République et canton de Genève

Grand Conseil

P 1247-A
22. Rapport de la commission des pétitions chargée d'étudier la pétition concernant les immeubles occupés par les squatters. ( -)P1247
Rapport de Mme Laurence Fehlmann Rielle (S), commission des pétitions

Sous la présidence de Mme Louiza Mottaz, puis de M. Louis Serex, la Commission des pétitions a examiné la pétition 1247 lors de ses séances des 31 mai et 1er novembre 1999.

L'un des pétitionnaires explique les raisons qui ont motivé le dépôt de cette pétition et qui résident dans de nombreuses plaintes entendues au sujet de l'aspect de certaines façades d'immeubles occupés par des squatters : il cite à cet égard diverses enseignes, banderoles et photographies apposées sur les façades. Ces réactions l'ont incité à intervenir auprès de la police des constructions qui est responsable de l'aspect extérieur des immeubles et qui est généralement très vigilante à cet égard. En effet, quand un propriétaire souhaite apporter une nouveauté sur la façade de son immeuble, il doit demander une autorisation en bonne et due forme.

M. Naef transmet le contenu de la réponse de la police des constructions. Il met en évidence une phrase où il est dit que, la situation du squat dont il est question n'étant pas définitive, le département ne peut donc traiter ce cas selon les règles usuelles. Le pétitionnaire en déduit qu'il y a deux poids, deux mesures. Le but de la pétition est de rendre le Grand Conseil attentif à cette question et de faire en sorte que la loi soit appliquée de la même façon pour tout le monde.

Il est apparu lors de la discussion qu'il n'y a qu'un squat faisant l'objet des réclamations des pétitionnaires : il s'agit de Rhino (24, bd des Philosophes). Les pétitionnaires ont reconnu qu'ils n'étaient pas perturbés dans leur vie quotidienne par ce squat mais qu'il s'agissait plutôt d'une question de principe. Ils n'ont jamais eu de contacts directs avec les habitants du squat.

Certains commissaires sont sensibles à l'argument de l'inégalité de traitement, mais d'autres relèvent que les décorations incriminées sont temporaires et apportent même une touche d'originalité dans ce quartier un peu austère.

Plusieurs commissaires relèvent que la situation du service de la police des constructions est délicate car appliquer strictement la loi aux squatters revient à cautionner une situation illégale. C'est pourquoi il a évoqué dans sa lettre la situation provisoire que constitue le squat.

A noter que suite à cette audition, l'un des pétitionnaires, en l'occurrence M. Naef, a fait parvenir aux commissaires un article paru dans le Nouveau Libéral, No 38 du 11 mars 1999, dont l'auteur est M. Charles Poncet. Cet article outrancier, attaquant très durement les squatters et leur mode de vie, a profondément choqué plusieurs commissaires qui ont jugé pour le moins inélégant ce lien avec la pétition. Alors que les pétitionnaires se sont défendus de porter un jugement sur les squats et ont déclaré se concentrer sur le problème de l'aspect extérieur des immeubles, ce dérapage donnait plutôt l'impression du contraire.

Suite à cet incident, quelques députées étaient tentées de demander le classement de la pétition et d'autres, peu convaincus par l'argument de la police des constructions, souhaitaient le renvoi au Conseil d'Etat. Finalement, compte tenu de l'importance du débat sur le problème des squats, la majorité de la commission a opté pour le dépôt sur le bureau du Grand Conseil par 6 voix pour (2 AdG, 2 S, 2 Ve), 4 contre (2 DC, 1 L, 1 R) et une abstention (R).

Nous vous invitons donc, Mesdames et Messieurs les députés, à suivre ces conclusions.

Pétition(1247)

concernant les immeubles occupés par les squatters

Mesdames etMessieurs les députés,

Les soussignés prient le Grand Conseil d'intervenir auprès des Autorités compétentes de l'Etat pour que les règles d'urbanisme et de police des constructions soient appliquées même aux immeubles occupés par les squatters.

Cette intervention est motivée par le fait que l'Etat n'intervient pas pour faire respecter ce qu'il exige de tout propriétaire dès l'instant que les immeubles sont occupés par des squatters et tolère que des "; décorations ", même lumineuses et des banderoles qui subsistent en permanence sur certains immeubles comme, par exemple, sur celui de l'angle du boulevard de la Tour et du boulevard des Philosophes.

N.B. : 70 signatures

M. .

7, boulevard des Philosophes1205 Genève

6Débat

M. Pierre Ducrest (L). Lorsque j'ai vu les conclusions de la commission des pétitions, j'ai cru tomber à la renverse...

Ainsi donc, d'après les conclusions d'une majorité de cette commission, il s'agit pratiquement, tacitement, de légaliser le squat, et les squatters, bien entendu ! Ainsi donc, il est possible, dans un squat, d'échapper à tout contrôle administratif, d'échapper à toute contrainte légale : c'est comme cela que le voit la majorité des commissaires de la commission des pétitions...

Mais alors, Mesdames et Messieurs les députés, il faut conseiller aux propriétaires de squatter leur propre immeuble ! Si ces immeubles sont squattés, ils pourront ainsi échapper à toute une kyrielle de lois et de règlements : par exemple, la loi sur les constructions et installations; par exemple, la LDTR - la fameuse loi sur les démolitions, transformations et rénovations -et d'autres lois et d'autres règlements ! Et puis, ce faisant, ils pourront démolir, transformer, voire rénover leur immeuble en toute impunité. Peut-être même pourront-ils y mettre des enseignes sans demander à quiconque l'autorisation de le faire, comme on en voit sur l'immeuble squatté par le fameux groupe RHINO !

On croit aussi rêver en entendant la police des constructions parler d'une situation provisoire... Le squat RHINO est-il provisoire ? Il dure depuis trop longtemps !

Il faut penser, en plus, que cet immeuble se trouve dans la zone faziste, qui est régie par la loi Blondel. Cette loi très contraignante fait passer sous les fourches caudines de la commission des monuments et des sites et autres associations, tous les propriétaires ayant des velléités de démolir, de transformer, de rénover, voire de construire ne serait-ce qu'un seul édicule... Une fois de plus, on croit rêver !

Alors, comment, Mesdames et Messieurs les députés, peut-on déposer une telle pétition sur le bureau du Grand Conseil ? C'est impossible ! C'est pourquoi le groupe libéral vous demande de la renvoyer là où elle doit être renvoyée, c'est-à-dire au Conseil d'Etat ! 

Mme Laurence Fehlmann Rielle (S), rapporteuse. J'aimerais vous dire, Monsieur Ducrest, qu'il ne faut pas confondre la légalisation des squats avec la possibilité de mettre quelques décorations, comme c'est effectivement le cas chez RHINO. Les pétitionnaires ont eux-mêmes admis, lors de l'audition, que les squatters de RHINO ne les dérangeaient pas, en dehors de ces décorations. C'est un peu l'exception qui confirme la règle.

Il n'y a donc pas lieu de s'émouvoir, et je vous recommande effectivement le dépôt de cette pétition sur le bureau du Grand Conseil.

M. Jean-Marc Odier (R). Sans porter de jugement sur le problème des squats, comment se fait-il qu'il faille demander une autorisation et payer pour mettre une enseigne sur un immeuble et que ce ne soit pas la même chose pour tout le monde ? Cette pétition soulève le problème de l'égalité de traitement et pas seulement le problème du squat !

C'est effectivement, à mon avis, une question de principe : il ne faut pas qu'il y ait deux poids, deux mesures ! Je ne comprends pas du tout la position du département et la directrice de la police des constructions qui, dans un courrier s'adressant aux pétitionnaires, explique : «Le département ne peut donc pas la traiter selon les règles usuelles en la matière...». C'est à mon avis tout simplement scandaleux ! Car les règles et les lois doivent être valables pour tous !

Alors, si ce parlement ne veut pas renvoyer cette pétition au Conseil d'Etat, je suggère que nous conseillions à tous ceux qui payent et demandent des autorisations de cesser de le faire, puisque certains n'observent pas ces règles. 

Mme Myriam Sormanni-Lonfat (HP). Ce que je vais dire ne va malheureusement pas plaire à tout le monde... J'abonde en partie dans le sens des propos tenus par M. Jean-Marc Odier.

Vous savez que j'ai fréquenté RHINO, mais ce n'est pas du tout par rapport à cela que je m'exprime. Du reste, mes enfants vont à l'école du cirque de MottAttom qui est aussi un squat.

Par exemple, certaines personnes ont des patentes d'alcool en bonne et due forme et d'autres délivrent de l'alcool sans aucune autorisation. La construction du jardin d'hiver sur le site d'Artamis a été faite sans autorisation. J'avais essayé de m'en ouvrir à l'époque avec le président Laurent Moutinot, qui n'avait pas voulu entrer en matière...

Il me semble donc juste de dire que les lois et les règlements sont faits pour tout le monde ! Même s'il s'agit de copains de certains députés de gauche qui les soutiennent, ils doivent être soumis aux mêmes règlements que tout le monde ! Je suis désolée de vous le dire ! 

M. Pierre-Louis Portier (PDC). J'aimerais rebondir, au nom du groupe démocrate-chrétien, sur l'intervention de notre collègue Odier.

Je relève combien il est difficile, parfois, pour les collectivités publiques de faire respecter les règlements en matière d'enseignes et de publicité dans les zones dignes de protection.

Or, dans le cadre du squat RHINO, nous sommes dans un quartier tout à fait digne de protection, au milieu d'un patrimoine immobilier tout à fait intéressant. Qui plus est, je considère pour ma part que c'est une véritable provocation de recevoir à la maison une carte postale qui fait la publicité de ces affichages sauvages !

Aussi, Mesdames et Messieurs les députés, le groupe démocrate-chrétien s'opposera également au dépôt de cette pétition. 

M. John Dupraz (R). J'ai lu le rapport de la commission avec intérêt, mais je suis étonné que le Conseil d'Etat, tout particulièrement le DAEL, se permette de traiter différemment les citoyens en octroyant des privilèges pour des hors-la-loi, un quarteron de voyous... (Exclamations.) - de voyous, oui - qui se croient tout permis !

Mesdames et Messieurs les députés, essayez d'ouvrir une fenêtre ou un Vélux dans un toit sans autorisation, et vous verrez comment vous serez traités ! Je trouve scandaleux que l'Etat octroie des privilèges à des gens qui se mettent hors la société et hors la loi ! Il n'est pas acceptable que l'Etat ne traite pas de la même manière les habitants de ce canton, en accordant des privilèges - puisqu'ils ne sont pas soumis aux mêmes procédures que les autres citoyens - à ceux qui occupent illégalement un immeuble !

Il me semble temps que le Conseil d'Etat se rende compte que la population en a marre. Cette pétition ne devrait pas être traitée par le département de justice et police et des transports, mais par le département de l'aménagement, de l'équipement et du logement, qui n'est pas présent... Il est parfaitement scandaleux - je le répète - que le Conseil d'Etat persiste dans cette voie de privilégier des gens qui se moquent de tout le monde, qui se moquent de la loi ! La loi est valable pour tout le monde et les citoyens réclament l'égalité de traitement !

C'est pourquoi, comme mes préopinants, je propose de renvoyer cette pétition au Conseil d'Etat et pas de la déposer sur le bureau du Grand Conseil.

M. René Koechlin (L). L'immeuble en cause, dont l'appellation RHINO est incontrôlée, est occupé depuis des années par des squatters de manière tout aussi incontrôlée...

La durée de cette occupation illicite laisse planer le doute sur le caractère provisoire que la police des constructions voudrait lui conférer. Il est vrai que dans cette République, le provisoire qui dure est monnaie courante. J'en veux pour preuve les baraquements de la place Sturm... (Exclamations.) ...qui ont duré au moins quarante ans et ceux dont sont parsemés les quais et qui viennent ornementer la rade - qui est considérée comme un site protégé, que je sache - sans parler de toutes les petites bicoques qui parsèment notre campagne.

Toute intervention dans la zone où est situé l'immeuble en cause doit faire l'objet d'une autorisation sous contrôle de la police des constructions, avec préavis de la CMNS, ou du service des monuments et sites, de la commission d'architecture, de tous les services techniques concernés et j'en passe... Mais si l'immeuble est squatté, qu'on se le dise, il échappe à tous ces contrôles, à tous ces préavis, tout simplement parce qu'il est squatté ! Dont acte !

Mais alors, en ce qui me concerne, en tant que professionnel, désormais, si cette pétition est déposée sur le bureau du Grand Conseil ou si elle est classée, je recommanderai à mes clients de décréter solennellement dans leurs immeubles le squat généralisé...

Une voix. Généralisé ! Obligatoire !

M. René Koechlin. ...moyennant quoi ils pourront procéder à toutes les transformations qu'ils voudront ! Laisser libre cours à toute leur fantaisie ! Peinturlurer ! (L'orateur est interpellé.) Eh oui, peinturlurer ! Faire tout et n'importe quoi : ajouter des pancartes, mettre des enseignes, des grandes peintures, des marguerites sur la façade... (Rires.) Pourquoi pas ? ...en toute liberté, en toute impunité. Alors, allez-y, Mesdames et Messieurs les propriétaires, décrétez le squat généralisé et faites ce que bon vous semble de vos immeubles ! Adieu, LCI ! Adieu, veaux, vaches, et cette cochonne de LDTR ! (Applaudissements et bravos.) Qu'on n'en parle plus : aux oubliettes, la LDTR ! On en sera enfin libéré ! Et, enfin, se répandra à Genève le chaos architectonique : tant pis !

Ou plutôt tant mieux ! Car il régnera dès lors un peu de fantaisie dans les rues et peut-être aussi de la poésie ! (Applaudissements et bravos.) 

Mme Erica Deuber Ziegler (AdG). Je veux réagir au terme de «voyous» et aussi à votre analyse, Monsieur Koechlin.

Vous savez parfaitement - et là je ne vais pas faire de la poésie ni du grand théâtre : je vais prendre le ton de la pédagogie - dans quelles conditions les squats se sont mis en place à Genève. Les voyous n'étaient pas de ce côté-là !

M. John Dupraz. Mais c'est n'importe quoi ! On est dans un Etat de droit ou quoi ?

Mme Erica Deuber Ziegler. La spéculation qui a sévi et les spéculateurs qui ont laissé ces immeubles vides en attendant de les revendre, reprendre ou rénover, à des conditions qu'en effet la loi jugeait souvent inacceptables, ont provoqué la naissance d'un mouvement social, qui est peut-être le seul mouvement social intéressant que la jeunesse ait connu pendant ces années, au sens où la sociologie utilise le terme de «mouvement social».

Les autorités politiques - et il s'agissait des autorités politiques de votre bord en particulier et du nôtre aussi quelquefois, pour ce qui est des magistrats socialistes - sont entrées en matière pour laisser les squatters occuper ces immeubles, dans des conditions de précarité évidentes, et sans fixer de limites, charge à ces gens de partir le jour où un projet intéressant serait prévu dans ces immeubles. Les gens de la Tour ont fait des projets intéressants, mais ils n'ont pas trouvé le financement nécessaire. Ce sont pour la plupart des étudiants, notamment des Beaux-Arts et du Conservatoire de musique. Ils ont en effet voulu afficher leurs principes philosophiques et leur identité à travers un traitement de façade. On aurait pu les en empêcher. Mais dès l'instant où ils étaient illégaux, précaires, et, de toute manière, convaincus qu'un jour ils devraient partir sauf à proposer un projet, que les banques ont refusé de financer, ils se trouvent aujourd'hui dans une impasse.

L'analyse que vous faites est très intéressante : profitons de cette occasion pour faire tous pareil... Non ! Le gouvernement dans sa grande sagesse a mené une politique de la jeunesse vis-à-vis de cette population qui a trouvé pendant vingt ans à se loger à bon compte et à mettre en oeuvre un mode de vie associative dans ces immeubles, dont certains ont donné des résultats remarquables alors que d'autres se sont plantés.

Je comprends bien que les voisins n'aiment pas ces décors et - comment disiez-vous ? - ces bariolages sur les façades : ce n'est certes pas très beau, mais je vous demande de ne pas oublier dans vos analyses les conditions dans lesquelles cela s'est fait et pourquoi le gouvernement de l'Entente - votre gouvernement ! - n'a pas jugé bon d'avoir une autre politique que celle qu'il a menée - une politique sage, à notre avis. J'aurais bien aimé que les banques mènent une politique sage, et notamment notre banque cantonale, en leur donnant les moyens de revenir à la normale et en les soumettant à la loi commune. (Applaudissements.)  

M. Michel Ducret (R). Je me réjouis, après ce qu'on vient d'entendre, de voir se créer un mouvement social des conducteurs réfutant les règles de la route et conduisant sans permis... Je me réjouis d'avance du résultat et de votre probable soutien à ce mouvement... Les futures victimes apprécieront !

Mesdames et Messieurs, soyons sérieux ! Les lois et règlements sur l'ordre et la salubrité publique n'ont pas été créés pour rien : il y a la protection du patrimoine; il y a la volonté d'avoir une certaine sécurité - ne serait-ce que pour ne pas prendre des pots de fleurs sur la tête ou des enseignes - et il y a un problème de propreté, qui, de nos jours, n'est pas négligeable dans les rues de Genève ! Croyez-moi, on est loin de la Genève d'il y a vingt ans où on pouvait se vanter de la propreté de nos rues ! Ça devient catastrophique et tout cela pousse à la négligence, non seulement à la négligence de comportement mais, également, à la négligence sociale, au manque de responsabilité des individus les uns envers les autres. Et ce problème est important, bien qu'il paraisse a priori secondaire : en effet, cela provoque le découragement de ceux qui se donnent la peine d'endosser cette responsabilité de tous les jours vis-à-vis de leurs concitoyens. Et c'est dans ce sens-là que ce problème est grave.

Je conclurai simplement en rappelant une petite anecdote :

Pas plus tard que pendant les fêtes de fin d'année, un architecte, d'ailleurs ancien député, transformait un immeuble. Il est logique, puisque les enseignes des magasins étaient cachées qu'il mette les enseignes par-dessus l'échafaudage qui a dû être posé lors des travaux effectués sur cet immeuble. Or, comme c'est une petite rue transversale, il a cru bon de placer ces enseignes légèrement en avant, perpendiculairement à l'échafaudage. Eh bien, les services de la municipalité lui sont tombés dessus et lui ont infligé des amendes sévères !

Mesdames et Messieurs, ce n'est pas normal qu'on traite pareillement des gens qui ne sont pas meilleurs ni moins bons que les autres, mais qui respectent les règlements; qu'on les traite plus mal que ceux qui ne les respectent pas; et, dans ce sens, cela n'est pas acceptable ! C'est le seul élément à prendre en considération ! Il ne s'agit pas de savoir qui vit dans ces squats - si c'est un mouvement ou un autre - il s'agit simplement de dire que la loi et les règlements sont les mêmes pour tous ! Nous ne pouvons pas, nous, dans cet hémicycle, tolérer que la loi soit appliquée de manière différenciée selon que l'on est ceci ou selon que l'on est cela ! C'est la porte ouverte à tous les abus ! Un jour, avec de tels principes, vous pourrez appliquer des lois selon la couleur de la peau, ou celle des yeux, ou la langue, ou l'origine !

Mesdames et Messieurs, le simple fait de déposer cette pétition sur le bureau du Grand Conseil est totalement inacceptable !  

Mme Myriam Sormanni-Lonfat (HP). Je voudrais faire un petit rappel historique, par rapport aux propos tenus par ma voisine, Mme Deuber Ziegler.

A l'origine, c'est M. Claude Haegi qui a introduit les contrats de confiance. Je ne discute donc pas de cela, et la droite n'est pas sans l'ignorer.

Par contre, un paragraphe, qui se trouve en page 2, me fait un peu bondir, je cite : «Plusieurs commissaires relèvent que la situation du service de la police des constructions est délicate, car appliquer strictement la loi aux squatters revient à cautionner une situation illégale. C'est pourquoi il a évoqué dans sa lettre la situation provisoire que constitue le squat.» Je rejoins tout à fait l'avis de M. Ducret, il n'est pas possible de faire une application différenciée de la loi !

Pour cette raison, il faut renvoyer cette pétition au Conseil d'Etat. 

M. John Dupraz (R). J'aimerais revenir sur les propos de notre collègue, Mme Deuber Pauli.

Je m'étonne en effet. Elle si sévère d'ordinaire dans son action pour la protection du patrimoine bâti à travers «Patrimoine vivant» se montre bien laxiste, uniquement parce qu'il s'agit de ses petits copains qui défendent un système de société qui lui convient, qui «mangent» du bourgeois tous les jours, qui occupent illicitement des immeubles et qui se croient tout permis !

Qu'ils les occupent illicitement, nous avons l'habitude, mais qu'ils se permettent de souiller le patrimoine bâti de cette manière, alors là, non ! Que les mêmes personnes qui se targuent d'être les défenseurs du patrimoine bâti tolèrent de telles exactions, je ne peux pas le comprendre ! C'est cela qui me choque ! D'autant plus que je doute que le département et le Conseil d'Etat se montrent aussi tolérants si des commerçants de la rue du Rhône se permettaient d'apposer de telles enseignes sur leur façade. C'est inacceptable quoi que vous disiez !

Je trouve regrettable que cette pétition ne soit pas renvoyée au Conseil d'Etat pour mettre de l'ordre et que la loi soit appliquée de façon équitable à tout le monde ! 

M. Alberto Velasco (S). J'aimerais vous dire, Monsieur Koechlin, que lorsque je regarde votre immeuble, je suis toujours heureux de voir la marguerite qui est dessinée sur la façade. Eh bien, je compare un peu les décorations de RHINO à votre marguerite !

Je vais vous expliquer pourquoi. Contrairement à ce que M. Ducret pense, la plupart des enseignes sont payantes, car elles ont un but commercial bien défini. Ce n'est pas le cas pour RHINO. En réalité, ces enseignes sont un message politique, et je suis sûr, Mesdames et Messieurs les députés, que le jour où le problème de RHINO sera réglé, où ces gens pourront rester moyennant l'achat des murs - que ce soit sous forme de coopérative ou autre - qu'il n'y aura plus rien sur les façades. S'il y a des enseignes sur les façades, c'est qu'il y a un problème et que ces gens le manifestent. Mais il ne s'agit pas du tout d'un contexte commercial, comme on essaye de nous le dire.

Je voulais apporter cette précision. 

Mme Erica Deuber Ziegler (AdG). Un mot à l'intention de M. Dupraz, Madame la présidente.

Il va sans dire que ma sensibilité est également heurtée par les bariolages dont il est question... (Exclamations.) ...mais je les tolère parce qu'ils sont provisoires et réversibles... (Rires.)

M. Claude Blanc. Du réversible qui dure !

Mme Erica Deuber Ziegler. Je peux vous dire qu'il s'agit d'une situation de précarité et d'illégalité, qui font que cette situation doit changer ! (Exclamations.) Par ailleurs, je connais les logements du boulevard de la Tour et je connais la Cave, qui donne d'ailleurs de très bons spectacles de jazz, et je peux vous dire que les conditions de conservation sont maintenues. La substance de ces bâtiments n'a pas été touchée. Il n'y a pas eu de transformations. Il y a simplement eu une dégradation de la façade par la couleur et par les apports artistiques, qui ne sont pas destinés à faire de la plus-value. Quand on transforme un immeuble pour faire de la plus-value, généralement on détruit, hélas, sa substance - c'est très souvent le cas. Mais en l'occurrence, ce n'est pas le cas.

Et c'est la raison pour laquelle, au nom de cette réversibilité et du provisoire de cette situation, Action Patrimoine vivant est parfois sollicité pour donner son avis. Mais jamais encore elle n'a eu besoin d'intervenir.

M. Claude Blanc. Donc, la majorité est réversible ! 

La présidente. Nous sommes en présence de deux propositions. L'une suit les conclusions du rapport de majorité de déposer cette pétition sur le bureau du Grand Conseil et l'autre de la renvoyer au Conseil d'Etat. Je vais les opposer. Celles et ceux qui soutiennent le dépôt de la pétition sur le bureau du Grand Conseil voudront bien se lever la main... (Rires et exclamations.) Vous pouvez constater que je commence à être fatiguée !

Le résultat est douteux.

Il est procédé au vote par assis et levé.

Le sautier compte les suffrages.

Mises aux voix, les conclusions de la commission des pétitions (dépôt de la pétition sur le bureau du Grand Conseil à titre de renseignement) sont adoptées par 43 oui contre 40.