République et canton de Genève

Grand Conseil

M 1213
18. Proposition de motion de Mmes et MM. Françoise Schenk-Gottret, Fabienne Bugnon, Alain Etienne, Christian Ferrazino, Laurence Fehlmann Rielle, Alain Vaissade, Rémy Pagani et René Ecuyer concernant le projet d'aménagement du territoire sur la région de Genève Sud. ( )M1213

Le GRAND CONSEIL de la République et canton de Genèveconsidérant :

- l'importance d'un aménagement du territoire cohérent et répondant à des objectifs sociaux, environnementaux, économiques et culturels ;

- la difficulté croissante à mettre en oeuvre des politiques en matière d'aménagement du territoire compte tenu des découpages institutionnels, qui ne correspondent plus aux découpages fonctionnels ;

- la pertinence et l'importance de la notion de développement durable comme approche de l'aménagement du territoire ;

- l'étude Genève Sud Durable, consistant en une application des principes du développement durable à l'aménagement du territoire et portant sur le territoire de six communes genevoises situées entre l'Arve, l'Aire et la frontière franco-suisse ;

invite le Conseil d'Etat

à développer un projet d'aménagement du territoire visant à mettre en application les principes d'action de l'étude Genève Sud Durable :

• une approche intercommunale des questions d'aménagement du territoire ;

• la nécessité d'un rééquilibrage de l'urbanisation entre les quartiers pour retrouver une mixité sociale et fonctionnelle à l'intention des personnes dont la vie quotidienne se déroule dans le quartier ;

• l'articulation des localisations des futures zones de logement, d'emplois, de commerces et de services aux infrastructures de transports publics pour susciter un report modal et éviter d'avoir à construire de nouvelles routes, conformément à la motion 1196 ;

• le lancement d'un concours en vue de la création d'un concept d'aménagement pour l'ensemble du périmètre Bachet de Pesay-La Praille. L'objectif est de créer un pôle d'agglomération cohérent dont l'accessibilité est axée sur les transports publics ;

• la création d'une entité bocagère et la réalisation d'un réseau agro-écologique de l'Aire à l'Arve.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Une des fonctions de l'Etat est d'être l'acteur d'un aménagement du territoire cohérent en fonction d'un certain nombre d'objectifs qu'il s'est fixé et qui renvoient à l'intérêt général. Actuellement, cette cohérence n'est pas assurée à Genève, pour plusieurs raisons :

1. les objectifs sociaux, environnementaux et économiques de l'aménagement du territoire ne sont pas clairement énoncés, ou lorsqu'ils le sont, les moyens manquent pour les atteindre ;

2. l'absence d'objectifs clairs et de moyens pour les atteindre se traduit concrètement par l'absence de cohérence en matière d'aménagement, celui-ci se résumant souvent à une gestion du territoire au coup par coup ;

3. la politique sectorielle des transports urbains et régionaux est largement déconnectée de celle de l'urbanisation, ce qui débouche sur des incohérences, telles que l'implantation d'entreprises (les Services industriels dans la zone industrielle du Lignon en sont un bon exemple), d'écoles (le Cycle de Bois-Caran, le Collège de Claparède par exemple), voire d'hôpitaux (l'hôpital de gériatrie) sans accès aux réseaux de transports publics.

Ces constats sont tout particulièrement valables pour la région de Genève Sud, c'est-à-dire la portion du territoire cantonal comprise entre l'Arve, l'Aire et la frontière franco-suisse. Ce territoire se caractérise par l'abondance de grands projets d'infrastructure et d'équipement, dont certains sont réalisés, d'autres en cours d'élaboration ou en gestation. Ces projets ne sont pas pensés les uns en fonction des autres et ne sont pas intégrés à une vision cohérente et globale de l'aménagement du territoire. On citera pour mémoire :

- le prolongement de la ligne 13 et la couverture de l'avenue des Communes-Réunies aux Palettes ;

- le contournement autoroutier de Plan-les-Ouates ;

- la route inter-quartier dite - "; Voie Cottier " ;

- le P+R en ouvrage du Bachet-de-Pesay ;

- le projet de stade à la Praille et l'ouverture de la ligne de chemin de fer Cornavin-La Praille aux voyageurs ;

- la ligne TGV La Praille-Latoy ;

- le projet d'hypermarché dans la jonction autoroutière de Perly.

Nous avons affaire à une juxtaposition de projets dont certains sont contradictoires. Relevons par exemple la volonté affirmée par les pouvoirs publics de susciter un usage accru des transports publics et les projets de nouvelles infrastructures routières suburbaines telles que la Voie Cottier, ou la volonté de promouvoir la vie du centre-ville et le projet d'un centre commercial dans une jonction autoroutière, déconnecté du réseau des transports publics et contribuant à accroître la concurrence commerciale à l'égard du centre.

Les observations qui viennent d'être énoncées sont à l'origine de l'étude Genève Sud Durable, qui poursuit trois objectifs :

1. se doter d'une conception globale en matière d'aménagement du territoire qui soit basée sur les trois principes du développement durable : la responsabilité écologique, la citoyenneté participative et l'économie solidaire;

2. proposer une mise en cohérence des différents projets touchant la région de Genève Sud en fonction de la conception globale retenue ;

3. émettre des recommandation en vue de mettre en pratique les propositions formulées.

Un diagnostic approfondi du territoire de Genève Sud a montré que l'urbanisation de cette zone est fortement déséquilibrée. En particulier, on notera une absence de mixité fonctionnelle et une absence de mixité sociale. Concernant ce dernier aspect, relevons en particulier la dégradation du climat social dans certains quartiers.

Ce diagnostic a également mis en évidence que l'absence de vision globale dans l'aménagement de la région de Genève Sud s'étendant sur six communes découle de l'absence de véritable intercommunalité.

Il a enfin mis en relief l'existence d'un lieu à très forte potentialité de développement : la zone comprise entre le Bachet-de-Pesay et l'emplacement du futur stade de La Praille. Ce lieu jouit d'une très bonne accessibilité grâce à la convergence de l'autoroute de contournement, de la ceinture intermédiaire et du réseau de tramway. Assez convoité, il constitue une centralité en devenir.

Suite à ces constats, l'étude préconise un certain nombre de principes d'intervention :

- rééquilibrer l'urbanisation dans les quartiers pour retrouver une mixité sociale. Pour atteindre cet objectif, elle propose de dédensifier les secteurs fortement urbanisés, de geler la zone de développement sur ces territoires et de densifier des quartiers de villas ;

- favoriser une meilleure mixité fonctionnelle, afin que les quartiers d'habitation de la région de Genève Sud ne soit pas une banlieue dortoir. L'étude préconise le développement du commerce de proximité d'activités artisanales, la disposition de locaux pour les habitants, l'équipement des quartiers en lieux de rencontre tels que des cafés restaurants, un urbanisme de proximité favorisant les déplacements à pied ;

- articuler la localisation des futures zones de logement, d'emplois, de commerces et de services aux infrastructures de transports publics pour favoriser l'utilisation d'autres moyens de transports que l'automobile et éviter d'avoir à construire de nouvelles routes ;

- développer une conception globale de l'aménagement du territoire à l'échelle du territoire de Genève Sud. Cet objectif nécessite une approche intercommunale des questions d'aménagement du territoire qui pourrait faire l'objet d'une loi ;

- penser le pôle Bachet-de-Pesay - La Praille comme une vaste interface de transport et une centralité urbaine. Ce lieu, appelé gare de Genève Sud, dans l'étude deviendrait un véritable lieu d'activités commerciales et un noeud de transports publics pensé comme un tout cohérent. Pour atteindre cet objectif, l'étude Genève Sud Durable propose un concours d'aménagement de l'ensemble du périmètre, intégrant aussi bien les aspects transports que les aspects équipements.

Les motionnaires adhèrent à ces principes d'intervention et souhaitent que le projet d'aménagement du territoire "; Genève Sud Durable " serve d'exemple et puisse être appliqué à l'ensemble de la région genevoise.

Au bénéfice de ce qui précède, nous vous remercions, Mesdames et Messieurs les députés, de réserver bon accueil à notre projet de motion.

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Débat

Mme Françoise Schenk-Gottret (S). Cette proposition de motion sur l'aménagement du territoire concerne six communes du sud de Genève, comprises entre l'Arve, la frontière française et l'Aire.

Actuellement, il est fort difficile d'instaurer des politiques en matière d'aménagement du territoire. En effet, les limites géographiques institutionnelles ne correspondent plus aux limites fonctionnelles, et c'est là toute la problématique des villes.

Fribourg s'est doté d'une loi sur l'agglomération. Le canton du Valais étudie la suppression des districts et le regroupement des communes. Genève devra suivre cette réflexion.

Le développement durable, avec ses trois composantes économique, sociale et environnementale, est admis, voire intégré maintenant à l'aménagement du territoire.

L'étude du groupe «Genève Sud Durable» est disponible, avec ses propositions constructives. Notre motion est le suivi logique, au niveau institutionnel, de toutes ces considérations.

Ces dernières années, nous avons assisté, en matière d'aménagement, à une politique du coup par coup. Je citerai, pour mémoire, le prolongement du tram 13 et la couverture de l'avenue des Communes-Réunies aux Palettes; le contournement autoroutier de Plan-les-Ouates; le projet de la voie dite Cottier; le P+R du Bachet-de-Pesay; le projet de stade à la Praille et le Barreau Sud.

Actuellement, trois principes du développement durable doivent être à la base de l'aménagement : la responsabilité écologique, la citoyenneté participative, l'économie solidaire.

Si nous faisons le diagnostic de Genève Sud, nous constatons une urbanisation très déséquilibrée, sans mixités fonctionnelle et sociale. Nous notons même une dégradation du climat social dans certains quartiers.

Il apparaît que la zone comprise entre le Bachet-de-Pesay et l'emplacement du futur stade de la Praille présente une forte potentialité de développement. L'accessibilité est bonne, grâce à la convergence de l'autoroute de contournement, de la ceinture intermédiaire et du réseau tramway. C'est une centralité en devenir. Comment intervenir ? (Commentaires et rires.)

Le président. Madame, ne vous laissez pas troubler par les quolibets de vos collègues.

Mme Françoise Schenk-Gottret. Je ne suis pas troublée, je suis amusée. Je disais que nous pouvions intervenir :

1. en rééquilibrant l'urbanisation des quartiers afin de retrouver une mixité sociale. Réduisons la densité des secteurs fortement urbanisés, gelons la zone de développement, et densifions les quartiers de villas;

2. en favorisant une mixité fonctionnelle dans les quartiers d'habitation avec des commerces de proximité, des activités artisanales, la mise à disposition de locaux pour les habitants, des équipements en lieux de rencontre, un urbanisme de proximité facilitant les déplacements à pied;

3. en articulant la localisation de futures zones de logement, d'emplois, de commerces et de services aux infrastructures des transports publics pour favoriser l'utilisation d'autres moyens de transports que la voiture et éviter d'avoir à construire de nouvelles routes;

4. en considérant le pôle Bachet-de-Pesay/La Praille comme un vaste interface de transports et une centralité urbaine. Nous demandons le lancement d'un concours d'aménagement qui intègre aussi bien les aspects de transports que les aspects d'équipements. Pour ce faire, il faut prévoir une gare Genève-Sud pour les voyageurs.

Dans le but d'une construction globale d'aménagement, une approche intercommunale des questions est absolument nécessaire. Cette approche devra faire l'objet d'une loi.

C'est pourquoi je vous propose, avec le groupe socialiste, de renvoyer cette motion en commission.

M. Claude Blanc (PDC). Avant de voter le renvoi en commission, je voudrais connaître la position du Conseil d'Etat concernant cette motion.

Le Le président. Monsieur le conseiller d'Etat Moutinot, voulez-vous vous exprimer ? Non, vous y renoncez.

Mise aux voix, cette proposition de motion est renvoyée à la commission d'aménagement du canton.