République et canton de Genève

Grand Conseil

PL 7991-A
7. Rapport de la commission de l'environnement et de l'agriculture chargée d'étudier le projet de loi du Conseil d'Etat sur l'usine des Cheneviers (L 1 25). ( -) PL7991
Mémorial 1999 : Projet, 829. Renvoi en commission, 865.
Rapport de M. Alain Etienne (S), commission de l'environnement et de l'agriculture

La Commission de l'environnement et de l'agriculture, sous la présidence de Mme Anne Briol, s'est réunie à quatre reprises, les 2 septembre, 16 septembre, 30 septembre et 7 octobre 1999, afin d'étudier le projet de loi 7791 sur l'usine des Cheneviers, qui lui a été envoyé par le Grand Conseil lors de sa séance du 28 février 1999.

M. Robert Cramer, conseiller d'Etat chargé du Département de l'intérieur, de l'agriculture, de l'environnement et de l'énergie, a participé aux travaux de la commission, assisté de Mme Karine Salibian, secrétaire adjointe, de M. Claude Convers, secrétaire général et en partie de M. Pierre Ammann, directeur de l'usine des Cheneviers.

Présentation par le département du projet de loi

Actuellement, l'usine comprend quatre lignes de traitement des déchets pour une capacité de 400'000 tonnes par an environ. Trois fours sont affectés aux ordures ménagères et déchets industriels et un aux déchets spéciaux. Les principaux usagers du site des Cheneviers, pour les résidus ordinaires, sont les communes (53 %), les industries et chantiers genevois (27 %), les clients et communes d'origine vaudoise (12 %), les clients et communes d'origine française (6 %) et divers (2 %). Pour les déchets spéciaux, les principaux usagers sont les entreprises du secteur industriel et des services du canton de Genève (80 %) et de seize autres cantons (20 %).

Le canton dispose aujourd'hui d'un concept de gestion des déchets, d'un plan de gestion des déchets et d'une loi sur la gestion des déchets. La politique environnementale en matière de déchets consiste en premier lieu à réduire la masse des déchets à la source, afin de limiter le plus possible le recours à l'incinération. Ainsi, les matières à faible pouvoir calorifique ou impropres à la destruction par combustion sont retirées des résidus ménagers ou industriels ordinaires tels que les résidus organiques, la ferraille, le verre. De plus, l'usine sera dotée d'ici fin 1999 des instruments d'épuration des fumées (dénox).

Le département explique que cette diminution voulue au niveau du canton peut être compensée. En effet, le 1er janvier 2000, la loi fédérale prévoit la fermeture des décharges à tous les déchets combustibles (déchets urbains et déchets de chantier). Le potentiel pour la Suisse est estimé à environ un million de tonnes par an. L'accroissement de la quantité des déchets sera également recherché par l'élargissement de la zone d'approvisionnement de l'usine en déchets, soit le bassin lémanique. Cela passe par une collaboration régionale (coordination intercantonale romande, Syndicat mixte intercommunal de gestion des déchets du Faucigny genevois - Sidefage par exemple).

Le département compte également sur l'énergie (calories et électricité) que produit l'usine. L'exploitation des ordures ménagères a produit une recette de 5,6 Mio F en 1996, résultant de la vente d'énergie électrique aux Services industriels de Genève, soit environ 85 Mio de KWh. L'usine est actuellement un service qui s'autofinance. Ce sont les taxes prélevées pour traiter les déchets qui couvrent les frais administratifs.

Comparée à d'autres services de l'Etat, l'usine entretient des rapports avec d'autres autorités dont les communes et la Ville de Genève, les usagers, notamment les industries et les centres de distribution (Migros, Coop...). L'usine doit pouvoir collaborer avec ces partenaires qui doivent pouvoir s'exprimer au sein de l'organisme.

Aujourd'hui, la même autorité gère l'usine et la contrôle (Ecotox). Le département estime que ce projet de loi permet de séparer le contrôleur du contrôlé.

Le projet de loi présente 8 chapitres. Le chapitre I est consacré aux dispositions générales, le chapitre II à la surveillance, le chapitre III à la gestion, le chapitre IV au statut du personnel, le chapitre V à l'exploitation, le chapitre VI à la comptabilité et aux finances, le chapitre VII à la dissolution, le chapitre VIII aux dispositions transitoires et finales.

Dispositions générales : le principe d'un établissement de droit public y est défini.

Surveillance : l'Etat a la surveillance de l'exploitation et de l'impact de ses activités. Le Conseil d'Etat a la surveillance de la gestion et des finances, avec rapport au Grand Conseil.

Organisation : un Conseil d'administration est formé, composé de représentants de l'Etat, des communes, des usagers, des milieux associatifs, du personnel.

Gestion : le projet prévoit une comptabilité conforme à la gestion de l'Etat avec les mêmes normes administratives.

Statut du personnel : le personnel est maintenu au statut de la fonction publique. Les employés resteront affiliés à la CIA.

Auditions

Association des communes genevoises (ACG), représentée par M. Daniel Mouchet, maire de Carouge et M. Michel Hug, secrétaire général

Les représentants de l'ACG tiennent tout d'abord à remercier le chef du DIAEE d'avoir associé étroitement les communes à l'élaboration du présent projet de loi et de celui sur les déchets qui vient d'être voté. Ils informent la commission que le projet de loi 7991 a recueilli un vote positif lors de l'assemblée générale de l'association.

Concernant la composition du Conseil d'administration, l'ACG demande que 2 magistrats soient désignés par le Conseil administratif de la Ville de Genève au lieu de 1 (art. 9, al. 1, let b) et que 3 magistrats soient désignés par l'ACG au lieu de 2 (art. 9, al. 1, let c). Cette requête est basée sur le fait que les flux financiers générés par cette activité de protection de l'environnement sont composés à 50 % par des fonds communaux.

Pour l'ACG, le projet d'autonomisation est important, car il représente l'aboutissement de toute la politique de la gestion des déchets du canton. Ce projet répond ainsi aux préoccupations des communes en ce qui concerne la maîtrise des coûts et la protection de l'environnement et assure un véritable partenariat entre les différentes responsabilités publiques. Il est aussi fait allusion à l'alimentation du fond cantonal de gestion des déchets qui permettra de dynamiser la politique environnementale du canton.

Personnel de l'usine des Cheneviers, représenté par M. Philippe Bochud, conducteur, M. Jean-Pierre Götz, contremaître, M. Jean-Marc Dornier, mécanicien, M. Patrick Parmingle, chef exploitation et représentant du personnel de l'usine des Cheneviers

Le représentant du personnel administratif fait état de certaines préoccupations, mais dit ne pas être opposé à l'autonomisation. Les préoccupations touchent à la représentation du personnel, aux mécanismes salariaux, aux compétences de l'usine en matière de gestion du personnel, aux conditions du transfert du personnel, à la liberté de gestion de la direction, à la responsabilité par rapport aux pertes éventuelles.

Il est précisé que sur un total de 150 employés, la proportion du personnel administratif acquis à l'autonomisation représente une quarantaine de personnes

Les représentants du personnel manuel déclarent être opposés au projet d'autonomisation de l'usine des Cheneviers. Afin de moderniser l'usine, l'accent a été mis sur la recherche de nouveaux marchés permettant de démontrer que l'usine peut être rentable. De nouveaux déchets à très haut pouvoir calorifique (PCI) ont été trouvés, tels que déchets animaliers, pneus et autres, ce qui a eu pour conséquence la détérioration des installations et la dégradation des conditions de travail. L'usine ne peut pas fonctionner correctement lorsque les déchets sont sélectionnés uniquement en fonction du seul critère de productivité alors que la vocation première de l'usine est le traitement des déchets ménagers. Il est fait remarquer aussi que l'arrêt des fours ne se fait plus en prévision d'une révision, mais lorsqu'il y a une obligation de réparer. La rentabilisation va aussi avoir des conséquences sur le budget et les finances de l'Etat. Si les installations sont mises à mal trop rapidement, c'est la collectivité qui devra financer les dégâts.

Le responsable d'exploitation représentant le personnel administratif confirme que, si l'on veut traiter des déchets industriels à haut pouvoir calorifique, il est nécessaire d'adapter les installations. Le vieillissement et l'encrassement des installations sont des phénomènes rencontrés par l'ensemble des incinérateurs suisses. Les modifications ont déjà été faites dans d'autres usines. De plus, ce problème n'est plus comparable à celui rencontré auparavant en raison de la dureté et de la résistance accrues des nouveaux matériaux qu'il faut incinérer en l'absence d'une filière de recyclage.

Syndicat SSP VPOD, représenté par M. Paolo Gilardi et M. Philippe Bochud

Les personnes auditionnées considèrent que l'incinération des déchets est une tâche d'utilité publique notamment parce qu'elle touche à la protection de l'environnement. Il est rappelé que l'usine est située à proximité d'une zone d'intérêt écologique reconnu et que des mesures doivent être prises pour préserver cette zone. Il est rappelé également que la diminution des déchets à incinérer reste l'objectif principal d'une saine politique de gestion des déchets et qu'à ce titre il est difficile d'accepter une augmentation des déchets industriels à haut pouvoir calorifique, laquelle entraîne immanquablement une péjoration des conditions de travail, un encrassement plus important des installations et une augmentation des résidus nocifs pour l'environnement.

Visite de l'usine des Cheneviers

La séance du 7 octobre est consacrée à la visite de l'usine des Cheneviers. Les commissaires se rendent tout d'abord au quai de chargement des ordures de la Jonction. Un employé, M. Alain Vulliamy, donne quelques explications. Les ordures levées par le service de voirie de la Ville de Genève sont amenées jusqu'à cet endroit, ainsi que celles de quelques communes limitrophes et de certaines entreprises privées. Les commissaires peuvent observer les opérations de déchargement. A leur arrivée et à leur départ, les véhicules sont pesés afin de fixer le montant de la taxe. Les camions alignés perpendiculairement au Rhône, déversent leur chargement dans la barge. Chaque barge transporte environ 150 tonnes d'ordures. En une semaine, seize barges sont chargées et poussées jusqu'à l'usine des Cheneviers. Le trajet dure environ une heure dans chaque sens.

En raison des fortes précipitations, le voyage prévu en barge est annulé et les commissaires se rendent en bus jusqu'à l'usine des Cheneviers où ils sont accueillis par le directeur de l'usine, M. Pierre Ammann.

Les commissaires visitent ensuite l'usine. Les deux premiers fours (Cheneviers 1) datant de 1966 ont été démontés en 1997. 1978 vit la construction de Cheneviers 2, comprenant un deuxième four à grilles et un four rotatif. En 1991 fut construit Cheneviers 3, comprenant deux nouveaux fours à grilles. M. Ammann nous informe qu'en 1998, les Cheneviers ont produit 126'000 MWh. L'usine a vendu plus de 95'000 MWh aux SI pour un montant de plus de 6,5 Mio. F alors qu'elle n'a acheté que pour 190'000 francs d'électricité. Concernant les métiers, 150 personnes travaillent aux Cheneviers, issues d'une quarantaine de métiers (marins, laborants, employés de commerce, mécaniciens, serruriers, informaticiens...). La formation du personnel est un aspect très important. En 2002, plus du tiers des collaborateurs partiront à la retraite. Une partie importante du personnel travaille à l'usine depuis sa création, cela représente une perte du savoir-faire d'autant plus que ces personnes ont dû faire l'effort de suivre l'évolution technologique. L'usine forme également des apprentis.

Les commissaires visitent la salle des commandes centralisées. Tout le fonctionnement de l'usine est géré par ordinateur. Ils passent par le quai de déchargement et visitent ensuite la cabine du grutier. Le grutier a un rôle essentiel, car c'est lui qui garantit l'alimentation constante des fours en répartissant dans les fosses les déchets qui proviennent tant des barges que des camions. Le grutier assure l'équilibrage du mélange des déchets. L'usine fonctionne 24 heures sur 24, 365 jours par an. Pour faire fonctionner les installations, six équipes de huit employés travaillent par tranche de huit heures. La visite se termine par la salle où se trouvent les installations de lavage des fumées.

Travaux de la commission

M. Cramer rappelle que ce projet de loi s'inscrit dans la logique du plan de gestion des déchets et de la loi sur la gestion des déchets et forme un tout. L'objectif visé par ces deux outils est de doubler la quantité des déchets à recycler. Le projet d'autonomisation n'est pas un projet de privatisation mais le projet de faire de l'usine une institution de droit public comme les Services industriels. M. Cramer rappelle que dès 2000, selon la loi fédérale, toutes les décharges de déchets combustibles seront fermées. Ce qui signifie que, même si l'on diminue la quantité des déchets à incinérer à Genève, il y a une forte demande extérieure au canton pour apporter des déchets à l'usine des Cheneviers, notamment de la part du canton de Vaud. L'usine des Cheneviers ne sera pas à la recherche de nouveaux marchés sur Genève.

Position des socialistes et de l'Alliance de Gauche

Les socialistes et l'Alliance de Gauche considèrent qu'il ne faut pas entrer en matière sur ce projet de loi car en l'état la rentabilisation dont il est question ici est dangereuse pour la politique environnementale de Genève. En effet, il est paradoxal de chercher à diminuer les déchets à incinérer au niveau du canton, puis de rechercher de nouveaux marchés à l'extérieur du canton pour rentabiliser l'usine. Il est tout aussi paradoxal de rechercher par l'incinération des déchets, la production d'énergie à partir de la matière que l'on cherche à diminuer. Le projet présenté est trop axé sur la rentabilité.

La fermeture des décharges à tous les déchets combustibles d'ici le 1er janvier 2000 n'est pas un critère à retenir, car ces quantités de déchets sont elles aussi amenées à baisser en raison de l'intensification du tri à la source, de la récupération et du recyclage engagés sur l'ensemble du pays. Le canton de Genève est encore trop loin des objectifs fixés pour envisager actuellement une autonomisation. Certes, l'incinération reste le mode de traitement ultime, indispensable lorsque toutes les possibilités offertes par les autres filières ont été épuisées, mais actuellement il n'y a dans le projet de loi aucune garantie que cela se fasse dans ces conditions.

Chercher à élargir la zone d'approvisionnement de l'usine en déchets aura aussi pour conséquence la multiplication des transports. Il est à noter que la création d'une ligne CFF pour les Cheneviers n'est actuellement pas envisageable pour des raisons financières. Le transport des déchets se fait pour l'instant par route et par voie fluviale. Le relais envisagé entre la gare de la Praille et les barges des Cheneviers ne paraît pas une solution convaincante.

La rentabilisation de l'usine semble aussi avoir des conséquences importantes sur la durée des installations. La collectivité ne doit pas faire les frais de cette rentabilisation, notamment en ce qui concerne le traitement des déchets apportés par les entreprises privées. Certes, on peut comprendre le souci des communes qui doivent s'occuper de l'élimination des déchets ménagers et qui ont besoin de cette infrastructure. L'incinération des déchets ménagers est une tâche d'utilité publique. Mais ce n'est pas à la collectivité de financer les dégâts causés par une exploitation intensive, surtout si l'usine a l'obligation de traiter des déchets qui n'ont pas toujours la qualité des déchets à haut pouvoir calorifique recherchés par d'autres.

Les conditions de travail se sont aussi dégradées. Une partie du personnel de l'usine n'adhère pas à ce projet. Il est difficile d'accepter que ce changement se fasse sans le consentement de l'ensemble du personnel. L'usine est aussi à l'image des employés qui se sont investis dans l'entreprise. Il s'agit aujourd'hui de respecter cela. La rentabilité ne doit pas se faire sur le dos des employés.

Il y a, certes, un risque de privatisation si, à plus long terme, il est constaté que l'usine n'est pas rentable. L'autonomisation est un pas que l'on fait en direction de la privatisation.

On peut aussi se demander pourquoi il n'a pas été prévu que des membres du Grand Conseil soient présents dans le Conseil d'administration, alors que pour l'aéroport par exemple, un membre par parti représenté au Grand Conseil, désigné par ce dernier, en fait partie. On peut se demander pourquoi le Conseil d'Etat n'a pas voulu la représentation du monde politique aux Cheneviers alors qu'il a trouvé normale la présence du monde de l'économie privée.

Position des Verts

Les Verts ne sont pas fondamentalement opposés au principe d'une gestion autonome des Cheneviers, en conséquence ils entrent en matière sur ce projet de loi mais demandent à en modifier le texte. Un contrôle strict doit être mis en place vu l'impact environnemental des activités de l'usine. Il est hors de question que la rentabilité soit l'objectif premier de l'usine. Les Verts trouvent que le projet de loi n'est pas assez contraignant. Il ne donne pas assez de garanties en ce qui concerne les exigences environnementales. Le contrôle démocratique n'est pas suffisant. Le statut des établissements autonomes devrait être harmonisé l'un par rapport à l'autre. Des amendements seront présentés qui porteront sur la valorisation des déchets, l'établissement d'un bilan écologique soumis au Grand Conseil, la mise en place d'un transport par rail, un accord de prestation voté par le Grand Conseil, la représentation politique au sein du Conseil d'administration, les gros investissements soumis au Grand Conseil.

Vote d'entrée en matière

Mise au vote, l'entrée en matière sur le projet de loi 7991 sur l'usine des Cheneviers est refusée par 6 voix contre (3 S, 3 AdG) et 6 voix pour (3 L, 1 DC, 2 Ve). Ce projet de loi présente de graves dangers pour la politique environnementale de Genève. Pour les raisons évoquées, je vous demande, Mesdames et Messieurs les députés, de ne pas entrer en matière sur ce projet de loi.

Projet de loi(7991)

sur l'usine des Cheneviers (L 1 25)

Le GRAND CONSEIL de la République et canton de Genèvedécrète ce qui suit :

Article 1 Principe

1 L'usine des Cheneviers constitue un établissement de droit public appelé "; usine des Cheneviers " (ci-après "; l'usine ").

2 L'établissement est géré et exploité dans les limites de l'article 160B de la constitution de la République et canton de Genève, du 24 mai l847, de la loi d'application de la loi fédérale sur la protection de l'environnement du 2 octobre 1997 et de la législation applicable en matière de gestion des déchets.

3 L'établissement est autonome et jouit de la personnalité juridique.

Article 2 But

1 L'établissement a pour but le traitement des déchets définis à l'alinéa 2 ainsi que la valorisation dudit traitement, des installations et du savoir-faire de l'établissement. Ces activités sont exercées dans le respect d'une gestion intégrée de l'environnement et conformément au plan cantonal de gestion des déchets.

2 Les déchets consistent en ordures ménagères, en déchets industriels assimilables aux ordures ménagères et en déchets spéciaux.

3 Les déchets sont acheminés à l'usine par voie fluviale, à bord de barges depuis le quai de la Jonction, par la route ou par le chemin de fer.

4 Les transports sont organisés de la manière la plus respectueuse de l'environnement.

Article 3 Siège

Le siège de l'établissement est à l'usine, sur le territoire de la commune d'Aire-la-Ville.

Article 4 Inventaire des bâtiments, installations et équipements de l'établissement

Les terrains, bâtiments, installations et équipements de l'établissement font l'objet d'un inventaire détaillé tenu à jour par la direction.

Article 5 Propriété et droit de superficie

1 Les terrains compris dans le périmètre de l'usine, demeurent, avec leurs accessoires au sens de l'article 644 du code civil suisse, la propriété de l'Etat de Genève et donnent lieu à un droit de superficie dont les conditions sont fixées par le Conseil d'Etat.

2 Les bâtiments et installations seront transférés à l'établissement, selon les modalités à fixer dans une loi spécifique.

Article 6 Dotation

L'établissement est doté, par l'Etat de Genève, d'un capital de 50 millions de francs, dont la rémunération fixée par le Conseil d'Etat ne peut être inférieure au coût moyen de la dette de l'Etat.

Article 7 Conseil d'Etat et Grand Conseil

1 L'établissement est placé sous la haute surveillance et le contrôle du Conseil d'Etat.

2 Le Conseil d'Etat délègue la surveillance et le contrôle de l'établissement au département chargé de l'environnement (ci-après département délégué).

3 Les budgets, les comptes et le tarif des taxes d'élimination des déchets sont soumis à l'approbation du Conseil d'Etat.

4 Le Conseil d'Etat présente chaque année au Grand Conseil un rapport sur la gestion et les comptes de l'établissement.

Article 8 Organes

Les organes de l'établissement sont :

Article 9 Conseil d'administration

1 L'établissement est géré par un conseil d'administration, composé de 15 personnes, soit :

2 Les administrateurs désignés sous lettres a à f doivent être choisis en fonction de leurs compétences ou de leur expérience dans le domaine de la gestion.

3 Les modalités de l'élection des administrateurs désignés par le personnel sont indiquées dans un règlement.

Article 10 Durée du mandat

1 Sous réserve de l'alinéa 2, les administrateurs sont nommés ou élus pour une période de 4 ans, débutant le 1er mars de l'année qui suit le renouvellement du Grand Conseil et du Conseil d'Etat. Ils sont rééligibles deux fois.

2 Le mandat d'administrateur d'un magistrat représentant le Conseil d'Etat, la Ville de Genève, les communes genevoises ou les Conseils d'Etat des cantons utilisateurs prend fin de plein droit à l'expiration de sa charge publique.

3 Le membre du conseil d'administration qui n'assiste pas à la moitié des séances de ce conseil au cours d'un exercice est réputé démissionnaire de plein droit, sauf motif valable accepté par le Conseil d'Etat et pour les représentants des communes genevoises, par le comité de l'association.

4 En cas de décès, de démission ou de perte d'une condition de nomination ou de révocation, il est pourvu au remplacement de l'administrateur pour la fin de son mandat, sauf si la vacance survient moins de 3 mois avant la fin de celui-ci ou si la condition de représentation n'est plus remplie.

Article 11 Incompatibilité

Les membres du conseil d'administration, quel que soit leur mode de nomination, peuvent être utilisateurs de l'usine, mais ne doivent être, ni directement, ni indirectement, fournisseurs ou chargés de travaux ou de mandats pour celle-ci.

Article 12 Responsabilité

Les membres du conseil d'administration sont personnellement responsables envers l'établissement des dommages qu'ils causent en manquant, consciemment ou par négligence, aux devoirs de leur fonction.

Article 13 Révocation

1 Quel que soit le mode de nomination, le Conseil d'Etat, après consultation du comité de l'association pour les représentants des communes genevoises, peut en tout temps révoquer un membre du conseil d'administration pour justes motifs.

2 Est notamment considéré comme tel le fait que, pendant la durée de ses fonctions, le membre du conseil d'administration s'est rendu coupable d'un acte grave, a manqué à ses devoirs ou est devenu incapable de bien gérer.

Article 14 Président / Vice-président

1 Le président et le vice-président du conseil d'administration sont nommés par le Conseil d'Etat au sein du conseil d'administration. Le vice-président est choisi parmi les représentants des communes genevoises et de la Ville de Genève.

2 Ils sont désignés pour une durée de 4 ans et sont rééligibles au maximum 2 fois.

3 La rémunération du président, du vice-président, des autres membres du conseil d'administration et du conseil de direction est fixée par le conseil d'administration.

4 Le conseil d'administration nomme son secrétaire qu'il choisit en dehors de ses membres.

Article 15 Attributions

1 Le conseil d'administration est le pouvoir supérieur de l'établissement.

2 Sous réserve des compétences du Grand Conseil et du Conseil d'Etat, le conseil d'administration est investi des pouvoirs les plus étendus pour la gestion de l'établissement et a, notamment, les attributions suivantes :

Article 16 Séances

1 Le conseil d'administration se réunit aussi souvent que l'exige l'intérêt de l'établissement.

2 Il est convoqué par le président ou, à défaut, par le vice-président.

3 Il est aussi convoqué si 3 administrateurs au moins ou le Conseil d'Etat le demandent.

4 La présence de la majorité absolue des administrateurs est nécessaire pour la validité des délibérations. A défaut, une nouvelle séance est convoquée. Le conseil d'administration peut alors délibérer valablement, quel que soit le nombre des administrateurs présents.

5 Les décisions sont prises à la majorité des membres présents, le président ne prenant pas part au vote. En cas d'égalité, le président départage.

6 Les délibérations du conseil d'administration sont constatées par des procès-verbaux, avec mention des membres présents.

Article 17 Conseil de direction

1 Le conseil de direction se compose de 5 membres. Le président et le vice-président du conseil d'administration en font partie de droit. Les 3 autres membres sont choisis en son sein par le conseil d'administration. Un membre au moins est choisi parmi les représentants des utilisateurs privés. Ils sont rééligibles.

2 Le conseil de direction est présidé, en principe, par le président du conseil d'administration.

3 Les membres du conseil d'administration choisis parmi le personnel de l'établissement ne peuvent faire partie du conseil de direction.

4 Le secrétariat du conseil de direction est assuré par le secrétariat du conseil d'administration.

Art. 18 Séances

1 Le conseil de direction se réunit aussi souvent qu'il est nécessaire pour la bonne marche de l'établissement et l'exécution des affaires dont il est chargé.

2 Il est convoqué par le président ou, à défaut, par le vice-président.

3 Il est aussi convoqué si 3 membres au moins le demandent.

4 Il ne peut valablement délibérer que si 3 membres au moins sont présents.

5 Les décisions sont prises à la majorité des membres présents. En cas d'égalité, la voix du président est prépondérante.

6 Les délibérations du conseil de direction sont constatées par des procès-verbaux, avec mention des membres présents.

Article 19 Attributions

Le conseil de direction a les attributions suivantes :

Article 20 Organe de contrôle

1 Sous réserve d'approbation par le Conseil d'Etat, le conseil d'administration nomme, après un appel d'offre approprié, un organe de contrôle, choisi parmi les professionnels de la révision. Le mandat de révision est d'une année, renouvelable.

2 Le rapport de révision est transmis au conseil d'administration et porté à la connaissance de l'inspection cantonale des finances.

Article 21 Direction

1 Le directeur de l'établissement assume la direction de celui-ci selon un cahier des charges adopté par le conseil d'administration. Il exécute les décisions du conseil d'administration et du conseil de direction et assiste à leurs séances avec voix consultative. Il reçoit ses instructions du président du conseil d'administration.

2 La nomination ou la révocation du directeur est soumise à l'approbation du Conseil d'Etat.

Article 22 Statut du personnel

Le statut du personnel est réglé par la loi générale relative au personnel de l'administration cantonale et des établissements publics médicaux, du 4 décembre 1997, ainsi que par les autres lois et règlements qui lui sont applicables.

Article 23 Caisse de pension

Le personnel transféré à l'établissement est affilié à la Caisse de prévoyance du personnel enseignant de l'instruction publique et des fonctionnaires de l'administration du canton de Genève (CIA). Le personnel engagé ultérieurement par l'établissement y est également affilié.

Article 24 Accord de prestations

1 L'Etat de Genève, après consultation des divers utilisateurs, fixe pour une durée pluriannuelle, les conditions que doit remplir l'établissement en matière de traitement et de valorisation des déchets mentionnés à l'article 2. Il définit notamment les conditions du droit de superficie mentionné à l'article 5.

2 Il définit les critères d'approvisionnement de l'usine dans le canton et hors canton.

3 Il détermine les objectifs en matière de gestion et de comptabilité environnementales.

4 Il confère à l'établissement une autonomie de gestion accrue et doit veiller à ce que les prestations soient de qualité et au meilleur prix.

5 L'accord de prestations comprend l'autorisation d'exploiter.

Article 25 Locations

L'établissement peut mettre en location, à des tiers, des locaux ou emplacements dont il n'a pas l'usage. Il doit préalablement obtenir l'accord du département délégué.

Article 26 Entretien

L'établissement assure l'entretien et l'adaptation des biens et équipements qui lui sont concédés par le contrat de droit de superficie prévu à l'article 5.

Article 27 Investissements

1 L'établissement décide des investissements dont il assure lui-même le financement, par ses ressources ou par l'emprunt.

2 L'approbation du Conseil d'Etat est requise lorsqu'un investissement excède la capacité financière de l'établissement. Dans ce cas, les communes sont consultées.

Article 28 Emprunts

1 L'établissement peut contracter lui-même et à son propre nom des emprunts destinés au financement des investissements relevant de sa compétence.

2 Le Conseil d'Etat fixe les compétences de l'établissement en matière d'emprunts.

Article 29

1 L'établissement est soumis à la loi sur la gestion administrative et financière de l'Etat de Genève, du 7 octobre 1993.

2 L'établissement tient une comptabilité adaptée à sa nature et à son étendue. Il adopte comme cadre de référence les normes comptables internationales, ci-après IAS (International Accounting Standards).

Article 30 Rapport de gestion et comptes annuels

1 Conformément à l'article 15, alinéa 2, lettre e, le conseil d'administration établit pour chaque exercice le rapport annuel, lequel comprend les comptes annuels et le rapport de gestion, il y joint le rapport de l'organe de contrôle.

2 Les comptes annuels se composent du compte de résultat, du bilan et de son annexe.

3 L'exercice social est annuel. Il se termine le 31 décembre.

Article 31 Ressources

Les ressources de l'établissement sont :

Article 32 Responsabilité quant aux résultats

L'établissement est responsable de ses résultats. Il conserve la totalité des excédents de produits, dont la moitié sera affectée à une réserve de renouvellement et le solde mis en réserve d'exploitation.

Article 33 Compétences du Conseil d'Etat

1 Les budgets, approuvés par le conseil d'administration, sont transmis au Conseil d'Etat, avant le 15 septembre de chaque année.

2 Les comptes et le rapport de gestion le sont avant le 30 avril suivant l'exercice clôturé.

3 Ces documents sont accompagnés de rapports explicatifs. Le Conseil d'Etat se prononce sur ces documents dans les deux mois.

Article 34 Exonération fiscale

L'établissement est exonéré des impôts cantonaux et communaux.

Article 35 Liquidation des biens

1 La dissolution, le mode de liquidation de l'établissement et la désignation des liquidateurs ne peuvent être décidés que par le Grand Conseil.

2 Le produit net de la liquidation revient à l'Etat de Genève.

Article 36 Transfert des droits et obligations

A l'exception de sa qualité de propriétaire immobilier dans le périmètre de l'usine, l'ensemble des droits et obligations de l'Etat de Genève relatif à l'usine, tels que notamment contrats, tarifs et taxes à percevoir ou à payer, sont transférés de plein droit à l'établissement au moment de l'entrée en vigueur de la présente loi.

Article 37 Transfert du personnel et droits acquis

1 Le personnel travaillant à l'usine des Cheneviers au sein du département de l'intérieur, de l'agriculture, de l'environnement et de l'énergie, au moment de l'entrée en vigueur de la présente loi, est transféré de plein droit à l'établissement, avec les droits économiques et les conditions de travail acquis au moment du transfert.

2 Si un membre du personnel s'oppose expressément à son transfert, l'office du personnel de l'Etat s'engage à le replacer aux mêmes conditions financières, au sein de l'administration cantonale ou dans d'autres établissements publics du canton.

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Premier débat

M. Alain Etienne (S), rapporteur. Je vous présente aujourd'hui le rapport de la commission de l'environnement qui a traité le projet de loi sur l'usine des Cheneviers. J'ai essayé de retracer au mieux les travaux de la commission. J'espère ne pas avoir trahi ni les uns, ni les autres. J'invite les députés qui le souhaitent à se référer si nécessaire à l'exposé des motifs du projet de loi présenté par le Conseil d'Etat et je vous renvoie également au rapport annexé du DIAE sur la consultation et qui contient des informations utiles.

Comme vous avez pu le remarquer, l'entrée en matière de ce projet de loi a été refusée. Ceci est dû à des absences certainement involontaires des membres radicaux et d'un membre démocrate-chrétien. Mais cette situation un peu particulière nous permet aujourd'hui de poursuivre le débat sur la pertinence ou non du projet d'autonomisation de l'usine des Cheneviers que nous propose le Conseil d'Etat. L'autonomisation de l'usine des Cheneviers est une question certes délicate, mais intéressante car elle met en évidence la façon dont la collectivité entend régler les problèmes environnementaux qu'elle génère. Les déchets sont à l'image de notre société de consommation.

L'autonomisation qui nous est proposée entre dans le processus de mise en oeuvre de la politique cantonale en matière de gestion des déchets, avec, il faut le rappeler, un concept de gestion des déchets 1998 - 2002, un plan cantonal de gestion des déchets 1998 - 2002, adopté le 14 octobre 1998 par le Conseil d'Etat, et la loi sur la gestion des déchets, PL 7919, que le Grand Conseil a récemment votée. De manière plus générale, elle entre dans la démarche de la restructuration de l'Etat.

Ce projet a également fait l'objet d'une large consultation auprès des milieux économiques, syndicaux, de protection de l'environnement et des consommateurs, ainsi que des communes et du DAEL, dont certaines observations ont été prises en compte dans la version finale.

Les communes approuvent et appuient la volonté de donner à l'usine un statut d'autonomie, notamment parce qu'elles sont parmi les usagers principaux et directement concernés et qu'elles recherchent en premier lieu la maîtrise des coûts.

Pourtant, il est apparu au cours de nos travaux et de la visite sur place que ce projet de loi posait quelques problèmes, notamment en ce qui concerne les risques environnementaux, la multiplication des transports due à la nécessité d'élargir la zone d'apport, et les conditions de travail qui se dégradent suite à la recherche de rentabilité.

Comme il nous a été dit dans l'exposé des motifs, le transport par rail ne semble pas être une alternative envisageable à moyen terme, alors qu'il est admis de privilégier le mode de transport le plus respectueux de l'environnement. De plus, nous avons été sensibilisés par le problème du vieillissement et de l'encrassement des installations.

Nous constatons que ce projet de loi comporte encore trop de contradictions du point de vue social et environnemental et qu'il est surtout traité sous l'angle économique. Alors il faut en convenir, nous ne sommes plus dans une logique de développement durable.

C'est pourquoi je vous invite, Mesdames et Messieurs les députés, à suivre les conclusions de la commission, à savoir ne pas entrer en matière sur ce projet de loi.  

Mme Geneviève Mottet-Durand (L). Comme l'a dit M. Etienne, le rejet de ce projet de loi n'est pas dû à la volonté d'une majorité de ce Grand Conseil, mais est bien le résultat d'absences malheureuses à la commission de l'environnement et de l'agriculture, puisque les partis de l'Entente et les Verts sont d'accord d'entrer en matière, avec toutefois des amendements que les Verts nous ont déjà annoncés en commission.

On ne balaie en effet pas sans argument valable un projet de loi qui a nécessité cinq ans de travail, au cours desquels toutes les parties ont été entendues et écoutées. Le personnel manuel et administratif était représenté à toutes les séances de travail de la commission qui a traité ce projet de loi et il n'a jamais fait état des remarques que l'on entend aujourd'hui de la part des opposants et principalement des syndicats. S'il est vrai que l'usine des Cheneviers est un lieu où s'exerce une forte concentration de la pollution, il faut rappeler que cette situation a fait l'objet de nombreux redressements dans ses aménagements, dont le dernier en date est le projet Denox. Ces coûts, je le rappelle, seront assumés par les usagers à travers une augmentation des taxes de traitement des déchets et ceci dès le 1er janvier 2000. Les différentes lois et les différents règlements sur les déchets, qu'ils soient fédéraux, cantonaux ou communaux, s'orientent tous vers une protection accrue de l'environnement.

L'usine des Cheneviers, construite à une époque où l'on ne parlait pas encore beaucoup du tri des déchets, est une grosse entreprise. Elle accomplit une tâche de destruction, mais aussi de recyclage et de valorisation des déchets, elle fournit de l'énergie thermique et de l'électricité. Nous savons que les mises en décharge seront interdites dès l'an prochain, ce qui permettra d'utiliser au mieux les installations existantes, sans pour autant multiplier les incinérateurs. A l'inverse de ce que les opposants avancent, l'usine n'est pas là pour réaliser des profits. Elle doit être gérée de manière à réaliser un équilibre entre les contraintes de gestion économique et les contraintes environnementales. Il est du rôle de l'Etat d'assurer un contrôle strict et rigoureux dans le respect de l'environnement et dans la perspective du développement durable. Il n'y a donc aucun danger d'action négative sur l'environnement. Il faut relever également qu'une partie du personnel s'est fortement élevée contre toute proposition qui modifierait le statut du personnel. Celui-ci a été entendu et son statut, comme vous avez pu le remarquer dans ce projet de loi, reste celui de la fonction publique.

Le véritable motif des opposants est donc bien celui de soustraire à la suprématie de l'Etat la gestion de l'usine et de marquer par là la volonté de garder la totale intégrité de l'administration cantonale. Mais cette administration, Mesdames et Messieurs les députés, n'a pas les outils adéquats pour une telle gestion. De même qu'un contrôle rigoureux ne peut pas être assuré par la même entité qui gère l'usine. Qui contesterait aujourd'hui que les Services industriels sont mieux à même de distribuer l'énergie que l'Etat ?

En conclusion, la manière la plus appropriée de gérer cette usine est bien celle proposée par le projet de loi, à savoir de donner à cet établissement un statut de droit public avec la responsabilité des fournisseurs de déchets, dont les quarante-cinq communes qui revendiquent aussi le droit à la parole. Elles ne veulent plus prendre simplement acte et payer.

Je vous propose donc, Mesdames et Messieurs les députés, de refuser les conclusions de ce rapport et de renvoyer ce projet de loi à la commission de l'environnement et de l'agriculture, où nous aurons tout le loisir de l'étudier.

Le président. Il est fait une proposition de renvoi à la commission de l'environnement. Je souhaiterais que l'on se prononce sur cette proposition.

Mme Anne Briol (Ve). Nous avons eu l'occasion de le dire lors du débat de préconsultation, nous l'avons redit en commission : nous ne sommes pas opposés à une autonomisation des Cheneviers, mais pas dans les conditions proposées par le projet de loi.

En commission, nous nous sommes donc prononcés en faveur de l'entrée en matière en précisant au préalable les points que nous souhaitions voir modifier dans ce projet de loi. Nous estimons en particulier, vu l'impact environnemental de cette usine, qu'un contrôle strict de son activité doit être mis en place, ainsi que des exigences environnementales sévères, notamment concernant les transports. Dans le même ordre d'idées, il doit être exigé dans le projet de loi que les déchets pouvant être valorisés soient refusés par l'usine. De plus, nous estimons qu'un meilleur contrôle démocratique doit être instauré, notamment par un accord de prestations voté par le Grand Conseil, par la présence de politiques dans le conseil d'administration ou en soumettant au Grand Conseil les gros investissements. Nous aurions encore beaucoup à dire sur ce projet de loi, mais nous vous invitons à en discuter en commission et nous vous proposons de soutenir ce renvoi en commission.

M. Rémy Pagani (AdG). La proposition de renvoi en commission vient de nous être soumise. J'essayerai donc de m'exprimer sur le fond et sur la proposition de renvoi en commission. J'estime que cette plénière a le droit de savoir, avant de renvoyer le cas échéant ce projet de loi en commission, pourquoi une majorité a refusé d'entrer en matière. Notre groupe désire qu'il y ait un vote sur le fond et que l'ensemble de la population puisse prendre conscience des réels dangers écologiques de cette autonomisation. Je ne citerai qu'un seul exemple... (L'orateur est interpellé.) Justement, Monsieur Vaucher, je veux vous l'expliquer si vous me laissez le temps de m'exprimer ! J'ai ici la liste des prix de l'usine des Cheneviers, les tarifs 1998. Les pneus sans jantes sont facturés 110 F par tonne. Pourtant, l'usine des Cheneviers, pour augmenter le taux de combustion de ses fours, qui, je le rappelle, sont des fours destinés à l'incinération des ordures et non pas des pneus, ni des déchets de voitures, a facturé, pour aller chercher sa clientèle le plus loin possible et faire du dumping à la baisse, les pneus sans jantes 88 F la tonne. C'est effectivement ce genre de pratique, Monsieur Vaucher, qui nous fait douter du véritable sens de l'autonomisation qui nous est proposée.

Il y a donc un problème. Il y a un véritable problème, puisque nous avons à la tête du département concerné par l'usine des Cheneviers un écologiste qui a mis en place une politique des déchets à laquelle nous adhérons. Nous trouvons cependant un peu spécieux qu'il se prive aujourd'hui d'un instrument et qu'il se coupe quasiment la main droite pour soi-disant mettre en place cette politique des déchets. Il devrait au contraire savoir qu'une véritable politique des déchets signifie le maintien de la gestion des déchets dans son département, jusqu'à ce qu'elle soit mise en route, valorisée et sûre. Il devrait maintenir dans son département la gestion des déchets dont il dispose encore actuellement, l'épuration des eaux usées et l'entretien des canalisations. Or, vouloir aujourd'hui fractionner cette entité, placée sous la responsabilité de son département, c'est mettre un terme à la mise en application d'une véritable politique des déchets et de la gestion des déchets. On nous dit d'un côté qu'il faut séparer et trier les déchets dans nos maisons et dans nos cuisines, ce que nous allons faire, on nous demande d'utiliser plusieurs poubelles, ce qui va nous prendre passablement de place dans nos cuisines. D'un autre côté, on va desserrer la bride placée sur le cou de certains qui vont chercher, comme cela s'est passé en 1998 - et il y a d'autres exemples - qui vont chercher le plus loin possible, jusqu'à Milan, des pneus pour augmenter le taux de combustion de l'usine, pour augmenter la production d'électricité, voire la production de chaleur, puisque nous avons voté le projet Cadiom.

Nous estimons qu'il faut tenir compte de trois critères à propos de cette usine. Un critère environnemental, un critère de rentabilité bien évidemment, et un critère, important, qui est celui des conditions salariales. Le département pense-t-il pouvoir en même temps se couper le bras gauche et respecter ces trois critères de la manière la plus cohérente possible, c'est-à-dire préserver l'environnement, maintenir un tant soit peu de rentabilité et surtout préserver les conditions salariales des personnes, dont passablement travaillent, je vous le rappelle, en équipes le jour et la nuit, à raison de trois fois huit heures ? Je trouve que c'est la quadrature du cercle. Il faudra que M. Cramer nous explique comment il veut concrètement procéder en rendant cette usine autonome. Son parti, le parti des Verts, propose évidemment d'entrer en matière, mais il apportera à ce projet toute une série de cautèles pour soit-disant mettre en oeuvre cette politique. Nous attendons de voir. Toujours est-il que la donne est intrinsèquement faussée depuis le départ et je ne crois pas que l'on parviendra à mener, en apportant un certain nombre de cautèles, cette politique des déchets que nous attendons tous, une politique visant à réduire la quantité de déchets produits par notre communauté, mais n'ayant pas pour objectif d'en traiter toujours plus pour rentabiliser l'usine des Cheneviers, laquelle nous a déjà coûté passablement cher.

Voilà pourquoi je vous propose de ne pas entrer en matière sur ce projet de loi et si possible, si le temps le permet, de revenir dans quelques années avec un véritable projet d'autonomisation, lorsque la politique de gestion des déchets sera effectivement mise en route. Avant cela, je vous propose de renvoyer le tout au Conseil d'Etat en attendant la mise en place d'une réelle politique de gestion des déchets. 

M. Bernard Lescaze (R). La passion que semble soulever sur plusieurs bancs l'examen de ce projet, qui nous revient pourtant de commission avec un refus d'entrer en matière, montre bien que le sujet est en réalité particulièrement important. L'élimination des déchets est en effet certainement l'un des problèmes capitaux du XXIe siècle. C'est déjà l'un des problèmes les plus importants que doivent résoudre nos sociétés postindustrielles.

Il va de soi que le groupe radical est particulièrement favorable, quoi que l'on ait pu en penser, au projet d'autonomisation de l'usine des Cheneviers proposé par le département. Ce projet va dans la bonne voie, dans la bonne direction. Les cris et les chuchotements montrent aujourd'hui bien que la proposition qui est faite de renvoyer ce projet en commission est une bonne proposition. Toutefois, à mon avis, Monsieur le président, à moins que la proposition de renvoi en commission signifie que ce Grand Conseil accepte l'entrée en matière, je vois mal qu'un simple renvoi puisse suffire. Pour ma part, j'aurais proposé qu'il y ait d'abord un vote d'entrée en matière, puis le renvoi en commission en second débat pour l'examen article par article, puisque ceci n'a pas été fait en commission. Ce serait un signe clair de la volonté d'aboutir de ce Grand Conseil. Il ne nous paraît pas, à nous radicaux, particulièrement positif, ni productif de simplement renvoyer ce projet en commission pour l'étudier dans plusieurs années ou pour y apporter de nouvelles cautèles.

J'avoue humblement que je ne m'étais intéressé que moyennement à ce projet. Et puis, en le lisant, j'ai en tout cas trouvé un article que l'on pourrait à mon avis également appliquer à ce Grand Conseil. C'est l'article 10, alinéa 3, relatif au conseil d'administration. Il prévoit que le membre qui n'assiste pas à la moitié des séances de ce conseil est réputé démissionnaire de plein droit. Je pense qu'une telle disposition dans le règlement du Grand Conseil ferait peut-être davantage fleurir les présences sur nos bancs ! Il y a en tout cas là une piste à suivre. (Exclamations.) Je vois, Monsieur le président... (Brouhaha.)

Le président. Monsieur Lescaze, une seconde s'il vous plaît. Mesdames, Messieurs, un peu de silence s'il vous plaît !

M. Bernard Lescaze. Je vois, Monsieur le président, que la pollution, les émissions de bruit, d'odeurs, etc. n'existent pas seulement autour des Cheneviers, mais également à la rue de l'Hôtel-de-Ville ! Dans ces conditions, Mesdames et Messieurs, le groupe radical manifeste son soutien à ce projet du Conseil d'Etat, souhaite son renvoi en commission, mais après le vote d'entrée en matière, et espère que du bon travail pourra être fait en commission. 

M. Christian Brunier (S). La position du parti socialiste était très claire, puisque tant le comité directeur que la fraction ont refusé unanimement l'entrée en matière de ce projet que nous ne trouvons pas bon. Je vous dirai pourquoi.

Il y a, par rapport à un mauvais projet, plusieurs façons de réagir. Il y a la façon proposée par les Verts, consistant à renvoyer ce projet en commission et à le modifier profondément par des amendements. Je crois que la sagesse veut parfois que l'on reparte de zéro. Je vous proposerai donc de faire comme hier soir, c'est-à-dire de laisser tomber un mauvais projet et de demander au Conseil d'Etat de revoir sa copie.

La position du parti socialiste n'est pas une position dogmatique qui s'oppose à toute autonomisation...

Une voix. Mais si, mais si !

M. Christian Brunier. Nous savons fort bien que les autonomisations apportent un certain nombre d'avantages, par exemple l'augmentation de la responsabilité des gens qui gèrent ces établissements et le fait que de plus petites entités sont souvent plus efficaces que des grandes. Mais nous savons aussi que les autonomisations apportent un grand nombre de désavantages, tels que la perte démocratique et le risque, il n'est pas mineur, de privatisation.

Ce projet de loi, nous le refusons aussi parce qu'il est beaucoup axé sur des critères de rentabilité. Nous ne pouvons pas vouloir d'un côté réduire sensiblement les déchets et d'un autre côté vouloir rentabiliser la politique des déchets. C'est quelque part incompatible et contraire à tout développement durable. Ces critères de rentabilité sont d'autant plus dangereux qu'il y a aujourd'hui à Genève un certain nombre de multinationales, spécialisées par exemple dans la gestion des déchets et dans l'exploitation de l'énergie, qui commencent à s'étendre en utilisant des techniques et des tactiques envahissantes. Nous ne voulons pas de ces entreprises sur le terrain genevois...

Une voix. Blocher, c'est Blocher !

M. Christian Brunier. Il y a aussi une tentation que l'on retrouve dans ce projet de loi. C'est la tentation de chercher à tout prix de nouveaux marchés pour être rentable. Ces nouveaux marchés sous-entendent, comme l'a très bien expliqué mon ami Alain Etienne, le déplacement d'un grand nombre de matières, dont des matières dangereuses, et l'accroissement là aussi sensible du risque de nuisances et du risque environnemental. Et puis, finalement, ce projet de loi renferme un danger caché. On traite aujourd'hui les déchets comme n'importe quel produit de consommation, ce qui est très grave car les déchets, comme l'énergie, comme un certain nombre de produits ou de prestations, ne peuvent pas être considérés comme de simples lessives, comme de simples produits de consommation. Des critères environnementaux et stratégiques tout à fait particuliers doivent être pris en compte dans la gestion des déchets.

Enfin, toute réforme, pour qu'elle fonctionne, doit obtenir le soutien du personnel concerné. Le personnel des Cheneviers a défendu de manière tout à fait légitime ses conditions de travail. Mais le personnel a aussi fait preuve d'un acte citoyen important en se préoccupant énormément des aspects environnementaux. Je ne crois pas que l'on puisse conduire un changement, n'importe quel changement, en provoquant le personnel et en le poussant à mettre les pieds contre le mur. Le climat social est aujourd'hui instable à l'usine des Cheneviers et l'on ne réussira aucune réforme contre le personnel. Il faut absolument que le Conseil d'Etat cherche l'adhésion du personnel pour qu'il devienne l'acteur de son propre changement. Cet aspect a été complètement loupé dans ce projet de loi. C'est donc pour des raisons environnementales et pour ces raisons de gestion du personnel que nous refusons ce projet de loi et que nous refusons son retour en commission. Nous demandons au Conseil d'Etat de revoir sa copie.

Une voix. Bravo ! 

M. Alain-Dominique Mauris (L). Y aurait-il un vent si froid qui souffle sur notre parlement pour voir les députés se geler face à toute ouverture ? Nous avons tous réclamé de la part de notre gouvernement une politique dynamique. Maintenant qu'il tente régulièrement des ouvertures, une majorité l'en empêche. Le refus de ce projet en est une illustration de plus.

Les arguments en faveur de l'autonomisation sont clairs et sont cohérents. Les collaborateurs de l'usine des Cheneviers conservent leur statut de la fonction publique et restent affiliés à la CIA. Que demandez-vous de plus ? Lorsqu'on sait que les salaires moyens se situent entre 80 000 et 100 000 F, arrêtez de parler de paupérisation ! Je connais d'autres couches de la population qui, elles, aimeraient bien se situer dans ces critères-là.

Le deuxième point très positif est l'ouverture de l'usine à une collaboration avec ses clients. Ceci permettra à l'usine de disposer d'une gestion de qualité, proche de la réalité environnementale, sociale et économique. Les décisions ne seront plus prises par des technocrates, mais bien par ceux qui ont un intérêt direct au bon fonctionnement de leur usine, en accord avec la politique environnementale. Que craindre à ce propos de la part d'un conseiller d'Etat, émanant des Verts, qui pilote justement cette autodétermination ? Quant aux communes, que faites-vous du vote de l'ACG qui soutient ce projet ? Les communes n'ont décidément que peu de chance devant ce parlement. Lorsque leur cause sert la majorité, elles sont alors écoutées et considérées. Lorsqu'elles ont un autre point de vue, elles ne sont bizarrement plus entendues de la même manière...

M. Bernard Lescaze. Démagogue ! (Exclamations et rires.)

Une voix. Et c'est toi qui dis ça, démagogue ! (Brouhaha.)

Le président. S'il vous plaît ! Monsieur Mauris, nous allons attendre une petite seconde !

M. Alain-Dominique Mauris. Savez-vous que l'un des seuls domaines où les communes ont une vraie compétence, c'est celui de la gestion des déchets ? S'il est donc un domaine où elles sont directement impliquées, et sans démagogie, Monsieur Lescaze, c'est bien celui-ci. Mais devant les yeux de la majorité, cela n'est pas pris en compte. Quelle injustice de voir ainsi les communes éconduites, de voir leurs nombreuses réflexions sur ce sujet purement et simplement rayées. Hier soir, vous vous exprimiez en faveur des communes. Aujourd'hui, elles vous demandent votre appui et ne trouvent que porte close. A ce propos, il est curieux de constater que M. Mouchet, exécutif socialiste de Carouge et rapporteur convaincu de l'ACG sur ce projet, soit mis en doute par les députés issus de son parti... (Brouhaha. Le président agite la cloche.) Et puis que dire du fonctionnement actuel de l'usine, qui se contrôle elle-même ? Trouvez-vous cela acceptable ? Non ! Cela n'est pas cohérent.

Alors, s'il vous plaît, arrêtons de vouloir avancer en marche arrière, arrêtons de geler toute proposition d'ouverture et arrêtons de figer le progrès en agitant de vieux épouvantails ! Mettons certes des garde-fous au projet, mais avançons ! Il est temps de soutenir le Conseil d'Etat dans ce projet et de mettre en place pour le nouveau millénaire un vrai projet pour profiler l'usine des Cheneviers comme l'un des fleurons de notre politique de protection de l'environnement, en phase avec le développement durable. Je vous recommande donc de voter le renvoi de ce projet en commission.

M. Luc Barthassat (PDC). Ce projet de loi soulève les passions et nous nous enfonçons une fois de plus dans des débats sans fin. Ce projet de loi, vu son importance et les années de travail que le département y a consacrées, mérite que l'on s'y penche un peu plus attentivement, et surtout en commission où l'on a du temps, plutôt que de faire ici un bla-bla continuel. Le PDC soutient donc la proposition faite tout à l'heure par M. Lescaze, c'est-à-dire le vote d'entrée en matière et le renvoi en commission. 

M. Robert Cramer. La première chose que je dois faire, c'est bien sûr rendre hommage en votre nom à toutes et à tous au rapporteur, M. Etienne, dont non seulement le rapport est de qualité, mais qui l'a rédigé dans des circonstances difficiles. M. Etienne a eu la courtoisie et la correction de rédiger son rapport rapidement, quand bien même il pouvait peut-être imaginer que le vote en plénière ne serait pas de même nature que celui de son groupe en commission. Il a de surcroît su, alors même que les travaux de commission se sont terminés abruptement par un refus d'entrée en matière, marquer dans son rapport les différents enjeux que pose ce projet de loi.

On peut bien sûr déplorer l'effet d'une majorité due à un certain nombre d'absences. Nous devons débattre aujourd'hui, alors même que nous savons que ce projet de loi sera vraisemblablement renvoyé en commission et que l'amorce de débat que nous avons eue sur le fond ne constitue qu'un premier tour qui sera reporté.

Pour ma part, dans le même temps que je le regrette, parce qu'il prend quelques minutes dans votre ordre du jour et que votre temps est précieux, je m'en félicite, puisque ce débat a permis aux uns et aux autres de s'exprimer sur un sujet que je considère d'importance, qui est celui de notre politique en matière de gestion des déchets. Ce débat a ainsi montré qu'il y avait dans chaque groupe de l'intérêt pour ces questions, soit parce que ce sont des vieux routiniers de ce sujet qui se sont exprimés, soit parce que ce sont des jeunes convertis, tel M. Lescaze, qui, avec la foi du néophyte, ont fait valoir leur point de vue.

Ce qu'il faut peut-être dire ici, ce sont trois choses. La première, c'est que, s'agissant d'un changement de statut de l'usine des Cheneviers, oser prononcer le terme de privatisation est un non-sens. C'est un non-sens car ce dont on parle, c'est de simplement faire passer cette usine des Cheneviers à un statut d'établissement de droit public, c'est-à-dire au statut d'une entreprise possédée à 100 % par l'Etat, contrôlée à 100 % par l'Etat, aussi bien quant à sa gestion que quant à sa politique, dans ses comptes, dans son budget et dans ses investissements. Tout cela est dit dans le projet de loi. Pour le surplus, les collaboratrices et les collaborateurs de l'usine des Cheneviers conservent, comme ils le souhaitaient - ce qui montre bien qu'ils ont été entendus, en tout cas largement sur ce point - conservent donc exclusivement un statut de fonctionnaire. C'est dire que cet établissement demeure entièrement dans la sphère de l'Etat, mais sous une forme différente.

En l'occurrence, plutôt que de parler d'autonomisation, il serait beaucoup plus juste de parler - je sais cependant que certains ici n'aiment pas ce terme - de parler simplement d'une entreprise de réforme de l'Etat, qui permet à notre Etat d'être plus performant et plus efficace. Je crois quand même que c'est ce que les uns et les autres, en tout cas ceux qui croient en cet Etat, doivent souhaiter.

Deuxièmement, en matière de gestion des déchets, j'ai entendu un certain nombre de choses que j'ai jugées surprenantes. Je vous dirai donc simplement que le Conseil d'Etat et le département dont j'ai la charge, et qui doit mener sa politique, entendent appliquer avec la même rigueur et pour toutes les entreprises du canton la même politique en matière de gestion des déchets : celle que vous avez voulue, Mesdames et Messieurs les députés. Que ces entreprises soient dans la sphère de l'Etat ou qu'il s'agisse d'entreprises privées, nous entendons appliquer à toutes ces entreprises le concept cantonal de gestion des déchets, le plan de gestion des déchets, ainsi que la loi que vous avez adoptée sur la gestion des déchets et son règlement d'application qui sont entrés en vigueur au mois d'août de cette année. Et ces règles s'imposent à tout le monde. Elles s'imposent aussi bien aux entreprises qui sont dans la sphère de l'Etat qu'aux entreprises privées. C'est un point qui répond, je l'espère, à l'une ou l'autre de vos préoccupations, Monsieur Pagani, puisque vous indiquez qu'une autonomisation des Cheneviers est peut-être envisageable pour plus tard, le jour où l'on saura comment s'applique cette politique en matière de gestion des déchets. J'entends vous dire qu'elle doit s'appliquer aujourd'hui et maintenant et pour chacun. Alors à partir de là, les préoccupations qui ont été exprimées, portant sur la rentabilisation des Cheneviers ou je ne sais quoi d'autre encore, tout cela s'efface derrière le fait que nous voulons gérer les déchets de façon environnementalement acceptable et conformément à la politique que nous menons. S'agissant enfin des transports, cette loi dit pour la première fois que nous entendons transporter à Genève les déchets en faisant usage des infrastructures de transports publics. C'est là, je crois, une nouveauté importante qui est introduite dans ce projet de loi.

Encore un mot justement sur le transport des déchets. On ne peut pas tout vouloir. On ne peut pas vouloir tout à la fois que nous récupérions mieux à Genève, que nous valorisions mieux, que nous ayons beaucoup moins de déchets genevois amenés à l'usine des Cheneviers, et vouloir dans le même temps éviter de rendre service à nos voisins vaudois, en accueillant une partie des déchets qu'ils produisent. Traiter ces déchets est souhaitable et je dirais même que c'est une pression pour que nous fassions toujours mieux à Genève, parce que nous créons ainsi une capacité réduite aux Cheneviers qui nous contraint de réaliser les objectifs ambitieux de nos plans de gestion des déchets.

Enfin, quant au renvoi en commission, je dois dire que je rejoins certains des avis qui se sont exprimés, notamment sur les bancs du parti radical ou du parti démocrate-chrétien, pour dire qu'il serait souhaitable que le Grand Conseil donne aujourd'hui un signe en prenant une décision au niveau de l'entrée en matière et que, une fois ce signe donné, il renvoie ce projet en commission. Comme tous les projets de lois, ce projet de loi est assurément perfectible, comme tous les projets de lois, ce projet de loi mérite d'être enrichi par les réflexions des députés travaillant en commission. C'est dans cet esprit-là que je vous demande de renvoyer ce projet de loi en commission pour qu'il en ressorte encore meilleur à l'issue de ses travaux.

Le président. Mesdames et Messieurs les députés, nous allons tout d'abord procéder au vote d'entrée en matière. Y a-t-il des oppositions sur cette procédure ?

M. Rémy Pagani (AdG). Monsieur le président, je ne suis pas très féru du règlement de notre Grand Conseil. Toujours est-il que je me demande si notre Grand Conseil peut réglementairement entrer en matière sur un projet de loi, puis renvoyer le tout en commission...

Le président. Oui, Monsieur Pagani, nous pouvons le faire.

M. Rémy Pagani. Je crois qu'il y a préalablement une demande de renvoi en commission à traiter...

Le président. Oui, et c'est la raison pour laquelle je demande à celles et ceux qui ont proposé le renvoi en commission s'ils sont d'accord que l'on utilise l'autre procédure proposée ce soir, à savoir voter d'abord l'entrée en matière. (Le président est interpellé.) Mesdames et Messieurs, le renvoi en commission est formellement demandé. Je dois donc vous faire voter le renvoi en commission de ce projet de loi. 

Mise aux voix, la proposition de renvoyer ce projet en commission de l'environnement et de l'agriculture est adoptée.