République et canton de Genève

Grand Conseil

PL 7578
8. Projet de loi du Conseil d'Etat ouvrant un crédit extraordinaire pour l'acquisition du complexe d'immeubles centre des Tattes. ( )PL7578

LE GRAND CONSEIL

Décrète ce qui suit:

Article 1

1 Un crédit extraordinaire de 30 427 932 F est ouvert au Conseil d'Etat pour l'acquisition des immeubles sis sur la parcelle n° 3181, feuille 36, du cadastre de la commune de Vernier, actuellement propriété de la Fondation pour la construction de logements destinés aux travailleurs saisonniers.

2 Il se décompose de la manière suivante:

· valeur des bâtiments  + 23 380 000 F

· valeur du terrain  + 8 238 932 F

· valeur de la construction

 de locaux en sous-sol par l'Etat

 en 1987  - 1 191 000 F

                              

    30 427 932 F

Art. 2

Ce crédit ne figure pas au budget d'investissement 1997. Il sera comptabilisé en une tranche unique au compte d'investissement en 1997, sous la rubrique 54.04.00.503.01.

Art. 3

1 Le terrain, qui avait été remis par l'Etat à la Fondation pour la construction de logements destinés aux travailleurs saisonniers en droit de superficie par acte des 7, 13 et 21 février 1990, est inscrit au bilan de l'Etat au patrimoine financier pour la somme de 8 238 932 F.

2 La nouvelle affectation, mentionnée à l'article 6, entraîne le transfert du terrain précité du patrimoine financier au patrimoine administratif de l'Etat, à la valeur de 8 238 932 F.

3 Cette opération ne donne lieu à aucune plus ou moins-value comptable à inscrire au budget de fonctionnement.

Art. 4

1 La subvention fédérale de 15 587 000 F se décompose comme suit:

· Subvention unique 15 275 000 F

· Mobilier + 312 000 F

                         

  15 587 000 F

2 Cette subvention serait remboursable à la Confédération dans une juste proportion si ces bâtiments étaient détournés du nouveau but ou aliénés avant l'échéance de la durée d'affectation de 30 ans, conformément aux articles 27 et 31 de l'ordonnance fédérale 2 sur l'asile relative au financement, du 22 mai 1991.

3 Cette subvention est relative à l'ensemble des immeubles, à l'exception de la cafétéria, du parking, de certains locaux en sous-sol et des aménagements extérieurs.

Art. 5

1 Les immeubles acquis changent d'affectation et servent, depuis le 1er janvier 1996, à l'hébergement de requérants d'asile et statuts assimilés, pour le compte de la Confédération.

2 Est réservée l'exploitation du restaurant, qui est ouvert au public.

Art. 6

1 Le financement est assuré par le recours à l'emprunt pour la somme de 6 602 000 F, décomposée comme suit:

· Crédit d'investissement [art. 1]  + 30 427 932 F

· Subvention fédérale [art. 4]  - 15 587 000 F

· Terrain [art. 3]  -  8 238 932 F

                         

    6 602 000 F

2 Le montant mentionné à l'article 1 doit s'inscrire dans les limites du plan directeur fixant à environ 250 millions de francs le maximum des investissements annuels dont les charges financières en intérêts et en amortissements sont à couvrir par l'impôt.

Art. 7

1 L'amortissement de l'investissement net de 14 840 932 F à charge de l'Etat est calculé chaque année sur la valeur résiduelle et est porté au compte de fonctionnement.

2 L'investissement net se décompose en:

· Recours à l'emprunt [art. 6, al. 1]  6 602 000 F

· Terrain [art. 3]   8 238 932 F

Art. 8

La présente loi est soumise aux dispositions de la loi sur la gestion administrative et financière de l'Etat, du 7 octobre 1993.

EXPOSÉ DES MOTIFS

1. Historique

Au début des années 80, environ 7 000 travailleurs saisonniers étaient logés dans des conditions d'habitabilité très précaires. Il s'est donc avéré nécessaire d'offrir aux ouvriers saisonniers des logements dans un complexe d'immeubles construits en dur répondant aux normes les plus évidentes d'hygiène et de confort.

Après de nombreuses recherches d'implantation de ces bâtiments, il a été projeté de réaliser cet ensemble sur une parcelle à la Renfile, au lieu-dit «Les Tattes», sur la commune de Vernier.

Cette parcelle n° 3181, feuille 36 du cadastre de Vernier, a été acquise par l'Etat par arrêté du 20 janvier 1983. Le terrain, d'une contenance total de 33 356 m2, a été acheté à l'époque pour le prix de 8 238 932 F, soit 247 F/m2.

L'implantation choisie permettait de réaliser douze petits immeubles affectés à l'habitation (3 étages sur rez) et une construction réservée aux locaux de service, tels que restaurant et cuisine.

C'est dans ces circonstances que, le 25 mai 1984, le Grand Conseil a adopté une modification du régime des zones de construction en déclassant ledit terrain de la zone-villas 5 A en zone 4 B, permettant la réalisation de petits immeubles à plusieurs logements pour les travailleurs saisonniers (L 5576). Selon l'exposé des motifs de ladite loi, cette construction devait être entreprise par une fondation de droit public tripartite (Etat, organisations d'employeurs et d'employés), laquelle devait être mise au bénéfice d'un droit de superficie sur le terrain propriété de l'Etat.

C'est, finalement, la forme d'une fondation de droit privé au sens des articles 80 et suivants du code civil qui a été retenue. Elle a été constituée, par acte du 25 septembre 1985, et est dénommée Fondation pour la construction de logements destinés aux travailleurs saisonniers, présidée à l'époque par le chef du département des travaux publics et composée de représentants de l'Etat, des milieux patronaux, des milieux syndicaux ainsi que d'un représentant de la commune de Vernier. Elle a pour but de favoriser la création sur le territoire genevois de logements destinés aux travailleurs.

2. Financement de la construction du centre des Tattes

Le financement de l'opération de construction était prévu de la manière suivante:

- Capital de dotation versé par le Fonds de logements

 temporaires 1 000 000 F

Emprunts sans intérêts

- Commission paritaire de la maçonnerie, gypserie-peinture,

 bois, couverture et vitrerie 3 800 000 F

- Fonds de logements temporaires 1 000 000 F

                     

 4 800 000 F

Emprunts avec intérêts

- Caisse de compensation bâtiment gypserie-peinture 10 500 000 F

- Etat de Genève 5 000 000 F

                        

TOTAL: 21 300 000 F

Le prêt de 5 000 000 F accordé par l'Etat, par convention du 20 novembre 1985, a été avalisé par la loi 5836, du 27 novembre 1986, autorisant le Conseil d'Etat à emprunter 140 millions de francs pour financer des achats de terrains et d'immeubles, des placements, des prêts et des avances (L 5836).

Selon l'arrêté du Conseil d'Etat du 19 juillet 1989, la fondation est au bénéfice d'un droit de superficie pour une durée de 99 ans sur le terrain propriété de l'Etat, moyennant le paiement d'une rente de superficie annuelle de 268 680 F, soit 27,10 F/m2 de plancher brut. Pour la période du 1er juillet 1989 au 30 juin 1994, le droit de superficie était toutefois concédé à titre gratuit. A l'échéance de cette première période de cinq ans, les parties devaient décider, d'un commun accord et en tenant compte des résultats d'exploitation durant cette période, si la rente était due en tout ou en partie dès le 1er juillet 1994 ou si l'exigibilité en était à nouveau reportée à une nouvelle échéance à définir d'un commun accord entre les parties. Or, vu les déficits importants enregistrés par la fondation, celle-ci ne s'est, à ce jour, jamais acquittée de la rente de superficie.

Par ailleurs, l'Etat s'est assuré une servitude pour l'utilisation des locaux en sous-sol des bâtiments nos 1 et 9 à 12 pour toute la durée du droit de superficie de 99 ans, moyennant le paiement, à l'époque, d'une avance de 1 191 000 F à la fondation. Ces locaux sont occupés par des associations locales sans but lucratif.

3. Occupation du centre des Tattes

La construction du centre des Tattes a été achevée en 1987. Le complexe présentait une capacité d'accueil de plus de 500 lits répartis dans douze immeubles de 3 étages, une grande buanderie, une cafétéria de 200 places et un parking extérieur.

En 1989 et 1990, tous les lits étaient occupés. La fondation enregistrait toutefois un déficit annuel d'exploitation d'environ 77 000 F, lié notamment à la hausse des taux hypothécaires.

En outre, en raison de la basse conjoncture, on constatait une baisse progressive du nombre de travailleurs saisonniers hébergés au centre des Tattes qui a atteint le chiffre de 20 saisonniers en 1993.

A la même époque, l'Association genevoise des centres d'accueil pour requérants d'asile (ci-après AGECAS) et l'Hospice général étaient confrontés, pour leur part, à des besoins importants de logements de requérants d'asile. Des chambres leur ont donc été louées et c'est plus de 250 à 300 lits au centre des Tattes qui ont été mis à la disposition de demandeurs d'asile en 1993, sans que cela ne pose le moindre problème avec le voisinage et la commune de Vernier. Force était donc de constater que la vocation de logements destinés aux travailleurs saisonniers du centre s'estompait lentement au profit de l'hébergement de requérants d'asile.

C'est dans ces circonstances que la fondation déjà déficitaire a décidé de donner une nouvelle affectation au centre des Tattes et a donc négocié avec la Confédération la location ou la vente du centre pour l'hébergement de requérants d'asile.

4. Négociations avec la Confédération

En 1993, notre Conseil et la fondation ont entrepris des démarches auprès de la Confédération, soit l'office fédéral des réfugiés (ci-après ODR), qui envisageait à l'époque l'achat d'immeubles destinés à l'hébergement collectif de requérants d'asile afin de diminuer ses charges. De son côté, l'AGECAS souhaitait disposer de lieux d'hébergement stables dans la durée et cherchait des solutions économiques pour remplir son mandat d'accueil et d'hébergement de demandeurs d'asile nouvellement arrivés à Genève, cela dans les limites budgétaires imposées par la Confédération.

Une expertise des bâtiments a alors été effectuée, en novembre 1993, estimant la valeur vénale de l'ensemble du complexe à 23 380 000 F.

Toutefois, l'ODR n'était plus disposé à racheter le complexe d'immeubles, mais uniquement à louer la partie du centre affectée à l'habitation. Il a donc proposé à notre Conseil, en juillet 1994, de louer pour une durée de 30 ans le complexe d'immeubles, à l'exclusion de la cafétéria, du parking extérieur et de certains locaux en sous-sol, pour le montant unique de 15 587 000 F. Le terrain devait être mis gratuitement à la disposition de l'ODR durant la période de préfinancement de 30 ans au terme de laquelle la pleine propriété du centre des Tattes reviendrait à l'Etat. En revanche, la cafétéria de 200 places, son équipements et quelques locaux en sous-sol, expertisés à la valeur vénale de 2 915 650 F, deviendraient immédiatement propriété de l'Etat de Genève.

Cette proposition a été avalisée par la fondation et notre Conseil en septembre 1994.

C'est ainsi qu'en décembre 1994, l'ODR a confirmé sa décision d'allouer au canton une subvention définitive de 15 275 000 F. A cette somme viennent s'ajouter un montant de 312 000 F pour la reprise du mobilier existant dans les chambres et du matériel d'exploitation, ainsi qu'une subvention additionnelle estimée à 2 157 000 F pour les travaux de transformation nécessaires à l'hébergement de requérants d'asile.

Ces travaux ont débuté en mai 1995 pour s'achever en été 1996, date de l'inauguration officielle du centre des Tattes par l'ODR et le Conseil d'Etat.

5. Exploitation actuelle du centre des Tattes

L'AGECAS a été mandatée pour gérer les douze bâtiments du centre des Tattes d'une capacité actuelle d'hébergement de 500 places. Ces immeubles ont été divisés en demi-étages, chacun équipé de cinq ou six chambres doubles, de cuisines et de sanitaires. Dans une partie des sous-sols, des aménagements ont été créés afin d'offrir des espaces communes à l'ensemble des résidents.

Le centre des Tattes abrite également la direction de l'AGECAS, le bureau d'accueil et un point santé dépendant de la Croix-Rouge genevoise. Le personnel assure ainsi une permanence continue sur les lieux sept jours par semaine.

Actuellement, plus de 300 requérants d'asile et personnes admises provisoirement, issues d'une trentaine de nationalités différentes, logent au centre des Tattes, ce qui fait de ce complexe la plus grande structure de logements collectifs destinés à l'asile de Suisse.

6. Conclusion

Cette opération de transfert de propriété du complexe d'immeubles du centre des Tattes à l'Etat de Genève obéit à un large consensus.

En effet, premièrement, la Confédération cherchait à réaliser sur le territoire cantonal un hébergement collectif de requérants d'asile. Or, grâce à sa typologie, à sa situation géographique et à son affectation primaire, le centre des Tattes était le seul complexe d'immeubles à Genève qui répondait non seulement à la volonté des autorités fédérales, mais permettait également de la réaliser à des coûts modestes.

Deuxièmement, les partenaires sociaux, représentés au sein de la fondation, ont largement contribué et aidé le canton pour transformer ce centre sous-utilisé par les travailleurs saisonniers en un hébergement collectif de requérants d'asile. Le changement d'affectation du centre des Tattes et sa gestion actuelle par l'AGECAS doivent toutefois entraîner la dissolution de la fondation dont le but du logement des travailleurs saisonniers ne correspond plus à la réalité du site.

Troisièmement, il faut souligner et remercier l'effort particulier de la commune de Vernier qui s'est toujours montrée favorable à ce projet et qui a même mené une campagne soutenue d'information et de sensibilisation auprès de la population locale pour intégrer ce centre dans sa vie communale.

Enfin, notre Conseil ajoute que cet hébergement collectif permettra désormais d'assurer aux requérants d'asile des conditions de logement tout à fait décentes, un accueil permanent et une gestion de l'asile efficace et à moindre coût dans notre canton.

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Tels sont en substance, Mesdames et Messieurs les députés, les motifs qui nous conduisent à soumettre à votre bienveillante attention le présent projet de loi.

Annexes: Evaluation de la dépense nouvelle et de la couverture financière.

 Evaluation des charges financières moyennes.

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Ce projet est renvoyé à la commission des finances sans débat de préconsultation.