République et canton de Genève
Grand Conseil
Séance du vendredi 6 juin 1997 à 17h
53e législature - 4e année - 6e session - 25e séance
PL 7597
LE GRAND CONSEIL
Décrète ce qui suit:
Article unique
La loi d'application de la loi fédérale sur l'aménagement du territoire, du 4 juin 1987, est modifiée comme suit:
Art. 12, al. 4 (nouvelle teneur)
4 En vue de favoriser l'urbanisation, la restructuration de certains territoires, l'extension des villages ou de zones existantes, la création de zones d'activités publiques ou privées, le Grand Conseil peut délimiter des périmètres de développement, dits zones de développement, dont il fixe le régime d'affectation. A l'intérieur de ces périmètres, le Conseil d'Etat peut, en vue de la délivrance d'une autorisation de construire, autoriser le département à faire application des normes résultant de la zone de développement, en lieu et place de celles de la zone à laquelle elle se substitue. Il ne peut être créé de zone de développement soumise aux normes de la 5e zone (villas).
EXPOSÉ DES MOTIFS
Lorsqu'une loi contient des dispositions qui sont réciproquement incompatibles, il convient de la modifier.
En matière d'aménagement du territoire, c'est le cas de la zone de développement 5.
L'article 19, alinéa 3, de la loi d'application de la loi fédérale sur l'aménagement du territoire (ci-après: LALAT) mentionne que «la 5e zone est une zone résidentielle destinée aux villas», étant précisé que des exploitations agricoles peuvent y trouver place.
Les caractéristiques de cette 5e zone ne répondent pas aux buts de la zone de développement tels qu'ils ressortent de l'article 12, alinéa 4, dela LALAT: une telle zone vise en effet à «favoriser l'urbanisation, la restructuration de certains territoires, l'extension des villages ou de zones existantes».
L'article 5, alinéa 1, de la loi générale sur les zones de développement (ci-après: LGZD) prévoit qu'en cette zone, une autorisation de construire est subordonnée à la condition que les bâtiments d'habitation répondent à un besoin prépondérant d'intérêt général, qu'ils soient destinés à la location ou à la vente. L'article 5, alinéa 3, prévoit en outre un contrôle des prix et des loyers par l'Etat pendant une durée de 10 ans, selon les modalités prévues par la loi générale sur le logement et la protection des locataires, du 4 décembre 1977 (LGL).
Ces mesures sont peu compatibles avec la destination de la 5e zone affectée à des villas. Souvent, la création d'une telle zone ne fait que régulariser une situation déjà existante. Soumettre cette zone aux règles de la LGL ou à l'exigence du besoin prépondérant d'intérêt général n'a pas de sens, d'autant que les prix de vente ou de location des villas coïncident rarement et difficilement avec les barèmes prévus par cette loi.
De plus, en vertu de l'article 2, alinéa 1, de la LGZD, le département des travaux publics et de l'énergie peut refuser toute autorisation de construire lorsque la réalisation du projet serait de nature à compromettre les objectifs de la zone de développement. Or, la construction d'une villa ou d'un bâtiment en zone 5 ne correspond pas, en général, aux objectifs de la zone de développement qui, en matière de logement, se rapportent de préférence à de l'habitat collectif.
Enfin, une zone de développement rend obligatoire l'approbation par le Conseil d'Etat d'un plan localisé de quartier préalablement à toute autorisation de construire (art. 2, al. 1, LGZD). C'est un outil disproportionné qui n'est guère adapté au caractère de la zone-villas et aux besoins des propriétaires individuels. Et si, pour des motifs urbanistiques ou de protection d'un site, un tel plan s'avérait nécessaire dans cette zone, même primaire, le Conseil d'Etat conserverait, en vertu de la LEXT, le pouvoir de le faire établir, de l'adopter et de lui subordonner toute autorisation de construire.
En tout état et pour le surplus, les dispositions qui régissent la zone de développement, laquelle comporte un caractère collectif et concentré, ne sont guère compatibles avec la cinquième zone d'essence individuelle et d'ordre dispersé.
Pour ces motifs, nous vous prions, Mesdames et Messieurs les députés, de réserver un bon accueil au présent projet.
Préconsultation
Mme Fabienne Bugnon (Ve). Le silence de ceux qui proposent des modifications importantes de la loi sur l'aménagement du territoire ne cesse pas de m'étonner !
Ce deuxième projet nous permettra de parler du problème de la zone villas, dont les Verts préconisent la densification de cas en cas, notamment lors de la construction de petits immeubles.
Nous avons également dit que cette zone ne devait pas être étendue.
Nous acceptons le renvoi de ce projet pour en débattre à la commission d'aménagement.
M. Christian Grobet (AdG). Nous nous opposons absolument à ce projet de loi, typique de la politique de M. Koechlin et de ses amis, qui tend au démantèlement des instruments d'aménagement du territoire.
En ce qui concerne les zones de développement, je rappelle simplement l'excellence desdits instruments mis en place, dans les années 50, par les représentants du parti radical qui, à l'époque, avaient une vision claire de l'aménagement du territoire.
Je constate que les radicaux n'ont pas cosigné ce projet de loi. J'ignore si c'est par inadvertance ou par respect des oeuvres de leurs pères spirituels. Je tiens surtout à souligner qu'outre cette volonté de démanteler les instruments d'aménagement du territoire, la vôtre, Monsieur Koechlin, est d'offrir des cadeaux fiscaux aux propriétaires et de poursuivre votre politique de réduction des rentrées fiscales.
Vous êtes architecte. Par conséquent, vous savez que dans toutes les zones de développement une taxe d'équipement est prélevée au bénéfice des communes, lors de la délivrance d'une autorisation de construire. Cette taxe permet de financer la construction des voies de desserte de la nouvelle zone, la pose de collecteurs et, cas échéant, de contribuer à la construction d'équipements scolaires jugés nécessaires.
Les zones villas ne sont guère nombreuses dans notre canton et vous savez où elles se trouvent, Monsieur Koechlin, en votre qualité d'architecte et d'urbaniste. Elles se trouvent dans les communes rurales où le centime additionnel est le plus élevé. Votre projet impliquerait, par exemple, la perte d'une source fiscale pour Aire-la-Ville qui a des impôts communaux particulièrement hauts.
Votre projet n'est pas clair, une loi ayant une application directe. Il pourrait être interprété comme devant empêcher la création de nouvelles zones de développement dans des zones 5. Aurait-il pour effet d'abroger, en quelque sorte, les zones de développement existant en zone villas ? Ce serait catastrophique pour les finances des communes comportant de telles zones.
Les zones de développement villas sont essentiellement des zones dérivant de la zone agricole. Par voie de conséquence, l'adoption d'une zone de développement se justifie à tous égards, notamment à cause de la taxe d'équipement et du coût très bas du terrain. Mais vous ne voulez même pas d'une taxe en matière de plus-value immobilière !
La zone de développement en zone villas ne gêne en rien. Généralement, le Conseil d'Etat n'y prévoit pas de plan localisé de quartier. Toutefois, ce plan pourrait se justifier dans certains cas, notamment en application de la loi Richardet qui a permis un taux d'occupation du sol notoirement plus élevé.
Il n'y a aucune raison de supprimer ces zones de développement et de ne plus en prévoir dans l'hypothèse de nouvelles zones 5, bien que notre groupe ne soit pas favorable à la création de nouvelles zones villas. En effet, elles représentent déjà 50% du territoire genevois.
En supposant qu'il soit appliqué aux zones de développement existantes, ce projet de loi pourrait susciter des effets pervers, notamment pour les finances communales.
Ce projet est renvoyé à la commission d'aménagement du canton.