République et canton de Genève

Grand Conseil

M 1255
14. Proposition de motion de Mme et M. Marie-Françoise de Tassigny et Pierre-Pascal Visseur concernant l'animation commerciale de la Ville pendant les fêtes. ( )M1255

EXPOSÉ DES MOTIFS

La fête de l'Escalade remporte chaque année un vif succès. Elle touche toute la population et déplace les foules.

Vivement appréciée, elle s'est néanmoins vue, cette année, formuler quelques reproches.

En effet, nombre de participants ont fait connaître leur déception de trouver les commerces de la Ville non seulement fermés durant ces journées de fête mais également de découvrir que les vitrines de ces commerces n'étaient pas illuminées.

Par ailleurs, les divergences qui ont opposé commerçants et tenants de la tradition quant à la mise en place et l'organisation d'un marché de Noël n'ont pas été comprises par les citoyens.

Certes, en décembre, Genève fête sa victoire face à la Savoie. Il s'agit là de la commémoration d'un événement historique. Mais décembre est également le mois des fêtes de fin d'année.

Dès lors, il semble normal que l'aspect festif prédomine à cette période.

Enfin, toujours concernant le marché de Noël et si celui-ci est reconduit l'an prochain, il serait extrêmement judicieux d'améliorer son organisation.

Emplacement, décoration, nature des stands, animations diverses (orgues de barbarie, carrousel...), tout est à revoir.

Car si l'intention première était excellente et mérite toutes nos félicitations... dieu, que ce marché est triste...

Débat

Mme Marie-Françoise de Tassigny (R). Qui n'a pas rêvé d'aller passer quelques heures lumineuses sur la place de la cathédrale de Strasbourg aux environs de Noël ? En effet, le marché de Noël, dans cette cité, a une longue histoire et attire une foule de la région et d'ailleurs. Cette ambiance de douces fêtes a peut-être un côté digne d'une image d'Epinal, mais le sens de la fête est toujours très apprécié de la population.

Pourquoi ne pas accorder ce privilège aux Genevois ? Le décor de la cité de Genève est comparable à celui de la capitale de l'Alsace. Pour des raisons de tracasseries légales ou des visions un peu étroites de multiples services, le marché de Noël, confiné sur la demi-lune, promenade Saint-Antoine, lieu charmant mais complètement isolé de la vie commerciale, n'a pas brillé par son succès. Quel dommage !

Nous sommes responsables de n'avoir pas accordé à cet essai d'animation une juste place. De plus, pour les punir de cet échec, on a infligé aux commerçants une amende salée en prime.

Cette motion prie le Conseil d'Etat de prendre toutes les mesures, en étroite concertation avec la Compagnie 1602 et les milieux économiques et syndicaux, pour que cet essai soit transformé en réussite. Nous sommes persuadés que ce voeu sera réalisé pour l'an 2000.

Le groupe radical souhaite le renvoi de cette motion au Conseil d'Etat.

M. Charles Beer (S). La motion qui nous est proposée, contrairement à l'exposé oral fait par Mme de Tassigny, ne traite pas que du marché de Noël, mais bien de l'ouverture des magasins durant la période de fin d'année.

Dans cette motion, vous proposez de revoir un système qui serait beaucoup trop rigide. Du reste, M. Visseur en est le cosignataire et il a eu l'occasion, en développant une interpellation urgente, de dire à quel point Genève était restrictive en matière d'heure de fermeture des magasins.

Un bref rappel. La loi sur les heures de fermeture des magasins prévoit très explicitement, en fin d'année, deux ouvertures extraordinaires jusqu'à 22 h, qui ont été accompagnées, cette année, par deux ouvertures extraordinaires pour le samedi jusqu'à 18 h, pour le non-alimentaire, alors que la loi prévoit l'ouverture jusqu'à 17 h. Sans oublier des ouvertures extraordinaires liées à des événements commerciaux, historiques, ou autres - j'aurai l'occasion d'y revenir - sans oublier également le fait que cette possibilité a été largement utilisée à l'occasion de la fête de l'Escalade, notamment par les artisans et petits commerçants de Carouge.

Donc, comme on le voit, la loi actuelle offre déjà bien des possibilités qui soumettent le personnel de vente à de rudes stress durant cette période où, je le rappelle, celui-ci travaille également le 24 décembre, le 31 décembre toute la journée et dès le 2 janvier, comme ce fut le cas cette année.

Bien entendu, pour couronner le tout, janvier est le mois des soldes et le personnel, comme vous l'aurez compris, ne peut se reposer...

Dès lors, j'aimerais revenir sur un point de détail, même s'il a trait à l'interpellation urgente développée tout à l'heure par M. Visseur : les ouvertures extraordinaires.

La loi donne la possibilité à des groupes de commerçants de faire appel au département pour demander une ouverture extraordinaire. Eh bien, on le voit, ces ouvertures extraordinaires créent des problèmes, des distorsions de concurrence, dans la mesure où certains sont, parce qu'ils en font la demande, autorisés à ouvrir et d'autres pas.

Cela fait que nous ne souhaitons pas renforcer encore ce qui est à la fois inutile sur le plan économique, aberrant sur le plan législatif et antisocial pour le personnel.

Si votre motion se réduit à étudier une organisation du marché de Noël plus appropriée aux besoins de la population, nous pourrons la soutenir, à condition que vous sortiez du texte l'aberration qui consiste à réclamer un assouplissement de la loi sur les heures de fermeture des magasins, qui est déjà extensible à souhait pour ne pas dire caoutchouteuse en la matière...

Je propose donc formellement l'amendement suivant qui consiste à modifier l'invite comme suit :

«à étudier une organisation du marché de Noël plus appropriée aux besoins de la population».

Mme Stéphanie Ruegsegger (PDC). En fait, cette motion aborde plusieurs problématiques.

Tout d'abord la question de l'animation au Centre-Ville. Nous sommes tout à fait conscients que ce dernier a besoin d'animation, mais nous aimerions simplement relever les efforts déjà fournis par les commerçants pour ce faire. Je vous rappelle - peut-être que cela ne se sait pas suffisamment - que ce sont les commerçants qui s'occupent de toute l'illumination et de toute la décoration du Centre-Ville en période de fin d'année. Par exemple, l'Association du quai Général-Guisan a dépensé plus de 100 000 F en 1997 pour la décoration. Je crois donc que les commerçants fournissent déjà un réel effort.

Pour ce qui est de l'ouverture prolongée des commerces, il y a une véritable demande en la matière. Pour s'en convaincre, il suffit d'aller visiter les centres commerciaux du canton de Vaud ou de France, qui pratiquent des horaires un peu plus souples. Nous serions d'avis de montrer plus de souplesse dans notre canton, s'agissant des horaires des magasins, notamment lors de fêtes spéciales, pour les fêtes de fin d'année ou lors d'événements particuliers comme les salons très importants qui se tiennent à Genève et qui drainent une clientèle supplémentaire. Je pense, par exemple, à Télécom ou au Salon de l'auto. Nous sommes donc favorables à plus de souplesse en la matière.

Pour ce qui est de l'échec du marché de Noël, puisque la motion aborde également ce sujet, je ne crois pas que ce soit au Conseil d'Etat d'intervenir pour faire en sorte que ce marché soit un succès. Il y a plusieurs raisons à cet échec : peut-être l'emplacement - nous pourrions effectivement trouver un emplacement plus adapté pour l'année prochaine - et, certainement, la question des horaires. Mais je crois qu'il y a d'autres raisons dont, notamment, le choix de la marchandise qui était proposée, et c'est plutôt aux organisateurs du marché de Noël de se pencher sur ce type de problème.

M. Christian Grobet (AdG). Comme Mme de Tassigny l'a relevé, il existe une tradition extrêmement sympathique en Alsace : les marchés de Noël, où de petits artisans vendent leurs produits. Je ne suis pas certain que le marché de Strasbourg soit le meilleur exemple, Madame, car je crois qu'il s'est passablement commercialisé.

Mais il n'empêche qu'il y a de quoi s'en inspirer et il serait intéressant de développer ce type d'activité à Genève, mais dans des lieux évidemment beaucoup plus adéquats que celui où s'est tenu le marché de Noël cette année. Il faudrait également essayer de développer une animation après Noël, car les derniers jours de l'année la ville est totalement morte, et une réflexion à ce sujet serait peut-être bienvenue.

Je suis tout de même étonné, Madame de Tassigny, que vous ne parliez pas de l'autre aspect de la motion qui a été très bien évoqué tout à l'heure par M. Charles Beer et j'ose espérer, Madame, que, sous le couvert de la préoccupation de ce sympathique marché de Noël, votre motion n'avait pour but de nous faire avaler la pilule des ouvertures nouvelles pour les grands commerces au Centre-Ville ! Que les petits commerçants indépendants bénéficient de plus de souplesse ne nous gêne pas. Par contre, nous ne sommes pas d'accord pour les commerces employant des salariés qui doivent, comme M. Beer l'a dit, travailler le 24 décembre jusqu'à je ne sais quelle heure et le samedi jusqu'à 18 h.

Madame Ruegsegger, vous avez cité l'exemple des centres commerciaux français... Eh bien, excusez-moi, Madame, vous qui faites partie d'un groupe politique dont le slogan est la défense de la famille, je trouve que l'exemple français est tout sauf un bon exemple ! Pour ma part, je trouve honteux que l'on fasse travailler des vendeuses le samedi soir jusqu'à 20 h 30 ou 21 h, si ce n'est 21 h 30 dans certains centres commerciaux. Nous pouvons tous faire nos commissions plus tôt. Vous avez parlé de demande : c'est vrai, mais c'est un oreiller de paresse, car sachant qu'un magasin est ouvert plus tard on ne fait pas l'effort de s'arranger autrement.

Dans certains pays les commerces sont fermés le samedi à 14 h et tout le monde arrive pourtant à faire ses courses. Il faudrait plutôt rédiger une résolution demandant au Conseil d'Etat de faire des démarches auprès de la France voisine pour que ce pays se montre plus social en matière de conditions de travail... (Remarques et rires.) ...et peut-être que le nouveau gouvernement français y sera sensible et révisera des lois qui ont été promulguées en France sous les gouvernements de droite qui ont dirigé le pays pendant de longues années. (Brouhaha.)

Toujours est-il qu'en ce qui nous concerne nous approuvons totalement l'amendement de M. Beer. Nous avions présenté le même, mais puisqu'il a pris les devants, nous le voterons.

M. John Dupraz (R). Ce débat est très intéressant. Et je regrette que nos collègues des partis de gauche prêtent de sinistres intentions aux deux auteurs de la motion.

Comme nous le faisons au Conseil national, Monsieur le président, puisque nous avons l'honneur d'y siéger ensemble, je déclinerai mes liens d'intérêt : je suis administrateur de Coop Genève. Mais connaissez-vous les difficultés de la distribution à Genève ? Les connaissez-vous ? Coop Genève rénove tous ses magasins, investit et veut faire un supermarché pour garder la clientèle à Genève et, vous, alors que nous sommes dans un monde d'ouverture et de concurrence, vous refusez la souplesse ! Il n'est pas question d'exploiter le personnel... Le travail de vendeur et de vendeuse est certes très difficile, mais lorsque ceux-ci travaillent un soir ils ont des compensations.

Monsieur Beer, vous qui êtes syndicaliste et qui voulez préserver l'emploi à Genève, avec une telle attitude bornée et stupide, comment voulez-vous que Genève se développe ? Comment voulez-vous que nous maintenions les emplois à Genève ?

Mesdames et Messieurs les députés, le salaire minimum d'une vendeuse à Genève est le double de celui d'une vendeuse en France voisine !

Monsieur Grobet, vous qui avez été conseiller d'Etat, vous savez quelles sont les relations avec la France et qu'il n'est pas facile de l'influencer. Vous parlez des gouvernements de droite... Mais pendant quatorze ans le président était socialiste : il a fait une Europe capitaliste outrancière et a soutenu un libéralisme économique à tout crin. Un socialiste !

Maintenant, M. Jospin, premier ministre, est socialiste...

Une voix. Et alors !

M. John Dupraz. Et alors ? Que voulez-vous de plus ? Regardez ce qui se passe en France : ce n'est pas ce que nous voulons ! Mais nous voulons au moins un peu de souplesse pour maintenir les emplois et retenir les clients à Genève.

Dimanche matin, je suis allé voir le nombre de Genevois qui vont faire leurs courses en France voisine... (Exclamations.) Nous ne demandons pas l'ouverture des magasins le dimanche matin, mais un peu plus de souplesse pendant la période des fêtes permettrait d'améliorer la situation du négoce à Genève, de maintenir des emplois supplémentaires tout en respectant les conditions de travail - et nous y tenons - des travailleuses et des travailleurs, car nous ne sommes pas des exploiteurs !

Monsieur Grobet, je ne suis pas un tenant du libéralisme à tout crin... (Commentaires.) ...mais si vous ne voulez pas accorder cette souplesse, eh bien le commerce de Genève crèvera, parce que la concurrence est ce qu'elle est ! Genève a 100 km de frontières avec la France... Alors, les gens iront acheter en France voisine, et il n'y aura plus d'emplois dans les grands commerces. Et après vous serez les premiers à beugler en demandant ce que fait l'Etat !

Une voix. Bravo !

M. Gilles Desplanches (L). Je ne suis pas administrateur de la Coop et je ne suis pas non plus un grand partisan de la libération des heures d'ouverture des magasins et des nocturnes. Par contre, il faut tout de même admettre que le commerce a aujourd'hui besoin d'un second souffle. Si les commerces de détail et les différents partenaires sociaux négocient pour obtenir une nocturne - c'est un voeu des deux parties - eh bien, il est temps de constater qu'un assouplissement est nécessaire pendant la période des fêtes de Noël et de prendre conscience que les clients qui ont consommé en France sont des clients que vous ne retrouverez pas dans vos commerces, ce qui n'engagera pas ces derniers à engager du personnel.

Monsieur Grobet, votre proposition est un coup d'épée dans l'eau. Vous savez, comme moi et comme tout le monde aujourd'hui, que le commerce de détail genevois n'a aucun poids vis-à-vis de la France. Or, il y a deux types de commerces : les grands et les petits. Et, en période de Noël, ces deux types de commerce sont intéressés à faire du chiffre d'affaires et les personnes qui y travaillent, comme les patrons, ont avantage à ce que le magasin réalise des bénéfices pour les redistribuer.

Encourager le commerce, c'est encourager l'emploi. Encourager l'emploi, c'est encourager la formation. Fermer les yeux et observer un comportement peureux, alors que c'est à la période de Noël qu'il y a une frénésie d'achats, c'est de l'inconscience ! (Brouhaha.)

M. Charles Beer (S). Je ne souhaite pas prolonger le débat, mais je voudrais apporter une ou deux précisions.

La motion ne visait pas une ouverture des magasins pour s'adapter à la compétition interrégionale, comme semblait le dire tout à l'heure M. Dupraz, dans un exercice d'auto-allumage dont il a le secret, mais des ouvertures extraordinaires en fin d'année. Encore une fois, la loi actuelle, et son règlement, prévoit de telles possibilités...

Une voix. Non !

M. Charles Beer. Si, et multiples, dans le respect de la loi sur le travail ! Ces possibilités sont telles que cela avait notamment amené un syndicat à déposer un recours au Tribunal fédéral, dans la mesure où il estimait que ces possibilités allaient beaucoup trop loin et qu'elles étaient en contradiction avec l'esprit de la loi.

Nous assistons aujourd'hui à des aberrations en ce qui concerne ces ouvertures extraordinaires. Déjà, bien souvent, les clients les ignorent; du fait que la plupart des commerces ne les pratiquent pas forcément dans l'ordre; qu'il y a un manque d'organisation autour de ces demandes, sauf lorsqu'elles sont réellement liées à la dimension spécifique des petits commerces dans les quartiers - je pense à Carouge ou à la Jonction - parce que cela a un certain sens, qui dépasse l'aspect du chiffre d'affaires des grandes surfaces.

Monsieur Dupraz, vous êtes administrateur de Coop Genève. Tant mieux ! Nous aurons l'occasion d'en parler bientôt et j'aurai un certain nombre de choses à vous dire à cet égard.

S'il est clair que ce groupe a multiplié les investissements à Genève ces derniers temps - je vous le dis au passage - c'est peu de temps après avoir ouvert un vaste centre hypermarché juste à l'entrée de Genève...

M. John Dupraz. C'est faux !

M. Charles Beer. ...ou plutôt au-dessus de Nyon, à Signy, Monsieur Dupraz... Laissez-moi terminer, vous prendrez la parole après ! ...et la Coop appelle régulièrement, par un certain nombre de publicités tous ménages, les Genevois et Genevoises à venir faire leurs courses dans le magasin vaudois. Tout cela pour vous dire simplement que Coop Genève, qui va jusqu'à Nyon - je vous le rappelle - puisqu'il s'agit de la même coopérative...

M. John Dupraz. Elle va jusqu'à Gland !

M. Charles Beer. Elle va jusqu'à Gland, mais en tout cas jusqu'à Nyon, jusqu'à Signy !

En tout cas c'est la même coopérative, alors cessez de dire que cela représente un intérêt pour le commerce genevois ! L'intérêt logique - et qui n'est pas condamnable - est donc celui de la Coop. C'est la même chose pour la Migros.

Alors, dans ces périodes de fêtes de fin d'année, ne prenez pas la défense du grand commerce : il a suffisamment de possibilités et son chiffre d'affaires le montre bien. Les chiffres obtenus par les grands groupes, ceux de décembre notamment, sont loin d'être misérables.

J'aimerais encore vous dire en passant - dans l'agriculture, vous êtes effectivement sensibles à la lutte contre le libéralisme - que, dans le domaine du commerce, à certains égards, plus vous donnez des possibilités aux grands, plus les petits souffrent. En effet, les petits commerces vivent souvent, vous le savez bien, des petits avantages qui leur sont octroyés pour pouvoir servir des clients lorsque les grands sont fermés. Et, à chiffre d'affaires égal, un petit commerce offre plus de places de travail qu'un grand.

Octroyer des horaires d'ouvertures plus souples pour tout le monde, c'est à l'évidence laisser plus de marge aux gros, contrairement à l'esprit de la motion, certainement, et par là même soutenir beaucoup moins l'emploi que vous ne le prétendez.

Petit détail : vous ne cessez de parler de la France, encore la France, toujours la France. Vous parlez également des socialistes qui ont mal fait... Enfin quoi, c'est la tragédie ! Alors, parlons-en ! Monsieur Dupraz, je vous ai parlé tout à l'heure des conditions de travail du personnel de vente. Je suppose que vous savez que le personnel de vente en France travaille trente-neuf heures. Il travaillera bientôt - peut-être l'avez-vous noté - trente-cinq heures, pour un salaire à plein temps. Le salaire minimum en France - je ne parle pas de la région frontalière en particulier, mais du centre de la France - permet à une vendeuse de meilleures conditions de vie, malheureusement, que celles d'une vendeuse à Genève... (Commentaires.)

M. John Dupraz. Alors, vas-y !

M. Charles Beer. Parfaitement, de meilleures conditions de vie, en raison des avantages indirects. Je n'ai pas dit que les employeurs payaient mieux en France qu'en Suisse. Ne me faites pas dire ce que je n'ai pas dit ! J'ai seulement affirmé que les conditions de travail et de revenu en France sont à certains égards plus décentes au centre de la France. Il est donc plus facile, ou moins difficile, d'y vivre qu'à Genève.

En conclusion, parlons du marché de Noël, restons au marché de Noël et cessons d'entrer dans ce genre de dérapage - certainement malencontreux de la part de Mme de Tassigny. Je doute davantage qu'il s'agisse d'un dérapage de la part de M. Visseur, après avoir entendu son interpellation urgente de tout à l'heure.

M. Alberto Velasco (S). Je voudrais simplement revenir sur l'intervention démagogique de M. Dupraz... (Exclamations et rires.)

Le président. Mesdames et Messieurs les députés, Monsieur Dupraz, Monsieur Velasco, essayez d'être concis et de convaincre par vos arguments plutôt que de vous apostropher !

M. Alberto Velasco. Démagogique, parce que vouloir comparer les salaires versés en France avec ceux de la Suisse n'a aucun sens...

Des voix. Aucun !

M. Alberto Velasco. Ce n'est pas moi qui le dis... (L'orateur est interpellé.) Ce n'est pas moi qui le dis, mais des économistes, Monsieur !

Et, en salaires réels, les salaires suisses sont comparables aux salaires français. Le logement en France étant moins cher ainsi que le coût de la vie, vous ne pouvez pas faire de telles comparaisons ! C'est vexant à l'égard des travailleurs de ce pays.

Vouloir rendre le commerce genevois compétitif sur le dos des travailleurs, c'est inadmissible !

M. John Dupraz (R). Je tiens à apporter une simple petite précision par rapport à la réponse de M. Beer suite à mon intervention.

Ne croyez pas que ce qui se fait dans un grand commerce se fait contre les syndicats ! Tout ce qui concerne le personnel : les horaires de travail, etc., se fait en étroite collaboration avec lui.

Ne croyez pas qu'en fermant le grand commerce vous allez faire tourner les petits commerces... C'est totalement faux ! Les grands commerces sont des pôles d'attraction qui attirent, entre guillemets, «la masse» des clients, mais les petits commerces bénéficient de ces pôles d'attraction, parce qu'ils fournissent des prestations spécifiques que les grands commerces ne peuvent pas fournir. Le petit commerce ne peut pas fonctionner sans le grand commerce - on le voit à Signy, où il y a de nombreux petits commerces. Les gens viennent faire leurs achats dans les grands commerces et complètent ceux-ci dans les petits commerces pour les achats spécifiques. C'est une erreur de vouloir opposer petit et grand commerces : ils sont complémentaires ! Malgré tous les prix alléchants et les actions des grandes surfaces, les épiciers s'en tirent très bien parce qu'ils offrent des produits de qualité et des services spécifiques à la clientèle, qui ne les trouve pas dans les grands commerces. Je le répète, c'est une erreur de vouloir opposer ces deux types de commerce.

Moi, Monsieur Beer, je me bats pour l'emploi : un peu de souplesse dans les heures d'ouverture, cela représente une augmentation du chiffre d'affaires et, donc, des emplois, tout en maintenant la clientèle chez nous, et c'est aussi plus d'argent qui rentre dans les caisses de l'Etat.

Si vous ne voulez rien faire par dogmatisme, c'est votre responsabilité ! Mais alors, après, ne venez pas pleurer que l'emploi va mal à Genève.

M. Carlo Lamprecht. Mesdames et Messieurs les députés, ces problèmes des horaires d'ouverture des magasins et du marché de Noël durant la période des fêtes du mois de décembre m'ont valu un maximum d'interpellations.

Nombre de personnes disent qu'on ne sait pas faire la fête à Genève. Elles se demandent pourquoi on interdit le marché de Noël et pourquoi les magasins ne sont pas ouverts plus longtemps. Eh bien, sachez qu'il ne s'agit pas, comme vous l'a dit au début Mme de Tassigny, d'une mauvaise volonté ou d'une mauvaise interprétation de la part du département. Toutes ces prolongations d'horaires et ces dérogations qui ont été octroyées l'ont été en plein accord avec les partenaires sociaux.

Cela représente un travail de deux ou trois mois, avec l'accord de tous, je le répète. Les magasins qui ont bénéficié des dérogations ont accordé un certain nombre de compensations sociales à leur personnel. Tout cela s'est fait en totale harmonie. Les choses, en définitive, ne se sont pas si mal passées cette année, puisque, pour la première fois, des magasins sont restés ouverts plus longtemps, d'autres l'ont été pendant la course de l'Escalade. Le département a donc été conciliant. Mais nous ne pouvions pas décemment accorder au marché de Noël des horaires d'ouverture encore plus larges, alors qu'ils sont refusés au commerce genevois depuis des années.

A la fin de l'année, je me suis penché sur ces problèmes et j'ai eu la même intention que celle qui est exprimée par la motion : réunir les partenaires sociaux une fois de plus et discuter à nouveau, en tout cas pour ce qui concerne les fêtes. A savoir que si marché de Noël il doit y avoir, ce devra être un marché de Noël digne de ce nom et que si les horaires d'ouverture des magasins doivent être élargis, ils devront faire l'objet de compensations sociales adéquates. Cela permettra - c'est une réalité et il faut l'admettre - de faire face à la concurrence, comme cela a été relevé par certains. Cela permettra également à des gens de pouvoir faire leurs achats en famille, à un moment où ils sont plus détendus, après leur journée de travail.

C'est un problème qu'il faut examiner rapidement. Pour ma part, je souhaite que cette motion soit renvoyée au Conseil d'Etat, afin que nous puissions entreprendre, dès le mois prochain, des négociations et organiser les horaires d'ouverture des magasins, lors des prochaines fêtes de Noël.

Je demanderai donc aux partenaires sociaux de se mettre autour d'une table et de faire en sorte que Genève, tout en respectant la justice sociale, soit plus vivante, que l'on puisse y faire la fête et que l'on y bénéficie, comme c'est le cas dans d'autres pays, de fêtes de Noël positives pour notre économie, afin que tout le monde y trouve son compte.

Le président. Je mets aux voix l'amendement proposé par M. Beer, qui modifie l'invite de cette motion, dont le texte se lit comme suit :

«à étudier une organisation du marché de Noël plus appropriée aux besoins de la population.»

Le résultat est douteux.

Il est procédé au vote par assis et levé.

L'adjoint du sautier compte les suffrages.

Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 37 non contre 36 oui.

Mise aux voix, cette motion est adoptée.

Elle est ainsi conçue :

Motion(1255)

concernant l'animation commerciale de la Ville pendant les fêtes

Le GRAND CONSEIL de la République et canton de Genèveconsidérant :

l'engouement et la demande populaire pour la mise en place de plus d'animations dans la cité ;

l'important succès que remportent ces animations liées ou non à des commémorations historiques ;

l'aspect festif mais également économique de ces animations ;

invite le Conseil d'Etat

à réétudier avec les milieux économiques, les syndicats et les associations historiques de la cité la possibilité d'une ouverture prolongée des commerces et l'organisation du marché de Noël plus appropriée aux besoins de la population durant le mois de décembre. 

Le président. Mesdames et Messieurs les députés, j'avais l'intention de ne pas dépasser 23 h, mais il nous reste une seule motion qui ne devrait pas appeler beaucoup d'interventions. Je vous propose donc de la traiter pour en terminer avec le département de l'économie, et de traiter ensuite la résolution 395, qui devrait aussi être votée rapidement.