République et canton de Genève
Grand Conseil
Séance du jeudi 26 octobre 2000 à 17h
54e législature - 3e année - 11e session - 45e séance
IU 924
M. John Dupraz (R). Je crois que chacun a été ému à la lecture de la presse qui nous apprenait que la police avait arrêté, à Genève, des enfants de 10 à 16 ans qui commettaient des vols dans notre canton.
On constate que ces jeunes habitent de l'autre côté de la frontière, en France. Ils viennent sur le territoire genevois perpétrer des vols. Ce sont des enfants qui ont été éduqués pour voler. Ils ont été éduqués dans ce sens-là comme on dresse des chiens pour mordre et pour garder. Je trouve profondément scandaleux que l'on se serve d'enfants pour échapper à la loi, pour voler pour une communauté, pour une famille ou pour un clan. Mes questions sont les suivantes :
1. Quelles mesures entend prendre le Conseil d'Etat face à cette nouvelle forme de délinquance ?
2. Quelles sont les mesures prises vis-à-vis de ces enfants qui, souvent, ne tombent pas sous le coup de la loi ? Peut-on leur faire suivre une école pour qu'ils reçoivent l'éducation qui leur a fait défaut jusqu'à maintenant, car en fait, ce sont des jeunes qui ont toute la vie devant eux ?
3. Quelles sont les mesures que prendra le Conseil d'Etat et, respectivement, le département de justice et police pour prévenir de tels délits, qui perturbent passablement la population de ce canton ?
Réponse du Conseil d'Etat
M. Gérard Ramseyer. En zone frontalière, dans les départements de Haute-Savoie et de l'Ain, la situation est forcément très évolutive en fonction des saisons, mais on a dénombré jusqu'à quatorze camps de gens du voyage, parfois en milieu urbain, parfois à la campagne, totalisant plusieurs milliers de personnes.
Dès que ces camps sont installés, on constate immanquablement une recrudescence des délits perpétrés à Genève et les interpellations de mineurs sont en forte augmentation. Les délits commis sur notre territoire par les gens du voyage le sont effectivement le plus souvent par des mineurs. Certains d'entre eux ont même été interpellés à plusieurs reprises pour les mêmes motifs à peu de jours d'intervalle, l'an dernier.
Les cas des mineurs appréhendés relèvent du service de protection de la jeunesse s'ils ont entre 8 et 15 ans et du Tribunal de la jeunesse s'ils ont entre 15 et 18 ans. Concrètement, le plus souvent, le Service de protection de la jeunesse se dessaisit du dossier au bénéfice du Tribunal de la jeunesse. Les mineurs sont alors placés en détention préventive à la Clairière pour les besoins de l'instruction.
Jusqu'à 15 ans, vous le savez, les mineurs ne peuvent pas être sanctionnés. Entre 15 et 18 ans, ils sont jugés et peuvent être sanctionnés. Ils peuvent ainsi être condamnés à des peines allant jusqu'à douze mois d'emprisonnement au maximum, avec ou sans sursis. On leur signale également une interdiction d'entrée en Suisse.
Lorsqu'ils ont purgé leur peine, les mineurs sont remis par la police au service de protection de la jeunesse d'où, le plus souvent, ils s'évanouissent dans la nature. Pourquoi ? Parce que les parents ne viennent jamais les chercher. Les parents préfèrent rester sur France pour éviter d'être, à leur tour, interpellés en Suisse et ces enfants ressortent, comme ils sont venus, illégalement par la frontière verte.
Vous avez raison, Monsieur le député, d'insister sur le travail transfrontalier que la police doit conduire. C'est le seul moyen de contenir, tant bien que mal, les irruptions des gens du voyage. Des perquisitions par commission rogatoire ont été récemment organisées en France avec succès. Seul le développement de la collaboration avec les services de la police et de la gendarmerie française permettra de lutter avec plus d'efficacité pour tenter d'enrayer ce phénomène.
Comme vous le savez, mon département s'y emploie activement. Je rappelle à cet égard la ratification par l'Assemblée nationale française cet été de la Convention franco-suisse de collaboration en matière de police. En vous remerciant de m'avoir préalablement transmis le texte de votre interpellation urgente, j'espère y avoir répondu à votre satisfaction.
Cette interpellation urgente est close.