République et canton de Genève

Grand Conseil

No 38/VI

Vendredi 27 juin 1997,

soir

Présidence :

Mme Christine Sayegh,présidente

puis

M. René Koechlin,premier vice-président

La séance est ouverte à 17 h.

Assistent à la séance : MM. Jean-Philippe Maitre, président du Conseil d'Etat, Claude Haegi, Olivier Vodoz, Guy-Olivier Segond et Gérard Ramseyer, conseillers d'Etat.

1. Exhortation.

La présidente donne lecture de l'exhortation.

La présidente. Je salue la présence à la tribune de M. Fontaine, ancien sautier. (Applaudissements.)

2. Personnes excusées.

La présidente. Ont fait excuser leur absence à cette séance : M. Philippe Joye et Mme Martine Brunschwig Graf, conseillers d'Etat, ainsi que Mmes et MM. Florian Barro, Matthias Butikofer, Claire Chalut, Pierre-Alain Champod, Hervé Dessimoz, Marlène Dupraz, Laurette Dupuis, Michel Halpérin, Yvonne Humbert, Alain-Dominique Mauris, Danielle Oppliger, Jean-Pierre Rigotti, Jean-Philippe de Tolédo et Michèle Wavre, députés.

3. Correspondance.

La présidente. La correspondance suivante est parvenue à la présidence :

C 624
Le Tribunal administratif nous informe que, selon l'avis paru dans la FAO du 18 juin 1997, le Conseil d'Etat l'a désigné comme instance de recours cantonale concernant les procédures relevant de l'aménagement du territoire et en particulier les plans d'affectation. ( )  C624
C 626
Le Conseil d'Etat nous adresse copie de son courrier au conseiller fédéral M. Jean-Pascal Delamuraz, chef du Département de l'économie publique, au sujet du montant des indemnités de chômage et enfants à charge, et lui adresse copie de la résolution 334 (concernant le chômage et les allocations familiales) adoptée le 13 juin 1997. ( )  C626
C 627
Le Conseil d'Etat nous adresse copie de son courrier au Conseil municipal de la commune de Veyrier au sujet des demandes d'autorisation de construire. ( )C627

Il en est pris acte 

C 628
Le Rassemblement pour une politique sociale du logement nous fait parvenir ses remarques concernant le projet de loi 7579 (instituant des mesures temporaires destinées à favoriser l'accession à la propriété du logement et la relance de l'économie dans le secteur immobilier). ( )C628

Ce courrier concerne le point 50 relatif au projet de loi 7579. Nous le traiterons à la suite des réponses aux interpellations urgentes. Nous verrons, à ce moment-là, si nous l'annexons simplement ou si nous en donnons lecture. 

Par ailleurs, la pétition suivante est parvenue à la présidence :

P 1167
Contre la démolition de l'ex-Villa Blanc. ( )  P1167

Elle est renvoyée à la commission des pétitions.

4. Annonces et dépôts :

a) de projets de lois;

Néant.

b) de propositions de motions;

La présidente. La proposition de motion suivante est retirée par ses auteurs :

M 1016
de Mmes Micheline Calmy-Rey, Maria Roth-Bernasconi et Fabienne Blanc-Kühn concernant les conditions de travail dans le commerce de détail. ( )  M1016

La proposition de motion suivante est parvenue à la présidence :

M 1149
de Mme et MM. René Longet (S), Jean-Claude Genecand (DC), Sylvia Leuenberger (Ve), Pierre Kunz (R) et Gilles Godinat (AG) concernant le conseil académique de l'université. ( )  M1149

Elle figurera à l'ordre du jour d'une prochaine séance. 

c) de propositions de résolutions;

La présidente. La proposition de résolution suivante est retirée :

R 340
de M. Christian Grobet concernant le centre de contrôle aérien. ( )  R340

d) de demandes d'interpellations;

Néant.

e) de questions écrites.

Néant.

IU 356
5. Réponse du Conseil d'Etat à l'interpellation urgente de M. Pierre Kunz sur les conditions du calcul de la taxe des entreprises bénéficiant du tourisme. ( ) IU356
Mémorial 1997 : Développée, 5010.

M. Jean-Philippe Maitre, président du Conseil d'Etat. J'essaierai de vous répondre avec le peu de voix qui me reste.

Vous avez interpellé le Conseil d'Etat sur le mode de calcul de la taxe d'encouragement au tourisme. A teneur de la loi, votée par votre parlement, cette taxe est fondée sur trois paramètres :

1. Les retombées du tourisme, en fonction de leur importance pour le type d'activités professionnelles pratiquées, d'une part, et en fonction de la localisation de ces activités, d'autre part.

2. L'importance touristique du secteur géographique où s'exercent lesdites activités.

3. Le nombre d'employés.

Votre interpellation urgente porte sur ce troisième critère, car vous souhaitez qu'une distinction soit faite entre le personnel de vente et le personnel dit de production.

Le secteur commercial auquel vous faites allusion a entretenu une correspondance abondante avec les autorités de taxation et déposé des recours contre leurs décisions.

A l'occasion d'un recours émanant d'un autre secteur professionnel, ce mode de taxation, tel que fixé par le Grand Conseil, a été confirmé. En d'autres termes, la loi ne nous permet pas d'opérer une distinction entre le personnel de vente et le personnel de production. Si elle nous y autorisait, nous devrions faire cette distinction entre le personnel de vente et le personnel administratif, etc.

En vertu d'une loi tout à fait claire, ces modestes taxations sont effectuées par rapport au nombre d'employés. Elles permettent de financer l'activité promotionnelle de l'Office du tourisme, donc d'investir pour que les commerçants bénéficient des retombées ainsi générées.

Cette interpellation urgente est close.

IU 357
6. Réponse du Conseil d'Etat à l'interpellation urgente de M. René Longet sur la mise en vigueur des nouveaux horaires CFF. ( ) IU357
Mémorial 1997 : Développée, 5011.

M. Gérard Ramseyer, conseiller d'Etat. Dans le cadre de «Rail 2000», l'offre intitulée «Impulsions 97», visant à l'amélioration globale des services, comporte, il est vrai, des décalages horaires plus importants que les précédents.

J'en viens à la manière dont la consultation a été conduite. Mon département a scrupuleusement suivi l'ordonnance fédérale sur les horaires fixes. Deux réunions de la commission consultative genevoise des horaires CFF ont été tenues en juillet 1995 et en novembre 1996. Cette commission regroupe entre autres l'OTC, les CFF, l'ATE, la CITRAP, Alpes-Rail, l'aéroport et l'OTG.

Plusieurs demandes écrites de modification, émanant de mon département et portées aux débats, ont fait l'objet d'une parution dans la «Feuille d'avis officielle».

Cet horaire concerne sept cent vingt mille usagers par jour. Bien entendu, ceux qui sont satisfaits ne se manifestent pas, alors que les mécontents s'expriment.

L'offre régionale entre Genève et Nyon sera améliorée dès que les CFF disposeront de la troisième voie Genève/Coppet.

Ainsi, Monsieur le député, tout a été organisé en fonction d'une disposition légale que nous avons scrupuleusement respectée.

Cette interpellation urgente est close.

 

IU 358
a) Interpellation urgente de M. René Longet sur la fusion «Journal de Genève» - «Nouveau Quotidien». ( ) IU358
Mémorial 1997 : Développée, 5012.
IU 361
b) Interpellation urgente de M. Bernard Clerc sur la disparition du «Journal de Genève» et les implications sur la liberté de la presse. ( ) IU361
Mémorial 1997 : Développée, 5015.

7. Réponse du Conseil d'Etat aux interpellations urgentes suivantes :

M. Jean-Philippe Maitre, président du Conseil d'Etat. Les députés Longet et Clerc ont développé chacun une interpellation urgente à propos de la fusion du «Journal de Genève» et du «Nouveau Quotidien».

Il y a quelques mois, des discussions ont été engagées par le «Journal de Genève» et le «Nouveau Quotidien» sur ce qui était une volonté de coopération et non un projet de fusion. Ces discussions n'ont pas abouti. Elles ont donné lieu à des communiqués selon lesquels chaque journal continuerait à suivre la politique propre à son titre.

Après l'échec des négociations avec le «Nouveau Quotidien», le «Journal de Genève» a poursuivi des réformes déjà engagées, allant jusqu'à annoncer à ses lecteurs une présentation nouvelle et une modification du rythme des parutions. On parlait de la suppression de l'édition du samedi et de ses incidences sur le «Samedi littéraire» et sur des éditions connexes.

Dans ce contexte, le «Journal de Genève» a vu, dès le début de l'année, croître le nombre de ses abonnements et son volume de publicité. Tout récemment, il annonçait des prévisions financières meilleures que celles inscrites à son budget et des chiffres noirs pour fin 1998; il affirmait pouvoir quitter, à partir de cette date, la zone de pertes qui était la sienne depuis de nombreuses années.

Il y a quelques jours, nous avons appris la nouvelle de la fusion du «Journal de Genève» et du «Nouveau Quotidien». J'ai immédiatement pris les contacts nécessaires. Voici ce qu'il en est résulté :

La décision de fusionner n'est concrétisée que par une seule lettre d'intention. Aucun document ne certifie que des pourparlers ont été engagés plus avant. Cette lettre d'intention fixe l'objectif de réaliser ce qui doit l'être pour aboutir à la naissance d'un nouveau titre, au début de l'année prochaine.

Dans le contexte que je viens d'évoquer, à savoir le redressement financier du «Journal de Genève», la décision prise va à contre-courant de la restructuration de la publication telle qu'annoncée. Elle a d'ailleurs été prise à la suite de négociations conduites, de toute évidence, dans le plus grand secret, puisque les rédacteurs en chef respectifs n'ont même pas été informés de ce que nous savons maintenant.

On ne pourra jamais savoir si cette décision constitue une démission, face à ce qui était possible pour le «Journal de Genève», ou une anticipation judicieuse par rapport à ce qui s'avérait inéluctable.

Compte tenu du programme de redressement entrepris, nous aurions souhaité que le «Journal de Genève» s'accorde le temps de tester, de manière opérationnelle, le bien-fondé et le succès des réformes engagées.

Le Conseil d'Etat regrette cette décision de fusionner pour plusieurs raisons. La première, évidemment, est la perte d'un élément contribuant à la diversité de la presse pour la Romandie et plus spécialement pour notre canton, ce quotidien incluant «Genève» dans son titre. Cela n'est pas sans incidence, le «Journal de Genève» ayant de nombreux abonnés à l'étranger.

Cette perte aura nécessairement une conséquence sur l'emploi, et j'en viens aux questions posées à ce propos.

Monsieur Clerc, vous avez cité des chiffres. Je rends hommage à votre vision et apprécie les informations dont vous disposez. En l'état, personne n'est en mesure d'annoncer les chiffres qui sont les vôtres. En revanche, une fusion supprime toujours des emplois. C'est, malheureusement, une évidence.

Des discussions ont d'ores et déjà été engagées. J'en ai eu, personnellement, avec M. Gilbert Coutau qui m'a informé que seuls des principes avaient été fixés dans une lettre d'intention et que trois paramètres devaient être considérés, en ce qui concerne les emplois.

Le premier se rapporte aux emplois des journalistes; le deuxième, aux emplois administratifs; le troisième, au secteur de l'impression, le centre d'imprimerie de Vernier pouvant être affecté.

J'ai informé M. Coutau de notre volonté de faire en sorte que l'impact sur les emplois soit le plus faible possible. Je lui ai dit que nous prêterions une attention toute particulière notamment aux emplois affectés à la composition et à l'impression, afin que Genève ne soit pas perdante, vu les circonstances liées à la reprise du centre de Vernier par Edipresse. Je lui ai fait savoir qu'il s'agissait là d'un noyau dur.

La structure de la nouvelle publication devra être considérée, selon ses protagonistes, comme un projet devant bénéficier de toutes les chances possibles. Il importe, en effet, que la publication issue de la fusion du «Journal de Genève» et du «Nouveau Quotidien» puisse avoir les meilleures chances de succès, en acquérant un titre de référence en Suisse romande.

Vous connaissez la répartition envisagée du capital-actions : 47% pour le «Journal de Genève»; 47% pour Edipresse; 6% pour la société des rédacteurs. M. Coutau m'a informé que le siège de la nouvelle publication et sa rédaction principale seront à Genève, mais cela ne signifie pas que Lausanne ne sera qu'une simple antenne.

Voilà les informations et prises de position que je pouvais vous communiquer.

Quant à la question de l'aide indirecte à la presse, je rappelle que votre Grand Conseil vient de renvoyer une motion à ce sujet au Conseil d'Etat, laquelle sera débattue au moment où nous rendrons rapport. Actuellement, nous procédons à certaines investigations.

Néanmoins, je rappelle que votre Grand Conseil devra choisir, une fois pour toutes, la doctrine qui lui semblera être la bonne, car il nous enjoint continuellement de réaliser des économies dans tous les domaines. En l'occurrence, il y a probablement une nouvelle donne. Si vous la voulez, il faudra que vous en donniez les moyens au gouvernement et à l'administration.

Ces interpellations urgentes sont closes.

 

IU 359
8. Réponse du Conseil d'Etat à l'interpellation urgente de Mme Fabienne Bugnon sur la précarité des conditions des enfants vivant dans la clandestinité. ( ) IU359
Mémorial 1997 : Développée, 5013.

M. Gérard Ramseyer, conseiller d'Etat. La politique de la police ne s'est pas durcie à l'égard des clandestins. En revanche, il est notoire que l'immigration clandestine est en hausse.

Cela étant, je rappelle que la police a pour obligation d'appliquer le droit, notamment la loi fédérale sur le séjour.

Ce type d'infraction ne fait pas l'objet d'une action répressive en tant que telle. C'est dans le cadre de poursuites engagées pour des infractions relevant du code pénal, en particulier les vols et les affaires de drogue, que des clandestins sont interpellés.

La police n'a jamais mené d'actions ciblées dans les milieux où, à l'évidence, des personnes en situation irrégulière sont employées. Je fais allusion aux cafés-restaurants, aux chantiers et aux exploitations agricoles.

Il n'y a pas de contrôles d'identité en fonction d'une apparence physique, quelle qu'elle soit.

Je n'ai pas de statistiques particulières sur le nombre d'enfants de clandestins ayant dû quitter la Suisse.

Je rappelle que le canton de Genève fait preuve d'une tolérance remarquable dans le traitement des dossiers des clandestins qui, enfreignant la loi, doivent être renvoyés de Suisse. Les enfants scolarisés ont la faculté de terminer l'année scolaire engagée, et leur départ est négocié au sein d'un groupe interdépartemental réunissant mon département et celui de l'instruction publique.

Il faut remarquer qu'il y a de plus en plus de familles, et non d'individus, en situation irrégulière. Ces familles mettent leurs enfants à l'école dès leur entrée à Genève. Cette démarche influence la durée effective du séjour clandestin en permettant sa prolongation, puisque les délais de départ, particulièrement souples, sont fixés à la carte.

Les renvois sont effectués par simple remise d'une carte de sortie par la police. Le bureau d'aide au départ de la Croix Rouge est également actif dans le domaine de l'aide au retour des clandestins.

Cette interpellation urgente est close.

 

IU 360
9. Réponse du Conseil d'Etat à l'interpellation urgente de Mme Fabienne Bugnon sur les conditions des atterrissages d'urgence et les impacts sur l'environnement. ( ) IU360
Mémorial 1997 : Développée, 5014.

M. Jean-Philippe Maitre, président du Conseil d'Etat. Le 20 juin dernier, un DC-10 tout cargo Genève/Singapour via Dubaï a connu un problème de réacteur, peu après son envol.

Après concertation avec la tour de contrôle et prenant les responsabilités qui sont les leurs, les pilotes ont décidé de faire demi-tour et de se poser. Les réservoirs de l'avion étaient pleins de kérosène en prévision de la destination finale.

Les pilotes ont dû respecter les procédures prévues en la matière, c'est-à-dire larguer une partie du kérosène pour atterrir dans des conditions de sécurité optimales. Selon ces procédures, le largage a eu lieu au-dessus du lac, à l'altitude prescrite pour ce faire. Dans ces cas fort rares de délestage, le kérosène se volatilise immédiatement sous l'effet de buses mises sous forte pression.

Des enquêtes ont immédiatement été ouvertes, notamment sur les causes de l'incident et sur l'impact éventuel sur l'environnement. Le service de l'écotoxicologue cantonal a été mis en oeuvre. Il procédera à des analyses de l'eau du lac et, au-delà, à celles des eaux de pluie.

En l'état actuel de nos informations, aucune conséquence sur l'environnement n'a été constatée, suite à ce largage de kérosène qui a permis à un avion en difficulté d'atterrir sans aucun dommage pour les personnes à bord. Il ne faudrait quand même pas l'oublier !

Cette interpellation urgente est close.

 

IU 362
10. Réponse du Conseil d'Etat à l'interpellation urgente de M. Bernard Clerc sur le statut fiscal de M. Metin Arditi. ( ) IU362
Mémorial 1997 : Développée, 5017.

M. Olivier Vodoz, conseiller d'Etat. Je vous remercie, Monsieur le député Clerc, de m'avoir remis le texte de votre interpellation urgente d'hier soir.

Ce que vous avez compris des explications que j'avais fournies au président du Conseil d'Etat, en raison de mon voyage à l'étranger la semaine passée, diffère quelque peu de ce qui ressort de leur transcription dans le Mémorial. Ce n'est pas grave, mais j'entendais le préciser par souci de clarté.

Cela dit, je ne vous cache pas, Monsieur le député, que je balance entre mon souhait de transparence et l'application du secret fiscal, à teneur de l'article 347, en ce qui concerne le rôle, et de l'article 348 LCP.

Je m'appuie sur l'avis des juristes pour vous dire que je ne partage pas votre opinion sur le caractère non absolu de l'article 348 qui dresse la liste exhaustive des personnes qui peuvent accéder aux secrets fiscaux.

Comme convenu avec M. le procureur général, je fournis toujours des renseignements à la justice après qu'elle les a sollicités et légitimés par écrit. La personne concernée par le secret fiscal peut toujours recourir si elle estime que nous les avons délivrés à tort.

J'opte évidemment pour le secret fiscal, car je n'entends pas, tant que je serai en fonction, qu'à divers titres et en provenance de n'importe quel banc de ce Grand Conseil l'on m'interpelle pour connaître le statut fiscal de telle ou telle personne.

En effet, le secret fiscal ne couvre pas seulement le fond, mais également le rôle et, par conséquent, l'assujettissement.

En revanche, je puis vous dire, en citant les termes exacts, que la personne en cause est «assujettie de manière illimitée» dès le 1er janvier 1997, comme elle l'était avant sa prise de domicile en Grèce, en été 1989, pour des motifs personnels qu'il ne m'appartient pas de dévoiler ici, mais qui sont «ténorisés» par des documents judiciaires.

Pendant les années séparant son départ de son retour - principalement dû au décès de son père qui vivait à Genève - cette personne a été imposée sur ses revenus à la source, non pas à teneur de l'article 28 qui ne s'applique pas au cas d'espèce, mais à teneur de l'article 7 de la loi sur l'imposition à la source, cela indépendamment de l'imposition de sa société existant à Genève et de l'imposition de ses tiers familiaux.

Voilà ce que je pouvais dire en réponse à cette interpellation urgente.

Cette interpellation urgente est close.

IU 363
11. Réponse du Conseil d'Etat à l'interpellation urgente de M. Luc Gilly sur le bien-fondé de la construction d'un abri de protection civile dans le bâtiment du World Economic Forum. ( ) IU363
Mémorial 1997 : Développée, 5018.

M. Claude Haegi, conseiller d'Etat. Les questions de cette interpellation urgente sont les suivantes :

1. Faut-il construire un garage de l,2 million de francs avec les deniers publics, en le faisant passer sous une rubrique financière pour la protection civile ?

2. Si c'est vraiment un abri de protection civile, est-il nécessaire de prévoir six à sept cents places, alors que des villas du quartier en sont équipées ?

Il s'agit là d'une volonté locale d'améliorer la situation de la population colognote en lui offrant une répartition plus adéquate des places protégées. En matière d'obligation formelle, une cinquantaine de places aurait suffi par rapport au nombre d'habitants.

Dans le cas présent, l'ensemble de l'ouvrage est financé par la commune seule. Cette réalisation ne coûte pas un sou à la Confédération et au canton. Par conséquent, la commune est libre d'agir selon son choix.

Il convient de préciser que toutes les villas ne sont pas équipées, l'obligation de construire des abris dans les résidences individuelles ne datant que des années 60.

De surcroît, je vous signale qu'aucun abri public n'existe sur le coteau de Cologny dont la surface équivaut à la moitié de celle de la commune.

Vous demandez encore si l'on doit, dans le cadre de la restructuration de la PC du canton de Genève, construire ce type d'abri aux utilités plus que douteuses, selon votre appréciation. Je me contente de vous informer qu'il s'agit d'une disposition fédérale sur le principe et non d'une disposition cantonale.

J'ajoute que ce type d'abri collectif correspond mieux aux risques actuels qu'à ceux qui existaient au moment de la création de la protection civile.

Votre dernière question étant : «Où sont donc les menaces ?», je ne vous répondrai pas qu'elles viennent de l'Est ou de l'Ouest. Les menaces sont diverses et plus seulement guerrières. La protection civile actuelle est également conçue pour des risques majeurs.

Cette interpellation urgente est close.

IU 364
12. Réponse du Conseil d'Etat à l'interpellation urgente de Mme Elisabeth Häusermann sur la sécurité routière à Onex. ( ) IU364
Mémorial 1997 : Développée, 5020.

M. Gérard Ramseyer, conseiller d'Etat. Mme Häusermann a de gros soucis avec les carrefours à quatre stops.

De 1991 à 1995, mon département a mis en place vingt-quatre carrefours réglementés par des stops. Ces dispositifs existent ailleurs en Suisse. C'est une alternative aux giratoires, lesquels sont plus coûteux, plus longs à construire, plus gourmands d'espace, tout en étant moins favorables aux cycles et aux piétons.

En 1994, un courrier de l'Office fédéral de la police indiquait que le principe de la priorité de droite restait applicable dans ce type de situation.

Dès lors, je vous rends attentifs au cas de figure suivant : si quatre véhicules sont arrêtés chacun à un stop, c'est la priorité de droite qui s'applique, mais comme chaque véhicule est situé à la droite du véhicule se trouvant à sa gauche, on ne sait toujours pas lequel est prioritaire !

Il n'empêche que cette réglementation a été très favorablement accueillie. Aucune opposition, aucune demande de modification, aucune contestation, aucun recours, n'a été enregistré.

En collaboration avec le TCS, nous avons lancé une étude financée par différents services des cantons de Genève, Vaud, Jura et de la Ville de Lausanne, afin de connaître le bilan de ces carrefours.

Une décision du Conseil fédéral, datant de septembre 1995, stipule que cette installation est contraire au droit confédéral, de sorte que nous avons décidé :

1. de ne plus modifier d'intersections à l'aide de ce système;

2. de suspendre toute nouvelle mise en place avant l'entrée en vigueur d'une nouvelle réglementation.

Cela étant, la Conférence romande des chefs des départements de justice et police, que j'ai l'honneur de présider, a renvoyé cet objet à la Commission suisse de la circulation, en mars 1997, pour que l'ordonnance fédérale sur la circulation routière soit modifiée en conséquence.

Cette interpellation urgente est close.

 

PL 7579-A
13. Rapport de la commission du logement chargée d'étudier le projet de loi du Conseil d'Etat instituant des mesures temporaires destinées à favoriser l'accession à la propriété du logement et la relance de l'économie dans le secteur immobilier. ( -) PL7579
 Mémorial 1997 :  Lettres, 1603, 1980, 2386. Projet, 2376. Renvoi en commission, 2398.
  Divers, 5376.
Rapport de majorité de M. Claude Lacour (L), commission du logement
Rapport de minorité de M. Laurent Moutinot (S), commission du logement

RAPPORT DE LA MAJORITÉ

Ce projet de loi a été présenté au Grand Conseil le 24 avril 1997 (Mémorial, pages 2396 à 2391), il a été renvoyé à la commission du logement, après débat de préconsultation (Mémorial, pages 2392 à 2398).

Objet et principes du projet de loi

En ce qui concerne la base de cette nouvelle législation, le rapporteur se réfère expressément à l'exposé des motifs, particulièrement complet (Mémorial, pages 2376 à 2390).

La commission s'est réunie en urgence et a siégé à quatre reprises dans le courant des mois de mai et juin 1997.

Audition de la Chambre genevoise immobilière (CGI), représentéepar MM. Pierre Félicité-Ivanes, président, Mark Mueller, secrétaire général, et la Société des régisseurs de Genève, représentéepar M. Léonard Vernet, président

La CGI relève qu'elle est heureuse de voir les députés se pencher sur la question de savoir comment l'on pourrait promouvoir à la fois l'accession à la propriété et militer en faveur de l'économie immobilière et de la construction.

Il est rappelé que ce projet de loi respecte et constitue une application de l'article 10 de la constitution genevoise qui parle de droit au logement, que ce soit sous la forme «d'une location ou de l'accession à la propriété». La CGI cite l'exemple du canton de Fribourg qui a promulgué une loi analogue. Elle cite également l'expérience française analogue, qui a provoqué finalement un boom en fin d'année d'exécution des mesures.

Il est suggéré d'englober parmi les logements visés ceux qui ont été construits en 1989 et 1990 et qui sont restés vacants pendant un certain temps ne pouvant être mis en location à cause de la loi sur les démolitions, transformations et rénovations de maisons d'habitation. Ces propriétaires avaient convenu un accord avec le département des travaux publics et de l'énergie pour qu'une mise en location temporaire n'entraîne pas une interdiction de vente par la suite. La CGI considère qu'il serait donc injuste aujourd'hui de les pénaliser par rapport à ceux qui auraient gardé des logements libres sans les louer.

Il est demandé à ce que la commission décide rapidement, car tant que la loi est en suspens, les intéressés ont tendance à retarder une décision d'achat, faute de situation claire. De même, il serait utile que les logements vendus en deuxième main puissent également bénéficier des mesures envisagées. Il est relevé que la CGI n'est pas opposée à un paiement des droits de mutation différé dans le temps pour autant qu'il s'agisse de l'intégralité de ces droits.

Après son audition, la CGI a adressé à la commission une lettre datée du 22 mai 1997 par laquelle elle précise sa position, notamment compte tenu des amendements amenés au projet (voir annexe I). De même, l'Association des promoteurs constructeurs genevois et la Société des régisseurs de Genève ont adressé à la commission une lettre datée du 26 mai 1997, indiquant que «n'ayant pu participer à l'audition de la Société des régisseurs de Genève, elle communique par écrit sa position» (voir annexe II).

Audition du Rassemblement pour une politique sociale du logement (RPSL) représenté par M. Carlo Sommaruga, secrétaire général,et Mme Sabina Mascotto, secrétaire adjointe

Le RPSL n'est pas opposé au principe de l'accession à la propriété, mais il milite pour une forme sociale, à savoir le système coopératif.

Le RPSL est favorable à un système d'étalement dans le temps du paiement des droits d'enregistrement et d'émoluments au registre foncier.

Il précise que cette facilité doit être restreinte par diverses conditions touchant au taux d'occupation, au taux d'effort, au type d'objet et au type de remboursement de cette aide.

En ce qui concerne le taux d'occupation, il entend se référer aux règles de la PPE / HLM et, par conséquent, ne pas exonérer l'accession à la propriété lorsqu'il y a plus de trois pièces par rapport au nombre de personnes qui composent le groupe familial. Il estime que la fortune ne doit pas excéder la moitié du prix de revient du logement et considère acceptable la limite de 100 000 F/pièce.

Pour le taux d'effort, le RPSL se réfère à l'exemple des PPE / HLM qui prévoit un taux d'effort de 20%.

Il estime que la loi doit se limiter aux objets neufs ou en construction et non pas à ceux qui ont déjà été construits et qui n'ont pas trouvé d'acheteur.

A noter que le RPSL avait adressé à la commission ses remarques par une lettre datée du 23 avril 1997 (voir annexe IV).

Postérieurement à son audition, le RPSL a également adressé à la commission un courrier daté du 29 mai 1997 pour faire part de son point de vue, notamment quant aux amendements désirés (voir annexe III).

A noter encore qu'en date du 21 mars 1997, l'Association genevoise de défense des locataires - ASLOCA avait adressé une lettre au Grand Conseil concernant ce projet de loi et faisant part de son point de vue (voir Mémorial, pages 2387 à 2388).

Travaux de la commission

La commission a tout d'abord écouté M. Claude Haegi, conseiller d'Etat chargé du département de l'intérieur, de l'environnement et des affaires régionales, qui a précisé les intentions du Conseil d'Etat, cela à la suite de la discussion qui avait eu lieu en débat préalable auprès du Grand Conseil. Il a précisé à nouveau que ce projet de loi n'était pas destiné à favoriser des produits inadaptés au marché ni d'aider des gens qui ont des revenus ou une fortune importants. Le but de la loi est d'aider ceux dont les moyens existent mais sont limités et avant tout de lutter contre les effets de la crise, notamment le chômage, par une action «coup de poing» extrêmement ciblée.

Les débats ont ensuite porté sur divers points cités ci-après dans l'ordre où ils ont été discutés :

- il est demandé à de nombreuses reprises que la loi comprenne une limitation de la fortune;

- il est demandé de limiter la loi aux logements neufs ou en construction;

- il est demandé par quelques commissaires de renoncer à l'exonération et de la remplacer par un paiement différé;

- il est relevé à plusieurs reprises la situation particulière de Genève qui n'a que 14% de propriétaires;

- il est également rappelé à maintes reprises que ce projet de loi est extrêmement limité dans le temps et que ce caractère temporaire a pour but d'inciter les gens à se décider rapidement;

- il est rappelé que la loi n'est pas faite pour des personnes qui peuvent acheter des objets à plus d'un million de francs, mais au contraire, c'est l'acquisition de petits objets au niveau du volume financier qui est visée;

- il est relevé que le marché a ses limites et notamment au-dessus de4 000 F/m2 on ne vend pas.

A ce stade de la discussion, le département a pris note des réserves faites et, pour répondre aux principaux défauts soulignés par certains députés ou commissaires, il propose trois amendements au projet de loi, à savoir :

1. limitation de la valeur de l'objet à 100 000 F/pièce;

2. taux d'occupation limité;

3. limite de fortune.

Ces amendements sont immédiatement examinés et discutés par les commissaires.

M. Claude Haegi rappelle qu'il y avait 277 logements à vendre, selon le recensement de juin 1996, répondant aux normes de 100 000 F/pièce. Ce sont ces logements-là qui sont visés et non pas les logements «rossignols», constitués notamment par des stocks d'habitations rachetés par les établissements bancaires.

La solution du taux concurrentiel est examinée et l'exemple du taux d'impôt dégressif sur les gains immobiliers est mis en avant.

Le problème de l'éventualité de la fixation d'un taux d'effort est repris et il est rappelé qu'il serait souhaitable que les charges du propriétaire pour le logement acquis ne soient pas supérieures au 20% du revenu, selon la définition de la loi générale sur le logement et la protection des locataires.

Le problème de savoir s'il faut se limiter aux 100 000 F/pièce ou au contraire fixer une limitation de prix par rapport au m2 est largement débattu, les deux critères ayant leurs défenseurs et se retrouvant dans diverses lois. De toute manière, si le critère du m2 doit être retenu, il est envisagé le baser sur le m2 PPE et de le fixer à 4 000 F, étant entendu qu'il s'agit de m2 habitables.

Enfin, une discussion s'instaure sur le problème de la durée de validité de la loi. D'un côté, il faut qu'elle ait un effet rétroactif de manière à éviter que des gens renoncent à des ventes dans l'attente de l'entrée en vigueur de la loi, de l'autre côté, il faut la limiter dans l'avenir pour que l'effet de coup de fouet soit plus perceptif.

Examen des articles modifiés et votes

L'entrée en matière est acceptée par 7 oui et 3 abstentions.

Article 1, lettre a

Il est demandé d'inclure dans la loi les logements «loués en attendant» ou qui, n'ayant pas trouvé de preneur depuis leur construction, devraient pouvoir bénéficier de l'effet de la présente loi.

Il est proposé également la formulation concernant des logements construits «dans le but d'être vendus».

Devant l'opposition ferme de certains députés, ces propositions ne sont pas retenues.

Il est proposé alors que, si l'on modifiait la lettre b dans le sens sus-indiqué, l'on renonce totalement à la lettre c.

Article 1, lettre b

Il est proposé de supprimer les termes «ni été loués» figurant à la deuxième ligne de ce paragraphe, en rappelant qu'en ce qui concerne la vente d'appartements destinés à la PPE et qui n'ont pas trouver de preneur, le cas est réglé par la nouvelle lettre c et qu'en définitive les objets visés à la lettre b sont les appartements qui ont été loués entre le 19 février 1997 et la mise en application de la nouvelle loi.

Finalement, la suppression des mots «ni été loués» est acceptée par 9 oui, 2 non et 2 abstentions.

La lettre c reste au projet de loi par 9 oui et 4 non et l'ensemble de.l'article 1, modifié à la lettre b, est accepté par 8 oui, 3 non et2 abstentions.

Article 2

Accepté par 9 oui et 4 abstentions.

Article 3

Egalement accepté par 9 oui et 4 abstentions.

Article 4

Accepté par 9 oui et 4 abstentions.

Article 5, alinéa 2

Proposition est faite de limiter par un chiffre précis la fortune à partir de laquelle l'acquéreur ne peut plus bénéficier des dispositions de cette loi.

Il est rappelé à cette occasion que l'aide fédérale ne fixe pas de maximum.

L'amendement consistant à ajouter au 2e alinéa les mots «mais au maximum 200 000 F» est finalement refusé par 5 oui, 5 non et 3 abstentions, de sorte que l'alinéa 2 est finalement accepté par 8 oui, 4 non et 1 abstention.

Article 5, alinéa 3

Il est proposé de remplacer le mot «propriétaire», à la première ligne, par «acquéreur», terme qui se retrouve, du reste, utilisé dans la loi à d'autres occasions.

A la deuxième ligne, pour éviter une répétition, le mot acquéreur est remplacé par «son».

A la suite de ces modifications de pure forme, l'alinéa 3 est accepté par 10 oui et 3 abstentions et l'article 5, dans son ensemble, par 9 oui et4 abstentions.

Article 6, alinéa 2

La référence au m2 habitable est remise en cause. Pour certains, le prix de 4 000 F/m2 paraît insuffisant en ce qui concerne les villas. Il est proposé alors de mettre les deux références, c'est-à-dire le prix à la pièce et au m2

Finalement, il est décidé de revenir à la notion de prix à la pièce habitable et de laisser la limite à 100 000 F.

Cette solution est acceptée par 11 oui et 2 abstentions, l'article 6 lui-même dans son ensemble étant accepté par 11 oui et 2 abstentions.

Article 7, alinéas 1 et 2

La note marginale est rectifiée en ce sens que la référence à l'immeuble est remplacée par la référence au logement.

A l'alinéa 1, les tenants de la suppression de l'exonération reprennent leur proposition de paiement immédiat avec échelonnement.

Cette proposition n'étant pas retenue, l'alinéa 1 est accepté par 11 oui,1 non et 1 abstention.

L'alinéa 2 est accepté par 9 oui et 4 abstentions et l'article 7 dans son ensemble est accepté par 9 oui et 4 abstentions.

Article 8

Accepté par 11 oui, 1 non et 1 abstention.

Article 9

Le problème de la rétroactivité est débattu. Il est proposé de mettre dans le texte la date du dépôt, soit le 19 février 1997. D'autres préféreraient la date du vote du Grand Conseil.

Finalement, le complément de date est accepté par 8 oui, 4 non et1 abstention et l'article 9 par 8 oui, 2 non et 3 abstentions.

Article 10

Compte tenu du temps déjà écoulé depuis le dépôt du projet de loi, il est proposé de prolonger la durée de validité au 30 décembre 1998 plutôt que le 30 décembre 1997.

Cette modification est acceptée par 9 oui et 4 non.

En ce qui concerne l'introduction d'un alinéa 2, la possibilité d'une unique prorogation est débattue et finalement, pour éviter tout nouvel affrontement, le département renonce à l'alinéa 2 de l'article 10, qui n'est ainsi pas soumis au vote.

Après une discussion concernant la compétence du ou des départements chargés d'examiner si les conditions de la loi sont remplies et l'application de la loi elle-même, l'ensemble du projet de loi est mis au vote et accepté par8 oui, 4 non et 1 abstention.

Conclusions

Au vu de ce qui précède, ainsi que des auditions et des nombreuses questions intéressantes que nous avons eues à examiner à la commission du logement, nous vous recommandons, Mesdames et Messieurs les députés, de suivre le vote de la commission du logement et de voter ce projet de loi.

Annexe I: Lettre de la CGI adressée le 22 mai 1997 à M. Pierre Ducrest, président de la commission du logement du Grand Conseil.

Annexe II: Lettre de l'APCG/SR adressée le 26 mai 1997 à la commission du logement du Grand Conseil.

Annexe III: Lettre du RPSL adressée le 29 mai 1997 à M. Pierre Ducrest, président de la commission du logement du Grand Conseil.

Annexe IV: Lettre du RPSL adressée le 23 avril 1997 au Grand Conseil de la République et canton de Genève.

Annexe V: Lettre de l'ASLOCA adressée le 21 mars 1997 au Grand Conseil de la République et canton de Genève.

(PL 7579)

PROJET DE LOI

instituant des mesures temporaires destinées à favoriser l'accessionà la propriété du logement et la relance de l'économiedans le secteur immobilier

LE GRAND CONSEIL

Décrète ce qui suit :

Article 1

La loi vise à encourager l'accession à la propriété du logement sis dans le canton de Genève et la relance de l'économie dans le secteur immobilier en favorisant la vente:

a) de logements neufs ou en cours de construction;

b) de logements déjà construits dans le but d'être vendus, mais qui n'ont jamais trouvé d'acquéreur à la date visée à l'article 9 de la présente loi;

c) de logements vendus, conformément à l'article 39 de la loi sur les démolitions, transformations et rénovations de maisons d'habitation, du 25 janvier 1996.

Art. 2

1 Est une acquisition au sens de la présente loi l'acte juridique opérant le transfert à titre onéreux d'un logement en propriété individuelle, copropriété ou propriété en main commune.

2 Sont notamment exclus du champ d'application de la présente loi les actes relevant du droit successoral et le transfert de participations à une personne morale.

Art. 3

1 Les actes d'acquisition d'un logement, au sens de la présente loi, sont exonérés des droits d'enregistrement et des émoluments du registre foncier, à concurrence des premiers 400 000 F du prix.

2 Les actes comportant constitution ou augmentation de gages immobiliers destinés au financement de l'acquisition d'un logement sont exonérés des droits d'enregistrement, des centimes additionnels et des émoluments du registre foncier, à concurrence d'un montant représentant 80% de la valeur du logement et 400 000 F au maximum.

Art. 4

Le paiement de l'impôt résultant du versement anticipé de fonds de la prévoyance professionnelle, en vue de l'acquisition d'un logement, est réparti en quatre annuités, à parts égales et sans intérêt, la première échéant 12 mois après la date d'acquisition du logement.

Art. 5

1 Peuvent bénéficier des dispositions de la présente loi les personnes physiques achetant le logement pour l'occuper elles-mêmes et y constituer leur domicile principal.

2 La fortune imposable de l'acquéreur et des personnes faisant ménage commun avec lui, avant les déductions sociales, ne doit toutefois pas excéder la moitié du prix d'acquisition mentionné dans l'acte.

3 Les charges de l'acquéreur ne doivent pas être inférieures à 20% de son revenu, tel que défini à l'ar-ticle 31C alinéa 1, lettre a, de la loi générale sur le logement et la protection des locataires, du 4 décembre 1977. On entend par charges les intérêts des sommes empruntées, l'amortissement des dettes et les frais d'exploitation de la propriété admis forfaitairement à 1% du prix d'acquisition.

Art. 6

1 Les logements acquis au bénéfice des dispositions de la présente loi doivent être affectés exclusivement à l'habitation et comprennent les locaux de dépôt et de service usuels en nombre et en dimension.

2 Le nombre de pièces de logement ne doit pas excéder de plus de 3 unités le nombre de personnes qui composent le groupe familial. Le prix à la pièce habitable ne peut pas excéder 100 000 F.

Art. 7

1 En cas de revente du logement dans un délai de 5 ans à compter de l'inscription au registre foncier, les impôts exonérés sont immédiatement exigibles sans intérêts rétroactifs.

2 En cas de fausse déclaration ou de violation de l'obligation d'occuper soi-même le logement acquis au bénéfice des dispositions de la présente loi, les émoluments et les impôts exonérés sont exigibles avec intérêts rétroactifs dans un délai de 5 ans, à compter de l'inscription au registre foncier de l'acquisition et ce sans préjudice d'autres sanctions civiles et pénales.

Art. 8

1 L'assujettissement aux dispositions de la présente loi fait l'objet d'une mention inscrite au feuillet du registre foncier de l'immeuble concerné.

2 Le registre foncier communique à l'administration fiscale cantonale les opérations assujetties à l'article 7 de la présente loi.

3 Il appartient à l'acquéreur de démontrer à l'administration fiscale cantonale et au registre foncier que les conditions d'assujettissement de l'acquisition immobilière à la présente loi sont remplies.

Art. 9

1 Lors de son entrée en vigueur, les effets de la présente loi rétroagissent à la date du dépôt du projet au Grand Conseil, soit le 19 février 1997.

2 Lors de l'entrée en vigueur de la présente loi, les droits d'enregistrement et émoluments du registre foncier versés à partir de la date définie à l'alinéa précédent sont remboursés sans intérêt si les conditions d'exonération sont remplies.

Art. 10

Les exonérations fiscales prévues à l'article 3 de la présente loi peuvent être obtenues jusqu'au 30 décembre 1998, la date d'immatriculation de l'acte au registre foncier faisant foi.

Art. 11

La présente loi entre en vigueur le

ANNEXE I

15

16

ANNEXE II

18

ANNEXE III

20

21

22

23

ANNEXE IV

25

26

ANNEXE V

28

RAPPORT DE LA MINORITÉ

Le 19 février 1997, le Conseil d'Etat déposait devant notre Grand Conseil le projet de loi instituant des mesures temporaires destinées à favoriser l'accession à la propriété du logement et la relance de l'économie dans le secteur immobilier.

Ce projet de loi vise, cumulativement, deux buts auxquels nous sommes certainement toutes et tous attachés: l'accession à la propriété du logement, d'une part, et la relance de l'économie, d'autre part. En revanche, le moyen proposé pour atteindre ces buts est manifestement inacceptable: l'exonération des droits d'enregistrement et des émoluments du Registre foncier est un cadeau injustifiable - même franchement indécent - à l'égard d'une petite couche de la population privilégiée par rapport aux difficultés dans lesquelles se débat la majorité de nos concitoyens. Ce projet est également particulièrement mal venu, alors que les comptes de l'Etat sont gravement déficitaires et que l'on prévoit de supprimer de la sorte une recette de plusieurs millions de francs par an.

Au début était la déraison totale...

Le projet de loi du Conseil d'Etat prévoyait, dans sa version initiale, l'exonération des droits d'enregistrement et des émoluments du registre foncier à concurrence des premiers 400 000 F du prix d'acquisition d'un logement, ainsi que l'exonération des droits d'enregistrement, des centimes additionnels et des émoluments du registre foncier relatifs à la constitution ou l'augmentation des gages immobiliers à concurrence de 80% de la valeur du logement et de 400 000 F au maximum.

Aucune limite de revenus n'était fixée en ce qui concerne les bénéficiaires de cette exonération. Aucune limite de fortune n'était davantage fixée en ce qui concerne les mêmes bénéficiaires.

Aucune limite n'était fixée quant aux objets exonérés, le projet traitant de manière identique les appartements, les villas contiguës, les villas individuelles, ou les châteaux !

Aucune limite n'était fixée quant aux véritables besoins de l'acquéreur.

De plus, le champ d'application de la loi couvrait aussi bien les logements neufs ou en cours de construction que les appartements déjà loués et même les «logements acquis par les vendeurs en compensation d'une créance hypothécaire et qui n'ont pas été mis en location».

En d'autres termes, le projet initial était un cadeau de l'Etat de Genève de 20 000 F à tout acquéreur d'un logement, quel que soit l'objet et quelle que soit la situation personnelle et financière de l'acquéreur.

Où la raison commence à prévaloir...

Le Rassemblement pour une politique sociale du logement ainsi que l'ASLOCA ont immédiatement fait savoir que le projet dans sa version initiale serait attaqué par un référendum (annexes I et II). De plus, dans les rangs de l'entente, d'aucuns ont dû se souvenir de l'échec cuisant de la loi Wellhauser, sévèrement rejetée par le Peuple, alors même que la situation sociale et les finances publiques étaient fort différentes d'aujourd'hui.

Lors des travaux en commission, différents garde-fous ont été introduits dans la loi, afin d'en atténuer les défauts les plus criants, mais sans toutefois toucher aux principes mêmes de cette législation qui reste un incroyable cadeau en faveur d'une minorité bien nantie.

Les améliorations portées au projet de loi initial sont les suivantes:

1. Les logements acquis par les vendeurs en compensation d'une créance hypothécaire et qui n'ont pas été mis en location - en réalité les objets sur lesquels il a été spéculé et qu'ont dû reprendre à leur valeur de gage les établissements bancaires - sont exclus du champ d'application de la loi.

2. Il a été précisé, à l'article 5, alinéa 2, que la fortune imposable de l'acquéreur avant les déductions sociales ne doit pas excéder la moitié du prix d'acquisition mentionné dans l'acte. Un amendement tendant à ce que ladite fortune imposable ne devait en tout état pas dépasser 200 000 F a cependant été refusé en commission. Il en résulte par conséquent que celui qui entend acquérir une villa d'un million de francs peut parfaitement disposer d'une fortune de 499 999 F et bénéficier de l'exonération du droit d'enregistrement sur les premiers 400 000 F du prix d'achat, à savoir un cadeau de 20 000 F pour un contribuable dont la situation personnelle est plus qu'enviable.

3. De la même manière, la commission a introduit un taux d'effort de 20% en deçà duquel l'exonération n'est pas consentie. Toute proposition de préciser en revanche dans la loi le montant, en francs, du revenu au-delà duquel aucune exonération ne serait consentie n'a été acceptée par la commission. Un rapide calcul démontre qui pourrait dès lors bénéficier de la loi:

- Nombre de personnes composant le groupe familial : 4 

- Type de logements: 6 pièces 

- Prix d'achat maximum: 600 000 F

- Fortune maximum: 300 000 F

- Charges (grâce à la caution de la loi Operiol):

 540'000 F × 5% = 27 000 F

- Amortissement:

 540 000 F × 2% = 10 800 F

- Frais d'exploitation:

 à raison de 1% du prix (art. 5, al. 3): 6 000 F

- Total: 43 800 F

- Limite de revenus: 43 800 F : 20% = 219 000 F.

4. La commission a fixé un garde-fou en précisant, à l'article 6, alinéa 2, que «le nombre de pièces du logement ne doit pas excéder de plus de 3 unités le nombre de personnes qui composent le groupe familial». Dans la même disposition, il a été également été précisé que le prix à la pièce habitable ne peut pas excéder 100 000 F. Ces deux garde-fous sont certes de nature à éviter certains abus, mais ne modifient en aucune manière le fond même de la loi.

5. La commission a enfin fixé que les exonérations étaient accordées avec effet rétroactif depuis le 19 février 1997, jusqu'au 30 décembre 1998, sans possibilité de prolongation. L'effet «coup de poing» de la loi est ainsi singulièrement atténué par le fait qu'au lieu d'encourager des opérations à venir, il ne fait qu'obliger l'Etat à rembourser des opérations déjà effectuées...

Où la raison devrait définitivement triompher...

Les amendements apportés par la commission au projet initial ont pour effet de soustraire à la loi les cas les plus inadmissibles, mais ils ne modifient en rien le système fondamentalement inacceptable d'un cadeau fiscal à une couche de la population qui n'en a manifestement pas besoin.

La minorité de la commission vous propose, par conséquent, un système différent, susceptible à la fois de favoriser l'accession à la propriété du logement, de favoriser la relance de l'économie dans le secteur immobilier et de ménager les finances publiques: il s'agit dès lors de remplacer l'exonération des droits d'enregistrement par un système de paiement échelonné et de limiter ce système à des objets neufs ou récemment construits. Cette proposition offre, de surcroît, l'avantage d'être praticable à long terme et de ne pas se limiter, par conséquent, à une simple opération «coup de poing».

Lors de l'examen du projet de loi Operiol, l'Association des promoteurs constructeurs genevois avait d'ailleurs émis le souhait que l'aide de l'Etat soit réservé aux logements neufs, compte tenu de l'effet de relance attaché à une telle mesure.

La minorité de la commission propose dès lors de modifier l'article 3 de la loi, pour préciser que les droits d'enregistrement et les émoluments sont payables en quatre annuités, sans intérêts, la première échéant douze mois après la date d'acquisition du logement. Ce système permet d'atténuer pour l'acquéreur les frais importants qu'il doit engager au moment de l'acquisition en les répartissant dans le temps et évite à l'Etat - mis à part l'effet d'érosion dû à l'inflation - les pertes qu'engendre le système de l'exonération pure et simple.

Il va de soi qu'un tel système n'est pas concevable pour une période limitée et qu'il est dès lors susceptible d'être l'une des pierres de base du système genevois d'acquisition de son propre logement.

L'article 3 de la loi ainsi amendé est le suivant:

Art. 3

1 Les droits d'enregistrement et les émoluments du registre foncier, à concurrence des premiers 400 000 F du prix sont payables en quatre annuités, à parts égales et sans intérêts, la première échéant douze mois après la date d'acquisition du logement.

2 Il en va de même des droits d'enregistrement, des centimes additionnels et des émoluments au registre foncier concernant les actes comportant constitution ou augmenta-tion de gages immobiliers destinés au financement de l'acquisition d'un logement et à concurrence du 80% de la valeur du logement et de 400 000 F au maximum.

Cette modification entraîne l'abrogation pure et simple des articles 9 et 10, dès lors qu'il n'est plus nécessaire, ni de prévoir une quelconque rétroactivité de la loi, ni d'en prévoir la date d'échéance.

Pour mettre en accord le reste de la loi avec le système du délai de paiement, il convient d'apporter une légère modification à l'article 7 de la loi, qui doit dès lors être rédigé de la manière suivante:

Art. 7

1 En cas de revente du logement dans un délai de 4 ans à compter de l'inscription au registre foncier, la totalité des droits, émoluments et autres impôts non encore payés sont immédiatement exigibles.

2 En cas de fausse déclaration ou de violation de l'obligation d'occuper soi-même le logement acquis au bénéfice des dispositions de la présente loi, les impôts et les émoluments non encore payés sont immédiatement exigibles, avec intérêts rétroactifs, à compter de l'inscription au registre foncier de l'acquisition et ce sans préjudice d'autres sanctions civiles et pénales.

Un deuxième amendement est nécessaire pour que la loi atteigne le but de relance de l'économie en limitant le champ d'application de la loi aux objets neufs, en cours de construction, ou récemment construits. Il importe dès lors de biffer l'article 1, lettre c, qui, outre qu'il ouvre une porte dangereuse en direction des congés-ventes, a pour effet de faciliter la vente d'objets anciens, soit une opération qui ne contribue en rien à la relance du secteur de l'immobilier, mais qui accroît en revanche la pénurie d'appartements à louer qui sévit toujours pour les appartements de deux pièces et demie à six pièces, qui sont les types d'appartements les plus demandés à Genève.

Enfin, un troisième amendement permettra de limiter le cercle des bénéficiaires, afin d'en exclure les personnes fortunées. Il s'agit de rajouter à l'article 5, alinéa 2, que la fortune imposable des bénéficiaires ne doit pas dépasser 200 000 F; l'article 5, alinéa 2, étant dès lors rédigé de la manière suivante:

2 La fortune imposable de l'acquéreur et des personnes faisant ménage commun avec lui, avant les déductions sociales, ne doit toutefois pas excéder la moitié du prix d'acquisition mentionné dans l'acte, mais au maximum 200 000 F.

En adoptant les amendements qui vous sont proposés par la minorité, vous parvenez, Mesdames et Messieurs les députés, plus sûrement aux buts mêmes du projet de loi et vous dotez Genève d'un instrument en faveur de l'accession à la propriété susceptible de produire des effets à court, à moyen et à long terme, en lieu et place d'un projet de loi qui relève à la fois de la provocation et de l'opération électorale mal comprise.

Vous constaterez également, à la lecture de la lettre du Rassemblement pour une politique sociale du logement, du 29 mai 1997 (annexe III), que la proposition qui vous est faite par la minorité va en deçà des conditions souhaitées par le Rassemblement, notamment en ce qui concerne le contrôle du taux d'effort, et qu'elle s'avère, par conséquent, des plus modérées.

Pour conclure, le rapporteur de la minorité laissera la parole à M. Olivier Vodoz, président du département des finances, qui, interrogé par la «Tribune de Genève» au sujet du projet de loi en cause, a indiqué: «J'ai eu de la peine à voir passer ce projet, c'est une question de priorité. Je ne crois pas qu'il soit raisonnable aujourd'hui de militer pour une baisse de la fiscalité. Dans le contexte actuel, la stabilité est déjà un engagement important».

Premier débat

La présidente. En vue de ce débat, des documents complémentaires ont été déposés sur vos places.

feuille A4 1

2

3

4

lettre du Rassemblement pour une politique sociale du logement

C 628

2

M. Gérard Laederach (R). A situation exceptionnelle, solution exceptionnelle. Après le projet de loi sur le bonus à la rénovation voté par notre parlement qui, rappelons-le, a généré à ce jour plus de 100 millions de travaux dans notre canton pour 10 millions alloués en 1996, voici un autre projet de loi dont le but est d'inciter les gens, notamment les jeunes familles, à acquérir leur logement.

Ce projet de loi est dans la droite ligne de l'action qu'un Etat responsable se doit de suivre. D'Etat-providence, il devient Etat-partenaire. Ce projet de loi, style «coup de pouce», vient à point nommé. D'une durée limitée, dans une période particulièrement favorable quant aux prix pratiqués, il vise à relancer la consommation.

Le parti radical croit plus en ce type d'action qu'à l'effet d'une baisse des impôts évoquée, ici, à maintes reprises.

Ce projet de loi répond concrètement à l'attente d'une grande partie des citoyens de ce canton qui voient enfin un encouragement significatif à la matérialisation de leur rêve.

Quant aux critiques négatives de ce projet de loi, relatives aux diminutions des rentrées fiscales, rappelons que l'acte d'acquérir son logement induit automatiquement des besoins de consommation.

Ce projet de loi contribuera à l'attachement indéfectible des futurs propriétaires à leur canton.

C'est pour ces raisons que le parti radical votera ce projet de loi.

M. Claude Haegi, conseiller d'Etat. J'étais quelque peu distrait, car je souhaitais ouvrir le débat pour préciser une ou deux choses.

Vous aurez trouvé, à vos places, un document qui présente le projet de loi tel qu'il ressort de la commission sur sa partie gauche et, sur sa partie droite, un projet de loi modifié suite aux discussions complémentaires qui ont eu lieu, lesquelles étaient animées par l'esprit de recherche d'un consensus.

Le projet de loi, tel que ressorti de la commission, est bien différent de celui que je vous avais proposé avec l'appui du Conseil d'Etat. Je pensais alors donner une impulsion à la consommation d'une manière générale, plus particulièrement dans le secteur immobilier, en suggérant la suppression des droits d'enregistrement dans les conditions d'alors, qui ne sont plus celles figurant dans le texte issu de la commission.

En commission et déjà en débat parlementaire, un certain nombre d'entre vous, le Rassemblement, l'ASLOCA, ont dit ne pas pouvoir accepter qu'un geste soit fait en faveur de personnes disposant de moyens financiers suffisants. Ils ne remettaient pas fondamentalement le principe en cause, mais arguaient du manque de moyens pour cette politique qu'ils jugeaient inéquitable.

Après avoir réfléchi à ces différentes remarques et recherché moi-même un consensus, j'ai suggéré, lors des travaux de la commission, l'introduction des quatre mesures suivantes :

La première touche le revenu limite des bénéficiaires par rapport au taux d'effort : seules les personnes ayant un taux d'effort lié à la charge de cet investissement supérieur à 20% de leur revenu pourraient en bénéficier.

La deuxième mesure touche la fortune; celle-ci ne pourrait être supérieure à la moitié de l'investissement considéré.

La troisième mesure touche le taux d'occupation, celui-ci étant limité selon les principes de la PPE/HLM, soit le nombre de personnes plus trois unités.

La quatrième mesure touche à la valeur des pièces, chacune étant devisée à 100 000 F.

Je croyais qu'en ayant fait ces concessions qui ont leur raison d'être, mais qui limitent néanmoins l'effet de consommation que j'espérais, nous pourrions bénéficier d'un soutien quasi unanime.

Il y a eu des agitations de couloir, hier; ce qui est le propre d'un parlement. Des remarques ont été faites sur quelques points, notamment sur la rétroactivité.

Je vous ai dit qu'il me paraissait essentiel de prévoir cette rétroactivité, dès lors que nous annoncerions un tel projet de loi, pour ne pas subir un effet contre-productif. En effet, certains seraient susceptibles de renvoyer leur décision d'acquérir, faute d'avoir la certitude de pouvoir profiter de ladite rétroactivité. C'est pourquoi j'ai suggéré que nous la pratiquions dès le départ.

Ce n'est pas un usage mais un principe que je ne défends pas si toutes les conditions ne sont pas réunies. Ici, elles le sont.

Si j'ai bien compris, une majorité s'est dégagée pour refuser le principe de la rétroactivité. C'est la raison pour laquelle la partie droite du document qui vous a été remis excipe d'un principe de rétroactivité fort limité, puisque l'effet de la loi serait fixé au 1er juin 1997.

D'autre part, vous aurez constaté que pour limiter les contrecoups de ce projet, sans remettre en cause le but recherché, l'effet de cette loi a été fixé au 31 mars 1998.

Pour ce qui se passera dès le 1er avril 1998, nous avons retenu les idées émises en commission par plusieurs députés, dont MM. Gardiol et Moutinot. Le paiement des droits d'enregistrement ne serait pas exigé immédiatement dans sa totalité, mais pourrait être échelonné dans le temps. Pour prévoir cet échelonnement, nous n'avions pas besoin d'un projet de loi à proprement parler. Nous aurions pu agir par voie réglementaire, mais le projet de loi, tel qu'il vous est présenté aujourd'hui, permet d'avoir la vision globale de ce que nous entreprenons en fait d'encouragement à l'accession à la propriété.

C'est ainsi que le nouveau texte prévoit des paiements échelonnés sur huit ans, afin que l'Etat ne perde pas les montants en question.

Le département a tenu compte des différentes remarques émises pour mettre ce texte à jour. J'espère que cette recherche constante de consensus nous permettra d'atteindre les objectifs majeurs de ce projet de loi, à savoir :

1. Respecter la constitution sur le plan de l'encouragement que l'Etat doit donner pour l'accession à la propriété.

2. Favoriser cette accession à la propriété dans les conditions rappelées, ici même, par certains d'entre vous.

3. Donner cette impulsion économique si attendue, car il ne fait pas l'ombre d'un doute que ce projet de loi relancera les activités du secteur immobilier, y compris la création d'emplois.

C'est pourquoi j'espère que le texte, figurant sur la partie droite du document, sera accepté à une large majorité. Je vous ai dit les points sur lesquels portaient mes regrets.

Ainsi, je crois avoir résumé la situation.

Mme Sylvia Leuenberger (Ve). Les Verts l'ont dit à maintes reprises : ils soutiennent l'accession à la propriété. C'est une forme d'indépendance, de responsabilisation, qui permet d'améliorer la qualité de la vie et de se soustraire aux pressions du marché immobilier de location. Cependant, ils ne soutiendront pas ce projet de loi non amendé. Pour comprendre leurs raisons, il faut rappeler ceci :

Jusqu'en 1990, le secteur immobilier a été l'objet de tous les abus : pénurie de logements loués, prix surfaits des objets à vendre, prêts bancaires consentis, parfois jusqu'à 100%, à des acheteurs financièrement fragiles. Tous les moyens étaient bons pour faire des bénéfices. Le marasme économique dans lequel nous nous trouvons aujourd'hui est lié, en partie, à cette spéculation effrénée. Un grand nombre de familles ont dû revendre leur logement à perte. Les milieux immobiliers et les banques furent les principaux acteurs de ce naufrage.

Actuellement, la situation a changé : les taux hypothécaires ont baissé et le marché de l'offre et de la demande s'est rééquilibré, voire légèrement inversé.

Toutefois, il demeure, de façon évidente, que les prix à Genève sont toujours très élevés, et c'est une des principales causes du petit nombre de propriétaires dans notre canton.

Dès lors, la mesure proposée par les milieux immobiliers pour relancer la vente, sous la forme du projet de loi proposé par le Conseil d'Etat, est de pratiquer des soldes d'environ 20% sur les ventes d'appartements et de maisons, cela sans baisser les prix. Ces 20% résultent, en effet, de l'exonération de l'impôt des droits d'enregistrement faite sur le dos de l'Etat.

Pour nous, il est inadmissible que les milieux immobiliers, qui ont été sans scrupules en période de haute conjoncture, puissent maintenant demander à l'Etat, c'est-à-dire à chaque contribuable, de participer à une baisse des prix de l'immobilier.

L'Etat accuse un déficit de plus de 400 millions. 3 millions ont été retirés au subventionnement de logements pour une catégorie de gens plus démunis que celle ciblée par ce PL. Alors, est-ce bien le moment de soustraire à l'Etat le double des recettes pour des personnes qui ont, pour le moins, 60 000 à 80 000 F de fonds propres ?

Si les milieux immobiliers veulent effectuer une opération «coup de poing» pour vendre des logements et relancer l'économie, c'est à eux de faire l'effort de réduire, pendant un an, les prix de vente de 10 à 20%.

On a eu les Quais de l'immobilier, on pourrait avoir les Soldes de l'immobilier...

Un autre point à soulever est celui de la politique de la Banque cantonale genevoise en matière de revente des objets immobiliers qui lui sont restés sur les bras, suite aux nombreuses faillites provoquées par la spéculation. Elle ne met pas sur le marché les logements qu'elle possède à des prix abordables; elle ne fait pas baisser les prix, alors que les autres banques le font. Notre Banque cantonale devrait changer d'attitude, car si on souhaite que la population accède, dans une proportion plus large, à la propriété individuelle, les prix doivent baisser et, là, les banques ont un rôle majeur à jouer.

Notre groupe soutiendra l'amendement des socialistes, à savoir le remplacement de l'exonération de l'impôt par un impôt échelonné. Nous soutiendrons, évidemment, tous les amendements visant à mettre des limites de revenu de fortune pour l'acquéreur, ainsi que des plafonds de prix pour les objets pouvant bénéficier de cette loi.

Notre groupe s'opposera à l'octroi - même limité dans le temps - d'un cadeau fiscal à une catégorie de gens qui n'en ont vraiment pas besoin. Nous ne changerons donc pas d'avis à ce sujet. L'échelonnement de cet impôt sur plusieurs années nous paraît être une mesure suffisante pour relancer l'économie sans appauvrir l'Etat. Son déficit est trop important pour qu'il tienne compte de cette demande.

Nous pensons que beaucoup d'autres priorités doivent être soutenues, dans les domaines social, de l'emploi ou de l'enseignement, avant de soustraire quelques millions des recettes de l'Etat pour subventionner les milieux immobiliers.

M. Christian Ferrazino (AdG). Mme Leuenberger a mis en évidence un certain nombre d'aspects scandaleux de ce projet de loi, et je souscris pleinement aux développements qu'elle vient de faire.

Après six heures de débats sur les comptes et après avoir entendu tous les députés de l'Entente nous dire, d'une seule voix, qu'il fallait ménager les dépenses publiques - M. Blanc a même demandé à M. Kunz : «Mais où voulez-vous couper ?» - et s'interroger sur les recettes, il est vraiment extraordinaire que le premier projet de loi dont nous sommes saisis soit un projet du Conseil d'Etat qui nous demande, ni plus ni moins, de faire des cadeaux fiscaux en renonçant à percevoir des droits d'enregistrement auprès de personnes désirant acquérir leur logement.

Au niveau de la cohérence, vous pourrez toujours repasser, Mesdames et Messieurs !

M. Haegi a souligné, à juste titre, que le projet initial était une pure provocation et nous avons été nombreux à la dénoncer... (Contestations.) Ce n'est pas ce qu'il a dit ?

La présidente. En tout cas, c'est ce que vous avez compris !

M. Christian Ferrazino. Bien ! M. Haegi a reconnu, en commission, qu'il allait trop loin avec le projet qu'il avait formulé initialement, en se faisant le représentant des milieux immobiliers qui souhaitaient, depuis longtemps, obtenir ces exemptions fiscales. D'où une proposition alternative, formulée en commission. Et là, Monsieur Haegi, ne nous faites pas dire ce que nous ne disons pas ! Comme l'a rappelé Mme Leuenberger, nous nous sommes déclarés prêts à prendre des mesures favorisant l'accession à la propriété, mais pas les vôtres qui coûtent à la collectivité, c'est-à-dire des aides à fonds perdus ou des exemptions fiscales.

Dans la situation actuelle des finances publiques, qui a conduit ce parlement à couper dans plusieurs budgets, notamment dans celui de l'allocation-logement amputé de 3 millions, il est inadmissible que vous proposiez, parallèlement, un projet de loi qui aura pour conséquence immédiate une perte de rentrées fiscales.

Vous vous retranchez derrière son aspect incitant à l'acquisition. Alors, permettez-moi d'être interloqué par votre incohérence ! Si vous voulez d'un projet incitatif, expliquez-moi pourquoi il devrait être rétroactif ! Je vois mal comment ce projet pourrait inciter à faire des opérations déjà conclues !

Soyez logique ! Si vous voulez être incitatif, concentrez-vous sur le futur et ne nous demandez pas de régler le passé en accordant des cadeaux fiscaux, car il s'agit bien de cela.

Vous avez relevé, Monsieur Haegi, que ce projet est plus présentable - ce ne sont pas vos mots, mais les miens ! - que la première mouture que vous nous aviez brutalement adressée, sans aucune concertation préalable, ce dont nous avons pris l'habitude ! Pourquoi ? Parce que, dans le projet initial, vous aviez eu l'idée - j'ignore qui vous l'avait soufflée - d'intégrer des canards boiteux dans cette opportunité d'acquérir des logements en propriété. J'entends par là les objets que les banques ont sur les bras. Même vos amis politiques étaient un peu gênés... Ils se disaient qu'adopter un projet de loi pour aider des gens qui n'en ont nul besoin était suffisant, mais que secourir des banques en débloquant des situations qu'elles avaient elles-mêmes suscitées, c'était vraiment lancer le bouchon trop loin !

Dans votre grande sagesse, vous y avez renoncé, et nous en prenons acte. Ce n'est pas pour autant que le nouveau projet est devenu présentable.

Vous avez parlé de la fortune et du revenu. Dans son rapport de minorité, M. Moutinot fait un simple calcul qui aboutit au fait que si ce projet devait être adopté tel quel, il pourrait aider des gens bénéficiant d'un revenu de plus de 200 000 F et d'une fortune supérieure à 500 000 F. Je précise qu'il s'agit de la fortune imposable, déductions sociales faites.

Dans la situation actuelle, prendre des mesures, à charge de la collectivité, pour aider des gens qui ont une fortune d'un demi-million et un revenu annuel de plus de 200 000 F, c'est tout simplement indécent, Monsieur Haegi !

Nous nous rallierons à la position soutenue par Mme Leuenberger. Nous rejetterons, bien entendu, la nouvelle mouture telle qu'elle nous est présentée. Nous soutiendrons les amendements du rapport de minorité, et nous attendons avec intérêt de voir comment M. Kunz se déterminera, vu ses propos de tout à l'heure.

M. Jean-Pierre Gardiol (L). Notre parti a toujours été partisan de l'encouragement à l'accession à la propriété. Nous ne sommes pas les seuls, puisque, comme rappelé dans le rapport de majorité, l'article 10 de la constitution genevoise parle du droit au logement sous la forme de location ou de l'accession à la propriété.

Ce projet de loi est en totale harmonie avec notre constitution, et je salue l'initiative positive du Conseil d'Etat en faveur de cette accession.

Dotée des garde-fous dont nous avons déjà parlé, cette loi, en dépit des contestations de M. Ferrazino, s'adresse véritablement à cette classe moyenne à qui il manque le petit plus pour franchir définitivement le cap qui lui permettrait de devenir propriétaire.

La grande qualité de ce projet de loi, à mes yeux, c'est que l'Etat agit, pour une fois, comme une entreprise. Il lance une action de marketing en proposant une exonération fiscale des droits d'enregistrement et des émoluments du registre foncier valable jusqu'au 31 mars 1998.

Cette action, limitée dans le temps, permettra d'ajouter une nouvelle corde à l'arc de l'accession à la propriété et bénéficiera globalement, sans nul doute, à l'industrie de la construction.

Les idées apportées en commission par le rapporteur de minorité sont des plus intéressantes. Celle du délai de paiement est séduisante; elle constituera un complément judicieux à la première partie de ce projet de loi, sous la forme d'une opération «coup de poing» temporaire.

Je terminerai avec quelques remarques sur le rapport de minorité et certains propos qui viennent d'être tenus.

Le rapporteur de minorité, tout comme M. Ferrazino, accuse l'Etat de favoriser les riches. C'est faux au vu des ajustements faits en commission, d'une part, et au vu, d'autre part, du niveau des loyers actuels. Il est certain que de nombreux locataires sont en mesure d'acquérir leur logement, compte tenu des taux d'intérêt et des prix pratiqués, aujourd'hui, sur le marché.

Si la classe moyenne s'y mettait, Genève sortirait vite de la crise.

Madame Leuenberger, vous dites que les prix de l'immobilier sont élevés à Genève. Je vous rappelle que si le coût d'un logement est élevé par rapport au prix actuel des terrains, cela est dû à la qualité de nos constructions et au niveau des salaires que nous payons. Je ne répéterai jamais assez qu'à qualité égale, salaire égal, nous construisons au même prix que dans les pays nous entourant.

S'agissant de la perte fiscale qui fait peur à notre grand argentier, je rétorque qu'il est difficile de perdre un montant qui n'est pas gagné et sera largement récupéré ultérieurement. En effet, il a été démontré qu'un propriétaire consomme plus qu'un locataire pour entretenir son logement et qu'il devient ainsi un moteur important de l'économie. Le cadeau fiscal offert au futur acquéreur et actuel locataire sera rapidement remboursé.

Notre parti est convaincu que cette action dynamique, novatrice et limitée dans le temps aura une influence positive sur l'économie genevoise. Je vous invite donc à voter ce projet de loi.

M. Laurent Moutinot (S), rapporteur de minorité. Juste un petit cursus de ce projet pour comprendre quelles sont les positions adoptées aujourd'hui.

Le projet initial du Conseil d'Etat constituait un cadeau fiscal sans limite, durant deux ans, avec effet rétroactif. Suite aux travaux de la commission, des limites ont été fixées en matière de revenu et de fortune, mais elles ne sont ni suffisantes ni satisfaisantes. Des limites ont également été posées quant à l'objet lui-même, afin d'exclure du champ d'application de la loi le stock d'immeubles et d'appartements récupérés par des prêteurs hypothécaires imprudents ou spéculateurs.

A ce moment-là, la rétroactivité faisait que le «cadeau» était valable vingt-trois mois au lieu de vingt-quatre.

Le parti socialiste et les milieux de défense des locataires préfèrent, purement et simplement, l'échelonnement du paiement - une facilité non négligeable ! - au cadeau fiscal.

C'est pourquoi les rapports font respectivement une proposition d'exonération de la majorité et une proposition d'échelonnement de la minorité.

Le Rassemblement pour une politique sociale du logement a écrit, hier, à la présidence du Grand Conseil pour l'informer que si l'on s'en tenait au rapport de majorité, un référendum serait lancé. L'ASLOCA est du même avis. C'est la raison probable des discussions qui ont eu lieu ces dernières vingt-quatre heures.

Le projet que M. Haegi a fait déposer sur nos tables contient les améliorations suivantes :

- l'effet rétroactif a été limité d'un mois ou deux par rapport à la date de votation;

- la durée totale du système d'exonération est ramenée à dix mois au lieu des vingt-quatre, puis des vingt-trois proposés par la commission. Le système de l'échelonnement des paiements entrera ensuite en vigueur, système que nous ne contestons pas.

Ce texte, tel que proposé par le département, a été soumis au Rassemblement pour une politique sociale du logement et à l'ASLOCA. Bien que le trouvant toujours très mauvais, ils m'ont autorisé à vous dire que s'il était voté tel quel il n'y aurait pas de référendum.

Mis aux voix, ce projet est adopté en premier débat.

Deuxième débat

Mis aux voix, le titre et le préambule sont adoptés.

Article 1

M. Claude Lacour (L), rapporteur de majorité. Un ancien texte a été utilisé par inadvertance, en lieu et place de celui retenu par la commission qui devait être reproduit sur la partie droite du document. Cela signifie qu'à la lettre b), deuxième ligne, les mots «ni été loués» ont été ajoutés par erreur. Ils ne figuraient pas dans le texte voté à la grande majorité de la commission, suite à l'explication figurant à la page 6 de mon rapport. Un amendement n'étant pas nécessaire, je vous demande simplement de rétablir le texte voté par la commission, en supprimant les mots «ni été loués».

M. Christian Ferrazino (AdG). Madame la présidente, il me faut rappeler à M. Lacour que cette mention figurait dans le texte d'origine. En effet, ce projet devait prétendument «favoriser la relance de l'économie dans le secteur immobilier». La formule apparaît également dans le titre du projet, susceptible, lui aussi, d'être amendé si, contre toute attente, l'objectif n'était plus le même ce soir !

Nous nous sommes évidemment demandé quelle relance pouvait bien procurer l'achat de logements déjà construits et avons conclu que cette aide, si elle était votée, devait concerner des opérations nouvelles. Sinon, il faut changer le titre pour ne pas faire croire que ce projet contribuera à la relance de la construction, les logements loués étant déjà construits.

Peut-être est-ce par erreur que le département a repris son intention d'origine, mais, pour une fois qu'une bonne idée figurait dans le projet initial, il serait dommage de la retirer.

Si vous cherchez à favoriser l'accession à la propriété, il ne faudrait pas, par des mesures de ce type, susciter des situations de congés-ventes qui n'ont plus cours dans cette République, grâce à la législation votée par ce parlement.

Quant à la disposition sous la lettre c), il faut se gratter la tête pour en saisir le sens, car elle propose de favoriser la vente de logements vendus ! On peut comprendre, Monsieur Haegi, que vous voulez favoriser la vente d'appartements à vendre, et qui seront vendus grâce à cette accession à la propriété. Néanmoins, vous m'accorderez que la clarté de cette disposition n'est pas des plus limpides !

Si vous supprimez, sous la lettre b), les mots «ni été loués», vous permettrez la réapparition d'une situation de congés-ventes, du moins vous nous en ferez courir le risque. En revanche, si vous souhaitez que ce projet favorise l'accession de locataires à la propriété du logement qu'ils occupent déjà, la disposition de la lettre c) vous en offre la possibilité.

Monsieur Lacour, c'est une chose de nous demander la suppression de trois mots, c'en est une autre de nous dire ce que vous recherchez en les supprimant.

Je viens de dire ce que je recherche en réclamant leur maintien. A vous de nous dire ce que vous recherchez en sollicitant leur suppression.

La lettre c) du projet, s'il est voté en l'état, permettra à des locataires, déjà en place, d'acheter leur logement. Pourquoi, dès lors, vouloir maintenir la lettre b) et quels cas vise-t-elle ?

M. Jean Opériol (PDC). Je crois utile de répéter l'explication, donnée en commission, des mots «ni été loués».

La lettre c) de l'article 1 fait exactement référence à la LDTR qui permet, dans certaines conditions bien précises et limitatives, la vente d'appartements jusqu'alors réservés au marché locatif.

En supprimant les mots «ni été loués», nous abordons le cas de figure qui s'inscrit dans l'esprit de cette loi, à savoir des appartements qui ont été construits avec un objectif de mise en PPE et qui n'ont pu être vendus pour cause de marché déprimé. Provisoirement loués pour des raisons économiques évidentes, ils peuvent être remis en vente, grâce à l'interprétation de la LDTR.

Si on excluait ces appartements, on irait à l'encontre de l'esprit de la loi. Voici un exemple : vous construisez un immeuble destiné à la PPE. Vous ne parvenez pas à vendre tous les appartements. Vous en louez un à Dupont qui découvre l'existence de cette loi. Intéressé par les avantages fiscaux, Dupont se dit prêt à acheter l'appartement. Et on ne le lui vendrait pas parce qu'il en est le locataire ? C'est complètement aberrant !

Monsieur Ferrazino, nous ne voulons pas réintroduire le marché des congés-ventes. Personne n'y tient, tant c'est mauvais ! Nous voulons simplement rendre cette loi pratique et applicable. Vous ne risquerez rien si les mots «ni été loués» sont supprimés.

La présidente. Etes-vous d'accord de supprimer les mots «ni été loués» ?

M. Jean Opériol. Non seulement je suis d'accord, mais je le souhaite, Madame la présidente.

La présidente. Je soumets au vote l'amendement qui consiste à supprimer les mots «ni été loués»...

M. Claude Haegi, conseiller d'Etat. Veuillez m'excuser, Madame la présidente, mais le rapporteur de majorité vient de dire que vous deviez biffer ces trois mots, parce qu'ils figurent dans le texte par erreur.

Si vous voulez suivre M. Ferrazino, il faut que ce dernier dépose un amendement...

La présidente. Le texte que nous votons comporte les trois mots «ni été loués». (Remarques de M. Claude Haegi et de M. Christian Ferrazino.) Faute d'accord, suivons la proposition de renvoi en commission ! Je mets aux voix le renvoi en commission de ce projet de loi...

M. Claude Haegi, conseiller d'Etat. Madame la présidente, ne prenez pas vos rêves pour des réalités ! Faites voter cela dans le sens que vous voulez, mais vous avez parfaitement compris que M. Ferrazino profite d'une faute de frappe pour développer les arguments qui sont les siens. Son intervention est empreinte de mauvaise foi, tout le monde l'a compris ! (Huées.) Oui, oui, faites monter... Vous pouvez toujours gueuler !

La présidente. Moi qui croyais au consensus...

M. Christian Ferrazino (AdG), conseiller d'Etat. A un conseiller d'Etat qui se laisse aller à dire qu'un député est de mauvaise foi, parce que lui-même... (Contestation de M. Claude Haegi, conseiller d'Etat.) Taisez-vous et restez calme sur votre chaise, Monsieur Haegi ! Vous me répondrez tout à l'heure. A un conseiller d'Etat, qui se laisse aller à dire qu'un député est de mauvaise foi, parce que lui-même n'est pas capable de rédiger correctement la troisième mouture du projet de loi qu'il nous a balancé, sans concertation aucune, je lui conseillerais de réfléchir avant de saisir ce Grand Conseil de grands projets de lois qui ont fait la une des journaux : «M. Haegi veut venir en aide aux propriétaires de ce canton»; «M. Haegi va faire des exonérations fiscales en faveur des promoteurs». Voilà le nouveau roi des propriétaires qui est aux ordres des milieux immobiliers. Nous avons connu tout ça, Monsieur Haegi. (Huées.)

Maintenant, vous êtes revenu sur votre position, suite à la pression que nous avons exercée. M. Moutinot vient de le rappeler. (Vacarme.)

La présidente. Silence, sinon, je suspends la séance.

M. Christian Ferrazino. Il est difficile de calmer les esprits après que de l'huile a été versée sur le feu ! Puisque vous avez voulu ouvrir les hostilités, nous les terminerons ensemble, Monsieur Haegi !

Je rappelle simplement... (Interruption de M. Michel Balestra.) Monsieur Balestra, voici du concret : il y a quelques mois, votre représentant au Conseil d'Etat a voulu faire mousser l'électorat, qui est peut-être aussi le vôtre, en disant qu'il viendrait à l'aide des pauvres propriétaires et promoteurs de ce canton, voire des banques et de certains de ses amis qui, s'étant lancés dans des opérations hasardeuses, ne savaient plus comment les écouler. Quelle idée géniale a-t-il trouvée ? Faire une proposition qu'il entendait appliquer pendant plusieurs années et qui coûtait 7 millions par an à la République ! C'était sa déclaration première.

Aujourd'hui, M. Haegi a adopté un profil plus bas. La mémoire lui faisant sans doute défaut, M. Moutinot a rappelé que suite à l'intervention de l'ASLOCA et du Rassemblement, il a dû reconnaître que son projet avait une odeur très brûlante de provocation.

Monsieur Haegi, vous êtes donc revenu en arrière, et je salue votre effort. Mais, à nos yeux, ce retour n'est pas suffisant, puisque l'aspect incitatif d'un projet ne devrait pas toucher le passé, mais uniquement l'avenir.

Monsieur Opériol, si vous ne voulez pas susciter le risque des congés-ventes, dont je parlais tout à l'heure, et ne viser que les objets construits en PPE qui ont dû être loués, faute d'acheteurs, vous pouvez très bien insérer une lettre supplémentaire les concernant eux seuls. Vous ne nous faites part que de votre interprétation. Relisez la loi ! Elle ne précise nulle part ce que vous dites.

Ne nous faites pas croire à des choses qui n'existent pas ! Que le débat soit clair, afin que l'on sache qui défend qui dans cette République !

Nous réaffirmons notre refus d'octroyer aux riches le cadeau que vous nous proposez de leur faire.

M. Jean Opériol (PDC). Pour moi, le problème est simple. Un consensus quasi général a été atteint, dans cette salle, pour le texte figurant sur la partie droite du document qui nous a été remis.

Je propose un amendement qui consiste à modifier trois mots de l'article 1. Je vous le soumets, nous l'adopterons ou nous le rejetterons.

M. René Koechlin (L). Nous débattons inutilement depuis dix minutes. Nous avons un texte, on propose un amendement, nous votons et nous continuons !

La présidente. L'amendement de l'article 1, à la lettre b), consiste à supprimer les mots «ni été loués». Nous le mettons aux voix.

Le résultat est douteux.

Il est procédé au vote par assis et levé.

Le sautier compte les suffrages.

Mis aux voix, cet amendement est adopté par 42 oui contre 31 non.

Mis aux voix, l'article 1 ainsi amendé est adopté.

Mis aux voix, l'article 2 est adopté, de même que les articles 3 à 5.

Art. 6 et art. 7

Mme Sylvia Leuenberger (Ve). Comme je l'ai déjà dit, nous soutenons le remplacement de l'exonération par l'impôt échelonné, de même que nous soutenons les autres amendements faits par le département.

Je propose l'amendement que Mme Olsommer vous fait porter, et qui consiste à abroger les articles 6 et 7.

M. Claude Blanc (PDC). Madame la présidente, vous ne pouvez pas abroger des articles qui n'existent pas. Vous devez mettre aux voix les articles 6 et 7, afin qu'ils soient adoptés ou rejetés. C'est la question que vous devez poser au Grand Conseil !

La présidente. Je la pose, puisque je propose le vote d'un amendement qui demande l'abrogation de ces articles. Libre à vous de ne pas voter ! Je n'ai pas à apprendre aux députés à faire des amendements !

Mis aux voix, l'amendement consistant à abroger les articles 6 et 7 est rejeté.

Mis aux voix, l'article 6 est adopté, de même que l'article 7.

Mis aux voix, l'article 8 est adopté, de même que les articles 9 à 13.

Troisième débat

M. Bernard Clerc (AdG). Permettez-moi de dire que je trouve ce projet de loi particulièrement scandaleux... (Brouhaha.)

La présidente. Silence, s'il vous plaît !

M. Bernard Clerc. Rassurez-vous, Madame la présidente, cela continuera ! Je le trouve particulièrement scandaleux, parce que, lors de nos discussions sur les prestations sociales, ceux des bancs d'en face nous rappellent systématiquement que l'aide doit aller à ceux qui en ont réellement besoin.

Vous avez aboli les allocations de formation professionnelle pour tous, en arguant qu'il n'était pas normal d'aider des personnes ayant des revenus de 100 000 F. Vous avez plafonné les allocations d'études, et j'en passe.

Aujourd'hui, vous voulez faire un cadeau fiscal à une petite minorité qui ne représente que 10% des contribuables - je l'ai vérifié - sous prétexte de relancer l'immobilier.

Votre démarche relève exactement de ce que j'ai dénoncé, ce matin, lors des débats sur les comptes. Une fois de plus, vous diminuez les rentrées fiscales pour justifier, demain, de nouvelles coupes dans les prestations de l'Etat.

Vous parlez d'un aspect incitatif. Soyez honnêtes ! Ce projet de loi n'a rien d'incitatif, il n'a pour lui que son aspect de «petit cadeau aux copains».

On nous a parlé d'un consensus. J'ignore qui l'a élaboré. De mon point de vue, ce n'est pas un consensus, c'est une compromission !

M. Luc Gilly (AdG). Je n'ai pas grand-chose à ajouter aux propos de Bernard Clerc.

Je souhaite simplement que l'Entente suive jusqu'au bout un ancien projet de loi dont M. Olivier Vodoz, ici présent, a parlé, dans son langage velouté, à la «Tribune de Genève». Je cite : «J'ai eu de la peine à voir passer ce projet. C'est une question de priorité. Je ne crois pas qu'il soit raisonnable, aujourd'hui, de militer pour une baisse de la fiscalité. Dans le contexte actuel, la stabilité est déjà un engagement important.»

Tirez vos conclusions, Mesdames et Messieurs d'en face !

Ce projet est adopté en troisième débat (selon le texte modifié par le DIER), par article et dans son ensemble.

La loi est ainsi conçue :

(PL 7579)

LOI

instituant des mesures temporaires destinées à favoriser l'accession à la propriété du logement et la relance de l'économie dans le secteur immobilier

(I 4 57)

LE GRAND CONSEIL

Décrète ce qui suit :

CHAPITRE I

Dispositions générales

Article 1

La loi vise à encourager l'accession à la propriété du logement sis dans le canton de Genève et la relance de l'économie dans le secteur immobilier en favorisant la vente:

a) de logements neufs ou en cours de construction;

b) de logements déjà construits, mais qui n'ont jamais trouvé d'acquéreur à la date visée à l'article 11 de la présente loi;

c) de logements vendus, conformément à l'art. 39 de la loi sur les démolitions, transformations et rénovations de maisons d'habitation, du 25 janvier 1996.

Art. 2

1 Est une acquisition au sens de la présente loi l'acte juridique opérant le transfert à titre onéreux d'un logement en propriété individuelle, copropriété ou propriété en main commune.

2 Sont notamment exclus du champ d'application de la présente loi les actes relevant du droit successoral et le transfert de participations à une personne morale.

Art. 3

Le paiement de l'impôt résultant du versement anticipé de fonds de la prévoyance professionnelle, en vue de l'acquisition d'un logement, est réparti en quatre annuités, à parts égales et sans intérêt, la première échéant 12 mois après la date d'acquisition du logement.

CHAPITRE II

Conditions relatives à la personne et au logement

Art. 4

1 Peuvent bénéficier des dispositions de la présente loi les personnes physiques achetant le logement pour l'occuper elles-mêmes et y constituer leur domicile principal.

2 La fortune imposable de l'acquéreur et des personnes faisant ménage commun avec lui, avant les déductions sociales, ne doit toutefois pas excéder la moitié du prix d'acquisition mentionné dans l'acte.

3 Les charges du propriétaire ne doivent pas non plus être inférieures à 20% du revenu de l'acquéreur, tel que défini à l'article 31 C alinéa 1, lettre a, de la loi générale sur le logement et la protection des locataires, du 4 décembre 1977. On entend par charges les intérêts des sommes empruntées, l'amortissement des dettes et les frais d'exploitation de la propriété admis forfaitairement à 1% du prix d'acquisition.

Art. 5

1 Les logements acquis au bénéfice des dispositions de la présente loi doivent être affectés exclusivement à l'habitation et comprennent les locaux de dépôt et de service usuels en nombre et en dimension.

2 Le nombre de pièces de logement ne doit pas excéder de plus de 3 unités le nombre de personnes qui composent le groupe familial. Le prix à la pièce habitable ne peut pas excéder 100 000 F.

CHAPITRE III

Dispositions applicables jusqu'au 31 mars 1998

Art. 6

1 Les actes d'acquisition d'un logement, au sens de la présente loi, sont exonérés des droits d'enregistrement et des émoluments du registre foncier, à concurrence des premiers 400 000 F du prix.

2 Les actes comportant constitution ou augmentation de gages immobiliers destinés au financement de l'acquisition d'un logement sont exonérés des droits d'enregistrement, des centimes additionnels et des émoluments du registre foncier, à concurrence d'un montant représentant 80% de la valeur du logement et 400 000 F au maximum.

Art. 7

1 En cas de revente du logement dans un délai de 5 ans à compter de l'inscription au registre foncier, les impôts exonérés sont immédiatement exigibles sans intérêts rétroactifs.

2 En cas de fausse déclaration ou de violation de l'obligation d'occuper soi-même le logement acquis au bénéfice des dispositions de la présente loi, les émoluments et les impôts exonérés sont exigibles avec intérêts rétroactifs dans un délai de 5 ans, à compter de l'inscription au registre foncier de l'acquisition et ce sans préjudice d'autres sanctions civiles et pénales.

CHAPITRE IV

Dispositions applicables dès le 1er avril 1998

Art. 8

1 Les droits d'enregistrement et les émoluments du registre foncier, à concurrence des premiers 400 000 F du prix, sont payables en 8 ans, à parts égales et sans intérêts, la première échéant douze mois après la date d'acquisition du logement.

2 Il en va de même des droits d'enregistrement, des centimes additionnels et des émoluments au registre foncier concernant les actes comportant constitution ou augmentation de gages immobiliers destinés au financement de l'acquisition d'un logement et à concurrence du 80% de la valeur du logement et 400 000 F au maximum.

Art. 9

1 En cas de revente du logement dans un délai de 8 ans à compter de l'inscription au registre foncier, la totalité des droits, émoluments et autres impôts non encore payés sont immédiatement exigibles.

2 En cas de fausse déclaration ou de violation de l'obligation d'occuper soi-même le logement acquis au bénéfice des dispositions de la présente loi, les impôts et les émoluments non encore payés sont immédiatement exigibles, avec intérêts rétroactifs, à compter de l'inscription au registre foncier de l'acquisition et ce sans préjudice d'autres sanctions civiles et pénales.

CHAPITRE V

Dispositions finales

Art. 10

1 L'assujettissement aux dispositions de la présente loi fait l'objet d'une mention inscrite au feuillet du registre foncier de l'immeuble concerné.

2 Le registre foncier communique à l'administration fiscale cantonale les opérations assujetties aux articles 7 et 9 de la présente loi.

3 Il appartient à l'acquéreur de démontrer à l'administration fiscale cantonale et au registre foncier que les conditions d'assujettissement de l'acquisition immobilière à la présente loi sont remplies.

Art. 11

1 Lors de son entrée en vigueur, les effets des articles 6 et 7 de la présente loi rétroagissent au 1er juin 1997.

2 Lors de l'entrée en vigueur de la présente loi, les droits d'enregistrement et émoluments du registre foncier versés à partir de la date définie à l'alinéa précédent sont remboursés sans intérêt si les conditions d'exonération sont remplies.

Art. 12

Les exonérations fiscales prévues à l'article 6 de la présente loi peuvent être obtenues jusqu'au 31 mars 1998, la date d'immatriculation de l'acte au registre foncier faisant foi.

Art. 13

La présente loi entre en vigueur le

 

R 341
14. Proposition de résolution de Mmes et MM. Michel Balestra, Marie-Françoise de Tassigny, Fabienne Blanc-Kühn, Laurent Moutinot, Nicolas Brunschwig, Jean-Claude Vaudroz, Alain-Dominique Mauris, Yvonne Humbert, Armand Lombard, Claude Basset et Pierre-François Unger concernant la modification de la loi fédérale sur l'aviation et la desserte de l'aéroport international de Genève. ( )R341

LE GRAND CONSEIL,

- vu la décision de Swissair, du 3 avril 1996, entrée en vigueur le27 octobre 1996;

- attendu que

- les activités économiques et touristiques de la Suisse romande et les emplois qui en découlent;

- le maintien des équilibres régionaux, nécessaires à la cohésion de notre pays;

- la présence des organisations internationales, que le Conseil fédéral déclare être un aspect essentiel de la politique étrangère de la Suisse,

 impliquent que l'aéroport international de Genève puisse continuer à bénéficier de la meilleure desserte aérienne possible par des vols directs européens et intercontinentaux;

- vu le message du Conseil fédéral, du 28 mai 1997, concernant la modification de la loi sur l'aviation,

invite les autorités fédérales compétentes

A adopter dans les meilleurs délais, et sur la base du projet du Conseil fédéral, une législation supprimant tout monopole et mettant en place une politique aéronautique ouverte et dynamique.

A compléter ou modifier le texte proposé dans le sens suivant:

a) assurer les conditions d'une desserte équilibrée des aéroports, ce qui constitue un des objectifs de la politique aéronautique suisse:

- par une répartition adéquate de l'ensemble des concessions de routes (vols de lignes) entre les aéroports;

- par l'introduction de la «désignation multiple» de compagnies aériennes dans tous les accords aériens qui ne la prévoient pas encore;

b) renoncer à l'exigence de la majorité suisse pour le capital actions d'une compagnie suisse;

c) renoncer au contrôle des tarifs aériens, tout en maintenant de hautes exigences en matière de sécurité;

d) réduire la durée des dispositions transitoires à cinq ans au maximum, les droits découlant des concessions existantes demeurant durant ce délai, pour autant qu'ils soient effectivement exercés, et devenant immédiatement caducs s'ils ne le sont plus.

Débat

M. Michel Balestra (L), rapporteur. Je suis chargé par la commission de l'économie de vous faire, ce soir, un rapport oral sur nos travaux concernant ce projet de résolution, initialement proposé par le groupe radical.

En commission de l'économie, nous avons recherché le consensus le plus large possible sur cette résolution, afin de donner à l'aéroport intercontinental de Cointrin toutes les chances de développer son activité et les emplois afférents.

Le Conseil d'Etat avait déjà grandement oeuvré avec l'administration et les autorités fédérales pour obtenir les bases légales nécessaires au développement du concept de libéralisation «Open Sky». Des conseillers nationaux et aux Etats ont également travaillé dans ce sens.

Ensuite, les radicaux genevois ont eu l'excellente idée de nous présenter leur résolution, laquelle n'atteignait toutefois pas la totalité des objectifs que nous souhaitions.

C'est pourquoi la résolution 341, que vous avez reçue sur vos tables, a été rédigée dans le cadre de la commission de l'économie.

Un large consensus a été obtenu. A l'exception de l'Alliance de gauche, tous les groupes ont accepté cette résolution. Seuls deux points ont été votés à une majorité moins confortable. Les voici :

- l'invite 2, lettre b) : «renoncer à l'exigence de la majorité suisse pour le capital actions d'une compagnie suisse». La majorité de la commission a décidé de garder cette disposition, parce qu'à l'aube du troisième millénaire elle ne jugeait plus défendable l'idée qu'une entreprise, pour être suisse, devait avoir un actionnariat qui le soit aussi dans sa majorité.

- l'invite 2, lettre c) : «renoncer au contrôle des tarifs aériens, tout en maintenant de hautes exigences en matière de sécurité». La majorité de la commission a estimé que si les conditions nécessaires à une sécurité optimale, notamment l'entretien conforme des appareils, doivent être garanties, la liberté commerciale des opérateurs sur le marché romand, sous réserve de cette contrainte de sécurité, doit être la plus large possible. Les exemples de Gulf Air et de la ligne très bon marché que voulait exploiter Virgin Express, entre Genève et Bruxelles, nous édifient sur la dérive monopolistique de l'OFAC. La politique des prix ne doit, en aucun cas, permettre de développer des arguties pour protéger le marché au moyen d'un contrôle protectionniste des prix des concurrents. Si les exploitants des lignes aériennes, clients de l'aéroport de Genève, veulent prendre des parts significatives du marché régional, ils doivent être libres de développer un marketing agressif.

Conscients de l'urgence du problème posé, tous les groupes, sauf celui de l'Alliance de gauche, ont voté cette résolution. Je vous propose donc d'appuyer la majorité de la commission de l'économie.

L'Alliance de gauche s'est abstenue. Je lui demande, ce soir, de se prononcer comme nous.

Tout à l'heure, nous voterons la résolution de l'Alliance de gauche sur le maintien du contrôle aérien à Genève. Ce maintien aurait-il encore un sens si nous ne nous battions pas pour celui d'un trafic aérien à Genève ? Il est des sujets propices à un moratoire politique et, dans l'intérêt général, je souhaite que cette résolution soit adoptée à l'unanimité de ce Grand Conseil. Je vous en remercie.

Mme Marie-Françoise de Tassigny (R). Les radicaux se réjouissent d'avoir été les initiateurs d'une résolution capitale pour l'avenir de Cointrin.

Même si la commission de l'économie a sensiblement changé son style, elle reprend les objectifs qui ont prévalu dans la démarche du parti radical, c'est-à-dire défendre les intérêts de la Suisse occidentale et les intérêts des organisations internationales, en matière de communications aériennes depuis Genève.

Le groupe radical se réjouit de pouvoir compter sur une grande majorité de députés pour adopter cette résolution qui, relayée par d'autres cantons romands, fera écho à Berne.

Néanmoins, il veillera attentivement à la destinée de cette résolution dans les premiers mois d'automne, afin de s'assurer de la prise en compte de ses principes. A défaut, il reprendra le flambeau et traitera à nouveau de ce dossier.

De plus, le groupe radical soutient l'amendement de son collègue, John Dupraz.

La présidente. Cet amendement, qui a été déposé sur vos tables, consiste à remplacer «Suisse romande» par «Suisse occidentale» dans le premier attendu.

M. Claude Blanc (PDC). Nous soutiendrons évidemment l'amendement de M. John Dupraz. Ainsi, il restera quelque chose du projet radical... (Rires.) ...qui ne pouvait pas voler, puisqu'il lui manquait deux ailes ! (Rires.)

M. John Dupraz (R). Mon ami Blanc est bien gentil, mais cet amendement est important, en dépit de son aspect anodin. Il l'est pour la raison suivante :

Quand on parle de Suisse romande, on fait allusion à une région linguistique. Or l'économie ne connaît pas les régions linguistiques. Les habitants du canton du Jura se sentent concernés, en tant que passagers, par les aéroports de Bâle-Mulhouse et de Kloten. En revanche, ceux du canton de Berne s'intéressent à l'aéroport de Cointrin.

C'est pourquoi j'ai déposé cet amendement qui, à Berne, aura sa pleine connotation. Le choix des termes «Suisse occidentale» a beaucoup d'importance, contrairement à ce que croit M. Blanc qui n'a jamais compris un seul mot de la langue de Goethe. (Rires.)

La présidente. Sicher, sicher...

M. Christian Grobet (AdG). J'inviterais Mme de Tassigny à plus de modestie, car parler d'une résolution qui serait capitale pour Genève...

En fait, c'est une demande adressée à l'autorité fédérale, et nous verrons bien ce qu'il en adviendra.

Nous ne voterons pas cette résolution, je tiens à le dire. Je suis navré, Monsieur Balestra, mais vous ne parviendrez pas, au nom d'un appel à l'unanimité au vu de circonstances spéciales, à nous rallier à vos thèses libérales de déréglementation.

Nous savons ce que la déréglementation, dans le domaine aéronautique, a produit aux Etats-Unis. Elle est en train de s'étendre en Europe et causera de véritables cataclysmes dans les compagnies d'aviation européennes.

C'est s'illusionner de penser qu'une liberté totale de concurrence sauvera les compagnies existantes, notamment Swissair.

Que l'on ne se méprenne pas ! La façon dont Swissair a pris ses décisions ne nous satisfait pas, pas plus que ses agissements vis-à-vis de Genève, même si on pouvait s'attendre à ce qui s'est passé et que l'on ne s'est pas préoccupé de trouver une alternative.

Il n'empêche que nous ne sommes pas pour la mort de Swissair, Monsieur Balestra. Nous la savons en péril aujourd'hui, face à la concurrence internationale, et nous ne sommes pas d'accord de brader une compagnie qui demeure importante à nos yeux.

Nous constatons que toutes ces fusions et déréglementations que vous préconisez provoquent des suppressions massives d'emplois en Suisse et dans les autres pays européens. La population a déjà compris que votre modèle économique conduit, précisément, à la perte de notre économie, et qu'il faut instituer d'autres règles pour protéger les emplois existants et en créer de nouveaux.

Dans le cadre d'une réglementation judicieuse du trafic aérien en Suisse, nous pourrions poser certaines exigences ou, du moins, demander à l'autorité fédérale de poser les siennes à Swissair. Dans le cadre de ce monopole que vous décriez, il serait possible de passer par l'autorité fédérale pour que Swissair offre des compensations, notamment dans le domaine régional, ainsi que l'octroi prioritaire de nouveaux droits d'accueil de vols provenant d'Europe et de la région méditerranéenne.

Vous voulez, au contraire, supprimer la réglementation, comme si cela pouvait résoudre nos problèmes ! Depuis le temps que nous parlons de la cinquième liberté, seule une liaison aérienne a été mise en place avec Gulf Air, ce qui m'amène à poser cette question au Conseil d'Etat :

Nous avons été informés que cette liaison négociée avec Gulf Air a donné lieu à une contrepartie au profit de cette compagnie. Cette contrepartie, accordée par votre département ou le Conseil d'Etat, a-t-elle été maintenue après que Gulf Air a décidé, trois mois plus tard, d'interrompre ses liaisons aériennes ?

M. Pierre Meyll (AdG). J'avais fait remarquer, en commission de l'économie, que le point de l'invite 2, lettre b), était douteux, puisqu'il demandait de «renoncer à l'exigence de la majorité suisse pour le capital actions d'une compagnie suisse». Il semble contredire les recommandations de la Chambre genevoise de commerce et de l'industrie. Ces dames et messieurs de la droite seraient bien inspirés de faire leur choix !

Mme Sylvia Leuenberger (Ve). Je vous remercie de me donner la parole, Madame la présidente, mais je pense que mon collègue Nissim interviendra à ma place.

M. Chaïm Nissim (Ve). Dans les débats sur les transports aériens, les Verts ont toujours insisté lourdement sur l'encouragement aux transports intercontinentaux, c'est-à-dire les long-courriers, mais aussi sur le transfert modal vers le train en ce qui concerne les distances franchies par les court-courriers.

Cette résolution ne mentionne pas cette distinction fort importante à nos yeux.

C'est pourquoi nous proposons d'amender la fin du premier attendu en remplaçant les termes «des vols directs européens et intercontinentaux» par «des vols directs long-courriers».

Nous vous proposons un deuxième amendement consistant à supprimer la lettre c) de la deuxième invite.

En effet, si nous renonçons à tout contrôle des tarifs aériens, ceux-ci baisseront automatiquement. Or, nous ne le voulons pas, car nous entendons favoriser le transfert modal vers le train. A notre avis, les tarifs des court-courriers devraient même être augmentés.

M. Michel Balestra (L), rapporteur. Notre parlement n'a eu aucune influence sur la décision interne prise par Swissair en termes de stratégie d'entreprise.

Swissair a déterminé qu'elle était une compagnie privée qui entendait adopter une nouvelle stratégie. Ses dirigeants ont affirmé qu'elle ne pouvait plus, dans les conditions actuelles du marché et en dépit d'une confortable situation de monopole, remplir un rôle de compagnie nationale avec une desserte équilibrée. C'est leur choix. Je souhaite qu'il soit bon, bien que j'aie quelques doutes.

L'avenir de l'aéroport intercontinental de Genève-Cointrin, comme l'avenir économique de la Romandie, sont beaucoup trop importants pour que nous permettions qu'ils soient conditionnés par la stratégie interne d'une compagnie aérienne privée.

Cette situation ne nous plaît pas, et il faut intervenir. Les Genevois l'attendent de nous, et je regrette que nous n'approuvions pas cette résolution à l'unanimité.

M. John Dupraz (R). Je souscris pleinement aux propos du rapporteur.

M. Grobet dit que le but de cette résolution est de brader Swissair. Loin de nous cette intention ! Personnellement, je souhaite longue vie à Swissair.

Dans cette affaire, il faut distinguer l'agresseur de l'agressé. Swissair ayant laissé tomber Genève, nous recherchons des moyens de substitution et de complémentarité avec les compagnies qui viennent déjà chez nous.

Je trouve navrant que M. Grobet, ardent défenseur de la place de Genève à Berne, ne se rende pas compte de l'hégémonie économique zurichoise. Elle s'est exprimée dans le cadre des débats sur les NLFA. Certains disaient qu'il fallait le Gothard, le seul pôle économique valable de Suisse étant Zurich, et que le reste du pays ne comptait pas. Nous avons entendu plusieurs fois ce type de discours.

Or nous disons que Genève et sa région - le reste de la Suisse occidentale et la France voisine - ont un rôle économique à jouer. De par la spécificité de cette région et la vocation internationale de Genève, un aéroport les desservant au niveau intercontinental est indispensable.

Je regrette, Monsieur Grobet, que vous ne vouliez pas le comprendre. Encore une fois, l'objectif n'est pas une libéralisation à tous crins, mais la recherche de moyens de substitution.

Swissair nous ayant laissé tomber, il nous faut réagir. Je ne vois pas d'autre solution que cette résolution.

M. Bénédict Fontanet (PDC). Je suis surpris de l'intervention de M. Grobet qui, en matière de realpolitik, est un maître dans tous les sens du terme.

Certes, nous pouvons regretter la façon dont le trafic aérien s'organise, au plan international, mais notre petit parlement et notre petite cité auraient bien de la peine à influer sur ce qui se passe aux Etats-Unis et en Europe, dans la branche des transports aériens.

Soyons réalistes, Monsieur Grobet ! Compte tenu du nombre important des multinationales domiciliées à Genève, compte tenu aussi des organisations internationales, gouvernementales ou non, siégeant dans le canton, nous devons conserver un aéroport compétitif, doté d'un réseau de liaisons intercontinentales.

Vous dites vouloir soutenir Swissair, si j'ai bien compris. Je ne vois pas très bien où vous voulez en venir. Swissair laisse tomber Genève et supprime des liaisons intercontinentales. Certaines sociétés internationales seraient revenues sur leur décision de s'installer à Genève si elles avaient été au courant de la politique de Swissair, laquelle freine considérablement le développement économique de notre canton.

Par voie de conséquence, et même si je doute de vous convaincre, je dis que nous devons tous voter ce projet de résolution des deux mains.

Monsieur Grobet, je m'étonne de votre attitude à l'égard de cette résolution, car vous avez le souci, comme nous, de la défense de Genève.

Monsieur Nissim, il faut s'exprimer sur un sujet donné en temps voulu. Je veux bien que vous arguiez du train, que nous aimons tous, à propos d'une résolution sur l'aéroport, mais tout de même ! Souhaiter renforcer l'aéroport en expliquant qu'il faut prendre le train et augmenter les tarifs aériens procède d'un raisonnement bien trop subtil pour mon esprit embrumé au terme de cette journée.

De grâce, votez cette résolution qui soutient notre aéroport et fera qu'il sera rendu plus compétitif par nos autorités fédérales, mais ne plaidez pas pour le développement du train ce soir ! Nous ferons ultérieurement une résolution pour Cornavin. Pour l'instant, Swissair n'a pas dit qu'elle allait quitter Cornavin, elle y conservera ses guichets. Vous voilà rassuré, j'espère !

Appelons un chat, un chat. Votons cette résolution radicale même si un radical ne s'y retrouve pas ! Votons-la sans les amendements du groupe écologiste et, si possible, de manière unanime, parce que dans l'intérêt de ce canton, nous devons donner un signal politique fort à nos autorités fédérales, nonobstant les clivages politiques qui nous divisent !

M. Christian Grobet (AdG). Monsieur Fontanet, je vous remercie de vos aimables compliments, mais je ne sais si je dois les prendre pour argent comptant. Ce sont, sans doute, des circonstances particulières qui vous amènent à penser que nous sommes des défenseurs de la realpolitik. Certes, nous croyons l'être, car la realpolitik consiste, pour nous, à ne pas entretenir des illusions, mais à proposer des solutions qui permettront à l'aéroport de Genève de continuer à jouer un rôle prépondérant.

Plutôt qu'entretenir l'illusion de la reprise de nombreux vols intercontinentaux à Genève, mieux vaudrait suivre la voie empruntée par des aéroports de villes de taille similaire, à savoir miser sur l'excellence de dessertes avec les pays d'Europe et méditerranéens.

Il ne s'agit pas, comme vous l'avez dit, de soutenir Swissair, quoique nous souhaitions son maintien et son développement, mais d'utiliser l'arsenal juridique à disposition pour lui poser nos exigences et non lui offrir des conditions dont elle pourra prétexter pour se dégager davantage de notre aéroport. Il ne faudrait pas oublier que cette compagnie assure encore 40% de notre trafic aérien.

Ce débat est quasiment philosophique. Vous êtes convaincu que, par le biais de la libéralisation, nous parviendrons à maintenir notre tissu économique. Nous pensons, au contraire, que ces mesures libérales contribueront à le détruire.

Je me range souvent à votre avis, Monsieur Dupraz, surtout à Berne. Vous me direz que ce n'est pas difficile, vu le conservatisme ambiant du Parlement fédéral, mais là, je ne vous suis vraiment plus. Certes, comme l'a dit M. Fontanet, vous êtes très vif à défendre les intérêts agricoles. Vous avez un discours assez anti-libéralisant en la matière, et vous avez eu des propos très durs, propos que nous n'avons nous-mêmes pas tenus, à l'égard du GATT et de l'OMC. Alors tâchez, Monsieur Dupraz, d'être cohérent dans vos raisonnements économiques !

M. Max Schneider (Ve). Le groupe écologiste acceptera votre résolution si vous soutenez ses amendements.

Pour les appuyer, je porte à votre connaissance la teneur du message qui nous a été transmis, à Chambéry, par M. Barnier, l'ex-ministre français. Il a parlé de cet espace métropolitain que constituent les Alpes du Nord, et du dynamisme exceptionnel de cette région qui, à l'instar de la Haute-Savoie et de l'Ain, compte sur l'aéroport de Genève pour son développement.

Un million et demi d'habitants demeurent dans cet espace, auxquels il faut ajouter les nouveaux arrivants : quinze à vingt mille chaque année. Sept cent mille emplois sont concernés.

Voilà pourquoi les écologistes soutiendront cette résolution si vous acceptez leurs amendements.

J'attire l'attention de M. Fontanet sur le fait que M. Barnier a également soutenu le rail. Pour les courtes distances, il a préconisé des liaisons ferroviaires régionales. Celles-ci manquent entre Chambéry et Cointrin et également à destination d'Evian et de Chamonix. Ces liaisons ferroviaires doivent donc être développées; M. Chaïm Nissim a eu raison de le dire.

Il en va de même pour les liaisons de moins de 500 kilomètres. Il faut absolument promouvoir le rail, d'où nos amendements. Il est clair que nous n'irons pas à New York en train, Monsieur Fontanet !

M. Jean-Philippe Maitre, président du Conseil d'Etat. Je serai bref, vu mon extinction de voix.

Le débat instauré est regrettable par rapport à celui qui s'est déroulé en commission de l'économie. Je remercie cette dernière d'avoir délibéré rapidement, quoiqu'en profondeur, sur le texte que le Conseil d'Etat lui avait soumis en vue d'un consensus au parlement.

Je remercie également le parti radical d'avoir bien voulu retirer son texte qui, techniquement, n'était pas praticable, même si les intentions qui l'animaient sont celles développées dans le présent débat.

Monsieur Grobet, vous avez parlé de déréglementation à tous crins, de libéralisation sans frein, etc. Je ne sais si je reprends vos propres termes, mais c'était le sens de vos propos. Je vous invite à lire attentivement le projet de message du Conseil fédéral et le projet de loi modifiant la loi fédérale sur l'aviation qui, nous l'affirmons, va dans le bon sens - Genève n'y est pas pour rien ! - mais doit être renforcé. Et cette résolution y contribuera, si vous le voulez bien. Il ne s'agit pas d'envisager la liberté totale, comme vous l'avez dit. Cela n'a jamais été prétendu, parce qu'en matière de navigation aérienne, les accords interétatiques existants - un aspect omis dans la résolution radicale ! - conditionnent cette liberté, les intérêts des Etats étant négociés les uns par rapport aux autres.

Le combat mené par Genève est évidemment celui de la Suisse occidentale et de la région française voisine. Ce n'est pas un combat contre Swissair, partenaire important de l'aéroport.

Je vous rends attentif, Monsieur Grobet, à ne pas tomber dans un travers que vous avez très rarement, parce qu'il ne correspond pas à ce que vous êtes. Je veux parler du travers de la naïveté, de la recommandation béate.

Pensez-vous pouvoir demander à Swissair de revenir ici, simplement par gentillesse et parce qu'elle en est priée ? Cela ne tient pas ! Sachez qu'au vu de nos expériences - j'ai fourni cet exemple à la commission de l'économie du Grand Conseil - Swissair a déjà amorcé son retour en réintroduisant une ligne long-courrier qu'elle avait supprimée dans le cadre du concept de concentration, à Zurich, de tout son réseau de long-courriers, à l'exception de celui de New York. C'est la ligne sur Tel-Aviv. Pourquoi ? Parce que nous avons eu la possibilité de faire jouer la concurrence. Je m'explique.

Sur le marché à destination de Tel-Aviv, la compagnie d'aviation israélienne El Al, qui dessert Genève en direction de Tel-Aviv, a considéré le retrait de Swissair comme un marché à prendre. Par conséquent, elle a cherché à engager de nouvelles négociations pour obtenir des droits de trafic supplémentaires. Les négociations ont eu lieu entre la Suisse et Israël. Nous le savons, les aéroports participant aux négociations. L'instruction très précise a été donnée quant à notre volonté d'obtenir, pour El Al, ces droits de trafic supplémentaires. J'avais évidemment l'intention de placer Swissair en face d'une alternative très concrète : ou elle achevait de perdre un marché, ce qui n'était pas dans notre intérêt; ou elle décidait de revenir. El Al a démontré qu'elle pouvait assumer ce marché, et Swissair s'est ainsi trouvée en situation de concurrence, fait inhabituel pour elle.

Résultat des courses : à partir de l'horaire d'été, Swissair reprendra le service sur Tel-Aviv, au départ de Genève. Nous avons obtenu ce résultat en mettant Swissair en concurrence avec El Al. A défaut de cette stimulante confrontation, nous aurions échoué.

Cette proposition de révision de la loi fédérale sur l'aviation correspond exactement à ce que nous voulons renforcer.

Monsieur Grobet, vous m'avez interrogé sur Gulf Air. A ma connaissance, il n'y a jamais eu de contrepartie. Je connais bien cette affaire pour l'avoir négociée. S'il m'est permis d'exprimer un regret, c'est celui que la Confédération n'ait pas accepté plus vite les propositions que j'avais faites au début des négociations. Elle ne les a agréées que huit mois après, mais c'était trop tard pour Gulf Air. Si, au cours de l'été dernier, la Confédération avait accepté ce que je lui proposais, nous aurions toujours Gulf Air à Genève. Je pense que cette compagnie reviendra, mais pas avant qu'elle n'ait digéré un certain nombre de difficultés d'ordre financier.

Au-delà des divergences d'approche des partis, somme toute naturelles, un fait me désole à Genève : c'est notre peine à nous unir quand l'enjeu se situe véritablement au-dessus des partis, aussi respectables soient-ils.

Je m'adresse aux Verts. M. Hiler, qui représentait votre groupe à la commission de l'économie, a parfaitement compris les enjeux, et son attitude, lors de notre discussion, fut extrêmement constructive. Je suis convaincu que vous aurez la même.

Vous voulez amender un considérant en distinguant le court, le moyen et le long-courrier. Votre distinction, bien que pertinente, n'est pas opportune en l'occurrence, le considérant en question ne l'évoquant pas.

Il faut laisser le texte tel quel, parce que notre réseau comporte plusieurs vols européens qui sont des long-courriers non intercontinentaux. Entre les vols intercontinentaux et les vols européens moyen et long-courriers, la symbiose est considérable, les uns servant de réseau d'apport aux autres.

Votre amendement, s'il était adopté, laisserait entendre que nous sous-estimerions le réseau européen. Ce serait une erreur stratégique fondamentale, parce que vous ne pouvez pas avoir un réseau de long-courriers si vous n'avez pas un réseau d'alimentation sur votre propre continent.

C'est la raison pour laquelle votre amendement ne doit pas être adopté. D'ailleurs, M. Hiler avait parfaitement admis les considérants de la résolution en commission.

L'effort demandé n'est pas important et, pourtant, il renforcera l'unité de Genève dans un combat vital pour elle et sa région. Par conséquent, je regrette infiniment le refus de l'Alliance de gauche. Que ses membres aient au moins l'intelligence politique de s'abstenir; nous savons qu'ils n'en sont pas dépourvus. Si des votes négatifs étaient émis à l'encontre de cette résolution, ils seraient utilisés par celles et ceux qui n'ont aucune raison de favoriser Genève. Je veux parler, notamment, des tenants de la pensée unique zurichoise qui, j'en suis certain, n'est pas votre tasse de thé.

Mme Sylvia Leuenberger (Ve). Je voudrais juste préciser quelque chose à M. Maitre qui semble bien fatigué. M. Hiler était absent à la commission, et c'est moi qui l'ai remplacé. Il n'a donc pas pu tenir les propos que M. Maitre lui prête. J'ai exprimé des réticences à l'égard de cette résolution que j'ai finalement votée, tout en conservant mes doutes.

M. Jean-Philippe Maitre, président du Conseil d'Etat. Vous avez raison, Madame. J'ai fait une regrettable confusion. Ce que je retire des propos de M. Hiler résulte de nos discussions en dehors de la commission.

Je suis navré de ma méprise et vous remercie, Madame, de votre précision.

La présidente. Je donne la parole à M. le député Meyll, puis je passerai au vote. Les deux vice-présidents et moi-même sommes très fatigués, nous n'en pouvons plus. Nous sommes «out» ! Monsieur Meyll, vous serez le dernier à intervenir. Je vous prie d'être bref !

M. Pierre Meyll (AdG). Je le serai, Madame la présidente, dans la mesure où la majorité m'accordera son attention, puisque c'est à elle que je m'adresse. En effet, elle s'apprête à voter un texte qui contredit l'avis de la Chambre de commerce et de l'industrie.

Pour vous prouver la véracité de mes propos, je lis un extrait du bulletin de la Chambre de commerce et de l'industrie : «Nos observations faites pendant la consultation - les améliorations concernant notamment la question du contrôle, par des citoyens suisses, d'une entreprise avec siège en Suisse. Nous avons également noté qu'un certain nombre de questions délicates - notamment l'exigence, formulée dans l'avant-projet initial, pour des entreprises avec siège en Suisse d'être majoritairement en mains suisses - seront réglées selon le projet actuel par le Conseil fédéral. Le projet laisse également sur d'autres questions un pouvoir discrétionnaire considérable à l'administration. Ce transfert de compétences vers l'ordonnance, ainsi que vers l'administration, offrira plus de souplesse, mais moins de garanties. Or dans un monde d'aviation, caractérisé par la libéralisation et la mondialisation, le développement des aéroports suisses exige des règles, des jeux de transparence et de crédibilité.»

Il est clair que vous voterez a contrario, et je ne comprends pas votre insistance à vouloir conserver cette lettre b).

La présidente. Je mets aux voix les amendements proposés. Le premier proposé par M. John Dupraz consiste à remplacer les termes «Suisse romande» par «Suisse occidentale». Il se rapporte au premier alinéa du premier attendu :

«- les activités économiques et touristiques de la Suisse occidentale et les emplois qui en découlent;»

Mis aux voix, cet amendement est adopté.

La présidente. Je mets aux voix le deuxième amendement proposé par les Verts. Il se rapporte au quatrième paragraphe du premier attendu et se lit comme suit :

«impliquent que l'aéroport international de Genève puisse continuer à bénéficier de la meilleure desserte aérienne possible par des vols directs long-courriers;»

Mis aux voix, cet amendement est rejeté.

La présidente. Je mets aux voix l'amendement de M. Pierre Meyll consistant à supprimer la lettre b) de la deuxième invite.

Mis aux voix, cet amendement est rejeté.

La présidente. Je mets aux voix l'amendement des Verts consistant à supprimer la lettre c) de la deuxième invite.

Mis aux voix, cet amendement est rejeté.

Mise aux voix, cette résolution ainsi amendée est adoptée et renvoyée aux Chambres fédérales.

Elle est ainsi conçue :

rÉsolution

concernant la modification de la loi fédérale sur l'aviation et la desserte de l'aéroport international de Genève

LE GRAND CONSEIL,

- vu la décision de Swissair, du 3 avril 1996, entrée en vigueur le27 octobre 1996;

- attendu que

- les activités économiques et touristiques de la Suisse occidentale et les emplois qui en découlent;

- le maintien des équilibres régionaux, nécessaires à la cohésion de notre pays;

- la présence des organisations internationales, que le Conseil fédéral déclare être un aspect essentiel de la politique étrangère de la Suisse,

 impliquent que l'aéroport international de Genève puisse continuer à bénéficier de la meilleure desserte aérienne possible par des vols directs européens et intercontinentaux;

- vu le message du Conseil fédéral, du 28 mai 1997, concernant la modification de la loi sur l'aviation,

invite les autorités fédérales compétentes

A adopter dans les meilleurs délais, et sur la base du projet du Conseil fédéral, une législation supprimant tout monopole et mettant en place une politique aéronautique ouverte et dynamique.

A compléter ou modifier le texte proposé dans le sens suivant:

a) assurer les conditions d'une desserte équilibrée des aéroports, ce qui constitue un des objectifs de la politique aéronautique suisse:

- par une répartition adéquate de l'ensemble des concessions de routes (vols de lignes) entre les aéroports;

- par l'introduction de la «désignation multiple» de compagnies aériennes dans tous les accords aériens qui ne la prévoient pas encore;

b) renoncer à l'exigence de la majorité suisse pour le capital actions d'une compagnie suisse;

c) renoncer au contrôle des tarifs aériens, tout en maintenant de hautes exigences en matière de sécurité;

d) réduire la durée des dispositions transitoires à cinq ans au maximum, les droits découlant des concessions existantes demeurant durant ce délai, pour autant qu'ils soient effectivement exercés, et devenant immédiatement caducs s'ils ne le sont plus. 

M. Claude Blanc (PDC). Madame la présidente, j'attire votre attention sur le point 48 de notre ordre du jour, à savoir l'initiative 109 qui doit impérativement être traitée avant le 23 juillet, faute de quoi elle sera considérée, sans autre, comme recevable, ce qui n'est pas l'avis de tout le monde.

La présidente. Si vous souhaitez que cette initiative soit traitée ce soir, nous suspendons nos travaux et nous les reprendrons à 20 h 30. Nous avons encore quatre objets à traiter et à voter.

M. Olivier Vodoz, conseiller d'Etat. M. le député Blanc a tout à fait raison de rappeler le traitement de l'initiative 109. Je m'y étais préparé en fonction de nos délais constitutionnels. A teneur de l'article 68 de la constitution et de l'article 120 du règlement : «L'absence de décision du Grand Conseil dans le délai prescrit à l'alinéa 1 - neuf mois - vaut décision déclarant l'initiative valide.»

Excusez-moi de vous rappeler l'existence d'un rapport de minorité en raison de ce que nous savons. Par conséquent, je souhaite que cette initiative soit débattue ce soir, compte tenu de ces délais.

La présidente. Nous savons qu'un tel débat dure une heure et demie à deux heures.

M. Daniel Ducommun (R). Je n'interviens pas à propos de l'initiative 109, mais pour annoncer le retrait de notre proposition de résolution suivante :

R 337
de Mmes et MM. Roger Beer, Thomas Büchi, Hervé Dessimoz, Daniel Ducommun, Michel Ducret, John Dupraz, Pierre Froidevaux, Elisabeth Häusermann, Pierre Kunz, Gérard Laederach, Bernard Lescaze, David Revaclier, Marie-Françoise de Tassigny, Jean-Philippe de Tolédo et Michèle Wavre à l'Assemblée fédérale exerçant le droit d'initiative cantonal à propos de la loi fédérale sur l'aviation (développement de l'aéroport international de Genève). ( )R337

Le Grand Conseil prend acte du retrait de la proposition de résolution 337.

M. Michel Balestra (L). Le Grand Conseil ayant la possibilité de voter son ordre du jour, je propose que nous entamions tout de suite nos travaux sur l'initiative 109. En effet, la minorité de la commission estime que certains articles de l'initiative sont non conformes au droit supérieur. Cette matière est suffisamment importante pour...

La présidente. Maintenant, nous passons à la résolution 342. Je suis d'accord de mettre aux voix votre proposition à la condition suivante : si elle est acceptée, nous siégerons ce soir, puisque vous êtes régulièrement convoqués à 20 h 30. Je refuse de prolonger cette séance. (Contestations.) Je vous ai convoqués régulièrement à 20 h 30, et, si vous voulez traiter l'initiative 109, ce sera à ce moment-là. Je ne vois pas en quoi cela vous gêne ! Je mets donc aux voix le point relatif à l'initiative 109. Celles et ceux qui veulent en débattre aujourd'hui sont priés de lever la main. (Exclamations.) Non, pas tout de suite ! Je vous ai régulièrement convoqués à 20 h 30, vous siégerez donc à 20 h 30 !

Une voix. Il est quand même maître de son ordre du jour.

La présidente. Sans doute, mais c'est moi qui l'ai convoqué régulièrement. Je suis aussi maître des horaires des séances. Je m'y tiendrai fermement, Monsieur Gougler ! Monsieur Fontanet ?

M. Bénédict Fontanet (PDC). Madame la présidente, je demande à ce que cet objet soit traité pendant cette séance. Le Grand Conseil étant maître de son ordre du jour, il votera sur cette question.

La présidente. Il n'est pas maître du nombre des heures des séances. Je vous ai convoqués régulièrement à 20 h 30, mais, pour le principe, je mets aux voix le traitement de cet objet à 20 h 30.

Mise aux voix, cette proposition est rejetée

La présidente. Je mets aux voix, pour le principe, le traitement immédiat de cet objet.

Mise aux voix, cette proposition est adoptée.

La présidente. N'étant plus opérationnelle, je m'en remettrai à mon premier vice-président. J'appelle encore les quatre points suivants.

R 342
15. Proposition de résolution de Mmes et MM. Michel Balestra, Marie-Françoise de Tassigny, Fabienne Blanc-Kühn, Laurent Moutinot, Nicolas Brunschwig, Claire Chalut, Yves Zehfus, Jean-Claude Vaudroz, Alain-Dominique Mauris, Yvonne Humbert, Armand Lombard, Claude Basset, Pierre-François Unger et Bernard Clerc concernant le maintien et le développement à Genève des services du contrôle de la circulation aérienne. ( )R342

Débat

M. Bernard Clerc (AdG), rapporteur. Comme il n'y a pas eu de rapport, je voulais dire quelques mots. Mais si le Grand Conseil estime que nous pouvons voter sans autre, cela ne me pose aucun problème.

Mise aux voix, cette résolution est adoptée et renvoyée au Conseil fédéral.

Elle est ainsi conçue :

rÉsolution

concernant le maintien et le développement à Genèvedes services du contrôle de la circulation aérienne

LE GRAND CONSEIL,

considérant :

- que l'organisation des services du contrôle de la circulation dans l'espace aérien suisse est de la compétence de la Confédération;

- qu'aujourd'hui ces services sont exploités sur mandat du Conseil fédéral par Swisscontrol, société anonyme propriété à 99% de la Confédération;

- qu'actuellement les services de Swisscontrol emploient près de 400 personnes à Genève pour le contrôle du trafic survolant la Suisse romande et la France voisine (contrôle régional) ainsi que du trafic faisant mouvement sur l'aéroport international de Genève (tour de contrôle);

- que des investissements importants ont été réalisés par la Confédération pour doter Swisscontrol à Genève d'un centre particulièrement performant;

- les études menées par l'administration fédérale et Swisscontrol en vue de la création à Genève d'un centre de contrôle régional commun franco-suisse et le soutien qui y est apporté par le Conseil d'Etat et la Conférence des gouvernements de Suisse occidentale;

- les études, sur mandat de Swisscontrol, concernant la concentration éventuelle sur un seul site des services aujourd'hui établis à Genève et à Zurich pour les opérations et à Berne pour l'administration et la formation et les préoccupations exprimées à cet effet par le Conseil d'Etat,

invite le Conseil fédéral

- à favoriser une utilisation optimale à Genève des compétences et des installations existantes, propriété de la Confédération et de Swisscontrol, en particulier du nouveau bâtiment de la navigation aérienne,

- à permettre l'aboutissement rapide des négociations concernant la création d'un centre commun franco-suisse, ayant valeur, dans ce domaine, de modèle de collaboration européenne.

 

PL 7670-A
16. Rapport de la commission des finances chargée d'étudier le projet de loi de Mmes et MM. Florian Barro, Roger Beer, Jacques Boesch, Hervé Burdet, Sylvie Châtelain, Pierre Froidevaux, Nelly Guichard, Elisabeth Häusermann, Dominique Hausser, René Koechlin, Chaïm Nissim, Catherine Passaplan, David Revaclier, Christine Sayegh, Max Schneider, Pierre Vanek et Jean-Claude Vaudroz ouvrant un crédit extraordinaire d'investissement pour l'équipement informatique des députés. ( -) PL7670
 Mémorial 1997 :  Projet, 4399. Renvoi en commission, 4406.
Rapport de M. Jean-Claude Vaudroz (DC), commission des finances

La commission des finances, sous la présidence de M. Claude Blanc, a étudié ce projet de loi lors de ses séances du 11 et du 18 juin 1997. Ont assisté à la séance:

- - M. .

- M. Jean-François Mabut, secrétaire général du département des finances;

- M. Bernard Taschini, secrétaire du comité de pilotage de l'informatique;

- M. Michel Roch, directeur du centre d'exploitation des technologies de l'information.

Préambule

Le projet visant à équiper tous les députés d'un ordinateur portable standard et dédié au travail et à la fonction parlementaire est le fruit du travail de la commission du suivi informatique. Celle-ci, depuis près de 4 ans suit les démarches et les travaux menés sous l'égide de la chancellerie pour améliorer les prestations offertes aux députés dans le domaine de l'informatique. Malgré le développement de modèles prédéfinis pour la préparation des textes parlementaires, la mise en place d'un mémorial électronique, l'installation d'outils de communication et malgré un support technique efficace et dédié, il n'y a aujourd'hui qu'une trentaine de députés équipés et connectés.

Le taux de satisfaction des utilisateurs est élevé et il n'est plus question pour eux de fonctionner différemment.

Objectifs du projet de loi

Le principal objectif du projet est d'étendre les premières expériences faites en équipant chaque député d'un micro-ordinateur portable. Cet équipement doit permettre aux députés:

- la communication via la messagerie électronique avec le service du Grand Conseil (envoi et réception de divers documents);

- la capacité à rédiger des textes selon des modèles prédéfinis;

- la consultation du mémorial électronique et de la législation sur CD-Rom;

- l'accès à des serveurs Internet / Intranet.

Parmi les avantages liés à cette nouvelle approche, il faut citer l'allégement de la maintenance et du support grâce à l'uniformisation des plates-formes utilisées ainsi que la rationalisation du travail effectué par les collaborateurs du service du Grand Conseil.

Les auteurs du projet préconisent donc de prêter, au début de chaque législature et à chaque député, l'équipement informatique nécessaire à son activité parlementaire.

Financement

Ce crédit sera inscrit au budget d'investissement 1997 en une tranche unique sous la rubrique 10.02.00.536.49 en sus de l'enveloppe budgétaire actuelle.

Les frais d'exploitation entraînés par cet investissement sont évalués à 30 000 F par année (rubrique 315). Ce montant correspond à une moyenne sur 4 ans. Il prend en compte la réparation et le remplacement des pièces défectueuses ainsi que d'éventuelles mises à jour de logiciels.

Discussion de la commission

La commission des finances est acquise au fait qu'un équipement informatique soit mis à disposition durant le mandat de député. Elle considère que des règles précises doivent être définies dans un règlement d'application de ce projet de loi avant la prochaine législature. Ces règles doivent préciser les limites d'utilisation de ce matériel informatique:

- pour les députés quittant en cours de législature,

- pour les députés non réélus,

- pour la formation,

- pour la mise en oeuvre,

- pour l'entretien du matériel (SAV),

- pour les responsabilités (assurance)

- etc.

Ce projet de loi n'est pas passé par la procédure de préavis de la CPIE, ceci essentiellement pour des questions de calendrier. Toutefois, il y a eu un certain nombre d'échanges; ce qui fait que ce projet de loi n'est pas vraiment «tombé du ciel». En effet, la décision de la commission du suivi informatique s'est prise tardivement et, si nous voulions que les députés élus en octobre puissent être équipés dès le début de leur mandat, il s'agissait de faire vite.

Toutefois, toutes les procédures mises en place dans le cadre de la réforme informatique de l'Etat seront utilisées pour le choix et l'ensemble des achats marchandises (hardware et software) inhérent à ce projet de loi.

Il faut rappeler que la solution préconisée dans l'exercice précédent qui consistait à subventionner les députés pour l'achat d'un équipement informatique n'a pas été très positive, si on en croit le nombre de députés connectés.

Nous pensons que le fait de mettre à disposition des députés un matériel standard configuré et adapté aux nécessités d'une connexion directe avec le réseau de l'Etat, va probablement permettre à un nombre important de députés d'être «connectés» et surtout leur permettre de faciliter leur travail dédié à la fonction de parlementaire.

Vote du projet de loi 7670

VOTE:

entrée en matière

11 OUI

2 ABST.

Amendement

L'article 1 est modifié en supprimant la durée de la législature. La commission considérant que si un député sortant est réélu il pourrait tout à fait convenir de conserver son matériel. D'autre part, si un député quittait en cours de législature, le matériel serait rendu.

Il est proposé de rajouter un alinéa 2 qui mentionne que:

cet équipement est remis en prêt aux députés pendant la durée de leur mandat (pour les mêmes raisons évoquées ci-dessus).

En outre, la direction générale des finances a souhaité que la période d'amortissement soit, selon les règles d'usage en matière d'amortissement des biens de l'Etat, de 8 ans à partir de la deuxième année. En tenant compte que le Conseil d'Etat envisage de modifier les normes comptables et tout particulièrement d'amortissement en matière d'informatique.

L'ensemble de la commission est d'accord pour modifier l'article 4 dans le sens suivant:

l'amortissement de l'investissement à charge de l'Etat est calculé chaque année sur sa valeur résiduelle et est portée au compte de fonctionnement.

amendement

OUI à l'unanimité

final

12 OUI

1 ABST.

Conclusions

La commission des finances a accepté à l'unanimité moins une abstention ce projet de loi dans le cadre de la volonté de doter le parlement des moyens nécessaires à son activité. La commission de suivi de l'informatique des députés ainsi que le Bureau du Grand Conseil se sont prononcés favorablement. Dans une période où l'on parle de Smart Geneva ou de Geneva Man et où l'Etat se dote de plus en plus de bases de données informatisées, il y a certainement un avantage déterminant à posséder un matériel de qualité ainsi que les moyens technologiques et pratiques pour remplir le mandat de député.

Par conséquent, nous vous recommandons, Mesdames et Messieurs les députés, de suivre le vote de la commission des finances et d'accepter ce projet de loi.

Annexes: Tableau d'évaluation des charges financières moyennes

 Tableau d'évaluation de la dépense nouvelle et de la couverture financière

ANNEXES

8

Premier débat

Ce projet est adopté en trois débats, par article et dans son ensemble.

La loi est ainsi conçue :

LOI

ouvrant un crédit extraordinaire d'investissement pour l'équipement informatique des députés

LE GRAND CONSEIL

Décrète ce qui suit:

Article 1

1 Un crédit global de 550 000 F (y compris TVA et renchérissement) est ouvert au Conseil d'Etat pour couvrir l'acquisition d'un équipement informatique pour les députés.

2 Cet équipement est remis en prêt aux députés pendant la durée de leur mandat.

Art. 2

Ce crédit est inscrit au budget d'investissement en une tranche unique 1997 sous la rubrique 10.02.00.536.49 en sus de l'enveloppe budgétaire 1997.

Art. 3

Le financement de ce crédit est assuré par le recours à l'emprunt et dans les limites du cadre directeur fixant à environ 250 millions de francs le maximum des investissements annuels dont les charges en intérêts et en amortissements sont à couvrir par l'impôt.

Art. 4

L'amortissement de l'investissement à charge de l'Etat est calculé chaque année sur sa valeur résiduelle et est portée au compte de fonctionnement.

Art. 5

La présente loi est soumise aux dispositions de la loi sur la gestion administrative et financière de l'Etat, du 7 octobre 1993.

 

R 343
17. Proposition de résolution de Mmes et MM. Fabienne Blanc-Kühn, Fabienne Bugnon, Luc Gilly, Pierre-François Unger et Roger Beer concernant le soutien au «Train européen pour la paix» (appel de Hanovre). ( )R343

EXPOSÉ DES MOTIFS

Les considérants de cette résolution font office d'exposé des motifs et au vu de l'urgence nous vous remercions d'accepter de la renvoyer directement au Conseil d'Etat.

Mise aux voix, cette résolution est adoptée et renvoyée au Conseil d'Etat.

Elle est ainsi conçue :

rÉsolution

concernant le soutien au «Train européen pour la Paix»(appel de Hanovre)

LE GRAND CONSEIL,

considérant :

- que la situation politique entre la Turquie et le Kurdistan est sans issue dans ce conflit si, actuellement, rien n'est entrepris;

- que le message des multiples prises de position des peuples turcs et kurdes en faveur de la paix et du dialogue politique dans le cadre d'une démocratisation générale est de plus en plus pressant;

- que «l'appel de Hanovre» (association allemande regroupant plus de 400 personnalités: députés, médecins, représentants de différentes associations et institutions travaillant pour la résolution de la question kurde + l'association des droits de l'homme de la Turquie et la fondation pour la recherche en droit social en Turquie) organise un «Train européen pour la Paix». Celui-ci sera mis sur rails pour aller de Bruxelles à la ville de Diyarbatir, fin août 1997;

- qu'un millier de personnes ont déjà annoncé leur participation;

- que le message porté par le «Train» est simple, «le temps de la paix est venu», «la démocratie, avec la paix et la liberté, est la nécessité la plus urgente et la seule solution au Kurdistan, et qu'elle ne pourra être remise à plus tard»;

- que de nombreuses personnalités, conseillers nationaux, députés genevois, ONG, associations de soutien au peuple kurde, organisations politiques, soutiennent déjà l'appel de Hanovre en faveur du «Train européen pour la Paix»,

invite le Conseil d'Etat

à apporter son message de soutien à cette action européenne d'envergure pour la Paix;

à adresser ce message aux responsables de «l'appel de Hanovre»;

à envisager une aide financière pour la réalisation de ce voyage.

La présidente. Nous allons maintenant traiter le projet de loi 7606.

M. Chaïm Nissim (Ve). Ce point étant moins urgent que les autres, je propose de le traiter en septembre. Il va susciter un très long débat. Nous n'allons donc pas en discuter maintenant !

La présidente. Je mets aux voix la proposition de traiter immédiatement le point 39.

Le résultat est douteux.

Il est procédé au vote par assis et levé.

Le sautier compte les suffrages.

Mise aux voix, cette proposition est rejetée par 31 non contre 28 oui.

La présidente. Ce point est donc renvoyé à une prochaine séance.

Présidence de M. René Koechlin, premier vice-président

IN 109-B
18. Rapport de la commission législative chargée d'étudier l'initiative 109 «Genève, République de paix». ( -) IN109
 Mémorial 1997 : Page, 267. Rapport du Conseil d'Etat, 267.
  Renvois en commission, 314.
Rapport de majorité de M. Luc Gilly (AG), commission législative
Rapport de minorité de M. Michel Balestra (L), commission législative

La commission législative s'est réunie les 7, 28 février et 11 avril 1997 sous la présidence de M. Laurent Moutinot - en l'absence de M. Halpérin - pour examiner la validité de l'initiative 109 «Genève, République de paix».

Les travaux ont été conduits en la présence de M. Eric Balland, secrétaire adjoint au département de justice et police et des transports (DJPT) (lors de toutes les séances) et de M. Gérard Ramseyer, conseiller d'Etat, président du DJPT (le 28 février 1997).

Préambule

Dans sa séance du 23 janvier 1997, l'initiative 109 et le rapport du Conseil d'Etat IN 109-A sont renvoyés à la commission législative. Le Conseil d'Etat propose de déclarer l'initiative 109-A partiellement recevable.

La commission législative s'est prononcée le 11 avril 1997 pour la recevabilité de l'initiative 109.

A Genève, une culture et une politique de paix, c'est nécessaireet c'est possible

C'est le 28 août 1996 que le Groupe pour une Suisse sans armée (GSsA) a remis son initiative «Genève, République de paix» - ci-après GRP - à la chancellerie d'Etat. Cette initiative est soutenue par: Femmes pour la Paix, l'Alliance de gauche, les Jeunesses socialistes, les Verts, le Parti du travail, solidaritéS, le Parti socialiste genevois et les syndicats SIT et SIB. Elle a obtenu l'appui de 11 178 citoyennes et citoyens du canton.

Insérer un article pacifiste dans la constitution genevoise, tel est le but de cette initiative, et c'est par ce levier-là que celle-ci veut, par des mesures cantonales concrètes, faire avancer et consolider un message d'ouverture, d'innovation et de courage pour renforcer l'idée que la prévention et la compréhension sociale des conflits doivent avant tout être de nature non violente. Déléguer la solution aux militaires ne peut qu'aggraver les conflits.

Cette initiative doit aussi orienter les responsables politiques du canton pour répondre à la majorité des citoyennes et citoyens qui soutiennent (à une exception près) depuis des dizaines d'années chaque votation concernant les problèmes liés à l'armée et à la paix !

La solidarité, la justice sociale et le renoncement à la violence sont les objectifs auxquels le gouvernement genevois doit impérativement donner la priorité. L'initiative propose des mesures concrètes qui vont dans ce sens: un programme d'éducation à la paix dans le cadre de l'instruction publique; la création d'un institut de recherche pour la paix; l'accueil des plus démunis et des victimes de la violence; enfin, le renoncement à la possibilité pour le canton d'appeler et d'engager les troupes de l'armée contre la population. Le canton développera des moyens civils et non violents pour résoudre les conflits internes. Il en va de même pour la protection des rencontres internationales.

Travaux de la commission

Lors de la première séance de commission, nous avons commencé par un tour de table. D'entrée, j'ai tenté d'expliquer que cette initiative n'était pas abolitionniste, mais bien un outil important pour encourager et favoriser la dynamique politique d'une culture de paix, pour que Genève devienne réellement cette «ville internationale de paix». Rapidement, les représentants de l'Entente se sont rués sur l'idée que l'initiative visait à abolir de fait l'armée à Genève par la petite porte, qu'elle outrepassait les compétences cantonales et ne respectait pas la constitution fédérale. Ils étaient encouragés sur cette voie par le rapport inconsistant du Conseil d'Etat, qui a avancé des arguments plus que douteux pour invalider partiellement l'initiative, tout en la dénaturant complètement et en détournant le sens donné par les initiants. En fin de séance, le président passe en revue les différents problèmes de recevabilité:

a)  l'unité de la forme: le projet est rédigé de toutes pièces;

b)  l'unité de la matière: la commission estime que l'initiative respecte le principe;

c)  l'unité du genre: la commission constate que ce principe est manifestement réalisé.

Le Conseil d'Etat est d'ailleurs du même avis dans son rapport.

L'examen de recevabilité matérielle et d'exécutabilité nécessite les documents que fourniront le GSsA et le département (deux avis de droit, voir annexes).

Audition

Lors de sa deuxième séance, le GSsA et Me Pierre-Louis Manfrini ont été auditionnés. Pour commencer, trois représentants du GSsA (Me Robert Cramer, MM. Paolo Gilardi et Tobia Schnebli) ont fait les commentaires suivants:

- «Depuis les années cinquante, le peuple genevois s'exprime en faveur du désarmement et de la paix, il s'agit d'ancrer aujourd'hui cette volonté dans la charte fondamentale de la République.»

- «Il y a des manques d'exigence à ce sujet sur le plan législatif.»

- «Cette initiative n'est pas abolitionniste. Elle propose différentes mesures, délimitées par le cadre du droit fédéral. Cette initiative ne contredit pas le droit supérieur.»

- «Le rapport du Conseil d'Etat a répondu par des mesures d'ordre juridique, qui recoupent en fait une position d'ordre politique. Le gouvernement peut ne pas partager le contenu de l'initiative, mais il doit séparer les aspects juridiques des aspects de fond.»

- «Concernant le point 4, lettre c (au sujet des conférences internationales), le Conseil d'Etat juge ce point irrecevable pour des raisons financières. Cet argument n'a pas de valeur juridique. Le peuple décidera.»

- «La commission doit adopter une attitude correcte et généreuse à l'égard de l'initiative et ne pas mélanger les avis personnels avec des considérations d'ordre juridique. D'autre part, une autorité de contrôle qui examine une initiative doit le faire de bonne foi et doit postuler que les initiants ont voulu respecter la constitution; ainsi que le dit d'ailleurs le rapport du Conseil d'Etat.»

- «L'initiative constitue un encouragement à la promotion d'une culture de paix avec des pistes concrètes. Cela revient à passer de la parole aux actes. Il y a des mesures d'encouragement, et des mesures plus contraignantes comme celle de renoncer à l'utilisation de l'armée contre la population civile.»

- «Il est regrettable que le Conseil d'Etat n'ait pas décrit en ouverture de son rapport le sujet traité, alors que ça aurait dû être le cas.»

- «Les mots utilisés par les initiants ne sont pas neutres. Le rapport du Conseil d'Etat donne la fâcheuse impression que son auteur substitue ses propres mots aux mots utilisés par les initiants. C'est grave ! Le contrôle de cette initiative a donné un rapport politique partial, plus que juridique.Ex.: l'auteur du rapport substitue «organisations» au terme d'«institutions» (art. 160D, al. 2). Le Conseil d'Etat et le Grand Conseil interviennent depuis longtemps et sans problème avec ses institutions:

- le CICR,

- Amnesty International,

- Médecins sans frontières,

- la LICRA (Ligue internationale contre le racisme),

- le Congrès juif mondial,

- Terre des Hommes,

- le GSsA,

- l'UEFA,

- l'IATA,

- l'UER (Union Européenne de Radiodiffusion), etc.»

- «Concernant les terrains militaires et l'encouragement pour la restitution à l'usage civil de terrains militaires (art. 160D, al. 2, lettre b), l'auteur ne tient pas compte de la double réserve des initiants («encourage» et «en intervenant»). De plus, les conventions qui lient la Confédération et le canton sont en tout temps aptes à être modifiées d'un côté comme de l'autre.»

- «L'initiative demande que le Conseil d'Etat ne fasse pas appel à la troupe pour assurer le service d'ordre. L'auteur du rapport du Conseil d'Etat fait croire que celui-ci ne doit rien signaler à la Confédération. Le texte des initiants est détourné.»

- «Me Manfrini est l'auteur du rapport du Conseil d'Etat et de l'avis de droit. Il n'a pas rendu un travail neutre, défend un point de vue et construit une argumentation imaginaire des initiants. Les initiants n'ont pas tenu les propos que leur prête Me Manfrini ! Il reproduit des citations tronquées, escamote certains problèmes et cache une partie de la littérature juridique. C'est grave de la part de l'auteur d'un avis de droit.»

- Me Cramer rappelle par exemple que les termes «institutions» et «organisation» ne sont pas semblables. Me Manfrini cite J.-F. Aubert dans son traité de 1967, en oubliant son complément de 1982, et le tempérament qu'il apporte à l'extrait présenté par l'auteur de l'avis de droit. Celui-ci oublie en outre de citer l'article 12 de la loi fédérale de la coopération au développement et l'aide humanitaire internationale du 19 mars 1976 qui déclare que «le Conseil fédéral peut collaborer avec des cantons […] et soutenir leurs initiatives». Cette loi fédérale dit donc que les cantons peuvent prendre des initiatives dans les domaines de la coopération au développement et de l'aide humanitaire internationale. L'initiative parle de coopération et de solidarité entre les peuples. Il apparaît bien difficile d'opérer une distinction entre ces deux textes, même en étant un juriste très subtile… «Il a été démontré qu'en de nombreuses occasions, la collaboration est possible, et même la bienvenue, entre le Conseil fédéral et les cantons. Les cantons peuvent réellement prendre des initiatives dans le domaine de la coopération, la solidarité entre les peuples et l'aide internationale.»

- Me Cramer constate encore que l'auteur du rapport du Conseil d'Etat cite, en allemand, un extrait intéressant d'un ouvrage de M. Kolz relatif à la restitution à des usages civils de terrains affectés à l'armée. La traduction française de ce même passage apparaît encore plus intéressante. Le texte dit en réalité exactement le contraire de ce que laisse entendre la traduction allemande figurant dans l'avis du Conseil d'Etat ! «Dans un cas concret, sur la base d'intérêts publics locaux spéciaux, le canton est sans doute libre, sans violation de son obligation fédérale de fidélité, de s'opposer à l'établissement d'une place d'armes. L'initiative ne va pas aussi loin, elle demande simplement d'essayer de s'arranger et de négocier avec la Confédération, «encourager … en intervenant». Alors les mots ont un sens. C'est ce sens-là qu'il faut comprendre, et pas un autre.

- «Le rapport du Conseil d'Etat est une machine politique de lutte contre l'initiative. Il lui fait dire autre chose que ce qu'elle dit en réalité. Le Conseil d'Etat est une autorité cantonale qui est chargée de transmettre le sentiment de la population. Il doit se faire l'interprète d'un besoin exprimé par celle-ci.»

 Ensuite, Me Manfrini s'est exprimé à son tour face à la commission.

- Il a examiné la conformité de l'initiative 109 au droit supérieur. Pour lui, l'initiative n'est pas problématique quant à ses buts. Quatre points suscitent une interrogation et conduisent à la non-conformité de trois d'entre eux.

1. L'article 162, alinéa 1: il heurte la compétence fédérale.

2. Le problème des terrains affectés à l'armée.

3. Le renoncement au recours à l'armée en cas de situation extrême.

4. Les conférences internationales posent problème.

 Mais Me Manfrini ne tire aucune conclusion sur ce dernier point.

 Il conclut à l'admissibilité de l'initiative dans son principe, mais à la non-recevabilité de certains points.

 Remarque d'un commissaire: il est gêné par l'expertise de Me Manfrini, devenu depuis quelques années l'expert patenté du Conseil d'Etat. Avant, le Conseil d'Etat procédait à deux expertises.

 La Confédération ne peut empêcher un canton d'intervenir auprès d'institutions, de conférences et de représentants d'institutions internationales. Le Conseil d'Etat se substitue souvent à la Confédération dans ce domaine, sans pour autant enlever quoi que ce soit à la politique étrangère de la Confédération.

 Au sujet de la sécurité des conférences internationales un commissaire fait remarquer que c'est le canton qui assure la sécurité des conférences internationales. C'est toutefois la Confédération qui estime si les mesures de sécurité prises sont suffisantes ou non. Dans un cas négatif, il peut être fait appel aux forces de police d'un autre canton, ou à l'armée. L'initiative n'empêche pas la Confédération de faire appel à l'armée. Elle demande juste que ce ne soit pas le canton qui y fasse appel. La lecture de l'avis de droit donne l'impression que Me Manfrini interprète l'initiative au-delà du sens même des mots. L'initiative demande au Conseil d'Etat de faire des démarches qu'il est en droit d'effectuer. Il apparaît donc difficile de qualifier cette démarche de contraire à la constitution.

- Me Manfrini doute des initiants sur le terme «dans les limites du droit fédéral». Pour lui, l'interprétation n'est pas sans limite. Il rappelle quand même que l'objectif principal de l'initiative ne pose pas de problème. Ce sont les quatre moyens qui en posent. Il est rappelé à Me Manfrini qu'il est inacceptable de voir dans le rapport du Conseil d'Etat comment les mots sont utilisés, travestis et détournent donc le sens de l'initiative.

 Le rapporteur a expliqué notamment à la commission que l'initiative demande au gouvernement genevois d'être participatif en matière de relations internationales. Ainsi que le dit M. Roland Mayer, chargé d'information des cantons au bureau de l'intégration au DFAE, «La première tentative de participation des cantons à la politique extérieure dans le cadre des négociations bilatérales avec l'Union européenne vise à augmenter le potentiel d'action de la politique extérieure de la Suisse. L'intégration directe des cantons dans la négociation permet de trouver des solutions applicables et faisables sur le plan de la politique intérieure. La participation des cantons à la politique extérieure suisse constitue donc un atout et non un handicap, d'autant que les réserves constitutionnelles qui lui sont parfois opposées sont sans fondement» (in «Participation des cantons à la politique extérieure: un atout et une nécessité», tiré de La vie économique, 2/1997). Cet auteur va beaucoup plus loin que ce que demandent les initiants et de ce fait enlève toute pertinence aux arguments suggérant l'incompatibilté constitutionnelle de l'alinéa 2 avancés par certains commissaires.

 Un commissaire fait remarquer qu'il existe à Genève de nombreuses organisations non gouvernementales, le Conseil d'Etat est libre d'intervenir auprès de celles-ci. Ex.: commission des droits de l'homme, etc. Voir liste en page 4.

Une audition contradictoire entre les deux juristes est acceptée pour la prochaine séance de commission.

Dernière séance de la commission: confrontation simultanéeentre Me Pierre-Louis Manfrini et Me Robert Cramer

Le président demande qu'ils se limitent aux quatre sujets controversés. En préambule, Me Robert Cramer souhaite aborder la problématique du droit d'initiative sous le contrôle de Me Manfrini, afin que les choses soient claires à propos de ce principe de base, sur lequel la commission devra baser sa décision. Concernant la recevabilité matérielle, il cite l'arrêt du Tribunal fédéral ATF 109 Ia. 61.

On peut lire dans le rapport du Conseil d'Etat, à la page 5: «De plus, en toute hypothèse, l'initiative doit être interprété de manière conforme à la constitution. Selon la jurisprudence relative au contrôle abstrait de la constitutionnalité de prescriptions légales ou réglementaires cantonales, il faut essayer, selon les principes d'interprétation reconnus, de donner au texte litigieux une portée qui le fasse apparaître comme conforme à la constitution. L'initiative ne peut être déclarée contraire au droit supérieur que si elle ne se prête pas à une telle interprétation (ATF 109 Ia 61).

L'initiative doit donc être interprétée à la fois dans un sens qui correspond le mieux à son sens et à son but et de manière à rester compatible avec les exigences du droit fédéral (Knapp, Précis de droit administratif, Bâle, 1963, page 59; Auer, Les droits politiques dans les cantons suisses, Genève, 1978, page 134; Kölz, Die kantonale Volksinitiaive in der Rechtssprechung des Bundesgerichts, ZBI 1982, page 44 et les nombreuses références citées).

- Article 160 D, alinéa 2 (intervention auprès d'institutions internationales et nationales): Me Cramer observe que, dans le rapport du Conseil d'Etat, il est indiqué que la politique du canton de Genève va dans le sens des initiants (page 28 III rapport)! Il faut vraiment faire dire à l'initiative autre chose que ce qu'elle dit pour arriver à la conclusion de l'irrecevabilité, puisqu'il est inexact d'affirmer que le canton n'a aucun pouvoir d'intervention en matière d'aide humanitaire et d'aide au développement.

- Me Cramer rappelle que les mots conservent leur sens dans l'ordre juridique. C'est le principe de l'unité du droit. Le droit genevois fait ainsi aux institutions internationales à plusieurs reprises, dans les articles 9 LCI et 15a de la loi sur l'extension par exemple, mais dans des termes différents. Ces deux articles traitent de la problématique des territoires des organisations internationales au regard des PUS. L'article 9 LCI vise les organisations intergouvernementales pour exclure les sujets de droit international, alors que l'article 15a de la loi sur l'extension parle d'institutions internationales. La signification est différente dans ces deux cas. Ce n'est donc pas par hasard que les initiants ont utilisé le terme de «institutions internationales» dans leur texte, c'est-à-dire la conception la plus large.

- Article 160 D, alinéa 2, lettre b (restitution à l'usage civil des terrains affectés à l'armée): Me Cramer fait remarquer que Me Manfrini lit le texte avec le verbe «devoir,» alors que l'initiative parle d'«encourager.» Il ne s'agit pas de réquisitionner les terrains militaires, mais de s'efforcer de les récupérer lors de discussions menées avec la Confédération.

- Article 160 D, alinéa 4, lettre b (renonciation à l'engagement des troupes de l'armée pour assurer le service d'ordre): Me Manfrini estime qu'il existe un lien entre l'ordre public cantonal et l'ordre public fédéral (art. 16 Cst. fédérale). Pour Me Cramer, l'initiative ne vise pas l'article 16, mais se réfère à l'article 19 de la constitution. fédérale, lequel donne la possibilité aux cantons de faire appel à des troupes militaires. L'article 127 de la constitution genevoise est le corollaire de l'article 19, l'initiative en demande d'ailleurs l'abrogation.

 Avertir et informer les autorités fédérales est une chose que l'initiative n'interdit pas. Elle demande par contre que le canton ne fasse pas appel à la troupe. La Confédération peut décider elle-même d'un envoi éventuel de la troupe.

- Article 160 D, alinéa 4, lettre c (sécurité des conférences internationales): Me Manfrini: «Il s'agit d'un problème d'exécutabilité. La responsabilité première pour la sécurité relève juridiquement de la Confédération.» Me Cramer rétorque que le canton s'est passé de la troupe pendant de longues années pour assurer la sécurité des conférences internationales. Entre 1961 et 1983, il n'y a pas fait recours. Un tragique accident était survenu en 1963 (méprise de l'armée) et le canton avait alors renoncé à recourir à la troupe. Il faudrait certes des moyens supplémentaires qui nécessitent discussion. En l'état des choses, il n'est pas possible de dire que cette partie de l'initiative est irréalisable, puisque le canton s'est déjà passé de la troupe durant de longues années pour assurer la sécurité des conférences.

La confrontation prend fin. Le président rappelle que les trois critères formels de recevabilité ont été remplis et acceptés par la commission. Il demande encore si la procédure d'appel à la troupe tomberait en cas d'abrogation de l'article 127 de la constitution genevoise. M. Balland constate qu'il s'agit d'une disposition purement cantonale. La constitution pourrait s'en passer. La conformité au droit supérieur de l'abrogation de l'article 127 de la constitution genevoise est soumise au vote de la commission: pour: 5 (L, PDC, Vert, PS, AdG), contre 0, abstention 1 (R).

Mise au vote, en troisième et dernière lecture, la conformité au droit supérieur des dispositions contestées de l'article 160D est admise par 4 voix (Vert, PS, 2 AdG) contre 3 (L, R, PDC).

L'exécutabilité de l'initiative est acceptée par 4 voix (Vert, PS, 2 AdG) contre 3 (L, R, PDC).

Conclusion

A la majorité de ses membres, la commission législative vous recommande, Mesdames et Messieurs les députés, d'accueillir favorablement l'initiative 109 telle quelle.

Cette majorité considère comme important de souligner que ce vote porte sur la recevabilité formelle et matérielle de l'initiative qui - à l'évidence - n'est pas contestable du point de vue constitutionnel. Ce vote ne porte pas sur l'appréciation politique que les un-e-s ou les autres peuvent avoir de l'initiative. Méconnaître ce fait conduirait à vouloir priver la population genevoise de pouvoir se déterminer rapidement sur la nécessité d'un projet innovateur en matière de politique de paix. Le Grand Conseil conserve, par ailleurs, toute faculté de faire connaître à la population genevoise sa position sur le fond de l'initiative.

A titre personnel je souhaite qu'il apporte un soutien appuyé à ce projet politique.

Je fais mienne la réflexion citée en conclusion des considérations juridiques figurant en annexe 1 du présent rapport de majorité. La voici donc:

«Serait-il inconcevable que, surmontant les pesanteurs d'une culture elle aussi désorientée, nous retrouvions les chemins des pays habités, et habités par l'homme qui mérite son nom parce que, vivant avec autrui, lorsque celui-ci le heurte, ou est heurté par lui, moins que la stérile vengeance de l'outrage et l'illusoire compensation de la douleur par la douleur lui importe l'avenir de la fraternité?»

Raphaël Drai, «Le mythe de la loi du talion», Anthropos, Paris, 1996,

page 234

Annexes:

I. Considérations juridiques relatives au rapport du Conseil d'Etat au Grand Conseil sur la validité et la prise en considération de l'initiative populaire cantonale «Genève, République de paix». Texte présenté par le GSsA.

II. Avis de droit de Me Pierre-Louis Manfrini.

ANNEXE I

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ANNEXE II

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Rapport de LA minorité

Le Conseil d'Etat a constaté l'aboutissement de l'initiative 109 par un arrêté du 16 octobre 1996, publié dans la Feuille d'avis officielle du 23 octobre 1996.

Le Conseil d'Etat a déposé son rapport au Grand Conseil le 18 décembre 1996.

La commission législative s'est réunie à deux reprises pour étudier, à teneur de l'article 66 de la constitution genevoise, la recevabilité de l'initiative.

1. L'unité de la forme est respectée, l'initiative 109 est en effet rédigée comme un projet législatif formulé.

2. Le principe de l'unité de la matière est respecté par cette initiative.

3. La conformité au droit supérieur pose, selon le Conseil d'Etat et l'avis de droit rédigé le 29 novembre 1996 par Me Pierre Louis Manfrini, des problèmes plus importants sur lesquels la commission législative s'est penchée avec attention.

4. L'exécutabilité: l'initiative 109 est, sous réserve d'une nullité partielle des articles qui posent des problèmes de non-conformité au droit supérieur, réalisable.

En préambule la minorité de la commission est d'accord pour affirmer, comme le Conseil d'Etat dans son rapport et le mandataire dans son avis de droit, que les réserves suivantes: 

«Dans la limite du droit fédéral, le canton développe une politique de sécurité fondée sur la mise en oeuvre de moyens pacifiques...» et «... par les autorités cantonales et communales, l'administration et les institutions publiques dans le cadre de leurs attributions.» de l'article 160, lettre D, alinéa 1, ne suffisent pas pour permettre de soumettre au vote populaire des dispositions contraires au droit supérieur que propose cette initiative.

Selon la minorité de la commission les articles suivants ne sont pas conformes au droit supérieur:

1. Article 160 D, alinéa 2

L'alinéa 2 de l'article 160 D prétend confier au canton la mission de soutenir toute démarche visant le désarmement global, la coopération et la solidarité entre les peuples et le respect des droits de l'homme et de la femme auprès des «institutions nationales et internationales compétentes».

Cette partie de l'initiative est irrecevable, car elle donne un mandat impératif au canton d'intervenir dans un domaine strictement réservé à la Confédération.

La seule exception imaginable, ce serait, pour le canton, d'intervenir en parallèle avec la Confédération dans le domaine de la coopération au développement.

Dans un débat intéressant entre Me Cramer et Me Manfrini, il est apparu clairement à la minorité de la commission législative que cet alinéa est non conforme au droit supérieur, le mandat impératif donné par les initiants au canton ne concernant pas la coopération au développement mais bien le désarmement global.

L'article 8 de la constitution fédérale n'est donc pas respecté et il convient de limiter le mandat impératif confié par l'initiative aux autorités cantonales à l'intervention auprès des «institutions nationales compétentes» .

2. Article 160 D, alinéa 2, lettre b

Cet alinéa concerne «la restitution à des usages civils des terrains affectés à l'armée dans le canton en intervenant auprès de la Confédération».

Le Conseil fédéral peut exploiter une place d'armes sans avoir besoin d'une autorisation de droit cantonal. Si le législateur fédéral a soustrait la Confédération de ces autorisations c'est parce qu'il tient les intérêts de la Confédération pour prioritaires par rapport à ceux du canton et que la défense nationale constitue bel et bien une tâche fédérale.

Les initiants justifient leur démarche par l'article constitutionnel genevois qui affirme le principe du «sortir du nucléaire». Or, si le canton a pu maintenir cette disposition, c'est justement parce que le législateur a renoncé à faire de la construction et de l'exploitation d'installations atomiques une tâche fédérale.

Ce qui n'est manifestement pas le cas pour les places d'armes.

De plus les initiants déclarent: «Nous voudrions en faire de même face au danger militaire» et l'objectif clairement affirmé de «démilitariser» le canton viole le devoir de fidélité confédérale, dans la mesure où il est en contradiction avec la politique du Conseil fédéral en matière d'instruction et de gestion des places d'armes.

Il ne s'agit pas, pour cette initiative, de s'opposer à l'implantation d'une place d'armes pour des motifs spécifiques d'aménagement du territoire, mais d'affirmer une volonté d'exclusion de l'armée du territoire de notre canton en menant une politique générale de «démilitarisation».

En conséquence, ce mandat systématique donné au canton est selon la minorité de la commission clairement contraire au droit fédéral, cette disposition doit donc être supprimée.

3. Article 160 D, alinéa 4, lettre b

Le maintien de l'ordre intérieur est un but primaire de la Confédération auquel les cantons sont associés pour leur bénéfice mutuel

En cas de trouble intérieur grave un canton ne peut pas renoncer à aviser immédiatement le Conseil fédéral, c'est en premier lieu un service d'ordre fédéral à la demande et sous le commandement du canton que la Confédération doit mettre sur pied en levant des troupes.

Dans l'hypothèse où le gouvernement cantonal est hors d'état d'invoquer le secours de la Confédération, les autorités fédérales interviennent sans réquisition.

Le renoncement du canton à l'engagement des troupes de l'armée pour assurer le service d'ordre est contraire aux dispositions de la constitution fédérale.

Le canton a en effet le devoir de maintenir l'ordre public cantonal, si l'article 19, alinéa 4, de la constitution fédérale donne le droit au canton de disposer des forces militaires basées sur leur territoire pour le maintien du service d'ordre, le canton ne dispose pas pour autant du droit de renoncer unilatéralement à cette prérogative.

Cet article 160 D, alinéa 4, lettre b, doit donc également, selon la minorité de la commission, être soustrait du texte soumis en votation populaire.

4. Article 160 D, alinéa 4, lettre c

La responsabilité première pour assurer la sécurité des conférences internationales revient juridiquement à la Confédération.

L'initiative, par son article 160 D, alinéa 4, lettre c, donne 5 ans au canton pour garantir la sécurité des conférences internationales par des moyens non militaires. Cette disposition serait juridiquement acceptable si dans tous les cas le canton était à même de garantir la sécurité des conférences internationales.

Le Conseil d'Etat répond clairement qu'il n'en a pas les moyens dans son rapport au Grand Conseil: «C'est une vue de l'esprit que de croire que le canton serait à même, à ses frais, de créer, d'instruire, d'entretenir en permanence et d'équiper un corps civil de plusieurs milliers d'hommes et de femmes prêts en tout temps à être mis sur pied pour garantir la protection de conférences internationales en lieu et place du service d'appui de l'armée.» (IN 109A, page 24.)

En conséquence, pour la minorité de la commission comme pour le Conseil d'Etat, l'article 160 D, alinéa 4, lettre c, doit également être retiré du texte soumis en votation.

5. Conclusion

La commission législative n'aurait pas dû rentrer sur le fond, mais se contenter d'analyser l'initiative afin de vous dire si elle est conforme ou non, concernant l'unité de la forme, l'unité de la matière, la conformité au droit supérieur et l'exécutablité.

Il est évident pour la minorité de la commission, comme pour le Conseil d'Etat dans son rapport, et pour le mandataire dans son avis de droit et les réponses qu'il a données à la commission lors de ses deux auditions, que les articles 160 D, alinéa 2, 160 D, alinéa 2, lettre b, 160D, alinéa 4, lettre b, et 160 D, alinéa 4, lettre c, ne sont pas conformes au droit supérieur.

C'est pourquoi la minorité de la commission vous demande, Mesdames et Messieurs les députés, de la suivre dans ses conclusions de modifier l'article 160 D, alinéa 2, comme proposé, et de refuser de soumettre les 3 autres articles commentés par ce rapport au vote populaire avant de déclarer l'initiative recevable et de la renvoyer à une commission chargée de l'analyser sur le fond.

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2

Débat

M. Luc Gilly (AdG), rapporteur de majorité. Comme je l'ai précisé dans mon rapport... (Brouhaha.) Je voudrais un peu de silence, s'il vous plaît !

Le président. Mesdames et Messieurs les députés, veuillez vous taire et laisser parler le rapporteur. Je vous en prie, Monsieur Blanc ! Monsieur le rapporteur, vous avez la parole.

M. Luc Gilly, rapporteur de majorité. Je souhaite que ce débat sur la recevabilité de l'initiative ne tourne pas en un débat pour ou contre une Suisse sans armée, pour ou contre l'armée, tant au niveau suisse qu'au niveau genevois.

Cette initiative propose l'inscription, dans la constitution genevoise, d'éléments qui n'y figurent pas. Par exemple, on n'en trouve aucun sur la paix. Les articles contraignants de l'initiative ne sont pas nombreux. D'ailleurs, toutes les initiatives en contiennent.

L'initiative, que vous aurez certainement lue, propose d'introduire certains articles dans notre constitution, afin que nos discours gagnent en cohérence et que la Genève de paix, la Genève internationale, la Genève d'accueil, soit réellement et concrètement tout cela dans le futur.

M. Michel Balestra (L), rapporteur de minorité. La commission législative a traité de la recevabilité de l'initiative «Genève, République de paix».

Il se trouve que certains de ses articles ne sont pas conformes au droit supérieur, bien que l'unité de la forme et le principe de l'unité de la matière soient respectés.

Des phrases telles que : «Dans la limite du droit fédéral, le canton développe une politique de sécurité fondée sur la mise en oeuvre de moyens pacifiques...» et «...par les autorités cantonales et communales, l'administration et les institutions publiques dans le cadre de leurs attributions» ne constituent pas, selon le rapport du Conseil d'Etat et l'avis de droit de Pierre-Louis Manfrini, des conditions suffisantes pour autoriser le vote de dispositions non conformes au droit supérieur.

N'ayant pas pour mission de se prononcer sur le fond, la commission législative s'est bornée à étudier cette analyse juridique.

Cette initiative est recevable, moyennant le remaniement de l'article 160 D, alinéa 2. Il faut laisser «institutions nationales» et supprimer «et internationales compétentes», cette dernière disposition s'opposant à l'article 8 de la constitution.

L'alinéa 2, lettre b), de l'article 160 D, doit être supprimé. Cet alinéa concerne la restitution, à des usages civils, des terrains affectés à l'armée dans le canton, en intervenant auprès de la Confédération. Ce mandat systématique est contraire au droit fédéral.

L'article 160 D, alinéa 4, lettre b), doit également être supprimé. Le maintien de l'ordre intérieur est un but primaire de la Confédération, auquel les cantons sont associés pour leur bénéfice mutuel. Le renoncement du canton à l'engagement des troupes de l'armée, pour assurer le service d'ordre, est contraire aux dispositions de la Constitution fédérale.

Enfin, il convient de supprimer aussi l'article 160 D, alinéa 4, lettre c), qui n'est pas applicable en l'état, selon le rapport du Conseil d'Etat.

Voilà les conclusions de la minorité de la commission législative.

M. Gérard Ramseyer, conseiller d'Etat. Je confirme que le rapport du Conseil d'Etat à la commission corrobore les dires de M. Balestra.

M. Christian Grobet (AdG). Je trouve assez déplaisante la façon dont le Conseil d'Etat traite cette initiative.

Le Conseil d'Etat a fait appel à son mandataire attitré, Me Manfrini qui, dans cette fonction, a succédé au professeur Knapp. Entre parenthèses, il serait intéressant de connaître le nombre de mandats confiés par l'Etat à Me Manfrini. Dès lors qu'un juriste bénéficie quasiment d'une rente de situation, il n'est pas étonnant qu'il aille dans le sens de son mandant. (M. Claude Blanc éclate de rire.) Le droit n'étant pas une science exacte, les avocats et les juristes ont des points de vue différents, Monsieur Blanc ! En l'occurrence, une autre méthode de travail doit être retenue, à l'exemple de celle qui avait été adoptée, il y a un certain temps, par le Conseil d'Etat : l'analyse des textes était confiée à deux experts de tendances différentes. C'est l'unique garantie du sérieux d'un tel travail, les experts devant réciproquement justifier leur choix.

Me Manfrini est l'expert patenté du Conseil d'Etat depuis six ou huit ans. Quand la majorité de celui-ci a sollicité son avis sur l'initiative lancée par les milieux des locataires permettant l'expropriation du droit d'usage des logements inoccupés, j'avais alors suggéré la collaboration d'un deuxième expert en la personne du professeur Berenstein, ancien juge fédéral. Le Conseil d'Etat avait accepté ma proposition. A une nuance près, les deux experts sont tombés d'accord et ont admis la constitutionnalité de cette initiative.

Deux autres excellents juristes, Me Cramer et, sauf erreur, M. Devaud, ont été auditionnés par la commission. Ils ont démantelé l'argumentation de Me Manfrini sur la prétendue inconstitutionnalité de quatre points de l'initiative, et leur démonstration m'a parfaitement convaincu. C'est l'exemple même que pour savoir la vérité sur une initiative, l'on ne peut se satisfaire d'un juriste, engagé politiquement de votre côté, et qui travaille régulièrement pour le Conseil d'Etat. Ce n'est pas sérieux et, d'emblée, j'entendais en faire la remarque.

Il est évident que nous démontrerons toujours l'inadéquation des arguments que vous tenterez - pour des raisons politiques et non juridiques - de faire valoir contre les initiatives, afin de les vider de leur substance.

M. Luc Gilly (AdG), rapporteur de majorité. S'agissant du niveau des institutions nationales et internationales, Me Manfrini a substitué les termes en parlant «d'organisations internationales» dans son avis de droit.

En matière de paix, Genève entreprend déjà des démarches et intervient tant au niveau national qu'international. L'initiative 109 lui demande d'en faire plus, mais pas d'intervenir, inopportunément, dans les politiques des pays voisins. Le problème n'intéresse que la Confédération.

Genève peut faire mieux et doit faire plus. C'est pour cette raison et en toute connaissance du rigorisme constitutionnel que nous avons introduit les termes suivants : «institutions nationales et internationales». Cela n'a rien à voir, Monsieur Balestra, avec «organisations internationales».

Ce n'est pas la première fois que Me Manfrini substitue des termes. Son rapport est plus une intention politique de dénigrement qu'une juste analyse juridique de l'initiative.

M. Michel Balestra (L), rapporteur de minorité. Les considérations de la commission législative se devant d'être uniquement juridiques, et non politiques, ce débat dérive et devient pénible. Le fond de l'initiative devra être étudié par une commission ad hoc devant laquelle vous pourrez argumenter.

Le rapport du Conseil d'Etat et l'avis de droit de Me Manfrini sont convaincants sur le plan du droit. Néanmoins, la majorité de la commission nous a dit qu'elle avait des doutes et qu'elle avait un autre avis de droit.

L'avis de droit opposé, que nous avons reçu, s'intitulait «Considérations juridiques», ce qui, à mon sens, n'augure guère d'un avis de droit sérieusement formulé.

La commission, qui n'avait toujours pas d'a priori, a convoqué Me Manfrini pour l'entendre au sujet des oppositions formulées par la majorité de la commission contre son avis de droit. Puis, nous avons entendu Me Cramer. Par acquis de conscience, nous avons même demandé à ces deux excellents juristes de mener ensemble, à la commission, ce que j'appellerai un «débat juridique d'éclairage à l'intention des députés de milice».

Suite à ce «débat d'éclairage», je déclare, au plus près de ma conscience et d'entière bonne foi, que Me Manfrini a parfaitement fondé ses considérations.

Aussi je demande à ce Grand Conseil de considérer que l'avis de Me Manfrini est conforme à la réalité du droit et je demande à sa majorité d'adopter la position de la minorité de la commission.

M. Chaïm Nissim (Ve), rapporteur. Je regrette que les rapporteurs aient, tous deux, omis d'insérer le texte de l'initiative dans le rapport, ce qui nous a obligés, M. Fontanet et moi, à nous le procurer. C'est un détail, certes, mais il a son importance..

A l'avenir, les textes des initiatives devront figurer dans les rapports.

M. Michel Balestra, rapporteur de minorité. Je suis entièrement d'accord !

M. Chaïm Nissim. Vous auriez pu y penser ! Il m'a suffi de participer à une seule séance de commission pour me rendre compte que le débat était - contrairement à ce que dit M. Balestra - totalement politique et pas du tout juridique. Au cours de cette séance et en lisant les procès-verbaux, j'ai constaté que des mots comme «intervient» et «institutions internationales» à l'alinéa 2, «encourage» à l'alinéa 1, «met en oeuvre» à l'alinéa 4, ont été contestés. Ces mots, qui peuvent être interprétés différemment, doivent l'être, in dubio pro populo, en faveur des dix à douze mille signataires. De deux interprétations possibles, notre constitution exige, Monsieur Balestra, d'utiliser la plus favorable aux signataires d'une initiative.

Monsieur Balestra, vous pratiquez un juridisme étroit, vous faites uniquement de la politique et profitez de votre appartenance à la majorité pour empêcher le peuple de s'exprimer sur un sujet qui vous effraie.

M. Bénédict Fontanet (PDC). Si M. Nissim le veut bien, nous travaillerons sur le même texte, même si nous ne sommes pas d'accord.

Les propos de M. Gilly à l'égard de M. Manfrini sont tout simplement inadmissibles. J'ai eu le plaisir de travailler avec M. Manfrini en tant qu'assistant à l'université. M. Manfrini enseigne le droit administratif et le droit public. C'est un homme, d'une très grande compétence reconnue, qui n'a pas d'attaches partisanes telles qu'il serait susceptible d'établir un rapport de complaisance. (L'orateur est interrompu par M. Christian Grobet.) Ce n'est pas parce qu'on a des opinions politiques qu'on ne rédige pas honnêtement un avis de droit, Monsieur Grobet ! M. Manfrini n'a jamais fait de politique active, et je trouve insupportable que l'on dise de ce jurisconsulte, émérite et honnête, qu'il aurait fait un acte politique en rendant son avis de droit.

M. Cramer est un homme que j'aime beaucoup. J'ai collaboré avec lui, en tant qu'avocat, dans plusieurs dossiers. Toutefois, je ne pense pas qu'en termes de compétences techniques et scientifiques il puisse être mis sur le même plan que M. Manfrini. M. Cramer est un très bon avocat, mais, que je sache, il n'enseigne pas le droit administratif et le droit public à l'université. En revanche, M. Manfrini est expert en la matière. Il a travaillé dix ans à la faculté de droit, et il est injuste de lui faire un procès d'intention.

Comme l'a relevé M. Balestra, on a voulu faire un débat politique de ce débat de pure technique juridique. Evidemment, certains acceptent mal que le mandataire du Conseil d'Etat ait déclaré anticonstitutionnelles certaines dispositions de l'initiative.

Nous n'allons pas débattre longuement de la constitutionnalité ou de la non-constitutionnalité des dispositions. Un avis de droit dit blanc - excuse-moi, Claude ! - et l'autre dit noir. Un adage dit «deux juristes, trois opinions». Bref, nous ne mettrons pas tout le monde d'accord et tout cela finira devant le Tribunal fédéral.

Si une majorité du Grand Conseil suit le rapport de minorité que je soutiens également, les initiants ne se feront pas faute d'en saisir notre haute juridiction. Si le contraire se produit, nous saisirons le Tribunal fédéral d'un recours. Dans les deux cas, ce dernier tranchera, et on ne pourra pas l'accuser de faire de la politique, quoique, récemment, certains aient prétendu qu'il agissait de la sorte.

Sans vouloir substituer ma modeste appréciation de modeste juriste à la sienne, j'estime que M. Manfrini a rendu un rapport parfaitement fondé. Pour des motifs politiques manifestes, cette initiative empiète sur des compétences et des tâches indubitablement du ressort de la Confédération. Dans le cadre de la commission législative et des débats qui viennent d'avoir lieu, on confond, et pour cause, la forme et le fond.

En suivant les propositions du rapport de minorité, nous veillerons à l'acceptation des amendements proposés avant que l'initiative ne soit soumise au vote populaire. Agir autrement ne serait pas conforme et à l'esprit de nos institutions et à la répartition des compétences voulue par la Constitution fédérale.

Je vous remercie de bien vouloir adopter les conclusions du rapport de minorité, quand bien même je n'entretiens guère d'illusions quant à ma capacité de convaincre, ce soir, quiconque serait convaincu du contraire.

M. Laurent Moutinot (S). Nous nous serions tous ralliés à la position de M. Manfrini si son débat avec M. Cramer, en commission, nous avait convaincus. Or de nombreux arguments contradictoires en sont ressortis.

Nous ne pouvons pas supprimer ces quatre points de l'initiative, M. Cramer ayant démontré qu'ils pouvaient être interprétés conformément à la constitution.

S'agissant du premier point, à savoir l'intervention auprès des institutions internationales, il est bon de rappeler que les autorités genevoises interviennent déjà, notamment dans le sens d'une politique de paix, auprès d'institutions non gouvernementales, comme la Croix-Rouge, le BIT, voire auprès d'institutions gouvernementales. La pratique étant inscrite dans les faits, il n'y a aucun problème à l'introduire dans la constitution.

S'agissant du deuxième point, à savoir la restitution des terrains militaires à des usages civils, l'initiative ne demande, rien de plus et rien de moins, qu'elle se fasse quand c'est possible, c'est-à-dire en négociant avec la Confédération, lorsque celle-ci décide de réduire le nombre de places d'armes. L'inscription de cet article dans la constitution genevoise donnerait mandat à nos autorités de demander que les places d'armes situées dans notre canton soient les premières supprimées. Il ne s'agit évidemment pas de décider nous-mêmes de leur affectation, mais d'avoir une ligne politique claire quant à leur destination.

J'avoue avoir un doute quant au troisième point, à savoir la renonciation de l'intervention de l'armée. En effet, on doit se demander si un gouvernement peut renoncer, par avance, à user d'un moyen ultime. Il ressort de la Constitution fédérale que le Conseil fédéral lui-même, en cas de troubles graves, peut intervenir, quel que soit l'avis des cantons. Ce doute étant émis, j'admets que l'on puisse voter l'alinéa 4, lettre b), de l'article 160 D.

Il est hors de question d'éliminer le quatrième point sur la base du seul argument de MM. Manfrini et Balestra. En effet, ils font état d'une simple complication qui ne saurait ressortir d'un argument juridique. Complication ne signifiant pas infaisabilité, nous sommes dans le domaine du possible. Dès lors, ce quatrième point peut être soumis au peuple.

La position de M. Koechlin, en commission, avait au moins le mérite de la clarté. En effet, M. Koechlin proposait de rejeter l'initiative en tant que telle, parce qu'il n'acceptait pas ses considérations pacifistes, excessives selon lui.

Aujourd'hui, vous tentez de supprimer certains passages dans le but de manifester votre désaccord sur le fond. C'est regrettable. Il faut que le peuple se prononce sur cette initiative et sur le contre-projet de la commission ad hoc.

M. Luc Gilly (AdG), rapporteur de majorité. Je suis extrêmement surpris, Monsieur Fontanet, du peu de cas que vous faites d'une initiative populaire cantonale et des milliers de signatures qui en soutiennent et l'idée et le fond.

Pour vous, tout est simple ! Au lieu de discuter de façon objective, vous préférez nous envoyer devant le Tribunal fédéral, perdre une année et demie et beaucoup d'argent !

Vous avez la mémoire bien courte ! Il y a vingt minutes à peine, vous avez voté une résolution en trente secondes, peut-être la tête dans le sac ! J'ignore si vous l'avez lue. Elle est importante et donne à espérer. Je ne sais si vous l'avez encore à l'esprit ou si elle est déjà passée à la poubelle.

Cette résolution demande que le Grand Conseil et le Conseil d'Etat donnent un signe clair et positif à une action internationale pour apporter un message de paix en Turquie et au Kurdistan.

Je ne referai pas l'historique de cette résolution, un voyage de Bruxelles au Kurdistan ne suffisant évidemment pas pour instaurer la paix dans ces régions. C'est bien plus compliqué !

Dès lors, je ne comprends pas votre insistance à vouloir supprimer le premier point de l'initiative, alors que la résolution votée corrobore l'article 160 D, alinéa 2, à savoir nous donner les moyens de soutenir réellement les actions de paix.

J'en viens aux terrains militaires. M. Moutinot l'a dit clairement : Genève est liée à la Confédération par des conventions en la matière. Néanmoins, toute convention peut être modifiée, abrogée ou rediscutée. Les conventions actuelles sont valables jusqu'en 2025, si je ne fais erreur. Par ailleurs, M. Vodoz nous a annoncé qu'une nouvelle affectation de la caserne des Vernets était prévue, eu égard à «Armée 95» et à la démobilisation de deux cent mille soldats sur six cent mille. Si l'initiative était acceptée, il serait de notre devoir de transformer ces terrains désaffectés.

Nous n'exigeons pas, et c'est là que MM. Manfrini, Balestra et Fontanet ont tort. Nous n'imposons pas l'affectation, à des usages civils, des terrains militaires sis à Genève. Nous demandons simplement «la restitution à des usages civils des terrains affectés à l'armée dans le canton en intervenant auprès de la Confédération».

Il n'est donc pas exigé de Genève qu'elle réclame à Berne la reprise des terrains militaires pour en faire autre chose. Ne faussez pas l'interprétation du texte !

Le renoncement à l'intervention armée. Voilà peu, nous débattions des ordonnances fédérales proposées à tous les cantons suisses. Je me souviens que M. Vodoz a été très clair quant à l'intervention de l'armée, à Genève, en cas de troubles civils. Il n'y tenait pas, connaissant les compétences limitées de la troupe dans ce genre d'opération. M. Vodoz pourra peut-être nous en dire plus, car je me souviens qu'il ne voulait pas que la troupe intervienne contre les civils. Nous avions évoqué 1932. Nous n'étions pas les seuls; cette date a été évoquée en haut lieu, à Berne. Nous souhaitons tous que 1932 ne se répète pas.

Renoncer à l'intervention armée est possible dans ces conditions. Pourtant, M. Manfrini prétend, à tort, qu'on interdirait à Genève d'informer Berne de difficultés dues à des manifestations civiles. Ce n'est pas vrai. Nous demandons simplement que Genève ne requière pas la troupe pour intervenir contre des civils. C'est simple, c'est clair !

J'en viens au dernier point contesté traitant de la protection des conférences internationales. Pas plus tard qu'aujourd'hui, j'ai lu qu'un corps spécial de police sera mis sur pied à cet effet. Il sera également chargé de missions quotidiennes sur le territoire genevois. M. Ramseyer pourra peut-être nous donner quelques explications complémentaires.

Dans ce cas, il est donc tout à fait possible de se passer de la troupe. Ce point est défendable. Tout ce que M. Manfrini entend nous faire dire n'existe pas. Tout excellent professeur qu'il est, son avis de droit est un dérapage juridique inacceptable.

M. Pierre Vanek (AdG). Je ne sais où se cache M. Fontanet, mais il a raison de le faire ! Ce n'est pas sérieux de nous imposer un débat dans des conditions pareilles et de nous dire qu'il trouvera son issue devant le Tribunal fédéral.

Une voix. Ne nous énervons pas !

M. Pierre Vanek. Vous avez, en effet, réussi à m'exaspérer en ouvrant le feu sur cette histoire ! (Brouhaha.)

Le président. Un peu de silence, s'il vous plaît ! Monsieur Vanek, parlez calmement !

M. Pierre Vanek. Cela m'est difficile ! Demandez le silence à vos congénères, et je baisserai un peu le ton ! Hier, nous avons eu droit à une brillante démonstration d'un éminent juriste du parti libéral, Me Halpérin, concernant l'affaire Joye. Ce juriste admettait l'existence d'une loi sur les incompatibilités pour les conseillers d'Etat, mais le vote des citoyens l'emportant, selon lui, on serait malvenu de sanctionner un conseiller d'Etat ayant violé la loi s'il était bien élu.

Aujourd'hui, on nous joue une musique différente : on veut imposer des arguments juridiques pour empêcher le peuple de se prononcer sur cette initiative, signée par des milliers et des milliers de citoyens. Je vois là une géométrie variable dans la façon dont le parti libéral conçoit le droit, la démocratie et leurs rapports respectifs.

Il m'arrive, bien que n'appartenant pas à la profession, d'avoir raison contre des juristes éminents. Je me rappelle les arguments avancés, à l'époque, par M. Jean-Philippe Maitre, quand nous demandions au Conseil d'Etat de recourir contre Creys-Malville. M. Maitre soutenait que cela était impossible, les relations internationales étant du strict domaine de la Confédération. Cela s'est passé lors de la réception d'une délégation de Contratom, à la salle Nicolas-Bogueret. Je me souviens que M. Maitre - Me Maitre, précisément - s'évertuait à m'expliquer que le droit fédéral interdisait ce type de recours. En fait, ce recours était possible, et il a été déposé. Avec la Ville de Genève, nous l'avons gagné, à plusieurs reprises, contre l'Etat français. Dans ce cas également, des juristes ont interprété, pour des raisons politiques, le droit fédéral dans le sens qui les arrangeait. Ils se sont trompés et le modeste citoyen que j'étais, et que je suis encore, a eu raison contre cet éminent juriste, membre du Conseil d'Etat. Ce soir, je pense aussi avoir raison.

Je me réfère, comme mon camarade Gilly, à la résolution que nous avons votée avant d'entamer ce débat quelque peu forcé. Si vous suivez Me Manfrini, vous auriez dû ne pas entrer en matière sur cette résolution. Je le dis spécialement à l'adresse de MM. Beer et Unger qui ont déclaré l'avis de droit de Me Manfrini parfaitement fondé. En effet, cette résolution «violerait» l'ordre constitutionnel, dans la mesure où elle permettra au canton d'entreprendre des démarches auprès d'institutions nationales étrangères ou d'organisations internationales.

Si vous acceptez, comme pain bénit, l'avis de droit de Me Manfrini, c'est que vous avez changé de position en vingt minutes, soit une géométrie variable des plus surprenantes !

Sur le fond, il est clair que ce parlement doit conserver, à l'instar de l'Etat et de nos citoyens, la possibilité d'entreprendre des démarches en matière de politique de paix, y compris dans le domaine international; politique soutenue, en principe, par l'ensemble de ce parlement.

Nous avons d'ailleurs voté plusieurs résolutions dans ce sens. L'une, contre les derniers essais atomiques français, ressortait manifestement de la politique internationale et de la politique de paix. Elle a été votée à une très large majorité. Elle s'adressait au gouvernement français.

Dès lors, l'évidence s'impose : notre parlement doit conserver, au nom des citoyens qu'il représente, la prérogative de ce genre d'actions.

Dans son avis de droit, Me Manfrini se réfère à un auteur, un arrêté ou je ne sais quoi, pour préciser : «Sont en particulier inadmissibles toutes les mesures qui peuvent influencer de façon gênante les relations de la Suisse avec les Etats étrangers...», alors que nous devons, précisément, conserver la prérogative de gêner tel ou tel Etat étranger qui violerait gravement les droits fondamentaux de l'homme. La citation continue ainsi : «...telles les résolutions de parlements cantonaux à propos d'événements survenus à l'étranger».

Si vous suivez l'avis de Me Manfrini en le considérant comme pain bénit, cela signifie que vous avez une position particulièrement restrictive quant à l'interprétation des droits démocratiques de nos citoyens à se prononcer sur cette initiative populaire. Vous vous engagez dans une voie qui limite scandaleusement les prérogatives de notre parlement et, bien sûr, des citoyens qui l'ont élu et qui le rééliront, je l'espère, avec une autre majorité.

M. Claude Blanc (PDC). D'emblée, je relève la légèreté inqualifiable du Bureau du Grand Conseil qui n'a pas prévu que nous avions jusqu'au 23 juillet pour traiter de cette initiative. En conséquence, il ne l'a donc pas inscrite à l'ordre du jour, et seul le hasard a voulu, ce soir, que quelques députés s'aperçoivent que nous étions roulés dans la farine par ceux qui n'avaient pas intérêt que l'on débatte, maintenant, de ce dossier.

A mon avis, la minorité de la commission est bien obligeante de se livrer à un «charcutage» en voulant encore séparer le bon du mauvais !

J'espère que vous aurez lu les considérants du Tribunal fédéral sur votre fameuse initiative 105. Le Tribunal fédéral vous accuse carrément d'avoir commis un abus du droit d'initiative. Vous aviez déposé une initiative fourre-tout, dont une partie était applicable et l'autre pas. Tout était mélangé. Vous avez crié comme des orfraies, dans ce Grand Conseil, quand nous avons fait valoir l'irrecevabilité de votre initiative. Vous nous avez menacés des foudres du Tribunal fédéral, comme ce soir d'ailleurs, et c'est vous qui les avez prises en pleine figure ! Non seulement vous avez été déboutés, mais vous avez été accusés - ce n'était pas la première fois - de tout mélanger pour tenter d'induire les signataires en erreur. A la page 39 de ses considérants, le Tribunal fédéral énonce que vous êtes coupables d'un abus du droit d'initiative.

Par conséquent, retournons au Tribunal fédéral !

M. Michel Balestra (L), rapporteur de minorité. Il ne faut pas dramatiser le problème. Nous avons des domaines réservés de compétences. La commission législative doit dire le droit au plus près de sa conscience. Le Conseil d'Etat fait une proposition de rapport dans laquelle il dit le droit. Nous avons sollicité un avis de droit et confronté deux avocats. Conclusion : nous sommes convaincus de l'inacceptabilité de l'article 160 D. En l'occurrence, il s'agit de la constitution genevoise et non d'une résolution qui vous autorise, si vous voulez, à hurler votre dégoût du nucléaire français, autant que vous le voulez, au parking de Saint-Antoine.

Vous proposez de modifier la constitution genevoise et de donner au canton le mandat impératif de s'occuper de ce qui est prioritairement réservé à la Confédération. C'est absolument illégal !

Les domaines de la coopération et du développement sont les seuls où les cantons peuvent intervenir. Toutes les jurisprudences du Tribunal fédéral le stipulent très clairement. Ici, il ne s'agit ni de coopération ni de développement, mais, très exactement, de politique étrangère visant au désarmement global.

Manifestement, cet article 160 D n'est pas conforme au droit supérieur.

L'alinéa 2 du même article, lettre b), parlant de la restitution, à des usages civils, des terrains militaires, prête à confusion. S'il est exact que l'on peut s'opposer, pour des raisons d'aménagement, à l'implantation de terrains militaires, cet article de l'initiative vise à une démilitarisation générale et donne un mandat impératif au Conseil d'Etat de s'opposer, dans ce but, à toute place d'armes. Cela ressort de l'exposé des motifs et fait partie de l'avis de droit de Me Manfrini. Lisez attentivement ! Bien que député-déménageur, j'ai essayé... (L'orateur est interrompu.)

Vous n'avez pas le droit de tromper les électeurs ! L'exposé des motifs parle clairement d'une démilitarisation de notre canton. Et cet alinéa 2 tend, manifestement, à une démilitarisation générale. Il n'est donc pas conforme au droit supérieur.

Quant à votre article sur le renoncement à des troupes armées, même dans des conditions ultimes, il nous ferait encourir des risques inconsidérés ! Si l'Etat doit assurer quelque chose, c'est bien l'ordre intérieur ! C'est un de ses buts primaires. Et la raison même de la confédération d'Etats où nous vivons, c'est cette volonté commune de défense.

De jouer avec une telle disposition, en prétendant qu'elle n'est pas acceptable, n'est pas raisonnable. Cet article, lui aussi, n'est donc pas conforme au droit supérieur. Le député Moutinot a eu l'élégance d'exprimer ses doutes à ce sujet, et cela m'a fait plaisir.

Pour ce qui est de l'alinéa 4, lettre c), de l'article 160 D, il serait compatible avec le droit supérieur, pour autant qu'il soit réalisable. Or le Conseil d'Etat, dans son rapport, nous dit textuellement : «C'est une vue de l'esprit que de croire que le canton serait à même, à ses frais, de créer, d'instruire, d'entretenir en permanence et d'équiper un corps civil de plusieurs milliers d'hommes et de femmes prêts, en tout temps, à être mis sur pied pour garantir la protection des conférences internationales, en lieu et place du service d'appui de l'armée.» Cette déclaration claire me fait dire que cette disposition n'est pas applicable. Par conséquent, il faut également retirer cet article 160 D.

Si vous le jugez utile, vous ferez appel au Tribunal fédéral, mais, au plus près de ma conscience, je vous dis qu'en votant les conclusions du rapport de minorité, vous serez en accord avec le droit actuel de la Confédération et de notre Etat.

M. Chaïm Nissim (Ve). Voici douze ou treize ans, M. Borner engageait M. Manfrini pour plaider l'argument suivant : le nucléaire, à teneur d'une loi de 1959, est de compétence exclusivement fédérale; il n'est donc pas possible d'introduire, dans la constitution cantonale, un article contre le nucléaire.

Je me souviens de ce débat qui, déjà, opposait Me Cramer, à l'époque encore stagiaire chez Me Bernheim, à Me Manfrini, déjà professeur de droit. Me Cramer avait gagné, ayant réussi à démontrer que bien que le nucléaire soit du ressort de la Confédération, le canton avait ses propres compétences. Aujourd'hui, cet article est reconnu par l'Assemblée fédérale et le Tribunal fédéral. Certes, nous avions eu l'obligation de supprimer un alinéa 7.

Il se peut, Monsieur Balestra, que Me Cramer, bien que petit avocat, ait raison, une fois encore, contre Me Manfrini, tout professeur qu'il soit.

M. Bénédict Fontanet (PDC). Je ne voudrais pas que l'on me fasse dire, sur les bancs d'en face, ce que je n'ai pas dit.

Monsieur Gilly, je respecte les gens qui ont signé votre initiative, mais pas forcément ceux qui font signer des initiatives sans s'assurer, au préalable, de leur conformité avec l'ordre juridique en vigueur.

On peut apprécier ou non notre ordre juridique, on peut aimer ou non l'armée, ce n'est pas le débat de ce soir. Toujours est-il qu'en matière d'initiative on constate, aujourd'hui, un certain nombre d'abus, des textes mal ficelés, provenant parfois de nos bancs, et je trouve insupportable, au plan des droits politiques, de soumettre au peuple des dispositions non conformes à notre ordre juridique.

Il en va du simple respect de nos institutions...

M. Christian Grobet. L'Alhambra !

M. Bénédict Fontanet. J'ai toujours dit, en commission, que cette initiative était particulièrement mal ficelée. Vous étiez conseiller d'Etat, à l'époque, et j'ai toujours estimé mauvaises les initiatives ayant pour objet la réalisation d'ouvrages individuels et concrets. Nous nous en étions expliqués, mais je continuerai volontiers à en débattre avec vous, dans un autre cadre.

L'initiative 109 est si mal ficelée qu'elle nous pose la question de son irrecevabilité intégrale, bien que M. Manfrini estime que nous pourrions la sauver en partie, sous réserve de la modifier.

Nous ne sommes pas en contradiction avec notre vote sur le Kurdistan. Monsieur Gilly, vous vous souviendrez que nous avions, à l'époque, accepté une résolution similaire, adressée, sauf erreur de ma part, au Conseil fédéral. Les formes étaient ainsi respectées.

Plutôt que de soumettre au peuple une initiative contestable sur la forme, tâchons de l'améliorer, puisque ses auteurs n'ont pas jugé utile de le faire, et votons le rapport de minorité ! Pour le surplus, le Tribunal fédéral tranchera s'il devait être saisi d'un recours.

M. Luc Gilly (AdG), rapporteur de majorité. Monsieur Fontanet, il est vrai que je ne suis pas juriste, mais nous avons longuement discuté de cette initiative et de sa teneur possible. Au moment où les choses ont, plus ou moins, été clarifiées, nous avons travaillé avec des juristes. Par conséquent, les mots n'ont pas été alignés au hasard. Le texte respecte intrinsèquement l'idée de notre initiative. Il est donc regrettable que vous la traitiez de fourre-tout, alors qu'elle est logique dans son développement et qu'elle représente beaucoup pour la majorité des Genevois qui ont voté, à maintes reprises, comme rappelé dans mon rapport, non seulement des initiatives antimilitaristes mais aussi des initiatives pacifistes. C'est par respect pour cette majorité que nous voulons aller plus loin, sur le plan cantonal.

Je regrette, évidemment, que les exportations d'armes n'aient pas été interdites, mais je rappelle le vote, par la majorité de ce parlement, d'une résolution contre les mines antipersonnel.

Les questions que j'ai posées, au cours de ma première intervention, sont restées sans réponse. M. Vodoz ne m'a pas répondu au sujet des conventions passées, entre la Confédération et le canton de Genève, sur les terrains militaires et leur affectation, de même que sur la position qu'il avait lui-même adoptée et défendue par rapport au recours à l'intervention de la troupe à Genève. Je n'ai pas entendu M. Ramseyer sur ce qui se fait, actuellement, au niveau de la police, en matière de protection des organisations internationales siégeant sur notre territoire.

La situation serait vraiment très grave et jamais vue s'il fallait des milliers de militaires pour protéger les conférences internationales, à moins de faire fi de l'efficacité des services de M. Ramseyer...

J'attends les réponses des conseillers d'Etat encore présents.

M. Gérard Ramseyer, conseiller d'Etat. Voici quatre éléments de réponse.

1. Le Conseil d'Etat a d'emblée émis l'avis que cette initiative, pour certaines de ses parties, n'était pas recevable, d'où l'avis de droit demandé, en confirmation, à Me Manfrini.

2. Je voudrais rappeler que l'avis de droit n'est pas de Me Cramer, celui-ci ayant tenu à rappeler qu'il le défendait, mais qu'il n'en était pas l'auteur. C'est la première fois que j'entendais un avocat dire défendre un avis juridique non écrit par lui. M. Grobet a parlé de M. Devaud. Est-ce l'auteur ? Peu importe, mais la chose est étrange !

3. Les travaux de commission se sont terminés le 11 avril et ce n'est que le 11 juin que M. le député Gilly a remis son rapport.

4. Monsieur Gilly, vous avez demandé ce qu'il en était des gardes de sécurité diplomatique. Je porte à votre connaissance qu'ils sont au nombre de vingt-cinq et que huit cent quatre-vingts soldats, entre autres du bataillon d'aéroport I, ont gardé le palais de l'ONU et l'aéroport lors des rencontres telles celles de MM. Clinton et Assad. Cela vous donne une idée de la différence ! Si vous pensez que Genève doit entretenir un corps de huit cents personnes en prévision d'une conférence annuelle, au niveau mondial, libre à vous ! Je répète les chiffres : vingt à vingt-cinq contre environ huit cent quatre-vingts personnes lors de telles rencontres, pour illustrer cette impossibilité.

Le président. Je prie les orateurs de bien vouloir s'exprimer sur la recevabilité de l'initiative, et pas sur le fond.

M. Pierre Vanek (AdG). Je pense que cette initiative est recevable.

Je me suis exprimé sur l'article 160 D, alinéa 2, concernant les interventions auprès des institutions nationales ou internationales. Cet article est, à mon sens, parfaitement recevable. D'ailleurs, les faits me donnent raison, puisque nous pratiquons régulièrement des interventions de ce type.

J'interviens maintenant sur un autre point. Si j'ai bien compris, on nous dit que la lettre b) de l'article 160 D sur la restitution à des usages civils des terrains affectés à l'armée, dans le canton, serait anticonstitutionnelle ou contraire au droit fédéral. La phrase «le canton encourage la restitution à des usages civils des terrains affectés, etc.» ne signifie nullement l'abrogation d'un engagement, d'un contrat ou d'une disposition nous liant à la Confédération. Cet article constitutionnel ne décrète pas une quelconque restitution. Nous disons : «le canton encourage...». C'est une orientation politique qui souligne l'évidence que les citoyens sont libres - encore heureux ! - de juger des options qu'ils veulent ou ne veulent pas encourager.

Prenons un exemple : le canton encourage diverses actions dans un secteur, à propos duquel je voulais intervenir ce matin. Toute une série de procédures de consultation a eu lieu sur le démantèlement des PTT et la privatisation des Telecom. Certes, je m'écarte de la recevabilité pure, mais le débat sera suffisamment long. Le canton a pris toutes sortes de...

Le président. Monsieur Vanek, nous débattons de la recevabilité de l'initiative.

M. Pierre Vanek. Monsieur le président, je traite présentement du droit fédéral constitutionnel ! Selon le rapport sur la procédure de consultation sur cet objet, il est dit que le canton de Genève atteste de la justesse des principes fondamentaux et de l'orientation de l'avant-projet en la matière. Or vous n'ignorez pas que ces dispositions, récemment votées par les Chambres fédérales, violent l'alinéa 2 de l'article 36 de la Constitution fédérale stipulant que les recettes des PTT doivent aller à la caisse fédérale.

Le président. Venez-en au sujet, Monsieur Vanek !

M. Pierre Vanek. Plusieurs avis de droit de M. Knapp et autres concordent. Or, sans nous consulter, le Conseil d'Etat s'est permis de donner, au nom du canton, un avis au Conseil fédéral en violation d'un certain nombre d'avis de droit reconnus et de l'alinéa 2 de l'article 36 de la Constitution fédérale.

Et, ici, nous n'aurions pas le droit simplement «d'encourager une restitution à des usages civils des terrains affectés à l'armée» ? Je ne vois pas par quel processus tiré par les cheveux...

Une voix. Un raisonnement !

M. Pierre Vanek. Je ne vois pas par quel raisonnement tiré par les cheveux... (L'orateur est interrompu.) Merci, je reprends pour la troisième fois ! Je ne vois pas par quel processus de raisonnement tordu, pour ne pas employer une image capillaire, on pourrait dénier à nos citoyens le droit d'avoir un avis sur ce que doit ou ne doit pas encourager le canton en matière de politique fédérale, alors qu'à longueur d'année le Conseil d'Etat, au nom du canton, rend des avis sur des consultations fédérales, sans consulter le parlement, sans consulter les citoyens, pour encourager ceci et cela, même dans des cas douteux sur le plan du droit, comme la question des Telecom.

Monsieur le président, je vous prie de me donner acte que je suis bien intervenu sur la recevabilité et non sur le fond.

M. Michel Balestra (L), rapporteur de minorité. Il nous faudra voter rapidement. Le débat dégénère : nous n'en sommes plus à la recevabilité de l'initiative, mais à débattre du fond.

L'exposé des motifs de votre initiative, en faisant un parallèle avec le sortir du nucléaire, disait clairement que, face au danger militaire, l'objectif était le même et qu'il fallait démilitariser le canton.

Vous savez que le canton a un devoir de fidélité confédérale, essentiellement en matière de volonté de défense. Il est donc parfaitement établi que cet article n'est pas conforme au droit supérieur.

Maintenant, soyez corrects et cessez vos manoeuvres dilatoires ! Si vous avez quelque chose de concret à apporter au débat, nous vous écouterons avec plaisir. Pour le reste, nous voterons, quitte à ce que vous recouriez auprès du Tribunal fédéral. Une commission ad hoc réfléchira sur le fond de l'initiative, et ce sera très bien ainsi.

Le président. Je vous donne la parole pour la troisième et dernière fois, Monsieur Vanek !

Des voix. Qu'il est ennuyeux !

M. Pierre Vanek (AdG). Vous, vous n'êtes pas ennuyeux, vous êtes franchement emmerdants !

Le président. Monsieur Vanek, veuillez châtier votre langage !

M. Pierre Vanek. Veuillez excuser, Monsieur le président, ce dérapage verbal causé par une interruption incongrue. Monsieur Lombard, vous êtes prié de m'écouter en respectant le silence religieux prévu par le règlement ! (Rires.)

Le président. Parlez, Monsieur Vanek ! Je vous recommande d'avoir des propos aussi pacifistes que l'esprit dans lequel vous prétendez les tenir.

M. Pierre Vanek. Je ne sais pas si je revendique vraiment le qualificatif de «pacifiste». Mais, il s'agirait là d'un débat sur le fond et non sur la recevabilité. Je ne réagirai donc pas à cette invite.

M. Balestra vient de dire que notre exposé des motifs comportait des analogies avec l'initiative «L'énergie, notre affaire», que l'intention des auteurs et des signataires de l'initiative 109 était de «démilitariser» le canton, comme nous avions l'intention, avouée celle-là, de le «dénucléariser».

Monsieur Balestra, ce disant, vous vous êtes écarté de la question de la recevabilité de l'initiative. Vous deviez discuter de son texte et non des «intentions» de ses auteurs. On doit répondre à la question que j'ai posée, de bonne foi, sur l'encouragement - un mot qui n'a rien de contraignant - à une restitution à des usages civils de terrains affectés à l'armée, selon la lettre b) de l'alinéa 2 de l'article 160 D. En quoi cette disposition serait-elle contraire au droit fédéral supérieur et à notre ordre constitutionnel ? Vous prétendez, Monsieur Balestra, que cette disposition tend à la «démilitarisation» du canton. (L'orateur est interrompu par M. Michel Balestra, rapporteur de minorité.) Ce n'est pas moi qui le dis...

Le président. Je vous prie de ne pas entamer un dialogue, Monsieur Vanek. Vous vous adressez d'abord au président, puis à l'ensemble de l'assemblée.

M. Pierre Vanek. Je m'adresse au président pour lui demander d'éviter que M. Balestra n'intervienne en me coupant la parole, sinon on risque, effectivement, de déraper dans un dialogue. L'éminent rapporteur de minorité prête une intention «secrète» à cette disposition. Il est évident que les initiants, sur le fond, désirent la suppression de l'armée suisse. Ce n'est un secret pour personne ! A cet effet, ils avaient lancé une initiative qui était du ressort du droit fédéral. Elle a échoué en votation fédérale, mais a gagné une majorité d'adhésions à Genève. Mais ceci n'a rien à voir avec ce qui nous occupe aujourd'hui !

Les initiants ont élaboré l'initiative 109 et en ont arrondi les angles. Ils ont réfléchi à sa conformité au droit fédéral, en voulant «pousser le bouchon» aussi loin que possible, mais pas plus loin. N'étant pas initiant moi-même, je suis bien placé pour vous dire que vous ne pouvez arguer d'intentions «malhonnêtes» par rapport à la suppression de l'armée, par exemple. Vous devez simplement me dire en quoi le fait d'encourager la restitution à des usages civils de terrains affectés à l'armée serait une disposition à éliminer avant de soumettre l'initiative au vote populaire.

Cette question a trait à la recevabilité de l'initiative. Vos arguments ne sont pas juridiques, puisque vous n'ouvrez pas le débat sur le texte et le droit, mais sur les intentions générales des initiants. Par ailleurs, ces derniers ont le droit, demeurant dans un pays libre, d'avoir un avis sur l'armée autre que celui du parti libéral.

Le président. La parole n'est plus demandée. Nous votons sur la recevabilité de l'initiative. Je mets aux voix les propositions d'amendement du rapporteur de minorité. Veuillez préciser, Monsieur le rapporteur, si vous proposez de supprimer l'alinéa 2 de l'article 160 D dans son intégralité ou seulement la lettre b) dudit alinéa !

M. Michel Balestra (L), rapporteur de minorité. Il convient de supprimer les deux mots «et internationales» dans l'alinéa 2. Ainsi cet alinéa se termine par :

«2...Il intervient dans ce sens auprès des institutions nationales compétentes. En particulier, le canton encourage...»

M. Christian Grobet (AdG). Il est insoutenable de prétendre qu'il serait inconstitutionnel de prévoir dans notre législation cantonale le droit de notre canton à s'adresser à des autorités d'institutions internationales. L'expert a confondu les termes «institutions internationales» et les termes «institutions interétatiques», ce qui m'étonne de la part d'un professeur. Une institution internationale, au sens étymologique du terme, recouvre aussi bien une organisation interétatique, comme l'ONU, le BIT ou l'OMS, qu'une institution internationale non gouvernementale, comme nous en connaissons une centaine à Genève.

J'en veux pour preuve notre précision, dans le cadre de la loi sur les constructions, quant aux requêtes en autorisation de construire soumises à un régime particulier, et auxquelles s'applique le régime de l'immunité de juridiction. Ce sont les requêtes en autorisation de construire déposées soit par des Etats étrangers soit par des organisations interétatiques. Quand nous avons mis au point cet article de la loi sur les constructions, nous avons eu la prudence de prendre l'avis du Département fédéral des affaires étrangères qui nous a prévenus de la confusion pouvant être faite entre les organisations internationales, au sens large du terme, et les organisations interétatiques.

Or Me Manfrini fait cette confusion dans son avis de droit. Il croit que les organisations internationales sont des organisations interétatiques, et que le monopole des interventions appartiendrait à la Confédération. C'est faux !

En revanche, il est sûr et certain que le canton a le droit de s'adresser à des institutions internationales non interétatiques.

Je rappelle également que les partis de l'Entente, dans le texte de la modification de la loi sur l'extension, afin de diminuer la portée des plans d'utilisation du sol, ont précisément tenu compte des organisations internationales, au sens large du terme - et pas seulement des organisations interétatiques. En effet, ils voulaient que les PUS s'appliquent également à des organisations qui n'étaient pas forcément interétatiques.

J'ignore où est passé M. Fontanet, lui qui disait vouloir raisonner sur cette affaire en termes juridiques et non politiques. Je constate que vous défendez la définition d'une institution, en la nommant «institution internationale», pour appliquer ces termes, quand cela vous arrange, à des organisations non étatiques. Vous conférez ainsi une interprétation restrictive aux termes «institution internationale».

Voici plus de vingt ans, le professeur de droit constitutionnel Aubert disait qu'il fallait interpréter une initiative dans son sens large. Par conséquent, les termes «institution internationale» doivent être interprétés comme recouvrant également des organisations non étatiques. Personne ne peut contester le droit du canton à s'adresser à des organisations internationales non gouvernementales.

Le canton a également le droit d'intervenir - terme très large - auprès d'organisations interétatiques de diverses façons. J'ai cité l'exemple où, en tant qu'ancien président du Conseil d'Etat, nous avions adressé un message de paix à l'ONU que j'avais lu avec M. Petrovsky, alors directeur de l'Office des Nations Unies à Genève. Dès lors, ne prétendez pas que la Confédération a le monopole des affaires étrangères, et que le canton n'a pas le droit d'intervenir.

Je vous donne un autre exemple, celui de la défense des droits de l'homme. La Commission des droits de l'homme de l'ONU est sollicitée par toutes sortes de milieux privés et publics pour des cas particuliers. Auriez-vous la prétention de prétendre que notre Grand Conseil n'aurait pas le droit d'adresser une résolution à la Commission des droits de l'homme, qui siège à Genève, au sujet d'un cas particulier ? C'est grotesque et parfaitement insoutenable sur le plan juridique.

Je me souviens du débat sur la centrale nucléaire de Super Phénix et des possibilités de notre canton de s'y opposer, en vertu de l'article constitutionnel qui obligeait notre canton à intervenir, au sens large du terme, contre des centrales nucléaires. La quasi-totalité du Conseil d'Etat avait soutenu que c'était impossible, parce que la question relevait exclusivement de la compétence du Conseil fédéral. J'avais osé exprimer un avis contraire et minoritaire d'une manière très mesurée, et c'est à ce propos que je plaisantais hier soir, en disant que cela m'avait valu les foudres de certains de mes anciens collègues et les manchettes de la «Tribune de Genève». Tous m'accusaient de vouloir briser la collégialité du Conseil d'Etat pour avoir soutenu qu'il était de notre droit d'intervenir dans l'affaire de Super Phénix ! Quelques jours plus tard, nous recevions un avis de Berne confirmant le droit du canton d'intervenir à l'étranger, dans certains domaines, et que la Confédération ne détenait pas ce monopole.

Or, malgré cet exemple des plus précis qui démontre notre droit d'intervention dans un pays étranger sur une question qui nous intéresse, on prétend, en ce moment même, que nous ne pourrions pas intervenir auprès d'organisations internationales, ne serait-ce que pour délivrer un simple message de paix.

C'est précisément là qu'apparaissent les motivations politiques de l'avis de droit de M. Manfrini. Pour des raisons politiques, on tente d'éliminer, dans cette initiative, des points parfaitement recevables.

Je rassure M. Ramseyer. Effectivement, j'ai fait une confusion de personnes en parlant de M. Devaud qui avait donné un avis de droit sur l'initiative des HES. Toujours est-il que Me Cramer a démontré, lors de son audition en commission, que les termes «institutions internationales» recouvraient effectivement une notion très large, notion qui ne pouvait pas être éliminée de l'initiative pour des raisons constitutionnelles. Et pourtant, c'est ce que vous proposez de faire...

M. Michel Balestra (L), rapporteur de minorité. Le député Grobet a déjà soutenu sa thèse en commission. Elle a été clairement infirmée par Me Manfrini, puisqu'il s'agit d'intervenir auprès d'institutions internationales en faveur d'une politique de désarmement et que l'ordre constitutionnel est ainsi violé. Les démarches résultant de la prévention des conflits relève de la politique étrangère, laquelle est de la compétence exclusive de la Confédération.

Si nous commençons à discuter de chaque article, des heures durant, nous ne nous en sortirons pas. Je propose donc à ce Conseil de déclarer l'initiative irrecevable dans son ensemble.

Nous avons été patients et avons essayé d'être ouverts autant que possible. Face à des députés d'aussi mauvaise foi que ceux de l'opposition dans ce débat, je vous propose de rejeter l'ensemble de cette initiative et de laisser au Tribunal fédéral le soin de trancher de la conformité des différents articles s'il est saisi par les initiants.

Mme Evelyne Strubin (AdG). Afin que chacun sache, dans ce parlement, qui plébiscite sincèrement une politique de paix pour notre canton, je demanderai l'appel nominal pour ce vote.

Le président. Le vote par appel nominal est-il appuyé ? Oui ! Il en sera fait ainsi.

M. Christian Grobet (AdG). Je n'admets pas que M. Balestra nous accuse de mauvaise foi. Quand on n'a pas d'arguments, Monsieur Balestra, il est facile d'utiliser l'injure.

Notre canton est parfaitement en droit de s'adresser à une organisation internationale non gouvernementale pour des questions relatives au désarmement.

Je rappelle que la Ville de Genève fait partie de l'Association internationale des villes de paix. Par conséquent, nous avons le droit d'adresser un message à cette association internationale. Je l'ai d'ailleurs fait, au nom du Conseil d'Etat, lorsque cette association se réunissait à Genève. Il est évident, dès lors, que nous pouvons dire que la problématique du désarmement fait partie de nos préoccupations.

Le président. Nous débattons de la recevabilité, Monsieur Grobet !

M. Christian Grobet. Je relève que M. Balestra a argué que nous n'aurions pas le droit de faire connaître notre avis en la matière. J'ose espérer, Monsieur Balestra, que vous êtes solidaire de celles et ceux qui tentent, aujourd'hui, de faire avancer les négociations sur le désarmement. Or, il est évident que nous avons le droit d'intervenir en votant, par exemple, des résolutions contre les mines antipersonnel.

Ces questions nous préoccupent, et il est absolument incorrect de prétendre que nous n'aurions pas le droit d'intervenir.

M. Claude Blanc (PDC). Monsieur le président, le Tribunal fédéral lira certainement le Mémorial de cette séance du Grand Conseil avant de se prononcer sur la décision que nous aurons prise.

Certains partisans de l'initiative font, manifestement, de l'obstruction pour nous empêcher de nous prononcer ce soir. La présidente du Grand Conseil avait déjà tenté... (Brouhaha.) Continuez ainsi, le Tribunal fédéral appréciera votre attitude et jugera de la responsabilité que nous avons prise pour aboutir !

La présidente du Grand Conseil a aussi tenté d'éluder ce débat. M. Gilly a fait de même en attendant deux mois avant de présenter son rapport. (Brouhaha.) Je dis tout cela à l'intention du Tribunal fédéral qui appréciera.

Je constate que M. Gilly, un des membres du comité d'initiative, est aussi le rapporteur de la commission, cela en contradiction totale avec l'article 188, lettre a) de la loi portant règlement du Grand Conseil. J'ai entendu M. Grobet, dont la langue a fourché, dire que le véritable auteur de l'avis de droit était M. Devaud... C'est bien ça ? Vous l'avez dit, n'est-ce pas ? (Réponse inaudible de M. Christian Grobet.) Toujours est-il que M. Devaud appartient au comité d'initiative. Si vous arguez du fait que M. Manfrini ne pourrait pas être objectif, que penser, dès lors, de M. Devaud, le véritable auteur de l'avis défendu par M. Cramer ?

Votre langue a fourché, Monsieur Grobet, et il est trop tard pour revenir sur ce que vous avez dit.

Face à l'obstruction systématique de certains députés, le Grand Conseil se prononcera sur l'irrecevabilité totale de l'initiative. Le Tribunal fédéral appréciera non seulement le fond de l'affaire, mais leur attitude.

M. Luc Gilly (AdG), rapporteur de majorité. Il est surprenant d'entendre de tels propos quand on parle de culture de paix ! Pour moi, elle ne se résume pas à de vains mots.

Si j'ai remis ce rapport tardivement - mais à la date autorisée - c'est parce que je me suis battu, bec et ongles, jour et nuit, pour essayer de faire passer l'initiative contre les exportations d'armes. J'ai échoué et j'en ai pris acte.

Les collages ne se font pas tout seuls, Monsieur Ramseyer ! Alors, «collez-moi» pour les collages que j'ai faits, et je «dégueulasserai» la ville ! Ce qui est sale, ce sont les bombes, les armes que l'on exporte, et pas des affiches collées sur un mur ! Des téléphones, j'en ai eus, du genre : «Le GSsA est dégueulasse, il met des affiches partout !».

Le président. Monsieur Gilly, je vous prie, exprimez-vous sur la recevabilité !

M. Luc Gilly, rapporteur de majorité. Si M. Balestra tient à sa position, qu'il l'assume ! L'appel nominal a été demandé.

Effectivement, je fais partie du comité d'initiative, et ne l'ai jamais caché. En me rendant à la commission, j'ai posé la question de la compatibilité. On m'a répondu : «Monsieur Gilly, il n'y a aucun problème.» Alors, ne revenez pas là-dessus aujourd'hui !

Il en a été de même pour le rapport de majorité que j'ai accepté de faire.

Mme Elisabeth Reusse-Decrey (S). La fatigue se fait sentir dans ce parlement. Des dérapages regrettables se sont produits de part et d'autre.

La question n'est pas de savoir si on est pour ou contre cette initiative, pour ou contre une politique de paix.

L'appel nominal a été demandé pour voter sur la recevabilité de l'initiative.

Vous avez décidé de l'irrecevabilité de certains articles . On pourrait, en effet, en délibérer longuement. Mais la question à poser concerne précisément ces articles sur lesquels vous avez basé votre rapport de minorité.

On ne peut pas, dans un geste de mauvaise humeur, jeter dix mille signatures de citoyens à la poubelle !

Le Tribunal fédéral ne tiendra pas compte de nos douze heures et demie de débat et de la mauvaise humeur des députés pour juger si ces derniers ont eu tort ou raison.

Je vous demande de voter les deux rapports, celui de majorité et celui de minorité, et de ne pas jeter à la poubelle plus de dix mille signatures de citoyens.

Encore une fois, des erreurs ont été commises des deux côtés. N'y revenons donc pas !

Je demande donc que l'on vote les deux rapports, tels qu'ils ont été déposés.

Le président. Madame la députée, je prends acte de votre demande, mais je suis obligé de faire voter la proposition la plus éloignée, à savoir celle du rapporteur de minorité de déclarer l'initiative irrecevable dans son intégralité. Le Grand Conseil votera cette proposition et, si elle est refusée, nous en viendrons à la vôtre. Messieurs les députés Vanek et Grobet, je ne peux pas vous donner la parole, vous l'avez déjà prise trois fois.

Mesdames et Messieurs les députés, nous procédons au vote... (Manifestations. M. Christian Grobet parle hors micro.) Monsieur Grobet, je vous donnerai la parole dans un instant. Je réponds d'abord à la protestation que vous avez formulée sans que je vous aie donné la parole. Je vous la donnerai néanmoins, car je pense que nous sommes un parlement et que notre rôle est de débattre. Il est vrai que vous vous êtes déjà exprimé trois fois - le vice-président est formel - sur la proposition d'amendement. Il n'y a qu'un débat, et il porte sur la recevabilité. Il n'y en a pas de deuxième, article par article, ce qui fait que chaque orateur, au sens strict de notre règlement, ne peut s'exprimer que trois fois. Mais pour calmer le débat et les esprits en prévision d'un vote serein, je vous donne la parole, Monsieur Grobet !

M. Christian Grobet (AdG). Nous voterons donc sur l'irrecevabilité totale de l'initiative. Nous verrons bien ce qu'il arrivera.

Bien que nous discutions de la recevabilité d'une initiative, permettez-moi de vous faire remarquer qu'il n'est pas possible de limiter les prises de parole sur des amendements. Le rapporteur peut s'exprimer autant qu'il veut sur les amendements successifs...

Le président. C'est le règlement !

M. Christian Grobet. Non ! le règlement stipule que nous pouvons nous exprimer sur chaque proposition.

Le président. Dans chaque débat, Monsieur !

M. Christian Grobet. Tout à l'heure, M. Blanc, qui «travaillait» pour le Mémorial, a dit que la présidente de notre Grand Conseil a tenté de faire obstruction. C'est faux ! Elle a souligné, à juste titre, qu'en traitant cet objet ce soir, comme vous l'avez demandé au dernier moment, Monsieur Blanc - ce qui laisse quand même présumer d'une manoeuvre de votre part - cette assemblée irait au-devant d'un long débat. C'est pourquoi elle a demandé le renvoi du débat à 20 h 30. C'est ce que notre présidente voulait !

M. Gilly, en ses qualités de membre du comité d'initiative et de député, a parfaitement le droit de défendre cette initiative ici. Il n'y a pas de lien d'intérêt, au sens de notre règlement, et vous êtes bien mal placé, pour faire la leçon à M. Gilly, puisque certains membres de votre groupe ont voté, eux, des objets manifestement liés à des intérêts. Ici, M. Gilly ne fait que défendre les droits des citoyens.

Nous voulions un débat juridique sur une question très simple : quelle est la portée des termes «institutions internationales» ? Comme cela vous gêne, vous éludez la question, sur le plan juridique, en disant que Me Manfrini détient la vérité absolue. Comme nous devons, à chaque amendement, discuter de l'inconstitutionnalité ou non des termes que vous voulez éliminer, je relève que vous refusez de débattre de la portée exacte des termes «institutions internationales» et que vous préférez clore le débat en déclarant l'initiative globalement irrecevable.

Le Tribunal fédéral appréciera votre façon de traiter juridiquement d'une initiative.

M. Michel Balestra (L), rapporteur de minorité. Nous voulions débattre, mais vu l'obstruction faite pour nous empêcher de terminer sereinement nos travaux, je me borne à confirmer ma proposition. (Interruption de M. Pierre Vanek.)

Le président. J'ai relu le règlement, Monsieur Vanek. La parole ne peut pas être prise plus de trois fois dans un même débat sur le même objet. Monsieur le député Clerc, veuillez vous exprimer.

M. Bernard Clerc (AdG). Si vous êtes persuadés que nous cherchons à faire de l'obstruction, alors que nous ne voulons que débattre, vous finirez par nous obliger à vous donner raison.

Ne m'étant pas encore exprimé sur cet objet, je peux utiliser trois fois les dix minutes de mon temps de parole. Si vous le voulez, dites-le !

C'est vous qui nous poussez à ces extrémités, parce que vous ne répondez pas sur le fond des questions qui vous sont posées.

Je m'arrête ici. De nouvelles interventions de ma part ou de membres de notre groupe ne sont pas à exclure si la suite du débat les rendait nécessaires.

M. Pierre Meyll (AdG). La présentation que la droite fait de cette initiative est illogique.

L'initiative a été présentée à la chancellerie. Dès lors que celle-ci l'a admise, il me semble difficile de la contester. Par conséquent, il n'est pas correct de vouloir l'écarter.

Si l'initiative n'avait pas été recevable, il aurait été étrange que la chancellerie autorisât la récolte de dix mille signatures pour la refuser ensuite, sous divers faux prétextes.

Quant aux avis de droit, j'ai vu, parfois, la façon dont on pouvait en orienter la forme...

Cette initiative doit être soumise au peuple, car c'est à lui de décider. Je trouverais dommage que vous craigniez ce dénouement, alors que M. Vodoz vient de parler de la désaffectation future de la caserne et de l'arrivée de «bérets» multicolores, qui sont, en quelque sorte, des missionnaires de la paix.

Je ne vois pas en quoi cette initiative pourrait susciter un malaise. Vous devez admettre que le peuple est à même de juger, quitte, ensuite, à ce que vous recouriez sur je ne sais quoi !

Prenez au moins acte du fait que la chancellerie a autorisé cette initiative ! Ne pas en tenir compte serait trahir plus de dix mille signataires-citoyens.

C'est pourquoi je vous demande d'accepter cette initiative et de la soumettre au vote pour que le peuple en décide, dans le respect de la démocratie.

M. Claude Blanc (PDC). Je prends la parole pour la troisième et dernière fois pour répondre à la quatrième intervention de M. Grobet.

S'agissant de M. Gilly, vous avez évoqué, Monsieur Grobet, l'article 24 sur l'obligation de s'abstenir. Votre volonté d'obstruction l'emportant, vous étiez complètement à côté du sujet. Vous dites n'importe quoi ! Il ne s'agissait pas de l'article 24 mais de l'article 188 qui interdit à l'auteur d'un projet d'être rapporteur.

Le Bureau du Grand Conseil a toujours fixé une heure précise pour traiter d'initiatives soumises à un délai. Dans le cas présent, il s'est aperçu, au dernier moment, que ce laps de temps n'avait pas été déterminé. C'est pourquoi nous avons demandé immédiatement l'inscription de l'initiative 109 à l'ordre du jour. Je n'accuse personne, mais je constate que le Bureau a fait preuve d'une légèreté inqualifiable.

M. Clerc nous promet que tous les membres de son groupe utiliseront trois fois les dix minutes de leur temps de parole pour faire davantage d'obstruction.

M. Pierre Vanek. Il n'a pas dit cela !

M. Claude Blanc. C'est ce qu'il a dit ! Cela figurera au Mémorial... (Interruption de M. Pierre Vanek.)

Le président. Monsieur Vanek, je vous prie de vous taire ! C'est M. Blanc qui a la parole.

M. Claude Blanc. ...et je me réjouis de connaître les considérants du Tribunal fédéral sur une attitude que je juge totalement inqualifiable.

Le président. L'appel nominal ayant été demandé, nous allons procéder au vote de cette initiative dans sa globalité.

Celles et ceux qui acceptent sa recevabilité répondront oui, et celles et ceux qui la rejettent répondront non.

La recevabilité de l'initiative est rejetée par 35 non contre 24 oui et 1 abstention.

Ont voté non (35) :

Bernard Annen (L)

Michel Balestra (L)

Claude Basset (L)

Janine Berberat (L)

Claude Blanc (DC)

Hervé Burdet (L)

Anne Chevalley (L)

Jean-Claude Dessuet (L)

Daniel Ducommun (R)

Jean-Luc Ducret (DC)

Michel Ducret (R)

John Dupraz (R)

Henri Duvillard (DC)

Catherine Fatio (L)

Bénédict Fontanet (DC)

Pierre Froidevaux (R)

Jean-Pierre Gardiol (L)

Henri Gougler (L)

Nelly Guichard (DC)

Janine Hagmann (L)

Elisabeth Häusermann (R)

Claude Lacour (L)

Gérard Laederach (R)

Armand Lombard (L)

Olivier Lorenzini (DC)

Pierre Marti (DC)

Michèle Mascherpa (L)

Geneviève Mottet-Durand (L)

Vérène Nicollier (L)

Barbara Polla (L)

David Revaclier (R)

Micheline Spoerri (L)

Pierre-François Unger (DC)

Olivier Vaucher (L)

Jean-Claude Vaudroz (DC)

Ont voté oui (24) :

Fabienne Blanc-Kühn (S)

Jacques Boesch (AG)

Fabienne Bugnon (Ve)

Bernard Clerc (AG)

Anita Cuénod (AG)

Erica Deuber-Pauli (AG)

René Ecuyer (AG)

Christian Ferrazino (AG)

Luc Gilly (AG)

Gilles Godinat (AG)

Christian Grobet (AG)

Dominique Hausser (S)

Liliane Johner (AG)

René Longet (S)

Pierre Meyll (AG)

Laurent Moutinot (S)

Chaïm Nissim (Ve)

Vesca Olsommer (Ve)

Elisabeth Reusse-Decrey (S)

Andreas Saurer (Ve)

Max Schneider (Ve)

Evelyne Strubin (AG)

Pierre Vanek (AG)

Yves Zehfus (AG)

S'est abstenu (1) :

Philippe Schaller (DC)

Etaient excusés à la séance (14) :

Florian Barro (L)

Matthias Butikofer (AG)

Claire Chalut (AG)

Pierre-Alain Champod (S)

Hervé Dessimoz (R)

Marlène Dupraz (AG)

Laurette Dupuis (AG)

Michel Halpérin (L)

Yvonne Humbert (L)

Alain-Dominique Mauris (L)

Danielle Oppliger (AG)

Jean-Pierre Rigotti (AG)

Jean-Philippe de Tolédo (R)

Michèle Wavre (R)

Etaient absents au moment du vote (25) :

Luc Barthassat (DC)

Roger Beer (R)

Nicolas Brunschwig (L)

Thomas Büchi (R)

Micheline Calmy-Rey (S)

Nicole Castioni-Jaquet (S)

Liliane Charrière Urben (S)

Sylvie Châtelain (S)

Jean-François Courvoisier (S)

Pierre Ducrest (L)

Jean-Claude Genecand (DC)

Alexandra Gobet (S)

Mireille Gossauer-Zurcher (S)

David Hiler (Ve)

Claude Howald (L)

Pierre Kunz (R)

Bernard Lescaze (R)

Sylvia Leuenberger (Ve)

Gabrielle Maulini-Dreyfus (Ve)

Jean Opériol (DC)

Catherine Passaplan (DC)

Christine Sayegh (S)

Jean Spielmann (AG)

Marie-Françoise de Tassigny (R)

Claire Torracinta-Pache (S)

Présidence :

 M. René Koechlin, premier vice-président

 

La séance est levée à 20 h 55.