République et canton de Genève
Grand Conseil
Séance du jeudi 26 juin 1997 à 17h
53e législature - 4e année - 8e session - 33e séance
GR 170-1 et objet(s) lié(s)
8. Rapports de la commission de grâce chargée d'étudier les dossiers des personnes suivantes :
M. B. L. , 1951, Italie, administrateur-délégué, recourt contre le solde de la peine d'emprisonnement afin d'être libéré pour fin juin 1997.
M. Claude Blanc (PDC), rapporteur. M. B. L. est né le 8 janvier 1951, à Gênes. Citoyen italien, il est domicilié à Cologny, marié et père de quatre enfants âgés de 19, 17, 11 et 9 ans.
Il était administrateur-délégué et directeur commercial de B. SA, commerce de café dont le siège est à Genève, mais ayant des activités universelles. Sachant sa société en déconfiture, il a obtenu frauduleusement des lignes de crédit auprès de neuf banques différentes pour un montant total de plus de 150 millions de francs. La Cour correctionnelle sans jury, admettant les circonstances atténuantes du repentir sincère et du fait qu'il a collaboré très activement et positivement à l'instruction, l'a condamné le 15 janvier 1997 à trois ans et six mois d'emprisonnement sous déduction d'un an et dix mois de préventive.
Il purge actuellement sa peine en semi-détention à la maison Le Vallon, et la libération conditionnelle lui sera accordée le 11 septembre prochain. Il demande la grâce du Grand Conseil pour pouvoir rejoindre dès maintenant sa femme et ses enfants, rentrés en Italie, qui souffrent beaucoup de son absence.
Le procureur général estime que, dans la fixation de la peine, la Cour correctionnelle a déjà très largement tenu compte des circonstances atténuantes vu la gravité des faits, et qu'il serait excessif que le recourant bénéficie d'un nouveau rabais, alors même que son statut actuel ne l'empêche pas d'avoir des contacts avec sa famille.
La commission conclut au rejet du recours à l'unanimité.
Mis aux voix, le préavis de la commission (rejet du recours) est adopté.
M. C. C. , 1946, France, fonctionnaire OMS.
M. Bernard Lescaze (R), rapporteur. M. C. C., âgé de 51 ans, père de deux grands enfants, est fonctionnaire international à l'OMS.
Pressé, un jour d'août dernier, il a dépassé très sensiblement la vitesse autorisée à la route de Malagnou, puisque la vitesse retenue contre lui est de 116 km/h à un endroit où elle est limitée à 60 km/h. Le radar mobile montre que sa vitesse, à un moment donné au moins, atteignait à une pointe de 144 km/h. Il a pu bénéficier d'une immunité de juridiction qui, en réalité, n'avait pas lieu d'être. C'est ainsi qu'il n'a pas été emprisonné, alors qu'un Genevois l'aurait été...
Il recourt contre l'amende, parce qu'il trouve que cette unique infraction lui a valu, outre la peine administrative d'un retrait de permis de deux mois, une amende un peu élevée à son goût. La commission et le rapporteur vous proposent le rejet du recours.
Mis aux voix, le préavis de la commission (rejet du recours) est adopté.
M. G. C. , 1951, Genève, comptable indépendant, recourt en grâce contre le solde des amendes dues, soit un montant de 952,90 F.
2ème recours en grâce partiel
M. Bernard Lescaze (R), rapporteur. M. G. C., âgé de 46 ans, célibataire, a commis plusieurs infractions à la loi sur la circulation routière. Ses amendes se montent à 2 600 F, sans compter 1 430 F de frais.
Le préavis du Parquet est négatif. En effet, sur les douze amendes en cause, huit concernent des excès de vitesse dont certains sont relativement importants. La commission vous propose le rejet du recours.
Mis aux voix, le préavis de la commission (rejet du recours) est adopté.
M. K. N. , 1969, Maroc, sans profession, recourt contre le solde de la peine d'expulsion judiciaire qui prendra fin en mai 2001.
M. Claude Blanc (PDC), rapporteur. Le 17 mai 1996, la police interpellait un personnage porteur d'une pièce d'identité française au nom de N. B., né le 6 novembre 1969.
Après vérification, il est apparu que cette pièce était un faux. L'intéressé a reconnu l'avoir achetée à Castellane pour le prix de 550 F français. Il a déclaré se nommer en réalité M. K. N., né le 23 juin 1969, marocain, étudiant, domicilié à Oujda, au Maroc.
Il a donné des renseignements précis sur sa famille marocaine, a déclaré s'être fait expulser de l'université Hassan II pour ses idées politiques, avoir déserté l'armée et s'être réfugié en Espagne.
Il a fait l'objet d'une ordonnance de condamnation le 30 mai 1996 pour infraction à la loi fédérale sur le séjour et l'établissement des étrangers, faux dans les certificats et titres étrangers, à deux mois de prison avec sursis et cinq ans d'expulsion.
Le 2 août 1996, il épousait à la mairie de Lancy une citoyenne suisse domiciliée à Lancy. Ce jour-là, comme l'atteste le certificat de mariage, il s'appelle M. M. K., né le 23 juin 1969, à Idra, Algérie, ressortissant de la République algérienne et domicilié aux Verrières, Neuchâtel.
Le 13 février 1997, M. K. N., comme il se nomme désormais, dépose une demande en grâce auprès de notre Grand Conseil en s'appuyant sur son mariage avec une Suissesse pour dire qu'il a de sérieuses attaches en Suisse et en invoquant le droit au regroupement familial.
Le 27 février 1997, il introduisait une demande de révision devant la Cour de cassation. Ce nouvel acte de procédure suspendait l'examen de son recours en grâce. La Cour de cassation a rejeté le recours le 30 mai 1997 en déclarant entre autres qu'un mariage contracté après une décision d'expulsion n'est pas un fait pouvant faire douter de la légitimité de la condamnation.
Le préavis du Parquet est naturellement négatif et s'appuie sur les mêmes arguments que ceux avancés dans l'arrêt de la Cour de cassation; si bien, Mesdames et Messieurs les députés, que j'étais prêt, dimanche soir, à présenter à la commission de grâce un rapport négatif concernant ce monsieur. Mais il se trouve que le lundi matin j'ai reçu une lettre de Mme M. G. K., la Suissesse ayant épousé M. K. N. le 2 août 1996. Je dois vous avouer que cette lettre m'a un peu ému. Mme K. m'informe de la sincérité de leurs sentiments réciproques, de l'amour qui les unit et de la catastrophe qui s'ensuivrait si M. K. N. devait être expulsé en Algérie. Mme G.-K. reconnaît par ailleurs que son mari a enfreint la loi, mais elle dit qu'il ne se rendait pas compte, à cette époque, de la gravité des infractions commises.
Alors voilà, j'ai été ému, je le répète, par cette lettre et j'ai proposé à la commission de grâce d'accorder un préavis favorable à M. K. N.. La commission de grâce m'a suivi par cinq voix contre quatre et trois abstentions.
Mis aux voix, le préavis de la commission (grâce du solde de la peine d'expulsion judiciaire) est adopté.