République et canton de Genève

Grand Conseil

PL 7680-A
5. Rapport de la commission des finances chargée d'étudier le projet de loi de MM. Jean-Luc Ducret, Olivier Lorenzini et Pierre-François Unger instituant une garantie en cas de déficit pour l'organisation des Jeux Olympiques 2006 en Valais. ( -) PL7680
Mémorial 1997 : Projet, 5050. Renvoi en commission, 5052.
Rapport de majorité de Mme Salika Wenger (AG), commission des finances
Rapport de minorité de M. Jean-Claude Vaudroz (DC), commission des finances

RAPPORT DE LA MAJORITÉ

Tout le monde s'accorde à dire que le spectacle des Jeux Olympiques d'hiver est d'une féerie incomparable et il est parfaitement compréhensible qu'en ces temps moroses chacun projette ses rêves et fantasmes dans la défense de ce projet. Il ne se passe pas un jour sans qu'une manifestation vante les mérites de cette rencontre.

Restons réalistes, Sion 2006 est un jouet coûteux et les gueules de bois financières d'Alberville et de Nagano sont loin d'être passées.

En cette période de difficultés budgétaires il est d'autres priorités que les jeux ; certains nous rétorquerons que 1 million c'est peu de choses, que la couverture financière de cet événement est d'ores et déjà acquise et que le risque est mineur. Dans ce cas, il n'est nul besoin de participer à ce qui risque d'être un gouffre financier.

Les Jeux Olympiques d'aujourd'hui sont à des années lumières de l'idée que s'en faisait Pierre de Coubertin et rares sont encore les amateurs qui réellement viennent y pratiquer leur sport pour « Le Sport ». De plus, nous gardons tous en mémoire les différents scandales qui ont secoué le Comité olympique et dont l'impunité ne peut en aucun cas servir d'exemple aux jeunes.

Le refus de cette couverture s'est fait au terme d'une très courte discussion au sein de la Commission des finances :

   5 oui (2 R, 2 DC, 1 L)

   6 non (3 S, 2 AdG, 1 Ve)

C'est pourquoi nous vous invitons à voter NON à ce qui nous semble être la participation à un événement inutile et dont les retombées ne seront qu'au bénéfice des marchands d'illusions et au détriment du contribuable genevois.

Projet de loi(7680)

instituant une garantie en cas de déficit pour l'organisationdes Jeux Olympiques 2006 en Valais

Le GRAND CONSEIL de la République et canton de Genèvedécrète ce qui suit :

Article 1 Garantie

Le Conseil d'Etat est autorisé à octroyer une garantie en cas de déficit pour l'organisation éventuelle des Jeux Olympiques de 2006 à Sion.

Article 2 Montant et modalités

1 Le montant de la garantie n'excède pas 1 million de francs.

2 Il sert de garantie à un éventuel déficit des organisateurs. Cette couverture est considérée comme intégralement assurée par les recettes et les dons prévus au budget établis par l'office du tourisme de Genève.

Article 3 Surveillance

L'inspection cantonale des finances est chargée de veiller au respect des conditions stipulées dans la présente loi.

Article 4 Couverture financière

En cas d'appel de la garantie, le montant est prélevé sur la rubrique budgétaire 61.03.00.365 du budget de la République et canton de Genève pour 2006.

Article 5 Loi sur la gestion administrative et financière de l'Etat

Pour le surplus, les dispositions de la loi sur la gestion administrative et financière de l'Etat, du 7 octobre 1993, sont applicables.

RAPPORT DE LA MINORITÉ

Favoriser une économie orientée vers la valeur ajoutée

C'est surtout au niveau de l'image et de la notoriété d'un canton, d'une région et de la Suisse tout entière que les Jeux Olympiques Sion 2006 vont apporter leur contribution. En effet. Les JO 2006 sont une opportunité extraordinaire de renforcer une volonté de soutien à une politique de promotion économique et touristique. Relevons à ce sujet que le budget de fonctionnement prévoit un montant de 50 millions de francs pour la promotion et la publicité des Jeux.

Renforcer une solidarité intercantonale

Dans ce contexte, les JO 2006 ont un rôle déterminant à jouer. Ils représentent un projet rassembleur permettant au canton du Valais et à notre région d'oeuvrer pour un but commun : réussir le pari d'organiser une manifestation d'envergure internationale.

Promouvoir l'environnement culturel

Plus de 30 millions seront destinés à promouvoir et mettre en valeur les ressources culturelles et encourager des activités pendant la manifestation.

Finalisation de l'affectation du sol et des infrastructures

L'occasion unique de la perspective des JO 2006 devrait encourager les collectivités à achever ou à améliorer, dans des délais adaptés, certains tronçons routiers prévus dans leurs programmes d'investissements. Là aussi, les JO 2006 seraient l'élément déclencheur pour parvenir aux objectifs.

Dépenses de fonctionnement des JO 2006

La part la plus importante (plus de 80 %) des dépenses liées à la tenue des JO 2006 concerne les frais de fonctionnement. Cela s'explique entre autres par le fait que de nombreuses installations seront provisoires. Elles seront démontées immédiatement après les Jeux et ont donc été imputées au budget de fonctionnement. Telles qu'elles ressortent du budget prévisionnel, les dépenses de fonctionnement s'élèvent d'environ 720 mios de francs.

Les infrastructures

L'une des caractéristiques du projet JO 2006 est d'utiliser au mieux les infrastructures sportives et touristiques existantes et d'en construire de nouvelles uniquement lorsque leur utilisation, après les JO 2006, par la population et les sportifs se justifie (dans le cadre de l'évolution et l'adaptation de l'ensemble des infrastructures). Les dépenses d'infrastructures prévues se montent alors à près de CHF 246 mios.

Les visiteurs

Les dépenses des visiteurs représentent un volet important pour l'impact direct sur notre économie. Les visiteurs sont nombreux et peuvent être regroupés en différentes catégories : les athlètes, les accompagnants, les officiels, les juges, les médias, les organisateurs et forces de sécurité, les spectateurs et les visiteurs avant et après les JO 2006.

Le nombre total de visiteurs attendus représente plus de 800 000 personnes. Inutile de dire que l'impact des « dépenses visiteurs » est phénoménal et estimé à plus de 340 mios (hébergement 135 mios, restauration 120 mios, achats 90 mios). Genève, avec son aéroport international, serait de toute évidence un des sites-clés d'accueil de visiteurs en provenance du monde entier.

Dépenses totales

Les sommes dépensées représentent plus d'un milliard deux cents millions de francs. Les sommes dépensées hors du Valais se montent à environ 520 mios et représentent plus de 42 % des dépenses estimées (sans tenir compte des effets induits et multiplicateurs de ces dépenses).

Effets sur l'emploi

L'organisation des JO 2006, avec un volume de dépenses estimé à un milliard deux cents millions, aura sans conteste un effet positif sur l'emploi. A titre d'exemple, le nombre de chômeurs enregistrés à Barcelone a diminué de moitié entre novembre 1986 (désignation de la ville par le CIO) et juillet 1992 (date des Jeux). En ce qui concerne les JO 2006, l'estimation du nombre d'emplois créés est supérieure à 15 000 par année. Ces nouveaux emplois se répartissent sur une période de sept ans, allant de l'été 1999 à l'été 2006. (A titre de comparaison, on estime que plus de 200 000 emplois ont été et seront créés en Australie entre 1991 et 2004 à l'occasion des Jeux de Sydney.)

Les effets sur l'emploi se caractérisent principalement par les activités liées à la construction, au tourisme (hébergement, restauration, commerce de détail) et le domaine des services (banque, poste, télécommunications, assurances) ainsi que les activités médicales et le domaine de la sécurité, etc.

Conclusion

Mesdames et Messieurs les députés, il est évident que l'impact positif que donnerait le pari pris par le peuple valaisan dépasserait très largement les frontières cantonales, et s'inscrit dans le cadre du développement régional. L'ensemble de notre pays bénéficierait de la réussite de ce projet. L'aéroport international de Genève à lui seul bénéficierait de recettes supplémentaires estimées à plus de 8 mios de francs.

D'autre part, le montant de la garantie n'excède pas 1 million de francs qui servirait de garantie à un éventuel déficit des organisateurs. Cette couverture serait intégralement assurée par les recettes prévues au budget établi par l'office du tourisme (art. 2).

Il nous semble que c'est une opportunité unique de montrer notre solidarité avec nos amis valaisans et c'est pourquoi, Mesdames et Messieurs les députés, nous vous prions d'accepter le projet de loi 7680.

Premier débat

Le président. Mesdames et Messieurs les rapporteurs, avez-vous quelque chose à ajouter à vos rapports ? Ce n'est pas le cas ? Madame Hagmann, vous avez la parole. (Le président est interpellé.) Monsieur Vaudroz, vous avez la parole !

M. Jean-Claude Vaudroz (PDC), rapporteur de minorité. Oui, excusez-moi ! C'est allé trop vite pour moi après un débat...

Le président. Il faut simplement suivre, Monsieur Vaudroz !

M. Jean-Claude Vaudroz, rapporteur de minorité. Je vous remercie, Monsieur le président. Je vais tenter de le faire !

Je voulais simplement rappeler à ce Grand Conseil, suite à la lecture de ce rapport, qu'il ne s'agit en tous les cas pas d'organiser, dans le cadre de ce projet de loi, des Jeux olympiques à Genève. Il s'agit donc bien des Jeux olympiques de Sion 2006.

Le Valais a déjà pris sa décision à une très large majorité. Une délégation de ce canton sera d'ailleurs présente à Séoul le 19 juin. Nous sommes et nous pouvons être certains qu'Adolf Ogi reviendra avec les Jeux olympiques 2006. Le débat ne doit donc pas avoir lieu dans cette direction. Il ne s'agit pas de savoir s'il est bon ou non d'organiser les Jeux olympiques. Je pense que le débat doit par contre s'engager autour de l'importance et de l'impact considérable que peuvent avoir ces Jeux olympiques sur notre économie, non seulement pour la Suisse toute entière, pour la Suisse romande, mais également pour Genève.

Nous venons de débattre de l'aéroport. L'aéroport constitue évidemment un point central dans ce contexte, puisque tout, en termes de communications internationales, aboutira finalement à l'aéroport international de Genève. L'impact apparaît donc considérable pour l'intérêt collectif.

Je voulais également signaler qu'il est fait allusion, en page 2 du rapport de majorité, au poids du cautionnement, cautionnement qui se ferait, selon ce rapport, sur le dos du contribuable genevois. C'est avoir mal compris l'article 4 prévoyant la couverture financière. Il ne s'agit surtout pas de puiser ce cautionnement d'un million dans les contributions publiques genevoises, mais il s'agit bien de le prélever sur le fonds pour le tourisme, fonds justement destiné à la promotion du tourisme genevois.

Je crois que ce fonds pour le tourisme sera particulièrement bien alimenté dès l'instant où le comité olympique aura désigné Sion 2006 comme prochain site olympique. La démonstration en a été faite dans le plan développé par le comité d'organisation des jeux olympiques. J'en ai mentionné quelques éléments dans le rapport de minorité qui montrent combien les investissements apparaissent considérables et comment ils permettront, non seulement à la population valaisanne, mais à tout le bassin lémanique d'en retirer un certain nombre de profits. C'est donc bien dans cet état d'esprit que se situe ce projet de loi. J'espère que ce Grand Conseil aura compris que c'est bien dans le fonds pour le tourisme que nous prélèverons ce cautionnement.

Il est indispensable que Genève soutienne cette décision du Valais, comme d'ailleurs toute la Romandie et la Suisse entière devraient le faire.

Mme Salika Wenger (AdG), rapporteuse de majorité. Vous parlez, dans votre rapport de minorité, de renforcer la solidarité. Renforcer la solidarité intercantonale en participant à ce que tout le monde sait être un gouffre financier ne semble toutefois pas être le meilleur gage de solidarité ! Pour ne citer que l'exemple d'Albertville, les surcoûts ont excédé les prévisions de 233% et entraîné une augmentation des impôts de 28% !

Alors qu'une initiative est actuellement en cours à Genève pour baisser les impôts, ce qui entraînera, en cas d'acceptation, un grave déficit ou des coupes dans les prestations, il est parfaitement indécent que les mêmes personnes qui veulent pratiquer ces coupes proposent aujourd'hui des dépenses aussi superflues que futiles. Si le propos est de dépenser un million à tout prix, il existe aujourd'hui bien d'autres priorités.

Vous parlez d'autre part de promouvoir l'environnement culturel. J'ai lu dans ce rapport que l'on doit promouvoir l'environnement culturel. (L'oratrice est interpellée.) Monsieur Blanc, s'il vous plaît, ayez un tout petit peu de courtoisie, si c'est possible ! (Brouhaha.) Bien !

On parle donc de promouvoir l'environnement culturel. Je suis ravie de constater que 30 millions sont destinés à mettre en valeur les ressources culturelles. Encore que ce terme très vague m'inquiète un peu, car si les Jeux olympiques sont un fait culturel, alors le lancement d'une nouvelle marque de dentifrice est aussi un fait culturel.

Mais la question qui me vient immédiatement à l'esprit est de savoir à combien se montera la somme affectée au même usage après les jeux. J'ai un peu de mal à croire que ce sera le même montant. Ou alors le Valais deviendrait champion culturel et j'appelle cela de tous mes voeux bien entendu. 

Mme Janine Hagmann (L). Mesdames et Messieurs les députés... (L'oratrice est interpellée.) Alors... Madame Wenger, pardon ! On m'a donné la parole, alors je l'ai prise. Je vous laisse finir... Voyez, j'obtiens le calme plus rapidement que vous !

Le président. Madame Wenger, j'ai considéré que vous aviez terminé. Vous pourrez reprendre la parole tout à l'heure. Madame Hagmann, c'est à vous, s'il vous plaît, nous vous écoutons !

Mme Janine Hagmann. Bon très bien. Je la reprends maintenant et je la garde !

Une voix. Quoi ?

Mme Janine Hagmann. La parole ! (Rires.) Non, allez, un peu de sérieux ! Pour certains dans cette enceinte, le sport a vraiment une grande importance. On se retrouve parfois dans des joutes extraordinaires. J'en veux pour preuve le débat de plusieurs heures qui a entouré le projet de loi de déclassement permettant la création du stade de la Praille. Souvenez-vous de l'enthousiasme de certains intervenants - du même bord si j'ai bonne mémoire, Madame Wenger, que vous-même - défendant le football-spectacle !

Et là, que voyons-nous ? (Brouhaha.) Un projet de loi reposant sur une garantie d'un million en cas de déficit pour l'organisation des Jeux olympiques, couverture qui a été étudiée, nous dit le rapport, à la suite d'une très courte discussion. (Brouhaha. Le président agite la cloche.) Le rapport de majorité se contente de demander une non-entrée en matière au motif qu'il ne s'agit pas d'une priorité. Quelle tristesse ! Comment peut-on réduire en une petite page un projet aussi enthousiasmant, une idée aussi rassembleuse ? Quelle indigence, Madame Wenger, que ce rapport ! Vous nous avez habitués à mieux !

Les Jeux olympiques, depuis leur création à Olympie par Hercule, d'après la légende, en 776 avant Jésus-Christ, ont une longue histoire qui explique l'importance de leur symbolique. (Brouhaha. Le président agite la cloche.) C'est dommage, parce que je pense que vous apprendriez...

Le président. Monsieur Dupraz, s'il vous plaît ! Je vous prie de faire silence ! Je vous assure que ce n'est pas très beau à voir depuis ici. Je vous prie donc de faire silence et d'avoir un peu de tenue dans cette salle ! J'aimerais vous signaler, Mesdames et Messieurs les députés, que vous donnez un triste spectacle... (Brouhaha.) ...un triste spectacle oui !

Mme Janine Hagmann. Moi qui voulais vous apprendre quelque chose sur les Jeux olympiques, j'ai beaucoup de tristesse. Je pense cependant que l'ambiance n'est pas propice ce soir pour apprendre quelque chose sur les Jeux olympiques !

Pour en revenir à quelque chose de sérieux, je trouve tout de même un peu dommage de ne pas aider à réaliser la complémentarité montagnes valaisannes et aéroport international. Il en aurait bien besoin, le pauvre, après ce que l'on a vécu tout à l'heure !

Restent neuf jours exactement, Mesdames et Messieurs ! Vous rendez-vous compte du délire général si l'honneur d'accueillir la prestigieuse compétition échoit à Sion ? Et nous au bout du lac, que fera-t-on ? Nous resterons cois et nous aurons vraiment l'air malin.

Prenez les journaux de ces derniers jours ! Depuis une semaine, les journaux consacrent chaque jour une page complète à cet événement. M. Vaudroz, dans son rapport, clair et factuel, vous a expliqué toutes les retombées des Jeux olympiques. Une étude de l'université de Neuchâtel, une étude très sérieuse, estime à 15 000 la création de nouveaux emplois. C'est donc un investissement d'avenir !

Je crois que je ne vais pas parler des éclaboussures, cela ne sert à rien ! Je veux simplement encore vous dire que je vois en face de moi le pin's des Jeux olympiques à la boutonnière de M. Cristin. Si vous portez ce pin's, c'est sûrement parce que vous êtes fier de cette idée, Monsieur ! Et si vous êtes fier de cette idée, je pense que vous serez obligé de soutenir ce projet de loi !

Une voix. On demandera l'appel nominal !

Mme Janine Hagmann. Ce projet de loi ne concerne pas les jeux du Valais, mais les jeux de la Suisse entière. M. Barro va vous présenter quelques amendements pour vous montrer que ce projet de loi est tout à fait viable. Votez les amendements de M. Barro ! Je crois qu'il s'agit de la seule manière de montrer que l'on ne vivra pas les jeux du Valais, mais les jeux de toute la Suisse ! (Exclamations.) 

Mme Caroline Dallèves-Romaneschi (Ve). Les Verts ne peuvent que se réjouir de la sagesse de la majorité de la commission des finances qui a refusé d'accorder cette garantie de déficit. Ce n'est en effet pas d'une question de gros sous qu'il s'agit, mais d'une question de principe. Ce n'est pas par hasard, ni par une volonté de nuire, qu'aucune des organisations valaisannes de protection de la nature n'a soutenu ce projet. Nous sommes convaincus que de lourdes atteintes à la nature ne manqueront pas de se produire pendant la préparation de la manifestation olympique et pendant son déroulement.

Une voix. Mais non ! (Rires.)

Mme Caroline Dallèves-Romaneschi. Les nombreux cas d'illégalité relevés dans les domaines de la nature, du paysage ou de l'environnement au cours de ces dernières années ont démontré que le souci de l'écologie... (Brouhaha. Le président agite la cloche.)

Le président. Mesdames et Messieurs les députés, si vous ne faites pas silence, j'arrête la séance et l'on poursuivra nos travaux plus tard. Monsieur Dupraz, Mesdames et Messieurs, s'il vous plaît, quelques moments de silence par respect pour ceux qui s'expriment. Monsieur Dupraz, je m'en prends à vous, parce que l'on n'entend que vous depuis ici ! Silence, s'il vous plaît ! Je vous donne un avertissement, la prochaine fois, je prendrai des sanctions ! Madame Dallèves-Romaneschi, vous avez la parole !

Mme Caroline Dallèves-Romaneschi. Les nombreux cas d'illégalité constatés ces dernières années en Valais ont démontré que le souci de l'écologie, tout comme celui du respect de la législation en vigueur ne constituent pas encore un fait acquis en Valais. Les déclarations du comité de candidature, selon lesquelles l'objectif est d'aller au-delà du strict respect des dispositions légales en la matière, afin de donner au projet un caractère exemplaire, n'y changent rien. Car les impacts sur le paysage, la nature et l'environnement des Jeux olympiques sont en partie inévitables et irréversibles.

Sion, tout comme les autres villes candidates d'ailleurs, est victime du diktat du CIO et des fédérations sportives. En effet, si une ville désire avoir une quelconque chance d'obtenir l'attribution des Jeux olympiques, elle se doit de suivre à la lettre et même d'anticiper les principes édictés par le CIO et les différentes fédérations sportives. C'est ainsi que Sion, contrairement d'ailleurs, tout à fait contrairement au principe de décentralisation énoncé par Mme Hagmann, Sion, pour plaire au CIO, a fait le choix d'une concentration maximale des sites olympiques, concentration qui implique la réalisation de toute une série d'installations et d'aménagement, qui ne correspondent à aucun besoin à long terme, ni à aucune tradition sportive pour la région.

Je vais vous en donner quelques exemples. Prenez les tremplins de saut à ski de Montana. Comme le Valais ne dispose d'aucun tremplin, la candidature prévoit la construction de deux tremplins, dont les impacts sur le paysage et la forêt seront très importants, alors qu'une telle installation est parfaitement superflue.

Il est de plus prévu de réaliser ces tremplins dans une zone de forêt qui aurait dû être une compensation au défrichement effectué lors des Championnats du monde de 1987. Ceci, alors que le Tribunal fédéral avait exigé que plus aucun autre défrichement ne se fasse dans la région après ceux des Championnats du monde.

Prenez l'exemple des patinoires. Comme le Valais ne dispose pas des patinoires adéquates, le canton devrait construire quatre patinoires parfaitement inutiles pour ses besoins propres. Il en va de même pour la construction de l'anneau de vitesse à Martigny et de la halle de curling à Montana. Le village olympique ensuite. L'accueil, traditionnellement en un seul lieu de plus de 3 500 athlètes, implique la construction d'un village olympique de plus de 200 millions de francs pour 16 nuits. Ainsi, l'idéal olympique de la fraternité des peuples, symbolisée par le logement de tous les athlètes en un seul lieu, engendre une débauche d'énergie et de construction qui n'est plus du tout en phase avec la réalité.

Prenez la piste de fond dans la vallée de Conche ! Il s'agit d'une zone d'une très grande richesse écologique, due principalement aux méandres d'un cours du Rhône encore à l'état naturel. Les exigences techniques et l'afflux d'un public nombreux et incontrôlable auraient des effets désastreux pour l'ensemble de cette zone fragile et préservée.

Prenez l'organisation des transports ! La gestion des transports pendant la manifestation est également hautement insatisfaisante. Alors que tout le discours du comité d'organisation est axé sur une organisation écologique des déplacements, les choix effectués ne conduisent pas du tout à un transfert prépondérant sur les transports publics. Bien au contraire !

On mentionne prioritairement le plus polluant des moyens de transport, Mesdames et Messieurs les députés, nous en avons parlé, l'avion, puis le réseau autoroutier, avec une demande d'accélération de sa réalisation en vue des jeux de 2006 - si bien que l'on pourrait se demander pourquoi le million de garantie n'est pas demandé à l'aéroport - ou encore l'élargissement des tronçons de routes de montagne et la réalisation de parkings d'échange ou de parkings provisoires, alors que les valeurs d'émissions dues au bruit sont en Valais très largement dépassées dans un grand nombre de localités. Tout comme les dépassements de l'ozone ou des oxydes d'azote. Le concept des transports Sion 2006 n'apporte aucune contribution à l'amélioration de la situation des transports publics dans le canton, tout en provoquant une aggravation des nuisances.

Mesdames et Messieurs, la candidature de Sion renforce la dépendance du Valais à l'égard du tourisme hivernal, au nom duquel de nombreux aménagements, souvent illégaux d'ailleurs, ont déjà été réalisés ou sont prévus. Dans cette perspective, l'attribution des jeux à Sion ne ferait que renforcer les déséquilibres du développement économique cantonal, en apportant un ballon d'oxygène artificiel et ponctuel au secteur de la construction en général et des remontées mécaniques en particulier, secteur déjà fortement endetté et surdimensionné.

Sion est une ville trop petite pour pouvoir assurer seule une organisation de Jeux olympiques raisonnable. C'est vrai, le canton du Valais est un canton qui a peu de ressources, le soutien de la Confédération est très faible et, comme nous l'a malheureusement montré la déroute financière de Loèche-les-Bains, la capacité des autorités cantonales à contrôler la gestion des biens publics laisse fort à désirer.

Nous en concluons que le thème du développement durable, choisi pour accompagner le dossier de candidature, reste un pur concept de marketing destiné à vendre la candidature. Le principe du développement durable n'est absolument pas entré dans les moeurs de la politique valaisanne, mais est utilisé comme un argument-alibi pour la promotion de la candidature des Jeux de Sion 2006. C'est pourquoi nous ne pouvons pas apporter notre caution à cette organisation, ne serait-ce qu'avec un million de garantie de déficit.

Mme Elisabeth Reusse-Decrey (S). Le Valais souhaite organiser les Jeux olympiques. Soit. Libre à lui, s'il le souhaite. L'aura des JO est toujours très attirante. Mais, vous le savez bien, c'est aussi un piège, un piège qui a pour nom, outre les dégâts à l'environnement qui ont été largement décrits, «déficits» - déficits qui ne sont pas des moindres et qui n'ont aucune commune mesure avec le million dont on parle aujourd'hui. Et ces déficits, nous le savons aussi, vont peser lourdement durant de nombreuses années après les événements sur les finances des collectivités locales, accompagnés de leurs lots d'effets négatifs sur les prestations à la population. On le sait, ce scénario est classique.

Doit-on donc s'annoncer prêts à combler une partie de ce déficit des jeux olympiques ? A cela, nous dirons non. Non pas, comme dit Mme Hagmann, à la légère, c'est au contraire une décision que nous avons bien mûrie.

Mais j'aimerais quand même vous dire qu'il faudrait aussi voir, avant d'accuser les commissaires qui ont voté un refus d'entrée en matière, comment se sont déroulés les travaux en commission. Un des auteurs du projet de loi est venu nous présenter ses arguments. Le seul qu'il a avancé était l'espoir que Sion allait à l'avenir laisser gagner Servette en retour du service rendu. A partir de là, le débat n'a plus été d'un niveau très élevé. Nous avons demandé un certain nombre de documents à ce député, documents que nous n'avons jamais reçus. Le jour où la commission des finances a repris ses travaux, les documents n'étant toujours pas là, nous avons effectivement refusé d'entrer en matière.

Nous avons donc dit non ! Et cette décision n'a pas été prise à la légère, Madame Hagmann. Ceci pour plusieurs raisons. D'abord, même si le montant est prélevé sur les finances de l'office du tourisme, à l'heure où l'on essaye de donner l'image d'un canton qui veut équilibrer ses finances, nous ne sommes pas d'accord d'aller soutenir les déficits d'autres cantons qui veulent se lancer dans des folies. Couvrons déjà les déficits des manifestations qui se déroulent chez nous ! De plus, nous avons appris hier par la presse que le budget de promotion des Jeux olympiques a doublé ces dernières semaines. On attend de voir l'évolution des coûts pour les semaines à venir. Enfin, les preuves reçues du canton du Valais sur sa capacité de gestion financière ne sont pas tout à fait de nature à nous rassurer. Je veux parler par là des affaires Dorsaz et de Loèche. Qu'ils règlent déjà ces affaires avant de se lancer dans d'autres aventures !

Toutes ces raisons nous poussent donc à dire non à ce projet.

M. Florian Barro (L). Madame Reusse-Decrey, Madame Dallèves-Romaneschi, Madame la rapporteuse de majorité, vous avez à dessein plutôt noirci le tableau.

L'impact d'un refus de ce projet de loi lors de la prochaine décision d'attribution du site des Jeux olympiques pourrait être perçu très négativement dans l'opinion publique, dans les médias et bien évidemment en Valais. Vous pourriez certes nous rétorquer que le projet n'a pas été spécialement bien défendu en commission - Mme Reusse-Decrey l'a relevé - que la date du dépôt était mal choisie, que la date du traitement de ce projet de loi en commission était mal choisie. On peut effectivement formuler tous ces reproches. Mais à l'approche de cette attribution de JO, je pense que le refus d'un projet de loi de ce type-là, qui, je le rappelle et M. Vaudroz l'a également fait, ne coûte pas un sou aux contribuables directs, mais sera financé, selon la structure du financement proposée, via le fonds de l'office du tourisme, le refus d'un tel projet de loi aurait un impact très négatif.

Je pense que l'on pourrait à tout le moins réfléchir sur un renvoi en commission afin de temporiser le vote, ou en tout cas temporiser l'image négative que l'on pourrait donner sur ce projet de loi. Si le renvoi en commission devait toutefois être rejeté, et pour prévenir un éventuel refus d'entrée en matière, je vous proposerai de manifester notre solidarité intercantonale en apportant deux cautèles à ce projet de loi, en développant deux amendements qui sont les suivants. L'un est technique, l'autre concerne plus l'impact que peuvent avoir les Jeux olympiques dans notre région, en particulier à Genève. Je vous donne rapidement lecture de ces deux amendements pour que vous puissiez éventuellement infléchir votre décision, tant sur le renvoi en commission que sur l'entrée en matière.

Le premier amendement précise que la garantie que l'on mettrait à disposition ne pourrait en tous cas pas constituer préliminairement, pour les organisateurs une couverture des charges des Jeux olympiques. En d'autres termes, les organisateurs ne pourraient pas se prévaloir de cette somme pour couvrir leurs charges de fonctionnement. Ils devraient faire la démonstration de leur capacité à financer eux-mêmes leurs Jeux olympiques.

Le deuxième amendement - c'est, je pense, ce qui a fait défaut aux travaux très courts consacrés à ce projet de loi - précise que le Conseil d'Etat dépose un rapport d'impact économique, circonstancié, pour le canton de Genève si les Jeux olympiques sont attribués au Valais.

Il est indéniable, M. Vaudroz l'a déjà signalé, qu'il y a huit millions de recettes potentielles pour l'aéroport. Il est évident que l'hôtellerie ou la restauration pourraient aussi en bénéficier, de même que les CFF par le biais des transports.

Ces amendements méritent à tout le moins un renvoi en commission pour des explications complémentaires. Si ce projet de loi venait à être voté, ils permettraient au moins de disposer d'une étude d'impact économique sur la qualité de ce projet.

Je vous propose donc successivement un renvoi en commission pour étude et, le cas échéant, le vote de ces amendements. Je vous remercie !

Le président. Mesdames et Messieurs, une demande de renvoi en commission a été formulée. La parole est demandée par trois députés. Si vous vous exprimez sur le renvoi en commission, je vous donne la parole. Ce n'est pas le cas. Nous allons donc voter sur le renvoi en commission.

La proposition de renvoyer ce projet de loi à la commission des finances est mise aux voix.

Le résultat est douteux.

Il est procédé au vote par assis et levé.

Le sautier compte les suffrages.

Cette proposition est rejetée par 48 non contre 38 oui.

M. John Dupraz (R). J'ai été assez affligé d'entendre tout à l'heure les propos tenus par deux Valaisannes, de véritables traîtresses à leur canton d'origine... (Rires.) ...mais qui ne manquent pas d'aller skier chaque hiver sur des pistes où les dégâts à l'environnement ont été bien plus grands à l'époque où elles ont été constituées que les Jeux olympiques vont en occasionner par leur réalisation, car les Jeux olympiques du Valais sont un projet exemplaire. Mes collègues du Conseil national, lorsqu'ils en parlent, tous partis confondus, se battent d'ailleurs comme des lions pour décrocher une décision favorable à l'octroi des Jeux olympiques à la ville de Sion.

Or, cela a été dit tout à l'heure, il ne s'agit pas des jeux d'une seule ville, ni d'un seul canton. Ce seront les jeux de toute la Suisse et ces Jeux olympiques, si Sion les obtient, auront un impact positif pour toute la Suisse romande et pour toute la Suisse, impact que l'on ne reverra jamais si on ne nous les accordait pas.

Je ne comprends pas cet esprit de mesquinerie qui anime la gauche, un peu désuète et ringarde, qui ne veut pas donner une garantie, si modeste soit-elle, un signe de solidarité, positif envers cette grande oeuvre que nous espérons bien voir se réaliser.

Je constate en fait qu'une fois de plus l'esprit mesquin de cette gauche décadente et ringarde ne pense qu'à faire de notre pays une réserve d'Indiens, où l'on se regarde le nombril et où l'on se croit les meilleurs. Les mêmes qui voulaient le stade à Genève, le grand stade que nous avons voté et soutenu, les mêmes personnes ne sont pas capables d'accepter une organisation de Jeux olympiques remarquables, telle qu'elle est prévue en Valais.

Mesdames et Messieurs, le groupe radical soutiendra le rapport de minorité et regrette que cette gauche bête et stupide s'entête à persister dans l'égoïsme et un absolutisme genevois qui la caractérise. (Applaudissements.)

Mme Salika Wenger (AdG), rapporteuse de majorité. Monsieur Dupraz, je suis d'accord avec vous, Sion 2006 est un pari. Or, dans un pari, il y a toujours un imbécile et un escroc ! Je ne veux être la complice ni de l'un, ni de l'autre ! C'est pourquoi je ne voterai pas cette loi et j'invite tous les députés à faire de même ! 

M. Chaïm Nissim (Ve). A mes yeux, ces Jeux olympiques sont, contrairement aux yeux de M. Dupraz, les jeux du fric et du dopage. (Brouhaha.)

Une voix. C'est une insulte à nos amis valaisans !

Le président. S'il vous plaît, Mesdames et Messieurs les députés !

Mme Janine Hagmann (L). Je suis profondément scandalisée par ce que j'entends ce soir, mais surtout sidérée que vous n'arriviez pas à vivre quelque chose qui peut être aussi grandissant et aussi rassembleur.

Connaissez-vous la devise olympique ? C'est « citius, altius, fortius ». Plus vite, plus haut, plus fort ! Eh bien, ce soir, vous n'en faites vraiment pas la démonstration ! (Applaudissements.) 

M. Gérard Ramseyer. Je n'ai franchement plus tellement envie de m'exprimer sur cette question. Genève n'est pas une île, Genève vit en Romandie avec cinq autres cantons, Genève vit en Suisse occidentale avec huit autres cantons, Genève a été un aéroport olympique pour Albertville. Il devrait l'être pour Sion 2006.

De manière unanime, le Conseil d'Etat a toujours soutenu les Jeux olympiques de Sion 2006. A Sion, en Valais, tout un peuple soutient ces jeux.

Bien sûr que l'on discute, Madame Dallèves. Vous avez raison, il y a des problèmes à résoudre. Mais il y a aussi tout un peuple qui se bat pour gagner cette élection dans neuf jours. Et nous réussissons, nous, à Genève, l'exploit d'être le seul canton de Suisse qui votera non et qui apportera implicitement sa voix aux concurrents, que sont la ville de Turin et d'autres ! Je trouve que c'est stupide à pleurer.

Il aurait fallu tout faire pour ne pas amener ce sujet ce soir, à neuf jours d'une décision olympique. Je trouve que c'est triste, je trouve que c'est très triste et je suis franchement triste pour Sion 2006. (Applaudissements.)

Mme Erica Deuber-Pauli (AdG). J'aimerais quand même intervenir sur les propos de M. le conseiller d'Etat pour lui dire que je partage son point de vue sur un point au moins. C'est qu'on ne peut être plus bête que ceux qui ont fait venir ce débat ce soir, à quelques jours de la décision qui doit être prise en Valais, alors que toute une série de questions demeurent encore en suspens et ne seront envisagées qu'au moment où le Valais, désigné pour organiser les jeux, sera obligé de se confronter à toutes les questions environnementales qui ont été soulevées tout à l'heure.

Ce projet de loi est malvenu, C'est la raison pour laquelle nous le refuserons. Rien n'empêche toutefois dans les années à venir - nous sommes à six ans des Jeux olympiques - de rallier un certain nombre de suffrages dans ce canton sur des projets qui apporteront des réponses aux questions que nous nous posons en matière environnementale en Valais. Si, comme le dit M. Dupraz, ce projet est exemplaire, il en fera la démonstration. Pour l'instant, nous n'avons pas cette démonstration. C'est la raison pour laquelle nous voterons sans arrière-pensée non ce soir à ce projet, en tous cas pour ce qui me concerne et pour ce qui concerne quelques membres de mon parti. Nous nous rallierons peut-être un jour à un projet de solidarité envers Sion 2006. 

M. Olivier Vaucher (L). J'ai bien écouté les propos de Mme Deuber-Pauli et je ferai une proposition, puisqu'elle semble d'accord de dire que le moment n'est pas opportun. Ce serait de reporter le vote, qui devrait intervenir à l'issue du troisième débat de ce projet de loi, à la prochaine session. Nous aurons ainsi l'air moins ridicule ! 

Le président. Je me permets de vous faire observer, Monsieur Vaucher, qu'il faut un vote d'entrée en matière pour qu'il y ait un troisième débat. Sans quoi l'on n'a pas besoin de faire de troisième débat la prochaine fois !

M. Michel Halpérin (L). J'ai entendu voici quelques jours à la télévision une petite fille de huit ans répondre à une question qui était au coeur de l'émission : « Qu'est-ce que la vieillesse ? » La réponse de cette petite fille, que je trouve opportune et mûre pour un enfant de cet âge, était à peu près ceci : « Être vieux, c'est ne pas avoir de projet ».

On peut penser ce que l'on voudra des explications filandreuses de Mme Deuber pour montrer que le moment est inopportun, mais pourquoi il ne faut surtout pas en changer. La réalité, c'est qu'il y a une fois de plus dans cette enceinte une bonne moitié de la salle qui n'a pas l'âge de porter des projets !

Une voix. Eh oui ! 

M. John Dupraz (R). Je peux à la limite comprendre que ce projet n'enthousiasme pas certaines personnes ou certains groupes politiques, mais j'aimerais vous rendre attentifs à une chose. Si nous votons négativement ce projet ce soir, ce sera interprété par nos amis valaisans comme une gifle à leur égard. Premier point. (L'orateur est interpellé.) Un moment s'il te plaît, tu me laisses parler, oui ? Deuxièmement : cela a été dit, nous sommes à huit jours de la décision de Séoul et une telle décision de ce parlement de la Genève internationale pourrait porter un coup fatal aux décisions qui seront prises en Corée pour nos amis valaisans. Je crois qu'un vote négatif du Grand Conseil, ce soir, serait déraisonnable, quels que soient vos avis, quelles que soient vos opinions concernant les Jeux olympiques et le site du Valais.

Une proposition a été formulée tout à l'heure de renvoyer le projet de loi en commission. On pourrait effectivement mettre ce projet dans un tiroir pendant quelques mois, car il n'y a pas urgence, et reprendre le débat dans une année. Mais s'il vous plaît, ne donnons pas des signes négatifs à nos amis valaisans et ne portons pas un coup qui pourrait s'avérer fatal, car très mal interprété à Séoul par ceux qui doivent prendre la décision ! 

M. Christian Grobet (AdG). Monsieur Dupraz, si nous nous trouvons devant la situation que vous venez d'exposer, c'est tout de même aux auteurs du projet de loi d'en assumer la responsabilité. C'est le premier point. Deuxièmement, il est assez désagréable, vous avouerez, Monsieur Dupraz, de nous mettre dans la situation de dire que ce serait un coup de couteau dans le dos du canton du Valais si nous ne votions pas ce projet de loi, alors que tel n'est pas le désir de celles et ceux qui s'opposent à ce projet de loi !

J'aimerais dire les choses d'une manière très simple. Et pour cela, il serait peut-être judicieux que l'on renvoie effectivement le projet en commission, mais pas pour des raisons tactiques. Ce serait pour obtenir certaines explications financières.

Vous avez parlé de la solidarité nécessaire de Genève à l'égard du canton du Valais. Je suis le premier à proclamer la solidarité, mais j'aimerais bien que la solidarité ne soit pas à sens unique. En ce qui concerne le canton de Genève, je sais que nous faisons des efforts considérables pour le reste de la Suisse romande dans un certain nombre de domaines. Cela s'appelle par exemple l'université de Genève, cela s'appelle par exemple l'aéroport de Genève - pour évoquer un débat que nous avons eu il n'y a pas si longtemps ce soir. C'est par exemple encore la Genève internationale. Voilà des thèmes que vous avez vous-même évoqués et que, sauf erreur, nous portons à bout de bras, sous réserve bien entendu des subventions fédérales.

J'aimerais savoir, et en cela je serais favorable au renvoi en commission, quels sont les domaines dans lesquels le canton du Valais nous apporte une aide financière.

Je rappellerai à ce propos que lorsque l'aéroport de Genève-Cointrin - je m'excuse d'ailleurs de revenir sur ce sujet ce soir - a été transformé en établissement autonome, l'idée était notamment d'avoir l'appui de certains cantons, en particulier il est vrai du canton de Vaud, parce que l'on discutait des problèmes de relations fiscales entre ces deux cantons. L'idée consistait à bénéficier, à travers ce nouveau régime et la présence dans le conseil d'administration de personnalités provenant hors de notre canton, d'un appui financier pour un aéroport qui, comme vous l'avez dit tout à l'heure, bénéficie à toute la région.

Je suggère donc que l'on renvoie ce projet en commission, de manière que le département des finances élabore un rapport sur les équipements genevois qui ont reçu une aide d'autres cantons ou sur les manifestations qui se sont tenues à Genève avec l'appui d'autres cantons. On pourrait par exemple parler de Palexpo. Le Conseil d'Etat tire à ce sujet la sonnette d'alarme à gauche et à droite, y compris auprès de la Ville de Genève. Est-ce que des cantons romands sont prêts à participer à Palexpo ? Est-ce que des cantons romands ont à un moment donné supporté certaines conférences qui ont eu lieu à Genève ?

Je souhaiterais avoir des réponses précises à ce propos. C'est pour ce motif que je propose le renvoi en commission. 

Mme Micheline Calmy-Rey. Le Conseil d'Etat est d'accord avec le renvoi en commission. Parce que ce qui se fait jour aujourd'hui, c'est un consensus autour de l'idée qu'il est inopportun de voter ce soir sur ce projet ! 

M. Jean-Claude Vaudroz (PDC), rapporteur de minorité. Malgré le fait que je ne partage pas les propos évoqués tout à l'heure par M. Ramseyer, j'accepterai le renvoi en commission, considérant tout de même qu'il est extrêmement important, compte tenu de l'ensemble des débats que nous avons eus ce soir, que la population se rende compte que le parlement que cette population a élu rend difficile toute entreprise dans ce canton. On l'a vu, on a vu Palexpo, on vu le stade, on a vu tout à l'heure l'aéroport. Il s'agit maintenant des Jeux olympiques. On confond tout. Il est important que la population le sache. C'est pourquoi je ne souhaite à aucun moment retirer ce projet de loi. J'accepterai par contre le renvoi en commission. 

M. Bernard Clerc (AdG). Je tiens à dire que je m'opposerai au renvoi en commission. Les arguments de fond, évoqués à l'appui de ce projet d'organisation des Jeux olympique, sont suffisants pour qu'il soit rejeté aujourd'hui. J'en ajouterai simplement un autre. Je trouve particulièrement curieux que l'on accorde une garantie de déficit à un canton romand comme le canton du Valais qui s'apprête à décider une baisse de la fiscalité et qui demande l'appui de notre canton pour organiser les Jeux olympiques. 

M. Claude Blanc (PDC). J'ai le regret de vous dire que je m'oppose également au renvoi en commission. Je me rends compte que l'on n'ose pas dire dans ce Grand Conseil ce que l'on a réellement envie de dire, parce que l'on a la trouille ! M. Grobet, après avoir fait campagne contre ce projet, fait à présent à demi marche arrière en disant que l'on va gagner du temps et que d'ici là on va oublier. Eh bien, Mesdames et Messieurs les députés, prenez vos responsabilités ! Ayez le courage de dire aujourd'hui que vous ne voulez pas des Jeux olympiques ! Un point, c'est tout !

M. Christian Brunier (S). Vous nous avez expliqué pendant plusieurs minutes que votre projet était mobilisateur et qu'il s'agissait d'un projet favorable à l'essor de Genève. Vous avez néanmoins été incapables de défendre ce projet - qui n'est honnêtement pas très bon - en commission. Et aujourd'hui... (Brouhaha.) ...votre seul moyen de défense, c'est de tenter par tous les moyens, de manière assez pathétique comme M. Barro l'a fait tout à l'heure, de botter en touche et de renvoyer ce projet en commission, parce que vous savez que ce projet est désastreux ! Mais ce projet est le vôtre ! (Brouhaha) Ce projet est le vôtre ! C'est un projet qui est mauvais sur le fond, c'est un projet qui se moque de la population, parce que l'on ne veut pas lui demander de voter des garanties d'un million, sachant que les finances vont mal. Et lorsqu'on fait de mauvais projets, nous devons aller jusqu'au bout et, dans le cas d'espèce, retirer simplement ce projet ! 

Mme Caroline Dallèves-Romaneschi (Ve). Je me suis entendue injuriée, traitée au début de ce débat de Valaisanne ingrate et égoïste. Je suis pour ma part atterrée par les motivations que je sens dans cette assemblée de différents côtés. Vous êtes en effet, Mesdames et Messieurs, avides d'empocher les retombées financières que ce projet pourrait éventuellement attirer à Genève. Ce ne sont cependant pas vous qui partagerez les déficits, car Sion, contrairement à Genève, ne serait pas responsable d'un million de déficit, mais de la totalité des déficits qui pourraient se monter à des centaines de millions. Elle serait également déficitaire sur le plan des dégâts à l'environnement. Mais cela ne vous concerne évidemment pas, parce que ce ne serait pas chez vous, mais chez le voisin ! C'est bien entendu l'éternel débat entre la qualité et la quantité.

Mais qui êtes-vous pour affirmer que tout un peuple est là, derrière ce projet ? En vérité, qu'en savez-vous ?

Une voix. Un vote populaire !

Mme Caroline Dallèves-Romaneschi. Il y en a beaucoup qui espère que ces jeux ne se feront pas. Il est cependant vrai que certains l'espèrent secrètement, par peur de représailles. Car vous savez que certains Valaisans ont le sang chaud et peuvent se montrer violents, comme nous l'avons déjà expérimenté par le passé. D'autres l'espèrent aussi secrètement par peur de péjorer leurs relations avec d'autres personnes, comme M. le conseiller national vient de nous le faire entendre. Cela me déçoit profondément ! C'est pourquoi je m'opposerai vigoureusement à ce renvoi en commission ! 

M. Florian Barro (L). Ayant la chance de fréquenter M. Brunier, je ne pensais pas qu'il aurait...

Une voix. Tu as de mauvaises fréquentation alors !

M. Florian Barro. Autant utiliser des termes euphémiques ! Je disais simplement qu'il n'y a rien de pathétique dans mes propos. Lorsqu'on a la chance de vous fréquenter, il faut essayer de trouver les solutions les moins pires pour la République. Vous affronter de front ne sert à rien, puisque vous vous opposez. J'ai donc essayé d'atténuer l'aspect négatif que vous entendiez donner à votre refus, en tentant de proposer par ces deux amendements une solution qui permette en tous cas, ou qui donne l'impression, telle que Mme Wenger l'a repris dans son rapport de majorité, que le contribuable ne sera pas grugé d'un coup d'un seul de ce million. J'ai en tous cas essayé de mettre des cautèles à ce projet de loi afin que son impact soit le moins négatif possible.

Il n'y a rien de pathétique dans mes propos. On n'a pas le choix, on doit travailler avec vous et vous avez plus une obstination dogmatique sur ces principes-là qu'une volonté de travailler, je ne dirais pas en finesse, mais de travailler dans une solution consensuelle. Je travaille pour ma part de cette manière. J'ai essayé, je n'ai pas pu. Le renvoi en commission est une forme, les amendements en sont une autre. Je continue à soutenir le renvoi en commission, puisque c'est là que le travail des amendements doit en principe se faire. Je continue donc à manifester mon soutien pour le renvoi en commission. 

M. John Dupraz (R). Je crois que M. Grobet a très bien compris le sens de mon intervention. Ce ne sont pas les Jeux olympiques, ni le Valais qui sont en cause dans notre décision. Mais la renommée de Genève ! Car on nous fera porter le chapeau dans cette affaire. Je crois que vous n'avez pas le droit d'agir ainsi.

Je ne comprends par ailleurs pas M. Blanc qui s'entête. Il est plus têtu qu'une mule valaisanne. Il me semblait qu'il y avait quand même des gens de droite et de gauche pour renvoyer le projet en commission et étudier le problème financier ainsi que d'autres aspects. Car une décision de ce type prise à Genève risque d'être commentée dans la presse du monde entier. Si elle était prise à Uri, elle passerait inaperçue.

Alors, si vous ne voulez pas que Genève soit mise au ban de la communauté internationale par une décision stupide, ce qui serait fort regrettable, je vous recommande donc vivement d'accepter le renvoi en commission. 

Mise aux voix, la proposition de renvoyer ce projet à la commission des finances est adoptée.