République et canton de Genève
Grand Conseil
Séance du jeudi 14 juin 2001 à 17h
54e législature - 4e année - 9e session - 29e séance -autres séances de la session
No 29/VI
Jeudi 14 juin 2001,
nuit
La séance est ouverte à 20 h 30.
Assistent à la séance : Mmes et MM. Micheline Calmy-Rey, Guy-Olivier Segond, Gérard Ramseyer, Martine Brunschwig Graf, Laurent Moutinot et Robert Cramer, conseillers d'Etat.
1. Exhortation.
La présidente donne lecture de l'exhortation.
2. Personnes excusées.
La La présidente. Ont fait excuser leur absence à cette séance : M. Carlo Lamprecht, président du Conseil d'Etat, ainsi que Mme et MM. Michel Ducret, Pierre Froidevaux, Jean-Pierre Gardiol, Mireille Gossauer-Zurcher, Alain-Dominique Mauris et Pierre Meyll, députés.
3. Déclarations du Conseil d'Etat et communications.
La présidente. Mesdames et Messieurs les députés, lors de notre séance du 17 mai 2001, le projet de loi 8487, crédit d'investissement pour le remplacement des centraux téléphoniques Glacis-de-Rive et Bourg-de-Four a été adopté. Une erreur matérielle s'est glissée dans le texte de l'article 2 «Budget d'investissement».
La commission des travaux s'est réunie tout à l'heure, la correction à effectuer est la suivante : in fine, il faut corriger les cinq derniers chiffres de la rubrique budgétaire concernée, soit 17.00.00.506.07, au lieu de 17.00.00.536.49. Un rectificatif sera publié dans la FAO. (N.d.l.r. : la loi publiée dans le Mémorial No 25 inclut cette rectification.)
4. Correspondance.
La présidente. Nous avons reçu un courrier (1369) de la Société Etienne Lacroix concernant la motion NO 1408 «Pour des Fêtes de Genève sans vendeurs d'armement», figurant au point 71 de l'ordre du jour.
5. Annonces et dépôts:
a) de projets de lois;
Néant.
b) de propositions de motions;
Néant.
c) de propositions de résolutions;
Néant.
d) de pétitions;
Il en sera fait ainsi.
e) de rapports divers;
Néant.
f) de demandes d'interpellations;
Néant.
g) de questions écrites.
Néant.
6. Suite du débat sur les objets suivants :
Suite du débat
M. Christian Grobet (AdG). Tout à l'heure, M. Charles Beer et Mme Sayegh ont cru devoir insister sur le fait qu'au début des travaux de la commission chargée d'examiner notre motion relative à la création d'une commission d'enquête sur les affaires Gaon et Stäubli, j'avais proposé que les débats se déroulent dans la confidentialité. A ce sujet, j'aimerais souligner que, s'il y avait des réserves du côté de la droite, la plupart des députés ont été d'accord avec ce principe de confidentialité, qui a du reste été adopté par analogie avec la façon dont avait travaillé la commission d'enquête du canton du Valais concernant les problèmes de la Banque cantonale du Valais. C'est d'ailleurs vous, Madame Sayegh, qui avez mis au point, en détail, ces mesures de confidentialité, à savoir que les procès-verbaux se trouvaient dans un classeur dans votre étude, etc. Cela dit, je ne vois pas pourquoi on évoque cette question, dans la mesure où de toute façon, comme M. Blanc l'a souligné tout à l'heure, les procès-verbaux devaient rester confidentiels.
En ce qui concerne les travaux de la commission, j'ai proposé la confidentialité pendant la durée des travaux de la commission, étant entendu qu'une fois les travaux terminés il appartenait à la commission de décider ce qu'elle entendait faire, comme ce fut le cas pour la commission d'enquête du Grand Conseil valaisan. Et qu'a décidé la commission ? Eh bien, précisément de lever la confidentialité des débats, puisque, pour rédiger son rapport, Mme Sayegh a bien dû reprendre de très larges extraits des procès-verbaux qu'aujourd'hui la majorité des députés ne voudrait pas communiquer au juge d'instruction. Il est assez cocasse de voir, au Mémorial du Grand Conseil de la séance du 17 février 2000, le rapport de Mme Sayegh où sont cités en détail les déclarations des membres du comité de banque de la BCGe qui ont été auditionnés, les déclarations qui ont été faites par M. Stäubli, les renseignements que l'on a obtenus auprès de la Commission fédérale des banques, sauf erreur les déclarations de M. Chazaud, ainsi que toutes les déclarations faites par le président de la commission d'enquête du Grand Conseil valaisan.
Aujourd'hui, on voudrait nous faire croire, pour justifier le refus de produire les procès-verbaux et les notes de séances, que cela créerait un précédent épouvantable et que les gens qui seraient entendus par une commission du Grand Conseil n'oseraient plus s'exprimer. En l'occurrence, permettez-moi de dire que celles et ceux qui ont parlé devant la commission censée travailler dans la confidentialité ont été servis, puisque tout ce qu'ils ont déclaré figure dans le rapport. Et c'est du reste la raison pour laquelle - seul point où je suis d'accord avec M. Beer - la production des procès-verbaux et des documents fournis à la commission n'apportera pas grand-chose de nouveau. Reste que prétendre qu'il ne faudrait pas produire ces procès-verbaux, sous prétexte que cela découragerait des gens de s'exprimer devant une commission parlementaire, est parfaitement grotesque : la preuve du contraire est fournie par le rapport de Mme Sayegh.
J'ajoute que Mme Sayegh a bien indiqué qu'à la fin des travaux les procès-verbaux de la commission avaient été envoyés à tous les députés membres de la commission. J'ai pris contact avec Mme Hutter, qui m'a confirmé que tous ces documents avaient été envoyés le 10 janvier 2000 à l'ensemble des membres de la commission. Curieusement, je ne les ai pas reçus, mais je suis certain que ce n'est pas volontaire : peut-être se sont-ils égarés dans mon bureau et que je les retrouverai... Toujours est-il que la commission a levé la confidentialité telle qu'elle avait été prévue pour la durée des enquêtes - que vous qualifiez vous-même d'enquêtes dans votre propre rapport, Madame Sayegh - et que le fruit de celles-ci se trouve dans votre rapport. La confidentialité a donc été levée.
Maintenant, il est vrai, Monsieur Beer, que j'ai été absent à quelques séances, comme vous du reste! Mais j'ai été présent à beaucoup de séances essentielles et je me suis fait remplacer pour d'autres. J'avais, d'entrée de cause, regretté que la commission fixe des séances le mercredi, car, sans vouloir évoquer mon cas personnel, il était évident que je ne pouvais y assister, lorsque je siégeais aux Chambres fédérales. Cela dit, je ne vois pas ce que cela a à faire avec le débat. Je me suis toujours fait remplacer et j'ai assisté aux séances importantes, comme celle de l'audition du comité de banque. A cet égard, Monsieur Beer, je commence à me demander si aujourd'hui vous ne refusez pas de produire ces procès-verbaux et ces notes de séances à cause, je regrette de le dire, des dépositions assez pitoyables des membres du comité de banque qui vous étaient proches... J'étais également présent à la séance qui s'est déroulée à Berne avec la délégation de la Commission fédérale des banques qui a tenté d'induire la commission en erreur...
Enfin, Monsieur Beer, vous travestissez la vérité d'une manière incroyable quand vous prétendez que j'aurais déclaré que les travaux de la commission étaient du bouillon pour les morts. Vous confondez ce que j'ai dit au sujet des travaux de la commission et ce que j'ai dit concernant la motion que vous aviez concoctée, vous les socialistes avec les députés de droite. C'est cette motion, qui tentait de vous sortir du pétrin dans lequel vous étiez, que j'ai qualifiée de bouillon pour les morts! Pour ne rien faire, pour ne pas nommer de commission d'enquête, vous aviez imaginé une motion à propos de laquelle j'ai dit à la fin de mon intervention : «Vous verrez, Mesdames et Messieurs les députés, que cette motion que vous nous proposez de voter ne donnera rien du tout, parce que le Conseil d'Etat ne s'est pas occupé de la Banque cantonale. On n'a fait que reproduire les déclarations faites par le comité de banque devant ce Grand Conseil.» Je ne me suis pas trompé, Monsieur Beer : vous attendez toujours la réponse du Conseil d'Etat à votre motion - que j'ai effectivement qualifiée de motion bidon - et vous avez donc perdu là une bonne occasion de vous taire!
J'aimerais terminer avec M. Blanc et M. Halpérin et tous les autres qui veulent également empêcher le pouvoir judiciaire d'avoir accès à ces documents, qui pourtant ne révéleront aucun fait important puisque la majorité de ce Grand Conseil a refusé de créer une véritable commission d'enquête. Je rappellerai ici que les Verts et moi-même avions proposé devant la commission ad hoc qu'une commission d'enquête soit créée, et c'est à la suite d'un projet de loi des Verts que la possibilité de créer des commissions d'enquête a été introduite dans le règlement du Grand Conseil. Mais cette adaptation du règlement est intervenue après la fin des travaux de la commission ad hoc. On n'a donc jamais créé cette commission d'enquête BCG et on n'a pas pu découvrir de faits importants, puisque les responsables de la banque se sont bien entendu réfugiés derrière le secret bancaire pour refuser de se déterminer sur certains faits, qui du reste étaient connus publiquement...
Aujourd'hui, Monsieur Blanc, avec l'hypocrisie qu'on vous connaît et dont vous faites constamment preuve dans vos interventions parlementaires, vous dites que ce Conseil ne peut pas prendre la décision de communiquer les procès-verbaux et les notes de séances au juge d'instruction, sous prétexte que, d'après la loi portant règlement du Grand Conseil, seule la commission est habilitée à prendre cette décision. Or, quand la commission ad hoc s'est réunie il y a un mois, ce sont vos amis politiques des partis de droite qui ont été les premiers à dire que c'était une décision beaucoup trop importante pour la prendre en commission, qu'il fallait la prendre en séance plénière. Et aujourd'hui, en séance plénière, vous avez le culot de dire que nous n'avons pas le droit de prendre cette décision. Je dois dire que vous vous foutez de nous d'une manière incomparable! Aussi, pour vous suivre sur le plan formel...
La présidente. Il vous faut conclure, Monsieur Grobet!
M. Christian Grobet. Je conclus! Pour que vous puissiez prendre vos responsabilités, Monsieur Blanc, je demande que l'objet dont nous débattons soit renvoyé à la commission ad hoc et que, conformément aux dispositions réglementaires que vous avez invoquées, celle-ci se réunisse tout à l'heure pour procéder à un simple vote sur le fait de savoir si on communique ces documents ou non. Nous en avons débattu durant quatre séances, nous avons épuisé le sujet : il suffit de nous réunir cinq minutes et de voter pour savoir si on communique ces documents ou non! Je demande donc le renvoi en commission, Madame la présidente. (Applaudissements.)
La présidente. Mesdames et Messieurs les députés, je vous propose de mettre tout de suite cette proposition aux voix, à moins que quelqu'un ait vraiment quelque chose à dire sur cette question du renvoi...
Mme Christine Sayegh (S), rapporteuse. Si on veut être cohérent dans nos travaux, avant de suivre une demande de vote en commission, il faudrait au moins prendre acte du rapport. Il y a deux possibilités : ou on prend acte du rapport et on renvoie la résolution en commission, ou alors on vote la résolution...
La présidente. Non, nous pouvons renvoyer le rapport en commission, Madame Sayegh... Je passe la parole à Mme Bugnon, sur le renvoi exclusivement.
Mme Fabienne Bugnon (Ve). Madame la présidente, j'avais demandé la parole lors de la séance précédente : cela a été annoncé par le vice-président. Je souhaite donc développer maintenant mon intervention, que je conclurai sur notre refus du renvoi en commission.
Mesdames et Messieurs les députés, comme M. Krebs l'a dit tout à l'heure, nous sommes particulièrement étonnés de la décision contenue dans le rapport de la commission et confirmée par la présidence du Grand Conseil, par le biais de la résolution 441, soit de ne pas transmettre ces procès-verbaux au pouvoir judiciaire, au cabinet du juge d'instruction. Nous avons eu l'occasion l'année dernière, le 19 mai 2000 précisément, lors du débat concernant le sauvetage de la Banque cantonale et la création de la Fondation de valorisation, de dire à quel point il fallait mettre fin au secret, voire aux mensonges qui avaient prévalu, pendant tant d'années, au sein du conseil d'administration de la BCG. Le débat que nous avons ce soir pourrait s'intituler : «De quoi avons-nous peur ?»
De quoi avons-nous peur en effet, lorsqu'il faut utiliser autant d'arguments juridiques pour refuser de transmettre des procès-verbaux à la justice ? Il y a vraiment de quoi se poser des questions! J'ai l'honneur, Monsieur Halpérin, de faire partie, comme vous le disiez, des quelques membres de la commission judiciaire qui, discrètement, timidement, se permettent de siéger à côté de vous et de M. Grobet pour discuter de cette fameuse loi sur la transparence... (Commentaires.) Oui, je fais partie des autres : ma foi, c'est la vie et je l'accepte très volontiers! Aujourd'hui, je comprends mieux pourquoi nous avons tant de peine à nous mettre d'accord.
Lorsque vous avez évoqué notre souhait de ne pas rendre publics les procès-verbaux, vous avez simplement oublié d'en dire la raison : nous avions émis ce souhait pour que les commissions puissent travailler dans une plus grande sérénité. Mais nous n'avons à aucun moment, et vous le savez aussi bien que moi, évoqué la diffusion de ces P.-V. dans le cadre d'une enquête judiciaire. Nous avons simplement parlé de leur publication. Ceci n'a donc rien à voir dans ce débat. Cette enquête, qui plus est, est une enquête, je vous le rappelle, que nous avons souhaitée et dans laquelle le Conseil d'Etat s'est porté partie civile. Or, voilà que notre Grand Conseil, dans sa grande transparence, ferait partie de ceux qui l'entraveraient! Il faut tout de même rester sérieux, Mesdames et Messieurs les députés! On ne peut pas à la fois souhaiter que toute la lumière soit faite et refuser de participer à l'enquête lorsqu'on est concerné. Se repose donc la question que je posais tout à l'heure : de quoi avons-nous peur ? En ce qui nous concerne, de rien. C'est la raison pour laquelle notre représentant en commission a voté pour la transmission de ces procès-verbaux.
J'aimerais conclure en relevant un point que M. Halpérin a, lui aussi, relevé : qu'en est-il de la demande, beaucoup plus importante à mon avis, de la consultation des P.-V. des séances relatives à la fusion de la Caisse d'épargne et de la Banque hypothécaire du canton de Genève ? Là-dessus, nous n'avons pas de réponse, alors qu'en réalité c'est ce qui est important : les P.-V., le nombre de mensonges qui ont dû être dits à ce moment-là par les personnes que nous avons auditionnées... Sur ce point, je pense qu'il va bien falloir répondre au cabinet du juge d'instruction.
Pour conclure sur votre souhait, Madame la présidente, nous soutenons la demande de M. Grobet de renvoyer ce rapport à la commission ad hoc. Que celle-ci se réunisse très brièvement et que, ramenée à de meilleures intentions, elle accepte l'évidence, c'est-à-dire de transmettre ces procès-verbaux à la justice, afin que, dans le cadre de cette session encore, nous puissions prendre une décision! (Applaudissements.)
M. Charles Beer (S). J'aimerais d'abord rappeler que si nous avons ce débat en séance plénière, c'est parce que les commissaires socialistes en ont fait la demande en commission. Non seulement ils trouvaient important, sur le principe, que le plénum se prononce, mais ils tenaient également à ce que le débat ait lieu en toute transparence, étant donné notamment les menaces qui planaient sur la commission de voir les procès-verbaux être envoyés directement au juge d'instruction par un groupe, voire une motion y être ajoutée, et pourquoi pas une conférence de presse au passage... Nous avons donc préféré que le débat ait lieu en plénum et je crois que nous avons eu raison.
Cela dit, ce n'est pas uniquement pour des raisons de transparence que nous avons souhaité ce débat en plénière, mais également parce que nous sommes dans une situation tout à fait particulière où nous avons à nous prononcer sur la transmission de procès-verbaux et de notes de séances. J'insiste : de notes de séances, sachant que procès-verbal veut dire approbation par les commissaires de leurs propos.
Enfin, dernier élément, la commission était une commission ad hoc avec une mission bien définie. La mission en question étant terminée, hormis le fait que vous avez eu la courtoisie de l'inviter à rendre son avis, la commission n'était pas forcément qualifiée pour décider sur ce point. Je ne vois donc pas comment tout à l'heure, en quelques minutes, nous allons décider que cette «non-commission» transmettra des «non-procès-verbaux» à la justice!
M. Claude Blanc (PDC). Je m'abstiendrai de répondre aux propos de M. Grobet, je me réserve d'y revenir plus tard. S'agissant du renvoi en commission, je n'y vois pas d'inconvénient, mais à condition que les membres de la commission ne doivent pas quitter une séance du Grand Conseil, sachant que leur réunion ne va pas durer trois minutes, mais un bon bout de temps. Alors, d'accord pour le renvoi en commission, mais pas ce soir, pas pendant une séance du Grand Conseil. Ce n'est pas sérieux, on ne peut pas travailler comme cela. En cas de renvoi en commission, je serais éventuellement prêt à ce que nous nous réunissions demain après-midi, à 15 h, de façon que nous ayons le temps de discuter et que nous ne nous privions pas de participer aux débats du Grand Conseil, qui sont quand même plus importants que les billevesées qu'on pourra dire en commission!
La présidente. Je propose de mettre maintenant aux voix la proposition de renvoi en commission... Monsieur Grobet, vous avez fait une proposition, j'aimerais la mettre aux voix...
M. Christian Grobet (AdG). Madame la présidente, ma proposition était double, à savoir qu'on renvoie en commission et que celle-ci se réunisse immédiatement. Je souscris toutefois aux propos de M. Blanc et je suggère que la commission se réunisse demain. Il me semble, Monsieur Blanc, que si nous nous réunissons durant une heure, cela devrait être suffisant, puisque nous avons déjà tenu quatre séances et que les opinions sont faites. Pour le moment, Madame la présidente, je suggère de mettre aux voix uniquement le renvoi en commission et que nous décidions ensuite quand la commission se réunit.
La présidente. Je passe la parole à M. le député Halpérin, sur le renvoi en commission uniquement!
M. Michel Halpérin (L). Oui, Madame la présidente. Vous pensez bien que je ne vous désobéirais en aucune circonstance! Je voudrais faire remarquer que M. Grobet, sur ce sujet, manie l'ambiguïté avec son talent habituel. Il vient de dire qu'il souhaitait une réunion de la commission tout de suite ou, à la rigueur, demain après-midi et, en même temps, il propose de voter en deux fois, d'abord sur le renvoi en commission, puis sur l'horaire. En ce qui me concerne, n'étant pas membre de cette commission, cela m'est un peu égal, si ce n'est que je suis du même avis que M. Blanc : on ne peut pas suspendre les séances du Grand Conseil pour permettre à des commissions de siéger. Ce n'est pas raisonnable et ce n'est probablement pas conforme à notre règlement. Aussi, Madame la présidente, j'aimerais que vous mettiez en consultation, à main levée, la question de savoir quels membres de la commission sont disponibles demain après-midi, parce que, si ce sont trois membres qui se réunissent, je considère que la commission n'aura pas fait son travail.
M. Hervé Dessimoz (R). Puisque la requête du juge concerne également l'accès aux travaux de la commission qui s'est occupée de la fusion des deux banques et dans la mesure où j'ai présidé cette commission, je demande à être auditionné par la commission ad hoc et que le rapporteur sur le projet de loi de fusion, M. David Lachat, soit également entendu.
M. Alberto Velasco (S). L'Alliance de gauche dit qu'après nos quatre séances nous ne sommes pas arrivés à grand-chose : je doute qu'après une séance, même si elle dure une heure, nous arrivions à mieux! Nous arriverons à la même conclusion, puisque tous les groupes se sont fait leur idée et que nos positions sont arrêtées sur ce sujet. Cela dit, nous n'allons pas nous opposer à ce renvoi. Par contre, réunir la commission demain à 15 h, pour nous, est exclu : la commission, si elle doit se réunir, doit le faire à des heures où tous les commissaires peuvent être présents.
M. Michel Halpérin (L). Je veux revenir à la remarque - pertinente, puisqu'elle appuyait la mienne! - de Mme la députée Bugnon : il y a un sujet qui ne peut pas faire l'économie d'un renvoi en commission non plus, c'est celui de nos travaux relatifs à la fusion des deux banques. Il ne suffit pas que le président de la commission concernée - voire le rapporteur, ou même le procès-verbaliste - soit entendu : il faut que la commission qui s'est occupée de la fusion soit, elle aussi, saisie. Par conséquent, je demande le renvoi à la commission qui a présidé à la fusion des deux banques, pour qu'elle s'exprime sur la première question du juge d'instruction. (Exclamations et brouhaha.)
La présidente. Monsieur le député Halpérin, cette commission n'existe plus et une partie de ses membres ne sont même plus députés...
Mme Fabienne Bugnon (Ve). Avec un immense plaisir, je vais répondre à mon collègue Halpérin qu'il aurait dû lire notre règlement! Il aurait vu qu'en cas de dissolution d'une commission, conformément à l'article 197, les documents sont remis aux archives. Il nous suffit donc de décider que le juge d'instruction peut avoir accès à ces archives.
M. Hervé Dessimoz (R). Je ne suis pas du tout d'accord avec les propos de Mme Bugnon. Si je suis intervenu en tant que président - je m'étais abstenu jusque-là - c'est que je pensais que la commission qui a traité de la demande du juge nous aurait sollicité. Or, j'apprends aujourd'hui qu'à défaut de nous solliciter elle n'a même pas consulté les documents de l'époque. Je tiens donc à dire ceci : personnellement, compte tenu de l'ancienneté des débats, je ne me souviens pas des engagements que nous avions pris vis-à-vis des personnes auditionnées. Je sais que les auditions ont été fort nombreuses et, si vous décidez de n'entendre ni le président, ni le rapporteur, ni toute autre personne ayant participé aux travaux, je vous recommande quand même de consulter les archives de la commission avant de les transmettre au juge, contrairement à ce que propose Mme Bugnon.
Mme Janine Hagmann (L). Je m'étonne des propos tenus par Mme Bugnon, parce qu'en fait la commission ad hoc, si elle s'est bien réunie, n'existe plus réellement, puisque nous avons terminé nos travaux. Au moment où ses travaux sont terminés, une telle commission ad hoc n'existe plus, comme l'a reconnu Mme Bugnon. Notre commission a donc siégé dans l'illégalité en quelque sorte : je pense qu'il n'est pas utile de continuer et de la reconvoquer!
La présidente. Je dois préciser que, tant que le rapport du Conseil d'Etat n'a pas été traité par le Grand Conseil, la commission ad hoc existe toujours.
Mme Christine Sayegh (S), rapporteuse. La commission ad hoc Enquête Banque cantonale de Genève n'avait à se prononcer que sur ses propres notes de séances et non sur celles de la commission ad hoc concernant la fusion des banques. Notre règlement, à l'article 231, prévoit que, s'il y a des problèmes d'application de la loi portant règlement du Grand Conseil, c'est le Bureau qui décide. Pour ma part, je ne pense pas que notre commission ad hoc - dont l'existence est suspendue à la réponse du Conseil d'Etat - puisse s'arroger la compétence de décider du transfert ou non de procès-verbaux d'une autre commission, question dont elle n'a jamais été saisie.
M. Michel Halpérin (L). S'agissant de la lecture du règlement faite par Mme Bugnon, l'article 189 dit effectivement, à son alinéa 4, que «...les procès-verbaux sont déposés aux archives d'Etat». Il dit aussi, à son alinéa 3, que «les procès-verbaux ne sont pas transmis à des tiers, sauf décision expresse de la commission». L'article 197 dit que «lors de la dissolution d'une commission, son président doit remettre au sautier un exemplaire des divers rapports et documents dont elle a été saisie». Cet article, pas plus que l'article 189, alinéa 4, ne dit que le sautier, respectivement les archives d'Etat ont la compétence de prendre une décision à la place de la commission. Si la commission est dissoute et qu'elle ne peut pas être réunie, personne ne peut prendre la décision à sa place. (Exclamations.)
La présidente. Bien. Je mets aux voix la proposition de M. Grobet de renvoyer cette résolution à la commission ad hoc.
Mise aux voix, cette proposition est rejetée.
M. Albert Rodrik (S). Je voudrais revenir sur deux choses. La première est la péroraison, tout à l'heure, de M. Halpérin : la séparation des pouvoirs, certes, mais la séparation des pouvoirs prohibe-t-elle la coopération des pouvoirs ? Pendant vingt ans, comme fonctionnaire, on m'a asséné l'article 11 CPP : je devais communiquer d'office au pouvoir judiciaire tous les délits qui venaient à ma connaissance... (Commentaires.) Oui, mais j'étais un bras du pouvoir exécutif! Je le répète donc : la séparation des pouvoirs, principe fort bon et respecté, ne prohibe pas la coopération des pouvoirs et, de temps en temps, l'impose, et ce même au Conseil d'Etat.
Deuxièmement, quand nous transmettons nos procès-verbaux de commission au Conseil d'Etat et à certains hauts fonctionnaires sur décision de nos commissions, nous nous départons du monopole de nos procès-verbaux. Il me paraît donc évident que nous sommes continuellement, en dépit de la séparation des pouvoirs, dans la coopération des pouvoirs.
Cela dit, revenons à la proposition des socialistes que, dans vos grands élans de principe et d'indignation, vous n'avez pas voulu examiner... (Brouhaha.) Pourrais-je avoir votre attention deux minutes, Mesdames et Messieurs ? Nous proposons en fait une solution pragmatique, parce que, problèmes juridiques, problèmes politiques, problèmes d'opinion publique, à la charnière de tout cela nous estimons particulièrement simpliste et primitif de répondre par oui ou par non. Cette réponse par oui ou par non ne nous paraît pas adéquate par rapport à la question qu'on nous pose. Car la question n'est pas anodine, même si, comme Charles Beer l'a dit, le contenu des documents qu'on nous demande est, lui, probablement assez anodin, surtout pour un juge d'instruction...
En l'occurrence, qu'entendons-nous ? Si nous refusons, nous sommes des vilains qui avons quelque chose à cacher. Vous avez vu le titre de l'article de la «Tribune», même si, comme d'habitude, le titre n'avait pas le même ton que l'article... Et si nous acceptons, nous sommes des vilains qui piétinons le statut du Grand Conseil. Alors, que disent les socialistes ? Ils disent quelque chose de très simple et de très pratique : nous n'avons rien à cacher, que M. le juge d'instruction vienne, lise tout ce qu'il a à lire, prenne les notes qu'il voudra prendre et, s'il apprend quelque chose, eh bien, que cela bénéficie à son travail et à son action! Voilà ce que nous disons, point final!
Et si, les uns et les autres, vous vouliez bien, au lieu d'appeler à la rescousse la loi et les prophètes, vous départir d'autres préoccupations que celle de répondre à ces questions, vous accepteriez cette réponse simple et pragmatique : nous n'avons rien à cacher, venez voir ce que vous voulez voir, mais le Grand Conseil ne se départ jamais de ses documents de travail. C'est une solution simple : si vous vouliez bien oublier qu'il y a des élections dans trois mois, vous seriez unanimes à l'accepter! (Applaudissements.)
M. Antonio Hodgers (Ve). J'aimerais essayer de faire la synthèse de l'opinion qui semble majoritaire ici. Le Grand Conseil, ayant constaté que le contribuable, dans l'affaire de la Banque cantonale, s'est fait voler 2 milliards, demande tout naturellement à la justice de se saisir du dossier et de tout faire pour savoir qui sont les responsables de cette débâcle. Puis, à la justice qui vient demander les documents dont elle a besoin, le même Grand Conseil voudrait répondre que ces notes, ces procès-verbaux, ne lui seront pas très utiles, qu'il préfère ne pas les lui donner, d'autant plus que les personnes auditionnées ne savaient pas que leurs propos pourraient éventuellement tomber dans les mains de la justice, que, si elles l'avaient su, elles auraient peut-être tenu des propos différents... Mais que veut dire cette position, Mesdames et Messieurs les socialistes ? Vraiment, je ne comprends pas, d'autant que vous avez vous-mêmes dit que ces documents étaient du bouillon pour les morts! A tout le moins, tout le monde semble d'accord pour dire qu'il n'y a pas grand-chose dans ces procès-verbaux.
M. Beer a parlé de la faiblesse de l'enjeu : je dirai qu'il y a un principe qui, lui, est fort, c'est la collaboration que tout le monde doit avoir avec la justice pour une affaire aussi importante. Dans ce sens, je rejoins tout à fait M. Rodrik : la séparation des pouvoirs n'est ici pas un argument. Mesdames et Messieurs les députés, lorsque nous examinons une loi qui concerne le pouvoir judiciaire, nous auditionnons souvent M. Bertossa et personne ne crie au scandale, à la séparation des pouvoirs! Il s'agit ici de coopération et d'une coopération d'autant plus nécessaire que nous sommes partie civile à ce procès et à l'action de la justice. Donc, s'il vous plaît, expliquez-moi votre position, car pour l'instant je n'ai vraiment pas compris. S'il n'y a rien dans ces procès-verbaux et sachant que le juge d'instruction est en mesure de lever des secrets qui relèvent du droit fédéral et pas d'une simple confidentialité inscrite dans l'article 189 de notre règlement, pourquoi voulez-vous vous opposer à sa demande et, dans le même temps, faire passer à la population le message que nous serions contre la transparence ? La demande qui est faite est claire et simple, elle ne représente pas un grand enjeu dans ce dossier, il faudra donc y répondre de manière claire et simple.
Encore une dernière chose. M. Krebs l'a dit : dans d'autres pays, le juge d'instruction n'aurait même pas demandé l'avis du parlement. Il me semble que dans le nôtre - vous me direz si je me trompe - si le juge est en mesure de faire parler des gens soumis au secret bancaire, il doit aussi être en mesure de débarquer un beau matin au service du Grand Conseil et de mettre des scellés sur tous les documents qu'il souhaite, sans l'autorisation de ce parlement! Nous discutons donc pour rien, si ce n'est sur des principes qui fondent quand même notre Etat!
M. Bernard Clerc (AdG). Il est pour le moins cocasse que certains essaient de faire croire que ce débat a lieu parce que nous sommes à trois mois des élections. C'est d'autant plus cocasse que notre groupe, depuis maintenant plus de six ans, n'a pas cessé de poser des questions par rapport au fonctionnement de la Banque cantonale et aux inquiétudes que nous avions quant à sa solidité financière. Venir nous dire aujourd'hui, Monsieur Rodrik, que nous menons ce débat pour des raisons électoralistes, je trouve cela indigne de votre part! D'autant plus indigne que, chaque fois que nous avons posé des questions, chaque fois que nous avons fait des propositions, qu'il s'agisse de modifier la loi sur la Banque cantonale ou de demander une commission d'enquête, votre groupe, Monsieur Rodrik, s'y est opposé et s'est rallié à la droite. Voilà la réalité politique!
Aujourd'hui, alors que le découvert de la Banque cantonale est de 4,2 milliards, alors que nous découvrons que des prêts ont été accordés pour des immeubles à hauteur de 150% ou 180% de leur valeur vénale, alors que nous constatons que certains débiteurs n'ont jamais payé une once d'intérêt, on veut nous faire croire que tout cela n'est qu'une question de capacité à gérer la banque, qu'il n'y avait pas d'actions frauduleuses là derrière! Mais c'est tout simplement invraisemblable! Dans ce Grand Conseil, en 1997, M. Vodoz, responsable du département des finances, nous jurait... (Exclamations. La présidente agite la cloche.) ...nous jurait, la main sur le coeur, que les crédits à risque de la Banque cantonale étaient de l'ordre du milliard et qu'ils étaient tous provisionnés. Deux ans après, nous sommes au quadruple de ce montant! Voilà pour les faits.
Le fond de la question que nous devons trancher ce soir, c'est : faut-il mettre, oui ou non, des obstacles à l'établissement de la vérité sur la Banque cantonale ? C'est là le fond de la question. Et, pour cela, il s'agit que la justice puisse consulter les documents de la commission ad hoc et les documents relatifs aux travaux qui ont présidé à la constitution de la Banque cantonale. Quoi de plus normal, alors que nous nous trouvons dans la situation financière que nous connaissons aujourd'hui ?
Je crois que, politiquement, le signe que nous donnerons ce soir sera clair. Celles et ceux qui refuseront - s'appuyant sur des arguties juridiques du genre : c'est la commission qui doit trancher, mais, comme elle a refusé de trancher, le plénum doit le faire, et là on sort tous les articles possibles du règlement du Grand Conseil pour en fait éluder la question - ceux qui refuseront de transmettre ces documents à la justice enverront le message politique suivant : nous ne voulons pas contribuer à l'établissement de la vérité! (Applaudissements.)
M. Michel Balestra (L). Comme l'a justement dit mon collègue Halpérin, le règlement ne permet pas la transmission de procès-verbaux d'une commission ad hoc - qui plus est ayant été soumise au secret - alors que cette commission n'existe plus et que trois législatures se sont écoulées depuis sa dernière réunion. Mais, Mesdames et Messieurs, ceci n'est pas très grave, parce que, pour ceux qui ne s'en souviendraient pas, cette commission a produit un rapport de majorité rédigé, comme l'a rappelé l'ancien président de la commission, par notre excellent collègue David Lachat, ainsi qu'un rapport de minorité, qui ont fait l'objet d'un débat parlementaire. Or, autant ces rapports de majorité et de minorité que le débat parlementaire figurent au Mémorial de la République et canton de Genève, sont publics et l'on peut considérer qu'ils constituent la synthèse des débats de la commission de fusion de l'époque.
Mais, plus relevant encore, les seuls documents importants pour la recherche de la vérité sont, à mon sens, les analyses comptables croisées. Souvenez-vous, Mesdames et Messieurs les députés : l'auditeur de la Banque hypothécaire a fait l'analyse de la Caisse d'épargne, l'auditeur de la Caisse d'épargne a fait l'analyse de la Banque hypothécaire, et ces deux analyses ont été validées par une troisième fiduciaire, neutre et choisie par le Conseil d'Etat. Or, ces analyses croisées et leur synthèse, qui sont, à mon sens, les seuls documents valables s'agissant de la cohérence entre la réalité et les chiffres de l'époque, sont à la disposition des magistrats.
Pour le reste, Mesdames et Messieurs les députés, si trois législatures après la confirmation du rapport de majorité, des débats parlementaires et du vote de notre Conseil par le peuple, vous entendez aller plus loin, si vous entendez aller plus loin malgré la possibilité pour les juges d'entendre les acteurs de l'époque sur les différents dossiers, documents et affirmations, vous créerez réellement une confusion entre les différents pouvoirs. Il est très important que le pouvoir législatif, les commissions parlementaires, lorsqu'elles sont réunies avec le secret des débats, puissent garantir l'anonymat aux gens qui se sont exprimés devant elles. C'est nous, Mesdames et Messieurs les députés, lorsque nous faisons notre débat parlementaire, lorsque nous présentons nos rapports, qui en prenons la responsabilité, ce ne sont pas les gens qui ont été auditionnés.
M. Philippe Glatz (PDC). Mesdames et Messieurs les députés, voilà un certain temps que je vous écoute : je trouve que ce débat commence à prendre une très mauvaise tournure et que c'est une honte, en particulier lorsque M. Clerc, insultant ses amis naturels socialistes, dit qu'il n'a pas d'intentions électoralistes en faisant aujourd'hui à nouveau le procès de la Banque cantonale! En l'occurrence, j'ai l'impression qu'on mélange les problèmes. Il y a d'abord un problème factuel : faut-il, oui ou non, transmettre les documents relatifs à la Banque cantonale au juge d'instruction ? Puis il y a un problème de principe, à savoir que la séparation des pouvoirs, si bien exposée par mes préopinants, doit être respectée. Cela a été dit : jamais ce parlement, ou quelque commission que ce soit n'oserait demander à un juge d'instruction l'ensemble de ses dossiers pour conduire ses travaux. Imaginez, Mesdames et Messieurs, que je vous propose ce soir de reconstituer une commission d'enquête sur la Banque cantonale et que nous demandions tous ses dossiers au juge d'instruction afin de pouvoir nous faire une opinion : vous verriez la réaction immédiate du Palais!
Cela dit, nous ne pouvons pas faire l'impasse sur cette question de principe. Il est certain que nous avons tous intérêt, Monsieur Rodrik, à ce que ces documents soient largement diffusés et nous y avons un intérêt notamment à l'égard de M. Grobet. En effet, je rappellerai que M. Grobet était à l'époque un ponte du parti socialiste largement responsable, que le parti socialiste, à l'époque où la banque a accordé ces crédits déraisonnables, était largement représenté et que M. Grobet porte une responsabilité à cet égard... (Protestations.) Il porte une responsabilité, car, dans les années 80, il était conseiller d'Etat, il était un ponte du parti socialiste, il dirigeait le parti socialiste, dont il a été chassé... (Chahut.)
La présidente. Monsieur le député Grobet, veuillez ne pas interpeller M. Glatz!
M. Philippe Glatz. Concernant le problème factuel, nous avons donc intérêt à ce que ces documents soient largement publiés, mais ils ne peuvent l'être à la seule intention du Palais. Par conséquent, je proposerai qu'ils soient publiés à l'intention de la population intégralement. Ainsi, le juge d'instruction pourra en prendre connaissance comme tout le monde, par le biais d'une publication qui sera disponible! (Exclamations.)
La présidente. Je passe la parole à M. le député Velasco... (Chahut.) Mesdames et Messieurs les députés, si vous ne vous calmez pas immédiatement, je lève la séance... (Protestations.) Je lève la séance jusqu'à 21 h 30!
La séance est levée à 21 h 20.
M. Alberto Velasco (S). Je ne voulais pas prendre la parole mais, quand j'entends parler de transparence, je me vois obligé d'intervenir. Il y a un point, dans les travaux de la commission ad hoc, qui me paraît extrêmement important et qui concerne l'affaire Gaon. M. Gaon est un homme intelligent, un homme d'affaires qui n'achète pas des terrains comme cela et je suppose que, si à l'époque il a acheté les terrains de Sécheron, c'est qu'il avait dû recevoir des garanties de la part du Conseil d'Etat sur le fait que ces terrains seraient un jour déclassés. En commission, j'ai donc demandé si le Conseil d'Etat avait offert des garanties ou peut-être conseillé à M. Gaon d'acheter ces terrains. J'ai également demandé si les procès-verbaux du Conseil d'Etat étaient accessibles. A ce jour, je n'ai toujours pas de réponse. La question que je pose donc ce soir à l'ensemble des députés, c'est pourquoi on ne demande pas les P.-V. du Conseil d'Etat, car il y a peut-être aussi des choses à voir dans ces P.-V.
Cela dit, j'ai de l'estime pour mon camarade Grobet, beaucoup d'estime politique, et je suppose, cher collègue, que si vous n'êtes pas intervenu pour nous dire ce qui s'est passé à l'époque, c'est parce que vous aviez un devoir de réserve, ce que je respecte. Mais alors, pourquoi nous dire ce soir, quand il s'agit des affaires de la banque, quand il s'agit de 3 ou 4 milliards, qu'il faut passer par-dessus tout ? Moi, je veux bien, mais vous auriez alors dû nous dire, cher collègue et camarade, pourquoi M. Gaon à l'époque avait acheté ces terrains. Pour ma part, je suis sûr que, dans les P.-V. du Conseil d'Etat, il y a quelque chose à ce sujet.
En l'occurrence, il y a des P.-V. importants qui méritent d'être sortis et qui ne sortent pas et il y a des P.-V. qui ne valent rien du tout et qu'on veut sortir, comme ceux de la commission ad hoc. Si ces derniers contenaient quelque chose d'important, vous savez très bien que nous, les députés socialistes, nous aurions informé le procureur, comme nous l'avons fait lors des travaux de la commission de contrôle de gestion.
En l'état, je tiens à dire une chose - et c'est la raison pour laquelle je suis contre le fait de transmettre ces P.-V. - c'est que, si on les transmet à la justice, c'en est fini de notre commission de contrôle de gestion et vous le savez très bien, Monsieur Grobet... (Exclamations.) Vous pouvez rire, Mesdames et Messieurs de l'Alliance de gauche, avec ce qui a paru ces derniers jours dans les journaux! Mais puisqu'on en est aux règlements de compte, allons-y! Pour ma part, je tiens à cette commission de contrôle de gestion, parce que la gauche l'a réclamée pendant longtemps. J'y tiens, chers collègues, et c'est pourquoi je ne veux pas que les P.-V. de la commission ad hoc atterrissent dans les mains du procureur ou d'un juge. D'autant qu'il n'y a pas grand-chose dans ces documents et vous le savez très bien, puisque, dans le cas contraire, ils auraient déjà paru intégralement dans la presse!
M. Charles Beer (S). J'aimerais répondre à M. Clerc : si on peut comprendre la gravité de certains de vos propos par rapport à la gestion de la Banque cantonale, la problématique dans laquelle vous nous enfermez est un peu plus difficile à comprendre. Vous l'avez dit d'emblée, dès votre première intervention : nous sommes indignes! Ce sont les premiers propos de M. Grobet qui a dit, en substance, que le fait même de refuser les conclusions du rapport et la transmission des documents était indigne. Je vous reconnais volontiers bien des mérites dans le dossier de la Banque cantonale, mais il me semble qu'en dehors de votre vérité, de votre appréciation, il y a de la place pour une autre appréciation également digne.
Je souhaiterais souligner une deuxième chose. Si certains de mes collègues, ou moi, avions honte, voulions cacher certains propos tenus lors des auditions concernant la Banque cantonale, ou les propos de certains proches qui étaient à l'époque membres du comité de banque, si tel était le cas, Monsieur Grobet, en tant que fin parlementaire, vous l'auriez certainement relevé à l'époque, dans votre rapport de minorité. Vous ne nous auriez jamais fait le cadeau de laisser passer des propos pouvant faire honte aux députés socialistes que nous sommes : vous nous les auriez mis sous les yeux, vous les auriez relevés pour montrer à quel point nos contradictions sont apparentes.
Troisième élément, en réponse à M. Hodgers, dont je constate que l'indignation a duré le temps de son intervention... Sans vouloir m'en prendre à M. Krebs, je remarque que M. Krebs était bien seul et, par moments, aussi un peu timide - bien qu'il ait été constant - pour rappeler la position des Verts qui étaient, sur le principe, absolument et fondamentalement acquis à la transmission des documents. Mais quand on est aussi fondamentalement acquis à une idée, comme je l'ai dit tout à l'heure pour l'Alliance de gauche, soit on est présent en commission, soit on se fait remplacer, il n'y a pas de solution intermédiaire!
Enfin, et c'est le dernier élément, un mot sur le message politique. Le message politique aujourd'hui ne concerne pas la Banque cantonale, comme on essaie de nous le faire croire. J'insiste là-dessus : si nous décidons de communiquer les pièces relatives à nos travaux - qui ne sont pas des procès-verbaux proprement dits - je maintiens que cela affectera les personnes, les experts auxquels nous disons, dans le cadre des travaux de la commission de contrôle de gestion sur les Offices des poursuites et faillites, qu'ils peuvent être tranquilles, que leurs propos sont confidentiels et qu'ils ne seront en aucun cas révélés. Car ce ne sera plus vrai : leur nom risque bien de figurer avec d'autres choses dans un dossier qui risque bien d'arriver devant la justice ou d'être l'objet de requêtes du même type.
M. Albert Rodrik (S). Je trouve que cette affaire ne mérite pas tous les poisons de la dissension qu'on est en train d'instiller au sein de l'Alternative! Je vais répondre à mon ami Bernard Clerc : non, je n'ai jamais pensé que la fièvre électoraliste était l'apanage d'un seul groupe. Je suis assez vieux pour savoir, sans en rougir, qu'elle peut nous atteindre tous. Je ne visais personne en particulier et je trouve qu'il n'y a pas de honte à considérer que, si près d'une telle échéance, nous en soyons tous - je ne m'exclus pas - conditionnés.
Deuxième chose : il n'est pas vrai que le groupe socialiste s'est retrouvé, durant cette législature, aux côtés de la droite en ce qui concerne la Banque cantonale. Je me suis levé par deux fois, en 1998 et en 1999, pour défendre des motions de l'Alliance de gauche que, sur le moment, je l'avoue, je trouvais excessives, mais qu'après coup on peut considérer comme pas si excessives. J'ai également fabriqué le projet de loi qui a mal fini en référendum... Donc, là n'est pas le problème.
Enfin, nous ne sommes pas de ceux qui croient qu'il y a quelque chose à cacher. C'est pourquoi nous voulons que le juge d'instruction puisse venir lire tout ce qu'il voudra et prendre toutes les notes qu'il voudra. Si nous voulons être simples et pragmatiques, c'est là une solution simple qui pourrait nous réunir tous. Il n'y a rien à cacher, tous les dossiers sont sur la table : le juge pourra les lire de A jusqu'à Z et prendre les notes qu'il voudra. Quoi de plus simple et de moins cachottier ?
M. Christian Grobet (AdG). Deux mots à M. Beer. Je tiens à le rassurer : dans le rapport, vous trouverez la déclaration de l'administrateur auquel je faisais allusion et dont j'ai eu la pudeur de ne pas citer le nom!
Quant à vous, Monsieur Glatz, je crois que vous avez également perdu une bonne occasion de vous taire : vous avez bénéficié de prêts de la Banque cantonale dans des conditions dont on pourrait discuter et vous êtes donc malvenu d'intervenir! Cela dit, vous savez très bien qu'en tant que chef du département des travaux publics je n'avais rien à voir avec la Banque cantonale. Je n'ai jamais siégé dans ses conseils. Par contre, j'ai demandé plusieurs fois que le Conseil d'Etat exerce sa surveillance. Qui s'y est opposé ? C'est M. Maitre, et M. Segond s'en souviendra, qui disait - je ne sais pas qui il visait! - ne pas vouloir que le Conseil d'Etat se mêle de la Banque cantonale parce que tout sortirait sur la place publique. C'est vrai qu'à l'époque Mme Buffat était cachée sous la table... (Exclamations.)
Deuxièmement, j'ai demandé une chose très simple, qui a été refusée aussi bien par le Conseil d'Etat que par le comité de banque, c'était de connaître - mais j'étais bien naïf à l'époque - la liste des débiteurs qui avaient bénéficié de plus de 5 millions de prêts. Je n'ai jamais deviné qu'un d'entre eux en avait eu pour 200 millions!
Enfin, je rappellerai que c'est votre parti, avec la direction de la banque, qui a lancé un référendum pour que l'AdG ne soit pas représentée au conseil d'administration.
Tout cela pour dire que vos propos sont parfaitement farfelus! (Applaudissements.)
M. Georges Krebs (Ve). En commission, j'ai proposé que l'on transmette tous les documents pour qu'il y ait une transparence complète sur les travaux de la commission ad hoc. Je voulais éviter ce débat malheureux, ces arguties juridiques : transmet-on, ne transmet-on pas ? Maintenant, nous devons voter. Le Grand Conseil doit prendre une décision claire sur la transmission de ces documents, en dépit peut-être de notre règlement ou d'arguties juridiques. Votons là-dessus, quitte à ce que la justice saisisse les documents, peu importe la façon. Maintenant ce débat a assez duré, nous devons prendre la décision de transmettre ou non ces documents.
M. Claude Blanc (PDC). Mesdames et Messieurs, je voudrais tout d'abord dire que la justice n'a pas le droit de venir perquisitionner au Grand Conseil : la séparation des pouvoirs est claire et c'est là une illusion que vous entretenez.
Cela étant, ce débat a assez duré et j'aimerais que l'on arrive à trouver une solution. Je vais donc vous faire une proposition, pour vous prouver d'ailleurs que nous non plus n'avons rien à cacher. En fait, les procès-verbaux de la commission ad hoc Banque cantonale, je les connais et je reviens sur ce que disait tout à l'heure M. Beer : il n'y a vraiment pas de quoi fouetter un chat et personne n'a rien à cacher. C'est la raison pour laquelle nous pourrions nous rallier à la proposition socialiste, si ce n'est que celle-ci, je vous le rappelle, parle des commissions au pluriel. Je proposerai donc un amendement visant à changer le titre de la résolution, à savoir : «Proposition de résolution concernant la communication des notes de séances de la commission ad hoc Banque cantonale au pouvoir judiciaire». Puis, in fine, pour reprendre le texte socialiste, je propose d'écrire : «à autoriser le pouvoir judiciaire à se rendre dans les bureaux du service du Grand Conseil pour prendre connaissance des notes de séances de la commission ad hoc Banque cantonale».
De cette manière, Mesdames et Messieurs les députés, nous ne violons pas l'article 189 de notre règlement et nous ne prenons pas d'engagement pour d'autres commissions. Un jour, peut-être modifiera-t-on cet article 189, mais dans l'immédiat, pour prouver que nous ne voyons pas d'inconvénient à ce que tout le monde sache ce que contiennent ces procès-verbaux, je me rallie à la proposition socialiste, sous condition que cela concerne seulement la commission ad hoc.
M. Philippe Glatz (PDC). J'ai été mis en cause, comme d'habitude, par M. Grobet, qui essaie de faire croire des choses, en disant que j'ai bénéficié d'un prêt de la Banque cantonale. Monsieur Grobet, je n'ai jamais bénéficié d'un quelconque prêt de la Banque cantonale : une société que j'administre a bénéficié d'un prêt... (Exclamations, commentaires.) Cette société a effectivement bénéficié d'un prêt, c'est de notoriété publique, elle en a payé intégralement les intérêts et l'a complètement amorti! A croire, d'ailleurs, que je suis le seul naïf et imbécile dans cette salle à avoir payé et à avoir fait gagner de l'argent à la Banque cantonale... (Rires.) Voilà ce dont vous m'accusez, Monsieur! C'est vrai, je suis naïf, je suis le seul à avoir permis, modestement, car c'était un tout petit prêt, que la Banque cantonale gagne un peu d'argent sur le dos de cette société...
Cela dit, Monsieur Grobet, vous affirmez n'avoir rien à voir avec ce qui s'est passé dans les années 80 : je serais quand même curieux de savoir combien de permis de construire vous avez accordés à des promoteurs qui sont aujourd'hui des débiteurs défaillants de la Banque cantonale... (Exclamations.) Je serais curieux que ceci puisse aussi être publié. J'ai dit tout à l'heure que je souhaitais vraiment une totale transparence, parce qu'il est trop facile de vous défausser, alors que vous étiez au pouvoir dans ces années folles, en disant que les autres sont tous responsables et que vous, vous êtes blanc comme neige! Monsieur Grobet, dites-nous combien de permis de construire vous avez accordés à des promoteurs qui sont aujourd'hui des débiteurs défaillants. Vous portez là une responsabilité, on pourrait en faire le recensement...
S'agissant de transparence, je note que M. Velasco pose les bonnes questions : comment se fait-il que le juge ne s'intéresse pas aux P.-V. du Conseil d'Etat, à l'époque où vous y siégiez, Monsieur Grobet ? Le juge devrait s'intéresser aussi aux P.-V. du Conseil d'Etat. Pourquoi s'intéresse-t-il seulement à la commission ad hoc ? La proposition faite par mon collègue Blanc va dans le sens de la transparence, mais je souhaiterais que, non seulement le juge, mais tout le public puisse être au courant de ce que contiennent ces P.-V. pour qu'il se rende compte de la manière dont tout cela a été conduit.
Mme Erica Deuber Ziegler (AdG). Je voudrais revenir sur une assertion martelée ce soir, à savoir que nos travaux, qui ont duré plus d'une année, auraient produit des P.-V. sans le moindre intérêt! Je me demande, dans ce cas, pourquoi le contribuable dépense de l'argent pour entretenir un parlement qui tient, pendant une année, des réunions régulières pour produire des propos sans intérêt...
Personnellement, je ne trouve pas que nos travaux aient été sans intérêt. Il est vrai que cette commission n'a pas été productive, mais il est vrai aussi qu'on lit en transparence dans ces P.-V., de manière tout à fait systématique, les silences et les mensonges de la banque. De même, si l'on reprend les P.-V. des années 1992-1993, on y lit aussi les silences et les mensonges de la banque. Alors, bien sûr, on n'y lit que ce qui relève du politique, c'est-à-dire de tous les non-dit, de tous les mensonges, de toutes les complicités, de tous les copinages qui ont été à l'origine des dysfonctionnements de la banque, et c'est peut-être ce qui fait peur. Mais pour moi, pour l'historienne qui, un jour, se penchera peut-être sur ces documents, en dehors de tout souci de justice, dans ces P.-V. il y a le procès politique de ceux qui ont permis que se développent cette complicité-là et ces écarts de conduite.
C'est la raison pour laquelle, indépendamment du fait que, comme membre de cette commission et comme députée du Grand Conseil, je n'ai pas à répondre au garde-à-vous aux demandes d'un juge - il ne s'agit pas de perquisition - je souhaiterais communiquer ces documents à la justice, même si la justice n'a pas à se saisir de nos débats politiques, n'a pas à juger les mensonges et les silences qui ont prévalu dans ce débat politique.
M. Bernard Clerc (AdG). Je vois que M. Blanc se rallie à l'amendement socialiste, alors qu'il nous dit n'avoir rien à cacher : c'est là effectivement une démarche un peu hypocrite. En effet, M. Blanc, qui siège par ailleurs dans une juridiction du pouvoir judiciaire, sait très bien que cet amendement socialiste ne permettra pas au juge d'utiliser ce qu'il aura lu, qu'il ne pourra produire aucune pièce dans la procédure. Cela revient à dire que les documents que le juge lira serviront à son information générale et personnelle, mais que, s'il découvre des éléments pouvant être à charge dans la procédure, il ne pourra pas les utiliser.
L'autre aspect, soulevé tout à l'heure par mon collègue Christian Grobet, c'est qu'il est normal que ces documents, dès le moment où ils sont en mains de la justice, puissent être consultés par toutes les parties à la procédure. En l'état, cet amendement n'aboutira à rien de concret pour permettre d'établir la vérité.
M. Charles Beer (S). Madame la présidente, je dépose un sous-amendement, si j'ose dire, au sous-amendement proposé par M. Blanc, qui a évoqué uniquement la commission ad hoc Banque cantonale. Nous nous sommes sans doute exprimés en termes trop généraux, mais ce que nous proposons concerne également la commission de fusion Banque cantonale. Il convient donc d'ajouter au sous-amendement de M. Blanc que nous autorisons le pouvoir judiciaire à se rendre aux archives d'Etat, de manière à consulter les procès-verbaux de la commission de fusion. Cela me paraît important et je suis en train d'écrire ce sous-amendement pour le déposer sur le bureau. J'ajoute par ailleurs que si le juge d'instruction découvrait des éléments importants pour son enquête qu'il n'aurait pas encore vus, je suppose qu'il se donnerait alors les moyens d'enquêter, moyens qu'il a largement.
M. Michel Halpérin (L). Je voudrais faire une observation sur la portée des amendements, amendés, sous-amendés et sous-sous-amendés, par M. Beer, par M. Blanc, puis par M. Beer à nouveau...
En l'occurrence, le système proposé ne peut pas donner satisfaction. En effet, si vous permettez au juge d'aller prendre connaissance des procès-verbaux et des notes, vous allez peut-être satisfaire sa curiosité, mais un juge d'instruction, à Genève, est chargé d'appliquer la loi, ici le code de procédure pénale, et n'a par conséquent pas droit à une information secrète pour lui seul. Il est obligé, comme l'a relevé M. Clerc, de rendre compte des documents auxquels il a accès pour que les parties à la procédure y aient également accès. En conséquence de quoi, vous allez le placer dans une situation plus difficile que celle où il demande d'être. En bon juriste, il refusera probablement d'avoir accès à des documents dont il devrait refuser l'accès aux parties, et nous aurons donc fait semblant de lui donner une réponse.
C'est la raison pour laquelle nous ne soutiendrons pas ces propositions d'amendements, d'autant que le terrorisme intellectuel qui consiste à dire que, si nous ne voulons pas de ces textes, c'est que nous avons des choses à cacher, est un peu ridicule. En effet, sur ce sujet-là, je crois que tout ce qui doit se savoir se saura nécessairement, et plutôt mieux par le juge que par le parlement. Ensuite, Madame la présidente, la solution de facilité consistant à dire qu'il est 22 h et qu'il faut nous arrêter, est bien agréable, mais elle ne répond pas à la question posée, qui est celle du fonctionnement des institutions les unes par rapport aux autres.
En conséquence, le groupe libéral refusera ces propositions d'amendements et refusera naturellement l'accès au dossier, dans la logique de ce que j'ai expliqué tout à l'heure.
Mme Fabienne Bugnon (Ve). Si j'ai bien compris, après ces heures de débat, les députés ne veulent pas transmettre les pièces, mais le groupe socialiste accepte que les pièces soient consultées. Pour ma part, je veux bien demander à mon groupe de se rallier à cette proposition, à la seule condition que soit réglé le problème évoqué dans l'intervention de M. Bernard Clerc, à savoir que, si le pouvoir judiciaire se rend dans les bureaux du Grand Conseil pour prendre connaissance des notes de séances, il ne pourra pas s'en servir. Je propose donc qu'on ajoute à la fin de l'invite : «à autoriser le pouvoir judiciaire à se rendre dans les bureaux du service du Grand Conseil pour prendre connaissance des notes de séances de la commission ad hoc Banque cantonale et à en faire des copies selon les besoins de l'enquête».
Cela reviendra à ce que nous voulions au début, c'est-à-dire qu'on transmette ces procès-verbaux. Mesdames et Messieurs, vous n'avez pas voulu que cela se fasse de cette manière : que cela se fasse d'une autre manière n'est pas important, l'important étant que les procès-verbaux soient transmis!
M. Rémy Pagani (AdG). Madame la présidente, au nom de l'Alliance de gauche, je demande le vote nominal. (Appuyé.)
M. Jean Spielmann (AdG). Décidément, la transparence, c'est difficile! On a cherché ce soir, sur tous les bancs, toutes les arguties possibles pour préserver le secret, pour empêcher la transparence, pour ne pas transmettre ces documents. On a donné toutes sortes d'arguments. Certains ont dit qu'il n'y avait rien dans ces P.-V. - s'il n'y a rien, pourquoi ne pas les transmettre ? - d'autres ont invoqué la séparation des pouvoirs... On a tout invoqué pour cacher le fait qu'on ne veut pas la transparence. La majorité de ce Grand Conseil, après tout ce qui s'est passé au niveau de la Banque cantonale, continue à vouloir maintenir le secret, qu'elle continue! Quant à nous, l'Alliance de gauche, nous allons prendre nos responsabilités et, en même temps, vous faciliter la tâche pour la suite des travaux, Madame la présidente, puisque j'annonce d'ores et déjà que nous transmettrons tous les documents en notre possession. Tous les documents en notre possession seront transmis et notamment les réponses de la banque aux questions posées par la commission, parce que nous ne tenons pas deux langages, nous ne cherchons pas à cacher les choses : il faut qu'il y ait transparence et que justice soit faite.
J'ajouterai que, du côté du Conseil d'Etat, Mme Calmy-Rey a fait, depuis maintenant plusieurs mois, un travail d'arrache-pied en ce qui concerne la Banque cantonale, a tenté de mettre en place la transparence, car sans transparence il n'y a pas de confiance. Mesdames et Messieurs, comment pourrez-vous expliquer à la population qu'il n'y a rien dans ces documents, mais que vous ne voulez pas les donner ? Que c'est du bouillon pour les morts, mais que vous gardez le secret ? Que, sur un dossier aussi catastrophique que celui de la Banque cantonale, vous avez constamment refusé la transparence, la discussion et que vous continuez ce soir à maintenir le secret ?
Nous, nous prendrons nos responsabilités, comme l'a fait d'ailleurs le Conseil d'Etat, qui a déjà transmis tous ses P.-V. Alors, continuez votre politique du secret! J'espère bien que la population un jour reconnaîtra les siens. Elle sait en tout cas ce qu'est la transparence : ce n'est pas ce que vous avez montré ce soir! (Applaudissements.)
M. Philippe Glatz (PDC). Je peux comprendre qu'un communiste ne connaisse pas le principe de la séparation des pouvoirs : il ne connaît que le Komintern! (Exclamations.) Mais oui, Mesdames et Messieurs, l'Histoire nous a enseigné que la séparation des pouvoirs n'est pas un modèle du genre dans les régimes que vous prônez!
M. Spielmann nous reproche de ne pas vouloir donner accès à ces documents. Ce n'est pas vrai et il le sait, mais il a besoin de faire un coup d'éclat ce soir, en annonçant qu'il va communiquer ces documents. Je vous rappelle, Monsieur Spielmann, que j'ai proposé qu'on les publie intégralement, soit sur le site Internet de l'Etat, soit dans la FAO. En l'occurrence, il ne s'agit pas de cacher quoi que ce soit : il s'agit de respecter un certain nombre de principes que vous foulez aux pieds ce soir. En particulier, je remarque que, pour votre coup d'éclat et votre coup électoral, vous foulez aux pieds les principes de la démocratie et la règle de la majorité! (Protestations de M. Spielmann.)
M. Michel Halpérin (L). Mesdames et Messieurs les députés, je ne peux pas vous cacher que je suis un peu choqué par ce que je viens d'entendre de la bouche de M. Spielmann. Il s'agit de savoir dans quel régime nous nous situons : je constate que M. Spielmann - apparemment ses amis politiques le soutiennent - décide, quand les décisions prises démocratiquement dans cette assemblée ne lui conviennent pas, de jouer sa partie tout seul. Jusque-là, cela ne m'étonne pas beaucoup. Je connais ses inspirations : il n'est guère inspiré que par lui-même et dès qu'il est suivi par une partie un peu convenable de ce parlement, cela l'angoisse. Il vient de se désinhiber et nous sommes heureux de l'avoir entendu dans un de ses grands moments!
Mais, Monsieur Spielmann, ce faisant, vous avez rappelé - et M. Glatz vient de le relever très opportunément - quelle est l'origine de votre pensée politique, à quel type d'idéologie vous vous référez et l'intérêt que vous portez à la démocratie, dès lors que les décisions ne vous paraissent mériter d'être respectées que lorsqu'elles sont conformes à vos voeux, et qu'elles méritent d'être violées lorsqu'elles ne le sont pas! Vous êtes en train, Monsieur Spielmann, de vous livrer à un exercice de subversion. Cela amusera quelques-uns de vos admirateurs habituels, qui s'apercevront très vite que les textes que vous avez rendus publics ne dissimulaient rien d'important, mais vous feront passer à bon compte pour un héros. En l'occurrence, contrairement à ce que vous imaginez, c'est à la majorité de ce parlement que vous aurez rendu service, parce que le public s'apercevra qu'il n'y avait pas de cachotteries, mais aussi qu'il y a un groupe de factieux au sein de ce Grand Conseil et que vous en êtes l'un des chefs!
J'ajoute, Monsieur, que vous avez pris la décision publique, retransmise devant un certain nombre de vos électeurs et d'autres, de déclarer tout haut que vous fouliez aux pieds les lois de la République. Je terminerai, pour faire bon compte, en vous signalant que de surcroît, depuis cinq minutes, vous êtes parjure, puisque vous avez prêté serment, pendant vos fonctions, non seulement de respecter les lois de la République, mais de garder le secret dans tous les cas où il vous serait enjoint par le Grand Conseil. Monsieur, vous êtes un traître! (Applaudissements, exclamations.)
Mme Christine Sayegh (S), rapporteuse. La déclaration de M. Spielmann ne me surprend pas. La menace de transmettre ces procès-verbaux, dont nous discutons justement le transfert, cette menace a déjà été faite à plusieurs reprises. Je pense même qu'ils ont déjà été transmis...
Nous sommes fiers de notre démocratie semi-directe, mais aujourd'hui elle me semble très ébranlée. Nous allons vers une dictature... (Exclamations.) ...ce à quoi je ne saurais adhérer, non seulement en tant que députée socialiste, mais en tant que présidente de cette commission. Je comprends ce soir pourquoi la présence de l'Alliance de gauche n'a pas été très assidue en commission : c'est parce que, de toute façon, ses membres prendront la décision qu'ils veulent, indépendamment de celle de la commission.
Je suis très déçue que l'on puisse bafouer les règles de la démocratie à ce point et je souhaiterais que M. Spielmann revienne sur sa déclaration. (Applaudissements.)
Mme Fabienne Bugnon (Ve). Les Verts regrettent la déclaration de M. Spielmann et surtout le moment où elle est intervenue. Vous auriez pu, Monsieur Spielmann, attendre qu'on vote sur l'amendement que nous avions déposé, demandant que le pouvoir judiciaire puisse se saisir lui-même de ces P.-V., puisque le Grand Conseil a décidé de ne pas les transmettre directement. Vous auriez au moins pu attendre qu'il y ait une décision sur ce point-là.
Je rappelle que le seul intérêt du groupe des Verts dans cette discussion, c'est de permettre à la justice de faire la lumière sur ce qui s'est passé à la Banque cantonale. Pour ce faire, la justice a besoin de ces procès-verbaux et le groupe des Verts estime qu'ils doivent lui être transmis. Si ce Grand Conseil n'est pas assez grand pour les lui transmettre tout seul, nous acceptons avec vous, puisqu'il le faut, que le pouvoir judiciaire vienne les chercher lui-même. Mais nous ne choisissons pas de les transmettre si ce n'est pas la volonté de ce Grand Conseil.
Je regrette, Monsieur Spielmann, que vous n'ayez pas attendu le vote de notre amendement et je demande, Madame la présidente, que vous fassiez voter celui-ci.
M. Jean Spielmann (AdG). Mesdames et Messieurs les députés, ce n'était effectivement pas une décision facile à prendre! (Exclamations.) Je me permets ici de vous rappeler deux choses. Premièrement, au moment du vote de la loi de fusion, nous avions proposé une série d'amendements visant à donner un certain nombre de consignes et de directives à la Banque cantonale que nous voulions créer. Je rappelle du reste que la Banque cantonale a été créée grâce, notamment, à ceux qui m'ont précédé sur ces bancs-ci, contre vos avis! Nous avions demandé que cette banque ait une éthique, mène une politique différente de celle des banques habituelles. Nous avons été battus!
Deuxièmement, nous avons constamment posé des questions dans ce parlement, nous avons demandé la mise en place d'une commission d'enquête, refusée par quasiment tous les partis. Devant nos questions, vous vous êtes moqués de nous, mais vous vous êtes, en même temps, moqués de la population. En effet, vous nous répondiez que rien ne se passait, que tout allait bien et, aujourd'hui, c'est 4 milliards que les contribuables doivent payer!
Alors, devant cette politique du secret, ce refus de la transparence, un député, un élu doit, à un moment donné, faire une pesée d'intérêts. Soit on se range avec vous, avec les socialistes et ceux qui veulent continuer à garder le secret, soit on en finit avec cette politique du secret et on joue la transparence.
Vous expliquez que ces textes sont du bouillon pour les morts, qu'ils ne contiennent rien. Pourquoi alors ne pas les donner ? Pourquoi refuser la transparence ? Pour ma part, je ne joue plus à ce jeu avec vous : cela fait trop longtemps qu'il dure et c'est le contribuable qui paie. Aujourd'hui, cela suffit, je prends mes responsabilités, je vous l'ai dit, et j'irai jusqu'au bout!
M. Pierre Vanek (AdG). M. Spielmann a été mis en cause. Michel Halpérin a eu des propos déplacés : il a traité notre collègue de parjure, de traître et de factieux. En l'occurrence, si notre collègue Spielmann est un traître, un parjure et un factieux aux yeux du parti libéral, je crois que c'est pour lui plutôt un honneur, que je revendique aussi pour moi-même et pour les députés de mon groupe!
M. Halpérin a cru bon d'invoquer les devoirs qui seraient inscrits dans la loi portant règlement du Grand Conseil, le mot parjure faisant référence au serment que nous avons prêté comme député. Monsieur Halpérin, quand on devient député, du moins sur les bancs de l'Alliance de gauche, on ne cesse pas pour autant d'être citoyen! Et nous estimons qu'un citoyen a des devoirs élémentaires, notamment celui de ne pas prêter la main à une opération visant à soustraire à la justice des documents dont elle a besoin, qu'elle demande. Tout citoyen a le devoir de se plier à une telle demande et ce n'est pas parce que nous avons le privilège d'avoir été élus par nos concitoyens sur les bancs de ce Grand Conseil que nous pouvons nous soustraire à ce devoir civique élémentaire.
Mme Sayegh a aussi tenu des propos déplacés... (Protestations.) ...des propos pour le moins déplacés à propos de l'intervention de mon collègue Spielmann. Parlant de la décision du groupe de l'Alliance de gauche de transmettre ces documents - cas échéant, s'il en était besoin, si ce parlement n'était pas conscient de son devoir, comme l'a dit très justement Albert Rodrik tout à l'heure, de prêter assistance à la justice - Mme Sayegh a utilisé le mot de dictature et a raconté ce que je qualifierai de grosses bêtises, pour rester très modéré et très gentil. En fait, c'est nous qui pourrions, avec bien plus de pertinence, parler de dictature en évoquant la chape de plomb qui pèse sur toute une série d'affaires par rapport auxquelles vous avez systématiquement entretenu, sous des prétextes divers, le secret et l'opacité afin que les citoyens ne puissent pas avoir le dernier mot.
Tout a été dit sur la Banque cantonale, mais il y a d'autres affaires. On a vu celle qui se développe - mon collègue Rémy Pagani me le souffle, mais je n'en avais pas besoin - du côté de l'office des poursuites et faillites : ceci n'a rien à voir avec les moeurs d'une république démocratique. Dans ce dossier, l'Alliance de gauche a aussi décidé qu'elle mettrait dans le domaine public tout ce qu'elle savait, parce que c'est un devoir que nous avons face à nos concitoyens, parce que c'est un comportement démocratique élémentaire. Ce n'est pas la pratique des dictatures que de prôner la transparence, de prôner l'information des citoyens, de s'adresser librement aux médias pour que les gens sachent de quoi il retourne. M. Beer, je crois, évoquait tout à l'heure la fâcheuse manie qu'aurait l'Alliance de gauche de tenir des conférences de presse. Mais, Mesdames et Messieurs les députés, c'est la moindre des choses! La liberté de la presse exige effectivement que celle-ci soit informée et nous tenons à lui permettre de l'être, pour qu'elle joue son rôle.
Maintenant, quant à ce qu'a dit Mme Fabienne Bugnon, il est clair que la déclaration de mon collègue Spielmann aurait pu, ou aurait peut-être même dû venir en toute fin de débat. Cela étant, nous nous rallions bien volontiers à votre amendement, consistant à reprendre la proposition socialiste en précisant que les juges pourront consulter, mais aussi photocopier les pièces qu'ils auraient besoin de faire valoir dans le cadre de la procédure. Nous le complétons toutefois par un sous-amendement reprenant ce que nous avons déjà proposé tout à l'heure, à savoir qu'il ne s'agisse pas seulement des procès-verbaux - ce que certains ont essayé de maquiller en parlant de notes de séances - mais aussi de «toutes les pièces remises à la commission, notamment les réponses écrites de la BCG aux questions posées par la commission».
Ces documents font partie du paquet et nous proposons donc d'ajouter cette précision à votre amendement, Madame Bugnon, que nous voterons. Si ce vote a une issue heureuse, si cet amendement est adopté par ce parlement, les déclarations de M. Spielmann sur notre intention de faire notre devoir de citoyen et de transmettre ces documents à la justice, n'auront plus de raison d'être, puisque ce parlement aura repris conscience de ses devoirs et que les choses se feront dans des formes un tant soit peu plus régulières. (Brouhaha.)
M. Claude Blanc (PDC). On tombe vraiment dans le terrorisme intellectuel, encore qu'intellectuel est un grand mot! On fait du chantage au Grand Conseil : ou bien vous votez comme nous voulons, ou bien nous faisons comme nous voulons! C'est une notion de la démocratie qui ne nous était pas habituelle. On sait que les bancs d'en face ont eu des grands maîtres qui l'ont pratiquée pendant soixante-dix ans, on voit ce que cela a donné, mais cela n'est vraiment pas dans nos moeurs!
Pour ma part, je reviens à l'amendement que nous avons proposé avec M. Beer. Ma préoccupation principale, je le répète, est de ne pas créer un précédent pour d'autres dossiers et passer outre l'article 189 de notre règlement. Puisque la commission ad hoc, qui était chargée par l'article 189 de se déterminer, n'a pas pu se déterminer, nous sommes d'accord que le Grand Conseil le fasse, mais il doit se limiter à ce point précis. S'il veut communiquer d'autres documents d'autres commissions, il devra modifier la loi. Cela nous paraît absolument indispensable.
Mesdames et Messieurs les députés, il faut maintenant que nous votions sur les amendements conjugués des socialistes et des démocrates-chrétiens, de manière à en finir et à montrer que nous n'avons vraiment rien à cacher. Le juge d'instruction pourra venir lire tout ce qu'il voudra, rien ne lui sera caché. Encore une fois, Mesdames et Messieurs, vous faites un débat pour la presse et la télévision : en réalité, vous savez bien qu'il n'y a rien dans ces documents. Vous tentez de faire croire que nous voulons cacher des choses, mais vous savez bien que le juge d'instruction en sait déjà beaucoup plus que nous et que les documents que vous lui transmettrez ne changeront pas les choses.
Mme Fabienne Bugnon (Ve). Madame la présidente, je demande le vote nominal, pour savoir qui est vraiment pour la transparence dans ce parlement!
M. Christian Brunier (S). Madame la présidente, nous demandons évidemment le vote nominal! (Exclamations.)
M. Claude Blanc (PDC). Mesdames et Messieurs les socialistes, nous n'allons pas continuer à voter à l'appel nominal toute la soirée! Vous pourriez demander l'appel nominal pour le vote final de la résolution amendée, parce que, si on vote sur chaque amendement, on ne s'en sortira pas... Je vous fais cette suggestion, car cela devrait suffire, me semble-t-il...
M. Charles Beer (S). Madame la présidente, il y a un problème dans le titre : il s'agit bien des notes de séances de la commission Banque cantonale; par contre, pour la commission de fusion, il s'agit de procès-verbaux...
Le Grand Conseil prend acte de ce rapport.
M. Jacques-Eric Richard (S). Mesdames et Messieurs les députés, j'ai le plaisir de vous présenter ce projet de loi, en rappelant que deux ou trois expériences ponctuelles de médiation se déroulent déjà dans les communes, ainsi qu'en Ville de Genève. Le mandat des médiatrices et médiateurs est de lutter contre l'exclusion et la marginalisation. Actuellement, nous avons besoin d'une base légale dans ce domaine et c'est pourquoi nous vous proposons de renvoyer ce projet de loi à la commission des affaires sociales.
Mme Geneviève Mottet-Durand (L). Les éléments contenus dans ce projet de loi sont en adéquation avec la pratique qui existe au niveau de la FASe, puisque cette dernière s'adapte à l'évolution des situations. Un cahier des charges circonstancié des travailleurs sociaux hors murs a été établi et prévoit entre autres l'obligation de collaborer étroitement avec les maisons de quartier, qui développent une action de proximité en lien avec le quartier et la commune d'implantation. L'intervention hors murs doit donc être considérée comme complémentaire et en synergie avec celle des centres, l'objectif étant que les centres eux-mêmes participent également à l'action hors murs. Et comme le dit si bien un travailleur social hors murs, il n'y a pas de hors murs sans les murs!
Consciente que certaines situations échappent aux centres, la FASe, à la demande de certaines communes, a engagé d'autres actions, comme celle du BUPP, Bus prévention parcs, développée à Lancy, Onex, Bernex et Confignon, comme le mentionne d'ailleurs l'exposé des motifs du présent projet. Cette action, confiée à des animateurs de la FASe, constitue un outil servant à établir la relation avec des jeunes confrontés à certaines difficultés. Cette expérience, qui en a généré d'autres se déroulant pendant tout l'été dans d'autres régions du canton, a aussi une limite, dès le moment où elle doit pouvoir être relayée par l'action d'autres intervenants, comme les services de l'office de la jeunesse, les centres sociaux de quartier, les conseillers des cycles, les îlotiers de gendarmerie, etc. Elle est à mettre en parallèle avec le travail effectué par dix autres travailleurs sociaux hors murs de la FASe dans six autres programmes, recouvrant dix-huit communes.
Il est indispensable que l'attribution des moyens nécessaires, comme le propose le projet de loi, pour faire face à des difficultés recensées, soit précédée d'une phase d'évaluation sur les moyens à donner. En ce sens, les réseaux regroupant les professionnels des institutions sociales, les communes, la police ainsi que les représentants d'associations telles que parents d'élèves ou enseignants, doivent être mis à contribution et consultés. C'est pourquoi nous estimons que cette consultation devra être très clairement mentionnée dans la loi ou dans son règlement d'application. Par ailleurs, nous ne pensons pas que les propositions prévues dans le projet de loi 8525 doivent faire l'objet d'une nouvelle loi : certaines dispositions peuvent tout simplement s'intégrer à la loi sur la FASe, qui est la loi J 6 11, complétant ainsi sa mission dans le domaine socio-éducatif.
Pour ma part, je vous proposerai, Mesdames et Messieurs les députés, de renvoyer ce projet de loi à la commission de l'enseignement. La FASe dépend entièrement de l'instruction publique, les travailleurs sociaux ont des contacts réguliers avec les conseillers sociaux des cycles d'orientation. Je ne vois pas pourquoi on renverrait ce projet aux affaires sociales, l'action de la FASe se déroulant complètement en dehors du DASS.
M. Roger Beer (R). En examinant votre projet, Mesdames et Messieurs, j'ai eu l'impression que c'était M. Manuel Tornare, aujourd'hui maire de la Ville, qui vous avait dicté ce projet de loi! M. Tornare vient de nommer une délégation à la jeunesse, il vient d'engager plein de gens, notamment des médiateurs de rue justement, pour intervenir dans les quartiers chauds, les endroits où il y a des difficultés, et cela a l'air de marcher. Or, ce qui m'étonne, c'est qu'il n'a pas eu besoin de votre projet de loi... Cela dit, je ne vais pas polémiquer. C'est une idée socialo-socialiste : visiblement certains la mettent en oeuvre tout de suite, d'autres veulent en discuter en commission. Pour sa part, le groupe radical suivra la proposition qui vient d'être faite de renvoyer ce projet de loi à la commission de l'enseignement.
Mme Esther Alder (Ve). Les Verts ne sont pas très favorables à ce projet de loi. En effet, dès lors que l'on souhaite supprimer les doublons entre les communes et le canton, à partir du moment où, dans la répartition des tâches, l'on considère que le travail de proximité - que, par ailleurs, les Verts soutiennent - est de la compétence des communes, nous pensons que les signataires de ce projet de loi se trompent d'instance. Cela dit, nous ne sommes pas contre un renvoi en commission, de sorte que les communes puissent être entendues sur leur politique en la matière, et notamment la Ville de Genève qui, rappelons-le, a récemment développé tout un concept à cet égard.
Mme Nelly Guichard (PDC). Nul ne saurait nier le fait que les médiateurs de rue ont un rôle important à jouer. Aujourd'hui, il faut aller à la rencontre des jeunes qui, pour diverses raisons, sont en rupture avec leur famille, avec le réseau social habituel de manière plus générale, et qui ne fréquentent donc plus les centres de loisirs ou les maisons de quartier.
Dans ce sens, le Bus prévention est une solution pour entrer en contact avec ces jeunes, où qu'ils se trouvent et selon des horaires adaptés à la situation, donc souples. Cette nouvelle approche s'est faite dans le cadre de la Fondation pour l'animation socio-culturelle, comme Mme Mottet-Durand l'a rappelé tout à l'heure, et il est probablement temps de reconnaître l'importance de ce travail hors murs et de lui donner un ancrage législatif. Mais le Bus prévention a aussi montré que ces animateurs socio-culturels, ces médiateurs ne peuvent pas fonctionner comme des électrons libres. Pour ancrer dans la durée l'action entreprise, pour lui donner une réelle valeur, il faut une coordination avec les lieux fixes que sont les centres de loisirs, jardins Robinson, maisons de quartier ou, le cas échéant, les services sociaux des communes, selon les configurations locales.
Il y a lieu aussi d'examiner - et, là, je rejoins la problématique des doublons - si le travail d'une partie, même petite, du personnel qui travaille dans les centres ne pourrait pas être réorientée vers cette fonction de médiateur hors murs, ou en tout cas si des postes ne pourraient pas être transférés, puisque la situation évolue. Tant pour la collaboration absolument indispensable que pour des questions de transferts éventuels de postes, il ne me paraît pas utile, pour ne pas dire inadéquat, d'avoir une structure séparée de la FASe, comme le prévoit le projet de loi, avec une ligne budgétaire propre. Cette problématique... (Brouhaha.)
La présidente. Monsieur le vice-président, pouvez-vous laisser Mme Guichard terminer ?
Mme Nelly Guichard. Je pense donc que toutes ces problématiques devront être examinées en commission, et nous aussi proposons que ce soit la commission de l'enseignement qui soit chargée de se pencher sur ce projet de loi, puisqu'elle s'est occupée de la mise sur pied de la FASe et que le département de l'instruction publique est le répondant de cette institution. De plus, je rappelle que la commission de l'enseignement, en ce moment, n'est pas surchargée de travail, ce qui n'est pas le cas de la commission sociale.
Mme Martine Brunschwig Graf. Sans allonger, je ferai trois observations. La première, c'est qu'effectivement la commission de l'enseignement devrait s'occuper de ce dossier. Deuxièmement, il n'est pas nécessaire, à notre avis, de faire un projet de loi spécifique : il vaudrait mieux trouver des solutions dans le cadre de la FASe.
Troisièmement, je vous recommanderai, Mesdames et Messieurs, au cours du travail en commission et au-delà de l'intérêt réel des questions qui sont posées, de ne pas adopter une loi qui soit trop contraignante et qui entre trop dans les détails. En effet, si aujourd'hui nous avons plutôt besoin de travailleurs de rue, demain ou après-demain, la situation peut évoluer. Je trouverais dommage que l'on inscrive dans la loi générale des définitions de métiers particuliers, alors que les caractéristiques du système mis en place sont précisément la collaboration canton-communes - la Fondation pour l'animation socio-culturelle vise justement à permettre cela - et la souplesse dans les réponses, en fonction des problèmes posés. A cet égard, la loi telle qu'elle est rédigée méritera quelque réflexion.
Quant au problème posé, nous sommes tous conscients de l'intérêt de ce type de pratique. Je confirme que, même sans base légale, il est parfaitement possible aujourd'hui d'agir. Mais si vous souhaitez une base légale, essayons de trouver habilement un chemin pour ne pas figer les activités de celles et ceux qui sont sur le terrain.
Ce projet est renvoyé à la commission de l'enseignement et de l'éducation.
M. Walter Spinucci (R), rapporteur. Mesdames et Messieurs les députés, je n'ai rien à ajouter, si ce n'est que je présente quatre amendements qui, en fait, n'en sont qu'un seul. Il s'agit de modifier, dans le projet de loi d'origine, le nom de la convention, à savoir :
«Projet de loi autorisant le Conseil d'Etat à adhérer à la convention relative à la négociation, à la ratification, à l'exécution et à la modification des conventions intercantonales et des traités des cantons avec l'étranger (B 1 03.0)»
Cet amendement s'applique par quatre fois dans le projet de loi, soit dans le titre, dans le préambule, à l'article 1 et à l'article 230A.
Mme Martine Brunschwig Graf. Mesdames et Messieurs les députés, il est rare que le Conseil d'Etat prenne la parole en troisième débat quand ce n'est pas nécessaire. Mais j'aimerais, pour les rares députés présents dans cette enceinte... (L'oratrice est interpellée.) C'est possible, Monsieur Beer! Mais le Conseil d'Etat, que je représente ici, parlant d'une seule voix, je me permets de dire la chose suivante... (Commentaires.) Je me permets de dire la chose suivante et je vais peut-être la dire de façon un peu plus sèche!
Vous allez voter dans un instant un projet de loi qui donne au parlement des pouvoirs qu'il n'a jamais eus. C'est le résultat du travail de six cantons, qui s'est déroulé dans des conditions optimales, avec la bonne volonté de gens de gauche, de droite, du centre, et qui a abouti à ce résultat que nous n'imaginions même pas il y a quatre ans. C'est pourquoi je me permets d'être un peu énergique dans ma déclaration : je pense que, par égard pour vous-mêmes, vous devriez y prêter un peu d'attention!
En effet, il s'agit là d'une avancée remarquable dans le contrôle parlementaire intercantonal, qui était le voeu de certains députés de la précédente législature - les auteurs du précédent projet de loi voudront bien le retirer par conséquent - et qui, aujourd'hui, fait l'objet d'un consensus dans six cantons. C'est suffisamment rare pour qu'on le souligne. En pensant à certains débats stériles qu'on entend parfois, il vaut la peine de rendre hommage à tous les députés qui ont participé à ces travaux. J'étais déléguée des gouvernements des six cantons et j'ai, pour ma part, pris grand plaisir à ces travaux! (Applaudissements.)
M. Roger Beer (R), rapporteur. Vu l'heure tardive, je dirai juste que ce projet de loi devrait également enchanter la présidente, puisqu'il a fait, après quatre séances, l'unanimité de la commission. Nous pouvons donc voter aveuglément ce projet de loi!
M. Roberto Broggini (Ve). Mesdames et Messieurs les députés, cette pétition évoque les doublons qui existent entre la Ville de Genève, notamment, et ce parlement. En effet, ce sujet relève typiquement de la Ville de Genève. Les personnes auditionnées concernant l'école du XXXI-Décembre étaient d'ailleurs Mme Simone Irminger, cheffe du service des écoles de la Ville, et M. Claude Deuel, chef du service de la délégation à la jeunesse. Comme nous le permet la loi portant règlement du Grand Conseil, à son article 172, lettre b), plutôt que de déposer cette pétition sur le bureau du Grand Conseil, je propose de la transmettre à une autre autorité, à savoir la Ville de Genève. Il serait opportun que les travaux de la commission des pétitions du Grand Conseil puissent lui être transmis pour information. Je vous encourage donc, Mesdames et Messieurs les députés, à renvoyer cette pétition à la Ville de Genève.