République et canton de Genève
Grand Conseil
Séance du jeudi 5 décembre 1996 à 17h
53e législature - 4e année - 1re session - 46e séance
GR 153-1 et objet(s) lié(s)
8. Rapports de la commission de grâce chargée d'étudier les dossiers des personnes suivantes :
M. D. F. , 1946, Genève, écuyer, ne recourt que contre les peines d'emprisonnement de huit mois et vingt jours ainsi que contre un solde de peine de réclusion de deux ans, quatre mois et dix jours suite à une réintégration prononcée par la commission de libération conditionnelle le 10 septembre 1996.
4ème recours en grâce
M. Daniel Ducommun (R), rapporteur. Il s'agit du recours en grâce de M. D. F., né en 1946, originaire de Genève, employé de commerce et écuyer, marié, deux enfants majeurs.
Nous nous prononçons, dans ce Grand Conseil, sur le quatrième recours en grâce de M. D. F.; les précédents en 1989, 1990 et 1991 ayant été rejetés. M. D. F. nous fait une nouvelle demande en date du 20 septembre 1996, soit de bien vouloir le gracier d'un solde d'une première peine de prison, dont il reste deux ans, quatre mois et dix jours à accomplir, et dont la commission de libération conditionnelle a révoqué le sursis. Il requiert également un sursis pour deux nouvelles peines, dont il vient d'écoper, soit huit mois et vingt jours de prison.
Les faits reprochés à M. D. F. sont graves et particulièrement abjects. Ce dernier a escroqué, lors de sa première condamnation, plus de septante personnes de condition modeste : handicapés, personnes âgées, chômeurs, femmes divorcées avec charges de famille, pour mener lui-même un grand train de vie, utilisant pour ce faire un subterfuge méprisant, soit promettre un emploi aux intéressés si ceux-ci versaient de l'argent. Vous avez peut-être le souvenir de cette entreprise : «S.V.P. Madame» qui a fait des ravages dans la République.
M. D. F. a été condamné par défaut, par la Cour d'assises. Il ne s'est pas présenté en 1985 et a écopé de sept ans de réclusion, dont il a accompli les deux tiers. Il en reste donc un tiers. Il avait obtenu le sursis, mais comme il a eu d'autres condamnations, ce dernier est révoqué.
A sa sortie de prison, plutôt que de s'assagir, il recommence de plus belle et persévère dans de nouvelles escroqueries en faisant du commerce avec des voitures et des chevaux. Il est à nouveau condamné à huit mois d'emprisonnement par défaut. Tout récemment, il commet une infraction à la loi fédérale sur la circulation routière en conduisant un véhicule sous défaut d'assurance responsabilité civile.
Dans son préavis le procureur général s'en rapporte à notre Grand Conseil, ce qui n'est pas une référence très utile !
La commission de grâce, à l'unanimité, a jugé, d'une part, que les actes commis étaient particulièrement graves et sans circonstances atténuantes et, d'autre part, que les arguments qui auraient pu justifier une grâce des peines d'emprisonnement, étaient peu convaincants. En définitive, la commission vous recommande le rejet.
Mis aux voix, le préavis de la commission (rejet du recours) est adopté.
M. S. N. , 1955, ex-Yougoslavie, rentier AI, recourt contre le solde de la peine d'expulsion dont l'échéance est fixée en mai 2011.
M. Claude Blanc (PDC), rapporteur. M. S. N. est né en 1955, originaire de l'ex-Yougoslavie. Il est au bénéfice d'une rente AI et d'une rente CNA, marié, deux enfants, éventuellement trois, dont l'aîné, âgé de dix ans, séjournerait illégalement à Genève chez le frère de M. S. N..
M. S. N. a été condamné une première fois en septembre 1993 par le Tribunal de police, à dix-huit mois d'emprisonnement avec sursis et à dix ans d'expulsion ferme pour infraction à la loi fédérale sur les stupéfiants et une deuxième fois, le 2 septembre 1994, par le même tribunal, à quatre ans de réclusion et quinze ans d'expulsion, le premier sursis étant révoqué, pour les mêmes délits.
Sur appel, la Chambre pénale de la cour de justice a ramené la peine à trente mois de réclusion. Le 9 avril 1996, la commission de libération conditionnelle accordait à l'intéressé sa libération pour le 16 mai en refusant de différer l'expulsion judiciaire. Le 3 mai, Me Barillon déposait un recours de droit administratif auprès du Tribunal fédéral contre le refus de différer l'expulsion.
Simultanément, le 6 mai, le même Me Barillon déposait un recours en grâce auprès de notre Grand Conseil, demandant que l'expulsion judiciaire soit assortie du sursis.
Le 30 juillet 1996, le Tribunal fédéral rejetait le recours de M. S. N., considérant que le condamné avait déjà trahi une fois la confiance qui lui avait été accordée en récidivant peu de temps après sa première condamnation. Il a également constaté que la femme et un, ou éventuellement deux de ses enfants, résident au Kosovo, où ils ne sont pas en danger. D'autre part, les rentes AI et CNA sont exportables. Le Tribunal fédéral considère que l'expulsion est la mesure la plus propre à préserver le condamné d'une nouvelle récidive.
A la suite de ce jugement, M. S. N. a été effectivement expulsé de Suisse le 16 août 1996. Le préavis du Parquet est négatif et celui de l'unanimité de la commission de grâce, également.
Mis aux voix, le préavis de la commission (rejet du recours) est adopté.