République et canton de Genève

Grand Conseil

PL 7610-A
14. Rapport de la commission des finances chargée d'étudier le projet de loi du Conseil d'Etat ouvrant un crédit de 20 millions de francs pour l'indemnisation des propriétaires riverains de l'Aéroport international de Genève. ( -) PL7610
 Mémorial 1997 : Projet, 4008. Renvoi en commission, 4016.
Rapport de M. Jean-Claude Vaudroz (DC), commission des finances

La commission des finances s'est réunie les 3 et 10 septembre 1997 sous la présidence de Bernard Annen.

Les travaux ont été conduits en présence de MM. Olivier Vodoz, président du département des finances; Benedikt Cørdt-Möller, directeur général des finances, département des finances; Jean-Philippe Maitre, président du département de l'économie publique; Jean-Pierre Jobin, directeur général de l'aéroport, et Serge Gobbi, juriste du département des travaux publics et de l'énergie (DTPE).

1. Historique

Il faut rappeler qu'en 1977, l'aéroport, relevant à l'époque du service de l'administration cantonale, était obligé, en vertu de la loi fédérale sur l'aviation, d'établir et de déposer un plan de zone de bruit, selon un indice fixé par des experts fédéraux, indice dit NNI (Noise Number Index), pour déterminer la gêne du trafic aérien autour de l'aéroport. Il a fallu ensuite dix ans de procédure entre l'administration fédérale et l'administration cantonale ainsi que les pouvoirs publics cantonaux pour définir les limites précises de ces zones.

C'est finalement en 1987 que le Conseil fédéral, en dernière instance, a approuvé les limites des zones dites NNI, divisées encore en trois zones A, B et C, selon qu'on s'éloigne de l'aéroport. Dès ce moment, les propriétaires concernés, considérant avoir droit à une indemnité pour une expropriation matérielle, ont eu cinq ans pour le faire valoir. Ce délai s'est éteint le 2 septembre 1992. Pendant ce délai, environ 260 demandes ont été adressées à l'Etat de Genève, puis traitées par le DTPE. Pendant cette période, 9 cas ont suivi la procédure, à savoir qu'ils ont été soumis à une commission fédérale d'estimation qui a fait le calcul des indemnités, calcul contesté aussi bien par les propriétaires que par l'Etat de Genève. Ces cas sont finalement arrivés au Tribunal fédéral qui a rendu un arrêt très important au mois de juillet 1995, à l'origine de toute la problématique posée ce jour.

2. Arrêt du Tribunal fédéral du 12 juillet 1995

En date du 12 juillet 1995, le Tribunal fédéral a rendu un arrêt très important dont on peut tirer en substance les points suivants:

Il a considéré que ces propriétés subissent des nuisances graves et spéciales qu'il n'était pas possible d'appréhender complètement avant le1er janvier 1961. Il est, dès lors, considéré que ceux qui avaient acquis et construit leur immeuble avant le 1er janvier 1961 étaient frappés d'une expropriation formelle des droits de voisinage et avaient droit en principe à une indemnité de ce fait, indemnité qu'il convenait de déterminer.

Dans cette décision partielle du 10 octobre 1995, le Tribunal fédéral a décidé que, pour apprécier la dévaluation des immeubles, la valeur vénale en automne 1985 est déterminante et que les intérêts usuels sur les éventuelles indemnités courent dès le 1er janvier 1985.

3. Discussion

Au sujet des indemnités, la commission s'est montrée très étonnée de la décision du Tribunal fédéral dans la mesure où cela va ouvrir des voies extrêmement lourdes et compliquées dans les procédures. Il faut noter que la conjugaison des nouvelles technologies, qui est le fait que les avions font de moins en moins de bruit, et des investissements permettant d'insonoriser davantage les environs directs de l'aéroport a complètement modifié les zones NNI.

L'Aéroport international de Genève, établissement public autonome depuis 1994, perçoit depuis 1981 une surtaxe à la taxe d'atterrissage déterminée en fonction des performances acoustiques des avions. Cette surtaxe dégressive est aujourd'hui de 800 F pour les avions encore très bruyants - et heureusement rares à Cointrin - et nulle pour les avions les plus modernes dotés des réacteurs à la pointe de la technologie tant en ce qui concerne le faible niveau de bruit que la consommation spécifique réduite en kérosène. La perception de cette surtaxe, à vocation incitative, alimente un « fonds  surtaxe bruit » qui ne peut être affecté qu'au financement d'installations concourant à la protection des riverains de l'aéroport.

Au 31 décembre 1996, le montant de ce fonds était de 46,5 millions de francs. La recette annuelle, actuellement de l'ordre de 3,5 millions de francs, ira en diminuant, compte tenu du renouvellement des flottes des compagnies aériennes.

En 1998, l'AIG instaurera une nouvelle surtaxe sur les émissions gazeuses des moteurs selon un mécanisme identique à celui de la surtaxe bruit. Un fonds ad hoc sera également créé. Le fonds surtaxe bruit et le fonds surtaxe émission gazeuse réunis constitueront le «fonds environnement».

Ce fonds permettra le financement, en plus des mesures d'insonorisation des habitations proches de l'aéroport en application des arrêts du Tribunal fédéral, est estimé à 40 millions de francs, d'installations importantes et onéreuses qui réduiront sensiblement les nuisances acoustiques et gazeuses telles que la fourniture aux avions pendant l'escale de l'énergie électrique et de l'air préconditionné, ainsi qu'un grand amortisseur du bruit émis lors des essais moteurs. Des frais d'étude, notamment pour l'établissement du bilan écologique de l'aéroport, seront également financés par ce fonds. La prévision pour les dix ans à venir de l'utilisation de ce fonds figure en annexe.

Il faut rappeler que le patrimoine immobilier est resté propriété de l'Etat et que l'aéroport est, en fait, une société d'exploitation.

L'aéroport est devenu un établissement public autonome depuis le1er janvier 1994. Dans ce transfert, il a été mentionné expressément que les obligations restaient à l'Etat de Genève et cela pour deux raisons :

- pour protéger les ayants droit et donner ainsi la garantie notamment aux 260 demandeurs qui les avaient fait valoir;

- personne ne savait exactement quelle serait la solvabilité du nouvel établissement.

C'est donc dans ces circonstances juridiques que le transfert a eu lieu et que les obligations découlant de l'aéroport à l'époque restaient à l'Etat de Genève.

Rappelons également que l'aéroport appartient à l'Etat de Genève et que s'il réalise 2 millions de francs de bénéfice net, il paie 37 millions de francs à la caisse de l'Etat chaque année. Si l'aéroport devait mettre 60 millions de francs d'indemnités, cela équivaudrait à sa fermeture. L'aéroport reste une infrastructure de transport public au service de la collectivité avec de considérables retombées économiques.

La commission des finances pense qu'il serait souhaitable de libérer une tranche de 20 millions de francs pour couvrir les jugements exécutoires et permettre de négocier les demandes suivantes. Sur ce dernier point, la direction de l'aéroport nous informe qu'un des objectifs, avec les quelque150 ayants droits pour lesquels les cas n'ont pas encore été formellement traités par le Tribunal fédéral, est de mener une négociation à l'amiable.

Dans ce contexte, il serait certainement possible de tenir compte de la réalité économique d'aujourd'hui et, d'autre part, de se rendre à l'évidence que la zone NNI a fortement évolué et que nous nous avons, en 1997, des zones NNI A, B et C, aujourd'hui nous nous trouvons pratiquement qu'en zone C.

4. Coût global

Une première évaluation grossière a déjà été faite et le montant global représente environ 60 millions de francs. Il faut savoir que, sur ce montant, environ 50% requièrent des intérêts moratoires. Aujourd'hui, 9 cas ont fait l'objet d'une évaluation précise. Tout le reste doit être déterminé selon des principes à appliquer, par analogie aux jugements rendus.

Vote d'entrée en matière : 4 oui et 2 abstentions (1 Ve, 1 S).

Titre (modifié)

«... ouvrant un crédit de 20 millions de francs pour l'indemnisation des propriétaires riverains de l'Aéroport international de Genève.»

La commission dans sa grande majorité souhaite fractionner le montant de manière à ne pas stimuler les appétits. Dans une volonté de transparence, il faut savoir que la première estimation est d'environ 60 millions de francs et que, pour éviter que l'Etat ne se retrouve à court ou qu'on lui refuse le crédit nécessaire, d'autres tranches seront nécessaire. Cela pour la clarté du débat et vis-à-vis de la prochaine législature.

Article 1 (modifié)

«Un crédit pouvant atteindre 20 millions de francs est ouvert au Conseil d'Etat pour couvrir les indemnités dues aux propriétaires riverains de l'aéroport, ainsi que les frais d'expertises et de procédures éventuels.»

Vote : 5 oui (2 L, 1 R, 2 DC) et 2 abstentions (1 Ve, 1 S).

Article 2 (modifié)

«Ce crédit est réparti en tranches annuelles inscrites aux budgets d'investissements dès 1997, sous la rubrique 51.01.00.586.01.»

Dans le cadre du budget d'investissement 1997, une somme de 1 million de francs figure sous la rubrique 566.02. Cependant les dépenses 1997 ainsi que les tranches 1998 figureront sous la rubrique 586.01.

Vote : 5 oui (2 L, 1 R, 2 DC) et 2 abstentions (1 Ve, 1 S).

Article 3

Vote : 5 oui (idem) et 2 abstentions (idem).

Article 4

Vote : 5 oui (idem) et 2 abstentions (idem).

Article 5 (nouveau)

«Le Conseil d'Etat, s'il y a lieu, saisit le Grand Conseil d'un projet de loi portant sur d'éventuelles tranches subséquentes.»

Vote : 5 oui (idem) et 2 abstentions (idem).

Article 6 (anciennement art. 5)

Vote : 5 oui (idem) et 2 abstentions (idem).

Conclusion

En date du 12 juillet 1995, le Tribunal Fédéral a rendu un arrêt important: s'il n'y a pas d'expropriation matérielle, il y a expropriation formelle de droit de voisinage. Il a considéré que ces propriétés subissent des nuisances sonores de 45 à 55 NNI et sont exposées à des nuisances qu'il n'était pas possible d'appréhender complètement avant le 1er janvier 1961.

Il est dès lors considéré que ceux qui avaient acquis et construit avant le 1er janvier 1961 auraient droit en principe à une indemnité qu'il convenait de déterminer.

La première évaluation équivaut à un montant total (indemnité + intérêts) de 60 millions de francs.

La commission des finances, dans sa grande majorité, propose de libérer une première tranche de 20 millions de francs afin de permettre d'exécuter le paiement des indemnités dues et permettre de régler à l'amiable dans la mesure du possible et dans les meilleurs délais les cas en suspens.

C'est en substance ce que la grande majorité de la commission des finances vous recommande, Mesdames et Messieurs les députés, d'accepter ce projet de loi modifié.

(PL 7610)

PROJET DE LOI

ouvrant un crédit de 20 millions de francs pour l'indemnisationdes propriétaires riverains de l'Aéroport international de Genève

LE GRAND CONSEIL

Décrète ce qui suit:

Article 1

Crédit d'investis-sement

Un crédit pouvant atteindre 20 millions de francs est ouvert au Conseil d'Etat pour couvrir les indemnités dues aux propriétaires riverains de l'aéroport, ainsi que les frais d'expertises et de procédures éventuels.

Art. 2

Budget d'investis-sement

Ce crédit est réparti en tranches annuelles inscrites aux budgets d'investissement dès 1997, sous la rubrique 51.01.00.586.01.

Art. 3

Finance-mentet couverture des charges financières

Le financement de ce crédit est assuré par le recours à l'emprunt, dans les limites du plan directeur fixant à environ 250 000 000 F le maximum des investissements annuels dont les charges financières en intérêts et en amortissements sont à couvrir par l'impôt.

Art. 4

Amortis-sement

L'amortissement de l'investissement est calculé chaque année sur la valeur résiduelle et est porté au compte de fonctionnement.

Art. 5

Le Conseil d'Etat, s'il y a lieu, saisit le Grand Conseil d'un projet de loi portant sur d'éventuelles tranches subséquentes.

Art. 6

Loi surla gestion adminis-trative et financièrede l'Etatde Genève

La présente loi est soumise aux dispositions de la loi sur la gestion administrative et financière de l'Etat de Genève, du 7 octobre 1993.

ANNEXE

Premier débat

M. Jean-Claude Vaudroz (PDC), rapporteur. Dans la première phrase de l'historique, la date est fausse. Il conviendra de remplacer 1997 par 1977. A la page 8, article 5, il faut ajouter «subséquentes» après «tranches». Ce sont deux petites erreurs probablement survenues lors de l'impression de ce rapport.

M. Christian Grobet (AdG). Ce projet de loi porte sur une question relativement complexe. Selon les solutions adoptées, il pourrait avoir des conséquences financières non négligeables sur l'Etat de Genève. Il est regrettable que notre conseiller d'Etat responsable du département des finances et contributions ne soit pas présent au moment où l'on aborde cet important débat.

Premièrement, l'Alliance de gauche se réjouit du fait que la commission ait réduit la demande de crédit de 60 millions prévue au départ à une première tranche de 20 millions. Elle servira à payer les montants dus en vertu des décisions judiciaires et l'étude attentive des autres cas. Le fait que le Conseil d'Etat ait une grande liberté dans l'utilisation du crédit-cadre que nous libérons grâce à cette proposition nous gêne un peu. Au vu des implications financières importantes que j'ai évoquées, il est nécessaire que le Grand Conseil suive cette affaire avec attention. C'est pourquoi nous désirons compléter ce projet de loi par un article 5, stipulant que la commission des finances doit être informée des propositions d'indemnisation envisagées par le Conseil d'Etat. Il nous paraît essentiel que, en vue de l'indemnisation, chaque cas soit soumis à la commission des finances. Selon les principes retenus, elle donnera son avis avant que la transaction ne soit conclue.

Deuxièmement, il est curieux de constater que - l'aéroport ayant été constitué en établissement public autonome - l'article 4 du projet de loi prévoit que l'amortissement des indemnités versées aux propriétaires fonciers concernés seront portées aux comptes de l'Etat et non pas aux comptes de l'aéroport.

Juridiquement, l'Etat de Genève doit répondre du versement de l'indemnité, car il est propriétaire des terrains et la concession lui avait été accordée avant que l'aéroport ne devienne un établissement public autonome. L'Etat de Genève est donc débiteur des indemnités dues jusqu'au jour de la constitution de l'aéroport en établissement autonome. Mais, comptablement parlant, ce n'est pas parce que l'Etat doit payer qu'il devient débiteur de cette somme.

Depuis trente ans, le Conseil d'Etat n'a eu de cesse de déclarer que l'aéroport était largement bénéficiaire sur le plan comptable. Certains avaient des doutes à ce sujet, d'ailleurs, mais il est vrai que l'aéroport a bénéficié - avant d'avoir été institué dans sa forme actuelle d'établissement autonome - d'une comptabilité d'entreprise, comme c'est le cas pour l'usine des Cheneviers.

Par voie de conséquence, toutes les dépenses inhérentes à l'aéroport doivent être portées au compte d'exploitation de l'aéroport. Il s'agit non seulement d'une évidence économique mais d'un minimum de transparence quant au coût réel de l'aéroport. Les indemnités dues, en raison des nuisances sonores liées à l'exploitation d'un aéroport qui, par ailleurs, engrange des recettes, doivent aussi être payées. On ne peut pas se contenter d'engranger les recettes !

Ainsi, même si l'Etat paie, au niveau des comptes, les indemnités doivent être portées sur le comptes d'exploitation de l'aéroport. C'est pourquoi nous demandons que l'article 4 soit modifié, selon les amendements suivants : premièrement, l'amortissement de l'investissement est calculé chaque année sur la valeur résiduelle. Deuxièmement, il est porté aux comptes d'exploitation de l'aéroport de Genève.

Vu l'heure tardive, 22 h 50, la sagesse commande de ne pas engager le débat sur ce projet de loi, mais de le renvoyer en commission. Ces questions n'y ont pas été étudiées, probablement parce que la commission était surchargée et voulait rapporter avant la fin de la législature. Mais il n'y a pas péril en la demeure !

Le président. Demandez-vous formellement le renvoi en commission, Monsieur Grobet ?

M. Christian Grobet. En effet, ce serait plus sage. Je demande formellement le renvoi de ce projet de loi en commission.

M. David Hiler (Ve). Le principe du pollueur-payeur est au coeur de ce débat et nous veillerons à ce que ce principe soit appliqué chaque fois qu'il doit l'être. L'origine des nuisances provient de l'aéroport. Par conséquent, le financement doit venir de celui-ci, pour deux raisons au moins. La première qui se rapporte à la comptabilité - à l'imputation, dirions-nous aujourd'hui - a été expliquée par M. Grobet avec son habituel talent.

La taxe anti-bruit est la deuxième raison. L'aéroport perçoit une taxe sur les appareils les plus bruyants. Un fonds énorme est disponible et devra être dépensé, dont une partie est prévue pour les indemnisations et les travaux d'insonorisation.

A notre avis, ce partage n'est pas équitable, car l'ensemble des dépenses doit être imputé à cette taxe anti-bruit. Si elle est modifiée régulièrement en fonction des progrès techniques de l'aviation, elle suffira amplement pour payer ce qui doit l'être. Si tel n'était pas le cas, l'aéroport payerait. Nous sommes conscients d'un effet de vases communicants; si l'aéroport paie plus, le bénéfice sera moins grand et l'Etat touchera moins. Toutefois, la question du principe ci-dessus est suffisamment fondamentale pour qu'on n'y déroge pas.

Les amendements déposés par M. Grobet vont dans le bon sens, et il est probable que nous y souscrivions en commission. A notre tour, nous demandons le renvoi de ce projet de loi en commission, car de tels amendements, susceptibles d'engendrer des conséquences juridiques importantes ne peuvent être débattus à une heure aussi tardive. Avant de les adopter, nous souhaitons nous assurer que tout est en ordre. L'important étant pour nous l'application stricte, à Genève et dans tous les domaines, du principe du pollueur-payeur.

Le président. Le renvoi en commission étant demandé, je prie instamment les orateurs de ne parler qu'à propos du renvoi en commission et non sur le fond.

M. Claude Blanc (PDC). Nous pouvons nous rallier au renvoi en commission, puisque, de toute manière, on n'obtiendra pas le vote de ce projet de loi. La taxe anti-bruit n'est pas prévue à cet effet. Elle est payée par les compagnies d'aviation en vue d'améliorer les installations de l'aéroport. Elle vise à lutter contre le bruit et ne peut pas être utilisée au sens où l'entend M. Hiler. Mais autant ne pas s'éterniser et renvoyer ce projet de loi en commission.

M. John Dupraz (R). Notre groupe ne s'oppose pas au renvoi en commission, suite aux propositions de M. Grobet. Il m'apparaît que M. Hiler est meilleur historien que juriste. En effet, les taxes anti-bruit - comme l'a dit M. Blanc - ne sont pas prévues à l'usage prétendu par M. Hiler. Les décisions à prendre doivent s'inspirer de la jurisprudence du Tribunal fédéral. Elles obligent l'Etat de Genève à verser des indemnités aux propriétaires de bâtiments en ce qui concerne certaines restrictions sur les droits à bâtir et l'utilisation des immeubles. L'Etat ayant pris des mesures, les collectivités publiques doivent verser des indemnités. Le fait qu'elles transitent par les comptes de l'aéroport est un problème technique méritant d'être étudié en commission. Mais M. Hiler m'inquiète par ses propositions. Nous serons donc plus proches de M. Grobet que de M. Hiler dans les travaux de commission. (Rires.)

M. Pierre Meyll (AdG). Je suis tout à fait d'accord sur le renvoi en commission, mais je désire rendre la commission des finances - à laquelle je ne participe que comme remplaçant - attentive au fait que la taxe anti-bruit est prévue et payée par les compagnies d'aviation - sur le dos des riverains souffrants - pour améliorer certaines installations de l'aéroport.

Mais un savant mélange est fait entre les différents investissements pour l'aéroport. Certains sont prétendument versés pour soulager les riverains du bruit. Or ce n'est pas toujours le cas. Je rends la commission des finances attentive à ce problème et lui propose d'auditionner les comptables chargés de la «ventilation» de ces investissements.

La direction de l'aéroport devra insonoriser les immeubles compris dans la zone reconnue par le Tribunal fédéral correspondant à peu près à ce qu'était la zone C; les zones A et B n'existant pratiquement plus. Le montant du coût de ces travaux sera prélevé sur la taxe anti-bruit. Ce problème devra être traité sérieusement en tenant compte des dires de M. Vodoz lors d'une interview, soit que l'aéroport coûte. Si l'on ne tient compte que des frais d'exploitation, il est certain que cet aéroport n'est pas une charge, mais, avec les investissements, il en devient une.

Si, au lieu d'avoir créé une société autonome pour l'aéroport, nous avions monté une société anonyme - comme on l'entend dans les sociétés capitalistes - nous aurions compris qu'il faudrait supporter d'autres frais. Aussi aurions-nous demandé le bilan d'entrée qui n'a jamais été fait. Aujourd'hui, nous sommes dans le brouillard quant aux charges que l'Etat doit assumer; ce qui entre dans sa caisse et ce qui en sort.

M. Philippe Joye, conseiller d'Etat. Je n'assisterai probablement pas aux séances de commission sur ce sujet. Je désire donc faire trois remarques.

Premièrement, en ce qui concerne le traitement des indemnités par groupe ou de façon très individualisée, le traitement par cas me semble très dangereux, puisqu'il y en a deux cent cinquante. En effet, pour régler la question de cent quarante-quatre bouclements de compte, il nous a fallu pratiquement trois ans et il en reste tout un train à traiter lors de la dernière session, en plus de ceux que vous avez ce soir.

Deuxièmement, à titre personnel, je ne suis pas opposé au principe du pollueur-payeur, mais - vous l'avez relevé - une question d'équilibre des comptes est en jeu. Vous savez que l'Etat de Genève prendrait à sa charge les indemnisations pour les questions d'expropriation, tandis que, dans le dispositif proposé, l'aéroport prend d'ores et déjà à sa charge tous les frais de transformation et d'amélioration physique des bâtiments.

Troisièmement, s'il est vrai que l'on peut régler les problèmes entre l'aéroport et la collectivité publique cantonale, il est également vrai que des demandes financières sont en cours et risquent de devenir très urgentes. C'est pourquoi nous ne pourrons pas échapper au rôle de financier transitoire pour honorer les engagements. En effet, la moitié environ des indemnités demandées représente la somme des intérêts de retard d'une cause que l'on a commencé à traiter en 1985.

Mis aux voix, ce projet est renvoyé à la commission des finances.

M. Pierre Meyll (AdG). Je désire préciser que, concernant les intérêts de retard dont a parlé M. Philippe Joye, il faut tenir compte... (Brouhaha.)

Une voix. On est au point 21 !

M. Pierre Meyll. Ecoutez, cela va peut-être vous intéresser !

Le président. Monsieur Meyll, le sujet est clos, je regrette !

M. Pierre Meyll. Oui, il est clos, si vous voulez, mais lorsque M. Joye parle d'intérêts à payer, je lui réponds que cette affaire d'intérêts est pendante devant le Tribunal fédéral depuis sept ans...

Le président. Monsieur Meyll !

M. Pierre Meyll....et il faudrait savoir si nous devons payer...

Le président. Monsieur Meyll, le règlement est formel, une fois un sujet clos, on ne peut plus intervenir. Je regrette, mais je ne peux pas vous laisser la parole !

M. Pierre Meyll. ...car cela représente une somme d'intérêts considérable !

Le président. Vous vous entretiendrez personnellement de cette question avec M. Joye, si vous le désirez !