République et canton de Genève

Grand Conseil

P 1338-A
Rapport de la commission des pétitions chargée d'étudier la pétition pour le maintien de la poste de La Plaine
Rapport de M. Louis Serex (R)
P 1344-A
Rapport de la commission des pétitions chargée d'étudier la pétition : Défendons la poste de Choulex
Rapport de M. Louis Serex (R)

Débat

Le président. Monsieur le rapporteur, avez-vous quelque chose à ajouter ?

M. Louis Serex (R), rapporteur. Monsieur le président, chers collègues, la précision spectaculaire de ce rapport me permet de dire qu'il n'y a rien à rajouter... (Rires.)...sinon qu'on a pu constater que certains maires un peu plus malins que d'autres avaient pu s'organiser en avant-première avec la Direction des postes.

Je propose à cette chère assemblée de suivre les conclusions de la commission et de renvoyer ces pétitions au Conseil d'Etat.

M. Alberto Velasco (S). Je voudrais attirer l'attention du président du département sur le fait que, depuis le dépôt de cette motion, la poste de Russin a été fermée et que d'autres bureaux de poste en Ville de Genève, notamment ceux des Acacias, Miremont, la Cluse, ont été condamnés. J'ajoute, Monsieur le président, que les habitants ont à chaque fois convié les représentants de la Poste à les entendre. Les habitants de Saint-Jean ont demandé à la Poste quelles étaient les raisons économiques pour lesquelles leur poste avait été fermée, chiffres à l'appui, mais personne ne leur a fourni de chiffres ! En plus, il semble que la Poste ait fait une étude comportant neuf critères - géographiques, financiers, économiques, sociaux, etc. - qui, une fois analysés, lui permettent de définir si une poste doit être fermée ou rester ouverte. Alors, les habitants de la Cluse ont invité la Direction de la Poste... (L'orateur est interpellé.)

Le président. Poursuivez, Monsieur Velasco !

M. Alberto Velasco. ...pour lui demander les raisons de la fermeture de leur poste. Au moment où l'étude a été présentée, les habitants de la Cluse ont demandé aux représentants de la Poste quels étaient les critères qui avaient prévalu à la fermeture de leur poste. Eh bien, à ce jour, la Poste n'a pas été capable de leur répondre !

Il ne faut pas prendre les citoyennes et les citoyens pour des imbéciles: il faut répondre à leurs questions et ne pas se contenter de leur dire que leur poste doit être fermée pour des raisons financières ou autres !

J'espère, Monsieur le président, que vous ferez diligence auprès de la Direction des postes romandes, afin qu'elle donne ces informations aux citoyens ! Et je souhaite, Monsieur le président, puisqu'à l'époque vous vous y étiez engagé ainsi que votre département - le Conseil d'Etat a pris des mesures similaires pour la police et dans d'autres secteurs - que les prestations de proximité de la Poste soient maintenues. Je vous y invite et j'espère que dans les semaines qui viennent nous aurons une réponse du Conseil d'Etat à propos de ces nouvelles fermetures de bureaux de poste.

M. Pierre Vanek (AdG). Je remercie M. Serex pour la précision spectaculaire de son rapport, ce qui me permettra d'être bref... (Rires et exclamations.)

Des voix. Chiche !

M. Pierre Vanek. Je ne ferai pas un long discours sur les causes de ces fermetures successives de bureaux de poste, sur la politique de marchandisation d'un certain nombre de services publics, de privatisation de facto de ceux-ci, qui conduit à cette situation, dont les aspects détestables sont bien décrits et ressentis par les pétitionnaires.

Je tiens juste à rappeler une position qui a été une position constante de mon groupe sur la question de ces fermetures de postes. Nous avons proposé - il n'a malheureusement pas été accepté lors de la dernière législature - un projet de loi qui demandait que le canton - vous vous en souviendrez, Monsieur Lamprecht - adopte une position nettement plus offensive et que, face à une politique fédérale visant au démantèlement d'un service public essentiel, il se donne les moyens d'anticiper et de ne pas réagir seulement au coup par coup.

Nous avons là deux pétitions concernant deux bureaux de poste. Les pétitionnaires ont été entendus par notre Grand Conseil. Un rapport spectaculairement précis a été établi et ces pétitions vont être renvoyées au Conseil d'Etat. Mais c'est encore traiter cette question par le petit bout de la lorgnette, c'est accepter de saucissonner le problème ! On peut lire dans le rapport de M. Serex que le représentant du département a insisté devant la commission sur le fait que les compétences cantonales en matière de réseau postal sont très limitées et que le canton ne peut que coordonner les actions communales... Je pense que cela n'est pas vrai ! Certes, sur le plan légal, les compétences, au sens strict de la loi cantonale, sont limitées, mais, sur le plan de l'initiative politique, de la résistance au démantèlement de ces bureaux de poste, le canton, à défaut d'avoir des compétences formelles, a des moyens, notamment de faire en sorte qu'on ne traite pas, session après session dans ce Grand Conseil, de tel ou tel bureau de poste qui va fermer, des doléances des habitant-e-s de tel quartier ou de tel autre. Nous pouvons essayer de nous donner les moyens, en tant qu'élus - non pas communaux mais du canton - d'avoir une idée des besoins réels de la population et des usagers dans l'ensemble du canton et de les défendre de manière concertée, en s'appuyant sur la mobilisation réelle des habitants, qui dépasse les clivages politiques de ce Grand Conseil, face à cette régie fédérale qu'est encore la Poste et face aux autorités fédérales qui cautionnent et impulsent cette politique de démontage. C'est là un point important.

On dit dans le rapport que la marge de manoeuvre est restreinte et M. Jean-Charles Magnin, directeur du département des affaires économiques du département de l'économie, rappelle que le département a déjà organisé deux réunions et que, sur proposition du département, l'ACG a voté une résolution s'opposant à la réorganisation du réseau... C'est fort bien ! Mais il faudrait faire bien plus ! Il faudrait faire une enquête pour savoir exactement quels sont les besoins de la population et faire un rapport à ce Grand Conseil, prendre des initiatives en disant quel est le réseau postal à l'échelle du canton dont nous avons besoin pour les entreprises, dont nous avons besoin pour les usagers, confronter cette image générale, que vous avez les moyens vous seul, Monsieur Lamprecht - ou le Conseil d'Etat - d'obtenir, au lieu de le faire commune par commune, exiger éventuellement de pouvoir la confronter avec celle de la Poste - les plans de la Poste sont effectivement souvent relativement opaques - et engager une campagne politique pour défendre un véritable service public postal dans ce canton, et évidemment aussi - puisqu'il s'agit d'une question fédérale - aller vers vos collègues des autres cantons pour impulser ce même type de démarches.

Or, je ne vois pas se dégager, au niveau des autorités de ce canton, au niveau du Conseil d'Etat en particulier, une dynamique qui dépasse le fatalisme et les lamentations au cas par cas sur les fermetures de postes. Cela n'est à mon avis pas satisfaisant, et je vous engage à mener campagne, Monsieur Lamprecht, Mesdames et Messieurs les députés, à appuyer dans ce sens le renvoi de ces pétitions au Conseil d'Etat pour aller dans le sens d'une action un peu plus vigoureuse, plus construite et concertée, comme on doit le faire à l'échelle du canton, plutôt que de traiter ce problème très important quartier par quartier ou commune par commune.

M. Pierre Weiss (L). La question de la Poste nous préoccupe depuis que la Poste suisse a décidé de se restructurer. Peut-être aurait-il fallu que l'on s'en préoccupât plus tôt, lorsque, au sein de l'Union européenne, les premières mesures de libéralisation des services publics ont été prises. J'ajoute: au sein de l'Union européenne dont la majorité des gouvernements étaient d'orientation sociale-démocrate... (Exclamations.)Et je partage l'avis de M. Velasco, qui a dit qu'il y avait des problèmes de communication sur la forme... Il est même paradoxal que la Poste ait de la peine à faire passer son message ! En tant qu'édile communal, j'ai à plus d'une reprise pu constater combien il était difficile de saisir la constance des intentions de la Poste quant à ce qu'elle voulait faire des bureaux de nos petites communes.

Toutefois, j'aurais plus de peine à partager les points de vue exprimés par M. Velasco quant au fond. J'ai effectivement fait référence tout à l'heure aux décisions sociales-démocrates au niveau européen, je pourrais aussi me référer, mais cela serait probablement peu opportun, au fait que le département fédéral responsable est dirigé par un représentant du parti socialiste et que la Poste elle-même est dirigée par un chef socialiste...

Mais il s'agit au fond de voir en faveur de qui ces décisions sont prises. Certains peuvent suspecter que cela soit en faveur du seul profit... Peut-être faut-il penser aussi aux avantages pour les consommateurs. Si c'est ainsi que les décisions se prennent, je crois que nous serions malvenus de tenter d'orienter dans un sens passéiste les restructurations qui se font à la Poste. Peut-être, effectivement, serait-il bon que nous étudiions avec plus d'attention les enquêtes de satisfaction qui sont menées par la direction de la Poste auprès des communes qui sont concernées par la restructuration.

Mais j'aimerais conclure ainsi pour éviter que nous ne nous transformions en «Renfort de Sézegnin» sur cette affaire: il se trouve que le Parlement fédéral a pris ses responsabilités. Qu'il les a prises d'abord en votant la restructuration et, aussi, en adoptant ou en rejetant certaines motions qui voulaient contraindre ou faire en sorte que le cours de cette restructuration de la Poste soit différent.

Le peuple n'avait pas cru bon - ou ses représentants - lorsqu'il y a eu une première loi, d'en appeler au référendum. C'est une occasion manquée, mais comme nous sommes dans un pays de démocratie semi-directe, l'occasion n'est pas définitivement manquée. Nous aurons l'occasion tous de nous prononcer au niveau fédéral sur une initiative populaire qui a été très récemment déposée avec 106 000 signatures qui s'opposent à cette restructuration. Nous verrons bien le sort que le peuple lui réservera. J'ajoute: le peuple et les cantons, et nous verrons bien de quelle façon le souverain genevois se déterminera à cette occasion.

Je crois par conséquent, Monsieur le président, qu'il serait sage d'en rester là où M. Serex avait estimé bon de limiter son rapport, et de ne pas poursuivre outre mesure ici le débat sur cette question.

M. Patrice Plojoux (L). J'habite un village - Russin - où la poste a été supprimée. Le service à domicile ne fonctionne pas à la satisfaction des habitants - comme on veut bien le dire - et la Poste ne dialogue pas... Elle prend ses décisions unilatéralement.

Toutefois, Monsieur Vanek, je ne peux pas vous laisser dire que les démarches sont effectuées commune par commune ! Les communes se sont regroupées et quarante-quatre communes sur quarante-cinq ont écrit une résolution contre les fermetures de la Poste ! Ces résolutions ont été transmises à M. le conseiller d'Etat Carlo Lamprecht et nous sommes allés tous les deux voir M. Ulrich Gygi à Lausanne, lequel nous a confirmé qu'il n'était qu'un exécutant et qu'il devait appliquer une politique fédérale. Ces quarante-quatre résolutions ont ensuite été envoyées, dans leur langue respective, à l'ensemble des conseillers nationaux. Elles ont également été envoyées aux autres conseillers d'Etat ainsi qu'au Conseil fédéral. Le Conseil national a confirmé la politique menée par M. Gygi dans une séance.

Il n'est donc pas exact de dire que les communes n'ont rien fait ! Au niveau politique, malheureusement, je ne vois pas ce qu'elles auraient pu faire de plus !

Voilà ce que je tenais à préciser.

M. Luc Barthassat (PDC). Il y a un peu plus d'une année, la fermeture d'une poste, dans certains quartiers ou certaines communes, faisait la Une de notre actualité. Souvent, elle a été ressentie comme un choc par la population locale. Il est vrai que, pour certaines personnes n'ayant pas les moyens de se déplacer, la surprise fut grande. Et la perte d'une certaine qualité de la vie en a agacé plus d'un.

On peut déplorer le manque de concertation de l'époque entre la Direction des postes et ces communes. Mais à l'heure des privatisations, des rationalisations, de l'informatisation, sans parler de la folie Internet, ce qui est plébiscité aujourd'hui d'un côté sera presque obligatoirement perdu de l'autre.

Certains appelleront cela l'évolution ou, tout simplement, un changement d'habitudes. Il est bien clair que ces transitions sont souvent difficiles, mais, aussi, parfois nécessaires. En effet - il faut le rappeler - certains offices postaux sont de moins en moins fréquentés et - cela est dit dans le rapport - c'est depuis le 1er janvier 1996 que les activités postales et de télécommunications ont été séparées.

L'autonomie de la Poste a nécessité une réorganisation de l'entreprise. Depuis plus d'une année, après que les habitants de certains quartiers se furent mobilisés - et Dieu sait s'ils ont eu raison de le faire ! - il y a eu beaucoup de discussions et un dialogue s'est quand même instauré entre la direction de la Poste et le Conseil fédéral. Beaucoup de dispositions et de solutions se mettent en place.

Le parti démocrate-chrétien vous prie, Mesdames et Messieurs les députés, de soutenir le renvoi de ces pétitions au Conseil d'Etat pour que nous puissions enfin être mis au courant de la situation actuelle et des solutions trouvées aux problèmes. Merci de votre attention.

Le président. Mesdames et Messieurs les députés, le Bureau vous propose de clore la liste des intervenants. Je vous soumets donc cette proposition.

Mise aux voix, cette proposition est adoptée.

Le président. Il en sera fait ainsi. Sont inscrits: MM. Velasco, Vanek, Spielmann, Weiss, Serex, et M. Lamprecht conclura. J'espère que nous arriverons à terminer ce point avant le repas... Monsieur Velasco, vous avez la parole.

M. Alberto Velasco (S). Monsieur Weiss, si nous sommes d'accord sur le manque de transparence de la Poste...

Le président. Développez votre intervention, Monsieur, mais n'interpellez pas vos collègues, s'il vous plaît !

M. Alberto Velasco. Monsieur le président, je suis d'accord avec M. Weiss sur le manque de transparence de la Poste, l'opacité de son plan de restructuration et son manque d'intelligence, mais il y a certains faits qu'il faut replacer dans leur contexte.

Il est vrai que la Poste est dirigée par un socialiste et que le chef du département fédéral, qui est chargé de faire appliquer la loi l'est aussi. Mais cette loi a tout de même été votée par une majorité au parlement et, que je sache, cette majorité n'est pas socialiste mais bien de droite ! Vous le savez, la loi c'est la loi... Vous pouvez faire ce que vous voulez, c'est comme cela. Si une loi était votée par ce parlement à majorité de droite, Mme Calmy-Rey devrait bien l'appliquer... (L'orateur est interpellé par un député.)Je suis d'accord avec vous qu'il est possible de démissionner, je vous l'accorde.

Vous le savez, les lois de libéralisation de l'Europe, notamment concernant les télécommunications, ont été votées à l'époque de Mme Thatcher et avec des subtilités sur lesquelles je ne vais pas revenir car le sujet est complexe.

Monsieur Weiss, un référendum avait été lancé notamment par l'Alliance de gauche - SolidaritéS - à Genève, que j'avais soutenu. Malheureusement, le parti socialiste, dans sa majorité, ne l'avait pas suivi, parce qu'il était question de quatre lois extrêmement difficiles à appréhender, et ce référendum n'a pas abouti. Voilà l'histoire. Alors, j'espère que l'initiative qui nous sera soumise cette fois aboutira...

Le principal, Monsieur Weiss, reste que la Poste est un service public, un service aux citoyens, un service de proximité, et je pars du principe que, s'il est possible de verser 2 milliards pour Swissair, on peut tout de même verser quelques dizaines de millions ou davantage pour que les citoyens puissent bénéficier de ce service public ! J'ajoute qu'à l'époque où cette loi a été introduite, le peuple n'a jamais été interrogé. On n'a jamais demandé à ceux qui ont construit la Poste pendant cinquante ans, pendant cent ans - ce réseau a été tout de même construit par les citoyennes et les citoyens de ce pays - voulaient s'en défaire. On ne leur a pas demandé s'ils ne voulaient plus d'une Poste publique, s'ils la voulaient privée. Non, la question n'a jamais été posée au peuple ! Alors que - je le répète - c'est un réseau qui appartient aux citoyens et aux citoyennes de ce canton. Voilà les points sur lesquels je suis en désaccord avec vous, Monsieur Weiss.

Par contre, nous pourrions être d'accord sur le fait qu'il faudrait poser la question au peuple quand il s'agit de vendre ou de dilapider son actif...

M. Pierre Vanek (AdG). Monsieur Plojoux - mais, par votre entremise, Monsieur le président, puisque je ne peux pas m'adresser à lui directement - je n'ai absolument pas condamné ou considéré comme non satisfaisante l'intervention des quarante-quatre communes que vous avez évoquée, leurs résolutions transmises aux autorités fédérales et toutes les démarches qui ont été faites, y compris l'intervention du département pour les appuyer, les stimuler ou les susciter. Je considère que cela est bien sûr positif. Le fait que toutes ces communes soient intervenues indique qu'il y a là réellement un problème, et votre témoignage personnel concernant la poste de votre commune qui a été fermée, le service à domicile qui ne fonctionne pas à satisfaction, les décisions prises sans concertation, démontre qu'il y a réellement un problème aigu dans l'application de cette loi.

Vous m'avez interpellé en me disant que vous ne voyiez pas ce que les communes auraient pu faire de plus... Précisément, je ne suis pas intervenu pour dire que les communes devaient en faire plus. Je pensais au contraire qu'il y avait lieu, vu l'unanimité des communes, vu les problèmes dans nombre de quartiers de la Ville, vu les mobilisations qu'il y a autour d'un certain nombre de postes qu'il est prévu de fermer en Ville, de s'élever à l'échelle du canton et au niveau du canton. Certes, il y a l'ACG, mais, d'une certaine manière et sous une autre forme, il y a aussi une autre organisation des communes qui s'appelle la République et canton de Genève ! Eh bien, que cette République et canton de Genève empoigne à bras-le-corps le problème d'un point de vue global - M. Lamprecht me dira toutes les interventions qu'il a faites; il l'a déjà fait en d'autres occasions, parce que ce débat n'est pas nouveau - et aille jusqu'au bout ! C'est-à-dire qu'il faut systématiser, du point de vue du canton, du point de vue des usagers privés de ce canton, mais aussi des artisans, mais aussi des entreprises, quelle est notre vision à Genève du réseau postal dont nous aurions besoin pour assurer le service public tel que nous le désirons et tel qu'il est nécessaire pour le fonctionnement de l'économie et de la vie sociale dans ce canton. De ce point de vue, il y aurait lieu d'élaborer, en concertation avec les communes, mais aussi avec les travailleurs de l'entreprise, avec les usagers privés, avec les entrepreneurs, etc., une vision collective pour l'ensemble du canton, dont on pourrait discuter dans cette enceinte, de la desserte que nous voulons, et de défendre ce point de vue-là, ensemble, de manière plus systématique, et non de le faire à chaque fois qu'un bureau de poste ferme ou qu'une fermeture est envisagée dans une commune ou une autre. Je voulais simplement demander d'élever un peu le débat, que le canton joue son rôle comme échelon intermédiaire entre les communes et la Confédération de manière un peu plus systématique et de manière politiquement plus construite. Cela est d'autant plus nécessaire, comme l'a rappelé M. Weiss, que nous allons avoir une votation populaire sur cette question.

Maintenant, encore un mot à propos de l'intervention de mon ami Alberto Velasco, disant que la loi doit être appliquée et que la majorité du parlement qui a voté cette loi est à droite, et à propos de ce qu'a dit M. Weiss sur la question du référendum. Il est tout de même bien malheureux que le référendum qui avait été impulsé par l'Alliance de gauche en 1997 n'ait pas abouti. Il aurait évité le démantèlement des PTT, la privatisation des Télécom... (Brouhaha.)...qui ont conduit à tous les problèmes que connaît la Poste. Avec quelques autres, nous avons bataillé pour faire aboutir ce référendum. Et, là aussi, il y a une responsabilité du parti socialiste - et vous le reconnaissez, je crois, bien volontiers - et d'un certain nombre de forces politiques qui n'ont pas su voir à ce moment-là les dangers de ce courant néolibéral... (Exclamations.)...qui nous conduit dans cette impasse de plus en plus reconnue aujourd'hui. Alors, avec nos modestes forces, nous avons essayé à l'époque de surmonter les difficultés volontairement mises comme barrière au fait que les citoyens puissent se prononcer, à savoir les quatre lois qui avaient été votées par les Chambres. Nous devions, en fait, récolter simultanément les signatures pour quatre référendums pour nous opposer à ce processus, que les Chambres devaient voter à la veille de l'été, etc. Enfin, c'était très difficile ! Mea culpa, nous n'y sommes pas arrivés ! Je le regrette, mais nous ne sommes pas les plus coupables... D'autres auraient pu intervenir, qui ne l'ont pas fait - si on veut faire le bilan historique - et c'est regrettable !

Mais je reviens à la question centrale qui est la question du jour...

Le président. Il vous reste une minute, Monsieur Vanek !

M. Pierre Vanek. Oui, j'arrête ! Je demande simplement à M. Lamprecht non de faire telle ou telle intervention individuelle comme il a pu déjà le faire - je ne doute du reste d'aucune manière de sa bonne volonté et de son engagement - mais d'essayer de dégager à l'échelle du canton une vision un peu construite de nos besoins, qui pourra être débattue de manière contradictoire - et nous ne serons certainement pas d'accord avec les libéraux sur ce point - et qui pourra être adoptée comme position cantonale et défendue comme telle, relais des communes en direction des autorités fédérales et, surtout, des citoyens, qui se mobilisent régulièrement dans les quartiers et les communes de ce canton quand il est question de fermer l'un ou l'autre des bureaux de poste.

M. Jean Spielmann (AdG). M. Vanek vient de répondre à M. Weiss au sujet du référendum. Il est vrai qu'aux Chambres fédérales, au moment où on a mis en route les processus de séparation de la poste et des télécommunications, on n'a pas bien évalué les conséquences de cette politique. Malheureusement, on commence seulement à s'en apercevoir aujourd'hui !

Il est clair que la poste, les chemins de fer et les télécommunications sont une part importante de la qualité de vie de notre pays et sont constitutifs de ce qui a été fait pendant des années pour maintenir les conditions-cadres nécessaires pour notre pays par rapport aux régions périphériques et à la diversité pluriculturelle de notre pays. Il fallait donc les maintenir non seulement pour maintenir des prestations de service public mais aussi pour maintenir ces conditions-cadres.

On voit aujourd'hui sur quelles pentes nous entraînent les projets de fermeture des bureaux de poste ! Les prestations diminuent et engendrent de grandes difficultés pour notre pays.

Lorsque nous avons lancé le référendum - c'est vrai - les difficultés étaient énormes. Nous étions tout d'abord trop peu nombreux - une quinzaine aux Chambres fédérales - à nous opposer aux processus qui avaient été mis en route. Même les organisations syndicales de la Poste adhéraient à cette idée générale qu'il fallait la privatiser pour la rendre plus performante, mais nous pouvons constater que c'est le contraire qui est en train de se passer ! Je ne voudrais pas reprendre la presse de l'époque, au moment du congrès du parti socialiste, qui diffusait une photo de Mmes Dreifuss et Brunner déguisées en soubrettes lors de ventes aux enchères organisées avec les grands directeurs de la Poste et des télécommunications... Les socialistes étaient en première ligne pour mettre en place cette politique ! Ce sont eux aujourd'hui qui conduisent la politique dans ces grandes régies et qui sont en train de saboter le service public ! Alors, je trouve un peu facile d'entendre dire maintenant qu'il faut maintenir les bureaux de poste ! Il faut savoir qu'en réalité tous les partis qui nous font face ici avaient décidé unanimement aux Chambres fédérales de privatiser la Poste. Maintenant que nous voyons les conséquences de cette politique, il est trop facile de crier haro sur le baudet et de se mobiliser pour le maintien des bureaux de poste !

Ce qu'il faut, c'est changer la politique de fond, maintenir un service public qui permettra à notre pays de continuer à être prospère, qui donne à la population les prestations dont elle a besoin et à l'économie les conditions-cadres qui lui permettent de se développer.

Partant de cette politique de fond, il est vrai qu'on peut toujours corriger des erreurs. Une initiative a du reste été déposée. Je ne suis pas sûr qu'elle permettra de répondre à tous les objectifs, mais en tout cas, Mesdames et Messieurs les députés, il faut changer le cours de cette politique... Vous devez faire votre mea culpa et changer de politique ! A ce moment-là, on pourra commencer à voir des changements ! Tous ceux qui aujourd'hui se lamentent sur les fermetures de l'un ou l'autre des bureaux de poste font fausse route parce qu'ils sont eux-mêmes responsables de la politique qui a été menée à cet égard ! Il faut corriger le tir, changer de politique, et nous verrons bien, au moment où l'initiative sera soumise au peuple, qui prendra position pour le maintien d'un service public et pour essayer de sauver ce qui peut encore l'être.

Mais je crois que le temps passe et qu'il sera très difficile de donner à nouveau à ce pays le service public dont il a besoin.

M. Pierre Weiss (L). Je serai bref, Monsieur le président, parce que l'heure menace dangereusement nos appétits...

J'aimerais remercier M. Spielmann pour ses propos. Il a, comme d'autres ici qui l'ont précédé, placé le débat à son juste niveau qui est celui de la conception que l'on doit avoir du service public. Cette conception peut diverger. Certains, sémantiquement, insistent davantage sur le service au public, d'autres préfèrent le service public. Je n'entrerai pas dans ce débat ici. Il me semble que la seule chose importante à dire à ce stade est que nous ne sommes pas l'enceinte adéquate pour débattre de ce problème.

L'enceinte adéquate, c'est le Parlement fédéral. Et, cette année, celui-ci a à peine modifié ses décisions antérieures, dont il a été dit qu'elles avaient été peu clairvoyantes... Ce qui signifie qu'il n'a pas beaucoup ouvert les yeux entre-temps ! Eh bien, nous verrons ce que le peuple suisse décidera, mais le canton, en tant que tel, ne me semble pas du tout le lieu adéquat pour continuer le débat sur ce thème, et ce parlement non plus.

M. Louis Serex (R), rapporteur. Je vais résumer tous les beaux discours que nous venons d'entendre... Une fois de plus, si vous travailliez de temps en temps avec nos amis bernois, vous sauriez tous que de Berne et de Vaud ne nous viennent jamais que des ennuis: de la bise et des impôts !

Par respect pour les restaurateurs et les téléspectateurs, j'arrêterai là mon petit discours, et je réitère ma proposition de renvoyer ces pétitions au Conseil d'Etat.

M. Carlo Lamprecht, conseiller d'Etat. Tout à l'heure, M. Plojoux, me semble-t-il, a déjà répondu partiellement au sujet de ce qui a été entrepris par le département, par le Conseil d'Etat et par les communes genevoises, pour faire en sorte que les bureaux de poste ne soient pas fermés.

Je suis un peu surpris, Monsieur Vanek, de vous entendre définir une stratégie à suivre. D'autant que cette stratégie a été appliquée et même au-delà de ce que vous pensez ! En effet, j'ai moi-même rencontré le conseiller fédéral M. Leuenberger à Berne. Je l'ai fait venir à Genève pour qu'il se rende à la poste de Saint-Jean. Nous avons sollicité l'aide de la Conférence des parlements de Suisse. Nous avons sollicité l'aide de la Conférence des gouvernements de Suisse occidentale. Nous nous sommes déplacés à deux représentants pour chacun des deux cantons, et vous le savez. Vous le reconnaissez, mais vous vous trompez d'enceinte, parce que c'est à Berne que les décisions se prennent ! Avec ces résolutions des communes genevoises - et nous avons fait en sorte, avec le président des communes genevoises, que toutes les communes s'impliquent, sinon peut-être seulement une dizaine de communes l'auraient fait - nous avons alerté les autorités fédérales ! Alors, je me demande ce que vous voulez faire de plus ! Nous avons alerté tous les gouvernements suisses, tous les parlementaires ! Monsieur Spielmann, vous êtes à Berne ! D'autres députés ici siègent aussi à Berne !

Une voix. Hélas !

M. Carlo Lamprecht. Hélas, oui ! (Exclamations.)C'est là qu'il faut agir ! Les décisions se prennent là-bas. M. le conseiller fédéral Leuenberger, lui-même, nous a dit qu'il était indispensable que la Poste puisse, en dernier ressort, je le cite, «s'adapter aux exigences d'une clientèle en constante mutation et se profiler sur un marché où la concurrence se fait chaque jour plus âpre. Son département ne saurait et ne voudrait apporter un soutien à un moratoire qui ne ferait qu'entraver la Poste dans sa volonté d'innover, etc. etc.» Je vous passe le reste !

Pour ma part, Monsieur Velasco, je ne prends pas les clients de la Poste pour des imbéciles... Pas du tout ! Je me suis battu et j'ai fait tout ce que j'ai pu ! A partir du moment où les décisions ne sont pas prises par ce parlement, car ce n'est pas de sa compétence, mais à Berne par le Conseil fédéral, c'est Berne qu'il faut actionner !

Alors, je veux bien que vous me renvoyiez encore ces pétitions. Nous recommencerons la même chose... Que puis-je faire de plus ? Ce n'est pas à nous qu'il revient de prendre ces décisions, malheureusement. Il nous appartient d'essayer de les influencer, mais nous l'avons fait ! Nous insisterons si vous le voulez, mais on ne pourra rien faire de plus ! Si vous avez une solution miracle, dites-la nous, et nous l'adopterons !

Mises aux voix, les conclusions de la commission des pétitions (renvoi de la pétition 1338 au Conseil d'Etat) sont adoptées.

Mises aux voix, les conclusions de la commission des pétitions (renvoi de la pétition 1344 au Conseil d'Etat) sont adoptées.