République et canton de Genève

Grand Conseil

No 10/II

Vendredi 18 février 2000,

nuit

La séance est ouverte à 20 h 30.

Assistent à la séance : Mmes et M. Martine Brunschwig Graf, Micheline Calmy-Rey et Robert Cramer, conseillers d'Etat.

1. Exhortation.

Le président donne lecture de l'exhortation.

2. Personnes excusées.

Le Le président. Ont fait excuser leur absence à cette séance : MM. Guy-Olivier Segond, président du Conseil d'Etat, Carlo Lamprecht, Gérard Ramseyer et Laurent Moutinot, conseillers d'Etat, ainsi que Mmes et MM. Esther Alder, Bernard Annen, Jean-Pierre Gardiol, Claude Haegi, David Hiler et Micheline Spoerri, députés.

3. Discussion et approbation de l'ordre du jour.

M. Jean Spielmann(AdG). Je souhaite que le point 40 de notre ordre du jour, projet de loi 8191 concernant la liaison Eaux-Vives/La Praille, soit adressé directement à la commission des travaux, l'important étant d'avancer sur ce dossier plutôt que d'en débattre dans ce parlement.

Une voix. Bravo !

Le président. Je vous remercie, Monsieur Spielmann ! Lors du tour de table des chefs de groupe, l'Alliance de gauche avait souhaité intervenir. Nous n'avons plus, entre guillemets, cette «hypothèque» ce soir. Ce projet de loi est donc envoyé directement à la commission des travaux. Je vous remercie de nous aider à l'efficacité de nos travaux !

4. Annonces et dépôts:

a) de projets de lois;

Néant.

b) de propositions de motions;

Néant.

c) de propositions de résolutions;

Néant.

d) de demandes d'interpellations;

Néant.

e) de questions écrites.

Néant.

Le président. Mesdames et Messieurs les députés, nous reprenons nos travaux où nous les avons laissés, c'est-à-dire la suite du point 17, projet de loi 8078-A concernant les procédés de réclame.

PL 8078-A
5. Suite du deuxième débat sur le rapport de la commission des affaires communales, régionales et internationales chargée d'étudier le projet de loi du Conseil d'Etat sur les procédés de réclame (F 3 20). ( -) PL8078
 Mémorial 1999 : Projet, 4895. Renvoi en commission, 4922.
 Mémorial 2000 : Rapport, 787. Premier débat, 863.
 Mémorial 2000 : Deuxième débat, 1325.
Rapport de majorité de M. Walter Spinucci (R), commission des affaires communales, régionales et internationales
Rapport de minorité de Mme Magdalena Filipowski (AG), commission des affaires communales, régionales et internationales

Suite du deuxième débat

Le président. Nous en étions à l'article 10. Je vais donc continuer à vous soumettre ce projet de loi article par article.

Mis aux voix, l'article 10 est adopté, de même que les articles 11 à 23.

Art. 24

Le président. Nous sommes saisis d'un premier amendement proposé par M. Velasco, qui consiste à compléter l'article 24 actuel de la manière suivante :

«1 Les communes peuvent établir un concept directeur des procédés de réclame visant tant le domaine public que le domaine privé. L'élaboration de tels concepts ne peut être confiée à des sociétés d'affichage.»

M. Alberto Velasco (S). Effectivement, lors de nos débats en commission, j'avais insisté sur cet aspect parce qu'il ne me semblait pas judicieux que les sociétés qui font les concepts d'affichage soient les mêmes que celles qui procèdent à cet affichage. Il me semblerait en effet plus juste et correct que ce soit une entreprise neutre qui fasse ces concepts. En l'occurrence, concernant l'énergie ou l'aménagement, ce sont les départements qui font toujours leurs concepts et ça se passe très bien...

Un des arguments que l'on m'a opposé est que les petites communes n'auraient pas les moyens de se payer de tels concepts. Eh bien, voyez-vous, j'ai pu voir ces concepts en commission et leur volume est peu important. Ils ne représentent pas des centaines de pages, mais seulement quelques pages, avec quelques schémas. Ils ne sont pas - et de loin - aussi coûteux qu'on le prétend ! Les petites communes peuvent donc aisément réaliser de tels concepts.

Par conséquent, Mesdames et Messieurs les députés, je vous engage à voter l'amendement que je vous propose.

M. Philippe Glatz (PDC). J'ai déposé un amendement dont je me permettrai de développer les motifs ici devant vous en trois points.

Le premier concerne le principe de libre concurrence. L'ordre économique suisse est régi par la libre concurrence et la nouvelle Constitution du 18 avril 1999 le rappelle expressément en ses articles 27, 94 et suivants. En matière d'affichage publicitaire, la portée de la liberté du commerce et de l'industrie dépend du lieu de situation des procédés de réclame. Sur le domaine public, les collectivités publiques sont très largement maîtresses des droits qu'elles veulent concéder. Sur le domaine privé, en revanche, la liberté économique s'applique pleinement. C'est ainsi qu'une société très fréquemment citée ce soir a pu obtenir le monopole de l'affichage dans la quasi-totalité des communes de Suisse... (Brouhaha. Le président agite la cloche.) ...et cela sans que ce soit directement critiquable sous l'angle de la liberté économique.

Cependant, la commission de la concurrence a eu l'occasion de se pencher sur le problème. Cette commission a invité les collectivités publiques à tenir compte de la concurrence dans le marché de l'affichage lors du renouvellement des droits d'affichage sur le domaine public : «L'application de notre loi ne doit pas aboutir dans les faits à étendre le monopole «concessionné» sur le domaine privé, ni à concentrer les possibilités d'affichage sur le domaine public.» (Brouhaha.) De telles mesures interféreraient en effet avec le libre jeu de la concurrence, dont faisait état tout à l'heure mon collègue, M. Velasco.

Deuxième point concernant les concepts directeurs et leur influence sur la libre concurrence. Selon l'expérience acquise, notamment dans le canton de Vaud voisin, les concepts directeurs communaux peuvent se prêter, en réalité, à des pratiques anticoncurrentielles. En effet, certaines communes développent et appliquent leur concept directeur ou concept global de manière à refuser la plupart des demandes d'autorisation visant à l'installation d'emplacements d'affichage sur le domaine privé. Fréquemment, le motif invoqué tient à la surcharge d'installations publicitaires dans le domaine considéré, compte tenu des emplacements existants. Les distorsions de concurrence auxquelles se prêtent les concepts directeurs sont donc souvent - mais, Mesdames et Messieurs les députés, jamais explicitement - motivées par des intérêts financiers particuliers. Il n'en faut pas plus pour les condamner définitivement au regard de la liberté économique protégée par la Constitution fédérale.

Le troisième point concerne l'établissement et la mise sur pied de ces concepts directeurs. Comme cela a pu être documenté par-devant la commission, les communes ont fréquemment recours aux services de la société concessionnaire du domaine public pour l'établissement du concept directeur. Et ce, même lorsque ledit concept vise autant le domaine privé que le domaine public. Ainsi, les communes délèguent trop facilement leur pouvoir à l'entreprise la plus intéressée par une limitation stricte des possibilités d'affichage sur le domaine privé.

Cette collusion d'intérêts, ne serait-ce qu'elle, suffit à montrer que les concepts directeurs sont des instruments qui sont susceptibles de porter une atteinte concrète à la libre concurrence. La délégation du pouvoir des communes à un particulier, intéressé au marché public, est manifestement choquante d'un point de vue démocratique.

C'est pourquoi nous vous proposons un amendement en trois points. L'alinéa 1 soumis est la reprise inchangée de l'alinéa unique de la loi telle qu'elle nous est proposée aujourd'hui.

L'alinéa 2, lui, a été établi par souci de transparence et de sécurité juridique. En effet, le concept directeur, de notre point de vue, doit être librement accessible aux intéressés. Comme le concept directeur, selon l'article 24 du projet de loi 8078, vise tant le domaine privé que le domaine public, nous pensons également qu'une telle délégation, pour sa mise sur pied, à un seul concessionnaire violerait les nouvelles règles régissant la passation des marchés publics.

Et, enfin, l'alinéa 3 est destiné à rappeler aux communes leur obligation de respecter le jeu de la libre concurrence sur le domaine privé.

Par ailleurs, Mesdames et Messieurs, je peux vous informer que le groupe démocrate-chrétien soutiendra l'amendement de M. Velasco et du groupe socialiste, puisque cet amendement permettrait de résoudre la problématique de concession à un particulier intéressé au marché. Cet amendement est complémentaire à l'ensemble de nos amendements, même si ces derniers vont un peu plus loin, puisqu'ils prévoient notamment à l'alinéa 2 que : «Le concept directeur peut être consulté par le public.» Selon l'amendement de M. Velasco, la préparation de ce concept ne peut plus être confiée à une société qui pourrait être soumissionnaire... Je pense que nous pouvons aller dans ce sens tout en maintenant la possibilité pour le public de pouvoir consulter et donner son avis sur le concept directeur. Je vous remercie de votre attention. 

Le président. Mesdames et Messieurs les députés, à ce stade du débat, le président Robert Cramer souhaite intervenir. Monsieur le président, vous avez la parole !

M. Robert Cramer. Il me semble utile d'intervenir maintenant pour vous donner quelques précisions.

Cette législation contient un élément qui est prescriptif : la concession. Le processus qui vise à autoriser, à un moment donné, la réclame, passe par une concession octroyée par les communes aux sociétés d'affichage. A côté de la prescription décidée par les communes, une chose est facultative mais souhaitable : le concept directeur. (Brouhaha. Le président agite la cloche.) Il est en effet souhaitable qu'à un moment donné les communes aient un projet mentionnant où les affiches pourront être placées, quel type d'affichage pourra être posé, quelle sera leur taille, etc.

Mais je vous dis tout net que l'amendement de M. Velasco impliquera à peu près certainement qu'il n'y aura pas de concept directeur dans les communes, ce qui signifie que l'affichage se fera au coup par coup. Et pourquoi cela ? Parce que cet amendement, qui vise à compléter la faculté des communes - qu'elles ont déjà d'ailleurs - de faire des concepts directeurs par une obligation de ne pas confier ces concepts directeurs à des sociétés d'affichage, signifie tout d'abord concrètement que l'on ne saura pas à qui confier cette tâche, parce que les compétences pour les établir, à vrai dire, ne sont pas très largement partagées : elles sont l'apanage des sociétés d'affichage. Alors, s'il n'est plus possible de confier cette tâche aux sociétés d'affichage, il n'y aura tout simplement pas de concepts directeurs. Par ailleurs, à supposer que l'on trouve une société qui puisse en faire, cela veut dire que le coût de ces concepts directeurs serait à la charge des communes. Alors qu'actuellement le concept directeur est établi gratuitement, parce qu'il est en général fait par la société qui va procéder à l'affichage. Mais si vous demandez que ce travail soit effectué par deux sociétés différentes, il va de soi que l'élaboration de ce concept sera payante et que c'est la commune qui devra le payer.

Mesdames et Messieurs les députés, en ce qui me concerne, je considère que l'argent public doit être utilisé à meilleur escient, plutôt que de payer des concepts directeurs qui peuvent être faits gratuitement. A mon avis, il vaudrait mieux consacrer nos ressources pour les domaines de l'assistance sociale, de l'instruction, de la solidarité. Je vous demande donc, sur ce point précis, de ne pas toucher au système actuellement en place.

En revanche, les deux amendements proposés par M. Glatz qui sont des alinéas 2 et 3 nouveaux semblent pouvoir être retenus.

A l'alinéa 2, M. Glatz nous dit que «le concept directeur peut être consulté par le public». C'est une bonne chose. Il faut que ceux qui résident dans la commune bénéficient d'une transparence en cette matière. M. Glatz dit également que les communes - et dans ce sens il fait un bout de chemin dans la direction de M. Velasco - peuvent prévoir que les mandataires ne sont pas admis à solliciter une concession... Eh bien, la balle est ainsi dans le camp des communes... S'il y a des communes qui s'estiment suffisamment riches pour faire établir à leurs frais des concepts directeurs, pourquoi pas ? L'amendement proposé par M. Glatz leur en donne la faculté, mais, au moins, il permet aux gens compétents en matière de concepts de continuer à les faire, je veux parler des sociétés d'affichage.

Enfin, l'alinéa 3, nouveau, proposé par M. Glatz, visant à introduire une plus grande concurrence entre les sociétés d'affichage, est évidemment également bienvenu. Nous sommes dans un domaine concurrentiel, régi par la liberté du commerce et de l'industrie, il faut donc que cette concurrence puisse s'exercer au profit de la collectivité, puisqu'au fond cette concurrence - passez-moi l'expression - est susceptible de faire monter les enchères, ce qui permet aux communes d'octroyer des concessions à des conditions qui leur sont plus favorables.

Voilà les raisons pour lesquelles, Mesdames et Messieurs les députés, je vous demanderai - me faisant ici l'interprète des communes - de ne pas retenir l'amendement qui vous est proposé à l'alinéa 1 et, en revanche, si vous l'estimez souhaitable, d'adopter les amendements qui vous sont proposés aux alinéas 2 et 3.

Le président. Nous saluons à la tribune la présence de notre ex-collègue, Maria Roth-Bernasconi ! (Applaudissements. Mme Roth-Bernasconi, aidée par d'autres femmes, déploie une banderole en faveur de l'initiative dite «des quotas».) Merci, nous avons vu ! Je vous prie de bien vouloir replier votre banderole ! (Rires et exclamations.)

M. Albert Rodrik (S). Que j'aime les indignations vertueuses, surtout quand elles s'adressent à ce qui n'est pas le propos de l'amendement de M. Velasco !

Vous savez, dans les carrés de nos cimetières, les concessions perpétuelles ou à quatre-vingt-dix-neuf ans ont tendance à disparaître...

Une voix. Hélas !

M. Albert Rodrik. Hélas ! ...mais, dans le système actuel, les concessions à perpétuité en faveur de certaines sociétés d'affichage, elles, sont bien là ! Et si on laisse l'article 24 tel qu'il ressort de commission, il y a bien concession perpétuelle !

M. John Dupraz. Mais ça n'a rien à voir !

Une voix. Tu n'as rien compris, Rodrik !

M. Albert Rodrik. Absolument rien ! (Exclamations.) Je vois là une coalition radicale superbe !

Je reviens à mon propos... Monsieur Cramer, la chose est simple : celui qui établit des concepts ne doit pas soumissionner. En effet, celui qui connaît bien un concept parce qu'il l'a élaboré va obtenir la concession. C'est de cela qu'il s'agit ! Si vous arrivez à mieux formuler l'amendement de M. Velasco pour qu'il dise que celui qui établit le concept ne peut pas soumissionner, nous sommes preneurs ! On peut aussi faire la variante suivante : les deux alinéas de M. Glatz sont parfaits, mais il nous faut un alinéa 2 disant que celui qui établit le concept ne peut pas soumissionner. A vous de le faire ! Nous nous y rallions d'avance ! 

Une voix. Tu fumes trop de joints, Rodrik ! (Rires.)

M. Alberto Velasco (S). J'aimerais tout de même vous répondre Monsieur Cramer ! Vous dites que certaines communes ne pourront pas se payer de concepts directeurs. Nous pourrions donc imaginer, en ce qui concerne le concept cantonal de l'énergie ou le concept d'aménagement, que nous nous adressions aux personnes qui les réaliseront par la suite et que nous les financions sous prétexte que cela coûterait moins cher à l'Etat... Eh bien, moi je suis opposé à ce mode de faire ! D'abord, chers collègues, ces concepts je les ai vus, et, comme je vous l'ai déjà dit, ce sont des documents relativement restreints - quelques pages - ce qui fait que leur coût doit être vraiment très minime. Les communes devraient donc pouvoir se les payer.

Cela dit, nous les socialistes, nous serions d'accord d'accepter les amendements présentés par le groupe démocrate-chrétien aux alinéas 2 et 3, et nous verrions un autre amendement s'insérer entre l'alinéa 1 et l'alinéa 2.

M. René Koechlin (L). Je constate tout d'abord que les personnes qui nous ont fait une proposition sur les quotas ne respectent pas ce quota, ce que je trouve évidemment regrettable ! Cela dit tout à fait en passant, Monsieur le président !

J'en viens au sujet qui nous occupe depuis un bon moment, et je n'hésite pas à vous présenter un amendement qu'en revanche j'hésite beaucoup à déposer sur le bureau du Grand Conseil... (Exclamations.) Mais je n'hésite pas à vous le présenter ! Simplement et par souci d'équité, équité à laquelle je sais que la majorité des députés sont attachés, il me semble qu'il faudrait payer une indemnité ou une prime, voire une subvention, aux entreprises qui font le commerce du tabac ou de l'alcool, si d'aventure ces entreprises faisaient de la publicité contre l'alcool ou contre le tabac... (Rires.) Ainsi, nous pourrions verser une subvention à Marlboro qui afficherait : «Ne fumez pas Camel !»... Ou une subvention à Martini qui dirait : «Ne buvez pas de whisky !»... Cet amendement aurait l'avantage de rendre à la Société d'affichage ce qu'elle risque de perdre avec ce projet de loi... Je vous garantis que si ce genre de publicité était autorisée, nous en verrions probablement la multiplication sur tous nos panneaux d'affichage, ce qui ferait le bonheur de la Société d'affichage, précisément !

Je présenterai peut-être cet amendement lors du troisième débat ! 

Le président. Merci, Monsieur Koechlin ! Nous pouvons associer cet amendement à celui sur les nains de jardin ! (Rires.)

Je donne la parole au président Robert Cramer.

M. Robert Cramer. Apparemment, nous ne parlons pas tous du même texte. Le texte que j'ai sous les yeux - je crois que c'est celui sur lequel vous devrez voter - dit en son alinéa 2, sous la plume de M. Glatz - il revient là sur une première proposition qu'il avait faite précédemment - les choses suivantes : tout d'abord, que «le concept directeur peut être consulté par le public» - ce qui est une bonne idée - ensuite, que «sa préparation peut être confiée à des mandataires privés» et il ajoute - allant ainsi dans le sens de M. Velasco - que «les communes peuvent prévoir que les mandataires ne sont pas admis à solliciter une concession». C'est vrai, Monsieur Velasco, qu'il ne dit pas : «Les communes doivent prévoir...» ou : «Les communes prévoient que les mandataires ne sont pas admis à solliciter une concession.» Il donne simplement cette faculté aux communes.

Mais je vous prie de considérer qu'il faudrait éviter, pour faire mieux, de ne rien faire du tout. Cela signifie que si l'on veut contraindre les communes à séparer strictement et dans tous les cas celui qui fera le concept et celui qui le réalisera, on court le très grand risque que les communes ne fassent pas de concept du tout dans le but de faire des économies. Et il me semble pourtant souhaitable qu'un concept directeur soit réalisé. Et il me semble également souhaitable que la population bénéficie de la transparence nécessaire qui lui permette d'interpeller les autorités communales, d'apprendre où les publicités seront placées, quel sera leur genre, et d'exprimer sa satisfaction, ou non, quant à la manière dont on utilise le domaine public. Nous devons donc favoriser l'élaboration de ces concepts, mais je crains fort que l'on se trouve sans concept dans la plupart des cas si nous empêchons en toutes circonstances celui qui fait le concept de le réaliser.

Le premier alinéa stipule que les communes peuvent prévoir un concept directeur et l'amendement indique ensuite, à l'alinéa 2, que si elles le prévoient, elles ont la possibilité de décider que celui qui fait le concept ne fait pas l'affichage. C'est un sérieux pas en avant par rapport à la situation actuelle. Et c'est un pas en avant qui ne nous fait pas courir le risque que les communes renoncent au concept, ce qui serait à mon avis extrêmement regrettable, aussi bien pour des raisons d'esthétique que pour des raisons d'urbanisme, et aussi, peut-être, pour des raisons de simples contrôles, que l'autorité peut mieux assurer, par rapport aux questions de sécurité publique - je pense ici au trafic - en ayant tout le projet de la commune d'un coup, plutôt qu'en devant faire les contrôles au coup par coup, affiche par affiche.

M. Bernard Clerc (AdG). Ecoutez, je suis un peu étonné par ce que j'entends. En effet, il est dit constamment : «Les communes peuvent...». Alors, Monsieur le conseiller d'Etat, si vous souhaitez que les communes établissent ces concepts directeurs, eh bien, formulez la phrase autrement ! Dites : «Les communes établissent un concept directeur...», sinon l'objectif que vous recherchez ne sera jamais atteint, si chaque commune est libre de faire comme elle veut !

De même pour les amendements déposés par M. Glatz. Il semble que tout le monde souhaiterait une séparation entre celui qui établit le concept et celui qui pratique l'affichage ; or, il est dit concrètement : «Les communes peuvent prévoir que les mandataires ne sont pas admis à solliciter une concession.» Excusez-moi, mais c'est de la pure hypocrisie ! Ou bien on décide que c'est impératif et on légifère en conséquence en disant : «Les communes doivent établir un concept...» et en fixant les conditions à l'élaboration de ce concept. Ou bien on laisse tout dans le flou comme c'est le cas actuellement et ça n'a pas grande signification ! 

Le président. Nous passons au vote des amendements proposés par M. Velasco et par M. Glatz. Nous prenons tout d'abord l'amendement de M. Velasco, qui consiste à ajouter à la phrase actuelle de l'article 24, qui devient alinéa 1, je cite :

«1Les communes peuvent établir un concept directeur des procédés de réclame visant tant le domaine public que le domaine privé. L'élaboration de tels concepts ne peut être confiée à des sociétés d'affichage.»

Le résultat est douteux.

Il est procédé au vote par assis et levé.

Le sautier compte les suffrages.

Cet amendement est adopté par 44 oui contre 34 non.

Le président. Nous passons maintenant au vote des amendements proposés par M. Glatz qui consistent à ajouter un alinéa 2 et un alinéa 3. Je vous cite l'alinéa 2 :

«2Le concept directeur peut être consulté par le public. Sa préparation peut être confiée à des mandataires privés. Les communes peuvent prévoir que ces mandataires ne sont pas admis à solliciter une concession.»

M. Philippe Glatz (PDC). Etant donné le vote de l'amendement de M. Velasco, je retire la dernière phrase, soit : «Les communes peuvent prévoir que les mandataires ne sont pas admis à solliciter une concession.» Elle est dorénavant désuète.  

Le président. Votre intervention est assez claire pour que l'on puisse voter sur cet alinéa modifié, dont la teneur est la suivante :

«2Le concept directeur peut être consulté par le public. Sa préparation peut être confiée à des mandataires privés.

Mis aux voix, cet amendement est adopté.

Le président. Je passe au vote de l'alinéa 3 de M. Glatz, dont la teneur est la suivante :

«3Le concept directeur ne peut exclure une possibilité de concurrence entre les entreprises d'affichage opérant sur le domaine privé et sur le domaine public.»

Mis aux voix, cet amendement est adopté.

Mis aux voix, l'article 24 ainsi amendé est adopté.

Art. 25

Le président. Nous sommes saisis d'un amendement proposé par Mme Loly Bolay, consistant à modifier l'alinéa 3 de l'article 25 dont le texte initial était le suivant : «La commune rétrocède à l'Etat une part de 10% de ces redevances», qui devient :

«3La commune rétrocède à l'Etat la part de cette redevance afférente au domaine public cantonal.»

Mme Dolorès Loly Bolay (AdG). Mon amendement vise surtout à éviter qu'on introduise dans la loi une inégalité de traitement. En effet, l'importance du domaine public cantonal varie d'une commune à l'autre. Certaines communes en ont plus, d'autres moins, d'autres pas du tout, comme c'est le cas par exemple de la Ville de Genève. Cette méthode permettrait donc, d'une part, d'instaurer une répartition proportionnelle des recettes provenant de la concession d'affichage et, d'autre part, de tenir compte de la situation particulière de chaque commune. Avec cette méthode, on éviterait donc que des communes qui ont un domaine public cantonal important payent en proportion et que d'autres ne payent rien parce qu'elles n'en ont pas.

Je vous remercie d'approuver cet amendement. 

M. Bernard Lescaze (R). Le parti radical soutient cet amendement qu'il trouve légitime à l'égard des communes. 

Le président. Je vous demande donc de vous prononcer sur l'amendement proposé par Mme Loly Bolay à l'article 25, alinéa 3 nouveau, que je vous lis à nouveau :

«3La commune rétrocède à l'Etat la part de cette redevance afférente au domaine public cantonal.»

Mis aux voix, cet amendement est adopté.

Mis aux voix, l'article 25 ainsi amendé est adopté.

Mis aux voix, l'article 26 est adopté, de même que les articles 27 à 41.

Art. 42

M. Michel Halpérin (L). L'union conjoncturelle de quelques intérêts divers et variés a transformé la nature du texte qui vous était proposé. Je constate que nous avons complètement amendé le texte initial. Nous avons donc désormais toutes les interdictions que vous souhaitiez et nous avons en plus mis sur la touche la société qui, jusqu'ici, est concessionnaire.

Je vous avais dit tout à l'heure que, dans ces circonstances, il me paraissait nécessaire de lui permettre de s'exprimer, mais M. Grobet a répliqué qu'ayant déjà été entendue en commission elle n'avait plus besoin de l'être... Je réitère qu'après avoir relu le rapport de commission je constate qu'il n'a pas été possible à la Société d'affichage de s'exprimer sur les conséquences des amendements qui ont été improvisés aujourd'hui par M. Velasco et par M. Glatz.

Je vous propose par conséquent de renvoyer ce projet en commission pour étudier ces questions et prendre la mesure de l'impact économique de nos décisions. Si ce choix était refusé, je vous proposerais deux amendements à l'article 42. 

Le président. Il faudra déposer vos amendements au bureau, Monsieur Halpérin ! Nous votons tout d'abord sur la proposition de renvoyer ce projet de loi en commission des affaires communales, régionales et internationales.

Mise aux voix, la proposition de renvoyer ce projet de loi en commission est rejetée.

M. Michel Halpérin (L). Je propose donc, à l'article 42, alinéa 1, à la deuxième ligne, de remplacer : «...dans un délai maximum de deux ans...» par «...dans un délai maximum de trois ans...» et que la même modification intervienne à l'alinéa 2. Je dépose à l'instant le texte de mes amendements.

Le président. Je soumets donc à votre approbation les amendements proposés par M. Halpérin aux alinéas 1 et 2 de l'article 42, que je vous cite :

«1Les procédés de réclame installés selon la législation antérieure, mais non conformes à la présente loi, doivent être supprimés dans un délai maximum de trois ans, sous réserve de l'obtention d'une autorisation.

2Les procédés de réclame non conformes à la présente loi, mais au bénéfice d'un contrat d'une durée supérieure à trois ans au moment de l'adoption de la présente loi peuvent être maintenus jusqu'à l'échéance du contrat, mais pour cinq ans au plus.»

Le résultat est douteux.

Il est procédé au vote par assis et levé.

Le sautier compte les suffrages.

Ces amendements sont rejetés par 46 non contre 30 oui.

Mis aux voix, l'article 42 est adopté.

Mis aux voix, l'article 43 (souligné) est adopté.

Troisième débat

M. Michel Halpérin (L). Puisque ce Grand Conseil a pris la responsabilité d'exprimer un vote contraire à l'expression de la volonté populaire souveraine d'il y a quelques années, je demande le vote à l'appel nominal. (Exclamations.) 

Le président. Cette demande est-elle soutenue ? Bien, nous allons passer au vote à l'appel nominal (Appuyé.), mais je vous demande d'être à votre place !

Une voix. Vivement le vote électronique !

Le président. Je passe la parole à M. Lescaze.

Art. 24

M. Bernard Lescaze (R). A l'évidence, l'article 24, tel qu'il a été modifié, suscitera un certain nombre de problèmes, et je ne suis pas sûr que l'ensemble de cette noble assemblée ait exactement compris ce dont il s'agissait... (Rires.)

Les amendements proposés par M. Glatz visaient à établir des règles précises quant à l'établissement du concept directeur. Ce que j'ai cru comprendre de ce que proposait M. le député Velasco était qu'il avait le souci que les communes établissent réellement un plan directeur. En conséquence, je vous propose, et tel est mon amendement, de remplacer «peuvent» par «doivent» à l'article 24, premier alinéa. L'alinéa 2 reste celui proposé par M. Glatz que vous avez adopté; il en est de même pour l'alinéa 3. Cela permet ainsi de régler le problème : «Les communes doivent établir...», ainsi on ne s'occupe pas - les communes restant maîtresses du mandat qu'elles attribuent - de l'exécution. Le souci manifesté par M. Velasco et aussi, si j'ai bien compris, par M. Glatz est légitime. Il faut en effet un concept d'affichage ; nous souhaitons que les communes aient l'obligation de le faire, et nous n'allons pas au-delà, dans le respect de l'autonomie communale.

M. Albert Rodrik (S). Je ne vois pas ce que vient faire l'intervention de M. Lescaze au sujet de l'article 24 après le vote...

Selon ses propos, l'amendement de M. Velasco disparaît, alors qu'il a été adopté !

M. Bernard Lescaze. Oui, mais il y a un troisième débat !

Le président. Monsieur Rodrik, nous sommes en troisième débat !

M. Albert Rodrik. Mais on n'y est pas encore !

Le président. S'il vous plaît ! Nous sommes en troisième débat, et nous allons voter sur l'amendement proposé par M. Lescaze qui consiste à remplacer «peuvent» par «doivent» à l'article 24, premier alinéa. 

M. Philippe Glatz (PDC). L'amendement proposé... (Brouhaha. Le président agite la cloche.) Mesdames et Messieurs les députés, je vous demande juste quelques instants de réflexion quant à la proposition de M. Lescaze qui me paraît tout à fait intéressante. En effet, dans la rédaction précédente - M. Lescaze a mis le doigt sur l'une des problématiques - le terme «peuvent» permettrait à certaines communes de renoncer à établir ce concept directeur de manière à pouvoir continuer à confier le même mandat public à la même société, toujours la même... Il convient par conséquent de faire en sorte - l'amendement de M. Lescaze apporte donc une nouveauté - que les communes soient obligées d'établir un concept directeur. Cela répondrait ainsi au souci de M. le conseiller d'Etat, qui souhaite véritablement que les communes établissent un concept directeur, et cela permettrait aussi de maintenir la libre concurrence.

Je ferai encore respectueusement remarquer que l'amendement que j'avais proposé initialement disait : «Les communes peuvent prévoir que ces mandataires ne sont pas admis à solliciter une concession», ce qui dans ce cadre respecte l'autonomie communale... Toutefois, la proposition de M. Lescaze est une avancée, et je la soutiendrai.

M. Alberto Velasco (S). Nous ne sommes évidemment pas d'accord avec votre proposition, Monsieur Lescaze, et pour cause !

Nous nous rallierons à la proposition telle que rédigée au premier alinéa, c'est-à-dire : «Les communes peuvent...» Si les communes le veulent, elles le font et, si elles ne le veulent pas, elles ne le font pas ! Mais si elles font un concept directeur, alors l'élaboration d'un tel concept ne peut être confiée à des sociétés d'affichage. Ce n'est pas du tout la même chose ! C'est une condition supplémentaire ! 

Le président. Je vous soumets donc l'amendement de M. Lescaze, à l'article 24, alinéa 1, qui devient donc :

«1Les communes doivent établir un concept directeur...»

Le résultat est douteux.

Il est procédé au vote par assis et levé.

Le sautier compte les suffrages.

Le président. Cet amendement est accepté par 32 oui contre 33 non... (Exclamations.). Il est accepté par 42 oui... Je voulais voir si vous suiviez ! (Rires et exclamations.)

Cet amendement est adopté par 42 oui contre 33 non.

Mis aux voix, l'article 24 ainsi amendé est adopté.

Le président. Nous allons passer au vote de ce projet de loi à l'appel nominal comme cela a été demandé par M. Halpérin. Madame la secrétaire, puisqu'il y a un calme apparent, je vous prie...

M. Bernard Clerc (AdG). Monsieur le président, j'ai tout d'un coup un doute sur le vote que nous venons de faire... (Rires.)

Il s'agissait bien uniquement de remplacer à l'article 24, à l'alinéa 1 : «Les communes peuvent» par : «Les communes doivent», et cela n'impliquait pas une modification de l'alinéa 2 tel que nous l'avons voté tout à l'heure ? (L'orateur est interpellé.) Ah, c'est bien ce qu'il me semblait, le vote portait uniquement sur l'alinéa 1 !

Le président. Monsieur Clerc, le vote portait essentiellement sur l'alinéa 1 de l'article 24 !

M. Bernard Clerc. Comment «essentiellement»? Non, non !

Le président. L'amendement dit : «Les communes doivent...» en lieu et place de : «Les communes peuvent...» à l'alinéa 1 uniquement !

M. Bernard Clerc. Voilà ! Et les alinéas 2 et 3 restent comme nous les avons adoptés tout à l'heure !

Le président. Absolument !

M. Bernard Clerc. Je vous remercie ! 

M. John Dupraz (R). Je me demande s'il est bien raisonnable de procéder ce soir au troisième débat... (Rires et exclamations.)

Ce plénum a procédé à un certain nombre de modifications, et il me semble qu'il serait judicieux de nous accorder un délai de réflexion d'un mois pour bien examiner le texte que nous venons de voter... Il n'y a pas le feu dans la maison ! Je le répète, il ne serait pas très raisonnable de voter le projet de loi en troisième débat maintenant. A moins que le Conseil d'Etat ne s'oppose à cette proposition, nous devrions nous accorder un délai de réflexion et prendre le temps d'examiner le texte qui a été modifié à différents articles pour en évaluer toutes les conséquences.  

M. Claude Blanc (PDC). Monsieur le président, deux choses :

M. Dupraz vient de faire une proposition formelle de ne pas voter le projet de loi en troisième débat et vous devrez la soumettre au parlement, car, même si le Conseil d'Etat demande le troisième débat, c'est le Grand Conseil qui a le dernier mot s'il s'y oppose.

Maintenant et de manière à ce qu'il n'y ait pas d'équivoque sur le texte de l'article 24 - car il semble qu'il y ait des interprétations différentes - je vous demande, Monsieur le président, de bien vouloir nous relire l'article 24, tel qu'il ressort du vote final du Grand Conseil. 

Le président. Bien, alors je vous lis l'article 24, alinéa 1, amendé tout d'abord par M. Velasco, puis par M. Lescaze :

«1Les communes doivent établir un concept directeur des procédés de réclame visant tant le domaine public que le domaine privé. L'élaboration de tels concepts ne peut être confiée à des sociétés d'affichage.»

M. Bernard Lescaze. Non, Monsieur le président !

Le président. Je donne la parole au conseiller d'Etat Robert Cramer.

M. Robert Cramer. Je pense que je vais mettre tout le monde d'accord en vous disant simplement que...

Une voix. Que tu nous aimes !

M. Robert Cramer, conseiller d'Etat. Que je vous aime, bien sûr ! M. Beer en particulier ! (Rires et exclamations.)

Je pense que je vais mettre tout le monde d'accord en disant simplement que je renonce au troisième débat... Nous pouvons donc arrêter la discussion ici !

Je souhaiterais juste que, lorsque nous reprendrons ce troisième débat, nous nous concentrions sur les questions que nous n'avons peut-être pas approfondies suffisamment - je pense notamment à l'article 24 et à la disposition transitoire. Et je vous suggère de ne pas refaire le débat une troisième fois sur la question de la publicité pour l'alcool et le tabac, parce que le parlement a pris des décisions qu'il a pesées à ce sujet.

Par contre, les articles 24 et 25 et la question des dispositions transitoires mériteraient que nous puissions en peser les enjeux de manière plus approfondie, car ce sont des questions techniques et je ne suis pas sûr que chacun ait tout à fait saisi la portée des votes qui ont été faits tout à l'heure.

Le président. Je vous précise, Monsieur Lescaze, que, lorsque vous avez présenté votre amendement qui consistait à remplacer «peuvent» par «doivent», vous n'avez pas précisé que vous vouliez supprimer, ce faisant, l'amendement de M. Velasco qui complétait cet article. (L'orateur est interpellé.) Non, Monsieur !

M. Bernard Lescaze (R). Monsieur le président, je suis absolument désolé mais votre interprétation n'est pas correcte. Le papier signé de ma main et que je vous ai remis porte très précisément sur l'article 24 et dit, je cite :

«1 Les communes doivent établir un concept directeur des procédés de réclame visant tant le domaine public que le domaine privé.

»2 OK, amendé ;

»3 OK, amendé.»

Cela signifie que le sous-amendement présenté par M. Glatz à son amendement à l'alinéa 2 et que nous avons voté était accepté. Et que l'alinéa 3 amendé était OK aussi.

La meilleure preuve de ce que j'avance, Monsieur le président, c'est que M. Velasco a parfaitement bien compris que mon amendement annulait le sien, et c'est pour cela qu'il s'y est opposé !

Des voix. Non, non ! (Exclamations.)

M. Bernard Lescaze. En conséquence, pour moi le vote était clair ! A l'article 24, alinéa 1, il s'agissait de remplacer, comme je l'ai dit - vous pourrez vérifier sur l'enregistrement - uniquement le verbe «peuvent» par «doivent» et de s'arrêter au texte imprimé. C'est d'ailleurs cela que souhaitait, si j'ai bien compris, M. Cramer, dans sa déclaration sur ce projet.

Le président. Mesdames et Messieurs les députés, compte tenu de ces confusions et des textes d'amendements qui nous ont été remis et qui ne sont pas clairs, je propose à cette assemblée que le troisième débat soit voté la prochaine fois.

Une voix. Voilà !

M. Michel Halpérin (L). J'ai connu cette assemblée mieux inspirée, plus sûre de ses choix et moins aléatoire dans ses propositions...

Nous venons d'assister à une double proposition, présidentielle et du chef du département, de faire le troisième débat puis de ne pas le faire ou, plutôt, d'adhérer à la proposition de M. Dupraz... En passant, nous avons assisté à un début de PACS entre M. Beer et M. Cramer... (Rires.) Nous les en félicitons ! J'observe aussi que nous avons eu droit à une algarade inhabituelle entre le président radical de cette assemblée et «l'amendeur» radical de l'article 24... Je suis persuadé que même une chatte, et à plus forte raison un PDC, n'y retrouverait pas ses petits... (Rires.)

Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, je veux bien que ce sujet vous fasse rire, soit au titre du plaisir que vous avez eu à faire enfin de la politique sanitaire à grandes envolées, soit au titre de la satisfaction que certains d'entre vous ont eue - et j'en suis - à participer à la rupture des monopoles ou de ce qu'on suppose être des monopoles, soit encore que les adversaires de toute entreprise quelle qu'elle soit aient enfin trouvé leur petite satisfaction juvénile ce soir...

Mais nous ne savons plus ce que nous avons voté, nous ne savons même plus quels sont les amendements que nous avons proposés, et nous nous proposons à nous-mêmes un mois de latence intellectuelle... (Rires.) ...duquel nous attendons probablement que la parole nous vienne... du Ciel ! (Rires.) Or, Mesdames et Messieurs les députés, ces quelques années que j'ai eu le plaisir de partager avec vous m'ont appris que nous ne nous améliorons pas d'un mois à l'autre... (Rires.) Je n'irai pas jusqu'à dire : au contraire, mais je le pense ! (Rires.)

En conséquence de quoi, puisque de toute façon ce temps qui vient est un temps vain de jachère, j'ai le privilège de réitérer la proposition que je vous ai faite tout à l'heure. Si nous renvoyons ce texte en commission, il se trouvera au moins quelques commissaires pour travailler pendant que nous penserons à autre chose... Ce n'est pas du luxe, Mesdames et Messieurs les députés, car le débat auquel j'ai eu le désavantage d'assister aujourd'hui pendant presque trois heures n'est même pas un débat de commission... C'est dire qu'il serait utile que nous l'engagions enfin, pour les raisons dites plus tôt et pour celles que je dis maintenant.

Je vous propose par conséquent, Mesdames et Messieurs les députés, d'inviter la commission compétente à se réunir pendant ce mois de carence et puis nous nous réunirons mieux documentés, mieux instruits et en ayant respecté le droit d'être entendu de ceux qui ont sollicité le privilège immense d'être écoutés par cette assemblée, qui n'a, semble-t-il, d'oreilles que pour elle-même ! 

M. Albert Rodrik (S). Je voulais vous poser une question, Monsieur le président... Comment qualifiez-vous l'intervention et l'amendement de M. Lescaze ? Relève-t-il du deuxième débat qui était terminé ou du troisième débat qui n'avait jamais commencé ? 

Le président. Monsieur Rodrik, nous étions en troisième débat ! Il y a simplement eu une confusion quand M. Lescaze a présenté son amendement. Il aurait fallu préciser que celui de M. Velasco, qui complétait l'alinéa 1 de l'article 24, tombait. Cela n'a malheureusement pas été précisé...

Maintenant, c'est fait ! Je suis prêt à vous faire voter à nouveau cet alinéa 1, mais une certaine confusion règne...

M. Christian Ferrazino (AdG). Monsieur le président, puisque M. Lescaze en présentant son amendement a ouvert le troisième débat, celui-ci est ouvert. Par conséquent, M. Cramer ne peut pas le retirer... Seule l'assemblée peut voter le renvoi en commission, si elle s'estime fondée à le faire sur la base des arguments que M. Halpérin nous a donnés déjà avant le débat, puisque le parti libéral ne voulait pas entrer en matière ce soir sur ce projet.

Par contre, dans la mesure où il y a un doute sur l'amendement de M. Velasco, qui a toute sa pertinence, il suffit de déposer à nouveau cet amendement dans le cadre du troisième débat... (L'orateur est interpellé.) Mais non, nous avons déjà voté celui de M. Lescaze ! Il suffit de voter à nouveau l'amendement de M. Velasco en troisième débat ! Cela évitera toute ambiguïté !

Par conséquent, vous pouvez considérer que cet amendement est déposé à nouveau en troisième débat. 

Le président. Je dois tout d'abord mettre aux voix la demande de renvoi en commission. La parole a été demandée, et je vous prie de vous exprimer essentiellement sur ce renvoi en commission.

M. Pierre Meyll (AdG). Le règlement du Grand Conseil précise bien que «le vote d'ensemble d'un projet peut être renvoyé à une séance ultérieure si l'assemblée décide de faire vérifier la rédaction définitive. Dans ce cas, les modifications de pure forme et la rectification d'erreurs matérielles sont seules permises ; elles doivent être soumises à l'approbation du Grand Conseil avant le vote définitif sur l'ensemble du projet».

Il est bien clair que nous étions en troisième débat, que tout ce qui a été accepté au cours de ce deuxième débat peut, tout au plus, être renvoyé à une séance ultérieure, uniquement pour que le texte soit examiné par les juristes du département, afin d'en vérifier la conformité. C'est tout !

Il y a une chose certaine, c'est que cette loi sur les réclames ne nous fait pas de la publicité ! (Exclamations.) 

Mme Christine Sayegh (S). Nous avons effectivement commencé le troisième débat. Un renvoi de ce projet en commission n'aurait donc pas lieu d'être ; il n'aurait en tout cas aucune substance... Il y a eu sept séances dans cette commission et j'estime que nous pouvons...

Une voix. Eh bien, ça ne se voit pas !

Mme Christine Sayegh. Ça ne se voit pas... Ma foi, c'est comme ça ! Le débat me semble dynamique. Je rejoins la proposition de M. Ferrazino de voter à nouveau l'amendement de M. Velasco.  

Le président. Je passe encore la parole à M. Dupraz et je ferai voter cette assemblée sur le renvoi en commission.

M. John Dupraz (R). Je ne comprends pas l'acharnement de M. Ferrazino et de Mme Sayegh à vouloir revenir sur ce vote à tout prix !

Il y a un certain nombre de confusions et, comme l'a dit tout à l'heure notre excellent collègue M. Halpérin... (Exclamations.) ...on peut dire que le texte sur lequel nous avons voté semble assez éloigné de celui qui ressort des travaux de la commission et que nous ne maîtrisons pas vraiment les conséquences de certaines dispositions qui ont été acceptées par ce parlement.

Vous dites que les communes vont faire des concepts en matière d'affichage...

Une voix. C'est normal !

M. John Dupraz. C'est normal... Mais vous ne savez même pas ce que c'est une commune, vous ! (Rires.) Si ce n'est que vous cherchez des clients pour faire des boulots dans les petites communes ! Vous ne savez pas ce qu'est une commune ! Croyez-vous que les communes de paysans comme Laconnex, Aire-la-Ville ou la mienne, ont les moyens de gaspiller de l'argent à faire des concepts ? Qui va les faire ces concepts ? Je vais vous le dire : ce sont ceux qui collent les affiches, et ils vous mettront des panneaux d'affichage partout !

Je regrette infiniment qu'au dernier moment de tels amendements soient présentés - dont on ne connaît pas les conséquences et qui pourraient être graves pour la protection du paysage de ce canton - sans que les communes aient été consultées ! Ce n'est pas acceptable !

La proposition de M. Halpérin est judicieuse - pour une fois, cher collègue, je suis entièrement d'accord avec vous. La voix de la sagesse nous invite à retourner en commission pour examiner ce texte et en apprécier toutes les conséquences. Nous ne sommes pas à deux mois près ! 

M. Robert Cramer. Je vous dis simplement, Mesdames et Messieurs les députés, qu'en ce qui concerne cet article 24 je suis totalement incapable de vous donner la portée du texte qui a été voté, et ce pour la raison que je vais vous donner.

Lorsque nous avons mis l'article 24 dans la loi, nous avons voulu y faire figurer une disposition qui reprenait la pratique d'un certain nombre de communes, sans vouloir qu'elle soit prescritive mais parce qu'elle nous semblait heureuse. Cette disposition - vous avez pu le constater en commission - n'a pas fait l'objet d'un grand nombre de discussions.

Sur quoi, M. Glatz est venu me voir en me proposant toute une série d'amendements qui n'étaient pas très prescritifs non plus, mais qui pouvaient inciter les communes à un certain nombre de réflexions supplémentaires. Au cours des débats que nous avons eus ce soir, on a voulu faire de ces dispositions indicatives, incitatives, des dispositions obligatoires dans le but de rendre les procédures plus transparentes.

Ces dispositions obligatoires vont peut-être dans un sens qui est souhaitable - je n'en doute pas - mais je suis en revanche totalement incapable de vous dire si elles sont réalistes et applicables. Peut-être que le dispositif mis sur pied est applicable dans quelques communes de ce canton - les plus grandes probablement arriveront à s'y adapter - mais, pour la plupart des autres, il n'est pas forcément viable. Sur ce point, nous mériterions peut-être d'avoir quelques informations supplémentaires. C'est pour cette raison que j'ai imaginé, à un moment donné, qu'en ayant un troisième débat ultérieur - mais ce n'est plus possible en l'état de la procédure - on aurait pu en parler un mois plus tard.

Il y a un second point : la disposition transitoire. Le projet de loi prévoyait que l'on se donnait cinq ans pour que tous les cas transitoires soient réglés, conformément à la législation actuelle. En commission, ce délai de cinq ans a paru trop long. Il a donc été réduit à deux. Maintenant nous voyons qu'en ce qui concerne la publicité pour l'alcool et le tabac les milieux intéressés, c'est-à-dire les publicitaires, nous disent qu'ils pourraient s'adapter en trois ans... Il me semble que, sur ce point aussi, il vaudrait peut-être la peine d'aller dans leur sens pour éviter tout litige complémentaire.

Tout cela pour dire qu'à ce stade il ne me paraîtrait pas déraisonnable que nous nous donnions le temps de la réflexion - qui pourrait être court - pour évaluer la portée du texte qui a été voté, plus particulièrement en ce qui concerne l'article 24.

Cela dit, c'est à votre Conseil, bien sûr, qu'il appartient de savoir s'il estime, oui ou non, que cette affaire est tout à fait claire dans les esprits et que ces dispositions sont applicables. Si tel est le cas, l'administration s'efforcera de les appliquer. 

M. Alberto Velasco (S). Je m'inscris en faux par rapport aux propos de M. Cramer !

En effet, le problème soulevé par mon amendement à l'article 24 a concrètement fait l'objet d'un vif débat en commission. Ce débat a eu lieu précisément après avoir auditionné certaines entreprises d'affichage qui ont relevé ce problème. Un débat sur cette question a donc eu lieu en commission, suivi d'un vote. Il vous suffit, pour vous en convaincre, de lire notre rapport !  

Le président. Mesdames et Messieurs les députés, je fais voter formellement le renvoi du projet de loi 8078-A en commission des affaires communales, régionales et internationales.

Mis aux voix, le renvoi du projet en commission des affaires communales, régionales et internationales est adopté.

M. Chaïm Nissim (Ve). Je propose à ce Grand Conseil une motion d'ordre.

Il est 21 h 30, et nous avons encore deux points à traiter, qui risquent tous les deux de prendre du temps. Je suggère de supprimer le point concernant l'école d'ingénieurs... (Exclamations, applaudissements.) En effet, ce point me paraît essentiel, mais il n'y a aucune raison de le traiter en urgence. Par contre, le point concernant la conception cantonale de l'énergie est lui véritablement urgent, parce que les fonctionnaires du département sont déjà au travail. Et il me semble que nous n'aurons pas le temps de traiter ces deux points ce soir, sinon nous risquerions de terminer à 1 h du matin...

Le président. Monsieur Nissim, cette assemblée a décidé de traiter ces deux points ! Je vous propose d'aborder le point 37, sur la conception générale en matière d'énergie. Nous ferons le point après ! 

RD 319-A
6. a) Rapport de la commission de l'énergie et des Services industriels de Genève chargée d'étudier le rapport du Conseil d'Etat au Grand Conseil sur la conception générale en matière d'énergie. ( -) RD319
Mémorial 1999 : Rapport, 3354. Renvoi en commission, 3424.
Rapport de majorité de M. Pierre Vanek (AG), commission de l'énergie et des Services industriels de Genève
Rapport de minorité de M. Alain-Dominique Mauris (L), commission de l'énergie et des Services industriels de Genève
R 417
b) Proposition de résolution de la commission de l'énergie et des Services industriels de Genève approuvant la conception générale en matière d'énergie. ( )R417

RAPPORT DE LA MAJORITÉ

Rapporteur: M. Pierre Vanek

La Commission de l'énergie et des Services industriels a entamé ses travaux, ceci de manière anticipée par rapport au renvoi en commission de cet objet, lors de sa séance du 23 avril dernier. Les travaux ont été conduits sous la présidence de M. Olivier Vaucher, en présence du conseiller d'Etat Robert Cramer, ainsi que de M. Jean-Pascal Genoud, directeur de l'Office cantonal de l'énergie (OCEN), et de M. François Brutsch, secrétaire adjoint du DIAE. Ils se sont poursuivis au cours de deux séances les 7 et 28 mai, pour être ensuite interrompus, jusqu'en octobre dernier, par le traitement urgent, au cours de 7 séances successives, du projet de loi 8064 concernant le projet Cadiom, ainsi que par une séance portant sur les comptes 1998 des Services industriels. Les travaux de la commission se sont conclus ensuite en 3 séances, les 1er, 8 et 15 octobre.

Il est utile de préciser que les travaux de la commission ont porté sur l'Annexe 1 du rapport RD 319 du Conseil d'Etat, soit la conception générale en matière d'énergie (avant-projet approuvé par la commission consultative sur les questions énergétiques). Un avant-projet issu de la commission consultative qui a été transmis en l'état au Grand Conseil par le Conseil d'Etat et qui est devenu le projet sur lequel a travaillé la commission, en l'amendant sur un certain nombre de points, pour en arriver à la version dont l'approbation vous est soumise aujourd'hui, sous forme de résolution, comme le prévoit l'alinéa 3 de la loi sur l'énergie (L 2 30). Ainsi, les annexes 2 et 3 du RD 319 du Conseil d'Etat, préparées par l'OCEN et portant sur l'évolution de la situation énergétique du canton de Genève de 1990 à 1997 (annexe 2), et sur la mise en oeuvre de la dernière conception générale de l'énergie, datant de 1993 (annexe 3), ont servi à informer la commission, mais n'ont pas été l'objet de ses travaux et ne sont donc évidemment pas compris dans le vote qui vous est proposé.

Travaux de la commission

Introduction

Les travaux de la commission se sont ouverts sur une première lecture du texte proposé. A signaler que, peut-être parce qu'il s'agissait d'un texte à approuver sous forme de résolution, et non d'un projet de loi, il n'y a pas eu de vote d'entrée en matière global sur la proposition de conception générale de l'énergie. On doit sans aucun doute néanmoins considérer que l'entrée en matière générale a été acceptée - de facto - par l'ensemble de la commission, tous groupes confondus.

La volonté largement partagée d'arriver dans des délais raisonnables à un texte de conception générale qui matérialise les orientations fondamentales de notre politique énergétique, exprimées dans l'art. 160C de la Constitution, ainsi que dans la Loi sur l'énergie, un texte qui aurait d'autant plus de force qu'il serait « court et sobre », comme le propose le Conseil d'Etat dans son rapport, en tirant les leçons de l'expérience de l'enlisement et du rejet général de la précédente proposition de conception générale de l'énergie au cours de la dernière législature, a sans aucun doute joué un rôle important dans le déroulement des travaux de la commission.

En effet, comme l'indique encore le Conseil d'Etat dans son rapport, l'adoption de la conception générale est une chose « ce qui compte ensuite, c'est surtout de l'appliquer »

RD 319 p.2

La question du plan directeur

A ce propos, il faut indiquer un point important. Dans son rapport, le Conseil d'Etat « s'engage à traduire rapidement les orientations que le Grand Conseil lui aura ainsi données en politiques opérationnelles » en indiquant qu'il s'agira dans ce sens d'élaborer un plan directeur qui jusqu'ici « n'a jamais pu être préparé en raison des circonstances et de l'investissement disproportionné placé dans la conception générale en matière d'énergie par rapport à sa mise en oeuvre ». Cette démarche du Conseil d'Etat : adoption d'une conception générale, puis élaboration d'un plan directeur cantonal de l'énergie « sur la base de celui-ci », a été explicitée à l'époque dans le règlement d'application de la Loi sur l'énergie

Règlement L 2 30.01 entré en vigueur le 22 septembre 1988

Loi sur l'énergie L 2 30, art. 10, alinéa 1, lettre c.

Or, nous sommes dans un processus d'adoption d'une conception générale qui ne remplit pas cette condition. Nous serions en effet bien en peine de nous prononcer sur un plan directeur qui n'existe pas à ce jour. Ce constat ne signifie évidemment pas que nous renoncions à cette prérogative de notre Conseil, prévue par la loi, en votant aujourd'hui la conception en l'état. Ce point a été soulevé lors de la première séance des travaux de la commission

Séance du 23 avril 1999, PV No 26 p.3

Première lecture

Pour en revenir aux travaux de la commission, signalons que les trois premières séances ont été consacrées à une première lecture du texte et à une audition des Services industriels

Séance du7 mai 1999, PV No 27 pp. 2 à 5

Point 5C du projet

En résumé, l'audition des Services industriels, représentés par MM. Gérard Fatio, président et par Jean-Luc Zanasco, membre du bureau du Conseil d'administration, dont il faut signaler qu'ils avaient déjà été consultés dans le cadre de la commission consultative, a apporté un certain nombre de propositions d'amendements relativement mineurs, sur le traitement desquels nous reviendrons également, un débat sur la problématique des pompes à chaleur, qui n'a pas débouché sur une concrétisation dans le projet de conception et une demande des SIG d'être associés à l'élaboration du plan directeur.

En outre, pour ce qui est de la prise de position générale, M. Fatio a répondu à la question d'une députée lui demandant si la conception s'inscrivait pour les SIG « dans une perspective d'entreprise » ou si elle représentait du point de vue de celle-ci « trop de contraintes », en indiquant que les SIG envisageaient les objectifs de la conception « sous forme d'un défi » à relever et qu'en outre cette entreprise est d'ores et déjà soumise à l'art. 160C de la Constitution

A ce sujet il n'est peut-être pas inutile de rappeler ici que l'Art. 1 (But) de la Loi sur l'organisation des Services industriels L 2 35, en son alinéa 2, fait explicitement référence à l'art. 160 C de la Constitution et pose la nécessité pour les SIG de se conformer ";aux principes de la conservation de l'énergie, du développement prioritaire des énergies renouvelables et du respect de l'environnement."

Deuxième lecture et propositions d'amendements

Introduction

Lors de la séance de reprise des travaux de la commission le 1er octobre dernier

V. PV No 36

Le point 5 de l'introduction portant sur Les fondements de la politique énergétique cantonale a également été accepté à l'unanimité de la commission. Ce point mérite quand même qu'on s'y arrête ; en effet, il rappelle :

en son point a) Le mandat constitutionnel adopté en 1986 et inscrit dans l'art 160C de la Constitution qui « exprime la volonté genevoise de renoncer à l'énergie nucléaire » ;

en son point b) La législation cantonale qui se fixe comme objectif « un approvisionnement énergétique suffisant, sûr, économique, diversifié et respectueux de l'environnement » ainsi qu'« une utilisation rationnelle et économe de l'énergie » associée à « un développement prioritaire de l'exploitation des sources d'énergie renouvelables » ;

en son point c) Le développement durable dans la perspective duquel s'inscrit la conception générale de l'énergie en prenant en compte pleinement dans ce cadre « les objectifs spécifiques genevois de renoncement à un approvisionnement en électricité fondé sur la technologie nucléaire » ;

en son point d) Les postulats de 1993, qui ont été reconduits comme partie intégrante de cette nouvelle conception, notamment le Postulat 3 qui indique en particulier que « le financement des mesures de politique énergétique peut faire l'objet d'un surcoût sur les prix des énergies consommées », ceci bien sûr moyennant une base légale, un intérêt public et dans le respect du principe de proportionnalité. Ce point, incontesté en commission, mérite d'être signalé. En effet, lors du passage du projet précédent de conception cantonale devant notre Conseil, ce postulat avait été contesté par certains, un amendement ayant même été proposé pour en inverser la teneur.

Le seul élément qui a fait débat, débouchant sur un vote de la commission concernant ce chapitre, a porté sur l'opportunité de supprimer ou non la note de bas de page indiquant que la Commission consultative était « divisée » sur l'opportunité de voir apparaître dans la conception l'objectif du renoncement à un approvisionnement en électricité d'origine nucléaire. Cette note constituant « un rappel historique », pour reprendre les termes d'un député radical

M. Roger Beer, v. PV 36 p.3

Quant à la commission de notre Grand Conseil, elle n'a pas quant à elle été divisée sur ce point, aucune proposition d'amendement visant à supprimer cet objectif du texte proposé n'ayant été formulée et l'ensemble de ce chapitre ayant, rappelons-le, été adopté à l'unanimité.

Partie A: Situation et engagements du canton

Ce point, essentiellement descriptif, n'a fait l'objet d'aucun amendement. Il a été accepté à l'unanimité.

Partie B: Objectifs et priorités

Ce point a fait l'objet de deux amendements, le premier étant essentiellement de nature rédactionnelle. Il concerne la formulation d'un des « 2 grands principes exprimés à l'alinéa 1 de l'art. constitutionnel 160C ». La version adoptée parle de « substitution de consommations nécessaires actuellement d'origine fossile et nucléaire, lorsque cela est possible et rationnel, prioritairement par des énergies renouvelables ». Le texte initial du projet parlait d'origine fossile seulement, l'OCEN nous expliquant qu'à ses yeux « fossile » était un concept général englobant « tous les agents énergétiques non renouvelables » et donc bien entendu aussi « les matériaux fissiles utilisés par l'industrie nucléaire »

Explication figurant dans un tableau synoptique de travail fourni par l'OCEN à la Commission.

Le deuxième amendement porte sur le point de cette partie B qui traite de « La libéralisation des marchés »

Sur ce chapitre, et pour être complet, il n'est pas inutile de rappeler ici les deux textes votés par notre Grand Conseil et remettant en cause le projet de loi en cours de traitement au Chambres fédérales sur l'";ouverture du marché de l'électricité" (LME))

M. René Longet

Moyennant ces deux modifications, mineures on en conviendra sans doute, ce chapitre a été lui aussi accepté à l'unanimité.

Partie C: Evolution retenue pour les agents énergétiques

Vous trouverez en tête de ce point deux paragraphes. Le premier est un constat, la consommation annuelle totale d'énergie par habitant est indiquée (92.0 GJ

GJ il s'agit de Gigajoules. Giga étant un préfixe qui placé devant une unité indique sa multiplication par un milliard, le joule étant une unité d'énergie qui correspond à l'application d'une puissance d'un watt pendant une seconde. Une ampoule consommant 100 watts et branchée pendant une heure (soit 3600 secondes) ";consomme" donc une énergie de 100x3600 soit 360 000 joules. (souvenirs d'école / pv)

Ces indications quantitatives ont été proposées par l'OCEN, suite à une remarque des représentants des SIG, lors de leur audition, concernant l'utilité de quantifier un certain nombre d'objectifs. Ils reprennent, selon M. Spierer de l'OCEN

v. PV No 36, p.4

Partie B : Objectifs et priorités p. 16

Electricité

Cette partie n'a fait l'objet d'aucune transformation, ou proposition d'amendement par rapport au texte proposé. Rappelons simplement ici qu'il est proposé (tous les autres paramètres étant inchangés, ex. population, PIB, etc.), de diminuer la consommation de 10 % à l'horizon 2005 et de 20 % à l'horizon 2015, ceci par rapport à l'état 1990, d'accroître de 5 % d'ici 2010 la production locale d'électricité de source renouvelable : objectif qui ne saurait être atteint sans l'apport décisif d'énergie électrique indigène et renouvelable issue de la rénovation des installations du barrage de Chancy-Pougny. Pour ce qui est des approvisionnements hors-canton, il est fixé comme objectif pour le plan directeur d'évaluer dans quelle mesure, quels délais et à quels coûts l'approvisionnement pourra être fondé « en plus grande partie ou en totalité sur des énergies renouvelables ».

Combustibles

Sur ce point également le texte qui vous est proposé est non seulement inchangé par rapport au projet du Conseil d'Etat, mais n'a fait l'objet d'aucune proposition d'amendement. En matière d'émissions de CO2 on vise une réduction de 10 % pour 2010 (Objectifs Energie 2000), à population constante la consommation de combustibles devrait diminuer de 15 % d'ici 2010 par rapport à 1997, la maîtrise de la demande se fondant sur des exigences en matière de construction et sur une incitation à une bonne gestion, en l'occurrence du parc immobilier. Un objectif de 3 % de production de chaleur sur la base d'énergies renouvelables est également formulé.

Carburants

Sur ce point, le texte a vu la commission effectuer plusieurs modifications significatives par rapport à la version initiale. L'intégration de l'aspect énergétique aux « plans divers touchant à la gestion et à la diminution du trafic » et se fera notamment en « concertation avec nos voisins vaudois et français ». (accepté par tous) On n'« influencera » pas la constitution du parc automobile vers les véhicules à plus faible consommation, mais on l'« encouragera » suite à un amendement libéral soutenu par 5 voix (3 L, 1 R, 1 DC) contre 2 (1 S, 1 AdG) avec 2 abstentions (Ve). Une proposition nouvelle de l'OCEN de « contrecarrer la tendance actuelle à une augmentation de la durée des déplacements » sera rejetée par 6 voix (3 L, 1 R, 1 DC, 1 Ve) contre 3 avis (1 S, 1 Ve, 1 AdG), le même vote supprimant une phrase du texte initial exprimant la difficulté de formuler des objectifs quantitatifs en la matière.

En outre, deux sous-titres sont rajoutés dans ce point (formulés par l'OCEN sur la base des débats de la commission). Le premier concerne l'Efficacité des véhicules : il fixe « l'objectif d'augmenter l'efficacité énergétique du parc automobile de 10 % à l'horizon 2010 ». Soit une baisse de la consommation de l'énergie de 10 % en 10 ans dans ce domaine, qui peut passer notamment par une augmentation du taux d'occupation des véhicules. Un sous-amendement vert visant à augmenter l'objectif d'accroissement de l'efficacité en la matière à 20 % sera refusé par 5 voix (3 L, 1 R, 1 DC) contre 3 (2 Ve, 1 S) avec 2 abstentions (1 S, 1 AdG). L'amendement portant rajout de ce point ne sera quant à lui contesté par personne.

Le deuxième sous-titre rajouté concerne l'Efficacité des transports, il se réfère aux objectifs du plan Mobilité 2005, sans en chiffrer les effets énergétiques. Il contient une disposition proposant « une augmentation du transport collectif de 50 % par rapport à 1990 » qu'un député libéral trouvera « totalement irréaliste ». Mise au voix, la suppression de l'ensemble de ce point sera refusée par 6 voix (2 S, 2 Ve, 2 AdG) contre 5 (3 L, 1 R, 1 DC), ceci sans abstention.

Eau

Ce point ne sera en substance pas modifié, une proposition des SIG de transformer le deuxième alinéa indiquant que le plan directeur devra « contenir des mesures encourageant une utilisation rationnelle de l'eau » plutôt que « d'intégrer la mise en place d'une politique d'utilisation rationnelle de l'eau » est acceptée à l'unanimité. Une proposition verte, d'intégrer un objectif quantitatif de diminution de la consommation de l'eau de 10 %, ainsi qu'une proposition à 5 %, ne trouvent pas de majorité. Elles sont appuyées par 5 voix (1 S, 2 Ve, 2 AdG) contre 5 (3 L, 1 R, 1 DC).

Partie D: Mesures d'application

1. Domaine de l'électricité

Bourse renouvelable : projet d'offrir au consommateur de l'électricité 100 % renouvelable d'origine solaire, éolienne, etc. moyennant un surcoût payé par celui-ci. Cette proposition, dont la formulation devient plus générale que dans la première version, suite à une proposition des SIG, est adoptée par 10 voix, sans opposition et avec une abstention (DC).

Modernisation de la production hydroélectrique : soit la modernisation des installations du barrage de Chancy-Pougny, déjà évoquée comme indispensable au regard des objectifs de la conception. Ce point est accepté à l'unanimité et sans débat.

Sensibilisation des preneurs éligibles : ce point propose des démarches auprès des gros consommateurs d'électricité (qui dans l'hypothèse de la libéralisation du marché de l'électricité seraient les premiers à pouvoir se fournir où bon leur semble, contrairement aux petits consommateurs qui resteraient captifs), pour les inciter à acheter de l'électricité de source renouvelable. Il est également accepté à l'unanimité et sans débat.

Promotion et coordination des programmes de gestion de la demande (dits DSM

DSM = Demand Side Management, intervention visant à réduire la ";demande" d'électricité pour un même service rendu, ceci par l'accroissement de l'efficacité énergétique des installations du consommateur, ce qui équivaut à produire ce que les Américains ont nommé des négawatts, plutôt que d'adopter l'attitude traditionnelle des électriciens consistant à augmenter l'offre (Supply side...) en produisant des kWh supplémentaires, avec ce que cela implique d'effets négatifs accrus sur l'environnement et d'épuisement des ressources non renouvelables.

Promotion des appareils et équipements économes en énergie : accepté par tous, avec le rajout unanimement appuyé de l'évocation d'un nouveau label dit Energy adopté au niveau européen (y compris Suisse) en 1999.

Technologies : ...permettant une utilisation plus efficace de l'énergie à promouvoir. Une évidence également acceptée par tous.

Géothermie : ce point est nouveau. Les SIG sont venus proposer un point sur l'« encouragement de la géothermie de surface », par l'utilisation de pompes à chaleur ...qui restent une forme de chauffage électrique. Le département ne s'est pas rallié à cette proposition et elle a divisé les commissaires, les appréciations techniques et écologiques de ce mode de chauffage étant controversées, il a paru inopportun de l'inclure dans la conception. C'est par 11 voix (3 L, 1 R, 1 DC, 1 S, 2 Ve, 3 AdG), sans opposition et avec une seule abstention (S) que cette proposition a été écartée. Par contre, l'intervention des SIG ayant attiré l'attention de la commission sur la géothermie, une proposition d'aller dans le sens de la promotion de la géothermie de grande profondeur dite «hot dry rock deep heat mining» a été formulée, appuyée par M. Robert Cramer en tant qu'ancien membre de la Société suisse de géothermie, qui a pu éclairer la commission sur ce point. La Suisse serait en train de retenir un premier site pilote à Bâle pour cette technologie, dont les coûts semblent ne devoir pas être trop élevés, qui sur la base de forages profonds permet une production combinée de chaleur (à distribuer dans un réseau de chauffage à distance) et d'électricité (de source évidemment renouvelable, en effet on n'épuise pas la chaleur profonde du globe terrestre). C'est sans opposition par 9 voix (1 L, 1 R, 2 S, 2 Ve, 3 AdG) avec 3 abstentions (2 L, 1 DC) que la commission a estimé que Genève devait si possible monter dans le train de cette technologie prometteuse.

2. Domaine des combustibles

Les points 2.1 à 2.6, portant sur les mesures en matière de construction et de rénovation, l'assainissement du parc immobilier, l'efficacité des chaufferies, la promotion de concepts énergétiques de zones, la récupération de chaleur de diverses activités industrielles ou tertiaires, l'utilisation pour le chauffage du bois issu de l'entretien des forêts, ont été acceptés tels quels, sans que ne soit proposée aucune modification.

Par contre, un point 2.7 nouveau Encouragement au gaz naturel, issu d'une proposition des SIG, a fait l'objet d'un débat important. Dans un premier temps la suppression de ce point a été proposée par un député vert, mais a été refusée par 6 voix (1 S, 2 Ve, 3 AdG) contre 5 (3 L, 1 R, 1 DC). Au final, l'encouragement de l'utilisation du gaz, comme substitution au mazout en matière de chauffage, mais aussi en matière de cuisson comme remplacement de la cuisson électrique, l'a emporté sans opposition, par 9 voix (1 L, 1 R, 1 DC, 1 S, 2 Ve, 3 AdG) avec 2 abstentions (L), moyennant une précision proposée par un député AdG indiquant que cet encouragement ne devra pas être « ...au détriment d'une énergie renouvelable ».

Cette réserve sera précisée lors de la dernière séance (v. plus loin)

3. Domaine des carburants

Ce point a fait l'objet d'une proposition de restructuration de sa matière, formulée par l'OCEN, il comporte dorénavant trois divisions et quelques :

3.1 Besoins en déplacement

A l'« analyse du potentiel de diminution du besoin en déplacement » figurant dans le texte original est rajouté le lien explicite aux « réflexions sur l'aménagement du territoire ». En effet, le fait que l'aménagement du territoire doive inclure des objectifs énergétiques, visant à minimiser les besoins en déplacement motorisés est une évidence, l'augmentation des déplacements induits par la centralisation et la concentration de certains services se paye non seulement par une perte de temps et une dégradation de la qualité de la vie, et du tissu social de certains quartiers, mais également par une consommation accrue de carburants non renouvelables.

On pense évidemment à ce propos aux projets de fermetures massives d'Offices postaux prévues par La Poste dans le cadre de son programme dit Optima, qui vise pour des raisons de maximisation de la rentabilité de ses investissements, à concentrer ses bureaux là où les flux de clients sont maximum (par ex. dans de grands centres commerciaux), ce qui contribuera d'ailleurs à renforcer ces mêmes flux et à créer des ";besoins de déplacement" évitables...

Ce point a été accepté à l'unanimité, après avoir été amputé, sur proposition libérale/démocrate-chrétienne

Il s'agit de M. Claude Blanc et de Mme Janine Berberat, v. PV No 37 du 8 octobre p.3

3.2 Efficacité des véhicules

On encourage le développement et l'utilisation de véhicules « faisant appel à des technologies à faible impact environnemental et à faible demande d'énergie ». A noter que ce point se terminait, dans la proposition de l'OCEN par l'indication « en accord avec les objectifs de la conception » qui a été supprimée sur proposition d'un député socialiste

Il s'agit de M. Alberto Velasco, v. PV No 37 du 8 octobre p.3

3.3 Efficacité des transports

Ce point vise le développement des « autres formes de mobilité » : transports publics, déplacements à pied, à vélo, etc. Il reprend d'ailleurs simplement un objectif constitutionnel figurant explicitement dans l'art. 160C (al. 3, lettre b) qui indique que « la conservation de l'énergie est obtenue notamment : b) dans le secteur des transports, en favorisant les déplacements en transports publics, à vélo et à pied, notamment sur le plan des investissements et des équipements ». Ce point a été adopté sans opposition, par 11 voix avec 2 abstentions (L, R).

4. Un Etat modèle (bâtiments et installations propriété de l'Etat)

4.1 Gestion de la demande d'énergie

Ce point visait notamment, dans sa version initiale, à mettre en oeuvre tout projet d'assainissement énergétique de bâtiments ou d'installations de l'Etat quand le temps escompté de retour sur l'investissement nécessaire était inférieur à 3 ans.

Suite à une remarque sur le caractère arbitraire du critère des 3 ans, l'OCEN a proposé une version prévoyant la « réalisation automatique » de tout projet d'assainissement de ce type « sans exclure pour autant des projets dont le temps de retour est plus important ». Mais le terme « automatique » a heurté plusieurs députés

Notamment MM. Claude Blanc et Chaïm Nissim, v. PV No 37 p.4

Hormis cette formulation controversée, les autres dispositions de ce point: comptabilité analytique (en matière d'énergie) par bâtiment, extension des expériences pilotes de sensibilisation à l'utilisation intelligente de l'énergie, fourniture d'appareils économes, ont été acceptées sans autres.

Au vote d'ensemble ce point a été accepté sans opposition par 13 voix avec une abstention (S).

4.2 Constructions de l'Etat

Ce point innove en prévoyant l'intégration de « nouveaux critères d'efficacité économique, énergétique et environnementale » en intégrant notamment les « coûts externes de l'énergie » quand il s'agit de choisir entre différentes technologies. Il n'a fait l'objet d'aucune modification.

5. Actions de caractère général

5.1 Information à la population

Sur ce point un député vert

M. Chaïm Nissim, v. PV No 37 p. 5

5.2 L'action pédagogique

Ce point sera accepté dans sa forme initiale avec un seul amendement, proposé par un député AdG, qui consiste à affirmer que l'action pédagogique ne doit pas seulement être menée « en collaboration étroite avec le DIP », mais qu'elle doit aussi l'être « avec le corps enseignant » directement. L'idée étant qu'il s'agit peut être moins de promouvoir des opérations ponctuelles ou des « activités pédagogiques » isolées du cadre général de l'enseignement et proposées de l'extérieur, mais bien plutôt d'une intégration transversale de la sensibilisation et de l'éducation en la matière, qui traverse un champ de disciplines et d'activités scolaires variées. Dans ce sens, le rôle-clé est joué par les enseignant-e-s, qu'il s'agit de gagner à ce point de vue ; ils méritent donc d'être mentionné-e-s explicitement comme acteurs/trices dans cette affaire.

Cette proposition sera acceptée sans opposition par 13 voix avec une abstention (R). L'ensemble du point 5.2 comprenant en outre la création d'une « Maison de l'énergie » à Vessy et la proposition d'actions pédagogiques et de sensibilisation en direction des communes, sera accepté à l'unanimité.

5.3 Centre intercollectivités pour la maîtrise de l'énergie

Cette proposition se voit transformée de « centre intercommunal » (projet initial) en centre « intercollectivités », terme un peu inhabituel, mais qui traduit mieux la réalité envisagée qui consiste à associer l'Etat, la Ville et les autres communes en créant et en mettant en commun un pool de compétences et de partage d'expériences en la matière, susceptible de contribuer à impulser dans le cadre de chacune de ces collectivités des initiatives énergétiques les plus efficaces possibles. Il faut préciser que le « Centre » envisagé n'est pas une structure lourde qui remplacerait l'OCEN ou le Service de l'énergie de la Ville de Genève, dont l'existence et le financement sont bien sûr à maintenir, mais une structure de coordination légère et en principe d'un coût modeste.

Des député-e-s libéraux manifestent le regret que le « Centre » envisagé ne prévoit pas des formes de participation du secteur privé. Malgré cette réserve, cette proposition sera acceptée par 10 voix (2 DC, 3 S, 2 Ve, 3 AdG) sans opposition et avec 4 abstentions (3 L, 1 R).

5.4 Echange de compétences entre secteurs privés et publics

Ce point nouveau sera proposé lors du « troisième débat », de la dernière séance de la commission. Nous y reviendrons plus loin.

5.5 Les aides fiscales

Il s'agit de la promotion de mesures fiscales existantes. Le texte, voté à l'unanimité, a été très légèrement développé par l'OCEN dans le sens de l'explicitation des « aides en vigueur » mentionnées dans la version initiale sans que l'on sache forcément de quoi il s'agissait.

5.6 Taxe sur les énergies non renouvelables

Proposée par un député vert

M. Chaïm Nissim, v.PV No 37 p.8

Quoiqu'il en soit, il se trouvera 9 voix (1 R, 3 S, 2 Ve, 3 AdG) contre 5 (3 L, 2 DC) pour refuser dans un premier temps la proposition libérale visant à ne retenir que l'aspect d'étude d'une taxe sur les énergies non renouvelables et à ne pas évoquer sa mise sur pied.

Ce sous-amendement refusé, la proposition recueillera 8 voix (3 S, 3 Ve, 3 AdG), contre 6 (3 L, 1 R, 2 DC).

Débat et vote finals

Lors de la séance du 15 octobre

V. PV No 38

la proposition renouvelée d'intégrer un objectif quantitatif de réduction de la consommation d'eau (en l'occurrence 5 % pour 2010) est refusée par 7 voix (3 L, 2 DC, 2 R) contre 6 (1 AdG, 3 S, 2 Ve), par contre la proposition suggérée par le département de reprendre la formulation du projet initiale prévoyant, outre l'indication du « coût » énergétique du m3 d'eau potable à Genève que « Le plan directeur devra intégrer la mise en place d'une politique d'utilisation rationnelle de l'eau » est acceptée à l'unanimité ;

une modification proposé par un député radical, qui s'y connaît, visant à préciser au point 2.6 qu'il s'agit bien d'encourager le recours « au bois issu de l'entretien des forêts » (plutôt qu'au « bois d'entretien des forêts » !) est acceptée à l'unanimité ;

une députée libérale

Mme Janine Berberat, v. PV No 38 p. 4

la même députée libérale qui reviendra sur le point 5.1, concernant l'information à la population, en demandant qu'on complète la phrase qui indique que « De plus, l'information à la population précisera que le but de l'utilisation rationnelle de l'énergie est aussi le renoncement à l'usage de l'énergie d'origine nucléaire » en y rajoutant le complément « ...en indiquant le coût de ce renoncement ». Cet amendement est combattu par des députés de gauche et verts en affirmant qu'il a un aspect unilatéral. En effet, sous prétexte d'objectivité, on n'y évoque que le « coût » du renoncement sans dire un mot des avantages que celui-ci comporte. Mis au voix, cet amendement sera rejeté par 8 voix (3 AdG, 3 S, 2 Ve) contre 7 (3 L, 2 DC, 2 R) ;

suite à ce premier vote sur ce point 5.1 un député radical

M. Roger Beer, v. PV No 38 p.6

la même députée libérale propose ensuite un point 5.4 nouveau intitulé « Echanges de compétences entre secteurs privés et publics », ce point est accepté à l'unanimité, sans débat ;

quant aux amendements, les travaux se conclueront par le vote de la proposition d'un député libéral

M. Alain Dominique Mauris, v. PV No 38 p. 7

M. Alberto Velasco, v. PV 38 p.8

La résolution approuvant la conception générale de l'énergie, telle qu'amendée par les travaux de la commission, est acceptée en vote final par 13 voix (3 AdG, 3 S, 2 Ve, 1 R, 2 DC, 2 L), sans opposition, mais avec deux abstentions (R, L).

Pierre Vanek est désigné comme rapporteur de la commission. Le parti libéral annonce un « deuxième rapport de majorité » qui sera rédigé par M. Alain Dominique Mauris.

Ce 2e rapport de majorité pose un petit problème. En effet, au vu du règlement, il semble qu'il ne puisse y avoir qu'un seul rapport de majorité. La question est ouverte ou l'a du moins été de savoir si une abstention permet de rédiger un rapport de minorité, les abstentionnistes sont-il une minorité au sens du règlement du Grand Conseil ?. Par ailleurs le rapporteur proposé de cette ";minorité" a voté, quant à lui, en faveur de la Conception, l'abstention libérale signalée étant le fait de Mme Janine Berberat. Ainsi, le rapporteur ne fait pas partie de la ";minorité" au nom de laquelle il rapporte! Je suggère au bureau, comme l'a fait aussi récemment la Commission des droits politiques et du règlement, de rédiger une note précisant les règles à appliquer en la matière, ceci dans son rôle d'arbitre de l'interprétation du règlement du Grand Conseil. Au-delà de ces questions formelles, je tiens à préciser que je trouve tout à fait positif la rédaction d'un deuxième rapport qui ne peut que servir à enrichir le débat autour de l'important document que constitue la CGE. (pv)

Conclusion

Le rapporteur se permet ici de souligner qu'il n'a pas voulu dans ce cadre rouvrir le débat, voire la polémique sur les avantages et les inconvénients de l'énergie nucléaire, sur ses dangers, le problème des déchets radioactifs et les accidents récents dans la branche.

Pour lui, ce débat est clos ou devrait l'être au niveau du Grand Conseil, il s'agit maintenant de tirer les conséquences pratiques des prises de position claires du souverain en la matière. On notera également que le rapporteur n'a pas voulu relancer dans ce cadre le débat autour du problème de ladite « libéralisation » du marché de l'électricité, à laquelle comme lui une large majorité de ce Grand Conseil est sans aucun doute opposée, particulièrement dans les formes brutales qui se dessinent du côté de la majorité des chambres fédérales.

Par contre, le rapporteur en question se permet de saluer ici le travail effectué par l'OCEN, le Conseil d'Etat, la Commission consultative, ainsi que par la Commission de l'énergie de notre Conseil. En effet, leurs travaux conjugués, au-delà d'un certain nombre de détails qui ont souvent occupé le devant de la scène de nos débats sur cet objet, éclipsant parfois les points d'accord importants, ont débouché sur un texte excellent.

Un texte dont l'ensemble, dans sa cohérence et par la direction qu'il indique, dépasse en qualité celle de la simple addition de ses parties. Un texte que je vous engage donc vivement, Mesdames et Messieurs les député-e-s, à voter sans opposition, comme l'a fait votre commission, donnant ainsi une base solide au passage aux travaux pratiques en la matière, qui représente évidemment la finalité de tous nos débats.

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Proposition présentée par la Commission de l'énergie et des Services industriels

Date de dépôt: 1er février 2000Papier

Proposition de résolutionapprouvant la conception générale en matière d'énergie

vu le rapport du Conseil d'Etat sur la conception générale de l'énergie (RD 319) ;

vu le rapport de sa Commission de l'énergie et des Services industriels (RD 319-A) ;

vu l'article 10, alinéa 3 de la loi sur l'énergie, du 18 septembre 1986 ;

approuve la conception générale de l'énergie dans la teneur annexée au rapport RD 319-A.

RAPPORT DE LA MINORITÉ

Rapporteur: M. Alain-Dominique Mauris

Pourquoi un rapport de minorité

Lors du vote d'ensemble de la commission sur la conception générale de l'énergie, le groupe libéral a annoncé le dépôt d'un deuxième rapport de majorité. Son but est d'apporter certaines nuances à cette conception. En effet, les débats nourris et « énergiques » lors des différentes séances de commission ont montré que tous les commissaires ne partageaient pas les mêmes perceptions quant au rédigé de ce texte qui servira de référence à l'Administration pour l'élaboration du plan directeur. Quelques jours après notre annonce de dépôt, on nous a communiqué qu'il n'était pas possible d'établir un 2e rapport de majorité. On nous a cité l'exemple vécu par notre collègue M. Vanek, lors d'une précédente situation. Il avait dû transformer son 2e rapport de majorité en rapport de minorité !

Nous avons convenu avec le rapporteur de majorité que ce rapport se limiterait à mentionner les nuances que le groupe libéral souhaite apporter à la conception générale de l'énergie. Les commissaires libéraux sur cette base ont accepté avec 2 voix et 1 abstention, cette conception lors du vote final.

Vision globale

Une conception générale de l'énergie doit être un document de référence pour non seulement l'administration (le plan directeur et la traduction opérationnelle de la CGE et à valeur obligatoire), mais aussi tous ceux et celles qui vont y puiser les sources de leurs réflexions et les références de leur travail dans le domaine énergétique. Tout en tenant compte du présent, elle doit se réserver une approche suffisamment large et pragmatique sur la vision des besoins futurs en énergie du canton, les moyens de les satisfaire et les conséquences sur la société. Elle tire sa légitimité du cadre légal, en l'occurrence de la loi sur l'énergie. Ce document est évolutif et est revu et réadapté régulièrement.

La conception générale de l'énergie doit établir un état exhaustif de la situation du canton de Genève en matière énergétique, ses besoins futurs et fixer les priorités de la politique énergétique cantonale.

Le groupe libéral inscrit ses priorités dans le respect du développement durable qui favorise des énergies de plus en plus propres tout en satisfaisant la consommation. L'idéal est une énergie de qualité et l'autonomie d'approvisionnement, mais en réalité la dépendance des différentes énergies est encore grande, y compris l'énergie nucléaire. Par exemple, les secteurs économiques et privés demandent toujours plus d'énergie électrique.

Evolution comparée de la consommation électrique du canton de Genève :

milliers kilowatts/h.

milliers kilowatts/h.

milliers kilowatts/h.

1994

mai

200.057

1998

mai

197.065

1999

mai

203.970

juin

204.372

juin

197.756

juin

200.894

juillet

204.691

juillet

201.253

juillet

202.009

La conception générale de l'énergie doit clairement indiquer comment elle entend satisfaire les besoins énergétiques futurs sans freiner la croissance économique de notre canton, afin de ne pas péjorer les conditions-cadres au maintien des emplois et des entreprises dans notre canton.

La vision globale de la conception prend en compte l'ensemble des paramètres de notre communauté régionale dans une approche coût-opportunité, sans négliger aucun secteur.

Ambigüité des objectifs

Entre les voeux pieux, les idéaux politiques et les théories, il n'est pas facile d'établir des objectifs clairs et globaux qui soient réalistes.

L'ambigüité des objectifs de la conception repose sur comment satisfaire les 3 composantes suivantes : garantir en même temps le bien-être social, la prospérité économique et un environnement protégé (développement durable) ; les deux grands principes exprimés à l'alinéa 1 de l'article constitutionnel 160C face à la libéralisation des marchés, les conjonctures économiques et sociales et les coûts des choix politiques.

La discussion va porter essentiellement sur le renoncement à l'énergie nucléaire qui a été voulu par le peuple genevois, mais comment y substituer d'autres énergies très rapidement à des coûts plus ou moins identiques ? C'est impossible à court terme. Cela implique soit d'acheter à l'étranger l'énergie électrique sans se soucier de sa provenance, soit de réduire drastiquement la consommation d'électricité, soit de faire la production à partir d'autres sources (hydrauliques, à gaz, etc.), mais à quel prix ?

Il est regrettable que la conception générale ne propose pas une information complète sur les coûts de renoncement à certaines énergies, ainsi que sur les engagements des consommateurs captifs et éligibles.

Par ailleurs, certains chiffres sont donnés sur les objectifs à atteindre comme l'efficacité énergétique du parc automobile ou des transports qui paraissent trop théoriques. Personne n'a pu nous expliquer pourquoi tel pourcentage a été choisi plutôt que tel autre !

L'impression est qu'ils ont été donnés sur une base purement « feeling » que « scientifique » ! La conception privilégie les transports publics au détriment de la complémentarité des transports publics avec les transports privés. C'est là une vision étroite qui ne prend pas en compte les synergies et les développements futurs à envisager concernant les transports en général.

Ainsi, par la poursuite de certains objectifs purement politiques, on risque de prétériter les équilibres, ce qui va à l'encontre du développement durable.

Le rôle du privé est le parent pauvre de cette conception ! Pourtant, le privé en est le principal intéressé.

A plusieurs reprises, la majorité de la commission s'est montrée frileuse pour l'intégrer pleinement dans cette conception. Il est regrettable que dans un document qui doit imaginer le futur, l'on se coupe du principal partenaire de l'Etat, qu'est le privé.

Même si les spécificités des branches sectorielles sont vastes et complexes, elles sont le reflet de la réalité. De plus, les ménages sont aussi à prendre en compte.

Le rôle du privé aurait dû être mieux défini et impliqué pour parvenir à réaliser les objectifs. L'évolution cyclique, technique et stratégique des entreprises s'inscrit dans la réalisation d'une meilleure maîtrise de la consommation électrique pour des raisons de coût, et d'une meilleure adaptation aux facteurs de production pour une raison de rentabilité.

C'est pourquoi, le groupe libéral insiste sur la complémentarité que doit favoriser la conception entre secteurs privé et public. Apprendre à consommer ensemble est certainement un des premiers pas pour mieux atteindre les objectifs de la conception.

Une ignorance de ce secteur est contre-productive et nuit à la recherche de solutions pour favoriser le développement durable. Une plus grande transparence sur le rôle des acteurs est fondamentale pour la cohérence de cette conception.

Enfin, concernant la taxe, elle a un but ici de punition qui laisse perplexe le groupe libéral. Elle est inadaptée à la situation et inéquitable car elle insiste pour taxer sans proposer d'énergies alternatives fiables. Le recours à la taxe ne doit pas être une nouvelle façon de faire passer à la caisse les consommateurs ! L'étude d'une taxe devra clairement indiquer son affectation et la limiter dans le temps. Elle tiendra compte des possibilités de substitution et de remplacement des énergies non renouvelables sans préjudice pour les conditions compétitives de notre économie. Ce qui pour l'heure est impossible, malheureusement. Cela reviendrait à vouloir faire emprunter à quelqu'un un chemin qui est tracé sur un plan, mais n'existe dans la réalité qu'à l'état de chantier.

L'incitation à la Bourse d'énergie est plus adaptée pour l'heure à la situation et de surcroît est motivante pour le consommateur. Elle donne la possibilité d'acheter l'énergie avec un label « propre » comme cela se fait à Zürich. Un peu comme le label « bio » qui connaît auprès des consommateurs un succès sans précédent.

A Genève nous devrions, avant d'imposer une taxe « coercitive », favoriser la responsabilisation des individus pour donner les possibilités à ceux qui sont prêts à payer plus cher leur énergie « propre » de le faire. En d'autres termes, il faut être plus incitatif et imaginatif que punitif.

Conclusion

Un très gros travail a été fait en commission. Tant le président du département, M. Cramer, conseiller d'Etat, son secrétaire adjoint M. Brutsch, MM. Genoud et Spierer de l'OCEN ont apporté leur contribution aux débats.

La volonté d'établir une conception générale regroupant toutes les tendances a été un but qui a été atteint dans les grandes lignes.

Reste maintenant à s'accorder sur les nuances à apporter au texte pour favoriser une vision globale et une transparence totale, y inclure le privé pour favoriser les complémentarités et ne pas voir dans la taxe la panacée des solutions.

Propositions d'amendement

3.3. En coordination avec la complémentarité transport public - transport privé et les divers domaines de transports ...

5.1. L'information pratique vise ...à l'usage d'énergie d'origine nucléaire, en indiquant le coût de ce renoncement

5.3. Ce centre permettra aussi de cas en cas de faire appel aux compétences du secteur privé. Des actions communes « publiques/privées » pourront être organisées.

5.6. Le canton encourage l'étude d'une taxe incitative à tous les niveaux ... L'étude indiquera son affectation au développement des énergies renouvelables et sa limite dans le temps. Elle ne devra pas préjudicier la compétitivité économique des entreprises et être supportable pour les ménages.

Débat

Le président. Monsieur Vanek, vous avez la parole, mais je vous prie d'attendre un petit moment que ça se calme ! (Brouhaha.)

M. Pierre Vanek (AdG), rapporteur de majorité. Monsieur le président, suspendez la séance cinq minutes !

Le président. Mesdames et Messieurs, je vous prie de faire silence !

M. Pierre Vanek, rapporteur de majorité. Mesdames et Messieurs les députés, contrairement à ce qu'a dit à l'instant Chaïm Nissim, je ne pense pas que le débat sur la conception cantonale de l'énergie sera forcément très long.

En effet, nous sommes deux à la table des rapporteurs. Notre collègue Alain-Dominique Mauris, dans un premier temps, voulait présenter un deuxième rapport de majorité pour exprimer les sensibilités particulières de son groupe concernant une conception qui, dans l'ensemble, allait dans le bon sens, qu'il était prêt à accepter et qu'il a d'ailleurs acceptée en commission de l'énergie et des Services industriels de Genève. Je crois donc effectivement que nous avons avancé sur les questions de l'énergie.

Il y a eu des débats en commission, des controverses et des votes contradictoires sur un certain nombre de points de cette conception. Je serai extrêmement bref en disant que l'essentiel n'est pas là. L'essentiel - vous trouverez ceci dans mon rapport que je ne tenterai pas de résumer dans le cadre du débat de ce soir - c'est que toute une série de points, précisément, sont passés sans contradiction, sans controverse et sans débat.

Mesdames et Messieurs les députés, les objectifs essentiels de cette conception, ses fondements, sont résumés à la page 5 de mon rapport. Elle se base et elle se fonde sur un mandat constitutionnel qui a été adopté en 1986, dans l'article 160 C de la constitution qui exprime - comme l'a dit le Conseil d'Etat dans son rapport à l'appui de sa conception - la volonté genevoise de renoncer à l'énergie nucléaire. Ce débat est clos : nous n'allons pas le rouvrir ce soir !

Egalement : la législation cantonale fixe les objectifs en la matière, notamment un approvisionnement énergétique suffisant, sûr, économique, diversifié et respectueux de l'environnement, ainsi qu'une utilisation rationnelle et économe de l'énergie associée à un développement prioritaire de l'exploitation des sources d'énergies renouvelables.

Egalement : cette conception a aussi comme axe et comme fondement une volonté de promouvoir le développement durable, mais ceci dans le cadre - et c'est encore le Conseil d'Etat que je cite - des objectifs spécifiques genevois de renoncement à un approvisionnement en électricité fondé sur la technologie nucléaire.

Sont également passés sans débat en commission : les postulats de la conception générale de l'énergie de 1993, que je vous invite à relire, qui avaient à l'époque fait l'objet d'un certain nombre de controverses, lors de notre dernière législature.

La situation est donc excellente du point de vue de l'avancée de cette conception et de l'unanimité qui s'est faite tant sur les objectifs généraux de la conception générale de l'énergie que par rapport à la majorité des mesures pratiques qui sont proposées. C'est bien d'être d'accord en théorie, mais tout cela devra se mesurer, bien entendu, à l'aune de la mise en application, des effets concrets de cette conception... Et nous avons aujourd'hui l'occasion de sortir de débats stériles sur un certain nombre de textes et de donner des indications pour l'élaboration d'un plan directeur dont nous aurons évidemment aussi à débattre.

Je ne serai pas beaucoup plus long. Je dirai simplement encore que cette démarche politique, qui est voulue par le législateur et que nous accomplissons aujourd'hui en acceptant - je l'espère - cette conception cantonale de l'énergie, s'inscrit évidemment dans un contexte qui est particulièrement difficile en termes énergétiques. Le nucléaire connaît des problèmes et des incidents de plus en plus importants, liés au vieillissement des centrales. Il y a une préoccupation justifiée et croissante concernant les émanations de CO2 et leurs effets sur le climat. Certains problèmes sont liés - nous en avons déjà débattu et je ne propose pas de rouvrir ce débat ce soir - au projet de libéralisation du marché de l'électricité, car il faut que notre canton mène une véritable politique de l'énergie basée sur les réalités de la consommation et de la production de l'énergie du canton. Dans ce contexte, il est donc d'autant plus important que nous acceptions rapidement cette conception et, surtout, que nous nous mettions à l'oeuvre pour la mettre en pratique.

J'en reste là pour le moment, mais je ferai toutefois quelques remarques sur les propositions d'amendements de notre collègue Alain-Dominique Mauris, qui expliquera tout à l'heure son rapport de minorité - qui est en fait un rapport de majorité avec des bémols, si j'ai bien compris l'esprit dans lequel ce rapport a été déposé.

Je n'interviendrai que sur un point - nous reviendrons plus tard sur ces propositions d'amendements - le point 5.1, à la page 55 du rapport. Nous sommes là dans une situation un tout petit peu particulière en ce sens qu'il y a une proposition d'amender le point 5.1 de la conception que vous pouvez trouver à la page 47 qui dit, à la fin du deuxième paragraphe, dans la version qui vous est livrée : «De plus, l'information à la population précisera que le but de l'utilisation rationnelle de l'énergie est aussi le renoncement à l'usage d'énergie d'origine nucléaire.»

Il s'agit d'une revendication de longue date de se servir de cette volonté assez unanimement partagée des Genevois concernant le renoncement à l'énergie nucléaire comme d'un levier pour promouvoir aussi les économies d'énergie et qu'il en soit fait explicitement état. Des débats à ce sujet ont eu lieu et une proposition des membres de la commission, de droite, a été faite pour insister sur le fait qu'il fallait indiquer aussi le coût de ce renoncement. C'est la teneur de l'amendement qui vous est proposé dans le rapport de notre collègue Alain-Dominique Mauris.

Or, en fait, dans mon rapport vous trouverez une situation un peu plus complexe en ce sens que nous avions voté en commission - si j'en crois les PV, et je n'ai pas voulu croire à autre chose pour préparer mon rapport afin de ne pas être accusé de partialité... - à une assez large majorité une proposition qui émanait d'un député radical - je crois que c'était M. Roger Beer - appuyé par le conseiller d'Etat Robert Cramer, qui portait précisément sur ce point, disant qu'il fallait informer la population que le but de l'utilisation rationnelle de l'énergie signifiait aussi le renoncement à l'usage de l'énergie d'origine nucléaire, mais en indiquant les avantages et les inconvénients économiques de ce renoncement. Le débat était déjà bien avancé et seuls les coûts avaient été évoqués, puis, des députés sont intervenus en disant qu'il ne fallait pas seulement indiquer les coûts mais aussi les bénéfices ; et puis, pour sortir de ce centrage exclusif sur le sujet coût/bénéfice, il nous a été proposé de cibler - mon collègue Alain-Dominique Mauris était acquis à cette idée - les avantages et les inconvénients économiques de ce renoncement, sous la forme d'un discours sur le fait que l'économie, ce n'était pas seulement des francs et des centimes...

Ce que je vous propose sur ce point - nous n'émettons aucune réserve quant au fait de mettre en avant les avantages et les inconvénients en la matière - c'est de compléter ceci avec la formulation que vous trouverez en haut de la page 18 de mon rapport, par : «en indiquant les avantages et les inconvénients sociaux et économiques de ce renoncement», cela pour expliciter le fait qu'il ne s'agit pas d'une conception exclusivement économique au sens financier du terme.

Je suis intervenu sur ce point pour préciser cette affaire, car il y a effectivement une contradiction entre mon rapport de majorité et le texte tel qu'il a été élaboré par les personnes qui ont fait le travail de collationner les différents amendements déposés et adoptés en commission.

Je conclus bien sûr en insistant sur le fait qu'à mes yeux cette conception est un bon outil de travail, et j'invite la plus large majorité des députés dans cette salle à la voter à l'issue de ce débat. 

M. Alain-Dominique Mauris (L), rapporteur de minorité. Effectivement, le but du rapport de minorité, qui était en fait un rapport de deuxième majorité, est tout de même essentiel puisqu'il va assurer sa cohérence au titre même de la conception générale... Il s'agit bien ce soir d'une conception générale et non d'une conception partisane ou dirigée. Le travail de commission a été très long et nous a demandé passablement d'énergie, mais il a abouti à une cohésion. Néanmoins, malheureusement, des amendements ont été présentés sur le texte de M. Cramer, amendements auxquels nous n'avons pas pu souscrire. C'est pour cela que ce soir nous souhaitons apporter certaines nuances, et nous espérons que ces nuances obtiendront votre soutien.

Le but de cette conception - disais-je - est de savoir si nous avons vraiment les moyens de nos ambitions et de voir comment ces moyens peuvent s'articuler par rapport au développement durable.

Nous avons parlé de social, nous avons parlé d'environnement, nous avons peut-être peu parlé d'économie parce que le terme «économie» est souvent un peu galvaudé, mal compris, voire restrictif dans sa définition. En général, on pense que «économie» égale «finance», alors que ce terme recouvre un grand nombre de concepts qui sont directement liés à notre avenir dans notre société.

Nous avons aussi souhaité faire revenir dans cette conception certaines valeurs qui nous tiennent à coeur dans le cadre de ces amendements. Afin d'éviter un long débat, je vous propose de discuter rapidement sur ce qui nous sépare encore, pour trouver l'unité et voter ensemble cette conception. 

M. Alberto Velasco (S). Je tiens tout d'abord à remercier le département pour le document qui nous est présenté et qui est aussi le fruit du travail d'un certain nombre de députés de la commission de l'énergie.

Sans être éminemment précis, ce rapport est néanmoins un excellent cadre de référence pour le développement d'une politique sur l'énergie, tout en respectant les principes du développement durable auxquels nous avons adhéré.

Au paragraphe 4.2 de ce concept, «Constructions de l'Etat» - point important - un principe sera fort utile pour notre commission des travaux. Il s'agit en effet de l'intégration des coûts externes de l'énergie dans les décisions mettant en concurrence diverses technologies, ce qui, enfin, nous amènera, nous députés, en cas d'application, à faire des choix financiers mais aussi économiques, comme vient de le souligner le rapporteur de minorité.

Vous dites, dans le rapport de minorité, que cette conception doit clairement indiquer comment elle entend satisfaire les besoins énergétiques sans pour autant freiner la croissance économique de notre canton... (Brouhaha.) Pour autant, Monsieur Mauris, que cette croissance soit en accord avec le développement durable - c'est ce que je comprends - car ce n'est que dans ce cadre que l'on peut créer des emplois et des entreprises avec une certaine durabilité ! (Exclamations.)

Dans le débat sur la substitution des agents énergétiques nucléaires par des agents d'origine renouvelable, vous posez la question du prix en regrettant que l'on ne donne pas une information complète sur le coût de ce renoncement. Eh bien, voyez-vous, moi j'aimerais que l'on me donne le véritable coût de l'énergie nucléaire, incluant les coûts induits des incidents et du retraitement des déchets ! Et je ne parle pas des risques pour la société... On verrait alors que le prix auquel cette énergie est vendue - 4 centimes - ne correspond en rien à la réalité !

S'agissant du privé, s'il est juste qu'il soit intéressé à cette conception, il doit aussi assumer les véritables coûts et pas seulement jouer à la pernicieuse politique - en tout cas à court terme - du kilowatt-heure le plus compétitif...

Enfin, s'agissant de l'eau, bien, richesse considérée comme patrimoine de l'humanité qu'il ne faut en aucun cas gaspiller, il est regrettable qu'au chapitre concernant l'évolution retenue pour les agents énergétiques on ait supprimé l'objectif quantitatif de cette diminution de consommation d'eau. En effet, un objectif peut être perçu non pas comme une mesure coercitive, mais comme un référentiel pour mesurer et évaluer les efforts réalisés ou à réaliser en la matière.

J'espère, Monsieur Cramer, qu'il vous sera possible d'intégrer ces quelques remarques dans le règlement.

Enfin, nous socialistes, il nous semble que l'amendement proposé par le rapporteur de minorité sous le chiffre 5.3 au sujet d'un «centre de compétences publiques/privées» est acceptable. Nous le voterons donc.

Compte tenu de ces remarques, le groupe socialiste vous prie de voter cette conception. 

M. Roger Beer (R). J'aimerais tout d'abord dire qu'il est extrêmement agréable et réjouissant de parler d'énergie dans un climat aussi serein. Vous avez du reste entendu les deux rapporteurs...

Monsieur Mauris vous nous avez dit que la conception générale de l'énergie nous avait demandé beaucoup d'énergie et pris beaucoup de temps en commission. Eh bien, si on fait le compte, il aura fallu une législature et demie pour arriver à nous mettre d'accord sur un concept de l'énergie.

Par ailleurs, j'aimerais tout de même souligner que les rapports de nos deux collègues, M. Vanek et M. Mauris, ont été faits par eux et non pas par le département... Enfin, j'ose espérer ! C'est donc plutôt eux qu'il faut féliciter, Monsieur Velasco, même si évidemment le département était derrière !

Le groupe radical est favorable à cette conception. Nous avons participé aux travaux. Il y a eu abstention sur un certain nombre de points de la part d'un de mes collègues, mais dans l'ensemble nous étions d'accord. C'est vrai aussi - et M. Vanek l'a relevé - qu'un des éléments qui nous paraît fondamental dans cette conception est qu'on parle de son coût. En page 18, un des amendements, qui avait largement été accepté, ne se retrouve pas dans la conception. Je me suis dit que cela était peut-être dû à un problème de copier/coller ou de mauvaise relecture... Je ne pense pas que cela soit très grave.

Maintenant, au sujet du vote des amendements, je ne sais pas très bien comment, formellement, nous devrons les voter, puisqu'aujourd'hui nous allons adopter une résolution qui accepte le concept... Je pense qu'il serait bon que nous ayons l'engagement du conseiller d'Etat responsable qu'il accepte que ces quelques amendements soient inclus dans le concept, d'entente avec M. Vanek, rapporteur de majorité. Ces éléments ont effectivement été largement discutés. Les sensibilités sont légèrement différentes, mais tout le monde était d'accord sur le fond. Ce qui est très important par rapport à la dernière législature, ne serait-ce que pour illustrer l'évolution des mentalités.

Cette conception, et je conclurai par là, nous convient parce qu'elle correspond parfaitement au credo de l'Agenda 21 et à son corollaire principal qui est le développement durable, comme l'a rappelé M. Velasco, en détaillant les différents postulats qui sont exposés dans cette conception, à laquelle l'ensemble de ce parlement peut adhérer en admettant trois des quatre amendements présentés par M. Mauris.

Mesdames et Messieurs les députés, je vous remercie d'accepter ce concept. Il faut en rendre hommage à M. Cramer qui nous a bien expliqué au début que, contrairement à la dernière législature, on allait travailler relativement rapidement sur des règles générales et se mettre d'accord sur les grandes lignes, pour pouvoir ensuite discuter concrètement de la politique de l'énergie. Je peux bien imaginer que les choses ne seront pas forcément faciles sur certains points touchant au coût de la conception. Mais, en acceptant le cadre, nous acceptons de discuter de la suite. 

Le président. Je vous remercie, Monsieur Beer. J'aimerais vous préciser, Mesdames et Messieurs les députés, qu'au niveau de la procédure nous allons approuver ce soir le rapport divers 319 tel qu'il ressort des travaux de la commission. En revanche, les amendements qui seront votés ce soir amenderont la résolution 417. Celle-ci sera adoptée «avec les modifications suivantes», et les amendements suivront... Les amendements interviendront uniquement au niveau de la résolution. Le résultat final est le même, mais c'est la procédure que nous suivrons ce soir.

M. Chaïm Nissim (Ve). Mes préopinants ont déjà dit beaucoup de choses. Je suis quant à moi très frappé de voir le changement extraordinaire qui est intervenu, depuis douze ou quinze ans que je fais de la politique - je ne me souviens même plus depuis quand... - dans tous les milieux politiques - pas seulement dans ce Grand Conseil, mais aussi au niveau fédéral. Le nucléaire était une pomme de discorde incroyable, un sujet de bagarre pied à pied. Je me rappelle de tous les recours déposés par les milieux de droite il y a quinze ans contre notre initiative, et, aujourd'hui, j'entends M. Beer parler d'Agenda 21, de développement durable... C'est extraordinaire ! C'est vraiment un changement très important !

Je constate donc qu'après de longs déchirements, qui ont duré plusieurs années et qui ont fait que les précédentes conceptions n'ont jamais pu être acceptées, parce qu'il y avait toujours des minorités très agissantes qui réussissaient à faire barrage, nous arrivons à une quasi-unanimité. Il reste encore quelques sujets de discussion, abordés tout à l'heure par M. Vanek et M. Mauris, mais, sur le fond, le développement durable a réussi à regrouper l'ensemble des forces politiques.

J'en veux pour preuve toutes les interventions de mon collègue John Dupraz au National en faveur d'une politique pour sauver les barrages suisses. Des gens de droite comme Eugen David disent qu'il faut des taxes pour sauver nos barrages, qu'il faut payer l'énergie à son juste prix, que les énergies renouvelables sont une bonne chose, que le fait de taxer les énergies non renouvelables et polluantes pour encourager l'énergie solaire est une bonne chose. Aujourd'hui, une telle affirmation ne choque plus personne au Conseil national. C'est très encourageant et c'est très porteur d'espoir pour moi.

Deux mots à propos des amendements qui ont été proposés. Comme mon collègue Velasco, j'accepterai le troisième amendement de M. Mauris, ainsi que l'amendement proposé par mon collègue Vanek sur les avantages et les inconvénients sociaux et économiques de ce renoncement au nucléaire - qui n'a pas été intégré à la conception suite, apparemment, à une erreur de copier/coller... Pour ce dernier, on pourrait même ajouter : les inconvénients sociaux, économiques et écologiques... Mais peu importe ! En réalité, l'essentiel est que nous soyons tous d'accord pour une fois de voter cette conception !  

M. Pierre Vanek (AdG), rapporteur de majorité. Des déclarations générales ont été faites. Maintenant, je pense qu'effectivement, à ce stade et eu égard à l'état des travaux et des débats et des sensibilités, il serait utile d'en venir aux amendements qui sont proposés - l'auteur devra bien entendu les présenter - pour avoir un bref débat et de passer ensuite au vote de ces amendements, puis au vote d'ensemble de cette conception.

J'insiste sur le fait que, même si le débat porte principalement sur ces amendements, l'essentiel est dans ce qui a été accepté, souvent sans débat et à l'unanimité par la commission de l'énergie et des Services industriels de Genève.

M. Jean Rémy Roulet (L). Espérons que cette conception cantonale de l'énergie 2000 pose les fondements d'une véritable politique cantonale de l'énergie, nous épargnant des querelles tournant autour du nucléaire ! En enterrant la conception cantonale précédente, les députés de l'actuelle majorité ont peut-être, sans véritablement le vouloir, signifié la fin des hostilités dans ce domaine.

Rappelons tout de même qu'un des principaux avantages de la conception précédente consistait à chiffrer le coût du renoncement à une telle énergie. Celui-ci eût été dans l'absolu purement et simplement prohibitif. Prohibitif : c'est le qualificatif qu'il conviendrait aujourd'hui d'appliquer pour la construction d'une centrale nucléaire en Suisse et d'ailleurs ailleurs en Europe. Nous voilà donc tous rassurés, population genevoise incluse, il n'y aura plus à court, à moyen et à long terme de nouvelles centrales nucléaires dans notre pays !

Paradoxe de cette nouvelle donne dans l'approvisionnement énergétique : c'est notamment la perspective de l'ouverture des marchés de l'électricité qui condamne en Suisse cette technologie. Celle-ci - l'ouverture des marchés de l'électricité - induira des baisses de prix à la production estimées à 30%, ce qui est totalement incompatible avec les coûts générés par une telle centrale, en intégrant notamment les coûts de recyclage des déchets radioactifs. Une énergie électrique à prix raisonnable constitue donc le meilleur rempart contre le nucléaire. A moins que cette énergie ne soit renchérie artificiellement, à l'aide d'instruments fiscaux notamment...

Vous l'aurez constaté, le débat porte aujourd'hui sur le coût de l'énergie et c'est, à notre sens, une notion qu'il faut faire apparaître en priorité dans la conception cantonale générale de l'énergie débattue ce soir. Comment voulez-vous convaincre des consommateurs industriels notamment d'utiliser de l'énergie solaire sans leur expliquer son coût ? Question futuriste ? Non, question d'actualité ! Comme vous le savez, les Services industriels de Genève offrent depuis ce mois la possibilité aux ménages et aux industries du canton d'acheter de l'énergie garantie solaire à 1 F le kWh. Cette proposition fait suite à une motion du député Nissim, qui doit se souvenir que sa proposition avait été soutenue à l'époque par les milieux économiques et industriels du canton.

Mais, Mesdames et Messieurs les députés, il faut tout de même une sacrée force de conviction pour vendre ce kWh à un prix quatre fois supérieur à ce que vous offre le marché aujourd'hui ! Il faudra également beaucoup de persuasion pour vendre dans le futur - et c'est sur cette voie que semblent s'engager les Services industriels de Genève - 1 kWh comprenant d'autres types d'énergies renouvelables comme l'hydraulique, à un prix forcément supérieur à ce que propose le marché d'aujourd'hui.

Cependant, cette tâche n'est pas aussi impossible qu'il n'y paraît, surtout à Genève, où la population et les milieux industriels sont sensibles à la nature et à la qualité de l'énergie qu'ils consomment. A une condition toutefois, c'est qu'électriciens et pouvoirs publics jouent la carte de la transparence au niveau des coûts !

C'est pour cette raison, Mesdames et Messieurs les députés, que nous vous demandons d'accepter l'amendement relatif à l'allusion au coût des énergies à Genève qui se situe en page 55 du rapport, au point 5.1, proposé par le rapporteur de minorité. 

M. Alberto Velasco (S). Je remercie les auteurs de ce rapport, qui est vraiment très bien fait.

Monsieur Cramer, j'attire votre attention - car tout à l'heure vous sembliez occupé... - sur le fait que le domaine de l'eau est éminemment important et qu'il occupe peu de place dans ce rapport. On connaît pourtant les enjeux que représente l'eau et la place qu'elle occupe dans la vie courante. J'ai parlé tout à l'heure d'objectifs minimaux... Si on ne peut pas l'intégrer dans ce concept, peut-être pourra-t-on l'intégrer, Monsieur le président, dans d'autres documents ? 

M. Alain-Dominique Mauris (L), rapporteur de minorité. Je voudrais vous rappeler, Monsieur Nissim - car vous avez eu un cri du coeur sur le fait que certains avaient enfin pris conscience de ce à quoi vous croyez depuis longtemps - que l'énergie n'est pas uniquement l'affaire de certains, mais bien l'affaire de tous ! C'est la raison pour laquelle ce soir nous essayons de vous convaincre avec nos amendements, pour nuancer cette conception et la rendre vraiment générale.

Si vous le voulez bien, Monsieur le président - je ne sais pas si d'autres personnes ont demandé la parole - j'aimerais commencer à vous expliquer les amendements les uns après les autres, pour avancer dans le débat... 

Le président. Je vous remercie, mais je vais peut-être d'abord passer la parole à Monsieur le conseiller d'Etat Robert Cramer.

M. Robert Cramer. Tout d'abord, bien sûr, je tiens à remercier tous ceux qui se sont associés à l'aboutissement de cette conception, chronologiquement : les collaborateurs de l'administration qui l'ont préparée et en particulier M. Genoud et ses collaborateurs de l'OCEN. Je pense aussi, parce qu'elle joue un rôle important, à la commission consultative en matière d'énergie qui réunit tous les milieux intéressés par cette question, qu'il s'agisse des milieux associatifs, des milieux professionnels, des représentants des milieux politiques. Ce lieu de débat avec la société civile sur la question de l'énergie est en effet important. Mes remerciements s'adressent évidemment également à la commission parlementaire.

Aujourd'hui, on le sent bien, cette conception est abordée dans un esprit que l'on peut qualifier de consensuel, même si sur tel ou tel point une discussion surgira au sujet des amendements qui sont proposés. Cet esprit consensuel ne peut être mieux illustré que par cette demande d'amendement signée conjointement par M. Mauris et par M. Vanek... Je ne crois pas qu'ils aient souvent eu l'occasion jusqu'ici de signer des textes ensemble au cours de cette législature !

J'en plaisante, mais j'ai le souvenir que le dernier consensus qui s'est fait en matière d'énergie se situe au début de la législature : lorsque la conception générale de l'énergie, qui avait été étudiée longuement durant quatre ans, a fait l'objet d'un débat devant ce Grand Conseil et qu'elle a été rejetée à l'unanimité... Eh bien, j'espère que ce n'est pas vers un tel consensus que nous allons aujourd'hui !

Nous avons parlé tout à l'heure du développement durable, et M. Velasco a dit à ce sujet un certain nombre de choses très justes. J'ajouterai simplement que cette triple dimension : la dimension environnementale, économique et sociale, est nécessaire pour être opérationnelle. L'administration n'arriverait en effet pas à mettre en place une conception générale de l'énergie qui aurait été arrachée au forceps dans ce parlement et qui, ensuite, verrait au niveau de l'application une opposition de ceux avec qui nous devrons collaborer pour l'appliquer : les milieux professionnels et les milieux industriels. Et c'est la même chose si les majorités sont différentes ; ce n'est pas une conception générale de l'énergie dictée par une volonté de ne pas tenir compte des préoccupations environnementales qui aurait la moindre chance d'être appliquée, parce qu'elle se heurterait, au niveau de l'application, à toute une série de blocages et d'oppositions venant des milieux associatifs. Il faut donc absolument que les uns et les autres comprennent qu'entre le discours et l'action se trouve un point où il faut se rencontrer sans se trahir, mais un point où il faut se rencontrer si l'on entend réaliser. Et c'est dans cet esprit-là que je conçois la suite, c'est-à-dire le plan directeur.

A ce sujet, j'attire tout de même votre attention sur une précision qu'il convient d'apporter au rapport excellemment rédigé par M. Vanek. Il s'agit du chapitre qui est traité sous le titre : «La question du plan directeur». Le plan directeur est quelque chose d'à peu près incompréhensible dans le domaine de l'énergie parce qu'il n'y a pas un plan directeur... Il n'y pas deux plans directeurs : il y a trois plans directeurs !

Il y a tout d'abord le plan directeur qui est visé par la loi, à l'article 10, alinéa 1, lettre c). Ce plan directeur-là est intégré à la conception générale de l'énergie : nous l'avons fait, malgré la confusion qui a pu exister. Et puis, il y en a deux autres qui sont mentionnés dans le règlement d'application. Dans le règlement d'application de la loi, vous pouvez constater à l'article 12 qu'il y a un plan directeur qui est le plan directeur cantonal de l'énergie et un autre plan directeur qui est le plan directeur des énergies de réseau. En d'autres termes, vous avez le plan directeur de l'énergie du canton qui est visé par la loi et qui est inclus dans la conception que vous voterez. Il y a ensuite le plan directeur cantonal de l'énergie et le plan directeur des énergies de réseau qui sont visés par le règlement et ce sont ces plans-là qui font l'objet d'une approbation du Conseil d'Etat et ce sont ces plans-là - et au fond cela ne change rien à ce qui est indiqué dans le rapport - que je me suis engagé à vous présenter, Mesdames et Messieurs les députés, parce que, je le répète, je pense que nous devrons appliquer ces plans ensemble.

Dès l'instant où cette conception générale de l'énergie sera adoptée, j'entends soumettre à l'approbation du Conseil d'Etat, déjà au début du mois de mars, le plan directeur cantonal de l'énergie. Dès que le Conseil d'Etat l'aura approuvé, je le présenterai à la commission parlementaire et à la commission consultative, pour que vous puissiez non seulement en avoir connaissance dans le détail, mais aussi pour que vous puissiez vous prononcer sur ses dispositions d'application. En effet, s'agissant de plans qui, cette fois, sont de l'ordre opérationnel et qui sont destinés à l'administration, nous pourrons, si vous le souhaitez, sur tel ou tel point, très aisément y apporter encore des modifications. Mais au moins nous aurons un outil et un outil opérationnel !

Monsieur Velasco, c'est dans ce plan directeur, qui vous sera très prochainement présenté - c'est une question de semaines aujourd'hui - que nous développerons, plus que nous n'avons pu le faire dans la conception, tout ce qu'il y a lieu de dire sur l'eau. Effectivement, l'eau est quelque chose d'important, non seulement en ce qui concerne la préservation des ressources naturelles, mais aussi parce qu'il faut savoir qu'il y a à peu près 1 kWh d'électricité dans 1 m3 d'eau. Le service de l'eau dans ce canton est le plus gros consommateur d'électricité et éviter de gaspiller de l'eau, faire des économies dans le domaine de l'utilisation de l'eau, c'est aussi, de façon indirecte, faire des économies dans le domaine de la consommation d'électricité. Voilà la petite précision que je tenais à vous apporter quant à ce rapport.

Encore une fois, merci, Mesdames et Messieurs les députés, membres de la commission de l'énergie et des Services industriels de Genève, pour la qualité des travaux que nous avons pu mener ensemble au sujet de cette conception générale. 

M. Olivier Vaucher (L). En tant que président de la commission au moment où nous avons débattu de la conception générale de l'énergie, j'aimerais tout particulièrement remercier les membres de cette commission pour l'excellent travail qu'ils ont effectué, car je peux vous assurer que c'était une gageure de siéger de 15 h à 20 h le vendredi, dernier jour de la semaine, pour avancer au pas de charge sur ce dossier. J'aimerais aussi associer à ces remerciements, comme l'a fait M. Cramer, les hauts fonctionnaires du département qui ont très bien su préparer tout le matériel nécessaire, ce qui nous a permis d'avancer rapidement.

Mesdames et Messieurs les députés, nous allons attaquer maintenant les amendements que notre collègue Mauris a proposé dans son rapport. Comme cela a été relevé par certains préopinants, ce qui fait la valeur de ce concept, c'est le consensus qui s'est dégagé lors des travaux parmi les commissaires, tous bords confondus, et ce consensus s'est fait - croyez moi ! - au prix de très grandes concessions pour certains d'entre nous. C'est pour cela que je vous demande de soutenir et de voter ces amendements, ce qui permettra à l'ensemble de ce Grand Conseil de se rallier à ce concept.  

Point 3.3

Le président. Mesdames et Messieurs les députés, nous allons passer à l'approbation des divers amendements. Je vais les présenter l'un après l'autre et je passerai la parole à M. le rapporteur de minorité pour les compléments d'information. L'essentiel de ces amendements figure en page 55 du rapport. Le premier touche le point 3.3 du concept, «Efficacité des transports», que vous trouverez en page 46. Je précise à nouveau que l'on ne modifiera pas le rapport proprement dit, mais que nous amenderons la résolution s'ils sont acceptés. M. Mauris propose de remplacer : «En coordination avec les autres domaines...» par : «En coordination avec la complémentarité transport public - transport privé et les divers domaines...»

M. Alain-Dominique Mauris (L), rapporteur de minorité. Si vous vous reportez à la page 46, comme vient de le faire notre président, vous pouvez constater qu'il s'agit ici d'étudier l'efficacité des transports dans un concept général, et cela en coordination avec les autres domaines des transports et de la circulation, de l'aménagement, du développement, etc. Il est donc évident que dans un contexte comme celui-ci, il faut parler des transports privés. J'imagine d'ailleurs que ce soir un grand nombre d'entre nous vont rentrer chez eux avec les transports privés... On ne peut donc pas faire abstraction des transports privés dans un concept général. C'est la raison pour laquelle nous souhaitons par cette proposition d'amendement rajouter la complémentarité transport public/transport privé.

M. Pierre Vanek (AdG), rapporteur de majorité. Les travaux de commission que j'ai repris pour rédiger mon rapport indiquent qu'il n'y a pas eu de proposition d'amendement sur ce point à l'époque et que le point 3.3 tel qu'il figure à la page 46 du rapport a été adopté en commission sans opposition - par onze voix et deux abstentions : une libérale et une radicale. En l'occurrence, il n'y a pas eu les énormes concessions évoquées par M. Vaucher et, s'il y en avait eu, elles n'auraient pas porté sur ce point.

Il y a bien entendu un débat sur les transports entre nous et c'est un débat qui revient régulièrement, car nos sensibilités sont différentes. Nous pourrions rouvrir le débat ce soir en parlant de la «complémentarité» qui sert pour certains à réintroduire le primat du transport privé et à mettre l'accent sur celui-ci. Pierre Vanek pourrait se remettre sur les bancs de l'Alliance de gauche et insister sur la nécessité de favoriser les transports en commun, sur la nécessité, certes, d'une complémentarité, mais qui favorise les transports en commun. Il pourrait aussi citer l'article 160C de la constitution cantonale que vous connaissez tous par coeur et dont le point 3.3 est simplement le reflet, qui dit que la conservation de l'énergie est obtenue notamment dans le secteur des transports en favorisant - je cite la constitution, Mesdames et Messieurs les députés - les déplacements en transports publics, à vélo, à pied, etc.

Alors, évidemment nous n'allons pas régler, par ce point 3.3 de la conception de l'énergie, tous nos débats concernant les transports. Il y a une commission des transports de ce Grand Conseil ; il y a des contradictions à l'occasion et des moments où nous sommes unis sur un certain nombre de propositions, et c'est très bien ainsi ! Toutefois, je suis d'avis de ne pas introduire cette notion ici. Je n'en fais pas une affaire d'Etat, mais le point 3.3 - peut-être malencontreusement intitulé «Efficacité des transports» - donne une idée de portée générale, alors qu'il porte quant à son contenu essentiellement sur le fait d'encourager le développement des autres formes de mobilité - je mettrai «autres» entre guillemets - que sont transports publics, plan piétons, pistes cyclables, etc. C'est vrai, ce sont des formes de mobilité aujourd'hui mineures - M. Mauris a eu raison de rappeler qu'une majorité d'entre nous rentrera sans doute par des transports privés ce soir, qui sont les modes de transports dominants aujourd'hui. Ce point n'a pas d'autre ambition que l'encouragement d'un tel développement. Mais c'est très important !

En conséquence, Mesdames et Messieurs les députés, je vous invite à en rester au libellé du point 3.3, tel qu'il a été accepté sans opposition par la commission, tout en rappelant qu'il ne me semble pas opportun ici de rouvrir tout le débat sur la place respective de la complémentarité transport public - transport privé. Il est évident que «complémentaire» a un sens très général et que nous butons sur le niveau de complémentarité. En ce qui me concerne, je ne voterai pas cet amendement, et je vous demande d'en rester à la version telle qu'elle figure dans la conception adoptée par la commission.

M. Chaïm Nissim (Ve). Mon groupe refusera également cet amendement, parce que nous voudrions éviter de relancer la guerre sans fin «transport public - transport privé», qui divise régulièrement ce Grand Conseil depuis plusieurs années. Nous ne sommes malheureusement pas encore au même stade sur ce point que celui auquel nous sommes arrivés dans le domaine de l'énergie, où un consensus a enfin été trouvé. Le point 3.3, en évoquant les «autres domaines des transports», fait bien entendu également référence au transport privé. Il ne me semble donc pas utile, je le répète, de rallumer cette guerre stérile en opposant transport privé et transport public.

M. Olivier Vaucher (L). Je vous précise, Monsieur Vanek, que les concessions que nous avons faites l'ont été avant le vote de la commission, lors de discussions que nous avions eues précédemment, car nous voulions faire avancer ce concept le plus rapidement possible !

D'autre part, si nous proposons cet amendement au point 3.3, c'est parce que, je vous le rappelle, nous avions voté cette complémentarité des transports dans ce Conseil. Il nous paraît donc logique que l'ensemble des transports soit pris en considération. Nous vous demandons donc de soutenir cet amendement. 

M. Alberto Velasco (S). Le groupe socialiste ne votera pas l'amendement proposé au point 3.3 pour la raison suivante : la question de la complémentarité ne se pose pas, étant donné la qualité des transports ! S'il est vrai que dans certains pays il serait justifié de penser que le transport privé a un rôle à jouer pour pallier les déficiences du transport public, le problème ne se pose pas chez nous. Je le répète, nous ne voterons pas l'amendement proposé par les libéraux au point 3.3 pour la raison que je viens de donner.

M. Alain-Dominique Mauris (L), rapporteur de minorité. Avant de passer au vote, je crains que nos espoirs du début, lors de la présentation de cette conception, qui montrait une certaine unanimité sur la portée générale, risquent de déraper rapidement. Vous me direz que nous sommes dans le domaine des transports, et qu'il serait normal que cela arrive, mais ce serait tout de même dommage !

L'idée, je le répète, n'est pas de rouvrir un débat sur qui doit dominer l'autre en termes de transport public et de transport privé ! Notre seule idée dans cet amendement est simplement de rappeler dans cette conception que les transports privés existent aussi et que ces transports privés doivent être pris en considération dans la coordination avec les autres domaines... Cela ne veut pas dire que nous voulons privilégier les transports privés ! Il serait bon, me semble-t-il, par rapport aux sensibilités que nous représentons, de pouvoir mentionner en toutes lettres l'existence des transports privés !  

M. Pierre Vanek (AdG), rapporteur de majorité. L'amendement propose de remplacer : «En coordination avec les autres domaines...» par : «En coordination avec la complémentarité transport public - transport privé et les divers domaines des transports de la circulation et de l'aménagement, développement des autres formes de mobilité...». Je comprends bien ce que voudrait le rapporteur Alain-Dominique Mauris, à savoir que les transports privés doivent être mentionnés... Bien entendu, cette conception de l'énergie n'a pas pour vocation de fermer les yeux sur ce qui consomme...

M. Michel Halpérin. Les piétons !

M. Pierre Vanek, rapporteur de majorité. Nous en sommes au chapitre des carburants : ce ne sont pas les piétons qui consomment des carburants ! S'il y avait plus de piétons, on en consommerait moins, Monsieur Halpérin ! Ce qui consomme le plus, ce ne sont pas les transports publics, mais c'est évidemment les transports privés !

Alors, moi je veux bien que les transports privés soient mentionnés, mais je trouve inopportun le fait d'introduire ici le hochet de la complémentarité, qui est le catchword, la chose qui déclenche des polémiques constantes, dès qu'on parle des transports ! Mais, Monsieur Mauris, si vous le voulez, nous pouvons très bien dire : «En coordination avec les autres domaines des transports, de la circulation et de l'aménagement, notamment les transports privés...» Il s'agit ici de développer d'autres formes de mobilité : transports publics, plan piétons, etc. Il n'y a pas de volonté - même si le texte est rédigé de manière peut-être un peu malhabile - dans cette conception d'occulter l'existence du transport privé, car il existe : c'est une évidence ! Il s'agit simplement d'essayer modestement de développer quelques pistes, notamment des pistes cyclables, pour permettre de réduire la consommation de carburant... C'est tout ! 

M. Olivier Vaucher (L). Monsieur le président, je suis content de voir que M. Vanek a compris le message que nous souhaitions faire passer.

Monsieur Vanek, pour la clarté du texte, il faut simplement ajouter au point 3.3, tel qu'il apparaît à la page 46 de votre rapport, après les deux points : «transports publics et privés, plan piétons, pistes cyclables, etc.» Ainsi, nous serons tous d'accord ! Je vous remercie d'avance de voter cela.

Le président. Monsieur Vaucher, veuillez déposer cet amendement formellement ! Monsieur Vanek, vous avez la parole !

M. Pierre Vanek (AdG), rapporteur de majorité. Si vous me donnez trente secondes, je vous remettrai un amendement dans l'esprit de ce que j'ai proposé, mais il me faut le temps de l'écrire ! 

M. Claude Blanc. On va y passer la nuit !

M. Pierre Vanek, rapporteur de majorité. Non, non !

Point 5.1

Le président. Mesdames et Messieurs les députés, je vous invite, pendant que ce premier amendement se prépare, à passer au second amendement présenté par M. Mauris et M. Vanek au point 5.1, qui figure en page 47 sous : «Actions de caractère général» «L'information à la population». Il consiste à ajouter : «...en indiquant les avantages et les inconvénients sociaux et économiques de ce renoncement» à la fin du second paragraphe.

M. Alain-Dominique Mauris (L), rapporteur de minorité. Vous avez reçu la proposition du deuxième amendement qui fera, je le pense, l'unanimité. Il consiste à ajouter : «...en indiquant les avantages et les inconvénients sociaux et économiques de ce renoncement.» à la fin du paragraphe du point 5.1. Nous avons expliqué tout à l'heure ce que nous entendions par «sociaux et économiques», soit dans un cadre général, par rapport à tous les coûts - et gains d'ailleurs - qui y sont liés.

Le président. Je vous soumets donc l'amendement proposé par M. Mauris et M. Vanek dont la teneur est la suivante :

«L'information pratique vise une utilisation (...) d'énergie d'origine nucléaire, en indiquant les avantages et les inconvénients sociaux et économiques de ce renoncement.»

Mis aux voix, cet amendement est adopté.

Le président. Cet amendement étant accepté, il figurera dans la résolution que nous voterons tout à l'heure.

Point 5.3

Le président. Je passe au troisième amendement présenté par le rapporteur de minorité au point 5.3, qui figure à la page 48 : «Centre intercollectivités pour la maîtrise de l'énergie». Il s'agit d'ajouter à la fin du paragraphe, je cite :

«...auprès de tous les partenaires concernés. Ce centre permettra aussi de cas en cas de faire appel aux compétences du secteur privé. Des actions communes «publiques/privées» pourront être organisées.»

Monsieur Mauris, vous avez la parole !

M. Alain-Dominique Mauris (L), rapporteur de minorité. Merci, Monsieur le président ! Cet amendement est très clair : il n'est pas possible de discuter uniquement au niveau public, il faut aussi s'accompagner des compétences privées dans ce domaine. Je vous propose donc de soutenir cet amendement tel qu'il est rédigé. 

M. Chaïm Nissim (Ve). Nous soutiendrons cet amendement qui est excellent ! 

M. Pierre Vanek (AdG), rapporteur de majorité. Je reviens sur le point 5.1. Monsieur le président, nous sommes d'accord que nous avons bien voté l'amendement déposé sur papier par M. Alain-Dominique Mauris et M. Pierre Vanek ?

Une voix. Mais oui !

Le président. Oui, Monsieur Vanek, absolument !

M. Pierre Vanek, rapporteur de majorité. Donc, conforme à la déclaration introductive que j'ai faite ?

Le président. Je n'ai pas d'autre ambition que de vous proposer cela ce soir !

M. Pierre Vanek, rapporteur de majorité. Vous êtes très gentil ! (Rires.)

Le président. La parole est demandée sur le point 5.3 ? Bien, alors je vous soumets l'amendement proposé par M. Mauris au point 5.3, que je vous relis :

«...auprès de tous les partenaires concernés. Ce centre permettra aussi de cas en cas de faire appel aux compétences du secteur privé. Des actions communes «publiques/privées» pourront être organisées.»

Mis aux voix, cet amendement est adopté.

Point 3.3

Le président. J'attends toujours la modification de l'amendement au point 3.3, Monsieur Vanek !

M. Pierre Vanek (AdG), rapporteur de majorité. Monsieur le président, je vous prie d'excuser ce retard. Je viens de me concerter avec M. Vaucher, mais j'attendais encore l'opinion de M. Mauris. Au point 3.3 «Efficacité des transports», en page 46, plutôt que l'amendement tel qu'il a été formulé par le rapporteur de minorité et pour répondre à la demande que l'existence des transports privés soit reconnue dans cette conception - c'est du reste une demande légitime et personne n'a eu l'idée de les éliminer - je propose la formule suivante : «En coordination avec les autres domaines des transports, de la circulation et de l'aménagement, notamment les transports privés, développement des autres formes de mobilité : transports publics, plan piétons, pistes cyclables, etc.»

Je dépose cet amendement par écrit, Monsieur le président.

Le président. Je vous remercie, j'attends donc cet amendement, Monsieur Vanek. Si tout le monde l'a compris, je vais procéder au vote. Il s'agit donc de l'amendement présenté au point 3.3 «Efficacité des transports», dont je vous redonne le texte :

«En coordination avec les autres domaines des transports, de la circulation et de l'aménagement, notamment les transports privés, développement des autres formes de mobilité : transports publics, plan piétons, pistes cyclables, etc.»

Mis aux voix, cet amendement est adopté.

Point 5.6

Le président. Nous avons un quatrième amendement à vous soumettre. Il s'agit du point 5.6 à la page 49 : «Taxes sur les énergies non renouvelables». Il faut ajouter à la fin du texte : «L'étude indiquera son affectation au développement des énergies renouvelables et sa limite dans le temps. Elle ne devra pas préjudicier la compétitivité économique des entreprises et être supportable pour les ménages.»

M. Alain-Dominique Mauris (L), rapporteur de minorité. Il s'agit de préciser ce que l'on entend par «taxe incitative à tous les niveaux». Nous souhaitons donc que l'affectation de cette taxe soit clairement indiquée pour le développement des énergies renouvelables et, bien entendu, qu'il y ait une limite dans le temps. Le mot «Elle» ne prête pas à confusion avec «étude»... Il s'agit de la taxe ! Et cette taxe ne devra pas préjudicier la compétitivité économique des entreprises ; elle devra aussi être supportable, bien sûr, pour les ménages. 

M. Claude Blanc. Préjudicier ?

M. Pierre Vanek (AdG), rapporteur de majorité. Un petit mot à propos de cette histoire de taxe. La première mouture du point 5.6 qui a été proposée, je crois, par un député Vert en commission, prévoyait que le canton encourageait l'étude et l'introduction d'une taxe incitative à tous les niveaux. Et je dois dire que j'étais tout à fait d'accord avec l'idée - qui était une condition pour certains à voter cette conception - qu'il fallait s'en tenir à l'étude, parce qu'il n'est pas raisonnable de décider de l'introduction d'une taxe avant que l'étude ne soit faite. Il faut évidemment d'abord procéder à l'étude et ensuite débattre et décider, en fonction des propositions, par rapport à l'introduction effective d'une taxe sur la base de l'étude.

Je suis donc d'accord pour que l'étude figure, par contre j'émets des réserves - à l'instar de Gilles Godinat à l'occasion d'un autre débat - sur la conception de taxes incitatives et les problèmes qu'elles posent en termes sociaux. En l'état, le texte propose une taxe incitative à tous les niveaux. Etant essentiellement un instrument de marché, c'est donc une approche très libérale, qui suscite chez moi un certain nombre de réserves. Des taxes et impôts indirects, comme la TVA, étant par essence de nature antisociale par rapport à la fiscalité directe et progressive.

Maintenant, le rapporteur de minorité apporte quelques éléments supplémentaires, soit que cette taxe sera affectée au développement des énergies renouvelables. Cette taxe ne serait plus liée à l'action des forces du marché et des prix, elle serait affectée à un certain nombre d'investissements nécessaires. J'accueille cet élément avec intérêt... On pourrait débattre ce soir pendant des heures de cet objet et faire l'ensemble du débat sur les taxes écologiques, parler de leurs limites, de leur utilité et de leurs inconvénients. J'accepte donc l'idée de cette affectation. Un autre élément prend en considération l'aspect social de cette taxe en se préoccupant des ménages, ce qui est une bonne chose.

De toute façon, ce débat devra se faire sérieusement, non pas ce soir au point 5.6 de la conception cantonale, mais sur la base des rapports qui nous seront rendus, sur les études qui seront faites par le canton, en l'occurrence par le département concerné. Je reporte donc toute une série de considérations que nous pourrions être amenés à faire et, en l'état, je suis prêt à accepter cet amendement. 

M. Claude Blanc (PDC). J'ai été choqué d'entendre le verbe «préjudicier» que je ne trouve pas dans le dictionnaire... Je vous propose de le remplacer par «pénaliser». 

Le président. J'ai pris notre de cette modification. Mesdames et Messieurs les députés, M. Blanc propose de remplacer «préjudicier» par «pénaliser».

M. Robert Cramer. Puisqu'on en est à rédiger des textes à une soixantaine de personnes, il serait bon de remplacer «Elle» par «La taxe»... Le texte gagnerait en clarté ! 

Le président. Je crois que je vais passer au vote, parce que chaque fois que je vous passe la parole, il y a un mot qui change...

M. Pierre Vanek (AdG), rapporteur de majorité. Encore un mot à propos du point 5.6. Il y a un côté un peu restrictif, en ce sens que l'affectation qui est évoquée - ce n'est pas une proposition d'amender l'amendement - pour cette taxe hypothétique est exclusivement le développement des énergies renouvelables. Il est évident qu'une telle taxe pourrait être affectée, non seulement au développement des énergies renouvelables, mais aussi à l'utilisation rationnelle de l'énergie. Mais tous ces points devront être débattus ultérieurement. Je ne vais donc pas allonger notre discussion de ce soir.  

M. Chaïm Nissim (Ve). Mon groupe refusera cet amendement. Quand on fait une étude, il faut pouvoir la faire en ayant un champ d'action suffisamment large. Il ne faut donc pas trop fixer de cautèles à l'avance. En l'occurrence, il ne faut pas spécifier que cette taxe devra forcément être affectée ni à quoi. Peut-être qu'elle ne le sera pas... Elle sera peut-être redistribuée... Elle ne devra pas, cela va de soi, être préjudiciable à l'économie. Sinon, on ne ferait jamais de taxes ! C'est un peu bête de définir un cadre trop contraignant. Je pense qu'il faut en rester au texte initial. 

M. Alain-Dominique Mauris (L), rapporteur de minorité. Monsieur Nissim, une taxe doit forcément être affectée. Il n'est pas possible de prélever une taxe sans cela !

Je vous propose, puisque l'ensemble de cette conception générale a comme toile de fond le développement durable, de dire : «L'étude indiquera son affectation au profit du développement durable.» En effet, le développement durable tient compte à la fois de l'économie, bien sûr, du social, bien entendu, et, enfin, de l'écologie. Ainsi, chacun pourra y trouver son compte. Nous aurons encore la possibilité ensuite d'avoir les débats qui s'imposent, mais, au moins, nous aurons eu le mérite d'avoir posé le cadre de ces débats. Les autres changements consistent à remplacer «Elle» par «La taxe» et «préjudicier» par «pénaliser».

Le président. Monsieur Mauris, pouvez-vous me relire votre amendement, tel que modifié, s'il vous plaît ?

M. Alain-Dominique Mauris, rapporteur de minorité. Bien sûr ! Je le cite :

«Le canton encourage l'étude (...) respectueux de l'environnement. L'étude indiquera son affectation au profit du développement durable et sa limite dans le temps. La taxe ne devra pas pénaliser la compétitivité économique des entreprises et être supportable pour les ménages.» 

Le président. Je vous remercie de votre collaboration ! Je soumets donc cet amendement à votre approbation.

Mis aux voix, cet amendement est adopté.

Le président. Mesdames et Messieurs les députés, nous avons ainsi pu trouver un consensus pour intégrer ces quatre amendements.

RD 319-A

Le président. Je vais passer au vote sur le rapport sur la conception générale en matière d'énergie, tel qu'il ressort des travaux de la commission.

Mis aux voix, ce rapport divers est adopté.

R 417

Le président. Nous passons maintenant à la proposition de résolution 471, qui va comprendre les quatre amendements que nous avons votés ce soir. Je ne vais pas vous les redonner. A la fin de la résolution : «...approuve la conception générale de l'énergie dans la teneur annexée au rapport RD 319-A», nous poursuivons : «...avec les amendements suivants :». Ce sont les quatre amendements qui touchent les points 3.3 «Efficacité des transports», 5.1 «L'information à la population», 5.3 «Centre intercollectivités pour la maîtrise de l'énergie» et 5.6 «Taxe sur les énergies non renouvelables», tels que nous les avons approuvés tout à l'heure.

Mme Françoise Schenk-Gottret (S). Monsieur le président, pour qu'il n'y ait pas de confusion, il s'agit de la résolution 417 et non 471 !

Le président. Je vous remercie, Madame, de cette précision ! Le texte que j'ai devant moi porte le numéro 471 ! C'est une erreur que vous avez raison de relever. Il s'agit donc bien de la résolution 417.

Mise aux voix, cette résolution ainsi amendée est adoptée.

Elle est ainsi conçue :

Résolution

(417)approuvant la conception générale en matière d'énergie

vu le rapport du Conseil d'Etat sur la conception générale de l'énergie (RD 319) ;

vu le rapport de sa Commission de l'énergie et des Services industriels (RD 319-A) ;

vu l'article 10, alinéa 3 de la loi sur l'énergie, du 18 septembre 1986 ;

approuve la conception générale de l'énergie dans la teneur annexée au rapport RD 319-A, avec les amendements suivants :

3.3 Efficacité des transports

...de l'aménagement, notamment les transports privés, développement des autres...

5.1 L'information à la population

...d'origine nucléaire, en indiquant les avantages et les inconvénients sociaux et économiques de ce renoncement.

5.3 Centre intercollectivités pour la maîtrise de l'énergie

...les partenaires concernés. Ce centre permettra aussi de cas en cas de faire appel aux compétences du secteur privé. Des actions communes «publiques/privées» pourront être organisées.

5.6 Taxe sur les énergies non renouvelables

...respectueux de l'environnement. L'étude indiquera son affectation au profit du développement durable et sa limite dans le temps. La taxe ne devra pas pénaliser la compétitivité économique des entreprises et être supportable pour les ménages.

Le président. Mesdames et Messieurs les députés, il est prévu, et le Bureau vous le confirme ce soir, que nous traitions le point 51 relatif à l'école d'ingénieurs... M. Nissim est intervenu tout à l'heure à ce sujet, mais le Bureau confirme qu'il souhaiterait que ce point soit traité ce soir... (Exclamations.) Le Grand Conseil est maître de son ordre du jour lorsqu'on est au point «Ordre du jour», ce qui n'est plus le cas ! Néanmoins, je mets volontiers aux voix la proposition de traiter le point 51 de notre ordre du jour.

Mise aux voix, cette proposition est adoptée. 

P 1260-A
7. a) Rapport de la commission de l'enseignement supérieur chargée d'étudier la pétition sur les difficultés actuelles des enseignants/enseignantes de l'école d'ingénieurs de Genève. ( -)P1260
Rapport de Mme Nelly Guichard (DC), commission de l'enseignement supérieur
M 1324
b) Proposition de motion de Mmes et MM. Janine Hagmann, Armand Lombard, Vérène Nicollier, Laurence Fehlmann Rielle, Véronique Pürro, Albert Rodrik, Jeannine de Haller, Erica Deuber Ziegler, Gilles Godinat, Marie-Françoise de Tassigny, Bernard Lescaze, Catherine Passaplan, Nelly Guichard, Antonio Hodgers et Chaïm Nissim sur les difficultés actuelles de l'école d'ingénieurs de Genève. ( )M1324

Déposée le 24 juin 1999 et munie de 136 signatures, la pétition 1260 a été transmise à la Commission de l'enseignement supérieur le 23 septembre 1999. La commission s'est réunie les 14 octobre, 4, 11 et 25 novembre, 9 et 23 décembre 1999 sous la présidence de M. Longet, puis de Mme Janine Hagmann. M. E. Baier, secrétaire adjoint du DIP dont nous apprécions le précieux concours, nous a assistés dans nos travaux. Notre reconnaissance s'adresse également à M. J.-L. Constant dont la qualité des procès-verbaux facilite grandement la tâche du rapporteur, également à M. J. Savary.

Historique

En préambule, il faut préciser que l'Ecole d'ingénieurs est aujourd'hui de par la loi une institution double puisqu'elle abrite une Ecole d'enseignement technique (EET) et une Haute école spécialisée (HES). La loi relative à la création de la HES a été adoptée par le Grand Conseil au mois de mars 1998 et elle est entrée en vigueur au moins de mai de la même année.

Pour mieux situer le contexte, il faut rappeler aussi qu'il y a quatre hautes écoles à Genève :

Ecole d'ingénieurs agronomes HES de Lullier 148 étudiants

Ecole supérieure d'arts appliqués HES 129 étudiants

Haute école de gestion HES 159 étudiants

Un comité stratégique chapeaute les quatre hautes écoles genevoises et assure la liaison avec la HES-SO. A sa tête, il a un directeur général de la HES-GE.

Audition de l'AGEEIT

(Association genevoise des enseignants des écoles d'ingénieurs et des écoles techniques) le 14 octobre 1999. La délégation de l'AGEEIT est composée de MM. S. Mouhanna, M. Degenève, M. Vincent et J.-F. Rochat

M. Mouhanna estime que la situation de l'école d'ingénieurs de Genève n'a cessé de se dégrader depuis l'entrée en vigueur de la loi et il pense que les décisions prises conduisent au démantèlement de l'école.

Il remet sévèrement en cause le choix et partant la manière de travailler du directeur du comité stratégique. Pour justifier ses dires, il dresse la liste des départs successifs des directeurs adjoints - au demeurant précédemment mis en place par la volonté de ce même directeur. Même l'administration semble prise dans la tourmente. Le directeur de l'école, engagé à grands frais, a lui-même été placé sous une forme de tutelle puisque M. Petitpierre sera dorénavant chargé de superviser l'EET.

Il craint que tous ces changements de structure ne finissent par prétériter l'école quand la commission fédérale des HES viendra la visiter avant de prendre un certain nombre de décisions par rapport à la reconnaissance des filières.

Avec un document à l'appui, M. Mouhanna démontre et déplore qu'aucun représentant de l'Ecole d'ingénieurs de Genève ne figure dans les divers groupes de travail de la HES-SO.

Il signale également que les comptes 1998 sont supérieurs de deux millions de francs au budget 1999. Bien que la diminution du nombre d'élèves soit avancée pour justifier cette diminution, il estime qu'il faut impérativement donner les moyens nécessaires lorsqu'un nouveau système est mis en place.

Et paradoxalement, dans ce contexte de diminution financière, il relève que la direction générale des écoles genevoises de la HES-SO, soit 4 ou 5 personnes, coûte tout de même quelque 1,153 millions de francs. De plus, il estime qu'il est difficile pour l'Ecole d'ingénieurs de fonctionner en étant subordonnée à trois directions, soit une direction de l'école, une direction du postobligatoire et une direction des écoles genevoises de la HES-SO.

M. Mouhanna résume la problématique de l'Ecole d'ingénieurs par trois interrogations. Il se demande tout d'abord ce que fait la direction genevoise de la HES-SO et qui endosse quelle responsabilité. Il s'interroge ensuite sur les ressources à disposition de l'Ecole d'ingénieurs, sur les moyens mis à la disposition des enseignants.

Il souhaite que les choses soient clairement dites. S'il est prévu de démanteler l'école ou de la redimensionner, il faut que cela soit annoncé.

M. Rochat indique que le nombre de postes d'enseignants au sein de l'école est passé de 104 à 94, une dizaine de professeurs sont partis à la retraite mais n'ont pas été remplacés. Or, l'Ecole d'ingénieurs a reçu une autre mission que celle qui lui était dévolue jusque-là, elle a aussi une mission de recherche et de développement. Si tout est aujourd'hui changé au niveau des horaires et des disponibilités financières, il ne sera pas possible que l'école remplisse cette deuxième mission, car il estime qu'il serait plutôt judicieux de donner au corps enseignant les moyens nécessaires pour pouvoir s'adapter.

Pour répondre aux questions posées par une députée, M. Mouhanna reconnaît que la mission de recherche et de développement a été développée au cours de ces dernières années, mais que l'école genevoise se situe toutefois encore très loin des autres écoles de ce type. Il déplore cependant le fait que les professeurs ne soient pas associés aux réflexions, qu'il ne soient pas consultés quand des changements interviennent, avant que les décisions ne soient prises.

Vu la résistance au changement qui anime un certain nombre de professeurs au sein de l'école et quelquefois aussi des velléités de règlements de comptes, un des députés fait remarquer que le climat général n'est vraisemblablement pas favorable à la concertation.

Pour répondre aux interrogations des députés sur le plan financier, M. Mouhanna affirme qu'il craint que le canton n'utilise les subventions fédérales pour pouvoir diminuer sa propre participation.

Sur le plan de l'encadrement, jugé satisfaisant par plusieurs députés qui se réfèrent aux tableaux et statistiques reçus, M. Mouhanna déclare ne pas partager cet optimisme si la dizaine de postes de professeurs partis à la retraite ne sont pas remplacés.

Pour conclure, il affirme que les pétitionnaires demandent le respect de la loi et l'affectation de certains moyens à l'Ecole d'ingénieurs. Face à la situation actuelle, les enseignants n'ont pas encore baissé les bras, mais ils sont aujourd'hui à la limite de ne plus rien faire. Ils font actuellement tout pour que nul ne puisse leur reprocher par la suite de n'avoir pas tout tenté pour sauver l'école.

Audition de M. J. Thiebaut, directeur général de la HES-GE, les 4 et 11 novembre 1999

La commission s'était étonnée de certaines pratiques, mentionnées par M. Mouhanna, au niveau de la nomination de la direction générale de la HES-Genève et de l'équipe de direction de l'Ecole d'ingénieurs. M. Thiébaut rappelle qu'en 1997, il a été procédé à un premier recrutement. Estimant la qualité des candidatures insuffisante, il a été décidé d'engager par intérim au poste de directeur l'un des doyens en place à l'époque, lequel devait partir à la retraite peu de temps après.

Cumulant à l'époque les charges de directeur général de l'OOFP et de responsable de la HES genevoise, M. Thiébaut s'est fait assister par une société de placement, principalement sur le plan méthodologique et pour les entretiens avec les candidats. Il a été question d'un coût exorbitant en rapport avec ces recrutements. Il tient donc à préciser que l'engagement du directeur a coûté 35 000 F, alors que celui des directeurs adjoints a coûté 12 000 F.

Il admet que la constitution de cette équipe de direction s'est avérée difficile, qu'il y a eu des démissions et qu'elle connaît encore aujourd'hui des difficultés.

M. Thiébaut précise que l'affirmation relative à sa participation, en qualité de candidat, aux entretiens avec les autres candidats au poste de directeur général de la HES-Genève est sans fondement. La commission a d'ailleurs reçu un courrier à ce sujet de Mme M.-L. François, secrétaire générale du DIP.

L'école est organisée en trois départements, à savoir les technologies de l'information, la mécatronique et la productique, ainsi que la construction et l'environnement. Cette organisation permet de valoriser la spécificité des différents groupes de filières.

M. Thiébaut explique l'absence de représentants de l'Ecole d'ingénieurs au sein du comité directeur de la HES-SO par le fait que le comité directeur est composé de six représentants des cantons. Or, lui-même représente le canton de Genève. Il y a également cinq représentants des écoles dans ce même comité. Les Ecoles d'ingénieurs dites vertes sont représentées par M. Mascherpa, alors que les Hautes écoles d'arts appliqués sont représentées par M. Fallet. Le canton de Genève compte donc trois représentants au sein du comité directeur de la HES-SO.

M. Thiébaut rappelle qu'il a été indiqué que des écoles d'ingénieurs d'autres cantons étaient représentées dans ce comité. Il se trouve que les représentants des cantons du Valais et de Fribourg sont en même temps directeurs d'une école d'ingénieurs dans leurs cantons respectifs. Vu le poids représenté par une telle charge, il s'agit cependant, à son avis, d'une situation provisoire.

Il précise aussi que les groupes de travail de la HES-SO sont en principe constitués de membres du comité directeur, à l'exception de deux personnes en raison de leurs compétences spécifiques.

Il constate également que le directeur de l'Ecole d'ingénieurs de Genève n'a pas été appelé jusque-là pour participer à cette structure, mais il pourrait l'être à l'avenir. Par contre, il participe déjà à la conférence des directeurs d'écoles d'ingénieurs.

Contrairement à ce que laissent entendre les documents distribués par l'AGEEIT et les explications données aux commissaires, M. Thiébaut précise que le financement de l'école n'a pas diminué puisqu'il s'est élevé à 21 millions en 1998 et à 22 millions en 1999. Il y a donc eu une augmentation des ressources mises à la disposition de l'Ecole d'ingénieurs, et ce malgré une diminution de ses effectifs. A cela, il faut ajouter les ressources du canton qui se sont élevées à 16 millions en 1999 contre 14 millions en 1998.

Lors de son audition, l'AGEEIT avait expliqué que 3,9 millions de francs avaient été affectés en 1999 aux dépenses générales de l'école contre 600 000 précédemment. M. Thiébaut précise qu'il ne s'agit pas de dépenses générales, mais d'une enveloppe mise à la disposition de l'école et dont le montant est calculé selon trois critères : les salaires, les loyers et le matériel. L'école est ensuite chargée d'organiser à l'intérieur de cette enveloppe l'attribution de ses dépenses. Il s'agit d'une solution nouvelle.

Concernant les prévisions d'effectifs d'élèves, il tient à souligner que celles-ci évoluent en cours d'année et s'affinent à l'approche des rentrées scolaires. C'est donc sur la base d'effectifs moyens calculés aux mois de novembre et de mars que le département travaille.

Les députés constatent qu'au-delà des problèmes financiers, qui sont peut-être correctement traités, il y a vraisemblablement une transition difficile. Entre des enseignants qui considèrent que l'école est sinistrée et l'optimisme de la direction générale de la HES-GE, les députés souhaitent savoir s'il manque des moyens financiers ainsi que des postes de travail dans les laboratoires. Y a-t-il oui ou non sureffectif en filière HES ?

M. Thiébaut concède qu'il y a en effet une situation de sureffectif au niveau de l'informatique de la HES. Un dédoublement pourrait être envisagé, mais il n'y a pas d'enseignants pour le réaliser.

Il indique que la HES compte 450 élèves regroupés dans une dizaine de filières pour un cursus de trois ans. Il signale qu'il existe des recettes provenant de la recherche appliquée et de projets développés pour compte de tiers. Ces ressources permettent d'engager des assistants, voire des enseignants en sus du nombre de postes usuels. Ces mandats sont toutefois limités à la durée des projets.

Au vu de tous les problèmes et malentendus évoqués par les uns ou les autres, un député se demande s'il existe un lieu où les différents protagonistes pourraient se réunir pour discuter de tout cela.

Etant précisé que l'actuel dispositif de concertation ne fonctionne pas, M Thiébaut concède qu'il conviendrait d'en trouver un autre.

Il estime également important de pouvoir avancer dans ce dossier et précise qu'il a préparé à l'attention de la commission une présentation de la HES-SO, de son système de financement, de la manière dont les charges se répartissent dans les cantons, de la répartition des charges selon les différents piliers de formation, selon les cantons et selon les écoles. Il se propose également de montrer comment il est possible de construire le budget d'une école en fonction de ces éléments, de présenter le nouveau budget détaillé de l'EIG-HES, l'évolution de ses effectifs, de ses dépenses par étudiant et du taux d'encadrement.

Sans minimiser l'importance que revêt la répartition des flux financiers, il ressort nettement de la discussion que les députés s'interrogent et souhaitent obtenir des explications par rapport aux trois derniers points mentionnés par la pétition, à savoir la mise en place d'une structure de concertation, la mise sous tutelle de l'école et l'acharnement administratif.

Lors de sa seconde audition devant la commission, M. Thiébaut présente d'emblée le système financier de la HES SO.

Il indique que le taux d'encadrement représente à l'Ecole d'ingénieurs des coûts très élevés et il souligne que cet encadrement est plus important qu'ailleurs. Il s'agirait de regrouper les cours par troncs communs ce qui permettrait d'augmenter le nombre d'élèves et de faire passer certains groupes de 5 à 10-12 élèves, sans que la formation en pâtisse.

A la demande d'un député, il présente un plan illustrant le coût et le financement par étudiant. Il insiste sur les différences sensibles qui existent entre les établissements. Par exemple, le coût d'un étudiant de l'Ecole de Lullier est nettement inférieur à celui d'un élève de l'Ecole d'ingénieurs. Cette disparité est liée directement aux coûts relatifs à l'encadrement des élèves. A l'EIG (école d'ingénieurs), le taux d'encadrement est très élevé, car les étudiants sont dispersés dans de nombreuses filières.

Par contre, la réduction des coûts à ce niveau permettrait d'investir plus d'argent dans les projets de recherche appliquée qui, à plus longue échéance donnent accès à de nouveaux financements.

Il rappelle aussi qu'à l'EIG, la priorité a toujours été donnée à l'emploi. Ce qui a fait que parfois, des groupes ont été coupés en deux pour employer plus de personnes. Par ailleurs, il mentionne le fait qu'il existe des enseignants qui ne donnent pas de cours. Une combinaison de tous ces éléments a créé un climat lourd et l'école peine actuellement à mettre en place un système de gestion efficace. Une analyse est en ce moment effectuée pour déterminer dans quels cours spécifiques une augmentation d'effectifs est envisageable.

Il cite également l'existence d'un logiciel qui est utilisé avec succès dans les collèges pour organiser la gestion des classes et donc la répartition des élèves, mais l'EIG a refusé de s'en servir. Le responsable des horaires a consacré plus de temps à analyser les défauts du logiciel qu'à sa mise en pratique.

Pour répondre à une députée qui se demande si d'autres cantons connaissent aussi une direction générale, M. Thiébaut répond que seule Genève connaît ce cas de figure. Il trouve cependant qu'il y a ailleurs absence de cohérence entre les HES d'un même canton. D'autre part, s'il y avait eu à Genève un directeur capable de mobiliser les énergies, les choses se seraient passées différemment.

A un député qui s'interroge sur les mesures qui ont été prises pour pallier à ce dialogue difficile ou inexistant, M. Thiébaut répond qu'un groupe de travail va être réanimé prochainement, qui aura pour but de faire mieux circuler l'information. Par ailleurs, un conseil d'école des HES-SO, avec des représentants de divers milieux, doit être mis en place. Celui-ci n'a pas encore été réuni, mais il pense qu'il ne faut de toute façon pas s'attendre à ce que les problèmes de regroupement des élèves puissent être discutés dans cette instance-là.

En tout état de cause, il ne pense pas que les revendications devraient arriver jusqu'à la Commission de l'enseignement supérieur au lieu d'être abordées au sein de l'établissement.

Discussion

Tous les députés sont d'avis que la situation est bloquée et que le dialogue est difficile, quasi inexistant entre l'Ecole d'ingénieurs et la direction générale de la HES Genève.

L'idée a été émise à plusieurs reprises par des députés d'auditionner le directeur de l'Ecole d'ingénieurs. Cependant, afin de ne pas ralentir le travail de la commission, compte tenu aussi des changements récents survenus dans cette fonction et au vu du contentieux qui existait entre le DIP et le directeur au moment où la commission terminait ses travaux sur le sujet, les députés ont majoritairement renoncé à l'audition du directeur actuel de l'Ecole.

Dans un premier temps, les députés de l'Alternative ont fait part de leur souhait de voir cette pétition adressée au Conseil d'Etat. Mais les termes très durs, voire excessifs contenus dans le texte ne paraissaient pas être, aux yeux de leurs collègues, le bon vecteur pour traduire la préoccupation des membres de la commission.

Les députés de tous les groupes sont d'avis que la gravité de la situation mérite dans tous les cas de figure un rapport circonstancié qui ne cache pas qu'ils se sentent tous interpellés face aux différents problèmes soulevés et aux dysfonctionnements dont il a été fait état lors des auditions.

Si les termes de la pétition sont véhéments, il y a lieu de se demander quelle en est la cause, il y a sans aucun doute un problème d'espace de concertation qui fait défaut, dans la mesure où il n'existe aucun lieu où les acteurs de l'école puissent échanger leurs idées. D'autre part, il faut bien rappeler que la naissance de la HES à Genève, en particulier à l'EIG, a été difficile. Mais aujourd'hui, il y a tout à gagner à ce qu'elle démarre dans de bonnes conditions. D'où la nécessité de clarifier la situation.

Au fil des discussions, les députés se sont ralliés à l'idée de rédiger une motion de la commission pour autant qu'un langage clair et ferme permette de définir des objectifs et de préciser le délai de réponse.

Une première ébauche de motion a été rédigée par deux députées. Ce document de base a permis, au fur et à mesure des travaux de la compléter en matière de références et de dates, de lui donner un ton plus incisif, d'y ajouter les préoccupations de tous afin de la rendre acceptable dans sa forme finale par l'ensemble des groupes.

Il ressort évidemment de tous ces travaux que les changements font peur et que beaucoup de protagonistes s'accrochent à leur manière de fonctionner et que la situation est figée. Mais force est de constater que les structures de concertation prévues par la loi votée en mars 1998, n'ont pas été mise en place et que celles qui existeraient ne fonctionnent pas.

Et surtout, il s'agit de ne pas perdre de vue ce qui a été soulevé à maintes reprises lors des auditions et au cours des discussions : cette sorte de triple direction est trop lourde et probablement aussi source de tensions et de conflits. L'Ecole doit-elle rendre des comptes à la direction du postobligatoire, à sa propre direction ou à la direction générale de la HES GE ? Qui prend les décisions en matière de personnel, de choix des filières ou encore de recherche appliquée ?

Conclusion

Pour donner à la motion sa version définitive, comme l'a suggéré l'une des députées, il faudrait distinguer trois types d'invites. Premièrement, ce qui découle de la loi ; deuxièmement, les constats sur la mauvaise coordination entre la direction genevoise et la direction romande ; troisièmement, le financement et les ressources de l'EIG. S'il est clair que quelque chose ne fonctionne pas correctement actuellement, il est en revanche nécessaire de se renseigner précisément sur la nature des problèmes.

Par ailleurs, il existe des centres de compétence des HES dans lesquels ne participe aucun Genevois. Cette situation est regrettable, dommageable pour l'école probablement et les députés souhaitent que le Conseil d'Etat donne aussi des explications à ce sujet.

En sus des invites contenues dans la motion ci-dessous, ils demandent au département de leur apporter des précisions sur les filières de formation et les centres de compétences reconnus par la HES-SO et acceptés par l'Office fédéral de la formation et du travail (OFFT).

Si les membres de la commission demandent qu'une réponse leur soit donnée « dans les meilleurs délais », cette formulation a été choisie pour éviter d'indiquer une date précise dans le texte même de la motion, mais ils souhaitent obtenir une réponse du Conseil d'Etat lors de la séance du Grand Conseil du début du mois de juin 2000 au plus tard.

Votes

La pétition est déposée sur le bureau du Grand Conseil à titre de renseignement par :

10 oui : 1 AdG ,1 Ve, 1 S, 2 R, 2 DC, 3 L

2 non : 1 S, 1 AdG

2 abstentions : 1 S, 1 AdG

Proposition de motion présentée par les députés membres de la commission de l'enseignement supérieur

11 oui : 3 AdG, 3 S, 1 Ve, 1 R, 2 DC, 1 L

0 non

3 abstention : 1 R, 2 L

Pétition(1260)

sur les difficultés actuelles des enseignants/enseignantes de l'Ecole d'ingénieurs de Genève

Mesdames etMessieurs les députés,

La Loi sur la formation professionnelle détournée de ses objectifs ?

Le 19 mars 1998, le Grand Conseil a adopté la Loi sur l'enseignement professionnel supérieur (C 1 26) et a ratifié, par la même occasion, le Concordat intercantonal créant la Haute Ecole Spécialisée de Suisse Occidentale (HES-SO). Cette Loi, comme stipulé dans son exposé des motifs et dans le rapport de la Commission de l'Université sur l'initiative 106, devait revaloriser et développer la formation professionnelle supérieure à Genève.

La Loi et le Concordat prévoient le contrôle parlementaire...

Les articles 37, 38 et 39 de cette Loi soumettent les écoles genevoises de la HES-SO, ainsi que la participation cantonale au dispositif romand, à un contrôle parlementaire. Ils chargent le Conseil d'Etat de saisir le Grand Conseil de rapports annuels portant sur les objectifs, les filières d'études, les centres de compétences, les budgets et les comptes annuels, et les plans de développement des écoles genevoises de la HES-SO.

Sur un autre plan, le Concordat définit dans son article 25 les compétences des conseils d'écoles ou d'établissements. Ceux-ci doivent notamment préaviser les budgets, les plans financiers, les comptes, les plans de développement des écoles, ainsi que l'engagement des membres des Directions et du personnel d'enseignement et de recherche.

... mais la Direction générale l'ignore !

Aujourd'hui, plus de 15 mois après l'adoption de cette Loi, aucune des dispositions précitées n'a été respectée.

Bien au contraire, la Direction générale des écoles genevoises de la HES-SO, qui a été installée immédiatement après l'entrée en vigueur de cette Loi, dans des conditions douteuses, et à grands frais - près de 1.3 millions au détriment des écoles genevoises - applique depuis lors une politique mettant gravement en danger l'avenir de l'Ecole d'ingénieurs de Genève. Cette école est pourtant largement connue pour les services qu'elle a rendus , depuis près d'un siècle, à la population et à l'économie genevoises.

Ressources diminuées et asphyxie financière programmée

En effet, outre une gestion budgétaire d'une opacité telle que de graves dysfonctionnements deviennent possibles, cette Direction générale a mis l'Ecole d'ingénieurs sous tutelle et la prive des ressources humaines nécessaires à l'accomplissement de ses missions actuelles et nouvelles prévues dans la Loi. Alors que les subventions fédérales sont passées de 12 % à 33 %, la part cantonale du financement de la partie HES de l'EIG est passée de 16,9 millions en 1998 à 14,7 millions en 1999. De plus, la Direction générale envisage la suppression de 20 postes d'enseignants sur les 104 actuels, pour l'année 1999-2000.

Un zèle suspect pour réduire le nombre d'inscriptions

A ces mesures budgétaires prises au mépris des dispositions légales, s'ajoutent des mesures de restrictions arbitraires au niveau du recrutement des élèves. De nombreuses catégories de candidats, qui seraient accueillis à bras ouverts dans les autres écoles romandes - lesquelles font par ailleurs régulièrement leur propre publicité dans la presse romande et genevoise en particulier -, se voient refusées par la Direction générale genevoise qui applique délibérément une politique restrictive.

Genève, avec une représentation incomplète, est marginalisée

Pour ce qui est des Centres de compétence prévus dans la Loi, malgré les nombreux projets proposés et les recherches abouties dans plusieurs domaines, aucun Centre n'a été attribué à Genève. La répartition de ces Centres est proposée par le Comité directeur de la HES-SO, dans lequel siègent les principaux Directeurs des écoles d'ingénieurs - «partenaires et concurrentes» de l'EIG -, à l'exception notable de la Direction de l'Ecole d'ingénieurs de Genève (qui ne figure par ailleurs sur aucun des groupes de travail du Comité directeur HES-SO). C'est curieusement la Direction générale seule qui représente l'EIG à ce niveau !

Les enseignants refusent « l'épuration technique » voulue par la Direction générale

Les conséquences négatives de cette politique sont aujourd'hui visibles à tous les niveaux au sein de l'ElG : dégradation des conditions d'études, baisse des effectifs et du niveau de formation, démotivation tant des enseignants que des étudiants et mise en danger de plusieurs filières de formation.

Cette situation suscite une très profonde inquiétude du corps enseignant.

C'est la raison pour laquelle les enseignantes et les enseignants soussigné(e)s vous adressent la présente pétition. Ils demandent :

Que l'école puisse bénéficier de l'intégralité des ressources attribuées dans le passé, afin de faire face aux nouvelles missions de HES, - ainsi que de la nouvelle 3e année préparatoire EET -, et de maintenir l'offre de formations de qualité accessibles au plus grand nombre.

Qu'il n'y ait aucune diminution de postes, particulièrement au moment où doivent s'engager des travaux de recherche appliquée et de développement, de collaboration avec les milieux économiques, de refonte des programmes et de réorganisation de l'enseignement, sans oublier la mise sur pied de la nouvelle Maturité technique de l'EIG.

Que toute la lumière soit faite sur la gestion comptable et les budgets de l'EIG, l'utilisation et le contrôle des ressources et le coût des charges additionnelles, notamment administratives (Direction générale).

Que les structures de concertation prévues par la Loi et le Concordat soient mise sur pied sans délai, et que le contrôle parlementaire devienne effectif (rapports au Grand Conseil).

Que soit mis fin à la mise sous tutelle de l'EIG, aux restrictions abusives des admissions de candidats et à l'imposition technocratique et autoritaire de programmes d'études.

Que cesse l'acharnement administratif de la Direction générale préfigurant un démantèlement progressif de l'Ecole d'ingénieurs de Genève, outil de formation qui a fait ses preuves auprès des jeunes et de la population.

N.B. : 136 signatures

AGEEIT, p.a. Ecole d'ingénieurs de Genève, 4, rue de la Prairie, 1201 Genève

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lettre

Résolution

appel à la population EIG

lettre Mme Brunschwig p.1

p.2

Débat

Mme Nelly Guichard (PDC), rapporteuse. En préambule, j'aimerais juste signaler une erreur dans les votes, à la page 10 de mon rapport, concernant le dépôt de la pétition. Il y a eu en effet deux «non» : un non socialiste et un non de l'Alliance de gauche, et deux abstentions : une abstention socialiste et une abstention de l'Alliance de gauche.

La commission de l'enseignement supérieur a consacré pas moins de six séances à la problématique soulevée par la pétition 1260, soucieuse qu'elle était de bien prendre connaissance de ce dossier complexe et controversé. Dossier toujours difficile, parce que les changements qu'implique le passage pour l'école d'ingénieurs d'une école technique supérieure, ETS - comme elle s'appelait précédemment - à une haute école spécialisée, HES, sont mal ressentis par certains professeurs.

Il ne s'agit en effet pas simplement de changer d'étiquette sur l'emballage... Le contenu et le type de cours doivent aussi changer. La manière de les donner, également. Et s'il y a moins de professeurs, c'est qu'il doit y avoir des maîtres d'enseignement et de recherche et des assistants. C'est donc un mode de fonctionnement tout à fait nouveau pour cette école, mais qui est connu sur le plan universitaire. A ces changements s'ajoute la nécessité de se profiler dans des filières de compétences au plan romand, voire suisse, pour être reconnu et donc être financé aussi.

Comme je l'ai expliqué dans le rapport, les membres de la commission ont jugé préférable de déposer la pétition et de récrire une motion pour dire leur préoccupation de voir la situation de l'école d'ingénieurs bloquée dans des discussions souvent stériles, dans lesquelles chaque camp se contentait souvent de camper sur ses positions. Et le langage, les termes virulents employés dans la pétition ne laissaient pas, à ce stade, présager d'ouverture.

Et pourtant, il y a urgence à faire valoir les atouts de l'école, pour que cette institution occupe la place qui doit être la sienne en matière de formation et de recherche à Genève, et au sein de la HES-SO bien évidemment. Il faut dire que, malgré les crispations des uns et des autres, les travaux de la commission se sont déroulés sereinement. C'est dans cet esprit consensuel et constructif que nous avons élaboré la motion et je vous engage, au nom des membres de la commission, à l'envoyer au Conseil d'Etat.

Au vu de l'évolution des événements de ces derniers jours, les réponses aux invites devraient pouvoir nous être données rapidement. Et si je puis émettre un voeu ce soir, c'est que ce même esprit d'écoute et de concertation dans lequel nous avons travaillé en commission amène ce Grand Conseil à travailler de la même manière.

Aujourd'hui, comme lors de précédentes interventions, j'ai toujours défendu la place de l'école d'ingénieurs et je souhaite, non seulement qu'elle conserve sa place, mais encore qu'elle regarde vers l'avenir pour que ses étudiants, qui représentent la relève de nos entreprises, soient solidement formés pour affronter demain leur carrière professionnelle.

Je vous remercie de votre attention. 

M. Rémy Pagani (AdG). J'ai demandé tout à l'heure la lecture des lettres des étudiants en grève. Vu l'heure tardive, je propose de surseoir à cette demande.

Par contre, j'aimerais faire état ici d'un certain nombre de considérations à propos de la pétition qui nous est présentée, émanant des enseignants qui ont déjà senti le vent venir au début du mois de septembre, et à propos de la résolution qui vient d'être rédigée par les étudiants en grève. Je me félicite de l'accord qui est intervenu, accord plus ou moins important, ne serait-ce que sur le fond de la problématique. Toujours est-il que le directeur qui a été licencié abruptement n'a pas réintégré son poste de travail.

Cela étant, toute une série de conditions ont été agréées par le Conseil d'Etat et par Mme Brunschwig Graf, responsable du département de l'instruction publique. Nous nous réjouissons en tout cas que ce conflit prenne fin...

M. Olivier Vaucher. Dépêche-toi... Ils coupent les micros à 23 h ! (Rires.)

M. Rémy Pagani. Cela étant, notre groupe ainsi que d'autres ont, il y a quelques années, relevé toute une série de problèmes d'orientation idéologique, si j'ose dire... Certains députés des bancs d'en face disaient hier que ce qui se passait en ce moment de manière générale dans l'instruction publique relevait de cette fameuse initiative présentée il y a une dizaine d'années par les libéraux... La stratégie se met en place, bien que le discours autour de l'importance de l'enfant voile et protège des considérations idéologiques. Toujours est-il que les jeunes, que ce soit les écoliers ou les étudiants, à l'école primaire, au cycle ou à l'EIG, vivent concrètement une situation qui fait partie d'une stratégie globale consistant à séparer - et je pèse mes mots - les bons élèves - ceux du gymnase, qui était il y a trente ans la voie royale, avant la démocratisation des études - c'est-à-dire la filière gymnasiale, et les mauvais élèves, sous prétexte que les mauvais élèves coûtent cher, qui seraient dirigés dans la filière de l'école professionnelle !

J'en veux pour preuve la nouvelle grille-horaire qui vient d'être mise sur pied au cycle d'orientation, qui a été accueillie par un tollé de la part du corps professoral. Elle vise à renforcer la voie gymnasiale, notamment à imposer l'anglais, et supprime toute une série de cours qui auraient permis de maintenir la démocratisation des études.

J'en veux pour preuve aussi l'abandon de systèmes d'hétérogénéité au cycle d'orientation.

Pire encore : à l'école primaire, sous prétexte de réformes, les notes sont supprimées, mais il est question aujourd'hui de mettre un examen en deuxième primaire et un vieil examen, qui existe dans le canton de Vaud, en sixième année pour sélectionner encore plus tôt les bons élèves des mauvais... Le but est de mettre sur pied - encore une fois, je pèse mes mots - une scolarité autoritaire et élitiste, sous le couvert de réformes. Du reste, certains enseignants ne s'y trompent pas et ne croient pas aux véritables motivations de la réforme qui est en train d'être mise en place.

L'objectif vise bien évidemment la diminution des coûts, qui est toujours le fond du problème. On nous a dit au début des années 90 qu'un écolier du cycle d'orientation coûtait 24 000 F. Aujourd'hui, concrètement, il ne coûte que 18 000 F. On nous dit aujourd'hui qu'un étudiant de l'EIG coûte 42 000 F. Qu'en sera-t-il demain ? Bien évidemment, il coûtera moins cher ! Ce qui est intéressant - du point de vue de la logique libérale qui nous est proposée - c'est de réduire les coûts au maximum et de séparer en deux les filières d'orientation, telles que nous les avons connues il y a une trentaine d'années, avant l'effort considérable qui a été fait par ce canton pour permettre à tout un chacun d'accéder à la formation qu'il est capable de suivre.

Voilà pour ce qui est de la situation générale. Je terminerai en disant qu'heureusement ce conflit de l'EIG se termine après deux semaines de grève. Mais toute une série d'autres conflits sont latents, vu la stratégie qui est mise en place - et de plus de manière autoritaire. Nous attendons la prochaine escarmouche, que ce soit à l'école primaire, au cycle d'orientation, au collège, voire à l'université pour en discuter à nouveau. C'est malheureux, parce que la majorité des habitants de notre canton défend la démocratisation des études, qui est... (Brouhaha. Le président agite la cloche.) ...une valeur essentielle, alors que la représentante du gouvernement qui se trouve à la tête du département de l'instruction publique, et qui représente la minorité, défend la sélection des enfants dès le plus jeune âge !

Je vous remercie de votre attention.

Une voix. Bravo !

Mme Erica Deuber Ziegler (AdG). Le conflit d'hier entre partisans de la HES-SO et partisans d'une HES Genève a évidemment laissé des traces tant chez les enseignants qu'au département de l'instruction publique. Mais la mémoire de ces positions différentes sur le sort de notre école d'ingénieurs devrait laisser place aujourd'hui - et semble être sur le point de laisser place - à une volonté de travailler ensemble dans le même but : participer à la chance d'une valorisation nationale et internationale de nos filières de formation professionnelle dans ce domaine ; à un climat d'émulation - qui existe, qu'on le veuille ou non, Monsieur Pagani - du réseau d'écoles d'ingénieurs en Suisse romande ; en bref, tirer ensemble à la même corde et manifester du punch.

Or, ces derniers temps et lorsque nous avons rédigé le projet de motion qui vous est soumis à la commission de l'enseignement supérieur, l'école se désespérait, l'école se battait pour se faire entendre du département de l'instruction publique... Et peut-être d'ailleurs l'inverse est-il aussi vrai. Madame la présidente du département de l'instruction publique, vous-même, dans la difficulté que vous aviez à sortir de la crise, vous pouviez ressentir quelque amertume. Je préférerais cette explication à celle qu'elle pourrait cacher, à savoir une véritable volonté de dégraissage de notre école d'ingénieurs, ce qui serait à mes yeux impardonnable.

Malgré leurs divergences, les associations professionnelles - divergences de l'époque puisque les associations professionnelles, notamment l'Union technique de Suisse, Swiss engineering et la SIA étaient favorables à une HES-SO - regroupent tous les professionnels de la branche. Elles ont continué leur dialogue avec l'école et ont partagé nos préoccupations. J'ai discuté avec plusieurs membres du comité de l'Union technique suisse qui nous ont fait part de leurs difficultés aujourd'hui à comprendre le malentendu ou l'incompréhension régnant entre la direction nommée à la HES genevoise et les directions, les professeurs, les structures internes de l'école. Les professeurs n'ont, disent-ils, après un premier moment de mauvaise humeur, jamais lâché leurs élèves. Ils se sont trouvés face à des blocages à l'évidence trop nombreux. Et ce sont des membres de l'Union technique de Suisse qui parlent !

Aujourd'hui, l'Union technique comme les ingénieurs SIA auxquels j'ai posé la question partagent nos préoccupations. Ils nous disent qu'à Winterthur on lance des programmes de formation et de recherche en direction de l'extérieur et qu'on collabore, par exemple, avec la Chine... Des Chinois viennent se former et des jeunes sont envoyés là-bas, ce qui crée des liens pour l'avenir, l'avenir de nos entreprises notamment. En Valais, le budget de l'école d'ingénieurs a été doublé, notamment pour développer la recherche. L'UTS elle-même jette des passerelles pour que des diplômés qui sortent de nos HES puissent passer un Master aux Etats-Unis. L'Union technique aurait besoin de trouver à la direction de la HES de Genève un répondant qui relève ce type de défi.

Mais Genève fonctionne quasiment sans direction et sans structures internes efficaces. L'EET doit pouvoir disposer d'une structure et d'un budget gérés par sa direction, et la HES doit pouvoir disposer des siens. On nous le promet : je m'en réjouis ! Les élèves et leurs parents doivent disposer d'un organigramme et d'un plan d'étude clair. En début d'année, lorsqu'ils l'ont demandé, ils ne l'ont pas reçu... Je me suis même laissé dire que M. Kohler avait un organigramme qu'il n'osait pas diffuser sans autorisation...

Il faudrait régler la question de l'enseignement de la culture générale et des langues à l'école, qui préoccupe également les élèves et leurs parents. Il y a eu de tels enseignements avec des classes à niveau qui ont été supprimés. On vole à vue, et cela doit être réglé.

Il faudrait se hâter également de régler la question de l'échelle des salaires entre professeurs de l'EET et professeurs HES. C'est également une question qui traîne et qui est évidemment une cause de frictions.

Le plus grave est l'absence des structures de concertation que la loi avait prévues. J'entends dire que grâce à la grève - c'est tout de même embêtant ! - cette réunion avec les différents partenaires de l'école que nous appelions de nos voeux a eu lieu aujourd'hui. Nous nous réjouissons que la date des élections s'approche pour que ces structures de consultation soient mises en place dans l'école !

Et enfin, nous souhaitons évidemment que notre école d'ingénieurs ait à sa tête une direction compétente, si possible issue du milieu professionnel, qui dispose de l'autorité - c'est nécessaire - pour diriger une école qui doit chercher à adapter les enseignements - comme l'a excellemment démontré le rapport de Mme Guichard et comme elle l'a encore évoqué tout à l'heure - trouver de nouvelles pistes, mettre en place de nouveaux types d'enseignement. Or, la direction actuelle à la tête de l'école n'a pas cette autorité, et c'est une des raisons pour lesquelles la circulation de l'information passe mal. Cette circulation se fait mal également au niveau des directions d'écoles, de la direction HES et des professeurs. Je me suis laissé dire que certains directeurs de filières passaient par-dessus la tête du directeur de l'école pour s'adresser directement à la tête de la direction HES... Ça ne peut pas fonctionner comme cela ! (L'oratrice est interpellée.) Mais ce sont des gens bien informés qui me l'ont rapporté !

Une voix. Ah, tu vois !

Mme Erica Deuber Ziegler. Je souhaiterais également que ce soient les directeurs de nos écoles qui soient présent dans la HES-SO pour créer une dynamique. Je donne là des pistes qui sont totalement élémentaires... Il ne faut pas créer un niveau hiérarchique administratif entre les responsables de nos écoles et les réunions de discussion qui se déroulent à la HES-SO. On me rétorquera que M. Kohler ne s'y rendait pas parce qu'il ne voulait pas y aller, ou parce qu'il n'y était pas convoqué, mais un fait est certain : la délégation doit être assurée par les directeurs d'écoles.

Je ne voudrais pas continuer cette énumération plus longtemps... Je voudrais simplement dire encore un mot : récemment, à une assemblée générale de l'Union technique de Suisse, Mme Ruth Dreifuss, qui était invitée, a prononcé un discours sur l'intérêt qu'il y avait d'accepter des étudiants étrangers dans nos écoles, de manière que dans un proche avenir ces élèves rentrés chez eux soient nos défenseurs, les défenseurs de nos entreprises et de nos ingénieurs à l'étranger. Or, nous le savons, nous avons refusé en début d'année d'inscrire des étudiants français dans certaines filières de notre école. Ils sont donc allés à Fribourg, à Yverdon ou ailleurs...

Ces exemples me prouvent qu'aujourd'hui il faut absolument être à l'écoute - être à l'écoute... - des milieux professionnels, des enseignants, des élèves et, bien sûr, du département de l'instruction publique pour que cette écoute circule et que cette motion unanime - ou presque - de la commission de l'enseignement supérieur puisse recevoir votre approbation, Madame la présidente du département de l'instruction publique, et des réponses satisfaisantes, afin d'aboutir enfin à un projet qui soit digne du passé de cette école et de la qualité de l'ensemble de ses protagonistes. 

M. Chaïm Nissim (Ve), rapporteuse. La rapporteuse l'a dit tout à l'heure, l'ambiance de travail était bonne dans cette commission. C'est peut-être parce qu'elle est essentiellement composée de femmes. C'est peut-être aussi parce que les rares hommes qui font partie de cette commission sont assez féminins... (Rires.) Je pense notamment à M. Godinat, à M. Lombard et à moi-même... (Exclamations.) J'ai sciemment évité de mentionner mon collègue Lescaze... (Rires.) C'est peut-être pour cette raison que nous avons pu faire du bon travail et que nous avons évité de nous affronter dans de bêtes clivages gauche/droite sur ce sujet délicat.

J'imagine que, dans une autre commission, ce même rapport ou cette motion aurait pu aboutir à deux rapports conflictuels - comme on sait si bien le faire dans ce Grand Conseil - à huit contre sept, avec une majorité toujours hargneuse et une minorité encore plus hargneuse... J'aurais pu imaginer entendre toutes sortes d'arguments, surtout dans ce contexte de grève assez pénible. Par exemple, que Mme Brunschwig Graf, parce qu'elle est libérale, veut démanteler l'école de Chavanne, s'opposer à la démocratisation des études, limiter les budgets... D'autres auraient répondu que ce n'est pas du tout de sa faute, mais la faute des profs qui sont crispés sur leurs acquis sociaux, qui sont corporatistes et qui refusent le changement... Eh bien, non ! Nous avons évité ces deux grossiers écueils et nous avons cherché à restaurer les structures de dialogue qui existent, mais qui ne sont malheureusement pas toujours utilisées. Nous avons cherché à faire un travail constructif avec des propositions concrètes.

Pendant que nous faisions ce travail, j'ai pu constater que les profs et Mme MBG continuaient leur dialogue de sourds... J'ai trouvé six lettres, dont j'imagine qu'elles ont été distribuées à la presse, avec des résolutions, des réponses, des contre-réponses, des lettres bien, des lettres moins bien... Eh bien, je considère que ces lettres n'auraient pas dû être données à la presse ni aux députés. Elles auraient dû circuler à l'intérieur des structures de concertation, de façon civilisée. C'est comme cela que cela devrait fonctionner !

Comme j'ai reçu ces lettres en tant que député, je tiens tout de même à signaler aux profs du Tech que leur résolution comporte deux points essentiels avec lesquels les Verts ne pourront jamais être d'accord, à savoir les point 2A et 2B. Au point 2B, ils demandent que l'offre de formation actuelle à l'EIG soit maintenue et développée. Eh bien, je ne suis pas d'accord avec eux... Le peuple a voté, et les Verts étaient d'accord avec la HES-SO !

Cela signifie - et je m'adresse directement à vous, Mesdames et Messieurs les profs - qu'il n'est pas logique d'avoir trois profs pour six étudiants à Genève, six à Yverdon et six à Délémont, alors qu'ils se trouvent dans la même filière ! Il vaudrait mieux que ces dix-huit élèves soient regroupés au même endroit, par exemple à Yverdon, ce qui obligerait - c'est vrai - certains de vos élèves à se déplacer selon la filière qu'ils veulent suivre. Mais c'est la volonté de la majorité du peuple et c'est aussi la volonté des Verts. Je le répète clairement : certaines de vos revendications sont corporatistes ! Vous voulez absolument tout bloquer, mais ce n'est pas un bon service que vous rendez à vos élèves !

D'un autre côté, je dois vous dire que vous n'avez pas non plus été un ange dans cette histoire, Madame Brunschwig Graf. Vous répondez toujours avec des arguments logiques, mais avec un petit ton agacé, un petit ton rageur... Madame la présidente, j'aimerais tellement que vous quittiez ce ton et que vous ouvriez votre coeur... Je sais que c'est impossible ! Mais j'aimerais quand même que vous sachiez que la psychologie des Verts, c'est aussi d'essayer d'ouvrir le dialogue. Et en l'occurrence, Madame la présidente, vous n'avez certainement pas été parfaite ! Cela dit, chacun fait ce qu'il peut... (Rires.)

Voilà, je crois que j'ai tout dit... (Rires et applaudissements.) 

Mme Janine Hagmann (L). Tout à l'heure, M. Nissim demandait que l'on ne traite pas de ce point ce soir sous prétexte qu'il était tard et que nous étions fatigués, mais je constate que ça ne l'empêche pas de parler pendant dix minutes !

Il faudrait beaucoup de temps pour lui répondre ainsi qu'à M. Pagani et à Mme Deuber, qui font un débat de fond qui va beaucoup plus loin que le débat sur la motion que nous désirons traiter. C'est un peu dommage que cela se fasse dans ces conditions.

Au moment où la motion a été déposée par la commission de l'enseignement supérieur, tous les commissaires ont éprouvé un sentiment de satisfaction. En effet, comme l'a dit M. Nissim - et c'est vrai - il en a fallu palabrer des heures pour trouver un consensus ! Mais les commissaires l'ont fait, car tous soutiennent l'EIG et souhaitent résolument en assurer le fonctionnement administratif. C'est une école dont le rayonnement dépasse largement les frontières genevoises et qui doit garder son aura. Personne n'a jamais envisagé son démantèlement. Ce serait ridicule de brûler ce que l'on adore !

Une bataille a eu lieu, c'est vrai. Qui l'a gagnée ? On ne peut pas encore le dire ce soir ; seul l'avenir nous le dira ! Maintenant, il faudra panser les plaies car toute bataille laisse des blessés. Je souhaite que les images catastrophistes de notre enseignement véhiculées par les grévistes ne fassent pas de tort à l'école genevoise. Il n'est pas vrai que tous les ordres d'enseignement sont malades... Bien au contraire ! On n'est pas malade, comme l'enseignement primaire actuellement, lorsqu'on se remet totalement en question et qu'on demande des réformes, qui plus est des réformes acceptées ! On n'est pas malade dans un canton qui a toujours eu une longueur d'avance sur l'enseignement et qui ne désire absolument pas péjorer son enseignement !

Genève, cité des pédagogues, doit rester un phare ! J'espère qu'étudiants et autorités profiteront de sa lueur pour continuer à dialoguer et que plus jamais on ne se demandera : «Y a-t-il un élève dans l'école d'ingénieurs ?».

Mme Marie-Françoise de Tassigny (R). Mettez dans un chaudron une école d'ingénieurs, qui avait souhaité dans les temps anciens devenir à elle seule une HES ; ajoutez une évolution de la situation qui transforme cette école par une nouvelle loi en une structure à deux têtes : l'EET et la partie HES ; mettez à la tête des directions multiples et peut-être non coordonnées ; additionnez des promesses non réalisées dans un premier temps de disponibilités financières pour la nouvelle formule HES, ses recherches et son développement, des refontes des filières tous azimuts et des résistances caricaturales au changement : vous avez ainsi tous les éléments réunis pour faire un véritable soufflet explosif !

Les députés de la commission de l'enseignement supérieur ont vite pris la mesure de cette poudrière. Ils ont refusé le ton démesuré de la pétition, mais ont déposé une motion invitant le Conseil d'Etat à faire rapport sur ce dossier extrêmement délicat. Malheureusement, l'action des députés concernés a été rattrapée par le charivari du décor précédemment décrit. Il est regrettable que le département de l'instruction publique n'ait pas mieux anticipé devant cet orage annoncé et n'ait pas pris tous les moyens pour régler cette crise.

Néanmoins, le groupe radical se réjouit que le Conseil d'Etat - et la conseillère d'Etat - ait pris la mesure des événements de ces derniers jours et le remercie d'avoir tout mis en oeuvre pour que la sérénité revienne dans cette école, avec comme seul objectif la formation d'excellence des étudiants.

Le président. Nous saluons à la tribune la présence de notre ancien collègue Jean-Marc Boccard. (Applaudissements.)

Mme Laurence Fehlmann Rielle (S). Le mouvement de grève qui s'est développé à l'école d'ingénieurs a démontré à quel point les revendications des étudiants convergeaient avec celles contenues dans la pétition 1260 et a révélé le manque flagrant de concertation qui a caractérisé le fonctionnement de cette école durant ces derniers mois. Néanmoins, nous pouvons nous réjouir du fait que les négociations qui ont été menées entre les étudiants et le département de l'instruction publique aient abouti à un accord.

Le groupe socialiste tient à saluer au passage la mobilisation exemplaire des étudiants qui, avec le soutien des enseignants, nous ont donné la preuve de leur capacité à s'engager et à s'organiser pour avoir une prise sur leur avenir.

Mais revenons à la motion émanant des membres de la commission de l'enseignement supérieur. Si nous avons accepté de présenter une motion rédigée en des termes plus mesurés que ceux de la pétition, cela n'enlève rien à nos vives préoccupations relatives aux dysfonctionnements qui affectent cette école à différents niveaux et qui ont été bien relevés dans le rapport de Mme Guichard.

Nous maintenons donc qu'il est urgent de mettre en oeuvre les structures de concertation internes à l'école prévues par la loi de 1998 et réclamées à différentes reprises. Il est également essentiel que la direction du département donne un certain nombre d'explications, en particulier sur le fonctionnement de la structure de pilotage, sur les modalités d'application des procédures d'admission des étudiants et sur les intentions réelles ou supposées de supprimer certaines filières. Le temps de l'opacité est révolu... Place à la transparence !

Le problème des ressources budgétaires nécessaires à l'établissement pour l'accomplissement de ses missions figure aussi, bien sûr, au rang de nos préoccupations.

Pour toutes ces raisons, nous vous demandons de renvoyer cette motion directement au Conseil d'Etat. 

M. Armand Lombard (L). Je compatis à la grande déception de M. Pagani et de ses amis, pour qui la pagaille a cessé et dont le joujou qu'il cherchait à maintenir et avec lequel il voulait que nous jouions ce soir a été rangé dans l'armoire par la cheffe du département de l'instruction publique...

Je suis navré pour vous, Monsieur Pagani ! C'est vrai, vous nous avez sorti... - comment s'appelait cette chanson, déjà ? (L'orateur se met à chanter sur l'air de «Salade de fruits» de Bourvil.) - ...salade de fruits, jolie, jolie, jolie : le tronc commun, l'hétérogénéité, la sélection, les bons, les mauvais, la scolarité autoritaire, l'escarmouche, le dégraissage...

Vous nous avez tout sorti : merci ! C'était un beau bouquet ! Il est totalement inutile... Nous pouvons le poser sur la table... C'est bien : vous avez pu avoir un peu de plaisir sans le ton agressif de rigueur, puisqu'il n'y a plus de raison d'être agressif étant donné que la situation - Dieu merci ! - est rentrée dans l'ordre.

M. Claude Blanc. C'est les vacances ! (Le président agite la cloche.)

M. Armand Lombard. Ce qui me frappe dans la crise que vient de traverser l'école d'ingénieurs, c'est que c'est un moment très difficile dû à la période de mutation que nous traversons. Les structures doivent être adaptées en fonction des exigences qui ont changé, en fonction des besoins nouveaux. Il a fallu changer ce qui était acquis, alors que la mise sur pied de cette école d'ingénieurs avait pris beaucoup de temps et que l'école fonctionnait - je ne sais pas si elle fonctionnait si bien, d'ailleurs... En effet, nous avons été obligés de faire des changements brusques pour nous adapter aux besoins de la société, de la région - voilà enfin un bout de la région qui se fait avec la HES ! - et pour tenir compte des filières particulières, des filières nouvelles, des suppressions de filières, etc.

Tout cela nous met dans une situation difficile, car il y a ceux qui sont en place et qui ont peur de devoir changer ; ceux qui veulent changer parce qu'ils sont clairvoyants ; ceux qui veulent changer parce qu'ils ont la bougeotte et, enfin, il y a ceux qui vont de l'avant.

Dans le cas de l'école d'ingénieurs, nous nous trouvions devant une école en mutation, comme cela a été le cas dans l'école primaire, au cycle, etc. Moi je salue plutôt la gestion de cette opération. Dans cette bataille - il me semble que c'était Napoléon qui faisait l'attaque au centre et que Jules César attaquait par les ailes - Mme Brunschwig Graf a tenté d'avancer ses pions... (L'orateur est interpellé par M. Blanc.) Monsieur Blanc, vous n'êtes même pas drôle ! Retenez-vous !

M. Claude Blanc. J'ai sommeil !

M. Armand Lombard. Vous avez sommeil ? Je veux bien, mais on vous a beaucoup entendu à propos de l'énergie !

Quoi qu'il en soit, nous sortons avec plaisir de cette situation difficile. Notre motion ne sert plus à rien puisque la situation a évolué dans le bon sens, mais nous l'enverrons tout de même au Conseil d'Etat. Nous pouvons simplement souhaiter que les prochaines mutations pourront être gérées à l'avenir avec moins de branle-bas que cette fois, pour arriver à une bonne solution, comme celle qui semble avoir été trouvée. 

Mme Jeannine de Haller (AdG). Je serai extrêmement brève, parce que tant Mme Deuber Ziegler que Mme Fehlmann-Rielle ont remarquablement bien dit ce que j'aurais moi-même voulu exprimer.

J'indique donc simplement que l'Alliance de gauche soutient, bien entendu, le renvoi de cette motion au Conseil d'Etat. Pour ce qui est de la pétition, dont certains termes étaient certes un peu outranciers, nous demandons néanmoins qu'elle soit renvoyée au Conseil d'Etat. En effet, elle témoigne du malaise certain qui régnait à l'école d'ingénieurs et qui, je le pense, continue à régner, même si certains accords ont été trouvés. Il faudrait donc que le Conseil d'Etat y réponde aussi. 

Mme Erica Deuber Ziegler (AdG). Excusez-moi de reprendre la parole, mais je tiens à préciser l'idée que l'on se fait de la notion de filières.

M. Nissim nous dit que les Verts sont accord avec la volonté populaire genevoise qui s'est exprimée très clairement dans le sens d'une sélection des filières à garder à Genève au profit de regroupements romands. J'aimerais dire que ce n'est pas mon interprétation de la volonté populaire... En effet, l'offre de formation doit rester la plus ouverte possible. Les aménagements horaires, l'organisation de l'enseignement de ces filières peuvent en effet éventuellement souffrir d'obliger à faire une année de perfectionnement ici, une année là, mais l'offre de formation, j'insiste, doit rester la plus ouverte possible. Je vous demande donc de faire la distinction entre les filières - sortes de sections existant en propre dans chacune de ces écoles - et les offres de formation qui doivent être restructurées, certes, mais qui doivent rester compétitives et ouvertes, notamment aux jeunes qui veulent suivre un enseignement à Genève et qui pourraient le cas échéant se déplacer ensuite ailleurs pour se perfectionner. C'est ainsi que j'imagine une école de base avec ses prolongements vers une Haute école, de manière à ne pas faire ce que M. Pagani appelle une «sélection», ce qui empêcherait des élèves de faire certains choix de formation parce que ces choix exigeraient de se déplacer. Nous avons vu ce qui se passe au niveau de la voie gymnasiale : certaines options risquent de ne pas être choisies, parce que certains collèges ne les proposeront plus et que les élèves choisiront plutôt de rester dans leur collège. Je n'aimerais pas que l'offre de formation se restreigne ainsi à Genève.

M. Albert Rodrik (S). J'ai l'impression que face à un rapport mesuré et sérieux, à une motion dont les termes ont été bien pesés, certains se méprennent dans cette salle et croient que ce qui se passe est anodin... Il est possible que le panorama dépeint par M. Pagani soit noir à l'excès, mais il n'est pas tolérable que M. Lombard pousse le numéro du troll chantant à ce niveau... (Rires.)

Non, Mesdames et Messieurs, ce n'est pas ce que vous décrivez ! Et nous avons là - et nous vivons encore - un drame dans cette affaire ! Et ce n'est pas parce que nous disons en termes mesurés que nous voulons la concertation, que nous voulons que cette école garde la place qui lui revient, que tout à coup nous allons banaliser ce problème ! Grâce à l'effort de la présidente, nous sommes restés continuellement à l'écoute l'un de l'autre, et nous avons pesé chaque mot. Et je lui rends hommage... Mais cela ne permet pas de réduire cette affaire à la mascarade que M. Lombard nous a infligée !

M. Armand Lombard. Tu es fatigué !

M. Albert Rodrik. Je ne suis pas fatigué, mais toi tu nous prends pour des imbéciles !

Mesdames et Messieurs les députés, je reviens à mon propos. Je souhaite que l'ampleur des événements soit prise en compte. Et en représailles pour ce que M. Lombard a fait, nous voterons le renvoi de la pétition au Conseil d'Etat ! (Applaudissements.)

M. Olivier Vaucher. Alors là, Albert, tu nous déçois !

M. Albert Rodrik. Je vous déçois délibérément, Monsieur ! Parce que l'effort que nous avons fait pour aller l'un vers l'autre a été ridiculisé par un collègue ! Voilà ! (Applaudissements.) 

M. Christian Brunier (S). Lors de la campagne sur les HES, l'Alliance de gauche, le parti socialiste, une bonne partie des milieux enseignants, des parents, des étudiants aussi, étaient véritablement inquiets par rapport à l'avenir de cette école et par rapport à l'avenir de l'ensemble des écoles HES. Très vite dans la campagne, la droite nous a attaqués en disant que nos inquiétudes étaient infondées, que nous étions axés sur un corporatisme vieillot, que nous étions des démagos, que nous étions repliés sur nous-mêmes...

M. Claude Blanc. C'est bien vrai !

M. Christian Brunier. Néanmoins, l'actualité de ces derniers jours nous prouve que, malheureusement - je dis bien malheureusement - nous avions raison ! M. Nissim et M. Lombard disent en fait que le combat actuel de l'école d'ingénieurs est un combat uniquement corporatiste et que les profs se battent uniquement pour leurs conditions de travail et leur salaire - ce qui n'est pas une mauvaise chose en soi, parce que se battre pour améliorer ses conditions de travail et son salaire, c'est aussi très honorable ! Je vous rappelle que lorsqu'un directeur est mis à la porte, en principe - ce sont mes souvenirs de jeunesse - les élèves font la fête, trop contents qu'il ait été foutu à la porte. Mais dans cette affaire les élèves, Mesdames et Messieurs les députés, se sont mis en grève, ont pris du retard sur leur programme scolaire, pour défendre leur directeur qui avait commis un crime gigantesque : celui de défendre son école et les filières de formation...

Autre chose. A entendre certaines personnes, sur les bancs de ce Grand Conseil, on a l'impression que les professeurs de l'école d'ingénieurs sont une équipe de dangereux gauchistes. Eh bien, non, Mesdames et Messieurs les députés ! Il y a parmi eux des gens de tous les partis, et beaucoup de personnes totalement apolitiques ! Il y a une certaine unanimité parmi les professeurs de l'école d'ingénieurs aujourd'hui pour défendre cette école, pour défendre la qualité de formation de ces écoles et pour défendre l'avenir des élèves.

Il ne faut donc pas minimiser la situation, comme certains le font ce soir, en prétendant que l'heure est tardive et qu'on peut se permettre tout et n'importe quoi dans ce Grand Conseil.

J'aimerais tout de même dénoncer la tentative assez cynique - le cynisme est bien présent - de fermer des filières de formation, même si c'est de manière astucieuse, et je rends là hommage à la présidente du département... Il y a actuellement onze filières. Je vous le concède, c'est beaucoup pour une HES, parce que le niveau HES est assez élevé et qu'il est difficile de garder un bon niveau de qualité sur l'ensemble des filières. Alors, on pourrait faire preuve de courage politique - ce n'est pas forcément la tradition dans ce canton... - et décider de supprimer quelques filières. Mais le courage politique est absent ! Pourquoi ? Parce que tout abandon de filière serait bien sûr condamné sévèrement, tant par les profs et les élèves que par la population ! La stratégie est donc plus perfide. Elle consiste à couper les moyens de cette école, pour que, finalement, l'évaluation HES soit négative. En effet, Berne doit faire une évaluation HES et c'est donc Berne qui devra trancher, ce qui permettra au pouvoir politique de ce canton de n'assumer aucune responsabilité dans la suppression de filières qui n'intéressent plus certains conseillers d'Etat - les filières industrielles - et de se tourner uniquement vers les filières de prestige, à savoir les filières high-tech, entre autres.

Un des problèmes de cette école - qui n'a pas été assez évoqué ce soir - c'est sa direction bicéphale. Vous savez très bien que le directeur de l'école d'ingénieurs - j'ignore son niveau et s'il a les qualités requises pour diriger une telle école - s'est retrouvé dans des conditions organisationnelles impossibles à gérer, quelle que soit la personne. En effet, il dépendait de deux directions, la direction de l'école secondaire et la direction des HES qui est une structure bicéphale, donc bureaucratique, quasiment soviétisante... Je vous rappelle juste une chose, à titre d'exemple : il lui a fallu près de dix mois pour avoir le feu vert des deux directions et pouvoir engager deux secrétaires, afin d'assurer la partie administrative de cette école.

J'aimerais évoquer le recrutement du directeur. Je vous rappelle que le nouveau directeur - ou plutôt l'ex-nouveau, puisqu'il est déjà renvoyé - avait été engagé au début de l'année 1999. Nous avons appris ce soir - les commissaires l'ont appris en commission - qu'après six mois seulement la procédure de licenciement était déjà engagée, dans des conditions très particulières. D'ailleurs, Madame la présidente du département, vous vous en êtes excusée, en disant qu'il y avait effectivement eu dysfonctionnement dans cette procédure. Il avait du reste été annoncé que le directeur était démissionnaire, alors que ce n'était pas vrai. Quoi qu'il en soit, au bout de six mois déjà, on flanquait à la porte ce monsieur qui travaillait dans des conditions, comme je l'ai dit, tout à fait inacceptables, la structure ultrabureaucratique ne lui permettant pas d'agir. Il était coincé dans une structure très difficile, d'autant que les ordres du département de l'instruction publique ne correspondaient pas forcément à sa manière de diriger une école.

On peut donc constater un certain nombre de dysfonctionnements graves. Je crois que la motion que nous allons voter ce soir n'est qu'un premier pas et que nous devrons rester hyper-vigilants - j'insiste : hyper-vigilants - par rapport à l'avenir de cette école, car autrement nous risquons de courir à la catastrophe. En ce qui me concerne, je suis aujourd'hui fort inquiet de l'avenir de l'école d'ingénieurs. Les étudiants, les professeurs, les parents d'élèves et la population en général l'ont prouvé durant ces derniers jours. 

M. Armand Lombard (L). J'accepte de me faire donner des leçons par M. Rodrik, parce que M. Rodrik participe à la commission de l'enseignement supérieur avec beaucoup d'assiduité, d'intelligence et d'expérience. Il m'a mouché et il a probablement raison...

Par contre, j'aime moins le discours de vieux papa qui vient de nous être délivré. On a peur de changer, on veut garder nos filières, Madame la présidente, on veut rester comme on est ! (Brouhaha. Le président agite la cloche.) C'est un discours de vieux papa assis sur ses acquis, de la part de quelqu'un qui n'a pas mis les pieds dans cette commission. Alors, s'il a des conseils à nous donner, qu'il vienne les donner en commission : il sera le bienvenu !

M. Christian Brunier. Les étudiants aussi étaient de vieux papas ?

M. Armand Lombard. Cela dit, les étudiants, tout comme M. Brunier, ont protesté contre l'inefficacité de la direction au moment de la première grève et ont protesté contre l'éviction du directeur au moment de la deuxième grève. Il faudra donc juste améliorer votre discours, Monsieur Brunier, pour la prochaine fois ! Il faut être logique : ou bien vous dites qu'il est inefficace ou bien vous dites qu'il est efficace ! Mais tâchez de construire votre discours !

M. Christian Brunier. Il faut leur demander à eux !

M. Armand Lombard. Ecoutez, essayez de raisonner tout seul ! Ils n'ont pas la parole, les pauvres ! Alors, essayez de répondre plus intelligemment !

Je suis désolé, Monsieur Rodrik, si vous avez eu l'impression que je voulais faire de l'humour par rapport à cette situation. Je voulais surtout me moquer du discours de M. Pagani, de sa grande tristesse - ce n'était d'ailleurs pas si méchant... Je ne cherchais pas à dire que tout cela n'était pas un problème et je l'ai bien précisé, mais vous n'avez dû entendre que la moitié de ce que j'ai dit, Monsieur Rodrik. Dans la moitié que vous n'avez pas entendue, j'ai dit que les problèmes étaient dus à une mutation générale importante, car les exigences de notre société sont nouvelles. Et je ne vois pas en quoi j'ai minimisé la gravité de la situation ! Votre réaction a été un peu chaude...

Alors, si vous voulez renvoyer cette pétition au Conseil d'Etat, renvoyez-la ! Si c'est pour punir M. Lombard, c'est une pédagogie de vieux roille-gosse... Mais ce n'est sûrement pas ce que vous...

Une voix. De quoi ?

M. Armand Lombard. De vieux roille-gosse ! Si vous ne savez pas ce que c'est, je vous donnerai un cours après...

La pétition demande de mettre fin «à la mise sous tutelle de l'école d'ingénieurs» et que cesse «l'acharnement administratif». Vous venez de dire que nous avions fait du bon travail en commission et que nous avions réussi à aplanir nombre de problèmes qui auraient au contraire pu devenir de véritables petites bombes. Alors, je trouve bête de réagir comme cela au dernier moment. Cela dit, renvoyez-la ! C'est vrai que vous avez la majorité et que vous gérez la démocratie ce soir... Alors, allez-y !  

Le président. Je passe la parole à M. Lescaze et, ensuite, je propose que nous passions au vote. Allez-y, Monsieur Lescaze, tant que vous n'avez pas d'amendement, ça va ! (Rires.)

M. Bernard Lescaze (R). Comme plusieurs personnes, notamment membres de la commission de l'enseignement supérieur, l'ont rappelé, nous avons réussi après de longs débats à nous mettre d'accord sur les termes d'une motion. Pour notre part - en tout cas pour ce qui reste du groupe radical ce soir, vu l'heure tardive - nous sommes décidés à tenir cet engagement, et nous voterons cette motion. Il avait été déclaré très clairement qu'en conséquence la pétition ne serait pas renvoyée au Conseil d'Etat. Je pense donc que cet accord - il ne s'agit pas d'épicerie, il ne s'agit pas de sous - doit être tenu, peu importe les propos parfois désagréables tenus par les uns et par les autres.

Ce qui, ce soir, me fait particulièrement plaisir, outre un certain niveau du débat tout de même un peu moins passionné que je ne le craignais, c'est d'apprendre que la grève est suspendue - elle n'est pas terminée - à l'école d'ingénieurs. En effet, c'est le premier pas réel et important vers un dialogue qui paraît tout à fait nécessaire.

J'ai aussi retenu de ce débat une chose très importante, c'est que personne ici ne conteste la nécessité de maintenir la qualité de l'enseignement de l'école d'ingénieurs, partie intégrante de la HES-SO. Une fois que chacun aura bien intériorisé ce que cela veut dire, je pense que même les opposants les plus acharnés à l'heure actuelle de la politique menée par la présidente du département de l'instruction publique reconnaîtront que cette politique vise effectivement à poursuivre ce but : maintenir une HES-SO de qualité à Genève !

J'ai retenu un seul chiffre : grâce à la HES-SO, l'ensemble des écoles genevoises appartenant à celle-ci nous coûte 42 millions, dont seulement 25 millions payés par le canton de Genève. En moyenne chaque étudiant coûte 42 000 F : c'est beaucoup plus que pour nombre d'étudiants dans d'autres facultés de notre université. Et cela est un témoignage tangible, sonnant et trébuchant - même si on peut toujours faire mieux - de l'intérêt que le canton de Genève, mais aussi l'ensemble de la Suisse romande, porte au maintien et au développement de certaines filières à Genève. Et comme cela a aussi été dit, je tiens ici à saluer le courage politique consistant à dire qu'il faudra probablement établir des priorités dans certaines filières. Cela a été dit aussi bien sur les bancs de la gauche que sur les bancs de la droite.

En conséquence, je vous recommande de voter la motion, comme l'unanimité de la commission de l'enseignement supérieur l'a suggéré, et de laisser de côté la pétition. 

M. Antonio Hodgers (Ve). Juste deux mots en cette heure tardive, pour indiquer que le groupe des Verts ne soutiendra pas le renvoi de la pétition au Conseil d'Etat contrairement au groupe socialiste qui vient de changer d'avis. Toutefois, nous soulignons que nous avons entendu les préoccupations des étudiants et des enseignants et nous estimons, à ce titre, que ces préoccupations sont reflétées dans le texte de la motion.

Dans ce débat, il nous semble qu'une volonté de trouver un consensus se dégage - c'est en tout cas dans ce sens que la motion a été rédigée - et nous nous en tenons à ce que nous avons dit en commission, c'est-à-dire uniquement au renvoi de la motion au Conseil d'Etat.  

Mme Martine Brunschwig Graf. Vous me permettrez de renoncer ce soir à évoquer en quoi que ce soit les questions posées par M. Pagani, parce que son but ne s'inscrit manifestement pas dans l'état d'esprit que vous avez souhaité donner à vos débats.

De la même façon, je n'entrerai pas en détail dans les réponses aux questions de celles et ceux qui ont malheureusement parfois jugé nécessaire de faire état de discussions ou d'informations fragmentaires en leur possession et dont il a été démontré, ces quinze derniers jours, à quel point il fallait les rassembler, les confronter et les vérifier pour s'apercevoir que certaines vérités ou prétendues telles ne reflétaient pas vraiment la réalité.

Si, aujourd'hui, une résolution de l'assemblée générale unitaire de l'EIG annonce la fin de la grève, c'est aussi parce que ce travail a été accompli et que de part et d'autre on a essayé d'établir des relations basées sur des principes de réalité et d'engagements crédibles.

Mesdames et Messieurs les députés, qu'elles qu'aient été les difficultés rencontrées ces derniers jours, une chose qui n'avait pas été admise jusqu'ici l'est aujourd'hui : c'est que le gouvernement, la présidente du département et le Grand Conseil, unanimes sur ce point, tiennent à l'école d'ingénieurs et veulent non seulement son maintien mais son rayonnement ! Je peux imaginer, Monsieur Nissim, qu'il n'était peut-être pas judicieux de distribuer ces lettres, mais elles ont été très utiles à la compréhension générale et elles ont permis d'ancrer cette certitude politique, non seulement dans l'esprit des députés sur tous les bancs du Grand Conseil, mais aussi dans l'esprit des étudiants et des enseignants de l'école. Plus personne - je l'espère en tout cas - ne dira le contraire pour éveiller des craintes. Je le répète, nous tenons tous à l'école d'ingénieurs et nous sommes convaincus qu'elle a un avenir, comme je l'ai écrit aux étudiants. La preuve, c'est que 25% d'élèves en plus se sont inscrits à la rentrée 1999 à l'école d'enseignement technique !

Effectivement, l'offre de formation est un débat qui doit se faire au niveau suisse et qui touche toutes les écoles. Mais j'ai aussi dit aux étudiants et aux enseignants que ce processus devait tenir compte de l'environnement social et économique local, des intérêts de la formation à Genève, et qu'il ne pouvait pas simplement résulter d'une logique arithmétique.

Monsieur Brunier, je regrette que vous ayez cru bon de définir tout d'un coup mes soi-disant intentions et mon non-courage politique... Je crois pouvoir dire ici qu'on me reproche beaucoup de choses, mais on ne m'a encore jamais reproché mon manque de courage politique !

Je vous le dis très clairement : il n'est pas question de diminuer en quoi que ce soit le budget de l'école d'ingénieurs - preuve en est la lettre signée par le Conseil d'Etat, qui faisait suite à la lettre signée par la présidente du département. Elle indique que l'enveloppe du budget 2000 destiné à l'école au niveau HES augmente, alors que le nombre d'étudiants ne progresse pas encore pour la raison que vous connaissez, à savoir une troisième année introduite à l'école d'enseignement technique. Cela signifie donc bel et bien que le montant par étudiant augmentera, puisqu'il passera fort probablement de 43 700 F à 48 000 F. Cela veut dire aussi que nous donnons des moyens, que ces moyens sont justifiés.

Alors, je ne peux pas entendre dire ici qu'il y a une volonté larvée de qui que ce soit d'étrangler cette école ! C'est si vrai d'ailleurs que l'un des motifs qui a permis d'arriver à un consensus a aussi été dicté par la préoccupation de montrer les aspects positifs, qualitatifs et le rayonnement de cette école à la commission fédérale, qui viendra visiter cette école le 2 mars. Ce travail prendra suffisamment de temps pour qu'on n'en perde pas trop par ailleurs.

La structure que vous évoquez, qui est due à l'histoire de l'école et qui fait que nous avons une école d'enseignement technique et une école au niveau HES, est une structure délicate à gérer. D'autres écoles ont la même, d'ailleurs : nous connaissons la même problématique à l'école des arts appliqués et au Centre de Lullier... Ce n'est donc pas un problème particulier à l'école d'ingénieurs. Nous avons tenu à garder les établissements entiers dans chacune de nos écoles de niveau à la fois secondaire et HES, ce qui n'est pas sans conséquences. Cela exige des modes de fonctionnement nouveaux, qui doivent être rodés et qui doivent clarifier les rôles de chacun. C'est ce que nous nous sommes attachés à faire et nous avons informé nos interlocuteurs, à leur satisfaction, je crois.

Vous avez montré beaucoup de maturité dans vos débats. J'espère qu'elle va perdurer dans la façon de suivre les activités de l'école d'ingénieurs.

Mesdames et Messieurs les députés, cette école a d'immenses qualités. Elle a aussi toujours été plus turbulente que les autres. Il y a déjà trente ans qu'on en parle ! Mes deux prédécesseurs ont dû aussi régler des problèmes à l'école d'ingénieurs. Parce que c'est une école plus complexe, une école d'ingénieurs ne se dirige pas comme une simple autre école professionnelle !

C'est la raison pour laquelle aujourd'hui je considère que nous sommes à un tournant et que de tels mouvements permettent de mettre les choses à plat, de prendre conscience des choses, d'avoir une meilleure estime de ses interlocuteurs et d'exercer sa capacité à écouter, comme certains députés l'ont dit. J'y vois donc plutôt le signe d'un renouveau et d'un départ positif et non pas, comme certains l'ont dit, un signe d'événements encore plus graves.

Les étudiants eux-mêmes ont fait preuve d'une certaine maturité : il en faut pour démarrer un mouvement et accepter de l'arrêter. Cela signifie qu'à un moment donné il faut écouter, négocier et prendre en considération les desiderata des uns et des autres. J'y vois donc également le signe d'un futur meilleur. Je veillerai, en votre nom et avec votre appui, à ce que l'évolution que nous espérons positive soit poursuivie. Je pense que cette école a autant de chances que toutes les autres, en Suisse romande et dans l'ensemble de la Suisse. Il y a lieu non seulement de l'affirmer mais de le démontrer !

Et je peux dire au nom du Conseil d'Etat, qui s'est engagé à assurer les ressources nécessaires pour cette école comme pour toutes les autres, qu'il n'y a aucune volonté de la démanteler. Au contraire, il y a une volonté de la soutenir, de l'encourager et de suivre son évolution. Vous avez montré - je l'ai déjà dit - votre désir de trouver un consensus. Je pense que nous pouvons le trouver ensemble, et, si un consensus peut être trouvé à l'intérieur de l'école, elle aura toutes ses chances pour l'avenir, y compris pour la reconnaissance définitive de ses diplômes. Il n'y a vraiment aucune raison de penser qu'elle est menacée en quoi que ce soit ! (Applaudissements.) 

P 1260-A

Le président. Nous procédons au vote sur ces deux objets. Je vais opposer les deux propositions faites à propos de la pétition : qui est favorable au dépôt de la pétition sur le bureau du Grand Conseil, selon les conclusions du rapport, et qui est favorable au renvoi au Conseil d'Etat, qui été proposé ce soir ?

Le résultat est douteux.

Il est procédé au vote par assis et levé.

Le sautier compte les suffrages.

La proposition de déposer la pétition sur le bureau du Grand Conseil à titre de renseignement obtient 32 oui.

La proposition de renvoyer la pétition au Conseil d'Etat obtient 44 oui.

Cette pétition est renvoyée au Conseil d'Etat.

M 1324

Mise aux voix, cette motion est adoptée.

Elle est ainsi conçue :

Motion

(1324)sur les difficultés actuelles de l'Ecole d'ingénieurs de Genève

Le GRAND CONSEIL de la République et canton de Genèveconsidérant:

la pétition (1260) déposée au Grand Conseil par l'AGEEIT le 24 juin 1999 

l'adoption, le 19 mars 1998, de la loi sur l'enseignement professionnel supérieur (C 1 26), faisant suite au scrutin populaire du 8 juin 1997, et l'adhésion conjointe du concordat intercantonal créant la Haute Ecole Spécialisée de Suisse Occidentale (HES SO) ;

le contrôle parlementaire qu'implique la loi ;

le retard apporté à la mise en place de la structure de concertation interne à l'Ecole prévue par la loi ;

les changements importants et les difficultés engendrés au sein de l'Ecole par le passage de l'Ecole technique supérieure (ETS) à une Haute Ecole Spécialisée (HES) ;

les multiples tensions créées par la mise en place d'une structure de pilotage de l'Ecole et de délégation à la HES SO qui ont dégradé le climat de travail et de collaboration nécessaire ;

l'absence préoccupante de représentants de l'Ecole lors du choix des responsables des centres de compétences de la HES SO ;

la complexité des affectations budgétaires et les incompréhensions qui en résultent, notamment sur le plan de la gestion des postes, tant à l'Ecole d'enseignement technique (EET) qu'à la HES ;

que cet état de fait nuit au développement de l'Ecole, à l'enseignement et à la recherche, comme à sa bonne intégration dans la HES SO ;

que, dans cette situation, l'Ecole ne peut pas faire valoir pleinement ses atouts sur le plan intercantonal et fédéral ;

invite le Conseil d'Etat

à faire rapport dans les meilleurs délais à l'intention du Grand Conseil sur les faits allégués dans la pétition 1260 ;

à mettre en oeuvre immédiatement la structure de concertation interne à l'Ecole prévue par la loi ;

à donner au Grand Conseil des explications sur la structure de pilotage de l'Ecole, sur son interaction avec la direction et avec les enseignants, ainsi que sur sa délégation à la HES SO,  en entreprenant les réformes qui pourraient s'avérer nécessaires ;

à veiller à assurer à l'avenir des dotations budgétaires adaptées aux différentes missions de l'Ecole ;

à expliquer clairement les modalités d'application du processus d'admission à l'Ecole.

Le président. Mesdames et Messieurs les députés, nous interrompons nos travaux. Je vous souhaite une heureuse semaine de détente et je vous invite à une profonde réflexion pendant cette semaine sur l'efficacité de nos travaux... Je vous souhaite une bonne nuit ! 

PL 8191
8. Projet de loi de Mmes et MM. Jean Spielmann, Pierre Meyll, Pierre Vanek, David Hiler, Pierre-Louis Portier, Thomas Büchi, Anne Briol, Nelly Guichard, René Koechlin, Charles Seydoux, Claude Blanc, Hubert Dethurens, Jeannine de Haller, Hervé Dessimoz, Walter Spinucci, Henri Duvillard, Pierre Ducrest, Geneviève Mottet-Durand, Christian Grobet, Catherine Passaplan, Françoise Schenk-Gottret, Christian Brunier, Laurence Fehlmann Rielle et Jean-Marc Odier ouvrant un crédit d'étude en vue de la réalisation d'une liaison ferroviaire reliant la gare Cornavin à Annemasse par la Praille et la gare des Eaux-Vives. ( )PL8191

Le GRAND CONSEIL de la République et canton de Genèvedécrète ce qui suit :

Art. 1 Crédit d'étude

Un crédit de 6 000 000 F (y compris TVA et renchérissement) est ouvert au Conseil d'Etat pour l'étude de la construction d'une liaison ferroviaire reliant la Gare Cornavin à Annemasse par la Praille et la Gare des Eaux-Vives, selon le tracé Obis abaissé, tel qu'adopté par arrêté du Conseil d'Etat du 4 juillet 1990.

Art. 2 Budget d'investissement

Ce crédit est réparti en tranches annuelles inscrites au budget d'investissement dès 2001, sous la rubrique...

Art. 3 Financement et couverture des charges financières

Le financement de ce crédit est assuré par le recours à l'emprunt, dans le cadre du volume d'investissements « nets-nets » fixé par le Conseil d'Etat, dont les charges financières en intérêts et en amortissement sont à couvrir par l'impôt.

Art. 4 Amortissement

L'amortissement de l'investissement est calculé chaque année sur la valeur d'acquisition (ou intitulé) selon la méthode linéaire. Il est porté au compte de fonctionnement.

Art. 5

La Commission des transports et la Commission des travaux du Grand Conseil sont régulièrement informées de l'avancement des études.

Art. 6 Loi sur la gestion administrative et financière de l'Etat de Genève

La présente loi est soumise aux dispositions de la loi sur la gestion administrative et financière de l'Etat de Genève, du 7 octobre 1993.

EXPOSÉ DES MOTIFS

L'objectif du présent projet de loi est de marquer la volonté du canton de Genève de terminer la liaison ferroviaire entre Genève et Annemasse prévue depuis 1881, et plus particulièrement la réalisation, dans les meilleurs délais, du maillon manquant entre La Praille et la Gare des Eaux-Vives. Depuis 1912, cette liaison ferroviaire est prévue par une convention signée entre la Confédération, les CFF et le canton de Genève. Le Conseil fédéral a été autorisé par l'Assemblée fédérale à ratifier cette convention, voire la loi fédérale du 10 juillet 1912 portant développement du réseau des CFF sur le territoire genevois (742.32), qui s'inscrit dans le cadre de l'accord franco-suisse sur la liaison Genève - Annemasse signé en 1881 (0.742.140.334.93) et les arrêtés fédéraux des 27 avril 1882 et 12 juin 1882. La convention et l'accord sont toujours en vigueur, ce que le Conseil fédéral a admis en indiquant qu'il appartenait au canton de Genève de prendre la décision de sa construction. Les actes législatifs respectifs figurent toujours dans les recueils systématiques des lois suisses et françaises.

Le dépôt du présent projet de loi fait suite aux décisions prises par le Grand Conseil concernant les liaisons ferroviaires franco-suisses, plus précisément la volonté manifestée par la quasi-unanimité du Grand Conseil (une seule opposition lors du vote) de réaliser enfin la jonction ferroviaire des réseaux suisse et français et de désenclaver la région genevoise, y compris le Chablais, sur le plan ferroviaire, grâce à la revitalisation de la ligne ferroviaire internationale du Sud Léman (ligne du Tonkin) entre Genève-Cornavin et Saint-Maurice (Valais), via La Praille, Eaux-Vives, Annemasse, Evian et Saint-Gingolph, et grâce au développement des liaisons ferroviaires internationales sur les axes Genève - Annecy - Chambéry - Grenoble et Genève - Saint-Gervais - Chamonix. Le maillon manquant doit être impérativement réalisé pour au moins trois motifs qui chacun à lui seul justifierait sa pertinence.

L'interconnexion des réseaux CFF de Suisse romande et SNCF de Haute-Savoie représente la condition première pour la réalisation des liaisons ferroviaires internationales indispensables à Genève et sa région. Elle permet aussi un transfert significatif du trafic de la route au rail avec à la clef une meilleure maîtrise du trafic et des besoins croissants de mobilité. En effet, ce raccordement est du plus grand intérêt pour les habitants des deux rives du lac. La possibilité de prolonger des TGV et des trains intercités suisses au-delà de Cornavin à destination du Chablais, de la Vallée d'Arve et d'Annecy permettrait de dynamiser les transports ferroviaires chez nos voisins. Ainsi l'accès au train est facilité pour la population franco-genevoise de la rive gauche. La possibilité de choisir entre différents moyens de transport double la clientèle potentielle des chemins de fer, ce qui laisse présager une meilleure rentabilité des lignes TGV et les autres trains au départ de Genève-Cornavin, toutes destinations confondues. Par ailleurs, cette liaison étend considérablement la zone de chalandise de l'Aéroport, ce qui laisse supposer une importante augmentation d'une clientèle potentielle qui, empruntant le rail, n'a besoin d'aucune nouvelle infrastructure lourde.

Avec l'application des accords bilatéraux, les relations régionales franco-genevoises sont appelées à se développer de manière spectaculaire. La croissance démographique exponentielle actuellement en cours sur un axe Evian - Annemasse - Annecy est un autre indicateur d'une prochaine augmentation du trafic transfrontalier. Le rail représente la réponse la plus adaptée aux futurs besoins de ce trafic international et régional. En plus des indispensables liaisons ferroviaires internationales, la réalisation de la ligne Annemasse - Chêne-Bourg - Eaux-Vives - Hôpital - La Praille - Cornavin satisfait aux critères d'un véritable Réseau Express Régional (RER), car ce dernier met en relation toutes les régions limitrophes du Sud Léman avec le centre de Genève et sa périphérie (zones industrielles, rectangle d'or, organisations internationales). C'est aussi un projet local et urbain, car il relie d'une manière rapide et confortable, sans encombrer le centre-ville, la rive gauche à la rive droite par les quartiers les plus denses de l'agglomération.

Le dramatique accident du tunnel du Mont-Blanc a démontré avec force la nécessité d'offrir, pour des raisons de complémentarité, de sécurité et de respect de l'environnement, une alternative aux transports des marchandises par la route. Le rail répond donc le mieux à ces critères. La réouverture du tunnel du Mont-Blanc devrait aller de pair avec un projet concret de solution crédible pour le transport des marchandises par le rail. Dans cette optique, des trains marchandises entre le nord et le sud de l'Europe pourraient transiter par la ligne sud-lémanique, Bellegarde - Annemasse - Evian - Saint-Maurice (VS) et le tunnel du Simplon. Cependant, le tronçon Bellegarde - Annemasse de cette relation étant proche de la saturation, des capacités fret devraient être impérativement dégagées par rapport au trafic voyageurs existant. Aujourd'hui, seule l'absence d'un tunnel de 4 kilomètres empêche le transfert de trains voyageurs sur le seul trajet alternatif possible, celui qui passe par La Plaine - La Praille et les Eaux-Vives. La réalisation du maillon manquant à la hauteur de Genève et l'interconnexion des réseaux s'avèrent donc indispensables, si on veut diminuer le trafic des poids lourds dans la zone frontalière, dans la Vallée de l'Arve et à travers le Mont-Blanc.

La réalisation de la liaison ferroviaire Cornavin - La Praille - Eaux-Vives est prévue et planifiée depuis des décennies. La répartition du financement est précisée dans une convention qui lie la Confédération, les CFF et le canton de Genève. Cette convention, toujours en vigueur, lie les trois parties de manière contractuelle. Toutes les modalités de l'étude jusqu'à la réalisation en passant par les acquisitions de terrains y sont fixées : depuis la fin du chantier de la gare de La Praille, la décision de réaliser le maillon manquant de la liaison Cornavin - Annemasse dépend d'une décision politique du législatif cantonal genevois. Le temps n'est donc plus aux nouvelles études comparatives, mais à celui de la réalisation concrète.

Mesdames et Messieurs les députés, la décision de réaliser le maillon manquant appartient au Parlement genevois ; son tracé a été clairement défini par un plan approuvé par le Conseil d'Etat, et les terrains sont réservés à cet effet. Nous proposons que le crédit d'étude de 6 millions faisant l'objet de ce projet de loi serve à une actualisation du projet, ce qui ne nécessite pas l'engagement de grands travaux de recherche. Par conséquent, nous demandons impérativement qu'une fois les études achevées, le Conseil d'Etat obtienne d'une part l'engagement de la Confédération et des CFF pour la réalisation de cet ouvrage avec le financement de leur part tel que prévu dans la convention, et d'autre part présente simultanément la part du crédit de construction à la charge du canton. Il s'agit d'une exigence parfaitement réalisable et même nécessaire pour ne pas perdre l'opportunité que Genève obtienne le financement accordé par la convention de 1912 et, le cas échéant, sa part de financement sur les crédits votés par le peuple suisse en faveur de Rail 2000 et de la connexion du réseau ferroviaire suisse au réseau international. Si Genève continue de tergiverser, il n'y pas de doute que nous manquerons cette opportunité qui fera une nouvelle fois le bonheur d'autres régions de notre pays. Il faut à ce sujet penser aux énormes investissements qui ont bénéficié à l'agglomération zurichoise et à ses nouveaux projets de gare et lignes souterraines estimés à plus de 2 milliards.

Il conviendra d'entreprendre parallèlement une étude d'impact sur l'environnement ainsi que sur le réseau ferroviaire et autres réseaux de transport, de même qu'une étude d'exploitation à mener en collaboration avec les CFF et la SNCF. Ces études feront l'objet d'une demande de crédit spécifique estimé à 1,5 millions de francs sous la forme d'un projet de loi séparé.

Dans un premier temps, il s'agit de conduire une étude préliminaire, estimée à 80 000 francs, dont le résultat permettra d'orienter la poursuite des études. Le résultat de l'étude préliminaire sera présenté simultanément à la Commission des travaux et à la Commission des transports afin de déterminer la suite des études. De même des séances d'information semestrielles sur le suivi des études seront tenues, afin que les commissions des travaux et des transports soient à même de suivre l'avancement des travaux d'études. Elles seront conduites jusqu'au projet définitif de construction, soit au stade de la délivrance de l'autorisation de construire.

Mesdames et Messieurs les députés, vous aurez compris à la lecture de cet exposé des motifs que les enjeux sont clairs : nous ne pouvons pas prendre la responsabilité de manquer une nouvelle fois l'occasion de relier les réseaux ferrés franco-suisses. Il en va de l'avenir de nos liaisons internationales et de notre région. Comme le précise de manière on ne peut plus claire, le conseiller fédéral responsable du Département de l'énergie, des transports et des communications, M. Moritz Leuenberger dans un récent courrier, dont vous trouverez une copie en annexe de cet exposé des motifs, la décision appartient au canton de Genève.

L'avenir de notre région sera le fruit des décisions que nous sommes appelés à prendre. Sachons être à la hauteur de ces enjeux décisifs. Mesdames et Messieurs les députés, nous vous invitons à accepter le présent projet de loi pour montrer la détermination et la capacité du Parlement cantonal à relever les défis de notre époque.

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Ce projet est renvoyé à la commission des travaux sans débat de préconsultation.  

La séance est levée à 23 h 45.