République et canton de Genève

Grand Conseil

PL 7304-A
8. Rapport de la commission des finances chargée d'étudier le projet de loi du Conseil d'Etat modifiant la loi instaurant des mesures d'encouragement à la retraite anticipée (B 5 16). ( -) PL7304
Mémorial 1995 : Projet, 6012. Commission, 6013.
Rapport de M. Bernard Lescaze (R), commission des finances

A la fin de l'année dernière, le Conseil d'Etat déposait un projet de loi, à propos de l'encouragement à la retraite anticipée, qui n'était en réalité qu'une «modification rédactionnelle permettant d'assurer l'égalité de traitement entre femmes et hommes dont l'âge légal de la retraite est fixé à 62 ans, soit exclusivement le corps enseignant primaire et une partie du personnel manuel des départements des travaux publics et de l'énergie (DTPE) et de l'intérieur, de l'environnement et des affaires régionales (DIEAR)».

En effet, dans l'ancienne version, un homme pouvait toucher une rente temporaire jusqu'à 65 ans, alors que, pour une femme, la rente temporaire s'arrêtait dès l'ouverture du droit à la rente AVS (62 ans), alors même que leur âge légal de retraite était fixé pour l'un et l'autre sexe à 62 ans.

L'acceptation du projet de loi proposé aura pour effet que la rente temporaire ne sera plus servie pour les hommes comme pour les femmes relevant du cas précité à partir de 62 ans.

Le 10 janvier 1996, la commission des finances a entendu le conseiller d'Etat M. Olivier Vodoz et M. Patrick Pettmann, directeur du département des finances. Ils ont souligné que ce projet de loi ajoutait une condition à l'article 3, alinéa 1, permettant de rétablir l'équation résultant du PLEND, soit la proportionnalité entre l'anticipation de l'âge de la retraite et la durée du PLEND. Cette modification rédactionnelle est apportée à la demande du DIP qui avait constaté cette inégalité de traitement entre hommes et femmes.

Certes, au niveau de l'Etat, une clause d'interdiction empêche les bénéficiaires du PLEND de travailler en temporaire dans des organismes étatiques ou paraétatiques. Une liste des personnes au bénéfice du PLEND a été dressée pour pouvoir permettre des contrôles, car si ce phénomène est possible, au sens de la loi, pour le secteur privé, il ne correspond en tout cas pas à l'esprit du PLEND qui représente également un élément de luttre contre le chômage. La commission des finances, ce jour-là, vota une première fois le projet, à l'unanimité des onze membres présents.

Toutefois, des fonctionnaires du secteur manuel ont fait part de leur opposition, en raison de revenus prétendument insuffisants si la modification était adoptée. Ces deux fonctionnaires avaient, en effet, été engagés avant le 1er juillet 1976, soit avant le passage de l'âge légal de la retraite de 62 à 65 ans.

Face à cette situation, la commission a décidé d'auditionner les représentants de l'Intergroupe du personnel manuel de l'Etat, tandis que pour préciser la portée de la modification envisagée, M. Olivier Vodoz, conseiller d'Etat, adressait au président de la commission, M. Daniel Ducommun, en date du 18 mars 1996, une lettre ayant la teneur suivante:

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Dans sa séance du 3 avril 1996, la commission a reçu MM. Thierry Hostettler, Jean Resin et Daniel Sormanni, de l'Intergroupe du personnel manuel de l'Etat. Ces derniers ont souligné que, pour eux, le projet de loi constituait une discrimination entre le personnel manuel engagé avant le 1er juillet 1976 et celui engagé après, puisque les uns peuvent toucher 5 ans de PLEND jusqu'à 62 ans seulement et les autres 5 ans de PLEND jusqu'à 65 ans. Ils ajoutent que 80 à 90% du personnel engagé sous le régime des 62 ans a continué à travailler jusqu'à 65 ans. Or, l'un des objectifs du PLEND était de ne pas créer une situation précaire pour ceux qui souhaitaient le prendre. La modification proposée irait à l'encontre de cet objectif puisqu'elle toucherait surtout les revenus «modestes» de certains fonctionnaires manuels. En conclusion, les représentants de l'Intergroupe déposent auprès de la commission un projet d'amendement éventuel (voir annexe 1).

Dans sa séance du 24 avril 1996, la commission des finances est revenue une dernière fois sur le sujet en présence de M. Olivier Vodoz, conseiller d'Etat, qui a proposé de maintenir le projet de loi sans changement ni amendement, et de M. Patrick Pettmann, directeur au département des finances.

Il est alors précisé par les deux responsables que le projet avait été élaboré en tenant compte d'une information selon laquelle les deux départements concernés, DTPE et DIEAR, n'entendaient plus prolonger les contrats des personnes engagés avant le 1er juillet 1976 au vu de la conjoncture actuelle. Il est vrai que la situation des travailleurs manuels est assez différente de celle des enseignants du primaire, qui doivent quitter impérativement leur poste à 62 ans. Souvent, ces travailleurs manuels n'ont pas encore atteint le maximum du droit à la retraite, ce qui les incite à prolonger leur engagement.

Un fait nouveau est apparu. Les prolongations restent toujours possibles et il suffit de les demander. Dans ces conditions, il est évident que le projet de loi peut être laissé en l'état, la limite d'âge étant en fait de 65 ans pour toutes les personnes du secteur manuel, compte tenu de cette possibilité.

Après enquête, on constate que la quasi-totalité des travailleurs manuels engagés avant le 1er juillet 1976 font la demande d'une prolongation afin d'avoir le plus d'annuités possible. Il s'agit donc de ne pas léser des travailleurs n'atteignant pas des montants de cotisation suffisants.

Le but est d'éviter qu'un travailleur manuel qui arrive à 61 ans et demi touche un PLEND sur 5 ans, mais de confirmer que ceux engagés avant le 1er juillet 1976 peuvent prolonger leur travail jusqu'à 65 ans. L'article 16 du Règlement B 52 mentionne bien cette possibilité. Sur cette base, et moyennant l'accord formel des responsables de personnel concernés, il n'y a plus d'empêchement à voter le projet de loi proposé. Il convient toutefois de mentionner que le revenu des 69 personnes concernées oscille entre 70 000 F et 115 000 F par an.

Prenant acte de ces déclarations, la commission des finances a confirmé, le 24 avril 1996, son vote à l'unanimité en faveur de l'adoption du projet de loi 7304. Elle vous invite, Mesdames et Messieurs les députés, à en faire de même, après avoir pris connaissance, en annexe, des lettres de confirmation de l'accord intervenu signées par les conseillers d'Etat responsables du DTPE et du DIEAR.

Annexes: 1. Projet d'amendement de l'Intergroupe du personnel manuel de l'Etat.

 2. Lettres de MM. Philippe Joye et Claude Haegi, conseillers d'Etat.

ANNEXE 1

ANNEXE 2

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Premier débat

M. Bernard Lescaze (R), rapporteur. Pour rassurer d'avance les députés qui se plaindraient que le personnel n'ait pas été écouté, j'ai joint à mon rapport l'échange intégral des lettres et demandes. Aujourd'hui, je puis dire que les gens que ce projet de loi inquiétait en sont maintenant satisfaits.

M. Bernard Clerc (AdG). Nous avions voté ce projet, parce qu'une solution avait été trouvée en commission. En effet, on nous avait dit que les chefs des deux départements concernés acceptaient que les personnes engagées avant 1976 puissent continuer à travailler jusqu'à l'âge légal de la retraite, pour ne pas être prétéritées.

Nous avons reçu les lettres après avoir voté le projet, ce que M. Lescaze reconnaîtra volontiers. Leur teneur, telle que publiée en pages 10 et 11, diffère de ce que l'on nous a dit en commission, à savoir que les personnes concernées pouvaient continuer à travailler jusqu'à l'âge légal de leur retraite.

Or la lettre de M. Philippe Joye dit textuellement : «Il ne faudrait pas que, suite aux récentes tractations, les collaborateurs concernés donnent une interprétation différente en concluant que ce qui était une faculté deviendrait un droit.» M. Haegi s'exprime de même : «Une poursuite des rapports de service jusqu'à 65 ans est possible, mais n'est pas systématique et ne constitue pas un droit absolu.» Cela veut dire que la promesse d'une retraite normale n'est pas garantie, puisque les chefs des départements pourront décider, si je puis dire, à la tête du client.

Nous serions d'accord de voter ce projet pour autant que nous ayons la garantie formelle que ces personnes, si elles le demandent, puissent continuer à travailler jusqu'à l'âge légal de la retraite.

M. Laurent Moutinot (S). J'abonde dans le sens de M. Clerc.

La législation sur le PLEND est lacunaire. En effet, les soixante-neuf travailleurs manuels engagés avant le 1er juillet 1976 pouvaient, en vertu de l'ancienne législation, bénéficier d'un PLEND de huit ans, alors que celui-ci n'est que de cinq ans.

Il fallait donc corriger cela. Or le projet qui nous est soumis a pour effet de réduire le PLEND à cinq ans et d'introduire une autre lacune, à savoir que ces travailleurs ne peuvent bénéficier du PLEND que de 57 à 62 ans : entre 63 et 65 ans, on ne sait diable de quoi ils vivront !

L'intergroupe des travailleurs manuels, entendu pas la commission des finances, a proposé d'aligner, purement et simplement, le PLEND sur les autres catégories professionnelles, soit sur la durée de 60 à 65 ans. La commission a refusé cette proposition, et vous en avez expliqué la raison, Monsieur le rapporteur : vous avez argué d'un fait nouveau, à savoir que la prolongation de l'engagement, au-delà de 62 ans, était possible pour ces travailleurs.

L'intergroupe des travailleurs manuels en a pris acte, comme l'a dit M. Clerc, mais il faut que cette possibilité soit sérieuse, reconnue, et qu'il n'y ait pas de refus, comme cela a été le cas récemment.

Par conséquent, Monsieur Vodoz, nous ne pouvons accepter ce projet de loi que si vous nous confirmez catégoriquement qu'il ne s'agit pas simplement d'une faculté laissée au bon vouloir des chefs de département, mais véritablement d'une politique qui sera poursuivie dans le sens de la précédente, c'est-à-dire l'acceptation des demandes de prolongation d'engagement de cette catégorie de fonctionnaires qui figurent dans les basses classes salariales de l'Etat, parce qu'exécutant des tâches manuelles.

M. Olivier Vodoz, conseiller d'Etat. J'entends clairement confirmer ici ce que j'ai déclaré, d'une part, à la commission des finances et, d'autre part, ce que j'ai dit à mes collègues, après avoir reçu leurs deux lettres, conformément à ce que j'avais demandé et à ce qui avait été avalisé par la commission.

En d'autres termes, il ne s'agit pas, pour cette petite catégorie du personnel, de refuser - sauf survenue d'un cas de force majeure qui n'aurait rien à faire avec l'âge de 62 ans - la possibilité de prolonger l'engagement jusqu'à l'âge de 65 ans, comme il est d'usage dans les deux départements qui emploient encore des travailleurs manuels.

Par conséquent, j'affirme ici - et je le confirmerai mercredi au Conseil d'Etat - que ces travailleurs bénéficieront de cette prolongation exceptionnelle de 62 à 65 ans, en raison du niveau de leur salaire et de leur entrée dans la fonction publique souvent plus tardive que celle des collaborateurs des autres catégories professionnelles.

M. Laurent Moutinot (S). Monsieur Vodoz, compte tenu des assurances que vous nous donnez, le groupe socialiste votera ce projet de loi.

Ce projet est adopté en trois débats, par article et dans son ensemble.

La loi est ainsi conçue :

LOI

modifiant la loi instaurant des mesures d'encouragementà la retraite anticipée

(B 5 16)

LE GRAND CONSEIL

Décrète ce qui suit:

Article 1

La loi instaurant des mesures d'encouragement à la retraite anticipée, du 15 décembre 1994, est modifiée comme suit:

Art. 3, al. 1 (nouvelle teneur)

Rente temporaire

1 Jusqu'à l'âge où le membre du personnel peut nor-malement prétendre à une rente de l'AVS, mais au maxi-mum pendant une durée égale à la différence entre la date de démission et l'âge légal de retraite fixé par les dispositions statutaires qui lui sont applicables, une rente temporaire égale à 20% du dernier traitement mensuel de base à l'exclusion de toute indemnité peut être versée par l'employeur sous forme mensuelle, dès la fin des rapports de service. Dans tousles cas, la durée du versement de la rente temporaire nepeut excéder 5 ans, à dater de la cessation des rapports de service.

Art. 2

Entrée en vigueur

La présente loi entre en vigueur le 1er janvier 1996.