République et canton de Genève
Grand Conseil
Séance du vendredi 24 avril 1998 à 17h
54e législature - 1re année - 7e session - 16e séance
PL 7836
Le GRAND CONSEIL de la République et canton de Genève
décrète ce qui suit :
Article unique
La loi sur l'aéroport international de Genève (H 3 25), du 10 juin 1993, est modifiée comme suit :
Art. 36 al 1 (nouvelle teneur)
En contrepartie de la mise à disposition par l'Etat des biens immobiliers et équipements lui appartenant en vue de l'exploitation de l'aéroport, l'établissement assure la charge des frais financiers, soit les intérêts et amortissements encourus par l'Etat à leur sujet, y compris - conformément aux obligations résultant de l'article 40 - les amortissements résultant d'indemnités que l'Etat serait appelé à payer à des riverains de l'aéroport en raison de nuisances qu'ils pourraient subir du fait de l'exploitation de ce dernier.
Art. 38 Compétences du Grand Conseil (nouvelle teneur)
1 Les budgets, approuvés par le conseil d'administration, sont transmis au Conseil d'Etat, avant le 15 septembre de chaque année. Les comptes rendus le sont avant le 15 juin suivant l'exercice clôturé. Ces documents sont accompagnés de rapports explicatifs. Le Conseil d'Etat, après s'être prononcé sur ces documents, les soumet pour approbation au Grand Conseil.
2 Tout projet de construction ou de transformation de bâtiments ou d'installations aéroportuaires portant sur un montant supérieur à 2 millions de francs est soumis à l'approbation du Grand Conseil sous forme d'un projet de loi répondant aux exigences d'une demande de crédit d'ouvrage soumis aux articles 51 à 57 de la loi sur la gestion administrative et financière de l'Etat.
EXPOSÉ DES MOTIFS
Lors de l'adoption de la loi sur l'aéroport international de Genève, le problème de la prise en charge par le nouvel établissement autonome des indemnités que l'Etat pourrait être amené à payer en raison des nuisances résultant de l'exploitation de l'aéroport n'a pas été évoqué.
Bien que les charges financières que l'Etat pouvait être appelé à assumer de ce fait relèvent manifestement des charges financières répercutées par l'art. 36 de la loi sur le compte d'exploitation de l'aéroport, ce qui résulte également de l'art. 40 de la loi, mieux vaut le préciser dans celle-ci pour éviter toute ambiguïté à ce sujet.
Tel est le but des compléments que le présent projet de loi propose d'apporter à l'art. 36 précité.
Le projet de loi propose également une modification de l'article 38 de la loi, afin que le Grand Conseil approuve les budgets et les comptes de l'aéroport, ce qui se justifie non seulement en raison de l'importance de cet établissement, mais en raison de la part du bénéfice qui doit être rétrocédée à l'Etat et dont il s'agit de s'assurer qu'il est effectivement versé.
Par ailleurs, les constructions importantes doivent être soumises à l'approbation du Grand Conseil comme c'était le cas dans le passé et comme c'est le cas pour d'autres établissements publics autonomes.
Au bénéfice de ces explications, nous espérons, Mesdames et Messieurs les députés, que le présent projet de loi recevra un bon accueil de votre part.
Préconsultation
M. Bernard Clerc (AdG). Ce projet de loi vise trois objectifs. Premièrement : prévoir des dispositions permettant de mettre à la charge de l'aéroport les indemnisations éventuelles des riverains de l'aéroport selon le principe du pollueur payeur. Ces questions étaient déjà présentes lors du vote de la loi sur l'aéroport en 1993 et n'ont jamais été mentionnées dans les rapports concernant l'aéroport.
Deuxièmement : permettre l'approbation des comptes de l'aéroport par le Grand Conseil selon l'usage en cours pour d'autres établissement publics. Certains éléments comptables permettent à l'aéroport de minimiser les bénéfices réalisés. L'aéroport tient une comptabilité de type commercial et n'est pas soumis aux règles de la comptabilité publique. Nous avons appris, encore récemment que l'aéroport avait réalisé en fait, lors des trois derniers exercices, 50 millions de bénéfice et non pas §17 millions comme mentionné dans les rapports qui nous ont été communiqués.
Troisièmement : nous demandons que les investissements supérieurs à 2 millions soient soumis à l'approbation du Grand Conseil. Nous vous remercions de réserver bon accueil à ce projet de loi qui pourrait faire l'objet d'un renvoi en commission, compte tenu des nouveaux éléments portés à notre connaissance.
M. Daniel Ducommun (R). Le groupe radical émet de grandes réserves face au projet de loi présenté par l'Alliance de gauche et les écologistes sur l'aéroport international de Genève et son avenir. Cela nous paraît suspect ! (Exclamations.) Bien que nous soyons rassurés par l'absence de socialistes parmi les signataires, il n'en reste pas moins que notre scepticisme reste entier. D'autant plus que, sous le point 54 de l'ordre du jour, les mêmes ou une partie d'entre eux proposent une motion sur la nouvelle compagnie genevoise SWA. Cela reste suspect, Monsieur le conseiller d'Etat !
Serait-ce que les démons du passé qui militaient pour la croissance zéro et une vocation d'aéroport de province pour Genève resurgissent ?
Une voix. Exactement !
M. Daniel Ducommun. Nous avons peur de cela effectivement, Monsieur Dupraz ! Nous sommes résolument en faveur du développement d'une Genève économiquement forte, offrant des conditions cadres de qualité pour celles et ceux qui veulent produire, étudier ou tout simplement consommer.
L'aéroport de Genève est un instrument fondamental dans cette approche. La position politique du groupe radical est claire à ce sujet. Nous ne pouvons pas soutenir les actions d'affaiblissement ou de démantèlement de notre aéroport. L'argument développé dans le projet de loi est celui des indemnités de nuisances que l'Etat est ou sera appelé à payer aux riverains de l'aéroport définies selon la loi fédérale en la matière. La commission des finances a étudié consciencieusement ce dossier, juridiquement compliqué en raison des nombreuses appréciations, recours ou oppositions dont la plupart sont en cours de traitement au Tribunal fédéral. Nous ne jugeons pas pour l'heure les intentions curieuses du Conseil d'Etat de jouer la prescription. Nous reviendrons éventuellement sur ce sujet, Monsieur le conseiller d'Etat. Cela est aussi suspect.
Pour le surplus nous faisons référence au message du conseiller fédéral Adolf Ogi, lequel, lors du transfert de la concession pour l'exploitation de l'aéroport, a formellement écrit que les indemnités que l'exploitant de l'aéroport pourrait être condamné à verser à la suite des prétentions légitimes des riverains, sont à la charge de l'Etat de Genève.
D'autre part, s'il est vrai que le fonds environnement de l'aéroport alimenté par les surtaxes s'élève à près de 50 millions, il sera complètement utilisé ces cinq prochaines années, soit pour les équipements de protection contre le bruit, soit pour des améliorations d'insonorisation.
L'aéroport ne reste donc pas en retrait de toute participation. Quant à lui faire supporter la charge de toutes les indemnités liées aux expropriations formelles et matérielles, cela pourrait entraîner la cessation de l'exploitation de cette infrastructure... (Rires et exclamations.) ...même si cela fait rigoler Ferrazino et son équipe. Deux cent soixante demandes d'indemnités ont été déposées dans les délais. Un jugement favorable du Tribunal fédéral pourrait entraîner des versements de l'ordre du milliard de francs. Voilà les conséquences assassines du projet qui nous est présenté et que nous contestons. Ce qui n'écarte pas la possibilité d'en discuter sereinement en commission.
M. Nicolas Brunschwig (L). Le groupe libéral avait participé à l'élaboration de ce projet de loi sur l'autonomie de l'aéroport, qui nous paraît effectivement un élément essentiel pour lui garantir une réelle autonomie.
Nous considérons que ce projet de loi ne poursuit pas cet objectif et nous n'en sommes guère étonnés au vu de la liste des signataires, qui n'avaient pas participé de manière très positive à son élaboration. Ce projet de loi pose diverses questions dignes d'intérêt qui seront sans doute discutées à la commission des finances. En fonction des débats que nous avons déjà eus, en particulier sur les procédures juridiques qui sont au coeur même de certaines discussions, le Bureau préavise d'envoyer ce projet de loi à la commission des finances.
En tout état de cause, un élément me semble totalement faux, celui d'envisager que ce ne soit pas le canton mais l'aéroport - en tant que tel - qui assume les charges financières. C'est ce qui pourrait résulter, avec toutes les réserves que l'on peut émettre, des différentes attaques qui ont lieu devant les tribunaux et le Tribunal fédéral en particulier.
Lorsque l'accord sur cette autonomisation avait été acquis et conclu, l'Etat de Genève s'engageait à mettre à disposition les terrains nécessaires à l'accomplissement de l'objectif que doit remplir l'aéroport. Nous comprendrions mal que l'Etat mette à disposition le bien-fonds, mais que ce soit à l'aéroport d'assumer les frais liés à des procédures qui existaient déjà au moment où ces biens-fonds ont été mis au bénéfice de l'établissement aéroport. Nous sommes catégoriques sur ce point et nous sommes opposés à cette vision des choses.
De plus, ainsi que l'a rappelé le député Ducommun, un impératif fédéral oblige l'Etat à assumer les éventuels dédommagements financiers qui pourraient résulter de certaines décisions juridiques. Sur les aspects d'autonomie et de transparence, ceux-ci mériteraient peut-être plus de précisions dans les dispositions qui figurent dans la loi. Le rapport de l'inspectorat cantonal des finances donne quelques pistes qui avaient été évoquées lors de précédents débats. Nous sommes prêts à en discuter bien évidemment. L'autonomie implique le respect des règles qui sont supposées présider au fonctionnement des établissements. Le parti libéral restera ouvert sur ce point. Il est clair cependant que l'objectif principal de l'aéroport est d'être performant et de pouvoir continuer à s'adapter en investissant, le cas échéant, pour répondre aux besoins.
M. David Hiler (Ve). Si nous entendons avoir une discussion sereine, Monsieur Ducommun, vous allez être contraint d'utiliser un ton un peu plus mesuré et d'avancer des chiffres un peu plus crédibles. Personnellement, je n'ai jamais entendu parler d'un montant d'un milliard.
Une voix. Oui, plusieurs fois !
M. David Hiler. Je me réjouis de savoir de quelle manière nous allons le payer. Vous souhaitez que ce soit l'Etat de Genève qui paie ce milliard, le cas échéant. Je serais surpris que vous ayez quelque solution à nous proposer; compte tenu du contexte, cela nous paraît difficile.
Il faudrait remettre les choses en place : l'aéroport a accepté - et c'est normal - de payer effectivement tout ce qui concerne la lutte contre le bruit au niveau des bâtiments. Il reste maintenant une somme qui n'est à vrai dire pas connue puisque le Conseil d'Etat, et nous approuvons cette décision, a décidé de ne pas accepter comme telle toute demande qui pourrait lui être adressée au nom de la diminution de valeur de biens-fonds. Celle-ci n'est pas prouvée - et de loin - dans tous les cas. N'oublions pas que certaines personnes ont pu réaliser de bonnes opérations grâce à la proximité de l'aéroport. Il ne s'agit pas de livrer l'aéroport, poings et pieds liés, à ceux qui demandent des indemnités, mais bien de ne verser que celles qui seraient pleinement justifiées. A cet effet, le nouveau Conseil d'Etat a décidé d'utiliser toutes les méthodes juridiques pour le faire et nous le soutenons.
Pour le surplus, il est vrai que ces 50 millions vont être dépensés ces cinq prochaines années sans poser de problème de trésorerie car la taxe est toujours perçue. Par ailleurs, le ton dramatisant qui a été utilisé toujours par le député Ducommun est surprenant, est surprenant... (Remarques et rires.)
Une voix. C'est l'heure, Dupraz!
M. David Hiler. Monsieur le président, vous décompterez ceci de mon temps de parole... (Rires.) ...parce que je ne peux pas lutter à armes égales face aux errements de M. Dupraz!
Le président. Ne vous laissez pas troubler, Monsieur l'orateur !
M. David Hiler. Sur ce point précis, il y a matière à payer une partie de ces indemnités sur cette taxe ainsi que la part de bénéfice qui, selon le rapport de l'inspection cantonale des finances, n'est pas versée à l'Etat en raison de la constitution de réserves «généreuses». Celles-ci sont néanmoins admises dans un certain type de comptabilité. Nous serons bien obligés de résoudre ce problème. Peut-on parler de conséquences financières dramatiques pour l'aéroport ? Non, et vous le savez très bien ! La question est tout de même idéologique. En ce qui nous concerne, nous garderons la même position : celle du pollueur payeur. Ce n'est pas parce qu'il y a un bien-fonds qui s'appelle l'aéroport qu'il faut indemniser les gens mais bien, Monsieur Brunschwig, parce qu'il est en exploitation. Si celle-ci devait cesser, il n'y aurait aucune indemnité à verser !
M. Claude Blanc (PDC). Si l'exploitation cessait... car c'est de cela qu'il s'agit, Messieurs et Mesdames les députés ! (Exclamations.) Il est vrai que l'on peut argumenter à perte de vue pour savoir qui devrait payer les indemnités dues.
Ce projet de loi ne se borne pas, Monsieur Hiler, à la modification de l'article 36, alinéa 1); il y a aussi l'article 38 qui vise à remettre l'exploitation de l'aéroport international de Genève sous la tutelle du Grand Conseil.
C'est une démarche identique à celle qui a été tentée avec la BCG. (Exclamations. Le président agite la cloche.) C'est là que le bât blesse, Mesdames et Messieurs les députés ! Lorsque nous avons voté la loi constituant l'aéroport international de Genève comme société autonome, nous avons dû nous battre pied à pied contre la gauche de l'époque - minoritaire heureusement - qui ne voulait absolument pas que la gestion de l'aéroport international de Genève échappe au contrôle politique; elle voulait, lors de chaque projet d'investissement, pouvoir faire jouer les dispositifs normaux de la démocratie, en appeler au peuple en espérant que celui-ci la suivrait dans sa politique restrictive.
Aujourd'hui, je retourne la question : en ce qui concerne la Banque cantonale, la première loi votée, qui est à mon sens assez anodine, a entraîné un référendum qui va déjà vous faire comprendre jusqu'où vous pouvez aller trop loin. Quant au deuxième projet de loi que vous allez présenter, vous êtes clairement allés trop loin ! Il en va de même pour le cas qui nous occupe. S'il le faut et puisque vous avez une majorité, vous voterez ce que vous voudrez. Si vous voulez tuer l'aéroport international de Genève et par là même contribuer à la ruine de l'économie genevoise, continuez, Mesdames et Messieurs ! Nous en appellerons au peuple et le peuple jugera !
Compte tenu de la conjoncture de ce gouvernement et de ce parlement, l'arbitre, ce sera le peuple. Je suis convaincu que chaque séance du Grand Conseil sera suivie d'un référendum. Cela semble faire effet; nous vous suivrons dans cette voie. Durant la dernière législature, vous avez lancé deux ou trois référendums - pas davantage - que vous avez réussis. Il s'agit maintenant du deuxième ou troisième référendum; le suivant est déjà en préparation.
Continuez dans cette voie et vous verrez ce que le peuple pensera de votre politique qui consiste à étouffer l'économie genevoise et à dire ensuite que le gouvernement ne fait rien pour lutter contre le chômage !
M. Carlo Lamprecht, conseiller d'Etat. Je constate que les débats sont beaucoup plus animés à partir de 20 h 30 et je m'en réjouis ! J'aimerais apporter un certain nombre de réponses à tout ce qui vient d'être dit ainsi que l'avis du Conseil d'Etat sur le projet qui vous est présenté.
Cet aéroport est en activité depuis plus de quatre ans sous son nouveau régime d'autonomie. L'aéroport international de Genève a atteint pratiquement tous les objectifs qui lui étaient assignés lors du vote du projet de loi 6927 qui est devenu depuis la loi H 3 25. L'aéroport est dirigé par un conseil d'administration lui-même placé sous la surveillance du Conseil d'Etat. Il est devenu non seulement l'aéroport de Genève mais celui de toute une région de la Suisse romande et de la France voisine. Dans son conseil d'administration siègent notamment les représentants de deux cantons romands, d'un département de la France voisine et, depuis peu, un représentant de chaque parti politique de cette enceinte, ce qui est logique et normal.
Les investissements ont été accélérés afin d'améliorer le confort des passagers et de donner à notre plate-forme la modernité qui sied à la Genève internationale et à son image. En raison de la situation financière de l'Etat de Genève, je doute que ces investissements aient pu être effectués à ce rythme et je me demande si l'Etat aurait été en mesure d'en assumer les charges financières.
Rappelons - pour mémoire - qu'il s'agit du dernier crédit cantonal pour l'extension latérale de l'aérogare qui a été à l'origine du référendum dont le résultat en septembre 1991 a été un véritable plébiscite de la population... (Brouhaha. Le président agite la cloche.) ...genevoise : 73% des voix en faveur de l'aéroport. Cela dans le but de développer la desserte aérienne, essentielle pour satisfaire les besoins des acteurs économiques, diplomatiques et touristiques de la région, pour maintenir, voire développer notre activité pour le futur. Le système a fait ses preuves et malgré le retrait des longs courriers de Swissair, nous pouvons dire aujourd'hui que l'aéroport international de Genève a maintenu le niveau de ses prestations.
Examinons maintenant ce que nous propose le projet de loi 7836 : la nouvelle teneur de l'alinéa 1, article 36 exige et tend à mettre à la charge de l'AIG les frais encourus par l'Etat au titre d'indemnités pour nuisances sonores à verser aux riverains et fixées par le Tribunal fédéral. Il a été établi juridiquement que ces indemnités devaient être à la charge de l'Etat, selon une condition fixée par les autorités fédérales lors du transfert en 1993 de la concession fédérale d'exploitation de l'Etat à l'aéroport international de Genève. Bien que le Conseil d'Etat, s'appuyant sur un avis de droit du professeur Knapp, ait décidé de faire valoir son droit à la prescription, le conseil de direction de l'AIG a admis d'assumer les coûts entraînés par l'insonorisation des habitations proches de l'aéroport. Ces indemnisations sont prélevées sur le fonds de réserve pour nuisances sonores alimenté par les compagnies d'aviation dont les appareils polluent l'environnement sur le plan sonore. L'AIG a de ce fait participé à certaines obligations qui auraient pu être celles du canton.
La nouvelle teneur de l'alinéa 1 de l'article 38 consiste à transférer les compétences actuelles du Conseil d'Etat à celles du Grand Conseil; c'est un choix que vous devrez faire plus tard. A mon sens, c'est une manière de vider de toute sa substance le statut d'autonomie actuel de l'AIG. Quant à son conseil d'administration, dont les membres ne sont pas tous Genevois mais aussi issus d'autres cantons romands et de la région française, c'est le priver de toutes ses compétences, sans oublier les hôtes que nous avons accueillis au sein de ce conseil.
D'autres établissements publics autonomes cantonaux, tels que les établissements hospitaliers, les TPG, qui se trouvent être également sous la surveillance du Grand Conseil, reçoivent des sommes importantes du fait qu'ils sont largement déficitaires. Ces sommes sont versées annuellement sous forme de subventions en vertu des contrats de prestations que nous avons conclus. Cela n'est pas le cas de l'aéroport international de Genève qui, lui, est bénéficiaire. Une partie de ces bénéfices est rétrocédée à l'Etat à raison de 50%. Cette part a été effectivement versée, contrairement à ce que pourrait laisser entendre l'exposé des motifs tel qu'il est rédigé.
Rappelons que le bénéfice net est réalisé après le paiement par l'aéroport à l'Etat des charges financières, à savoir les intérêts et les amortissements des investissements faits par l'Etat à l'aéroport. Cela représente, uniquement pour 1997, respectivement 17,3 millions pour les intérêts et 16,3 millions pour les amortissements, soit 33 et quelque millions en plus. Les bénéfices raisonnables réalisés ces dernières années sont admis par l'autorité de surveillance fédérale. Ils doivent notamment permettre à l'aéroport international de Genève de financer de nouveaux investissements importants, pour lui permettre de rester compétitif sur le plan international et accueillant également pour les compagnies d'aviation ainsi que les six millions de passagers qui le fréquentent chaque année.
En ce qui concerne la teneur de l'alinéa 2 de l'article 38 qui nous est proposé et qui exige de soumettre au Grand Conseil, selon la procédure des grands travaux, tout investissement aéroportuaire supérieur à deux millions, il s'agit d'un retour au passé ainsi que vous l'avez cité dans l'exposé des motifs. Le Conseil d'Etat est d'avis que ce retour au passé, dans le système économique concurrentiel d'aujourd'hui, est préjudiciable pour la compétitivité et le développement de notre aéroport.
L'aéroport international de Genève, contrairement à d'autres établissements publics autonomes, n'est pas déficitaire. Il est à même d'assumer seul ses investissements sans avoir recours à aucune subvention des collectivités publiques; de surcroît il rétrocède à l'Etat 50 % de ses bénéfices. Ce projet de loi équivaut clairement à annihiler toutes les attributions de son conseil d'administration et le principe même de son autonomie.
Grâce à une gestion saine et dynamique, dépouillée au niveau de ses investissements des obstacles et lenteurs inhérents aux prises de décisions politiques (nous traitons encore dans cette salle des projets de lois et des motions qui datent et qui ont été présentés par des personnes qui ont disparu), l'aéroport international de Genève a trouvé aujourd'hui ses lettres de noblesse. Il vient d'être placé par une grande étude IATA au 5e rang des aéroports du monde au niveau de la qualité de son accueil et de son confort. Sa jeune équipe de marketing vient d'obtenir le prix «Marketing communication executive international» qui est un prix d'excellence décerné par un groupe d'experts des grandes firmes internationales de tous les pays du monde. Vous pourrez constater, lorsque nous annoncerons les résultats, que son bénéfice 1997 est excellent malgré le retrait de Swissair de la majorité de ses lignes intercontinentales en faveur de l'aéroport de Zurich.
Soulignons également que cet aéroport investit pour l'avenir; cela représente 110 millions, dans les nouvelles jetées frontales pour le rendre plus accueillant encore. Vous qui soutenez les travailleurs du bâtiment, ces 100 millions sont aujourd'hui nécessaires à l'économie de ce secteur largement sinistré.
L'aéroport doit être soutenu également au niveau de la révision de la loi sur l'aviation civile. Nous nous sommes battus auprès de nos élus aux Chambres fédérales; je suis personnellement monté au créneau à Berne pour faire en sorte d'influencer le Conseil des Etats, afin que la loi sur la multi-désignation soit votée. Avec la Suisse romande, tous ensemble, nous avons gagné cette loi qui permet aujourd'hui à l'aéroport de Genève d'être compétitif et de faire en sorte de pouvoir rester dans le coup; c'est très important aujourd'hui.
Dans un contexte extrêmement compétitif en constante évolution, notre aéroport ne doit pas être jugulé par des contraintes politiques supplémentaires de nature à étouffer son fonctionnement et son développement. L'aéroport de Genève représente 480 emplois directs et 6000 emplois qu'il assure au travers des 150 instances établies sur le site. C'est un atout incomparable, non seulement pour Genève, mais également pour toute la Suisse romande et pour la France voisine. C'est la raison pour laquelle, n'en déplaise à certains, le Conseil d'Etat n'est pas favorable à ce projet de loi et je tiens à l'exprimer ici très, très clairement. Toutefois pour mieux explorer les arguments de sa prise de position, pour mieux revoir peut-être certains aspects financiers de cet aéroport, je demande le renvoi en commission de ce projet. (Applaudissements, bravos.)
Mme Marianne Grobet-Wellner (S). Mon intention n'était pas d'intervenir après M. le conseiller d'Etat. J'ai tenté de demander la parole à quatre reprises, cela n'a pas été enregistré et je tiens quand même à donner... (Brouhaha. Exclamations.) Ce n'est pas grave !
Je tiens à donner la position du groupe socialiste sur ce projet. Nous considérons effectivement que le versement de telles indemnités, en raison de l'expropriation formelle causée par les nuisances résultant directement de l'exploitation de l'aéroport, doivent figurer dans les comptes de l'AIG, établissement public autonome depuis le 1er janvier 1994.
Le deuxième point concernant l'article 38 «Compétences du Grand Conseil» qui propose de soumettre à l'approbation de ce dernier tout projet de construction ou de transformation de bâtiments ou d'installations aéroportuaires pour un montant supérieur à 2 millions, ce deuxième point vise à instaurer un contrôle accru du Grand Conseil. Nous réservons notre position en attendant l'étude de ce projet en commission.
Nous attirons cependant votre attention sur le problème lié à la pratique actuelle de l'AIG visant à diminuer artificiellement, selon les termes de l'inspection cantonale des finances, son bénéfice comptable dont le 50% revient à l'Etat. Selon l'inspection cantonale des finances, cette diminution s'élève à une dizaine de millions chaque année depuis 1994, montants qui sont accumulés au bilan de l'AIG sous provisions et fonds d'investissements.
Les questions liées aux demandes d'indemnités étant actuellement traitées en commission des finances, dans le cadre du projet de loi 7610 ouvrant un crédit de 60 millions de francs pour l'indemnisation des riverains de l'aéroport international de Genève, nous proposons le renvoi de ce projet de loi à la commission des finances.
Ce projet est renvoyé à la commission des finances.
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, je vous prie, lorsque vous demandez la parole, de garder la main levée aussi longtemps que le vice-président qui est à ma gauche n'a pas enregistré votre demande et jusqu'au moment où il vous fait signe indiquant qu'il vous a inscrit sur la liste des intervenants. Dès lors, il n'y aura plus de malentendu ni de mécontentement de votre part, je l'espère.
Monsieur le député Blanc, il paraît que vous gesticulez, me dit-on ?
M. Claude Blanc (PDC). Oui, Monsieur le président, je gesticule car il faut gesticuler pour obtenir la parole dans ce parlement. (Rires.) Vous êtes six là-haut, c'est-à-dire un de plus que la constitution ne le prévoit et vous n'êtes pas «foutus » de regarder la salle ! (Rires.)
Cela étant dit, dans un débat de préconsultation, Monsieur le président, vous devez vous assurer que tous les groupes ont pris la parole avant de donner la parole à un conseiller d'Etat. Je vois là une intention malveillante de la part du Bureau d'avoir sauté... (Exclamations.)
Le président. Merci pour l'expression, Monsieur Blanc ! Vous en portez seul la responsabilité.
M. Claude Blanc. ...le parti socialiste - et personne en particulier, Monsieur le président ! - avant de donner la parole au Conseil d'Etat. C'est une façon déloyale de mener le débat. Vous en êtes tous responsables; maintenant il faudrait vous réveiller un peu !
Le président. Monsieur, il n'y a pas de façon déloyale. Les groupes ne sont pas tenus de prendre la parole en débat de préconsultation. Certains groupes prennent la parole, certains autres ne la prennent pas. Si le représentant d'un groupe ne lève pas clairement la main, il n'est pas enregistré et la parole ne lui est pas donnée. C'est la règle. Vous agissiez de la même façon, Monsieur le député...
M. Claude Blanc. Ce n'est pas vrai !
Le président. ...lorsque vous étiez président.
Nous passons aux points 58 et 59 de notre ordre du jour qui, comme nous en sommes convenus, sont traités ensemble, à savoir : projet de loi 7838 et motion 1205.