République et canton de Genève

Grand Conseil

PL 7601-A
16. Rapport de la commission de l'économie chargée d'étudier le projet de loi de Mmes Nicole Castioni-Jaquet et Alexandra Gobet modifiant la loi en matière de chômage (J 2 20). ( -) PL7601
Mémorial 1997 : Projet, 2314. Renvoi en commission, 2317.
Rapport de majorité de Mme Marie-Françoise de Tassigny (R), commission de l'économie
Rapport de minorité de M. Pierre-Alain Champod (S), commission de l'économie

RAPPORT DE LA MAJORITÉ

Ce projet de loi a été déposé le 8 avril 1997 par Mmes Nicole Castioni-Jaquet et Alexandra Gobet-Winiger.

Il a été traité pendant trois séances (12.05.97, 02.06.97, 08.09.97) et malgré les arguments louables des initiants, il est apparu très rapidement à la commission que ce projet tend à transformer l'Etat en philanthrope dans la mesure où il finance déjà lui-même la moitié des prestations.

Il est ressorti très clairement que cette extension des prestations cantonales en cas de maladie (PCMM), pour les chômeurs ne bénéficiant plus des indemnités fédérales et n'étant pas encore sous le régime des occupations temporaires, n'était pas envisageable financièrement pour la majorité de la commission.

C'est la raison par laquelle cette dernière n'est pas entrée en matière. En effet, malgré le vide juridique du système actuel, la commission a jugé que l'Etat était dans l'impossibilité à ce jour de faire face à de nouvelles charges.

Pour rappel, en 1997, les PCMM ont coûté 14 millions de francs à l'Etat.

Une augmentation de la couverture d'assurances perte de gain pour les chômeurs concernés chargerait d'une manière très conséquente le budget de l'Etat.

De plus, les chômeurs cotisent à ces PCMM sur une base volontaire et représentent seulement 66 % de la totalité des chômeurs.

Les non-assurés représentent souvent les bons risques et de ce fait pénalisent les charges de l'assurance.

Actuellement, les cotisations représentent 3,5 % des gains des chômeurs et il n'est pas concevable de les augmenter pour financer une extension de couverture. A terme, cette hausse équivaudrait à une nette diminution du pouvoir d'achat des chômeurs.

Pour hypothèse, trois mois de couverture supplémentaire entraîneraient une cotisation de 5,08 % du gain précédent.

Il faut relever que la comparaison avec les autres cantons montre que l'investissement de l'Etat de Genève en la matière est parmi les plus conséquents.

Par ailleurs, un élément supplémentaire extrêmement déterminant pour la prise de décision de la majorité de la commission a été de considérer que ce projet de loi aurait pour conséquence immédiate la nécessité de mettre au bénéfice des mêmes dispositions les auxiliaires de l'Etat pour éviter une inégalité de traitement.

Cette analogie aurait pour effet de charger encore plus le budget de l'Etat.

Devant ces considérations de charges supplémentaires et l'impossibilité de pouvoir financer ce projet dans la situation que nous vivons actuellement, la commission vous propose de ne pas entrer en matière pour ce projet de loi.

PROJET DE LOI(7601)

modifiant la loi en matière de chômage (J 2 20)

Le GRAND CONSEIL de la République et canton de Genèvedécrète ce qui suit :

Article unique

La loi en matière de chômage, du 11 novembre 1983, est modifiée comme suit :

Art. 8 Bénéficiaires potentiels (nouvelle teneur)

1 Peuvent bénéficier des prestations en cas d'incapacité passagère de travail, totale ou partielle, les chômeurs qui ont épuisé leur droit aux indemnités journalières pour maladie, accident ou maternité, conformément à l'article 28 de la loi fédérale, de même que ceux dont l'incapacité de travail survient avant le début de l'occupation temporaire.

2 Peuvent bénéficier de l'occupation temporaire, les chômeurs ayant épuisé leur droit aux indemnités de la loi fédérale. Il en va de même pour les indépendants ayant renoncé à leur statut, aptes au placement et disponibles pour une activité lucrative dépendante.

3 Peuvent bénéficier des prestations de reconversion, de perfectionnement et d'intégration professionnels complémentaires à la charge du canton, indépendamment des prestations prévues par les articles 59 et 60 de la loi fédérale, les assurés définis à l'article 27 de la présente loi.

Art. 9 Domiciliation (nouvelle teneur)

Peuvent bénéficier des prestations :

a) les chômeurs suisses ainsi que les chômeurs étrangers titulaires des permis B, C et F domiciliés depuis une année au moins sans interruption dans le canton de Genève, à dater du jour de l'introduction de la demande et qui sont indemnisés par une caisse de chômage ;

b) les chômeurs visés sous lettre a en attente d'une occupation temporaire.

Art. 10 Cotisations (nouvelle teneur)

1 Le chômeur qui désire être couvert contre la perte d'indemnités durant une incapacité de travail au sens de la présente loi doit autoriser sa caisse de chômage, soit la caisse cantonale de chômage, à percevoir la cotisation prévue à l'article 20, dans un délai de 10 jours à compter du premier jour pour lequel il prétend à l'indemnité de chômage dans le délai-cadre prévu à l'article 27 de la loi fédérale.

2 La cotisation due par le chômeur est prélevée dès le premier jour donnant droit à l'indemnité de chômage et se poursuit jusqu'à la prise d'effets de l'occupation temporaire.

Art. 15 Durée (nouvelle teneur)

Les prestations sont servies au bénéficiaire dès la fin du droit aux indemnités au sens de l'article 28 de la loi fédérale jusqu'à concurrence de 270 indemnités journalières cumulées dans un délai de 36 mois.

Art. 20 Mode de perception (nouvelle teneur)

1 La cotisation du chômeur est perçue par les caisses de chômage.

2 La caisse cantonale de chômage perçoit les cotisations des personnes en attente d'occupation temporaire.

3 Le montant de la cotisation des chômeurs est versé mensuellement à l'autorité compétente.

Art. 22 Occupation temporaire (nouvelle teneur)

1 L'autorité compétente propose aux chômeurs ayant épuisé leur droit aux indemnités fédérales une occupation temporaire, correspondant dans la mesure du possible à leurs aptitudes professionnelles, dans l'administration cantonale ou les établissements et fondations de droit public.

2 En cas de chômage prononcé et persistant au sens de la loi fédérale, le Conseil d'Etat peut également promouvoir l'occupation temporaire de chômeurs au sein des administrations communales, des administrations et régies fédérales ainsi que de l'économie privée.

3 La charge financière de l'occupation temporaire des chômeurs est assumée par le budget de l'Etat.

4 En tant qu'employeur, le Conseil d'Etat fixe notamment les principes de rémunération des chômeurs occupés, dans le cadre d'un contrat de droit privé.

5 Il garantit, en cas d'incapacité passagère de travail, totale ou partielle du chômeur, une compensation de la perte de salaire pour une période déterminée équivalant à la moitié de la durée de l'engagement.

RAPPORT DE LA MINORITÉ

Ce projet de loi déposé en avril 1997 a été l'un des derniers sujets traités par la Commission de l'économie durant la précédente législature.

Le but de ce projet était de modifier certains articles de la loi cantonale en matière de chômage concernant plus précisément les PCMM (prestations de chômage en cas de maladie et de maternité). Ce chapitre de la législation genevoise n'a pas été modifié lors de la révision votée en juin 1997.

Le but des PCMM est d'offrir aux chômeurs qui le désirent la possibilité de s'assurer contre la perte de gain en cas de maladie ou de maternité. La loi fédérale ne verse des prestations que pendant les 30 premiers jours de maladie. Pour être assuré au-delà de cette limite le chômeur doit contracter une assurance privée. Pour encourager les chômeurs à s'assurer, le canton de Genève a prévu dans la législation cantonale une assurance perte de gain pour les chômeurs (les PCMM). L'avantage de cette assurance est d'éviter que des chômeurs, malades pendant plus de 30 jours, se retrouvent à la charge de l'assistance publique s'ils n'ont pas d'économies.

Cette législation soulève quelques problèmes d'application que ce projet de loi avait pour objectif de corriger. Il y a notamment le problème de la couverture en cas de maladie pendant l'occupation temporaire. Sur cette question, une motion a été votée par le parlement en octobre 1992 (M 775-A) A ce jour le Conseil d'Etat n'a pas donné de réponse malgré les promesses répétées de l'ancien Conseiller d'Etat, M. Maître, qui a indiqué à plusieurs reprises que le dossier était à l'étude et que nous allions avoir une réponse dans les meilleurs délais !

Se pose également le problème des personnes qui tombent malades à la fin de leur période de droit au chômage. Les PCMM n'étant pas versées au-delà du délai cadre fédéral. En d'autres termes, pour toucher la totalité des 270 indemnités prévues par la législation sur les PCMM, il est préférable de tomber malade au début qu'à la fin de la période de chômage.

Enfin, le projet propose quelques autres modifications dont certaines ont été prises en compte lors de la modification de juin 1997.

En commission, l'ancienne majorité a refusé le vote d'entrée en matière par 7 voix contre 6 (3 AdG, 2 S et 1 Ve). Ce vote a pour conséquence que le projet n'a de fait pas été étudié par la commission. Etant donné qu'il s'agit d'un sujet technique, ce projet ne peut pas être accepté sans faire l'objet d'un travail en commission.

Compte tenu du changement de majorité intervenu depuis le vote en commission de ce projet de loi, l'ancienne minorité vous invite, Mesdames et Messieurs les députés, à renvoyer ce projet à la Commission de l'économie.

Premier débat

Mme Marie-Françoise de Tassigny (R), rapporteuse de majorité. Je pense que malheureusement le contexte de la situation budgétaire de l'Etat ne nous permet absolument pas d'entrer en matière sur cette extension des PCMM, c'est-à-dire les prestations cantonales en cas de maladie.

De plus, il faut vraiment souligner que si cette extension avait lieu un vote informatif aurait pour conséquence immédiate de traiter les auxiliaires de l'Etat de la même manière, ce qui aggraverait encore plus la situation financière. Donc, pour moi, la situation est vraiment très claire : il faut refuser ce projet de loi !

M. Pierre-Alain Champod (S), rapporteur de minorité. Ce rapport vient un peu tardivement devant cette séance plénière. En effet, c'est un des derniers points qui a été traité sous l'ancienne législature.

Depuis une année, il y a eu des votations et une nouvelle majorité. Il est clair que, si l'on vote ce soir, le vote sera extrêmement différent de celui de la commission et mon rapport de minorité deviendra un rapport de majorité. Néanmoins, le problème des PCMM reste entier. Ce projet de loi n'avait pas pour but de modifier profondément tout le système des PCMM mais de corriger un certain nombre de dysfonctionnements qui existent bel et bien actuellement.

Ce sujet est extrêmement technique ; de plus, entre le dépôt de ce projet de loi et la séance d'aujourd'hui, la loi sur le chômage a été modifiée sur quelques articles, ce qui signifie qu'un vote ce soir du projet tel quel pourrait poser des problèmes de cohérence à l'intérieur de la loi. Il faudra donc faire quelques amendements à ce projet en commission. C'est la raison pour laquelle je vous propose de renvoyer cet objet à la commission de l'économie. Nous pourrons ainsi traiter ses aspects techniques et modifier les articles qui posent problème. Il ne s'agit pas de révolutionner le système mais de corriger certains dysfonctionnements.

Le président. Le renvoi en commission ayant été demandé, je prie les orateurs de ne s'exprimer que sur ce renvoi.

Mme Nicole Castioni-Jaquet (S). J'exprimerai sur le renvoi de ce projet de loi à la commission de l'économie. Auparavant je relèverai un petit détail : il est bien agréable de revenir parmi vous un an après pour traiter les mêmes sujets que j'avais laissés en partant. C'est agréable parce qu'on n'a pas l'impression d'être partie très longtemps.

Je vais évidemment soutenir ce renvoi à la commission de l'économie en appuyant ce qu'a dit mon collègue Pierre-Alain Champod, en précisant en particulier que ce projet de loi a été déposé il y a une année et qu'entre-temps la loi sur le chômage a effectivement été modifiée. Par ailleurs, la majorité dans cette enceinte a également changé.

Madame la rapporteuse, vous signalez qu'il y a un vide juridique dans le système actuel, et vous avez évidemment raison. Je pense donc que nous devons absolument légiférer. Quand vous parlez de prudence par rapport aux finances, je suis un peu étonnée que certaines personnes se soient élevées contre la taxe prévue pour les piscines privées et que personne ne se lève sur certains bancs quand il s'agit des problèmes des chômeurs qui ne peuvent pas toucher de prestations cantonales quand ils sont malades et en fin de droits. (Commentaires.) Oui, mais la piscine me semble quand même un peu moins importante ! Je poursuis en disant qu'il faut effectivement renvoyer ce projet de loi à la commission de l'économie.

M. Alain-Dominique Mauris (L). Nous soutiendrons le renvoi en commission. Je voudrais rappeler le sujet abordé, car ce que vient de dire ma préopinante est totalement incohérent : il ne s'agit pas de supprimer des indemnités à des chômeurs, mais bien de prévoir un relais de ces indemnités pour certains chômeurs.

Il est judicieux que ce sujet, qui paraît compliqué au premier abord mais qui est en fait très simple, soit réétudié.

M. Bernard Lescaze (R). Le groupe radical souhaite effectivement ce renvoi en commission. On voit que les choses sont plus mobiles que n'a l'air de le dire Mme Castioni, puisqu'en une année il y a déjà eu des modifications telles qu'il faut reprendre attentivement ce texte.

Nous souhaiterions que la commission se livre à un chiffrage des propositions qui sont faites car, de part et d'autre, on nous dit que cela ne coûtera pas trop cher mais aucun chiffre n'est articulé et nous souhaiterions que le renvoi en commission soit l'occasion de nous donner des chiffres un peu plus précis quant à la charge supplémentaire pour le budget de l'Etat.

Mme Magdalena Filipowski (AdG). Nous soutenons un renvoi en commission de l'économie afin de pouvoir étudier les différentes lacunes des PCMM.

Je tiens à souligner que les PCMM instaurées en 1984 n'ont pas été modifiées depuis. Il est important de savoir qu'en 1984 les indemnités fédérales de chômage étaient fixées à 250. Aujourd'hui, elles sont au nombre de 520. Cela veut dire que le chômeur se trouve pendant une durée de dix mois ni couvert par l'assurance fédérale de chômage car malade, ni couvert par les PCMM genevoises car elles sont restées limitées à 250 indemnités.

Mis aux voix, ce projet est renvoyé à la commission de l'économie.