République et canton de Genève
Grand Conseil
Séance du vendredi 26 avril 2002 à 14h
55e législature - 1re année - 7e session - 32e séance
M 524-B et objet(s) lié(s)
Débat
Mme Laurence Fehlmann Rielle (S). La réponse à ces différentes motions, qui étaient d'ailleurs très documentées, permet de rappeler combien est pertinente la question de l'utilisation judicieuse du sol dans un petit canton tel que le nôtre, question qui se pose avec encore plus d'acuité maintenant qu'à l'époque où ces motions ont été déposées.
Il faut souligner que la politique de densification de la zone villas a régulièrement été affirmée par le Grand Conseil, quelles que soient les majorités politiques en place. Le schéma directeur cantonal adopté en septembre 2001 ne fait pas exception et confirme cette préoccupation. La nécessité de réaliser de nouveaux logements a donc incité le DAEL à examiner tous les périmètres où il est possible d'opérer une certaine densification. C'est ainsi que douze projets de lois ont été déposés, afin de répondre au besoin criant de logements. Mais force est de constater que si certains d'entre eux ont facilement passé la rampe de la commission d'aménagement, d'autres font l'objet de vives résistances, notamment de la part de certaines communes, qui ont d'ailleurs des relais actifs au sein de ce Grand Conseil...
Hier, dans le débat sur les comptes, M. Blanc, sauf erreur, disait qu'il fallait garder les contribuables à Genève afin d'assurer une certaine prospérité à notre canton. Alors, rappelons-nous ces propos judicieux et soyons cohérents: que ces bons principes guident aussi nos discussions lors des futurs déclassements qui sont pendants devant la commission d'aménagement. Car ce sont effectivement les mêmes milieux qui réclament plus de contribuables et de nouvelles entreprises et qui s'opposent en même temps à certaines densifications de la zone villas.
Le président. Monsieur Grobet, vous avez la parole...
M. Christian Grobet. Je ne l'ai pas demandée, c'est une erreur !
Le président. Ah, je pensais déjà croiser le fer de bonne heure avec vous aujourd'hui... Monsieur Blanc, vous avez la parole.
M. Claude Blanc (PDC). Il est vrai qu'hier j'ai rompu une lance en faveur des contribuables qu'il faut retenir dans notre canton, mais je l'ai fait en faveur des contribuables qui ne trouvent précisément plus d'endroits pour se loger, c'est-à-dire les contribuables aisés, les cadres des sociétés qui s'implantent à Genève, qui cherchent désespérément des villas dans notre canton, qui n'en trouvent pas et qui vont habiter à Nyon. J'ai lu ce matin, dans je ne sais plus quel quotidien, que la commune de Nyon annonçait des résultats particulièrement brillants et notamment l'augmentation considérable du nombre de ses gros contribuables. Eh bien, voilà: les gros contribuables, puisque nous ne pouvons pas les loger, vont habiter à Nyon et c'est Nyon qui rigole ! Qu'il faille construire des HLM, nous sommes d'accord, mais taper dans certaines zones villas pour faire des HLM, c'est-à-dire diminuer encore l'offre pour les bons contribuables, c'est là une erreur. L'erreur manifeste, c'est de ne pas vouloir établir un équilibre entre les différentes catégories d'habitat à Genève et d'axer tout sur l'un au détriment de l'autre. C'est à cela que nous nous opposerons.
M. Christian Grobet (AdG). Je confirme, Monsieur le président, que j'avais, tout à l'heure, appuyé sur le bouton par mégarde, mais maintenant ce n'est pas par mégarde: je voudrais répondre à M. Blanc. Monsieur Blanc, qui savez toujours organiser la charité bien ordonnée, vous devriez passer faire une quête pour ces pauvres contribuables aisés qui ne trouvent pas à se loger à Genève ! En l'occurrence, il ne faut pas exagérer: on a développé la zone villas plus que de raison, le nombre de villas qui ont été construites ces dernières années est considérable. Il serait du reste intéressant d'avoir la statistique: je suis prêt à parier qu'on a construit plus de villas que de logements HLM.
Il y a quand même quelque chose de choquant à vous entendre parler de déséquilibre, sachant qu'aujourd'hui ceux qui ont de la peine à trouver des logements, ce sont bien les contribuables de condition modeste, voire les contribuables à moyens revenus. Il est extrêmement difficile de trouver un logement en dessous de 2500 F par mois et, en ce qui concerne les villas, il y en a sur le marché. Il ne faut donc pas dire qu'on se trouve dans un cas de détresse parce qu'on devrait louer un logement et qu'on ne pourrait pas acheter une villa ! Là, Monsieur Blanc, vous vous éloignez des préoccupations sociales que votre parti proclamait, à un moment donné, en matière de logement...
En fait, aujourd'hui, la priorité doit bel et bien être donnée aux logements répondant aux besoins de la majorité des citoyennes et citoyens de ce canton et, vu la pénurie de terrains, il faut effectivement persévérer dans la voie de densifier les terrains non bâtis en zone villas. Il ne s'agit pas de démolir des villas, mais tout simplement d'attribuer à du logement collectif, à une meilleure densité, les terrains qui sont inutilisés. Je rappelle, et M. Moutinot le dira mieux que moi, que la zone villas occupe pour ainsi dire la moitié de la surface à bâtir à Genève. On ne peut donc absolument pas parler d'une situation de déséquilibre comme vous l'entendez. S'il y a un déséquilibre, c'est bien dans l'autre sens !
M. Laurent Moutinot, conseiller d'Etat. Comme nous sommes en procédure accélérée, je serai bref. Non, Monsieur Grobet, il s'est quand même construit un peu plus de HLM que de villas. Mais il est vrai que les villas représentent, ces dernières années, entre 20 et 25% du total des nouvelles constructions, ce qui est certainement proportionnellement supérieur au pourcentage de la catégorie de la population auxquelles elles s'adressent.
Maintenant, très factuellement, quelques chiffres. La zone villas actuelle, c'est 32 millions de mètres carrés, alors que le premier train de déclassement, les douze projets de lois qui vous ont été soumis, c'est 615 000 m2: nous ne sommes donc pas en train de proposer des excentricités, ou des révolutions ! Enfin, après soustraction des 615 000 m2, le potentiel de la zone villas reste de l'ordre de 20 000 à 22 000 villas.
Le Grand Conseil prend acte de ce rapport.