République et canton de Genève

Grand Conseil

R 338-A
9. a) Rapport de la commission de l'énergie et des Services industriels de Genève chargée d'étudier la proposition de résolution du Conseil d'Etat approuvant le projet de conception cantonale de l'énergie. ( -) R338
Mémorial 1997 : Développée, 6265. Renvoi en commission, 6292.
Rapport de majorité de M. Pierre Ducrest (L), commission de l'énergie et des Services industriels de Genève
Rapport de minorité de M. Chaïm Nissim (Ve), commission de l'énergie et des Services industriels de Genève
M 1181
b) Proposition de motion de Mme et MM. Chaïm Nissim, Pierre Vanek, René Longet et Elisabeth Reusse-Decrey refusant la conception cantonale de l'énergie. ( )M1181

RAPPORT DE MAJORITÉ

Sous la présidence de Mme Janine Berberat, la commission a étudié la résolution R338 lors des séances du 29 août, 5 et 19 septembre, 10 et 17 octobre 1997. Assistaient à ces séances M. Ph. Joye, chef du DTPE, M. J.-P. Genoud, directeur le l'OCEN, ainsi que Mme L. Boissier et M. R. Beck du même service.

Préambule

La loi sur l'énergie du 7 novembre 1987 demande une révision de la conception au moins une fois par législature. Ceci fut fait en date du 26 août 1993 pour la législature 1989-1993. Celle qui fait l'objet de la présente résolution revient devant le Grand Conseil en dehors du délai imparti principalement pour des raisons de calendrier, son dépôt en plénière étant intervenu en date du 19 septembre 1997.

Technique

Une première version du texte de la conception cantonale de l'énergie a été élaborée en tenant compte des éléments actuels notamment en ce qui concerne la libéralisation des marchés, la politique tarifaire, l'aspect technique et les contraintes politiques liées aux achats d'énergie d'origine nucléaire.

Cette version a été soumise en consultation auprès des milieux concernés qui ont émis certaines critiques quant au manque de cohérence dans la concrétisation, remarques qui ont amené à modifier le projet.

Le texte final présenté par le Conseil d'Etat inclut les demandes formulées par les consultés à savoir les objectifs chiffrés sur les émissions CO2, une structure pour un fonds énergétique ainsi que la création d'une commission de surveillance des marchés de l'énergie. Concernant les énergies renouvelables, une réflexion sur les investissements de la collectivité est prise en compte de même que les options à prendre pour le partenariat public-privé.

Auditions

Association des communes genevoises (AGC). (MM. Hiltpold et Rütsche).

L'association approuve dans son ensemble le projet de conception cantonale de l'énergie. Cette audition qui fait suite à celle du 5 février 1997 sur le même sujet a été demandée par l'association afin de clarifier quelques points importants :

- Le fonds cantonal de politique énergétique pose un problème de gestion, les communes n'étant pas favorables à une entité cantonale unique si les communes y participent.

- Le projet prévoyant de supprimer le rabais aux collectivités publiques pour stopper le déficit des SIG et leur permettre de faire face aux défis du marché de l'électricité doit tenir compte de cet objectif en excluant qu'une partie des sommes dégagées puisse servir à la création d'un fonds.

- Les communes ne sont en général pas favorables à la création d'un fonds, estimant que le canton doit assumer lui-même les moyens de ses ambitions.

- Concernant le projet CADIUM, l'ACG y est favorable et souhaite que le financement soit couvert par les bénéficiaires afin qu'il n'y ait pas d'incidence financière sur le coût de destruction des ordures ménagères pour les communes.

Services Industriels de Genève (M. Fatio, Président).

Quelques remarques et modifications sont souhaitées par les SIG et qui portent sur les points suivants :

- L'objectif de réduction d'énergie nécessaire soit de 10 % en l'en 2005 est ambitieux. De plus, les éléments pris en compte pour le calcul à savoir base 1990 aggrave la réalité en tablant sur 15 à 20 %.

- La création d'une entité régionale n'est pas à prévoir car elle se développera par elle-même.

- Ce n'est pas au pouvoir politique de définir l'orientation des options d'achat et de vente d'énergie. Le contrat de prestations inclut déjà ces éléments.

- La création d'une commission cantonale de surveillance des marchés de l'énergie n'est pas souhaitée.

- La notion de combustible fossile dans le cadre des investissements dans des capacités de productions locales ne devrait faire référence qu'au gaz naturel ; (recommandation des l'an 2000).

- L'action tendant à la rénovation et augmentation de puissance de l'usine hydroélectrique de Chancy-Pougny doit inclure, non seulement la recherche des modalités de financement, mais aussi la diminution des coûts dans le projet.

Travaux de la commission

La commission étant saisie d'un projet de résolution portant le numéro R338, basée sur le texte de la conception cantonale de l'énergie, a choisi par sa majorité de travailler sur le contenu du texte.

Le rapporteur, conscient de la difficulté de reproduire une lecture facile des éléments du texte à la lumière d'amendements internes sur des fragments d'un projet de 57 pages plus les annexes, vous recommande de vous référer, Mesdames et Messieurs les députés à l'ouvrage de base.

Il faut néanmoins citer les amendements acceptés à savoir :

Page 3/ postulat 3

texte amendé : ...politique énergétique ne peut faire l'objet d'un surcoût sur les prix des énergies consommées, dans les respects du droit fédéral et ne trouvera sa solution que moyennant : une base légale...

Page 14

texte amendé : c'est-à-dire renchérir le coût de l'électricité ou libéraliser.(fin du texte)

Page 46

texte amendé : al.3/... dans les cas d'investissement utilisant des combustibles fossiles, le gaz naturel est recommandé dès la période 2000.

Conclusion

La commission de l'énergie et des SIG vous recommande, Mesdames et Messieurs les députés d'accepter le texte de la conception cantonale de l'énergie et son pendant la résolution R338 par 7 oui( 3L,2 R,2 DC) contre 3 non (1 Ve)

Résolution

(338)

approuvant le projet de conception cantonale de l'énergie.

Le GRAND CONSEIL de la République et canton de Genève

vu l'article 10 de la loi sur l'énergie,

décrète

La conception cantonale de l'énergie est adoptée.

RAPPORT DE MINORITÉ

Bien que signé par un seul d'entre nous, le présent rapport reflète la position globale de la coordination- Energie, qui regroupe depuis 15 ans des députés et des militants qui cherchent à impulser une politique énergétique de développement durable. A ce jour WWF, SSES, SPE, PEG, PS, AdG, Chrétiens -sociaux viennent régulièrement.)

1. Politique énergétique genevoise

Quelques rappels historiques :

C'est en 1979 que le peuple genevois a montré pour la première fois par un vote son opposition au nucléaire. (initiative fédérale "; pour un contrôle démocratique du nucléaire "). Cette opposition ne s'est plus jamais démentie depuis. En décembre 1986, le peuple acceptait notre initiative cantonale "; l'énergie notre affaire " (par 57 % de oui), contre l'avis du Conseil d'Etat de l'époque, et contre l'avis de l'OCEN (Office Cantonal de l'Energie). Cette initiative "; l'énergie notre affaire " impose aux autorités cantonales de "; s'opposer par tous les moyens juridiques et politiques à leur disposition à l'installation de centrales nucléaires dans le canton et au voisinage de celui-ci ". Elle propose aussi toute une panoplie de mesures visant à économiser l'énergie dans tous les domaines, notamment dans le parc immobilier et le domaine des transports, en favorisant les transports publics. Le Conseil d'Etat et les partis de l'Entente ont recouru contre notre texte au TF, arguant entre autres que la politique nucléaire ne peut être que du domaine fédéral. Ils ont été déboutés. La loi actuelle L 2 18 découle en grande partie de notre texte, notamment son article 10 qui impose au Conseil d'Etat de proposer au Grand Conseil une Conception cantonale de l'énergie tous les 4 ans. (C'est cette conception que nous examinons aujourd'hui, elle est censée couvrir la législature précédente). En 1990 deux autres initiatives fédérales (moratoire nucléaire et abandon) furent acceptées par les Genevois à une forte majorité (66 % pour le moratoire). C'est ce premier texte sur le moratoire nucléaire, accepté aussi au niveau fédéral, qui détermine aujourd'hui la politique fédérale.

De plus, la libéralisation des marchés de l'électricité est venue confirmer, si besoin était, que l'ère nucléaire est bel et bien terminée. Ce que nous disions s'est donc confirmé, les investissements nucléaires se sont avérés trop lourds, impossibles à amortir. Les contrats nucléaires signés avec des centrales françaises se sont avérés de mauvaises affaires, et EOS cherche aujourd'hui à s'en dégager. 2.3 milliards investis à Leibstadt sont des investissements échoués, (inamortissables) et inutiles ! Nous demandons que ces contrats nucléaires, notamment ceux signés avec la France par l'intermédiaire de CNP - Centrales nucléaires en participation SA - soient rendus publics. Des milliards ont été gaspillés en pure perte, ces centrales nous coûtent cher et produisent de plus en plus de déchets radioactifs impossibles à gérer à long terme.

2. Processus d'élaboration de la CCE 96  (Conception Cantonale de l'Energie 96)

Le 1er mars 1994 la Coordination Energie publiait dans la presse une courte pré-étude d'évaluation, qui démontrait qu'on peut sortir de notre dépendance du nucléaire en 10 ans, sans augmentation notable du prix du courant. En effet, Genève consomme aujourd'hui en gros 28 % de courant d'origine nucléaire (la moyenne suisse est de 40 %). En substituant ces 28 % par des couplages chaleur-force, des barrages améliorés, des mesures de DSM (Demand Side Management, ou économies chez le consommateur), et des capteurs solaires, on pourrait réduire cette dépendance à zéro en 10 ans. Notre étude chiffrait les investissements nécessaires (ordre de grandeur : 350 mios), évaluait les emplois créés (850 emplois en 10 ans). Mais nous n'allions pas jusqu'à calculer le prix du courant qui résulterait de l'application de ces mesures. En effet, toutes les mesures décrites ci-dessus, à l'exception peut-être des CCF (couplages chaleur-force), produisent du courant à un coût supérieur à celui du nucléaire français (7 ct/kWh). Par exemple, la rénovation de Chancy-Pougny produirait de grandes quantités de courant (20 GWh/an supplémentaires), mais à un coût de 10 à 12 ct/kWh environ. La population genevoise acceptera-t-elle de payer la différence, par cohérence avec ses options antinucléaires ? La question reste posée.

Sur ces entrefaites, M. Philippe Joye, conseiller d'Etat nouvellement élu, choisit de nous prendre au mot et de commander deux études plus complètes (et aussi beaucoup plus chères, ½ million de frs !) à deux instituts, le genevois Logilab et l'américain CERA. Ces deux études devaient vérifier nos calculs approximatifs et évaluer l'augmentation du prix du courant qui résulterait de telles mesures. Elles devaient aussi évaluer l'impact économique global de telles mesures, notamment sur l'emploi.

Les résultats de ces 2 études furent publiés par le DTPE en janvier 95. Il est difficile de résumer ici les conclusions de ces études, que nous tenons à la disposition des députés intéressés. En gros, ces 2 études concluaient qu'il faudrait investir 1.4 milliards et non pas seulement 350 millions pour sortir du nucléaire, et que ces milliards entraîneraient une augmentation du coût marginal du courant de 13 ct/kWh environ, soit une augmentation notable du prix de vente actuel, qui varie entre 7.4 et 29.15 ct/kWh selon les tarifs, l'heure et la saison. Mais il faut préciser ici que les prémisses de ces études ont été délibérément faussées. Par exemple, les SIG avaient indiqué aux 2 instituts concernés que leurs prévisions étaient que la consommation cantonale serait en 2007 supérieure de 29.3 % à celle de 1992. Ce qui fait qu'il fallait substituer non plus seulement 28 % (notre part actuelle de consommation nucléaire) mais 28 + 29.3 %, soit 57.3 %. Ce qui est évidemment beaucoup plus difficile et plus cher.

L'un des 2 instituts se distançait d'ailleurs explicitement de ces prévisions volontaristes et fantaisistes, citant un rapport de l'association faîtière des électriciens allemands, qui prévoyait une légère baisse de la consommation dans 15 ans. (CERA, pp. 26-29) On sait aujourd'hui, après 6 ans de consommation stationnaire, que les SIG eux-mêmes ont réduit leurs prévisions à la baisse, ce qui fait que les prémices des 2 études se sont aujourd'hui avérées fausses, comme nous l'avions dit à l'époque.

En août 1995, 3 membres de la Coordination-énergie (les mêmes que les signataires du présent rapport) déposaient une résolution (R285), qui proposait des objectifs politiques à inclure dans la conception. Nous voulions respecter la loi, qui nous impose de renouveler la conception à chaque législature. Or, il faut tenir compte des longs délais de consultation : Une commission consultative doit d'abord examiner le projet, qui doit aussi être discuté largement dans tous les milieux concernés. Ceci prend un certain temps. Ensuite la commission parlementaire reprend le projet, le discute et l'amende si nécessaire, et cela prend aussi du temps.

En déposant notre projet de conception en 1995, nous voulions d'une part avertir le Conseil d'Etat qu'il était en retard, d'autre part contribuer au débat en proposant un texte qui ajoutait au texte de la conception existante, datant des années J.-Ph. Maitre, des objectifs politiques, soit un ensemble d'actions visant à permettre une décroissance de notre consommation d'énergie brute de 1 à 2 % par an. La Ville de Genève, elle, a déjà pris des mesures qui lui permettent d'abaisser chaque année sa consommation de 2 %. Le canton a lui aussi fait un effort, mais insuffisant faute d'une orientation politique claire, qui devrait permettre par exemple d'améliorer aussi les bâtiments des fondations immobilières et des caisses de pensions gérées par l'état, et de mieux organiser des services aujourd'hui dispersés. Ce texte R285 n'a jamais été discuté en commission, parce que nous attendions la conception officielle du Conseil d'Etat.

A noter sur ce chapitre des longues attentes qu'un autre texte fondamental attend lui aussi sa réalisation: Le 29.9.1992 les mêmes députés, et Robert Cramer, déposaient un projet de motion (M820) pour créer un fonds pour les économies d'énergie et l'encouragement des énergies renouvelables. Bien que la commission de l'énergie en ait discuté durant de nombreuses séances, et ait proposé de nombreuses variantes pour la création de ce fonds, rien ne s'est jamais concrétisé depuis 5 ans. Sur ce point aussi, les SI des villes de Lausanne et de Zurich possèdent de tels fonds depuis des années; nous à Genève jusqu'ici on a pu que freiner et traîner, faute de volonté politique claire et clairement affirmée! (sur ce point un PL 7759 a été récemment déposé, les choses pourraient donc avancer)

3. La CCE 96 enfin déposée

En septembre 1996 le premier projet de CCE 96 fut enfin mis en consultation. Ce projet avait le mérite de chiffrer à 550 millions la somme des investissements nécessaires pour sortir du nucléaire. (p.56) Mais il ne disait pas où prendre ces 550 millions sur 15 ans. (pour mémoire et pour comparaison les SIG investissent 100 à 150 millions par an). De plus, ce premier projet oubliait complètement de se fixer des objectifs politiques, ce que faisait notre R285. Ce dernier reproche, que nous avons mis en évidence dans la consultation, a ensuite été corrigé dans le sens de nos demandes, puisque la version actuelle de la conception, datée d'avril 97 et résumée par la R 338 qui vous est soumise ce soir, propose à la p 6 des objectifs politiques tout à fait raisonnables, ressemblant en grande partie à ceux que la Ville de Genève avait mis au point il y a 5 ans. Mais... mais...

En récrivant cette dernière version de la conception, ses auteurs ont "; oublié " la p. 56 de leur version précédente, qui proposait de sortir du nucléaire en 15 ans, en investissant 550 millions. En fait, ils ne se situent plus dans cette perspective-là. Ils se contentent de sinuer, d'osciller longuement, sans prendre parti, entre 2 options politiques, très éloignées l'une de l'autre, et contradictoires en grande partie :

- D'une part la libéralisation des marchés de l'électricité, qui nous est peu ou prou imposée par l'Union européenne depuis juin 1996, nous propose une baisse des prix pour les gros consommateurs, qui pourront se fournir là où le courant est le moins cher, soit dans les centrales à charbon rouillées et polluantes de l'est européen. Dans cette perspective de libéralisation pure et dure, les nouveaux barrages suisses deviendraient des investissements échoués, les prix baisseraient, les petites entreprises électriques locales feraient faillite, (p. ex EOS, ou les Force Motrices Valaisannes !) le contrôle politique sur la production disparaîtrait, et l'éco-dumping deviendrait la règle. (Eco-dumping: On achète là où c'est moins cher, même si ça pollue)

- D'autre part l'idée que pour sortir de notre dépendance du nucléaire il nous faut un contrôle politique sur l'économie, quitte à accepter de payer plus cher un courant de meilleure qualité. C'est dans ce sens que vont les initiatives fédérales "; centime solaire " et "; énergie-environnement ", déposées en 1995, ainsi que celles des Verts ("; taxer l'énergie et pas le travail ", déposée en 1997) et de la CAN (coordination anti-nucléaire, récolte de signatures imminente: Pour participer, s'adresser à Contratom, cp 65, 1211 Genève 8, tél. 781 48 44)

Les auteurs de ces initiatives complémentaires observent que depuis 20 ans, les prix du pétrole ont chuté d'un tiers, constituant une désincitation massive à toute politique volontariste de l'énergie, à toute valorisation d'autres sources d'énergie. Des milliers d'emplois dans des innovations essentielles n'ont pu se créer; les incitations économiques vont ainsi à rebours du bon sens. Ce bas prix de l'énergie est aussi considéré comme coresponsable du chômage structurel, puisqu'il incite à substituer le travail par l'énergie. Le correctif à cette évolution négative est tout simple, à portée de main: revaloriser le prix de l'énergie.

D'où l'idée d'une taxe sur les énergies non-renouvelables. L'effet incitatif est double dans ce sens qu'en renchérissant le prix de l'énergie non renouvelable, la taxe (qui n'est pas un impôt) rend rentables le s économies et le remplacement par d'autres énergies, et que son produit peut précisément être affecté à cette tâche. Taxe dont les recettes diminueront à mesure que diminuera l'emploi des énergies non-renouvelables - mais dans cette mesure précisément on a aussi moins besoin de son produit.

Plusieurs possibilités sont ouvertes :

- Pour financer une autre politique énergétique ("; l'initiative solaire ": une redevance de 0.5 centimes au kWh sur les mêmes agents, destinée à favoriser l'énergie solaire et l'usage rationnel de l'énergie, redevance limitée à 20 ans)

- Pour rectifier les distorsions actuelles : (l'initiative "; énergie environnement ": une taxe d'incitation sur l'ensemble des agents énergétiques non-renouvelables, restituée aux entreprises et aux ménages, et comprenant une disposition prévoyant que 8 ans après son entrée en vigueur, la consommation sera stabilisée puis réduite de 25 % en 25 ans)

- Pour diminuer la charge pesant sur le travail

- Pour financer la sécurité sociale (initiative des verts)

Ces pistes sont complémentaires, et demandent une analyse plus approfondie. Mais des changements de ce type sont indispensables.

C'est dans ce sens que va la taxe de 0.6 ct/kWh votée dernièrement par le Conseil national, mais refusée par le Conseil des Etats, qui doit être prélevée sur toutes les énergies non-renouvelables, y compris les énergies non-renouvelables suisses, pour éviter la discrimination. Cette taxe doit aussi servir à aider les barrages suisses à amortir plus rapidement leurs installations, puisqu'ils produisent de l'énergie renouvelable.

Ce dilemme est au centre du débat aujourd'hui: Sommes-nous prêts à payer à un juste prix un courant plus propre ? A quel prix évaluer une politique énergétique durable ? Nous sommes quant à nous convaincus que s'il est bien informé le peuple répondra oui : C'est la seule solution praticable !

La CCE 96, dans sa nouvelle mouture, telle qu'elle ressort de la consultation, se présente dans 2 versions différentes: Une version courte, qui est l'exposé des motifs de la R338. Et une version plus complète, dans une brochure annexée. Les députés de la commission de l'énergie ont choisi de se prononcer sur la version plus complète. Qui oscille encore plus, sinue, entre 2 lignes contradictoires, sans jamais prendre clairement parti:

- Les impératifs du développement durable d'une part, qui constituent l'un des pôles de ce texte, commanderaient un meilleur contrôle politique sur la politique énergétique, donc une augmentation de certains tarifs au moins, le renouvelable coûtant plus cher que le polluant. En effet : "; Actuellement les coûts externes de l'énergie, ou coûts des impacts induits par sa production, sa distribution et son utilisation, ne sont pas imputés à ceux qui les suscitent ou directement aux utilisateurs mais à la collectivité et aux générations futures. Cette situation est de nature à fausser la concurrence entre les divers agents énergétiques, notamment renouvelables, compromet les investissements dans les économies d'énergie et impose des charges considérables aux générations à venir. Afin de progresser dans le sens du développement durable, il est aujourd'hui indispensable de développer des instruments fiables permettant l'internalisation de ces coûts. Celle-ci aura l'avantage de fournir une meilleure base économique aux décisions cruciales de l'économie et de la politique énergétique. " (p. 28 du texte long).

- Les impératifs d'une libéralisation pure et dure d'autre part. Si notre conception postule un prix du courant "; aussi bas qu'économiquement possible " (p. 31 du texte long), comment peut-elle à la fois proposer un prix bas et un prix qui englobe les coûts externes ? Comment peut-on dans la même conception proposer d'augmenter et de diminuer les prix ? Les chapitres 3, 4 et 5 sont pleins de ces contradictions, et de ces sinuosités. Certes, on peut argumenter que certaines de ces contradictions ne sont que des descriptions objectives des possibles.

Certes aussi, des comptabilités analytiques permettront un meilleur contrôle et une meilleure visibilité des subventions croisées et des coûts cachés. Certes enfin, il existe des variantes atténuées de libéralisation qui permettent à la fois une meilleure transparence et un contrôle politique des coûts, intégrant les coûts externes dans les prix!

La minorité "; alternative " de la commission, devenue entre-temps la majorité du Grand Conseil, à la faveur des élections, proposera le refus de la CCE 96, trop complexe, contradictoire et illisible pour être amendée en plénière. (ou même en commission, d'ailleurs !)

Ensuite la minorité proposera dans une motion, ci-jointe, les lignes directrices d'une conception amincie, qui ont du moins le mérite d'aller clairement dans le sens du développement durable, dans le sens que demandent une majorité de genevoises et de genevois, comme ils l'ont montré dans 4 votes populaires successifs. Ces lignes directrices nous permettront d'attendre sereinement le dépôt par le nouveau conseil d'état d'une véritable conception complète.

4. CCE 96 : 2 lettres qui changent tout !

La commission de l'énergie et des SIG a consacré 4 séances à l'examen de la nouvelle mouture de la CCE 96. (Avec les délais de consultation cette CCE 96 aurait dû s'appeler désormais CCE 98 !) Elle a choisi de n'étudier que le texte long, comme déjà dit plus haut. Les commissaires de l'entente ont d'autre part choisi d'affaiblir encore le texte déjà très contradictoire proposé, profitant de leur très provisoire majorité en commission. C'est ainsi que le député Hervé Burdet se crut autorisé à rajouter un "; NE " dans la formulation du 3e postulat, qui devenait ainsi : "; le financement des mesures de politique énergétique NE peut faire l'objet d'un surcoût sur le prix des énergies consommées... "

Amendement approuvé par l'ancienne majorité néo-libérale, qui a au moins le mérite de la clarté, et qui révèle à quel point les chantres du néo-libéralisme sont contradictoires : Comment en effet approuver une politique énergétique quelle qu'elle soit en refusant en même temps de lui donner les moyens financiers nécessaires ?

Débat

M. Pierre Ducrest (L), rapporteur de majorité. Il convient de rappeler ici que, selon la loi sur l'énergie du 7 novembre 1987, il y a une obligation d'une révision de la conception cantonale de l'énergie au moins une fois par législature. La première révision a eu lieu pendant la législature 1989-1993. La seconde fait l'objet de la présente résolution en dehors du délai imparti pour la législature. Cela pour différentes raisons essentielles. Premièrement : la libéralisation des marchés au 1er janvier 1998 qui a demandé au Conseil d'Etat une étude et une concertation plus larges de ce rapport.

Deuxièmement : les retards pris dans cette enceinte font que ce rapport arrive ce soir. Monsieur Nissim, j'ai été fort surpris en lisant votre rapport de minorité. Vous êtes un grand innovateur. J'ai vainement cherché dans ce document un BVR pour payer ma quote-part à la publicité que vous faites pour un groupuscule qui soi-disant défend l'énergie. A la page 10, il est mentionné qu'il faut s'adresser à Contratom, C. P. p 65, 1211 Genève 8, tél. 781 48 44.

D'autre part, je savais que dans ce Grand Conseil certains lobbies agissaient par député interposé. Mais vous, vous allez plus loin puisque les rapports de minorité sont faits directement par ces lobbies. Vous avez la sagesse de l'indiquer de même que vous parlez dans votre rapport des trois mains qui ont signé celui-ci. (Brouhaha. Le président agite la cloche.) Il s'agit là d'une trilogie, bien sûr ce n'est pas l'Orestie, mais ce serait dans votre cas plutôt du Pagnol. Monsieur Nissim, vous êtes l'Escartefigue de l'électron, le M. Brun du neutron et le César de la cellule photovoltaïque ! Néanmoins, vous ne me fendez pas le coeur car vous avez, sur quelques pages du rapport, réussi à proposer une dizaine de fois les mots redevance, taxe et impôt. De même dans la motion le mot taxe est mentionné une dizaine de fois. Les managers de l'industrie genevoise doivent frémir en écoutant ou lisant vos propos quand l'outil de travail est déjà menacé par la conjoncture actuelle. Néanmoins la donne est différente. Le Conseil d'Etat qui a bien étudié son rapport n'a malheureusement pas pu mener à bien la finalité de celui-ci en raison des délais. Dès lors la commission, par sa majorité, avait demandé d'accepter ce rapport. Nous sommes au mois d'avril, soit environ six mois après le début de la nouvelle législature. Il faudrait à mon sens faire une autre proposition : celle de renvoyer ce rapport au Conseil d'Etat afin qu'il peaufine celui-ci avec les données nouvelles et non pas l'accepter tel quel.

M. Chaïm Nissim (Ve), rapporteur de minorité. Je vais vous expliquer, Monsieur Ducrest, ainsi qu'à vos collègues du parti libéral le problème de cette conception et celui du point précédent sur la libéralisation des marchés. Nous avons grosso modo deux grands choix en matière d'énergie. Prenons l'exemple de Chancy-Pougny ou celui de la rénovation de Verbois. Nous pourrions rénover Chancy-Pougny qui est une usine relativement ancienne d'environ cinquante ans. Le coût s'élèverait approximativement à 80 millions, ce qui mettrait le prix kWh supplémentaire produit aux alentours de 11-12 centimes. Nous pourrions envisager cet investissement qui serait rentabilisé à très long terme, soit un amortissement d'environ soixante ans. Ce courant propre à 11 centimes se trouverait en concurrence avec du courant nucléaire français à 7 centimes. Si la libéralisation a lieu ainsi que la loi fédérale le propose, les gros consommateurs seraient encouragés à se fournir au prix les plus bas, c'est-à-dire au nucléaire français à 7 centimes plutôt qu'à l'hydraulique suisse à 11 centimes.

Voilà le dilemme qui est le nôtre aujourd'hui et qui entraîne d'autres inconvénients. Le problème est le même pour un barrage à Rheinfelden sur le Rhin, pour Cleuzon-Dixence ainsi qu'à divers autres endroits. Il existe encore du courant bien moins cher que le courant nucléaire français à 7 centimes. Il est question aujourd'hui de courant charbon tchèque à 3 centimes, de l'énergie nucléaire de Tchernobyl à 2 centimes. Notre choix est le suivant : du courant sale bon marché avec tous les risques que cela inclut (déchets radioactifs, troubles respiratoires, forêts de Bohème qui dépérissent) ou préférez-vous du courant propre local à un prix un peu plus élevé ? (Brouhaha. Le président agite la cloche.)

Au niveau du consommateur, cette redevance sur les énergies non renouvelables représenterait le prix d'une tasse de café par mois et par famille, selon un calcul fait par M. Blondon, nouveau président-directeur de EOS. Pour environ 99 % des entreprises, les coûts de l'électricité représentent aujourd'hui environ 1 à 1,5 % (dans le cas des banques) de la charge salariale. La taxe de 0,6 centime par kWh, prévue par le Conseil national et refusée par le Conseil des Etats, représenterait encore un supplément de 2 % par rapport au 1 % actuel. C'est «peanuts», Monsieur Ducrest ! En revanche pour quelques entreprises grosses consommatrices, tel Kugler qui fabrique des robinets et utilise des fours électriques, de même que pour cinq autres entreprises du canton de Genève, l'augmentation serait plus importante. Pour ces entreprises, nous devrions trouver un moyen de les aider soit en les détaxant, soit en leur accordant un tarif préférentiel, soit en les aidant par d'autres moyens.

En agissant ainsi, nous assurerions la sauvegarde de nos barrages : Cleuzon-Dixence, Chancy-Pougny et Verbois. Voilà le dilemme auquel nous sommes confrontés aujourd'hui.

Deuxième partie : la conception qui nous avait été proposée par le Conseil d'Etat. Elle sinuait, oscillait sans jamais rien décider entre les deux alternatives décrites plus haut : le courant un peu plus cher avec une taxe ou le courant un peu moins cher mais polluant. La conception ne résolvait rien car Philippe Joye n'avait pas non plus le courage de faire un choix clair. Il parlait beaucoup de développement durable, il en parlait beaucoup pour nous faire plaisir à nous et il parlait tout autant de courant le moins cher possible. Il y a toute une série de phrases, que je ne veux pas vous infliger ici, que j'avais découpées concernant la conception de Philippe Joye. Celles-ci étaient totalement contradictoires; parfois à l'intérieur du même paragraphe les deux options restaient ouvertes et Philippe Joye ne parvenait jamais à choisir.

C'est la raison pour laquelle nous avons complètement réécrit l'essentiel des points de la conception, soit environ 14 ou 15 points. Nous avons repris le projet de loi existant que nous avons pratiquement refondu en choisissant clairement la voie du développement durable, la voie d'un courant un peu plus cher mais propre.

Je proposerais de refuser la résolution 338 et de renvoyer la motion 1181 au Conseil d'Etat qui pourra s'en inspirer pour préparer la future conception qui sera celle de l'an 2000. J'espère que cette dernière respectera l'essentiel des propositions que nous faisons concernant les différents barrages.

Une voix. Bravo !

M. Pierre Vanek (AdG), rapporteur. Le rapporteur de l'ex-majorité défend un rapport indiquant que le Grand Conseil accepte l'ancienne conception cantonale de l'énergie; il conclut néanmoins son intervention en disant qu'il serait préférable de renvoyer ce rapport au Conseil d'Etat pour qu'il le peaufine. Il ne défend donc plus les conclusions de son rapport. Je le remercie d'avoir partiellement du moins rejoint notre camp. Il serait effectivement absurde de voter aujourd'hui cette ancienne conception cantonale de l'énergie. Le rapporteur de majorité l'a admis. Vous n'êtes pas obligés de me croire, moi, sur parole, vous pouvez le croire, lui, si vous avez des affinités plus particulières de ce côté-là de la salle.

Cette conception contient certes beaucoup d'excellentes choses. M. Nissim a indiqué des aspects négatifs. Elle est politiquement extrêmement sinueuse, extrêmement contradictoire. Nous ne pouvons donc pas l'accepter.

Quoi qu'il en soit, nous devons une fois par législature réviser la conception cantonale de l'énergie. Adopter post hoc une conception qui aurait dû être acceptée lors de la dernière législature, ne peut que retarder une remise sur le métier qui est urgente et nécessaire. Nous vous proposons de rejeter la résolution qui approuve la conception cantonale de l'énergie. M. Joye et l'ancienne majorité ont eu quatre ans pour réviser et faire adopter une conception qui aurait pu être la vôtre ou une conception de compromis de l'énergie. Cela n'a pas été possible. Je me rappelle que M. Joye en mars 1994, sauf erreur, nous assurait que «dans trois mois» il aurait une conception cantonale qui satisferait tout le monde. C'était du bluff; c'était bidon. Il n'a pas réussi à en accoucher. M. Nissim dit que cette politique était nulle; effectivement tirons un trait d'un commun accord sur cet aspect-là des choses. Cela ne veut pas dire - pour autant - que l'ensemble des travaux engagés et les réflexions dans le cadre de l'élaboration de cette ancienne conception sont à mettre au panier. Cela signifie que ce document n'est pas bon en tant que texte politique d'orientation générale pour ce canton.

Nous avons à vous proposer une motion qui ne prétend pas être elle-même LA nouvelle conception cantonale de l'énergie. Elle tente de résumer un certain nombre d'orientations que nous avons développées au cours de la dernière législature. C'est une motion qui n'a pas d'aspects contraignants. Elle invite le Conseil d'Etat à élaborer une conception cantonale de l'énergie avec une orientation claire qui est celle que nous donnons. Le Conseil d'Etat prendra ses responsabilités. Il tiendra compte de ces indications et il devra nous expliquer son choix dans un délai de six mois d'après la loi. Nous avons perdu la précédente législature en la matière car nous n'avons pas eu une conception avec des objectifs. Nous devrions être en mesure maintenant, dans un délai de six mois, d'avoir une conception cantonale de l'énergie qui incarne réellement les objectifs que les citoyens désirent voir appliquer tels qu'ils figurent dans l'article 160 C de la Constitution.

Je vous propose de rejeter la résolution 338 et je souligne que, s'il y avait quelques velléités de l'accepter, ce n'est pas la conception proposée par le Conseil d'Etat qui vous est soumise mais bien une conception amendée. Je ne citerai qu'un point : le postulat N° 3 qui est l'un des postulats essentiels des premiers principes généraux figurant déjà dans la précédente conception du temps de M. Jean-Philippe Maitre. Ce postulat dit que, dans le respect du droit fédéral et pour financer la politique énergétique, le coût de l'énergie peut faire l'objet d'un surcoût appliqué sur le prix des énergies consommées. En commission, l'ancienne majorité a découvert soudain que ce postulat n'était pas conforme aux accords de l'OMC et à l'esprit libéral qui devait prétendument souffler sur cette République; elle a conçu l'amendement le plus économe - pas d'énergie mais de lettres - dans l'histoire de ce parlement... (Protestations.) ...en rajoutant un «ne» et en disant : le prix des énergies ne peut faire l'objet d'un surcoût, et c'est cet amendement qui a été rajouté. Ce qui signifie que même si vous aviez des velléités d'accepter l'ancienne conception, ainsi qu'amendée par la majorité libéralo-quelque chose de l'ancienne législature, ce ne serait même pas celle-là que vous accepteriez, mais ce serait une conception qui incarne vraiment un esprit que nous venons de rejeter tout à l'heure en votant la résolution concernant le marché de l'électricité. Je vous invite par conséquent à suivre ma proposition.

Le président. Un peu de silence, Mesdames et Messieurs, s'il vous plaît !

Mme Janine Berberat (L). Genève est sans doute le seul canton à s'imposer tous les quatre ans l'élaboration d'une conception cantonale de l'énergie. Cela est-il bien nécessaire ? Est-ce le bon outil ? Est-ce le moment le plus approprié, en fin de législature, pour voter cette conception ? A l'heure de la mondialisation où le plus petit dénominateur commun devient la région, où la libéralisation des marchés de l'électricité et du gaz est imminente, où les clients dits éligibles pourront en toute liberté économique s'approvisionner où bon leur semble, Genève peut-elle réellement concevoir sa politique en énergie à la dimension du canton ? Est-ce une utopie ou un défi ? Sans doute les deux à la fois. Les Genevois ont voté, il est vrai, en 1986 «énergie, notre affaire». Mais aujourd'hui sont-ils vraiment d'accord d'en payer le coût réel ?

En ce sens, la conception cantonale qui nous est soumise a toute sa raison d'être car elle ose prononcer un chiffre pour le coût du renoncement au nucléaire. Elle a aussi le mérite d'être réaliste car elle pose objectivement toutes les contraintes extérieures auxquelles notre politique genevoise est confrontée. Les aspects économiques sont pris en compte, notre interdépendance énergétique est admise, la fragilité de l'approvisionnement genevois est reconnue. Elle répond même au-delà aux objectifs Energie 2000. Elle a aussi le grand mérite d'une large concertation. Les milieux les plus divers ont été consultés et nous avons pu lire leurs avis consignés dans une brochure que vous avez tous reçue. Enfin elle intègre les principes du développement durable qui s'appuie sur les trois notions fondamentales que sont la société, l'économie et l'environnement.

Le décor est bien planté mais l'essentiel demeure dans l'éclairage qui devra être apporté. C'est peut-être là qu'il faut prendre le temps d'une nouvelle réflexion. L'organisation des travaux fait que la conception arrive en fin de législature. Elle a deux chances sur trois que le conseiller d'Etat qui la conçoit ne l'applique pas. Soit parce qu'il ne se représente pas, soit parce qu'il n'est pas réélu. Il serait raisonnablement possible d'envisager qu'elle soit élaborée en début de mandat. Alors pourquoi ne pas renvoyer celle-ci au nouveau conseiller d'Etat à charge pour lui de la revoir, de la remanier selon la politique énergétique qu'il entend mener ? (Brouhaha. Le président agite la cloche.)

Nous ne souhaitons pas, ainsi que le demande la motion 1181, considérer cette conception 96 comme nulle et non avenue. Ainsi que je l'ai commenté plus haut, elle n'est pas à jeter aux orties. Elle est le fruit d'un gros travail. Un travail de concertation pris au sérieux par de nombreuses personnes, groupements et associations, tant dans les milieux économiques qu'écologistes et des utilisateurs. Elle peut très bien rester une base de travail ou tout au moins une référence pour comparaison.

Je vous demande, Messieurs et Mesdames des bancs d'en face, de ne pas voir la conception selon la Coordination énergie, mais de la voir aussi avec les milieux économiques qui ont été consultés; c'est un tout. Le développement durable comprend aussi l'économie. Vous ne pouvez pas en faire abstraction. C'est pourquoi le groupe libéral vous propose de retourner cette conception au Conseil d'Etat pour qu'il en ait d'abord une nouvelle version que nous réexaminerons en commission de l'énergie avec beaucoup d'intérêt. Nous pourrons aussi examiner votre motion.

Le président. Mesdames et Messieurs les députés. J'ai procédé à un constat tout à fait provisoire, bien sûr. Nous sommes soixante-douze dans la salle et j'ai dénombré trente-deux personnes qui, outre l'orateur, parlaient en même temps. Je veux bien que nous soyons un parlement et que nous soyons enclins à parler mais si possible, Mesdames et Messieurs, à tour de rôle. Cela pour la meilleure compréhension et le meilleur déroulement de nos débats. D'avance, je vous en remercie.

M. René Longet (S). J'aimerais vous citer deux chiffres. Celui de la relation entre les énergies renouvelables et les énergies non renouvelables. En Suisse, nous dépendons à 85 % d'énergies non renouvelables; seuls 15 % sont renouvelables. Le deuxième chiffre : dans le monde 25 % de la population consomme 75 % des ressources énergétiques.

Ces deux chiffres à mon avis résument tout le débat et l'ensemble de la problématique. D'aucuns se demandent ici pourquoi faire cet exercice. Pourquoi s'astreindre à ce travail ? Nous sommes dans une situation où nous ne pouvons pas accepter que notre économie ou notre société soient fondées sur une structure énergétique aussi instable que cela. Les chiffres peuvent être contestés; cela serait assez vain, car ce sont toujours les mêmes chiffres cités lorsque ce débat est abordé. Nous avons l'obligation, non pas juridique mais factuelle, d'arriver à changer ces chiffres et ces rapports, et de pouvoir nous fonder de plus en plus sur les seules énergies raisonnablement possibles, celles qui sont renouvelables. Il s'agit d'inverser le pourcentage qui est factuel; il n'est pas durable de dépendre à 85 % de ressources non renouvelables.

C'est pour cette raison que des politiques de l'énergie se sont développées depuis vingt ans. Depuis 1986 nous avons un article constitutionnel à Genève. Depuis 1990, il y a le moratoire et l'article énergétique. Quel combat, Mesdames et Messieurs, pour en arriver à une politique à peu près cohérente et efficace ! Depuis quinze ans nous avons, sur le plan cantonal, davantage hésité, tergiversé, tourné en rond, essayé de faire tout et son contraire : quinze ans d'hésitations ! De bonnes choses ont été réalisées mais sur une base politiquement insuffisante. La base constitutionnelle est excellente, les techniciens sont excellents; mais la volonté politique qui devait faire le lien entre les deux était insuffisante. Une option politique, qui était celle de la majorité, laquelle pendant quinze ans n'a pas voulu respecter le vote populaire d'«énergie, notre affaire», n'a pas donné des missions claires aux techniciens, si bien que nous n'avons effectué que la moitié, voire le tiers du chemin.

Il nous faut aujourd'hui mettre les bouchées doubles pour rattraper ces quinze ans en choisissant une politique forte, ferme, cohérente. C'est pour cela que nous refusons que ces deux textes soient traités à égalité, qu'ils soient renvoyés au Conseil d'Etat en lui laissant en quelque sorte le soin de faire les arbitrages à notre place. C'est nous, et je m'adresse au rapporteur de l'ancienne majorité, c'est nous qui ce soir devons faire le choix de la base à partir de laquelle, Madame Berberat, nous allons ensuite voir les consultations ordinaires se faire, y compris celles des milieux concernés. Cela ne doit pas avoir lieu dans la confusion, ni dans le rapiéçage de toutes sortes de textes contradictoires mais sur une base claire. Celle non seulement de nos options constitutionnelles mais de la réalité factuelle de notre monde.

Nous vous demandons de voter le rapport de M. Nissim; la résolution qui a été proposée n'est plus opérationnelle. Il faut voter la motion 1181 pour assainir la situation et faire enfin ce que le constituant nous demande de faire.

R 338

Mise aux voix, cette proposition de résolution est rejetée.

M 1181

Mise aux voix, cette motion est adoptée. 

Elle est ainsi conçue:

Motion

(1181)

refusant la conception cantonale de l'énergie

Le GRAND CONSEIL de la République et canton de Genève

considérant :

- l'article 10 de la loi sur l'énergie

- la résolution 338 (CCE 96) proposée par le Conseil d'Etat en 96

décrète

1. La CCE 96 est refusée.

2. Le Conseil d'Etat est mandaté pour proposer une CCE 98, après les consultations d'usage, prenant en compte les principes suivants:

1. Introduction générale :

Les autorités cantonales basent leur politique énergétique sur le développement durable. Elles s'efforcent de sortir de notre dépendance des énergies non renouvelables et polluantes. Pour créer de la qualité de vie, et des emplois locaux.

En particulier, les autorités cantonales respectent la volonté populaire de sortir du nucléaire, y compris importé de l'étranger. Elles informeront la population des inconvénients du nucléaire, et des avantages du développement durable, de façon que celle - ci soit en mesure de décider du rythme et du coût à payer pour sortir progressivement de notre dépendance du nucléaire. L'art 160 C Cst est la base de la présente conception.

(Rappel : Un développement est défini comme durable s'il satisfait aux besoins des générations présentes sans compromettre la possibilité pour les générations à venir de subvenir à leurs propres besoins.)

2. Objectifs sectoriels :

Dans ce cadre, les autorités cantonales se fixent au moins les objectifs suivants :

Electricité :

- Augmenter, par rapport à l'état 1990, l'efficacité globale de la consommation - c'est-à-dire diminuer les consommations dans les proportions citées ci-après : - de 10 % à l'horizon 2005 et de 20 % à l'horizon 2015.

Les productions alternatives et décentralisées d'électricité seront encouragées. Citons à ce sujet la M 1114, qui propose la création d'une "; bourse du solaire photovoltaïque ", destinée à encourager la construction, par les SIG, de capteurs solaires à l'intention des citoyens concernés, qui sont prêts à payer une part de leurs achats au prix de revient du photovoltaïque, soit environ 4 fois plus cher que le prix de vente)

La rénovation de Chancy-Pougny, source de kWh abondants, renou-velables et indigène, est une priorité.

Combustibles :

Genève adopte les objectifs d'Energie 2000 mais les reformule de la façon suivante : les consommations de combustibles à population constante doivent diminuer de 15 % en l'an 2000 (objectif Energie 2000) et de 45 % d'ici 2025 par rapport à l'année de référence 1990.

Pour ce qui est du solaire thermique, l'objectif est d'installer ½ m2 de capteurs par habitant, partout où c'est possible.

Carburants :

Les autorités influenceront la constitution du parc automobile vers les véhicules à plus faible consommation par des mesures fiscales, et vers l'encouragement accru des transports publics. (lien avec les concepts circulation, transfert modal vers les TPG)

La limitation des émissions de CO2

Genève adopte les objectifs du programme Energie 2000, à savoir une stabilisation des émissions de CO2 au niveau de 1990, puis une réduction progressive. (v. ACF du 30.10.90 lors de la conférence de Genève sur le climat; v. aussi l'initiative énergie-environnement qui propose 1 % d'amélioration par an) Au delà de ces objectifs, toute diminution de 3 tonnes de CO2 dans l'atmosphère, due à des mesures de rationalisation, autorise une production fossile complémentaire d'électricité émettant 1 tonne de CO2 supplémentaire.

3. Liste d'actions :

Au niveau fédéral, l'Etat de Genève encourage la création de toutes mesures permettant de fixer les prix et tarifs, en fonction de critères écologiques et politiques, évitant ainsi l'éco-dumping.

Dans ce cadre, les responsabilités de l'Etat et des sociétés de production-transport-distribution seront précisées par :

Action 1 La définition d'un contrat de prestations pour les SIG

Ce contrat de prestations définira :

1. La mission des SIG et leur rôle dans la politique énergétique

2. La compensation des manques à gagner financiers qui pourraient résulter de l'accomplissement de cette tâche.

3. La structure des tarifs en fonction des points précédents

4. Les conditions incitatives de rachat du courant issu de sources renouvelables.

5. Les modes de collaboration régionale.

Pour travailler sur ces questions, il est indispensable :

- de connaître dans le détail les coûts aujourd'hui payés par les SIG pour le transport et la distribution d'énergie. Cela implique une comptabilité analytique complète et efficace, telle qu'elle est programmée par les SIG;

- d'étudier l'introduction de tarifs différenciés, qui permettraient de moduler l'augmentation pour certains clients.

3.1. Production hydroélectrique

La production hydraulique du canton est actuellement assurée par les ouvrages hydroélectriques de Verbois, du Seujet et de Chancy-Pougny.

L'usine hydroélectrique de Chancy-Pougny (dont les installations ont 80 ans) doit impérativement être rénovée ces prochaines années. Parallèlement à cette rénovation, des travaux d'augmentation de puissance (11 MW, soit 20 GWh / an ou 3 % de la consommation nucléaire du canton) pourraient être effectués pour des investissements d'environ 100 millions de francs.

Cette action doit être analysée en regard des incertitudes sur le long terme concernant les marchés de l'énergie. Elle s'inscrit dans le plan d'action de la conception cantonale de l'énergie pour les motifs suivants :

- il s'agit d'une production renouvelable et sans émissions;

- le coût de l'électricité produite doit être réévalué. En effet, un démantèlement de l'ouvrage coûterait lui aussi très cher !

Action 2 Rénovation et augmentation de puissance de l'usine hydroélectrique de Chancy-Pougny. Poursuite des études pour les 2 autres sites (Conflan et Vessy) afin d'avancer les dossiers de construction et de résoudre les problèmes écologiques.

Les SIG ont répertorié deux autres sites potentiels de production hydroélectrique: Conflan et Vessy. Conflan pourrait produire 135 GWh/an, soit 5 % de la demande cantonale. Vessy pourrait produire 15 GWh/an. Ces 2 ouvrages seront étudiés.

3.2. Gestion de la demande d'électricité (DSM)

(DSM : Demande Side Management ou gestion des économies possibles chez le client)

Quoique souvent comptabilisés comme des coûts, les montants consacrés à inciter les consommateurs à réduire leur consommation par différents moyens relèvent d'une logique d'investissement concurrente de celle des moyens de production et peuvent largement bénéficier au distributeur. C'est dans ce sens qu'on parle parfois de "; production de négawatts ".

Les actions de DSM peuvent être de plusieurs types: le remplacement des technologies d'usage par des technologies plus efficaces présentant le plus faible coût marginal à long terme; le changement de comportement des utilisateurs, l'ajustement de la fourniture de prestation au besoin. Elles peuvent être promues de diverses manières : signaux tarifaires, information, aides à l'investissement, audits, actions systématiques, etc. Toutes les mesures efficaces ont leur pleine valeur, quelle que soit l'évolution des marchés de la fourniture et de la distribution d'électricité.

On distingue deux trains de mesures DSM: les mesures dites primaires sont celles dont le potentiel est presque certain et le temps de retour bref (potentiel d'économies : 1 à 2 % par an. Coût des kWh économisés: 2 - 8 ct). Les mesures de DSM secondaires ont des temps de retour plus longs, et un potentiel théorique plus important (potentiel d'économies : 10 % de notre consommation actuelle, soit 240 GWh/an. Ou encore 30 % de notre consommation d'origine nucléaire. Coût  20 ct/kWh).

Les opérations de DSM primaires, actuellement conduites dans le canton de Genève, se sont révélées être performantes et doivent être multipliées (programme OGURE). Sur la base des enseignements de ce programme, les coûts des mesures de DSM peuvent être mieux calibrées en vue de conduire des opérations de DSM secondaires à haute performance.

Action 3 Développement des mesures de DSM primaires et secondaires.

3.3. Cogénération

Les technologies de cogénération, ou couplage chaleur force (CCF) produisent simultanément de la chaleur et de l'électricité. On distingue les installations connectées à un réseau de distribution de la chaleur à l'échelle d'un quartier au moins (CCF centralisé) de celles desservant des îlots d'immeubles (CCF décentralisé).

Ces techniques peuvent être cohérentes dans la perspective d'une future internalisation des coûts externes, dans la mesure ou elles produisent moins de CO2 supplémentaire que les diminutions obtenues dans les secteurs combustibles et carburants. (v. ci-dessus)

Action 4 Réalisation d'une turbine à gaz à cycle combiné avec récupération de chaleur sur le réseau de chaleur à distance actuel, éventuellement étendu.

Plusieurs sites réunissant les conditions pour l'implantation de CCF décentralisés ont d'ores et déjà été identifiés par l'OCEN. Ces installations s'inscrivent dans le plan d'action de la conception cantonale de l'énergie pour les motifs suivants :

- elles assurent une production électrique à haut rendement pour un rapport émission de CO2 par kWh très favorable ;

- elles constituent des opérations économiquement rentables à condition d'être réalisées dans le cadre de conditions de rachat de l'électricité correctes et de véritables partenariats entre les SIG et les autoproducteurs.

Action 5 Mise en place d'installations de cogénération exploitées en fonction des besoins de chaleur sur les sites actuellement répertoriés.

La pile à combustible pourrait pénétrer sur le marché dans un délai de4 à 5 ans. Le rapport élevé de production d'électricité/chaleur permet de produire plus d'électricité que les autres formes de cogénération et avec un taux d'émissions favorable.

Action 6 Encouragement au développement de la pile à combustible.

3.4. Consommation de combustibles

CADIOM

Le projet CADIOM (chaleur à distance par l'incinération des ordures ménagères) est destiné à valoriser de l'énergie thermique dégagée lors de l'incinération des ordures ménagères à l'UIOM des Cheneviers par un réseau de chauffage à distance sur la Cité Nouvelle d'Onex.

Cependant l'étude strictement énergétique concernant Cadiom doit impérativement être complétée par une étude concernant les déchets. Il serait en effet inacceptable que le tonnage des déchets à incinérer augmente, ou même qu'il ne diminue pas aussi vite que le recyclage le permet, à cause de Cadiom.

Action 7 Conditionner la réalisation du projet CADIOM au résultat des 2 études demandées, sur l'énergie et les déchets.

(v. à ce sujet la motion M 1169 acceptée par le GC le 23 janv. 98)

3.5.  Actions techniques à développer dans le secteur immobilier

Les actions techniques déjà en cours et à développer sont la mise en application de la loi sur le DIFC, la maîtrise de la consommation de combustibles dans les bâtiments de l'Etat, le développement de l'énergie solaire thermique, la valorisation du bois d'entretien des forêts genevoises et la valorisation des rejets de chaleur (par exemple : rejets de chaleur produits dans le secteur tertiaire pouvant être valorisés pour le préchauffage de l'eau sanitaire dans l'habitat collectif voisin; déchets de papier dont le recyclage permet la production à moindre coût énergétique et environnemental; les déchets de restaurants qui peuvent être valorisés par bio-méthanisation avec l'effet secondaire d'en réduire l'encombrement et, par là, des nuisances de stockage et transport, ou éventuellement par incinération à proximité de preneurs de chaleur).

Ces divers types de valorisations offrent un potentiel intéressant et doivent être exploités, comme le mentionne explicitement l'article constitutionnel 160C.

En résumé, toute expérience pilote sérieuse dans ce domaine devra être encouragée.

Action 8  Poursuite des programmes en cours:

 Mise en place du décompte individuel des frais de chauffage conditionné à la performance. Introduction d'une limite perfor-mentielle pour les bâtiments existant de 500 MJ/m2.an

 Programme de réduction de la consommation dans les bâtiments publics et des organismes qui en dépendent dans le cadre d'un système de management environnemental.

 Développement des installations solaires thermiques et photovoltaïques à Genève.

 Développement du recours aux sources indigènes et renouvelables de chaleur par le bois.

 Valorisation des rejets de chaleur: Etablissement d'un inventaire des sites potentiels regroupant offre et demande de chaleur.

3.6. Consommation de carburants

La réduction de la pollution automobile sera obtenue principalement par le transfert modal vers les transports publics.

Cependant, une modification de la fiscalité automobile est aussi une des voies à explorer dans l'objectif de réduction de la consommation de carburants. Plutôt que d'être imposés selon leur cylindrée, les véhicules seront, par exemple, imposés selon leur consommation normalisée. Le but de cette action est d'inciter les utilisateurs à prendre en compte la consommation au moment décisif de l'achat.

Les voitures électriques qui utilisent du courant nucléaire sont à proscrire.

Action 9 Poursuite des travaux en vue de l'adoption d'une disposition encourageant l'achat de véhicules de faible consommation.

Action 10 (nouvelle) : Le Conseil d'Etat s'efforce, par tous les moyens politiques et juridiques à sa disposition, de proposer réaliser ou promouvoir une taxe sur les ventes d'énergies non renouvelables (combustibles, carburants, nucléaire et gaz). Le produit de cette taxe servira à encourager les productions indigènes et renouvelables.

Cette action 10 se justifie pour les raisons suivantes :

Dans le contexte de la libéralisation envisagée des marchés de l'électricité, les prix risquent de subir des pressions vers le bas. Les compagnies d'électricité risquent d'aller au devant de difficultés financières parce qu'elles n'auront pas la possibilité d'amortir leurs investissements, notamment les investissements dans le renouvelable et l'indigène. Il s'avère dès lors indispensable de soutenir les centrales "; propres " et indigènes, en taxant les autres (nucléaires, charbon, fuel, gaz) et en redistribuant l'argent aux centrales "; propres ". Cette taxe est aujourd'hui indispensable pour qui veut conduire une quelconque politique énergétique. Le Conseil National l'a déjà proposée au niveau fédéral, (0.6 ct/kWh, soit 500 millions par an) mais le Conseil des Etats l'a refusée. Au niveau européen également une telle taxe redistributrice est à l'étude. Au niveau cantonal cette taxe doit être coordonnée avec les niveaux supérieurs, tout en précisant que Genève ira aussi loin que possible dans cette voie. Elle poussera les gens au civisme écologique, et créera de nombreuses places de travail dans le solaire et les économies d'énergie. Le postulat No 3 de la conception de 93 laisse la porte ouverte à cette taxe, mais cette formulation "; le financement des mesures de politique énergétique PEUT faire l'objet d'un surcoût... " ne suffit plus dans la situation actuelle, il faut une certitude.

4. Financement des mesures techniques :

Diverses études aux résultats convergeants chiffrent la dépendance de Genève par rapport au nucléaire, suisse et importé, à 28%. Pour substituer partiellement ces kWh, les investissements nécessaires se monteront à 550 millions en 15 ans. (En plus des 100 millions env. investis annuellement par les SIG). Ces investissements auront un coût marginal moyen de 12-16 ct/kWh, ils auront un impact sur les prix du courant de 10-15 % environ, soit quelques francs par mois pour un ménage moyen. Pour les 5 gros industriels que cette augmentation mettrait en péril, des accommodements seront mis au point.

L'action de l'Etat dans ce domaine doit se renforcer et s'élargir à l'encouragement de tiers opérateurs

Action 11 Au niveau local et intercantonal, il faudra favoriser les synergies entre les compétences existantes, et développer de nouvelles compétences

Si le canton de Genève décide de s'équiper en moyens de production indigènes afin d'assurer son autonomie, il est nécessaire de décider qui finance la volonté d'autonomie, laquelle résulte d'une décision politique. Cela est important si ces équipements produisent de l'électricité à un coût supérieur à celui auquel les SIG ou les entreprises genevoises, dans le cadre de la libéralisation, pourraient s'approvisionner dans le marché européen.

La libéralisation va imposer aux SIG un nouveau défi: Comment réaliser des ouvrages produisant de l'électricité chère - faisant ainsi diverger les coûts de l'énergie genevoise de ceux offerts sur le marché extérieur - pendant que leurs clients importants vont pouvoir s'approvisionner à bon marché hors du canton?

La nécessité d'une taxe sur les énergies non renouvelables prend ici tout son sens.

4.1. Fonds de politique énergétique

Le fonds est destiné à soutenir le financement, de tous projets locaux ou la partie genevoise de projets régionaux conduits par les collectivités et établissement de droit public et le secteur privé, s'inscrivant dans les objectifs de la politique énergétique cantonale.

Le fonds doit être créé par une disposition légale qui en définit le principe et les modalités de fonctionnement.

Le fonds est géré par un conseil du fonds composé de représentants de l'Etat et de techniciens aux compétences reconnues.

Action 12 Constitution d'un fonds de politique énergétique cantonale.

Voir à ce sujet le projet de loi 7759 déjà déposé.

4.2. Les effets des actions techniques sur l'emploi

Les diverses actions de maîtrise des consommations de même que les actions qui substituent des productions locales à des achats extérieurs favorisent le développement de l'emploi. Les retombées économiques d'un programme d'investissement dans des technologies CCF CAD et DSM (Demand Side Management) pourraient être à l'origine de la création d'environ 3000 emplois pendant l'ensemble de la période quinquennale centrée en 2000. (Extrapolation de documents en provenance d'Energie 2000) Ces actions sont un support important à l'économie locale, aspect qui doit être également pris en compte lors des calculs économiques (coûts épargnés sur la politique sociale et économique).

Au-delà de la recherche de solutions dans une stricte vision énergétique, Genève peut saisir l'occasion extraordinaire que constitue la réforme de son système énergétique pour devenir un pôle de compétences en matière de technologies énergétiques. Dans cette perspective, l'Etat devient également un générateur de projets au service de son économie.

En conclusion nous vous présentons la courbe de charge annuelle du canton, avec la forme qu'elle pourrait prendre si les mesures proposées étaient réalisées. Il va de soi que dans la courbe ci-dessus les importations sont de sources renouvelables, de sorte que les importations nucléaires ont été réduites à zéro.

 

La séance est levée à 23 h 25.