'aujourd'hui.
M. Thomas Büchi (R). Lors de la dernière session, le groupe radical avait appuyé votre proposition, Madame la présidente, d'attendre votre projet de loi avant un renvoi en commission, et de ne pas statuer immédiatement et à la hâte sur les projets déposés soit par l'Alliance de gauche, soit par le parti libéral. Un des arguments que nous avions défendu à ce moment consistait à dire que le Conseil d'Etat avait bien plus de moyens que nous autres du Grand Conseil pour préparer un projet bien élaboré et bien étayé. Nous avions aussi indiqué qu'il ne fallait pas tirer sur le pianiste et qu'il fallait, s'il y avait une faute, plutôt contribuer à la réparer pour rétablir l'équité.
Nous avons reçu ce projet de loi voici trois jours. Comme milicien, ce n'est pas facile d'en tirer une synthèse, d'en comprendre toute la difficulté et de l'analyser au vu de l'imbroglio auquel nous sommes confrontés.
Nous avons quand même quelques doutes et une certaine perplexité par rapport aux experts qui ont commis la première faute. Nous osons espérer, Madame la présidente, que vous avez nommé d'autres experts pour vous aider à élaborer ce projet de loi !
Une voix. C'est nul ! Nul !
M. Thomas Büchi. C'est gentil ! C'est très gentil, Monsieur Hausser ! En l'état, nous allons donc nous limiter à souligner les objectifs du parti radical en matière fiscale.
Nous défendons tout d'abord une neutralité absolue du système genevois sur la base des directives liées à l'harmonisation fédérale. Nous voulons la poursuite d'une politique sociale objective sur le plan fiscal, mais surtout, nous ne voulons sous aucun prétexte alourdir le fardeau fiscal des classes moyennes, c'est-à-dire des artisans, des indépendants, des cadres, etc.
Que nous propose-t-on ? Conformément à votre promesse, votre projet de loi propose de corriger les hausses anormales constatées et de garantir la neutralité du dispositif. Or, il nous semble que vos propositions, en première analyse, favorisent les revenus les plus modestes et ne garantissent absolument pas que la classe moyenne, véritable colonne vertébrale de notre société, ne subira pas un préjudice, qui lui fasse payer l'entier de la facture.
Quant à la solution libérale... (Exclamations.)...qui nous paraît quand même avoir été déposée un peu hâtivement, elle a le mérite trompeur de la simplicité, avec sa réduction linéaire pour tous les revenus. Il n'est pas besoin d'avoir fait Sorbonne pour savoir que 2% de 1 000 F, cela fait moins que 2% de 1 million par exemple ! (Applaudissements.)
Une voix. Les libéraux aiment ce qui est simple !
M. Thomas Büchi. Surtout que les hauts revenus ne sont pas du tout touchés par le problème qui nous préoccupe. Alors notre proposition, la proposition radicale, c'est de fusionner les deux dispositifs pour atteindre la neutralité et l'équité.
Votre proposition de base, Madame la présidente, constitue un socle que nous approuvons. Mais il faut la compléter pour réparer l'injustice causée à la classe moyenne. Ainsi, le groupe radical propose de remédier à cette situation en modifiant le projet de loi libéral avec une réduction de 3%, au lieu des 2%, mais avec un plafonnement du revenu annuel à 150 000 F. Nous proposerons cet amendement en commission. (Brouhaha.)Ainsi, la parité sera rétablie à la satisfaction de tous. Voilà pourquoi nous proposons de renvoyer en commission tous ces projets de lois et surtout d'y travailler avec diligence, parce que les délais sont très courts. Nous y contribuerons du mieux que nous pourrons. (Applaudissements.)
Mme Marie-Françoise De Tassigny (R). Après tous les fiscalistes en herbe de notre enceinte, je ne me lancerai pas dans les questions de rabais d'impôt, 3%, 2%... Je remarquerai tout simplement que la constitution genevoise a comme première mission le soutien à la famille et que les familles se sont senties extrêmement touchées par cette nouvelle fiscalité. Elles nous ont interpellés. Je remercie Mme Calmy-Rey d'avoir enclenché une démarche très rapidement. Il est certain que la commission fiscale va la peaufiner, la pondérer, mais ce qui est très important, c'est que nous puissions tranquilliser le plus rapidement possible les familles qui, pour certaines, envisageaient déjà de quitter le canton ou même d'aller en France voisine. Je trouve vraiment déplorable, alors que le canton est en train de mettre en place une politique familiale, que nous soyons trompés par une fiscalité qui n'appuie pas les familles.
M. Claude Marcet (UDC). Je rappelle que nous sommes passés de la LCP à la LIPP en fonction d'un certain nombre de principes impératifs de droit fédéral. J'ai entendu un certain nombre de choses ce soir, mais j'aimerais tout de même rappeler...
Le président. Faites attention, Monsieur Marcet... Il y a la télévision et vous avez les mains dans les poches !
M. Claude Marcet. Je m'excuse ! J'aimerais donc rappeler un certain nombre d'éléments. Pour passer de la LCP à la LIPP, un certain nombre de mesures correctives ont dû être mises en place. Ces mesures correctives touchent la totalité des contribuables, peu ou prou, et ce dans toutes les classes. Dès lors que vous avez envisagé une neutralité globale, il est totalement illusoire de prévoir une neutralité classe par classe, car vous aurez, dans chaque classe, des éléments totalement différents, qui vont influer de façon parfois positive, parfois négative sur les impôts des contribuables précités. De toute manière, je tiens à remercier ici Mme Calmy-Rey, car je trouve qu'elle a eu l'honnêteté intellectuelle d'agir très rapidement dès qu'elle s'est aperçue d'un certain nombre de dérives à ce niveau-là. Je pense que la meilleure des choses que nous puissions faire, c'est d'aller dans le sens d'une étude approfondie de ce dispositif en commission fiscale, en n'oubliant pas une chose: si vous voulez la neutralité pour tous, nous allons vers une réduction massive des impôts en raison de ce qui précède.
M. Pierre Vanek (AdG). L'essentiel a été dit. J'aimerais juste revenir sur un ou deux points qui ont été évoqués par nos collègues libéraux. Mme Hagmann s'est félicitée de la promptitude avec laquelle le parti libéral aurait réagi. C'est certes vingt-quatre heures, semble-t-il, d'après les dates, après le projet de loi de l'Alliance de gauche qu'il a déposé un projet de loi sur cette question. C'était le 30 mai, mais il aurait peut-être été utile d'attendre le lendemain du 2 juin...
La qualité essentielle que M. Halpérin vante dans ce projet de loi, c'est sa simplicité évangélique. Effectivement, tout le monde comprend ce que signifie une baisse de l'impôt de 2%, non ciblée, une baisse pour tout le monde, une baisse pour les riches et pas pour ceux qui ne paient pas d'impôts parce qu'il n'y a rien à baisser, une baisse bien plus importante pour ceux qui sont bien plus riches. M. Büchi, avec un talent mathématique remarquable, nous a fait la démonstration sur le 2% d'un million et sur le 2% de 1 000 F, je ne la referai donc pas. Mais nos concitoyennes et concitoyens ont été capables, le dimanche 2 juin, de comprendre que l'on pouvait prendre, en matière de fiscalité, des mesures un tout petit plus fines que celles qui sont proposées par le parti libéral, des mesures comme celles qui sont contenues dans l'initiative adoptée par une majorité de nos concitoyens ce week-end-là. Ces mesures ciblent effectivement un certain nombre de catégories qui ont les moyens de contribuer un peu plus, des moyens aptes à répondre aux besoins de notre collectivité en matière de financement, notamment pour rembourser cette dette qui pèse de manière très lourde sur les épaules de nos concitoyens et sur les finances de la collectivité.
M. Halpérin a donc expliqué que le projet de loi libéral était d'une simplicité évangélique. C'est mal connaître l'Evangile - M. Blanc pourra intervenir sur cette question-là - parce que c'est un projet de loi qui favorise les riches et qui défavorise ceux qui le sont moins, et ce n'est évidemment pas là l'esprit de l'Evangile !
Quant au projet de loi de l'Alliance de gauche, il a des mérites certes limités, mais en tout cas le mérite de considérer qu'il faut atteindre les objectifs fixés par la LIPP, telle que votée, pour parvenir à une neutralité par rapport aux différentes catégories de contribuables, en opérant un certain nombre de distinctions et en jouant avec les instruments à disposition. Il a aussi eu le mérite évident de pousser le Conseil d'Etat, je le remercie encore de l'avoir fait, à aller rapidement vers des solutions que nous examinerons sur la base des faits, sur la base de l'étude de ces tableaux dont M. Halpérin disait qu'ils étaient abscons et que l'on pouvait difficilement les comprendre. Nous nous y attellerons pourtant et nous regarderons cela de plus près en commission fiscale.
Une dernière chose sur le projet de loi libéral, qui sera bien entendu renvoyé en commission. Il est évident que si la situation, on le vérifiera, est telle que décrite dans le rapport du Conseil d'Etat, c'est-à-dire qu'à revenus constants les trois quarts des contribuables ont bénéficié, avec cette LIPP V, de réductions d'impôts et qu'un quart d'entre eux - Mme Hagmann a insisté là-dessus en disant que ce n'était pas rien - ont vu leur situation se péjorer un tant soit peu du point de vue fiscal, vous m'accorderez, Madame Hagmann, Mesdames et Messieurs, que ce n'est pas en baissant de manière linéaire les impôts pour tout le monde que vous réglerez le problème de ce quart qui émerge et qui aurait, selon vous - c'est une question que nous examinerons, on trouve ces éléments dans le rapport du Conseil d'Etat - été maltraité par la révision fiscale votée par ce parlement. Ce n'est pas une réponse à la question, mais une réaction réflexe du parti libéral correspondant à son discours standard et traditionnel : «Il faut baisser les impôts de manière générale.» Sur ce point, Mme Roth-Bernasconi a eu raison d'intervenir. On entend systématiquement, du côté du parti libéral, des discours remettant en cause la progressivité de l'impôt. C'est un élément essentiel de justice sociale à laquelle nous sommes attachés et que nous défendons.
M. Pierre Weiss (L). Dans cette opération, je crois qu'il faut de temps en temps parler vrai. Il m'a semblé que les uns et les autres étaient empreints d'une compassion hypocrite à l'occasion... (Protestations.)Mais il faut quand même s'en tenir à une ligne de communication lorsqu'on essaye de communiquer. Sinon, on est pris dans ses propres rets. Cette ligne de communication a été très clairement indiquée dans l'excellent journal qu'est «Entreprise romande»... (Brouhaha.)...par Mme Micheline Calmy-Rey. Je la cite : «Enfin, je me dois de l'avouer: nous constatons aujourd'hui, avec la rentrée des premières déclarations, que nous n'avons pas évalué à sa juste mesure l'augmentation d'impôt qui touche les familles, insuffisamment protégées, même sous le régime genevois humanisé.» Ce n'est pas moi qui ai écrit cela, mais c'est un discours que Mme Calmy-Rey a prononcé à l'assemblée générale de la Fédération des syndicats patronaux. Je la remercie d'avoir dit ce soir-là une vérité. Malheureusement, dans les jours qui ont suivi, d'autres, mais pas elle, ont exprimé d'autres vérités. Et comme l'a relevé M. Hiler, mais aussi d'autres collègues, ces autres vérités ne coïncident pas exactement avec celle de Mme Calmy-Rey. Il s'agira donc, et c'est la première chose d'ailleurs que demandent les motions déposées par l'Entente et l'Alliance de gauche, il faudra donc que l'on sache quelle est LA vérité, et non pas une vérité, en la matière, et sur les responsabilités, et sur les causes, et sur les effets. On ne peut pas à la fois corriger quelque chose et n'avoir rien à corriger. On ne peut pas à la fois avoir plus d'argent qui entre dans les caisses de l'Etat et prétendre que l'Etat en perd. Il y a là quelque chose d'incohérent. Il faut sortir de cette incohérence et cela ne peut se faire évidemment par la seule lecture de ce projet d'une trentaine de pages du Conseil d'Etat.
Le deuxième point qu'il est important de relever, c'est que ce projet constitue, par rapport aux premières déclarations de Mme la présidente du Conseil d'Etat, une amélioration. En effet, on vise à permettre aux contribuables de voir l'augmentation pour l'année 2001 également annulée pour partie. On peut discuter des modalités. Néanmoins, en même temps qu'il y a une amélioration pour certains, on introduit pour d'autres une inégalité. Je vois là dans le projet du Conseil d'Etat un vice fondamental, qui est, pour les contribuables imposés à la source, l'impossibilité pour 2001 de voir leur impôt restitué. Il serait donc bon que le département des finances songe au moins, lorsqu'il sera moins pressé par les événements, à une solution d'amélioration, j'allais dire une solution des délais... On me souffle... Une solution des délais pour améliorer ce projet de loi ! Soit dit en passant, ceux qui accusent d'un excessif simplisme ou en tout cas de simplicité évangélique le projet libéral lui reconnaîtront le mérite, à lui, de ne pas être inégalitaire... (Rires et brouhaha.)Les citoyens, lorsqu'ils ont voté sur l'initiative libérale qui prévoyait et qui a abouti à une baisse d'impôt de 12%, ne l'ont pas trouvée inégalitaire. Tous ceux qui payaient des impôts ont vu leurs impôts baisser de 12%. Il n'y a pas eu une baisse de 12% supérieure pour ceux qui gagnaient 1 million ou 100 000 F et une baisse de 12% inférieure pour ceux qui gagnaient seulement 50 000 F. Seulement, il est vrai que certains ne payent pas d'impôts. Pour ceux qui ne payent pas d'impôts, je crois qu'il serait bon que M. Vanek n'oublie pas, par exemple, qu'ils reçoivent beaucoup de l'Etat. On ne peut pas à la fois ne pas payer d'impôts, vouloir que ses impôts baissent et en même temps recevoir de l'Etat des montants eux-mêmes en augmentation.
Nous sommes trop simples, nous dit-on. Je crois que le projet de loi du Conseil d'Etat, lui, est trop compliqué. Il est parfois même incohérent. Je trouve par exemple étonnant que l'on songe à augmenter la déduction pour frais de garde effectifs pour toutes les familles ayant un revenu brut de moins de 50 000 F. 50 000 F, c'est donc 4 000 F par mois. Il m'étonnerait beaucoup, à quelques centaines de francs près, mais je suis probablement moins imprécis que les spécialistes de l'administration fiscale sur ce point, il m'étonnerait beaucoup que des personnes ayant un revenu de 50 000 F brut puissent en plus avoir des frais de garde. Il serait au contraire bon...
Le président. Il vous reste trente secondes, Monsieur le député ! Il vous faut conclure.
M. Pierre Weiss. ...que le montant de la déduction soit lui-même augmenté. Nous avons au fond eu, dans cette affaire, un détournement de loi au détriment des contribuables. Il est donc important de voter d'abord, c'est la position du parti libéral, une solution simple, égalitaire, qui s'applique rapidement pour l'année 2001 et l'année 2002 à tous les contribuables sans exception, à toutes les familles, voire aux contribuables au bénéfice du barème A, parce que nous ne sommes pas convaincus, dans la mesure où les déclarations d'impôts ne sont pas encore rentrées, que les contribuables du barème A ne soient pas affectés. On pourrait avoir d'autres surprises. J'imagine la mine contrite de celui ou plutôt de celle qui devra ce jour-là confesser d'autres surprises !
Le président. Terminez, Monsieur ! Terminez !
M. Pierre Weiss. Une phrase pour terminer, Monsieur le président !
Le président. Une phrase, je vous l'accorde !
M. Pierre Weiss. Une fois que nous aurons corrigé, par cette solution simple, le problème pour 2001 et 2002, il nous faudra songer à une modification profonde de la LIPP. Là, je regrette de devoir diverger d'avis avec David Hiler. Cela passera à notre sens par une solution d'esprit confédéral. Et l'esprit confédéral en la matière ne connaît pas le rabais d'impôt. Une fois de plus, on veut faire de Genève un «unicum». Nous sommes contre ces solutions qui ne s'appliquent qu'à un canton et pas aux autres.
M. Claude Blanc (PDC). Sur l'insistance de M. Vanek, je me dois de répondre à sa demande d'exégèse sur la simplicité évangélique. Je me rappelle avoir lu quelque part, à l'intention de M. Halpérin et de ses amis, qu'il est plus facile à un chameau de passer par le trou de l'aiguille qu'à un riche d'entrer dans le royaume ! C'était le préambule ! (Applaudissements.)Chameau, parce que Mme Calmy-Rey a souvent fait allusion à ce genre de quadrupède pour parler des effets de la LIPP V ! (Brouhaha. L'orateur est interpellé.)C'est vrai, c'est un dromadaire, mais chameau il y a quelque part... (Rires.)
Ceci étant, Mesdames et Messieurs les députés, redevenons sérieux. Il a été dit beaucoup de choses ce soir sur les causes et les effets de la LIPP, sur les conditions dans lesquelles elle a été votée, sur les choses qui ont été exprimées, celles qui ne l'ont pas été, sur celles que l'on a comprises, celles que l'on n'a pas comprises. Nous l'avons tous votée, cette LIPP, avec des éléments qui nous ont paru suffisants.
Je vous rappelle, en ce qui concerne l'Entente, qui était minoritaire à l'époque, que le but de ses députés en commission fiscale, lorsque nous avons discuté des différentes lois fiscales LIPP, c'était d'obtenir le mieux possible. Car nous ne pouvions pas obtenir de la majorité des choses qu'elle ne voulait pas nous donner. Nous sommes finalement tombés d'accord, avec mon excellent ancien collègue Nicolas Brunschwig qui était un peu le fer de lance de l'Entente en commission fiscale, pour reconnaître que nous avions obtenu le mieux que nous pouvions obtenir et qu'il fallait nous en contenter. On s'aperçoit aujourd'hui de certains effets inattendus de cette réforme fiscale. Le Conseil d'Etat nous présente un projet de loi qui tend à corriger ces effets inattendus. Je dois vous dire, Mesdames et Messieurs les députés, que le parti démocrate-chrétien a accueilli avec satisfaction la teneur de ce projet de loi. Il s'est même dit que nous aurions pu le présenter nous-mêmes, tellement il colle à l'idée que nous nous faisons de la fiscalité familiale et tellement il est conforme à la doctrine que nous avons toujours défendue en ce qui concerne la fiscalité familiale.
Il est bien évident, Mesdames et Messieurs les députés, que ce projet n'est probablement pas parfait. Il ne répond peut-être pas à toutes les questions posées par l'application de la LIPP V. Il en apparaîtra peut-être d'autres ensuite, que nous n'avons pas encore analysées aujourd'hui. La commission fiscale a déjà accepté de se saisir de ces projets rapidement, puisqu'elle a d'ores et déjà programmé des séances pendant l'été - je remercie M. Hiler d'en avoir pris l'initiative - de façon à ce qu'elle puisse terminer ses travaux suffisamment tôt. Cela permettra au Grand Conseil de mettre ce projet de loi sous toit, tel qu'il est ou amendé, lors de notre séance spéciale agendée le 29 août. De toute manière, il sera voté ce jour-là, de façon à être soumis au peuple dans les plus brefs délais et de façon à ce qu'il puisse encore entrer en vigueur cette année. Ainsi, les gens qui auraient été frappés d'une manière trop forte par la loi précédente pourront trouver satisfaction dans cette nouvelle loi. C'est pourquoi nous nous efforcerons de travailler le plus vite possible.
Je voudrais ajouter qu'il n'est pas sûr, je vous l'ai d'ailleurs déjà dit, que cette loi résolve tous les problèmes. Aussi souhaitons-nous proposer, lors des travaux de la commission, que cette loi soit assortie de la clause de loi expérimentale, une loi que l'on avait appelée à l'époque loi Unger. C'est une loi qui s'éteint d'elle-même au bout de deux ans, c'est-à-dire qui oblige le parlement à en mettre une autre tout de suite en chantier, de façon à ce que l'on puisse arriver à une solution définitive au bout des deux ans. Si nous n'y arrivons pas, nous pourrons toujours renouveler cette loi-là au bout de deux ans, mais il faut que nous nous imposions de reprendre la LIPP à tête reposée, si j'ose dire, parce que nous allons maintenant travailler dans l'urgence. Il nous faut le faire en introduisant cette clause de caducité au terme d'une période de deux ans, si nous n'avons rien fait d'autre entre-temps.
Voilà, Mesdames et Messieurs les députés, ce que je tenais à vous dire. Je crois que nous sommes maintenant sur la bonne voie. J'espère que la commission fiscale travaillera avec diligence et que nous arriverons à redresser la situation d'ici la fin de l'année.
M. Jean Spielmann (AdG). Beaucoup de choses ont été dites. Permettez-moi simplement d'apporter certaines corrections à des affirmations qui, à mon avis, ne correspondent tout simplement pas à la réalité.
Tout d'abord, il y a un certain nombre d'éléments qui engendrent des changements sur les bordereaux de cette année, changements qui ne sont pas la conséquence d'erreurs, mais d'une modification de fond de la fiscalité. Pourquoi ? Concernant par exemple le postnumerando, il est clair que certaines choses ont changé. Une brèche est intervenue dans les calculs et beaucoup de citoyens en ont probablement profité pour mettre un certain nombre de revenus de côté. Les citoyens n'ont pas été imposés en fonction de leurs gains de l'année en cours, mais en fonction des gains de l'année précédente. Et comme il est dans l'habitude de la plupart des citoyens de remplir leurs déclarations d'impôts année après année, beaucoup ont constaté, après l'introduction du postnumerando, des hausses sur leurs revenus, alors qu'ils n'avaient pas été sanctionnés par le fisc pendant une année. Deux ans de modifications dans la situation personnelle se sont additionnés sans intervention du fisc.
Autre élément: le passage au postnumerando ne provoque pas seulement la brèche de l'année de calcul, mais change aussi le moment de la prise en compte de la situation des contribuables. Cette situation n'est plus celle du 1er janvier, mais celle du 31 décembre. Il se peut donc que la situation fiscale d'un certain nombre de contribuables ne soit plus la même. C'est par exemple le cas pour des personnes avec des enfants aux études, qui étaient, d'après l'ancienne loi, déductibles au niveau fiscal: ces personnes doivent tout d'un coup faire face à deux années de suppression de déductions, les enfants étant sortis du régime de déductions. Ce sont des pénalisations qui ne sont pas dues à des erreurs de la loi, mais qui tiennent à la modification sur laquelle nous n'avons peut-être pas suffisamment réfléchi.
Sur la question des barèmes maintenant, il faut rappeler que nous avons tous demandé la mise en place d'un nouveau barème fiscal et procédé à des changements de fond, parce qu'il était nécessaire de corriger le barème fiscal en vigueur, avec des méthodes mathématiques forcément compliquées, ces barèmes résultant d'une série de dispositions fiscales extraordinairement complexes. A un certain moment, il y avait des centimes additionnels supplémentaires. Ils ont été insérés dans le barème de base. Il y avait aussi les barèmes-rabais. Aujourd'hui, on se trouve dans un système de rabais d'impôt. Ce sont donc des modifications considérables qui ont engendré un changement de la courbe, figée pendant deux ans. C'est ce que l'on a appelé la fameuse bosse. A un moment donné, certaines progressions s'avèrent un peu plus importantes que la norme ne le voudrait. Beaucoup de gens se trouvent dans ces situations-là. Les résultats d'impôt en sont la conséquence.
Les autres éléments dont nous aurions dû, et je me compte aussi parmi ceux-là, tenir compte, c'est la modification du système de réduction pour les familles. Il y avait 2 600 F de déduction pour un enfant, 2 400 F d'allocations familiales, 400 F pour les déplacements et 500 F pour le carnet d'épargne. Cela fait en tout, grosso modo, 6 000 F de réductions pour le premier enfant. Dans la loi, on a mis 4 500 F. Il est évident qu'en modifiant la loi et en passant d'un système de déductions basé sur le revenu, qui favorise effectivement les bas revenus et qui est à mon avis plus juste, à un système de déductions sur l'impôt, les familles avec un enfant ont été pénalisées. Il est donc logique et normal que le Conseil d'Etat fasse une proposition qui corrige la situation pour cette partie de la population.
Je voudrais simplement dire ici à ceux qui souhaitent la neutralité complète, parce que la neutralité globale permet à tout le monde de déduire, qu'il s'agit tout simplement d'une vision erronée, parce que la neutralité signifie qu'il n'y a pas d'influence de la loi fédérale sur la loi cantonale et que les modifications en question constituent la rectification des modifications intervenues dans la loi et non pas une déduction d'impôt pour tous. Le projet de loi libéral propose tout simplement, en ce qui concerne par exemple le barème B, de déduire, pour les revenus de 20 000 F, une somme d'environ 42 F et, pour des revenus plus importants, des revenus d'un million, plus de 7 000 F ! On modifie donc la loi, mais on ne respecte pas la neutralité.
Contrairement à ce que vous dites et même si les radicaux veulent fusionner les projets, ce serait une erreur politique et une erreur fiscale que de favoriser tout le monde et de ne pas utiliser l'argent qui a été versé en trop...
Le président. Il vous reste trente secondes, Monsieur le député !
M. Jean Spielmann. ...pour favoriser ceux qui ont été pénalisés par les modifications. Il faut donc cibler les modifications et accepter les propositions que nous avons faites, ainsi que celles du Conseil d'Etat qui vont dans la bonne direction. J'entends bien contrôler cela de manière plus pointue cette fois que nous ne l'avons fait la dernière fois, parce que l'on ne peut pas se tromper encore une fois !
M. Claude Marcet (UDC). A vous entendre, Mesdames et Messieurs, je me demande si vous n'êtes pas en train de refaire un débat que vous auriez dû faire il y a deux ans déjà. J'ai entendu un certain nombre de choses sur ce qu'aurait dit Mme Calmy-Rey dernièrement. Pour ma part, je lis que le lundi 6 novembre 2000 - nous n'étions pas là - Micheline Calmy-Rey déclarait: «75% des contribuables verront leurs impôts baisser.» Si je pars du principe que vous vouliez une neutralité globale, cela équivaut à dire qu'à cette époque déjà vous auriez dû savoir que 25% des contribuables allaient voir leurs impôts augmenter. Actuellement, nous sommes en train de refaire le débat, peut-être suite à des augmentations un peu plus importantes que celles qui étaient espérées. Mais à cet égard, je vais tout à fait dans le sens de M. Spielmann, c'est-à-dire: augmentation des revenus, modification des situations et passage du praenumerando au postnumerando.
M. Pierre Froidevaux (R). Nous avons entendu, Monsieur le président, les avis de chacun. Je vous propose à présent une procédure de vote. Il est évident que tous les projets de lois iront en commission. Je suggère que les deux motions, la motion 1458 et la motion 1459, soient directement renvoyées au Conseil d'Etat pour que les invites aient un sens. Je souhaite donc, Monsieur le président, que vous passiez à ce vote et je recommande à notre Conseil de voter dans ce sens-là.
Le président. Sur cette question, je rappelle qu'il y a eu une demande de renvoi en commission. Vous savez que le renvoi en commission prime sur votre proposition.
M. Claude Blanc (PDC). Rapidement, car j'ai oublié de dire quelque chose à l'adresse de M. Iselin, qui faisait allusion aux rentes et aux rentiers. Il y a un principe qu'il faut que l'on se mette bien dans la tête. Toutes les sources de revenus, quelles qu'elles soient, qu'elles proviennent d'un salaire, d'une rente ou d'un capital, doivent être imposées de la même manière. Dès l'instant où les revenus sont des revenus, ils doivent être imposés comme tels. Autrement, on ne s'en sort pas. D'ailleurs, le droit fédéral le prévoit. C'est pour cela que le droit fédéral a aggravé la situation des rentiers. Mais il faut que l'on se fasse une raison. Moi-même qui suis retraité, je suis bien obligé d'admettre que ce que je gagne aujourd'hui, je le gagne de la même manière que je le gagnais il y a quelques années, en me fatiguant moins, mais je dois de toute manière payer des impôts sur ce que je gagne. Je ne crois pas que l'on puisse établir ici des situations privilégiées pour des revenus, quelles que soient leurs sources.
Le président. Voulez-vous encore la parole, Monsieur Iselin ? Sur les rentiers ? (Protestations.)Si, l'UDC a le droit de l'avoir !
M. Robert Iselin (UDC). J'ai le droit de réponse, n'est-ce pas ?
Les rentiers dont vous parlez, Monsieur Blanc, vous que j'apprécie pour beaucoup de choses... Entre parenthèses, lorsqu'on parle du chameau qui passe par le trou de l'aiguille, ce n'est pas le trou de l'aiguille, mais la petite porte de la grande porte de Jérusalem. Pour votre orientation...
Cela dit, je voulais préciser que les rentiers, eux, ont déjà payé sur les sommes qu'ils ont économisées et ils payent une deuxième fois.
Le président. Voilà, Mesdames et Messieurs, nous arrivons au terme de ce débat et Mme Calmy-Rey va le conclure.
Mme Micheline Calmy-Rey, présidente du Conseil d'Etat. Très rapidement, je voudrais faire un certain nombre de remarques sur ce qui a été dit. La première remarque: j'ai immédiatement tiré la sonnette d'alarme lorsque j'ai vu rentrer les déclarations, parce que nous avons constaté qu'il y avait des hausses d'impôts importantes sur la quasi-totalité des déclarations. J'aurais pu me taire, mais je n'ai pas voulu le faire et je vous présente aujourd'hui des mesures de correction.
Ce que l'on voit sur ces déclarations, c'est que ces augmentations d'impôts sont dues premièrement au passage à la LIPP. M. Marcet vient de vous lire un passage de la «Tribune de Genève» à ce sujet. Nous avons effectivement fait des efforts considérables pour corriger l'adaptation du droit fédéral, afin d'éviter qu'elle ne conduise à des augmentations massives d'impôts. Ces corrections ont abouti aux résultats suivants: 75% des contribuables devaient avoir des diminutions et 25%, en moyenne, des augmentations. Cela signifie qu'un certain nombre de personnes devaient avoir des augmentations d'impôts et que ces faits-là étaient connus au moment du passage de l'ancienne à la nouvelle loi.
Le deuxième facteur d'augmentation, ce sont les changements de situations familiales et les augmentations de revenus. La nouvelle loi, c'est aussi le postnumerando. Le postnumerando, ce sont deux années d'écart entre la dernière déclaration que les contribuables ont reçue, c'est-à-dire la déclaration 2000 sur les revenus 1999, et celle qu'ils vont recevoir en fin d'année 2001 sur les revenus 2001. Deux années d'écart de revenus, c'est une croissance des revenus à Genève et, Dieu soit loué, c'est une bonne nouvelle, mais cela se traduit, en terme d'impôts, par des augmentations normales qui ne nécessitent pas de corrections de notre part.
Troisième constatation - c'était aussi un fait connu, mais peut-être pas dans tous ses effets - le barème B, c'est-à-dire celui qui s'applique aux couples mariés, corrige moins que le barème A. C'est sur ce point-là que j'ai réagi et c'est sur ce point-là que je voulais apporter des correctifs. A Genève, Mesdames et Messieurs, la situation des familles est difficile. Les frais de garde sont importants et le forfait que nous avions mis dans le rabais d'impôt n'allait pas assez loin. La première charge de famille n'était pas suffisante non plus. Nous n'avions pas adapté les revenus des enfants pour charge et demi-charge de famille. Il fallait encore faire un effort. C'est aujourd'hui ce que le Conseil d'Etat vous propose, en plus de la correction du barème B qui n'a pas été faite au moment de l'adaptation à la LIPP.
Pour ce qui concerne les rentiers, Monsieur Iselin, ils ont été à l'origine du rabais d'impôt. Le canton de Genève était pratiquement le seul canton de toute la Suisse à connaître une déduction des rentes AVS/AI qui pouvait aller jusqu'à 50% de la rente en fonction des revenus. C'était une déduction très importante que l'harmonisation à la loi fédérale nous interdit désormais. Par conséquent, si nous n'avions pas adopté le rabais d'impôt, les rentiers auraient enregistré de très fortes augmentations d'impôts. Les membres de la commission fiscale le savent très bien, Mme Hagmann aussi. Nous avons en effet procédé à des simulations avec des déductions sur le revenu brut des rentiers, jusqu'à 18 000 F pour un couple, qui corrigeaient moins bien que le rabais d'impôt. C'est la raison pour laquelle le parti libéral s'est finalement rallié au rabais d'impôt. C'est bien pour protéger les retraités. Cela a été l'un de nos soucis.
Maintenant, concernant les propositions de motions et les projets de lois, le projet de loi du Conseil d'Etat cible les familles et les familles de catégorie moyenne. Il ne porte d'effet que sur le barème B et il est complété par des mesures familiales, à savoir frais de garde, première charge de famille, revenu des enfants. Le projet de loi libéral agit à la fois pour le barème A et pour le barème B et il ne cible pas. Il diffuse ses effets tout au long des deux barèmes. Il ne permet donc pas de corriger la situation des familles autant que le projet de loi du Conseil d'Etat.
Nous allons discuter de tous ces projets de lois en commission. Je pense que cela correspond au voeu du parlement, que tout soit renvoyé en commission et que s'engage une discussion. Si vous souhaitez renvoyer les motions au Conseil d'Etat, pourquoi pas ! Mais de toute façon, Mesdames et Messieurs, on ne pourra réellement évaluer les effets de la LIPP qu'après coup, c'est-à-dire une fois que toutes les déclarations seront rentrées et auront été examinées. Par conséquent, aussi bien pour les invites qui demandent un suivi de la LIPP, des commissions d'experts qui assurent le suivi, que pour ce qui concerne la proposition de M. Blanc qui demande une évaluation, tout cela devra intervenir après coup. Je n'y suis pas opposée, mais au contraire favorable.
Pour ce qui concerne l'imposition à la source, Monsieur Weiss, c'est vrai qu'elle pose des problèmes en termes de rétroactivité, je l'ai dit hier lors de la conférence de presse, je le répète aujourd'hui. L'administration fiscale a rencontré le Groupement des frontaliers. On est en train de travailler aux solutions d'entente avec eux, parce qu'il est effectivement inadmissible d'instaurer des inégalités de traitement entre un groupe de contribuables et les autres.
Voilà, Mesdames et Messieurs, je voudrais simplement vous remercier de bien vouloir examiner ces projets en commission, de le faire avec célérité, afin que ces projets de lois puissent encore déployer leurs effets sur l'année fiscale 2001.
Le président. Madame Hagmann, vous maintenez votre proposition de renvoi en commission ? Monsieur Roulet ?
M. Jean Rémy Roulet (L). Il n'est pas d'usage d'intervenir après la conseillère d'Etat, mais si celle-ci est d'accord que l'on renvoie les deux motions au Conseil d'Etat, nous retirons, nous groupe libéral, notre proposition de tout renvoyer en commission fiscale.
Le président. Nous allons procéder de la manière suivante. Tout d'abord, renvoyer en commission fiscale les trois projets de lois 8752, 8753 et 8756. Nous passerons ensuite au vote des motions 1458 et 1459.
Les projets de lois 8752, 8753 et 8756 sont renvoyés à la commission fiscale.
Mise aux voix, la motion 1458 est adoptée.
Mise aux voix, la motion 1459 est adoptée.