République et canton de Genève
Grand Conseil
Séance du vendredi 11 mai 2001 à 17h
54e législature - 4e année - 8e session - 23e séance
PL 8215-B
Suite du premier débat
M. Alain-Dominique Mauris (L). Monsieur Vanek, comme vous, j'ai aussi des craintes, mais avons-nous vraiment les moyens à ce jour de faire autrement que d'adhérer à cet accord ? Rappelons-nous que l'enjeu est européen et que Genève est bien petite par rapport à l'Europe ! Il est vrai que les compétences ne sont pas tout à fait clairement définies mais, contrairement à vous, je ne pense pas que la coquille est vide... Au contraire, elle contient un certain nombre de choses !
En fait, notre préoccupation est bien de savoir si nous voulons oui ou non nous associer aux discussions avec les autres cantons pour harmoniser nos différences. Les expériences ont bien montré que rester en retrait n'est pas toujours la meilleure stratégie à adopter. Si d'autres doivent décider à notre place, où sera notre compétence ? Dans cet enjeu, notre atout doit rester l'initiative, nous devons rester actifs. En position d'attente, nous ne serions que réactifs et nous ne pourrions que voir les décisions passer !
Nous devons donc adhérer à l'accord intercantonal tel qu'il est présenté sur l'élimination des entraves techniques au commerce pour nous permettre de nous harmoniser aux autres, et harmoniser ne signifie pas forcément uniformiser. Faisons donc confiance au représentant de Genève qui défendra notre législation cantonale et qui participera ainsi à la mise en place des règles du jeu !
M. Christian Brunier (S). Refusant le fatalisme qui vient d'être exprimé, nous pensons que la lisibilité de ce projet de loi est plus que nébuleuse... On nous demande tout simplement d'adhérer à un accord intercontinental... (Rires.) ...intercantonal - pardon - sur l'élimination des entraves techniques au commerce sans que personne ne connaisse les conséquences réelles de ce projet.
Le projet était d'ailleurs tellement flou qu'il a été renvoyé en commission pour quelque temps, mais ce retour n'a servi à rien... Personne n'est capable de nous dire - et le Conseil d'Etat ne fait pas exception - quels sont les avantages et quels sont les inconvénients de cet accord. Cet accord pourrait d'ailleurs provoquer des conséquences assez néfastes - M. Vanek l'a dit tout à l'heure - sur des aspects de la politique genevoise sur lesquels nous sommes particulièrement en avance, par exemple en matière d'énergie ou en matière d'aménagement.
Adhérer à une structure régionale intercantonale, voire européenne, peut être, bien entendu, une chose très positive et ce n'est d'ailleurs pas un hasard si le parti socialiste est un des partis les plus pro-européens... (Exclamations.)
M. John Dupraz. Tu te prends pour qui, gringalet ?
M. Christian Brunier. Quand vous vous serez calmé, Monsieur Dupraz, je continuerai !
La présidente. Monsieur Brunier, poursuivez ! Monsieur Dupraz, je vous demande de vous taire !
M. Christian Brunier. Mesdames et Messieurs les députés, avant d'adhérer à une structure, nous devons bien entendu connaître les points positifs et les points négatifs de celle-ci et procéder à une pesée d'intérêts. Ceux qui soutiennent ce projet vont, en fait, signer un chèque en blanc. Dans ce contexte, les socialistes diront non, ce soir. Mais ce non n'est pas un repli ni un refus définitif d'un accord de ce type !
Nous demandons simplement au gouvernement, s'il tient à un tel accord, de nous présenter un nouveau projet qui identifie clairement quels en sont les attraits et les inconvénients. Nous demandons un peu de lisibilité avant de voter un tel projet. En attendant, nous ne sommes pas prêts à brader les droits démocratiques au profit d'un accord intercontinental... (Rires.) ...intercantonal - décidément - dont la seule caractéristique est d'être totalement flou !
Mme Morgane Gauthier (Ve). Ce projet nous a longuement fait plancher, et en commission des travaux nous nous sommes abstenus. Les raisons en sont les suivantes : nous sommes tout à fait d'accord avec le principe d'harmonisation, mais l'instrument choisi, c'est-à-dire une autorité intercontinentale... (Rires et exclamations.)
Une voix. Intercommunale !
Mme Morgane Gauthier. ...un niveau intermédiaire entre cantons et Confédération sans contrôle démocratique ne nous convient pas particulièrement. D'un autre côté, il faut savoir à quoi l'on donne le plus d'importance : avoir raison tout seuls ne sert pas non plus à grand-chose... Quant à l'impact sur l'énergie, nous avons obtenu toutes les garanties du DIAE qu'il n'y aura pas d'impact sur la loi genevoise.
Les Verts n'ont finalement pas de consigne de vote.
M. Claude Blanc (PDC). Ce projet est évidemment très mal emmanché...
Il a tout d'abord été renvoyé en commission de l'économie, puis cette dernière s'est vite rendu compte que ce projet concernait uniquement des problèmes de construction. La commission de l'économie a donc fait venir Mme Vuillod, juriste du département de l'aménagement, qui nous a donné toutes les garanties nécessaires qui nous ont permis de voter ce projet de loi.
Les même débats que ceux d'aujourd'hui ont déjà eu lieu au Grand Conseil et ce dernier a décidé, compte tenu que ce problème concerne plus particulièrement la construction, de renvoyer ce projet en commission des travaux. Cette dernière s'est retrouvée devant les mêmes problèmes : au lieu de venir nous dire si le Conseil d'Etat était d'accord ou non, le conseiller d'Etat a pratiqué la politique de la chaise vide, comme ce soir d'ailleurs...
Une voix. Bravo !
M. Claude Blanc. Alors, il nous a envoyé Mme Vuillod, qui nous a répété la même chose - il faut dire que j'ai la chance de faire partie des deux commissions concernées - que ce qu'elle avait dit en commission de l'économie : c'est dire que nous étions toujours dans le vague !
En tant que président de la commission des travaux, je me suis permis, à la fin, de faire une remarque, car j'ai trouvé absolument inconcevable que les gens qui étaient opposés se soient finalement abstenus, de sorte que le rapport de majorité ne correspond pas à la majorité parlementaire qui va ce soir «balancer» ce projet. Ce qui m'a le plus amusé, d'ailleurs, c'est que, dans le fond, tout le monde a couru après tout le monde, tout le monde s'est regardé, personne ne sachant quelle position prendre, surtout pas le conseiller d'Etat chargé des constructions dans ce canton !
M. John Dupraz. Qui est-ce qui gouverne ?
M. Claude Blanc. Je trouve que c'est une carence inacceptable, mais puisqu'il n'est pas là, renvoyons-lui son projet ! Moi, ça m'est égal !
M. Bernard Clerc (AdG). Dans cette enceinte, une critique de la mondialisation néolibérale... (Exclamations.) ...est faite par un certain nombre de groupes politiques, et j'insiste sur le fait de lier ces deux termes parce que la mondialisation en soi cela ne veut rien dire : elle existe d'ailleurs depuis fort longtemps. Cette mondialisation néolibérale consiste effectivement à libéraliser autant que faire se peut tous les aspects de la vie, notamment les aspects liés au commerce, sujet qui nous concerne ce soir.
Il est facile de faire la critique, en théorie, sur les grands principes de cette mondialisation, si en face d'un cas concret, même s'il est limité, d'application des principes de l'OMC, il n'y a plus personne ! Il ne s'agit pas d'un projet concocté comme cela pour le plaisir de faire de l'harmonisation... Ce sont les conséquences directes des principes définis à l'OMC !
Certains ont parlé du manque de visibilité de ce projet de loi... Non, il est très clair : son but est d'aligner des normes sur un strict minimum ! Le rapport de majorité le dit d'ailleurs très bien en citant effectivement Mme Vuillod, en page 4 : «...pour qu'il y ait problème, il faudra que les normes du canton provoquent une entrave à la concurrence». C'est marqué en gras dans le rapport ! Cela signifie que si nos normes en matière énergétique sont supérieures aux normes européennes, par exemple, elles seront considérées comme des entraves à la concurrence ! Notre volonté d'économiser l'énergie sera considérée comme une entrave à la concurrence ! C'est d'ailleurs aussi dans la logique de la libéralisation du marché de l'énergie : ce n'est pas pour rien que nous avons lancé un référendum contre la libéralisation du marché de l'électricité ! Cela va exactement dans le même sens. L'énergie sera moins chère pour les gros consommateurs qui en dépenseront d'ailleurs davantage. Et là aussi il y aura entrave à la concurrence, qu'il faudra briser...
La libéralisation néolibérale du commerce, Mesdames et Messieurs, ce n'est pas qu'une simple question de commerce - on le voit à travers cet exemple précis - c'est l'imposition de choix économiques, notamment des grands détenteurs de capitaux, à l'ensemble de la société, ce qui conduit, qu'on le veuille ou non, inéluctablement à une réduction des droits démocratiques : et voilà ! Adhérer à cet accord intercantonal, c'est abandonner la possibilité, pour ce Grand Conseil, de définir des normes en matière d'économies d'énergies, puisque, semble-t-il, c'est ce point-là qui, finalement, serait véritablement concerné, les autres points ayant déjà été largement harmonisés par des normes de la Confédération.
Eh bien, c'est sur ce choix concret sur un objet précis - j'interpelle sur ce point nos amis Verts pour qu'ils soient un peu cohérents avec eux-mêmes sur cette prise de position - qu'il faut dire non ! Car il n'est pas possible de dire non au néolibéralisme en théorie et en général et de dire oui dans les cas particuliers !
M. Alberto Velasco (S). J'avais en effet posé la question suivante, dont la réponse figure dans le rapport de minorité, à Mme la juriste du département, en l'occurrence Mme Vuillod :
«Etant donné que nous sommes un Etat fédéral composé de cantons qui ont certaines prérogatives, dites-nous, Madame, afin de prendre une décision en connaissance de cause, si l'application de cette loi signifie que notre canton perdra certaines prérogatives.» Après quelques secondes, Mme Vuillod a répondu affirmativement.
Voilà, Mesdames et Messieurs les députés, ce que représente ce projet. Et cette réponse, je le répète, m'a été donnée par une juriste du département !
Notre collègue Mauris préconise de faire confiance aux représentants de Genève qui vont nous défendre... En effet, l'article 1 stipule : «Le Conseil d'Etat est autorisé à adhérer, au nom de la République et canton de Genève, à l'accord intercantonal sur l'élimination des entraves techniques au commerce...» Mais que veut dire «entraves techniques», car le mot technique recouvre bien des domaines : juridique, construction, environnement ? MM. Haegler et Kramer nous ont donné des explications à ce sujet, mais cela n'est pas suffisamment clair. On nous demande aujourd'hui de voter ce projet de loi, alors que nous n'avons pas reçu de réponses à toutes les questions que nous avons posées en commission et que nous n'avons pas suffisamment de détails.
Eh bien, Mesdames et Messieurs les députés, à mon avis, même si nous ne votons pas ce projet de loi, le canton pourra tout de même aller de l'avant ! Et nous avons le droit en fonction du principe dit «de précaution» de nous prévaloir de ce que ces accords peuvent impliquer. A voir ce qui se passe aujourd'hui dans certains pays qui ont appliqué les directives de l'OMC, il y a de quoi se demander s'il l'on doit aller au-delà ! L'expérience de ces quatre ou cinq dernières années nous montre ce que veut dire la «liberté de commerce» dans le sens où l'entend l'OMC ! Cette liberté de commerce n'inclut justement pas les principes qui respectent la dignité de l'être humain, dans le sens social du terme.
Mesdames et Messieurs les députés, ce projet de loi ne contient précisément aucune notion de respect de l'environnement et des normes sociales. Pour moi, il n'est pas possible de voter un projet dans ce sens sans qu'il ne soit fait mention de cet aspect des choses. Les socialistes ne pourront donc pas voter un tel projet.
M. Claude Blanc (PDC). J'interviens à nouveau, car c'est un véritable dialogue de sourds ! On répète toujours les mêmes choses, mais on oublie l'essentiel : cet accord est strictement interne à la Suisse. Il consiste à établir des normes techniques en matière de construction, sur lesquelles seront basées toutes les règles des soumissions dans tous les cantons suisses. Et il suffit que dix-huit cantons adhèrent à cet accord pour qu'il ait force de loi dans toute la Suisse !
La seule différence sera que nous ne serons pas partie prenante aux discussions et que, par conséquent, nous n'aurons rien à dire sur les normes qui pourront être introduites. Nos entreprises ne pourront pas aller soumissionner dans un autre canton sous d'autres normes que celles qui auront été admises par cet accord. Ces normes, j'insiste, auront force de loi dans toute la Suisse dès l'instant où dix-huit cantons y auront adhéré ! Vous pouvez bien faire ce que vous voulez, et je sais ce que vous allez faire, mais ça m'est bien égal en définitive, parce que vous n'aurez que ce que vous méritez ! En réalité, nous serons soumis à des normes à l'élaboration desquelles nous ne pourrons pas participer : nous nous soumettrons donc sans pouvoir discuter.
Alors, faites-le, allez-y et bonne chance !
M. John Dupraz (R). Je suis toujours étonné de voir comment la globalisation, la libéralisation, peut passionner ce parlement... Pourtant, dans les années 90, à part quelques paysans têtus et bornés - comme nous étions considérés à l'époque - qui tiraient la sonnette d'alarme au sujet des accords de l'Uruguay Round qui ont été conclus à Marrakech, personne ne s'inquiétait, ce qui est regrettable.
Mesdames et Messieurs les députés, faites ce que vous voulez, mais les règles de l'OMC s'appliquent également à la Suisse et aux cantons ! Et de ces règles découlent certaines obligations. Une loi sur l'harmonisation des normes techniques en matière de construction a été votée dernièrement au niveau fédéral et tout cela est lié. Alors, quand vous faites l'amalgame entre la libéralisation du marché de l'électricité et ce projet de loi, vous me faites un peu sourire ! C'est bien joli de lancer un référendum contre la loi sur le marché de l'électricité, mais je vous souhaite bon courage, parce que si vous convainquez le peuple de refuser cette loi, il n'y aura pas de loi et il n'y aura pas de mesures d'accompagnement qui sont prévues dans la loi pour la libéralisation du marché, et nous aurons une libéralisation sauvage !
Et en fait dans cette affaire, M. Brélaz, votre petit copain écolo de Lausanne...
M. Claude Blanc. Pas si petit que ça !
M. John Dupraz. Excusez-moi, mais c'est un petit monsieur ! Parce que lui, avec le marché de l'électricité qu'il fiscalise, il encaisse au passage 20 millions par année pour la Ville de Lausanne ! C'est pour cela qu'il est opposé à la libéralisation ! Il ne fait pas payer le véritable prix à ses administrés : au passage il prend 20 millions pour les finances de sa ville !
L'amalgame que vous faites est un peu fort et, comme le dit M. Blanc, ne pas voter cette loi, c'est priver le Conseil d'Etat et les autorités du canton de participer aux négociations et à l'élaboration de ces règles !
Cela dit, faites tout ce que vous voudrez, moi j'attends le jour où une entreprise genevoise ira planter des clous en Valais - la Corse de la Suisse ! Vous pourrez fixer toutes les règles que vous voulez, jamais une entreprise qui n'a pas son siège en Valais pourra faire quoi que ce soit ! Certains copains qui se trouvent dans cette salle en ont fait la cruelle expérience ! Dans certains cantons de Suisse centrale, par exemple pour les NLFA, les entreprises romandes n'ont pratiquement obtenu aucun contrat. Il faut bien savoir que, dans les métiers du bâtiment et du génie civil, il y a une espèce de cartel, une mafia sauvage, qui se partage le boulot, et vous pourrez établir toutes les règles que vous voulez, cela ne changera rien !
M. Pierre Vanek (AdG), rapporteur de minorité. John Dupraz a un jugement sévère sur un certain nombre de milieux économiques qu'il a traités de «mafia sauvage», avis que je peux partager. Par contre, je ne partage pas du tout ses appréciations sur la loi sur l'électricité...
M. John Dupraz. On s'en fout !
M. Pierre Vanek, rapporteur de minorité. C'est vous qui avez abordé ce sujet, Monsieur Dupraz ! Dire qu'il faut voter une très mauvaise loi, parce que cela permettra d'avoir des mesures d'accompagnement, c'est comme si on disait qu'il faut accepter de vous faire conduire à l'abattoir pour pouvoir prendre les mesures de sécurité sur la route qui y conduit... (Exclamations.) Mais ce n'est pas le débat de ce soir, et vous cherchez à nous égarer avec ces propos !
Je reviens sur votre première intervention, Monsieur Blanc, avant que mon collègue ne vous ait irrité, dans laquelle vous nous avez dit que nous pouvions voter ce que nous voulions et que, de toute façon, le Conseil d'Etat pratiquait la politique de la chaise vide, que personne ne savait où il veut aller, que c'était le chenit complet... Eh bien, vous m'accorderez, Monsieur Blanc, que je sais où je veux aller, puisque je rejette cet accord et que je suis intervenu en substance dans les mêmes termes la première fois qu'il a été débattu dans cette enceinte.
Il est effectivement choquant et surprenant que les deux départements concernés ne soient pas représentés ici - ils se font tout petits - et que le Conseil d'Etat ne défende en aucune manière cette proposition. J'ai proposé dans mon rapport une explication à cela : c'est que le Conseil d'Etat, dans un premier temps - je le répète, car je l'ai dit dans la première mi-temps du débat avant la pause - avait émis des critiques fort pertinentes où il avait effectivement expliqué - contrairement à ce que vous avez dit, Monsieur Mauris - que cet accord était une coquille vide et qu'il instituait simplement un système de délégation.
La coquille est en effet aujourd'hui vide, mais les représentants des exécutifs cantonaux pourront la remplir, avec Dieu sait quoi... Comme vous l'avez expliqué, Monsieur Blanc, nous avons renvoyé ce projet de loi dans deux commissions distinctes, et personne n'a pu nous dire vraiment avec quoi on allait la remplir !
Monsieur Blanc, vous venez de nous dire qu'il s'agit en l'occurrence d'un accord intérieur à la Suisse et que cela n'avait rien à voir avec l'OMC et tout cela, que nous sommes entre braves Suisses aux bras noueux et que la réflexion de mon collègue Bernard Clerc n'est pas pertinente. Ce n'est pas exact, Monsieur Blanc ! J'attire votre attention sur le fait qu'à l'article 6, alinéa 2, sur les prescriptions intercantonales concernant les exigences en matière d'ouvrages, il est bien indiqué que ces prescriptions devront tenir compte des normes internationales harmonisées avec, pour le surplus, quelques dérogations au nom de conditions géographiques ou climatiques ou de protection du patrimoine, mais aucune espèce de dérogation, par exemple, pour des raisons de protection de l'environnement, de politique de l'énergie, ou autre ! Et ce processus de délégation, au nom de choses apparemment innocentes comme l'élimination d'entraves techniques au commerce, est en fait une manifestation de ce coup d'Etat rampant qu'on essaye de faire pour substituer le pouvoir économique au nom des bénéfices de certains et des règles du marché...
M. John Dupraz. Des noms !
M. Pierre Vanek, rapporteur de minorité. Par exemple, les mafias que vous évoquez avec beaucoup d'aisance dans un certain nombre de débats ! Vous l'avez dit tout à l'heure !
Cela signifie que ce projet de loi doit évidemment être rejeté.
J'aimerais revenir, Madame Gauthier, sur la position des Verts telle que vous l'avez présentée, indiquant que vous ne donneriez pas de consigne de vote, eu égard au fait que le projet n'était pas très bon, même plutôt mauvais, mais que vous aviez, je cite, «reçu toutes les garanties du département de l'intérieur, de l'agriculture, de l'environnement et de l'énergie». Je ne sais pas par quel canal, Madame Gauthier, vous avez reçu toutes ces garanties - peut-être les avez-vous reçues d'un conseiller d'Etat qui n'a pas daigné venir ici ce soir nous les présenter - mais en tout cas nous ne les avons pas eues en commission. Je n'ai pas assisté à toutes les séances de commission, mais j'ai lu tous les procès-verbaux pour faire le rapport et je n'y ai rien vu. Peut-être avez-vous eu une conversation privée avec M. Robert Cramer, qui est un homme que j'apprécie, mais de là à présenter cela comme une garantie reçue du département, il y a un pas... Il serait d'ailleurs bien emprunté de donner de telles garanties, parce que le contenu du texte légal qui nous est proposé ne lui permet en aucune manière de donner des garanties. Cette autorité intercantonale sera appelée, je cite, «à légiférer», entre guillemets, et on ne peut pas donner des garanties et fixer des limites claires aux pouvoirs de cette commission. Au contraire, la juriste du DAEL, Mme Vuillod, a indiqué que, précisément, des normes en matière de politique de l'environnement pourraient être revues à la baisse.
Je vais parler d'un autre juriste du département. Vous nous avez dit, Monsieur Blanc, dans votre exposé que j'ai apprécié comme toujours, que, évidemment, si nous pratiquions la politique de la chaise vide, nous ne serions pas là pour participer aux discussions sur les choses importantes et que nous nous retrouverions le bec dans l'eau à devoir subir les décisions des autres, car celles-ci s'appliqueraient automatiquement à tous les cantons... Ce n'est pas du tout ce qui nous a été dit en commission ! M. Goumaz, de la direction des affaires juridiques du département de M. Lamprecht, a été très clair à ce sujet. Il nous a précisé - et cela figure dans le PV numéro 102 de la commission des travaux de la séance du 9 janvier, car cette question s'est effectivement posée - que si nous n'étions pas partie prenante de cet accord, nous pourrions continuer à faire, à l'intérieur du canton, en matière de normes constructives notamment, ce que nous voulions.
Pour être plus constructif, je suis favorable à une harmonisation intercantonale pour toute une série de normes - pas forcément en matière de commerce - pour améliorer la législation, la simplifier, retenir les bonnes idées des autres et prêcher les nôtres outre-Versoix et outre-Sarine.
J'ai présenté ici quelque chose qui s'est fait - pas dans les cénacles d'écologistes fondamentalistes ou de rouges genevois - à l'assemblée générale des directeurs cantonaux de l'énergie qui ont travaillé très différemment en matière de prescriptions énergétiques dans un objectif d'harmonisation. Ils ont travaillé pour élaborer un document commun qui est une proposition - c'est le rôle d'un exécutif, de cette assemblée de directeurs de départements. C'est un document très bien fait, qui contient beaucoup de matières et de modules. C'est une proposition que les cantons peuvent reprendre à leur compte : il y a un noyau dur et des éléments qui peuvent être repris et insérés au rythme de chacun, en respectant les processus législatifs de chaque canton, dans leur propre dispositif législatif, ce qui préserve les droits des parlementaires, ce qui préserve les droits des citoyens de recourir au référendum, le cas échéant, si ces normes étaient trop ou pas assez rigoureuses. C'est un processus dans lequel il n'y a aucune volonté d'Alleingang, d'isolement ou de quoi que ce soit d'autre; c'est un processus d'élaboration d'une harmonisation intercantonale, conçu de manière démocratique...
La présidente. Monsieur Vanek, vous devez songer à conclure !
M. Pierre Vanek, rapporteur de minorité. Oui, j'y songe, Madame la présidente ! J'y songe !
Je vais donc conclure très rapidement. Dans l'esprit de ce que vous avez dit tout à l'heure, Monsieur Blanc, j'aimerais dire que personne n'a défendu cet accord avec enthousiasme. M. Mauris a dit qu'il n'était pas très bon, mais qu'il fallait faire confiance à nos représentants. D'autres ont dit la même chose... Si je reprends le rapport de majorité de M. Gardiol...
La présidente. Monsieur Vanek ! Monsieur Vanek, s'il vous plaît !
M. Pierre Vanek, rapporteur de minorité. Je finis ma phrase, Madame la présidente ! ...j'y vois - je m'apprêtais à vous les citer - à quatre ou cinq endroits des raisons suffisantes, y compris du point de vue d'un libéral, de rejeter cet accord. Nous pourrons toujours y revenir. Le Conseil d'Etat pourra nous faire une nouvelle proposition, mais ce soir arrêtons ce cinéma et rejetons cet accord !
Mme Janine Hagmann (L). Vous le savez, je ne suis pas une spécialiste de la construction, je m'y connais mieux en matière d'enseignement. Mais si je prends la parole ce soir, c'est parce que j'ai l'impression d'entendre exactement les mêmes débats que ceux qui ont eu lieu dans cette enceinte il y a deux ans, quand Genève devait adhérer à des concordats, à des regroupements intercantonaux. Les mêmes groupes politiques disaient que cela allait être la catastrophe... Déficit démocratique : c'était l'expression que vous aviez tout le temps à la bouche pour essayer de nous dissuader d'adhérer à ces concordats ! Maintenant que nous avons adhéré à certains concordats, nous nous rendons compte que ce n'est pas du tout une catastrophe, bien au contraire ! Cela permet d'avoir une vision d'ensemble, d'élargir les débats, de penser «région».
Monsieur Vanek, vous avez parlé de «coquille vide»... Une coquille vide est faite pour être remplie ! Si nous ne sommes pas là pour y mettre quelque chose, c'est catastrophique, car ce sont les autres qui vont le faire à notre place ! Arrêtez de croire que Genève est le nombril de la Suisse ! Ce n'est vraiment pas le cas ! Nous avons aussi besoin des autres cantons, et, pour une question de principe, je désire que nous entrions dans ce concordat.
M. Gardiol m'a parlé de son rapport dont il est tout à fait convaincu : il désire véritablement... (L'oratrice est interpellée par M. Vanek.) Oui, Monsieur ! Il veut...
La présidente. Monsieur Vanek, laissez parler Mme Hagmann !
Mme Janine Hagmann. ...que nous acceptions d'entrer dans ce concordat !
M. Olivier Vaucher (L), rapporteur de majorité ad interim. En ce qui me concerne, Monsieur Vanek, j'ai lu ce rapport, puisque j'y ai participé. J'aimerais juste vous dire que M. Gardiol, contrairement à ce que vous prétendez, n'a pas sous-entendu dans son texte qu'il n'était pas favorable à cet accord... (L'orateur est interpellé par M. Vanek.) S'il vous plaît, Monsieur Vanek, laissez-moi terminer, je vous ai laissé parler !
M. Clerc - comme vous-même, d'ailleurs - a une fois de plus mélangé les sujets en évoquant ici son thème favori : la mondialisation néolibérale ! En boutade, je vous dirai qu'on a connu - elle est heureusement éteinte - la mondialisation néocommuniste... Messieurs Vanek et Clerc, il ne faut pas mélanger les sujets ! Vous avez tous deux parlé de cet accord sans relever le point essentiel sur lequel il porte - vous pouvez d'ailleurs le trouver en page 12, annexe A - il s'agit d'un accord sur les produits de construction ! Ces éléments - de 1 à 6 - sont la base de l'accord pour compléter les normes européennes sur les produits de la construction. Je tenais à le rappeler, et je vous remercie, Monsieur Dupraz, de l'avoir dit fort pertinemment et d'avoir remis ainsi l'église au milieu du village.
Monsieur Vanek, vous dites regretter que les départements concernés soient absents. Si un ou deux conseillers d'Etat sont absents, le principal conseiller d'Etat concerné quant à l'élaboration et au suivi de ce projet de loi est bien là : je veux parler du représentant du département de l'économie, de l'emploi et des affaires extérieures ! Preuve en est que ce projet de loi avait tout d'abord été renvoyé à son département ! Et si je ne me trompe pas, non seulement M. Lamprecht en est bien le président mais, de plus, il est le président du Conseil d'Etat ! Il est donc tout à fait à même de pouvoir répondre à vos préoccupations.
D'autre part, Monsieur Vanek - et Monsieur Brunier, ensuite - vous avez dit que les députés n'auront rien à dire : c'est faux ! En effet, le délégué du Conseil d'Etat pourra, voire même devra, si nous le lui demandons, nous consulter avant de s'engager ! Par son chèque en blanc... (L'orateur est interpellé.) Mais, Monsieur, nos pouvoirs nous permettent de demander des comptes au Conseil d'Etat ! Vous avez assez su le faire avec l'office des poursuites ! Quand on veut... (L'orateur est interpellé.)
La présidente. Monsieur Vanek, Monsieur Velasco, laissez M. Vaucher terminer son intervention !
M. Olivier Vaucher, rapporteur de majorité ad interim. Quand on veut, on peut demander des comptes, Monsieur Vanek !
J'aimerais simplement dire en conclusion, contrairement à ce que certains préopinants ont dit, que ne pas voter oui à ce projet de loi, c'est renoncer à défendre nos lois et règlements auxquels nous sommes attachés. C'est laisser aux autres le soin de décider à notre place, sans avoir eu la possibilité de nous exprimer. La politique de la chaise vide que vous proposez est une mauvaise politique ! Et vous le savez bien, Monsieur Vanek, les conséquences à moyen terme en seront certainement bien plus dommageables pour notre canton !
C'est pour défendre nos domaines de compétences que la majorité souhaite conclure cet accord intercantonal, malgré ses imperfections. C'est la raison pour laquelle je vous invite, Mesdames et Messieurs les députés, à voter ce projet de loi, suivant ainsi le rapport de majorité de M. Gardiol.
La présidente. Mesdames et Messieurs les députés, il reste trois intervenants : je vous propose de clore la liste, et puis nous passerons au vote d'entrée en matière. Vous avez la parole, Monsieur Glatz.
M. Philippe Glatz (PDC). En écoutant ce débat, je me suis tourné vers un de mes collègues pour lui demander si nous étions encore au même point de l'ordre du jour, ce qu'il m'a confirmé... En effet, à force de vouloir brandir l'épouvantail de la mondialisation et de la globalisation, nous sommes sortis du cadre de ce qui nous est proposé aujourd'hui, soit la possibilité de passer un accord intercantonal sur l'élimination des entraves techniques.
Je n'ai pas participé aux travaux de la commission, mais, par contre, j'ai lu l'annexe de cet accord intercantonal qui est très simple - elle figure aux pages 7 à 11 du rapport. L'essentiel est défini dans l'article 2, page 7, et je me demande en le lisant si nous comprenons bien les mêmes choses et si la langue française reste perméable à tout un chacun.
Il est écrit : «Au sens du présent accord, on entend par : a. Entraves techniques au commerce : les entraves aux échanges transfrontaliers de produits qui résultent de la divergence des prescriptions...» Et puis, au paragraphe suivant, il est dit ce que l'on entend par prescription : «b. Prescriptions techniques : les règles de droit fixant des exigences, dont la réalisation constitue une condition de l'offre [...] notamment sur : 1. La composition, les caractéristiques, l'emballage, l'étiquetage ou le signe de conformité des produits...».
Ici, on demande simplement une certaine harmonie sur la conformité des produits, ce que les consommateurs réclament : ils veulent en effet avoir le même étiquetage pour un même produit, qu'ils l'achètent à Genève ou à Lausanne. C'est une revendication légitime de la part des consommateurs, et nous voudrions nous opposer à cela ?
Il est donc demandé que la production, le transport ou l'entreposage des produits soient conformes au niveau intercantonal, par exemple que les exigences soient les mêmes s'agissant des produits congelés à Lausanne ou à Genève. Y a-t-il quelque chose d'extraordinaire à cela ?
L'accord proposé porte encore sur «les essais, l'évaluation de conformité, l'enregistrement, l'homologation ou la procédure d'obtention du signe de conformité». Il faut que les choses soient conformes, que, par exemple, une prise achetée à Lausanne puisse être branchée à Genève...
Monsieur Clerc, vous avez très peur que nous risquions de perdre la possibilité de légiférer de manière indépendante... J'ai également eu quant à moi un petit souci sur ce point. Or, je lis en haut de la page 8 ce que l'on entend par «normes techniques» : il est explicitement écrit : «les règles, directives ou particularités sans contrainte juridique...» Monsieur Clerc, si notre parlement vote une loi, cela constitue une contrainte juridique : ce n'est donc plus une norme technique. Nous conservons donc toujours le droit d'édicter des contraintes juridiques différentes de celles du canton du Valais, du canton de Vaud ou du canton de Fribourg !
Voilà pourquoi j'aimerais que vous m'expliquiez en quoi cet accord, qui me semble extrêmement simple, pourrait détruire notre autonomie cantonale, notre possibilité de légiférer ! Je ne comprends pas, vu la teneur du texte de cet accord et des explications que je vous ai données, que vous puissiez vous y opposer, d'autant qu'une harmonisation en Suisse est tout de même nécessaire. Vous parlez de l'Europe, de votre désir que nous adhérions à l'Europe, et, aujourd'hui, vous refusez une simple harmonisation intercantonale ? Expliquez-moi plus avant, s'il vous plaît, en quoi notre parlement se verrait démuni d'un certain nombre de ses prérogatives !
Mme Morgane Gauthier (Ve). Je tiens simplement à revenir sur l'assurance que nous a donnée le département, que j'ai évoquée dans ma précédente intervention. Il s'agit d'une lettre du 6 avril de M. Brutsch qui a été adressée à M. Carlo Lamprecht et dont nous avons eu copie. Je vais vous en épargner la lecture, mais cette lettre donne tout à fait l'assurance que cet accord n'aura pas de conséquences sur l'énergie, en tout cas à Genève.
Cela n'empêche pas le fait que nous ne soyons absolument pas d'accord avec cette structure intercantonale. C'est tout ce que je voulais dire.
M. Claude Blanc (PDC). Je ne sais pas pourquoi je m'épuise à essayer de faire boire des ânes qui n'ont pas soif, mais quand même ! (Exclamations.) Mais quand même !
M. le député et conseiller national Dupraz a dit tout à l'heure que les Chambres fédérales avaient voté une loi fédérale sur les entraves techniques au commerce à l'intérieur de la Suisse, mais il a oublié d'ajouter que les cantons ont obtenu de la Confédération qu'en matière de règles constructives ils ne voulaient pas être soumis à une loi fédérale et qu'ils demandaient la possibilité d'être soumis à un concordat intercantonal. Ce concordat intercantonal se substitue donc à la loi fédérale comme l'Assemblée fédérale lui en a donné le mandat. Et c'est pour cela que les cantons doivent établir eux-mêmes leurs règles. Dans le fond, les cantons se sont réservé la possibilité de faire eux-mêmes quelque chose que la Confédération aurait pu faire pour eux. Vous me direz que ce n'est peut-être pas la meilleure solution, mais c'est comme cela !
S'il est vrai qu'à l'intérieur du canton nous gardons notre souveraineté, il est vrai aussi qu'en ce qui concerne les règles constructives, quand nos entreprises voudront aller soumissionner dans le reste de la Suisse, elles devront se conformer aux règles établies par le concordat intercantonal. L'article 6 du concordat... Non, ce n'est pas un concordat, c'est un accord intercantonal... Enfin bref, c'est une question de vocabulaire ! L'article 6 de cet accord qui donne les principes dit en son alinéa 3 : «Ces prescriptions sont obligatoires pour les cantons», tous les cantons !
Une voix. Mais, non !
M. Claude Blanc. Si, parfaitement ! Ces normes seront applicables dans l'ensemble de la Suisse dès l'instant où dix-huit cantons au moins auront adhéré à l'accord intercantonal ! Ça, c'est sûr !
C'est la même chose à l'article 7. Les principes sont fixés et un autre alinéa dit : «Ces directives sont obligatoires pour les cantons.» Idem pour l'article 8 concernant les directives dans le domaine de la mise sur le marché des produits de construction : «Ces directives d'exécution sont obligatoires pour les cantons.» Que nous y soyons ou pas, ces directives sont obligatoires pour les cantons !
Alors, si vous ne voulez pas être partie prenante dans les discussions, à votre aise, Mesdames et Messieurs les députés !
M. Carlo Lamprecht. Le débat est vif, contradictoire et beaucoup de choses ont été dites. Je voudrais vous donner ici très simplement l'avis du Conseil d'Etat.
Il est vrai que le projet qui nous occupe ce soir est éminemment technique. Il faut savoir que la Suisse connaît actuellement vingt-six législations cantonales en matière de produits de construction, plus une législation fédérale. En effet, en vertu de la Constitution fédérale, la Confédération est compétente pour édicter des règles concernant la mise sur le marché de produits. C'est ainsi que l'Assemblée fédérale a adopté une loi sur les produits de construction qui est entrée en vigueur au 1er janvier de cette année. En revanche, les règles de construction relatives aux ouvrages restent, en principe, de la compétence des cantons.
On voit ainsi qu'un certain nombre de conflits peuvent survenir entre le droit fédéral et le droit cantonal, en ce sens que des produits jugés conformes pour leur mise sur les marchés dans l'ensemble de la Suisse - ce qui relève de la compétence fédérale - ne pourraient pas être intégrés dans un ouvrage à Genève, Schwyz, ou dans les Grisons, en vertu des règles de construction qui y prévalent et qui sont, en principe, de la compétence cantonale.
Ces contradictions ne sont pas très opportunes, car un produit jugé techniquement conforme au niveau suisse devrait effectivement pouvoir être utilisé dans toute la Suisse. Alors une des solutions aurait été évidemment que la Confédération légifère également sur les ouvrages, dans le cadre de la loi sur les produits de construction. Elle en a d'ailleurs eu l'intention au départ, mais la Conférence des gouvernements cantonaux s'y est opposée, voulant préserver le principe formel de la compétence des cantons, tout en reconnaissant la pertinence d'une harmonisation dans ce domaine.
C'est ainsi, Mesdames et Messieurs les députés, qu'est né le projet d'accord intercantonal qui vous est soumis et qui vise à la fois à réaliser l'harmonisation tout en préservant la compétence formelle des cantons. Il ne faut toutefois pas se leurrer : cette compétence est déjà actuellement très limitée, puisque le droit cantonal ne peut pas être une entrave à l'application du droit fédéral en raison de la supériorité de ce dernier.
Ce n'est donc pas, contrairement aux craintes émises par certains d'entre vous, à une large perte de pouvoir à laquelle nous consentirions en adhérant à cet accord... (Exclamations. La présidente agite la cloche.) Ce sont des problèmes très techniques qui devront être traités dans le cadre de cette conférence qui, dans la plupart des cantons, sont régis par des règlements édictés par les gouvernements et non pas par des lois votées par les parlements.
Alors, Mesdames et Messieurs les députés, nous pouvons pratiquer la politique de la chaise vide, comme vous le suggère le rapporteur de minorité... Nous devrions alors accepter les normes édictées par l'autorité intercantonale à l'élaboration desquelles nous n'aurions pas participé, cela a déjà été dit ici. C'est vrai, théoriquement nous pourrions dire non, mais je pense que la position du village d'Astérix sera difficilement tenable à terme... Comme vous le savez, d'autres cantons s'apprêtent à signer cet accord. En janvier 2001, onze cantons sur dix-huit l'avaient déjà signé. Et cela a continué.
Alors, nous ferions un peu comme la Suisse avec l'Union européenne... (L'orateur est interpellé par M. Vanek.)
La présidente. Monsieur Vanek, s'il vous plaît ! Monsieur Vanek, laissez parler M. le conseiller d'Etat !
M. Carlo Lamprecht, président du Conseil d'Etat. Je vous ai écouté pendant une heure tout à l'heure ! (L'orateur est interpellé.) Merci, vous êtes très aimable ! Je vous remercie beaucoup ! Nous ferions ainsi comme la Suisse avec l'Union européenne, qui passe son temps à adapter la législation pour la rendre eurocompatible, sans avoir pu dire un seul mot sur le contenu de ce droit européen qui finit néanmoins par s'imposer à nous... Alors, si c'est là la souveraineté que vous revendiquez, je crois que nous n'avons pas la même conception de ce mot ! A la souveraineté formelle, je préfère, pour ma part, la faculté de pouvoir discuter, de pouvoir convaincre et de voter sur des règles qui doivent être harmonisées, tout en admettant démocratiquement la possibilité d'être mis en minorité par les autres. C'est justement une des règles fondamentales de la démocratie.
Avant que vous ne passiez au vote, j'aimerais encore vous rendre attentifs à deux considérations. La première c'est que l'harmonisation se fera, avec ou sans Genève. Si les cantons n'arrivent pas à trouver en leur sein une solution, la Confédération prendra le pouvoir de décréter à notre place. Cela se passera d'autant plus vite, Mesdames et Messieurs les députés, que notre pays a besoin d'une législation qui soit harmonisée pour pouvoir discuter, en particulier avec l'Union européenne, d'un élargissement des accords bilatéraux pour permettre la libre circulation des produits de construction.
La deuxième remarque est d'ordre beaucoup plus politique. Votre parlement à maintes reprises - cela a été dit aussi ce soir - a marqué sa détermination ferme de voir la Suisse intégrer le plus rapidement possible l'Union européenne. Cela supposera des transferts de compétences d'un tout autre ordre que celui que vous peinez aujourd'hui à vouloir concéder. En refusant d'accéder à cet accord, vous montreriez une belle contradiction entre vos actes et vos discours ! Alors je gage pour ma part que la raison l'emportera et que, même si le texte de cet accord n'est pas exactement celui que nous aurions voulu, car il y manque certaines précisions, vous ne privilégierez toutefois pas pour notre canton la voie de l'Alleingang ! (Applaudissements.)
Mis aux voix, ce projet est adopté en premier débat.
M. Olivier Vaucher (L), rapporteur de majorité ad interim. Madame la présidente, j'aimerais vous demander que la lettre de M. Brutsch adressée à M. Lamprecht, évoquée par Mme la députée «Verte» tout à l'heure... (Rires.) figure au Mémorial.
La présidente. Il s'agit de Mme Gauthier, Monsieur Vaucher !
M. Olivier Vaucher, rapporteur de majorité ad interim. Mme Gauthier, merci !
La présidente. Cette lettre figurera donc au Mémorial, comme vous le souhaitez, Monsieur le député !
lettre
Deuxième débat
Mis aux voix, le titre et le préambule sont adoptés, de même que les articles1 à 3.
Troisième débat
M. Pierre Vanek (AdG), rapporteur de minorité. Madame la présidente, je demande l'appel nominal sur le vote final de ce projet de loi. (Exclamations.)
La présidente. Bien, cette demande étant appuyée, je demande à tous les députés de regagner leur place pour que nous puissions procéder à l'appel nominal. (M. John Dupraz proteste.) Monsieur Dupraz, à peu près tous les socialistes et l'Alliance de gauche ont soutenu cette demande ! (Exclamations.) Monsieur le secrétaire, je vous prie de bien vouloir procéder à l'appel nominal.
Celles et ceux qui acceptent ce projet répondront oui, et celles et ceux qui le rejettent répondront non.
Ce projet est adopté en troisième débat par 43 oui contre 37 non et 6 abstentions.
Ont voté oui (43) :
Bernard Annen (L)
Michel Balestra (L)
Florian Barro (L)
Luc Barthassat (DC)
Roger Beer (R)
Jacques Béné (L)
Janine Berberat (L)
Claude Blanc (DC)
Anne Briol (Ve)
Juliette Buffat (L)
Marie-Françoise de Tassigny (R)
Gilles Desplanches (L)
Hervé Dessimoz (R)
Jean-Claude Dessuet (L)
Hubert Dethurens (DC)
Daniel Ducommun (R)
Pierre Ducrest (L)
Michel Ducret (R)
John Dupraz (R)
Henri Duvillard (DC)
Jacques Fritz (L)
Pierre Froidevaux (R)
Philippe Glatz (DC)
Nelly Guichard (DC)
Janine Hagmann (L)
David Hiler (Ve)
René Koechlin (L)
Bernard Lescaze (R)
Armand Lombard (L)
Alain-Dominique Mauris (L)
Etienne Membrez (DC)
Jean-Louis Mory (R)
Geneviève Mottet-Durand (L)
Vérène Nicollier (L)
Jean-Marc Odier (R)
Michel Parrat (DC)
Catherine Passaplan (DC)
Pierre-Louis Portier (DC)
Jean Rémy Roulet (L)
Stéphanie Ruegsegger (DC)
Louis Serex (R)
Walter Spinucci (R)
Olivier Vaucher (L)
Ont voté non (37) :
Charles Beer (S)
Marie-Paule Blanchard-Queloz (AG)
Jacques Boesch (AG)
Dolorès Loly Bolay (HP)
Christian Brunier (S)
Nicole Castioni-Jaquet (S)
Alain Charbonnier (S)
Bernard Clerc (AG)
Jacqueline Cogne (S)
Jean-François Courvoisier (S)
Anita Cuénod (AG)
Régis de Battista (S)
Jeannine de Haller (AG)
Erica Deuber Ziegler (AG)
René Ecuyer (AG)
Alain Etienne (S)
Laurence Fehlmann Rielle (S)
Christian Ferrazino (AG)
Magdalena Filipowski (AG)
Alexandra Gobet (S)
Gilles Godinat (AG)
Mireille Gossauer-Zurcher (S)
Mariane Grobet-Wellner (S)
Christian Grobet (AG)
Cécile Guendouz (AG)
Dominique Hausser (S)
Danielle Oppliger (AG)
Rémy Pagani (AG)
Jacques-Eric Richard (S)
Albert Rodrik (S)
Christine Sayegh (S)
Françoise Schenk-Gottret (S)
Myriam Sormanni-Lonfat (HP)
Jean Spielmann (AG)
Pierre Vanek (AG)
Alberto Velasco (S)
Salika Wenger (AG)
Se sont abstenus (6) :
Roberto Broggini (Ve)
Fabienne Bugnon (Ve)
Pierre-Alain Cristin (S)
Anita Frei (Ve)
Morgane Gauthier (Ve)
Antonio Hodgers (Ve)
Etaient excusés à la séance (6) :
Nicolas Brunschwig (L)
Jean-Pierre Gardiol (L)
Michel Halpérin (L)
Yvonne Humbert (L)
Pierre Marti (DC)
Pierre Meyll (AG)
Etaient absents au moment du vote (7) :
Esther Alder (Ve)
Thomas Büchi (R)
Georges Krebs (Ve)
Louiza Mottaz (Ve)
Véronique Pürro (S)
Micheline Spoerri (L)
Pierre-Pascal Visseur (R)
Présidence :
Mme Elisabeth Reusse-Decrey, présidente
La loi est ainsi conçue :
Loi(8215)
autorisant le Conseil d'Etat à adhérer à l'accord intercantonal sur l'élimination des entraves techniques au commerce (L 5 07.0)
Le GRAND CONSEIL de la République et canton de Genève,
décrète ce qui suit :
Art. 1 Adhésion
Le Conseil d'Etat est autorisé à adhérer, au nom de la République et canton de Genève, à l'accord intercantonal sur l'élimination des entraves techniques au commerce (ci-après : l'accord intercantonal), adopté le 23 octobre 1998 par la Conférence suisse des gouvernements cantonaux. Le texte de l'accord est annexé à la présente loi.
Art. 2 Publication
La publication des directives d'exécution et prescriptions obligatoires, conformément à l'article 11 de l'accord intercantonal, est régie par la loi sur la forme, la publication et la promulgation des actes officiels, du 8 décembre 1956 et son règlement d'exécution, du 15 janvier 1957.
Art. 3 Entrée en vigueur
L'entrée en vigueur pour le canton de Genève de l'accord intercantonal est fixée conformément à l'article 13 dudit accord.
Art. 2 Définitions
Art. 3a, lit. a, de la loi fédérale sur les entraves techniques au commerce (LETC) du 6 octobre 1995, en vigueur depuis le 1er juillet 1996; RS 946.51
Art. 3b, lit. b, LETC
Art. 3a, lit. c, LETC
Art. 3 Organisation
Art. 4 Tâches et compétences
Art. 5 Prise de décisions
Art. 6 Principes
Art. 7 Principes
Art. 8 Directives dans le domaine de la mise sur le marché des produits de construction
Art. 4 (5) de la Directive sur les produits de construction (Directive 89/106/CEE relative au rapprochement des prescriptions juridiques et administratives des Etats membres de l'UE sur les produits de construction; JOCE no L 40 du 12.2.1989, p. 12, modifiée par la directive 93/68/CE du Conseil du 22.7.1993 (JOCE no L 220 du 30.8.1993, p. 1); cette directive peut être obtenue auprès de l'Office central fédéral des imprimés et du matériel, 3003 Berne ou auprès du Centre suisse d'informations pour les règles techniques (switec), Mühlebachstrasse 54, 8008 Zurich)
Déclaration no 2 au procès-verbal de la directive sur les produits de construction
Art. 9 Principes
Art. 10 Répartition des coûts
Art. 11 Publication des prescriptions et des directives
Art. 12 Adhésion et dénonciation
Art. 13 Entrée en vigueur