République et canton de Genève
Grand Conseil
Séance du jeudi 8 juin 1995 à 17h
53e législature - 2e année - 8e session - 27e séance
M 1004
LE GRAND CONSEIL,
considérant :
les études menées depuis 1975 sur le développement du réseau des transports publics;
la votation populaire du 12 juin 1988 sur la loi concrétisant l'initiative pour des transports publics efficaces;
le réseau adopté par le Grand Conseil le 12 février 1993 lors de l'adaptation de la loi sur le réseau des Transports publics genevois (TPG) et figurant au plan annexé à ladite loi;
la demande d'extension de la concession pour le réseau de tramways à cinq sections figurant au plan annexé à la loi précitée adressée à l'office fédéral des transports, à Berne, le 6 décembre 1993 par les TPG;
l'enquête publique portant sur cette demande de concession qui s'est tenue durant le mois de mars de cette année;
le rapport du Conseil d'Etat du 26 avril 1995 sur la mise en oeuvre de la loi sur le réseau des transports publics,
invite le Conseil d'Etat
à orienter les nouvelles études portant sur le futur réseau des TPG dans le sens de donner la priorité à la liaison Cornavin-Meyrin, en se référant, à cette fin, aux études relatives à cette liaison, menées au début des années 1980 dans le cadre du projet de croix ferroviaire envisagé à l'époque, et en tenant compte des réservations faites au profit des transports publics lors des travaux d'aménagement de la rue de la Servette et de la route de Meyrin;
dans l'attente de l'aboutissement de ces études et de l'obtention de la concession d'exploitation de cette future ligne de transport, à engager dès maintenant, c'est-à-dire, comme prévu, la réalisation des étapes d'extension du réseau tramway, telles que décidées par le Grand Conseil dans le plan de réseau annexé à la loi sur les réseaux des transports publics,
à faire rapport au Grand Conseil sur:
le coût total des études consacrées depuis 1975 aux projets de transports publics et plus particulièrement au projet de métro automatique léger et au projet d'extension du réseau tramways tels que retenus dans la loi sur le réseau des transports publics;
les résultats de l'enquête publique portant sur la demande d'extension de la concession de tramways aux 5 sections figurant au plan annexé à la loi sur le réseau des transports publics;
le coût estimé pour la réalisation de chacune de ces cinq sections.
EXPOSÉ DES MOTIFS
C'est en 1974 déjà que le Grand Conseil a exprimé sa volonté de favoriser une utilisation intensive des transports publics et a voté un crédit de 2,5 million de francs portant sur l'étude du futur réseau des TPG, qui devait comporter un développement de l'infrastructure lourde, c'est-à-dire le tramway, afin de répondre, par la mise en place de moyens de transport de grande capacité, à la demande en déplacements et favoriser un véritable transfert modal de l'automobile au profit des transports publics. C'est dès 1978 que les services de l'Etat préconisent la réalisation d'une croix ferroviaire de tramway, sous forme de quatre branches de tram interconnectés et reliant la place Bel-Air à Moillesulaz, Meyrin, Onex et Carouge, ce qui impliquait la réalisation des deux branches de Meyrin et d'Onex. La branche de Meyrin était considérée comme prioritaire compte tenu de l'importance des déplacements entre les deux rives.
Au moment où les études de la croix ferroviaire arrivaient à leur terme, des députés déposèrent en avril 1985 une motion demandant une étude de faisabilité d'un métro automatique léger, laquelle eut pour effet de différer dans le temps la réalisation de l'extension du réseau tramway. Finalement, la réalisation d'un réseau de métro automatique léger se révéla d'un coût insupportable pour le budget de l'Etat, ce qui amena le Conseil d'Etat à recommander, dans le cadre du futur réseau d'infrastructure lourde des TPG, la réalisation d'une seule ligne de métro, celle de Rive-Cornavin-Meyrin, réalisable en deux étapes, complétée de la nouvelle ligne de tram 13 avec ses prolongements par étapes en direction de Sécheron et de Lancy, option approuvée par le Grand Conseil dans le cadre de la loi du 12 février 1993 et qui est matérialisée dans le plan annexé à ladite loi.
Cette décision a été concrétisée par une demande de concession adressée le 6 décembre 1993 par les transports publics genevois à l'office fédéral des transports et mise à l'enquête publique durant le mois de mars 1995, laquelle porte sur cinq sections du réseau tramway adopté par le Grand Conseil, à savoir:
la section «Stand» entre le boulevard Georges-Favon et la rue de la Corraterie;
la section «Acacias» entre Plainpalais et la rampe du Pont-Rouge;
la section «Grand Lancy» entre la rampe du Pont-Rouge et le chemin des Palettes;
la section «Palettes» entre le Bachet-de-Pesay et le chemin des Palettes;
la section «Sécheron» entre Cornavin et la place des Nations.
Aujourd'hui, on apprend, dans le rapport du Conseil d'Etat relatif à la réalisation du futur réseau d'infrastructure lourde des TPG, que celui-ci s'est reconverti, pour des raisons de coût, au tramway ce dont on peut se féliciter quoiqu'on doive constater qu'il est prêt à investir un milliard de francs pour la traversée de la rade et sa liaison avec la Route Blanche, mais qu'il n'est pas d'accord d'investir une telle somme dans une ligne de métro moderne et performante qui devait constituer, selon son propre aveu, l'ossature de base du futur réseau des TPG.
Retour 20 ans en arrière !
En effet, le rapport précité indique qu'au lieu de poursuivre l'étude de la ligne de métro décidée par le Grand Conseil, le Conseil d'Etat veut y renoncer au profit d'un autre projet, qui ne figure pas dans le plan adopté par le Grand Conseil le 12 février 1993 tel qu'annexé à la loi sur le réseau des transports publics. Le Conseil d'Etat en revient, en fait, à la branche de Meyrin de la croix ferroviaire de tramway proposée il y a 20 ans en arrière et qui avait été tant décriée par certains.
A part le temps énorme qui a été perdu entre-temps et surtout les millions dépensés en pure perte pour le projet de métro automatique léger, il faut relever que le Conseil d'Etat recommande de réaliser sa nouvelle ligne de transports en partant d'Annemasse, ce qui nécessitera beaucoup de temps en raison des accords compliqués à négocier avec la France. Mais surtout, il prévoit, en deuxième étape seulement, la liaison Cornavin-Meyrin, alors que depuis 20 ans tous les spécialistes s'accordent à dire que la priorité sur le plan du développement des transports publics est de mettre en place un moyen de transport rapide et de grande capacité entre Meyrin, Cornavin et le centre-ville. Cette priorité est devenue plus évidente que jamais, dans la mesure où les autobus reliant Meyrin au centre-ville sont tellement bondés aux heures de pointe que certains passagers ne peuvent y monter et restent sur le trottoir malgré des fréquences de bus toutes les 3 minutes et la présence de bus accélérés.
En procédant à un dédoublement coûteux de la ligne 12 à partir de la gare des Eaux-Vives, le Conseil d'Etat reporte à nouveau la création d'un moyen de transport efficace et de grande capacité là où le besoin se fait le plus sentir, ce qui est grave.
Abandon du projet d'extension de la ligne de tram 13
Mais plus grave encore, c'est le renvoi aux calendes grecques des projets d'extension de ligne de tram 13 dont les plans sont prêts depuis 18 mois et dont les diverses étapes devaient, selon la programmation retenue, être réalisées successivement dès l'achèvement des travaux de la ligne de tram 13 qui va être inaugurée le 27 mai prochain.
Cette décision est inconcevable. Non seulement la justification de la ligne 13 et de l'important investissement consenti est remise en cause, alors que le Conseil d'Etat dans un souci de cohérence avait conditionné sa réalisation à sa prolongation par les deux branches complémentaires des Acacias et de Sécheron avec des parkings d'échange à leur extrémité, mais c'est tout le développement de l'infrastructure lourde des TPG, attendue depuis 20 ans, qui est remise en cause.
Cette remise en cause est inadmissible et bafoue la volonté populaire exprimée massivement lors de la votation du 12 juin 1998. Il est, par ailleurs, injustifiable d'abandonner au profit d'un nouveau projet, encore au stade d'ébauche, la réalisation d'une extension du réseau tramway, dont les études ont été très coûteuses, dont les plans sont prêts et dont l'exécution par étapes a été conçue de manière à entraîner un investissement annuel modéré à la mesure des moyens financiers de notre canton, soit environ 15 millions de francs par année contre 50 millions de francs par année pour l'évitement autoroutier de Plan-les-Ouates.
Le nouveau projet du Conseil d'Etat est non seulement d'un coût très onéreux, ce qui risque de le faire échouer au détriment du projet actuel, mais son étude et surtout son aboutissement demanderont encore de nombreuses années. Enfin, le tracé de cette nouvelle ligne destinée à relier Annemasse à la gare Cornavin est tout sauf attractif avec son détour par le pont de la Coulouvrenière. Ce tracé ne tient pas compte du projet élaboré par le département des travaux publics en 1987, à la suite des critiques quant au concept de la croix ferroviaire et de son noeud central à Bel-Air, projet qui proposait de réaliser une liaison directe du tram 12 avec la gare Cornavin et la rive droite du lac par une déviation de cette ligne à Longemalle, afin d'emprunter le pont du Mont-Blanc et monter ensuite directement par la rue de la Servette en direction de Meyrin. Le «chemin des écoliers» retenu par le Conseil d'Etat démontre qu'il n'est pas prêt à favoriser les transports collectifs pour les rendre véritablement attractifs. Ce n'est pas en proposant des détours, et surtout de cette importance, aux transports publics que l'on va inciter la population à les utiliser de manière intensive pour de longs trajets, ce qui est pourtant le but du développement des TPG.
C'est aujourd'hui que la réalisation tant attendue du réseau des TPG, qui a fait l'objet de longs débats au Grand Conseil et d'un consensus général, doit être poursuivie par étapes selon la volonté clairement exprimée par le peuple dont la volonté a été concrétisée par le Grand Conseil. En proposant un nouveau projet et en engageant de nouvelles études, le Conseil d'Etat démontre qu'il veut en fait différer une nouvelle fois la poursuite de la réalisation du réseau de tramway décidée par le Grand Conseil.
Le Conseil d'Etat marque clairement sa volonté d'arrêter le développement des transports publics au profit de celui du réseau routier, qui a été très largement privilégié ces dernières années (notamment avec la réalisation de l'autoroute de contournement ainsi qu'une série d'autres aménagements routiers) et qui continue à être privilégié avec l'accélération du chantier de l'évitement autoroutier de Plan-les-Ouates, la prolongation non urgente de l'avenue de Lect à Meyrin (20 millions de francs) et surtout le projet hors de prix de la traversée de la rade (un milliard de francs). Il n'est dès lors pas étonnant qu'il ne reste plus d'argent pour le développement du réseau des transports publics et que le Conseil d'Etat, qui se trouve dans l'impasse, veuille engager de nouvelles et longues études pour éviter de devoir réaliser ce qui a été décidé et qui, en ce qui concerne le réseau tramway, est d'un coût bien plus modéré que les projets routiers.
Cette politique va à l'encontre de toutes les décisions prises ces 20 dernières années par le Grand Conseil qui sont rappelées dans le résumé ci-annexé. Le Conseil d'Etat est expressément invité à revoir sa position et à continuer à exécuter l'extension de réseau tramway, conformément aux décisions prises par le Grand Conseil.
ANNEXE
Rappel des études réalisées depuis 1970
1970: mise à l'étude du plan directeur des transports publics
C'est le 30 novembre 1970 que le Conseil d'Etat, suite aux préoccupations du Grand Conseil sur les problèmes de circulation à Genève, décida de créer un groupe interdépartemental chargé de l'élaboration d'un plan directeur des transports. Il s'agissait, par l'établissement d'un tel plan, de «définir une politique des transports adaptée aux aspirations légitimes de la collectivité, aux techniques nouvelles, aux moyens financiers et, en tenant compte de l'économie générale et des dispositions légales, de fixer des objectifs précis».
Le 6 avril 1973, le Grand Conseil était saisi par le Conseil d'Etat d'un projet de loi portant sur une demande de crédit de 2,5 millions de francs pour l'élaboration d'un plan directeur des transports. Le rapport de la commission de développement du canton, à laquelle ce projet avait été renvoyé, fut débattu lors de la séance du Grand Conseil du 14 novembre 1974. Ce rapport indiquait que «d'emblée, les députés ont souhaité que l'hypothèse de travail fondamentale soit l'utilisation intensive des transports publics».
Au vu de l'importance accordée à cet objectif et des divergences de vues à ce propos entre les députés et le Conseil d'Etat, les députés ont exprimé le désir de «pouvoir discuter avec le Conseil d'Etat des choix qu'il allait être appelé à faire au cours de l'étude», en précisant à ce sujet que «l'Etat sera appelé à prendre un certain nombre de dispositions et de choix; des options importantes seront à prendre et les députés veulent y être associés».
Cette volonté a été confirmée par l'adjonction d'un article 3 au projet de loi voté le 14 novembre 1974 disposant qu'«au terme de chaque phase de l'étude appelant une option fondamentale, le Conseil d'Etat adresse un rapport au Grand Conseil».
1978: la proposition d'une croix ferroviaire tramway
Le premier rapport du Conseil d'Etat portant sur la première phase d'étude du plan directeur des transports fut présenté au Grand Conseil lors de sa séance du 24 février 1978. Ce rapport concluait sur la nécessité de développer les TPG, qu'«une amélioration de matériel et des lignes s'impose», qu'«il est indispensable que les TPG se dotent d'un organisme de planification et introduisent la gestion centralisée de leur trafic».
Lors de l'examen de ce rapport en commission, le département des travaux publics présenta la phase II de l'étude du plan directeur des transports comportant deux rapports intermédiaires. Le deuxième portait notamment sur quatre variantes de développement du réseau des TPG, dont celle d'une croix ferroviaire de tramway comportant à partir de la place Bel-Air deux nouvelles lignes de tram reliant Meyrin et Onex, qui devaient être connectées à la ligne de tram 12 dans le but de réaliser des liaisons directes et sans transbordement entre la rive gauche et la rive droite du lac afin de répondre aux besoins prioritaires sur le plan des transports.
Dans son rapport approuvé lors de la séance du Grand Conseil du 15 juin 1979, la commission du développement concluait à l'approbation des divers principes de politique générale des transports proposés par le Conseil d'Etat et demandait en particulier, en ce qui concerne le schéma des transports publics, la poursuite d'«une étude comparative des quatre variantes de réseaux des TPG suivantes:
a) maintien du réseau actuel;
b) réorganisation du réseau actuel;
c) réorganisation et extension du réseau actuel;
d) réorganisation, restructuration et développement du réseau, notamment concept en forme de croix ferroviaire.»
1981: les projets d'extension du réseau tramway
Le Conseil d'Etat présenta, lors de la séance du Grand Conseil du 16 janvier 1981, son deuxième rapport consacré à l'avancement des études du plan directeur des transports, lequel portait sur la deuxième phase d'étude matérialisée par un volumineux rapport technique intitulé rapport intermédiaire no 3. La partie du rapport d'accompagnement du Conseil d'Etat consacré au réseau des TPG relève que ce «volet de l'étude, que nous considérons comme le plus important du plan, présente les comparaisons des variantes envisageables pour l'organisation du réseau des TPG à l'horizon 1990». Le Conseil d'Etat met en avant, dans ce cadre, la prolongation de la ligne de tram 12 jusqu'au Bachet-de-Pesay à court terme et la réalisation des branches vers Meyrin et Onex, le Conseil d'Etat précisant que celle «vers Meyrin devrait être entreprise en premier, afin de mieux équilibrer le réseau». Le rapport intermédiaire no 3 préconisait notamment d'entreprendre des études complémentaires de faisabilité pour une croix ferroviaire et le Conseil d'Etat concluait son rapport au Grand Conseil en insistant sur le fait que «des décisions de principe sont nécessaires, afin que dans la phase III du plan il soit procédé à la mise au point de la variante choisie».
La commission de développement n'ayant pas réussi à terminer l'étude du rapport du Conseil d'Etat avant la fin de la législature, elle décida de présenter au Grand Conseil un rapport intermédiaire portant uniquement sur le choix de la variante de réseau des TPG considérant que c'était la question la plus urgente à trancher pour que les TPG puissent aller de l'avant avec l'adaptation de ce réseau. Le Grand Conseil approuva, lors de sa séance du 9 octobre 1981, les conclusions du rapport de la commission de développement du canton traitant la partie du rapport intermédiaire no 3 consacrée au développement du réseau des TPG et qui recommandait de retenir la variante «1 D adaptée» portant sur la réorganisation du réseau des TPG de l'époque, variante permettant «une évolution aisée du réseau des TPG avec de nouvelles lignes de tram si le Grand Conseil en décide ainsi».
1984: dépôt de l'initiative «pour des transports publics efficaces»
Suite à cette décision du Grand Conseil, le Conseil d'Etat avait chargé le département des travaux publics de conduire l'étude de faisabilité du projet de croix ferroviaire qui était en cours lorsqu'un groupe de citoyens, proclamant leur volonté de rattraper le retard pris depuis 20 ans par les TPG, décida de lancer une initiative populaire «pour des transports publics efficaces». Cette initiative préconisait une série de mesures destinées à favoriser le développement des TPG dont l'adoption d'un réseau réalisable à l'horizon de l'an 2000 comportant notamment la réalisation de la croix ferroviaire sous forme d'une liaison par tramway sur les axes Palettes - Carouge - Bel-Air - Meyrin et Moillesulaz - Bel-Air - Onex. L'initiative avait pour but de faire aboutir ce projet envisagé depuis 1978 et sur lequel le Grand Conseil allait devoir se prononcer sur la base de l'étude de faisabilité en cours.
1985: demande d'étude d'un métro automatique léger
Cette initiative, à l'ordre du jour de la séance du Grand Conseil du 15 mars 1984, fut renvoyée à la commission des TPG. Cette commission, à l'occasion de l'examen de cette initiative, fut sensibilisée par un nouveau mode de transport: le métro automatique léger (VAL) fonctionnant dans la ville de Lille et proposa au Grand Conseil d'adopter une motion demandant une étude de faisabilité et de coût de la réalisation d'un métro à guidage automatique, parallèlement à celle de la croix ferroviaire, motion qui fut renvoyée au Conseil d'Etat lors de la séance du Grand Conseil du 18 avril 1985.
Fin 1985: projet de croix ferroviaire tramway
Peu de temps après, le Conseil d'Etat présenta, lors de la séance du Grand Conseil du 1er novembre 1985, son 3e rapport consacré à l'avancement des études du plan directeur des transports, lequel portait sur des compléments au rapport intermédiaire no 3 de la deuxième phase d'étude du plan directeur des transports. Le rapport était, pour l'essentiel, consacré à l'étude de faisabilité de la croix ferroviaire, notamment des 3 variantes envisagées au centre-ville pour la branche de Meyrin et les deux variantes retenues pour celle d'Onex. Les conclusions du Conseil d'Etat relatives à la croix ferroviaire étaient réservées, en ce sens qu'il considérait que l'attractivité du projet n'était pas suffisante en raison de l'exiguïté des voiries dans le secteur Bel-Air - Saint-Gervais et la concentration en un seul endroit (Bel-Air) de l'interconnexion des lignes de tram. Il demandait à poursuivre les études avant de prendre une décision définitive. Quant au métro automatique léger, le Conseil d'Etat, qui n'avait pas encore pu mener l'étude de faisabilité demandée, fit part, dans les conclusions de son rapport, de son appréciation selon laquelle «un tel mode de transport risque d'être d'un coût disproportionné par rapport aux moyens financiers de notre canton».
Lors de la séance du 1er octobre 1987 du Grand Conseil, le Conseil d'Etat présente son rapport sur la motion demandant une étude faisabilité et du coût de réalisation d'un métro à guidage automatique. Le rapport est positif et l'étude fait l'objet d'une présentation devant les députés par les mandataires chargés de mener celle-ci. Les députés approuvent la conclusion que l'étude doit être poursuivie.
1988: la loi sur le réseau des transports publics est approuvée par le peuple
Lors de sa séance du 17 mars 1988, le Grand Conseil approuve le contre-projet que la commission des TPG proposa d'opposer à l'initiative populaire pour des transports publics efficaces. Etant donné que la commission des TPG s'était divisée entre partisans du tram et partisans du métro et que cette guerre des tranchées risquait de compromettre le succès de l'initiative, alors qu'une majorité de la commission était favorable sur le principe du développement des transports publics, la majorité préféra reporter le choix entre ces deux modes de transports à plus tard et adopta un contreprojet à l'initiative sous forme d'une loi qui se bornait à formuler un certain nombre d'objectifs à atteindre avec le développement des transports publics à l'horizon de l'an 2000 avec l'obligation pour le Conseil d'Etat d'adopter en 1989 au plus tard un plan directeur du réseau pour l'horizon 1992-1994 et en 1991, au plus tard, le plan directeur du réseau comprenant le choix du projet retenu pour le développement des transports publics, c'est-à-dire le choix entre le tram et le métro automatique léger.
Cette loi sur le réseau des TPG fut approuvée en votation populaire du 12 juin 1988 à une majorité de près de 80% des votants.
Le soir de la votation, le Conseil d'Etat annonça qu'il recommandait, sur la base des études qui avaient été poursuivies entre-temps, un réseau de transports publics comportant un réseau RER pour les transports régionaux et un réseau métro pour le trafic urbain, complété de lignes de rabattement dont une partie seraient réalisées sous forme d'une extension du réseau tramway. Le Conseil d'Etat voulait mettre fin à la «guerre des tranchées» qui s'était déclenchée entre les partisans du métro automatique léger (majoritaires à l'époque au Grand Conseil) et les partisans du tramway, ce qui risquait de bloquer tout le processus de développement du réseau des TPG. Il misait, en conséquence, sur la complémentarité des trois réseaux étudiés.
1992: plan du réseau horizon 2000-2005
Le Conseil d'Etat poursuivit les études dans ce sens, adopta le 31 janvier 1990 le plan directeur du réseau des TPG 1990-1994 et présenta des rapports successifs sur le projet du futur réseau, devenu le réseau horizon an 2000-2005. Le rapport final porté à l'ordre du jour du Grand Conseil du 18 juin 1992 recommande l'adoption d'un «réseau de base pour les transports publics de l'agglomération, réalisable à l'horizon 2000-2005, soit une échéance appréhendable, qui comprend:
une infrastructure lourde associant:
un métro automatique léger reliant le centre-ville (Rive) à Meyrin, avec un prolongement ultérieur vers l'hôpital cantonal et au-delà;
le réseau de quatre lignes de tramway déjà prévues par le plan directeur des transports publics 1990-1994, et dont la réalisation va au-delà de 1995;
une infrastructure légère adaptée de lignes de véhicules sur pneus.
Ce rapport indiquait que le Conseil d'Etat ne faisait pas de propositions pour un réseau RER, vu le coût de celui-ci à la charge du canton, et comportait un projet de loi modifiant et complémentant la loi sur le réseau des transports publics approuvé en votation populaire.
1993: le réseau futur des transports publics est enfin adopté
Le 12 février 1993 le Grand Conseil approuva ce projet de loi et adopta ainsi le nouveau réseau des transports publics prévoyant la réalisation, matérialisée par un plan annexé à la loi:
d'une ligne de métro Rive-Meyrin réalisée en deux étapes, la première reliant Rive à Cornavin;
d'une extension du réseau tramway avec la ligne 13 reliant le rond-point de Plainpalais à Cornavin avec des étapes ultérieures successives en direction de Sécheron (branche Sécheron) et Lancy (branche Acacias), y compris la liaison entre les Palettes et le Bachet-de-Pesay. Une liaison entre Bel-Air et le pont de la Coulouvrenière était également prévue afin d'assurer la jonction entre la ligne 12 et la ligne 13 à partir de Bel-Air.
L'article 4 de la loi prévoit que le Conseil d'Etat présente tous les deux ans au Grand Conseil un rapport sur l'état d'avancement de la réalisation des infrastructures prévues par la loi et la prochaine étape de réalisation ainsi que les modalités de financement des infrastructures.
L'article 9 de la loi dispose que le financement des infrastructures nouvelles de métro et de tramway est assuré notamment par une participation de l'Etat inscrite au budget de l'Etat jusqu'à concurrence de 30 millions de francs par an.
Le chantier de la ligne de tram 13 fut ouvert durant le premier semestre de l'année 1993, au courant de laquelle le plan général de la ligne de métro Rive-Meyrin fut mis à l'enquête publique. Début décembre 1993, le projet d'extension du réseau tram, dont les plans étaient achevés, et la demande de concession y relative, fut adressé à l'office fédéral des transports pour sa mise à l'enquête publique, qui ne fut ouverte qu'au mois de mars 1995.
1995: le Conseil d'Etat remet en cause 20 ans de travail !
C'est à ce moment-là que le Conseil d'Etat a remis aux députés un rapport succinct portant sur un nouveau projet de «métro léger transfrontalier» à voie métrique visant à relier l'agglomération d'Annemasse, Genève et le pays de Gex. Du dossier, il résulte qu'il ne s'agit nullement d'un métro, qui exige un site propre intégral, mais d'un tramway qui relierait Annemasse à la gare des Eaux-Vives en empruntant la voie de chemin de fer existante, avant de se raccorder à la ligne de tram 12 jusqu'à Bel-Air et grâce à la future liaison avec le pont de la Coulouvrenière rejoindre la gare de Cornavin par la ligne de tram 13. Une seconde étape prévoit la réalisation d'une ligne de tram en direction de Meyrin, puis ultérieurement vers Saint-Genis.
Cette ligne de tramway remplacerait la ligne de métro prévue entre Rive et Meyrin. Elle implique une convention internationale entre la Suisse et la France, complétée d'un accord tripartite entre les autorités locales concernées et les TPG, en tant qu'exploitants de la future ligne transfrontalière. Un accord devra être trouvé sur le choix du matériel et surtout les études du tracé de cette nouvelle ligne entre Cornavin et Meyrin devront être entreprises.
Dans son rapport du 26 avril 1995 sur la mise en oeuvre de la loi sur le réseau des transports publics, qui aurait dû être consacré d'après l'article 6 de loi sur le réseau des transports publics à l'état d'avancement des futures lignes de métro et de tramway, le Conseil d'Etat, après avoir évoqué un certain nombre d'adaptations du réseau d'infrastructure légère, aborde les études de l'infrastructure lourde en évoquant en deux pages seulement le projet de métro franco-genevois pour lequel il a donné sa préférence. Il annonce qu'il proposera au Grand Conseil de renoncer en conséquence au projet de métro automatique léger et de modifier la loi sur le réseau des transports publics et le plan annexé dans ce sens.
En ce qui concerne des lignes de tramway, également évoquée en deux pages seulement dans ce rapport le Conseil d'Etat indique qu'il entend, pour le moment, réaliser uniquement la petite liaison entre Bel-Air et le pont de la Coulouvrenière par la rue du Stand ainsi que le prolongement de la ligne de tram 12 depuis le Bachet-de-Pesay aux Palettes, programmée depuis 10 ans et dont la réalisation, différée depuis 5 ans, est liée aux travaux d'évitement autoroutier de Plan-les-Ouates actuellement en cours. En ce qui concerne les trois autres lignes de tram correspondant à la prolongation de la ligne de tram 13 en direction de Sécheron, d'une part, et des Acacias, puis de Lancy, d'autre part, le Conseil d'Etat indique qu'«elles ne devraient être exploitées qu'après la mise en service du métro entre Annemasse et Meyrin, selon un calendrier et des modalités d'exploitation qu'il est prématuré d'esquisser aujourd'hui».
ANNEXE
feuille A4
Plan A4
Débat
M. Christian Grobet (AdG). Lors de la dernière séance du Grand Conseil, nous avons évoqué le rapport du Conseil d'Etat portant sur le développement du réseau des transports publics genevois. Ce rapport mentionnait notamment la recommandation du Conseil d'Etat d'abandonner le projet d'un métro automatique au profit d'un nouveau projet, le métro léger, pour relier Annemasse à la gare de Cornavin, dans un premier temps, la gare de Cornavin à Meyrin, dans un deuxième temps.
Ce rapport a déjà fait l'objet d'une première séance de la commission des transports où, d'emblée, les difficultés inhérentes à ce nouveau projet sont apparues. L'opportunité de réaliser en priorité un doublet du tram 12, alors que d'autres besoins en transports publics ne sont pas satisfaits, a également été évoquée.
Il est évident que la mise au point du projet, envisagé aujourd'hui par le Conseil d'Etat, prendra de nombreuses années. Il y aura un grand nombre de difficultés à surmonter. Les oppositions les plus diverses se manifesteront. De plus, il faut savoir que la procédure d'obtention d'une concession fédérale est particulièrement longue. J'en veux pour preuve que la demande de concession pour l'extension du réseau tramway, faite sur la base d'un dossier très élaboré et déposée par les TPG le 8 décembre 1993, a été étudiée pendant plus de quinze mois par les autorités fédérales. Et comme M. Stucki l'a relevé, les autorités fédérales ont demandé des adaptations avant que cette demande de concession ne soit mise à l'enquête publique dans le courant du mois de mars.
Dès lors, il est indispensable que le projet d'extension du réseau du tram 13 soit réalisé prioritairement, tel qu'il a été étudié et mis au point, et tel qu'il a fait l'objet de la demande de concession précitée. Il est incompréhensible que le Conseil d'Etat veuille reporter la réalisation de l'extension de la ligne 13, dont la première étape vient d'être inaugurée avec un magnifique succès, à l'échéance de la mise en service de la deuxième étape du projet de métro léger Annemasse-Meyrin. Autant dire que c'est reporter cette extension à dix ans, voire aux calendes grecques !
Or, quand le projet de la ligne du tram 13 entre le Rond-Point de Plainpalais et Cornavin a été élaboré, le Conseil d'Etat avait considéré, fort justement, que cet investissement ne se justifiait que dans la mesure où cette ligne 13 était prolongée, d'une part, en direction de Sécheron, c'est-à-dire à l'aboutissement de l'autoroute Lausanne-Genève, à l'entrée est de Genève, et, d'autre part, jusqu'aux Acacias, à savoir au débouché de l'autoroute de contournement sur la route des Jeunes.
Le Conseil d'Etat avait même demandé que ces deux branches supplémentaires soient complétées, à Sécheron et aux Acacias, par deux parkings d'échange.
L'autoroute de contournement, avec l'évitement de Plan-les-Ouates, sera définitivement achevée d'ici deux ou trois ans. Dès lors, un flot important de voitures se déversera, via la route des Jeunes, sur la route des Acacias et au quartier de la Jonction, où les entrées de la ville sont déjà engorgées. Par voie de conséquence, il est urgent que soit réalisé le complément indispensable à l'autoroute de contournement, à savoir le tram - ce moyen de transport enfin reconnu pour sa performance ! - afin de rendre possibles les déplacements jusqu'au centre-ville.
Le but de cette motion vise à ce que les promesses faites à l'époque soient tenues. A cet égard, je souligne que les extensions du tram 13 en direction de Sécheron et des Acacias avaient bel et bien été programmées, contrairement à ce qu'a déclaré M. Stucki, directeur des TPG, devant la commission des TPG. Il semble avoir oublié que le Conseil d'Etat les avait intégrées dans le plan directeur des transports publics pour la période 1990-1994. Il faut dire que l'on espérait, à l'époque, que le chantier de la ligne 13 s'ouvrirait en 1991 et non en 1993. C'est d'ailleurs en raison de ce retard de deux ans, dû aux problèmes liés à l'obtention de la concession, que le chantier de ces deux branches n'a pas pu être ouvert dans le cadre du plan directeur des transports publics 1990-1994.
Toujours est-il que le Grand Conseil lui-même, dans la loi du 12 février 1993, a adopté le plan d'extension du réseau tramway, dont les branches Acacias et Sécheron, tel qu'il figure sur le plan annexé à la loi.
Nous vous demandons, par conséquent, de bien vouloir renvoyer cette motion en commission pour qu'elle soit traitée simultanément avec le rapport du Conseil d'Etat, relatif à l'extension du réseau tramway, et pour que les engagements pris et la volonté exprimée par ce Grand Conseil dans la loi du 12 février 1993 soient respectés.
M. Philippe Joye. Je réponds aux invites de cette proposition de motion 1004 qui, évidemment, sera renvoyée en commission.
1) La première invite et notre choix du premier tronçon de métro léger.
Pourquoi avons-nous choisi, pour ce premier tronçon, le trajet Cornavin-Annemasse ? Ce choix a été dicté par l'idée de montrer au plus vite un résultat tangible de la politique des transports. Ce passage était relativement facile à réaliser, parce que disposant d'un tracé prêt à recevoir une infrastructure ferroviaire nouvelle. Les comptages ont permis de recenser cent mille passages quotidiens de la frontière à Fossard-Mon Idée, dont la moitié hors des heures de pointe. Cela prouve l'existence d'une demande importante pour ce tronçon.
2) La deuxième invite et l'extension du réseau tramway.
Je vous donne l'état exact des demandes. Les procédures d'obtention de la concession fédérale sont en cours pour les cinq sections suivantes : Stand, Acacias, Grand-Lancy, Palettes et Sécheron. La priorité est donnée à la réalisation des sections Stand et Palettes, le reste suivra et la liaison Cornavin-Meyrin également. Il n'y a pas d'interruption prévue dans les processus de demandes de concessions. Il est normal de terminer le réseau de la rive gauche et de poursuivre, comme cela vient d'être dit, vers Sécheron et Stand.
3) Pour ce qui est de la troisième invite, mon département a pu fournir les ordres de grandeur suivants pour ce qui est du coût des études consacrées au projet des transports publics : 800 000 F en 1985, pour les trams de la croix ferroviaire; 800 000 F en 1987, pour l'étude d'opportunité et de faisabilité d'un métro automatique léger; 13 800 000 F de 1989 à 1994, pour les études TC 2000, soit environ 15 400 000 F. Les études TC 2000 comprennent notamment les études du réseau ferroviaire, ainsi que les études de la ligne du tram 13. Ces dernières, comme on le sait, ont été concrétisées.
4) La quatrième invite et les résultats de l'enquête publique.
L'Office fédéral des transports a délégué l'office des transports et de la circulation pour mener l'enquête publique portant sur la demande d'extension de la concession de tramways aux cinq sections figurant au plan annexé à la loi sur le réseau des transports publics. Les remarques, les questions et les oppositions formulées dans le cadre de l'enquête publique seront publiées et pourront faire l'objet d'un débat dès qu'elles auront été traitées.
5) Je conclus en répondant à la dernière invite.
Dans la demande de concession déposée en 1993, le coût estimé à la charge de l'Etat pour la réalisation des cinq sections était de 155 millions, celui de la réalisation des deux prochaines sections, Stand et Palettes, se montant à 15 millions par an.
Je vous serais reconnaissant de renvoyer la motion en commission, parce que l'on pourra y discuter, sereinement et techniquement, de tous les problèmes.
M. Hervé Dessimoz (R). La motion de l'Alliance de gauche me semble superfétatoire sur le fond, du fait qu'une majorité de ce parlement, lors de la dernière session, a renvoyé le rapport du Conseil d'Etat en commission pour y discuter des options prises par le gouvernement.
Par conséquent, j'estime que cette motion est inutile.
Néanmoins, après avoir écouté M. Grobet, je tiens à rappeler certaines choses, puisque je présidais la commission des transports pendant le débat sur la loi des transports.
La ligne 13 a fait l'objet d'une négociation très serrée entre les commissaires et le Conseil d'Etat pour que soit garantie la réalisation du métro automatique léger. Nous avions ainsi négocié une priorité avec la réalisation, d'abord, de la ligne 13, puis avec celle de la première étape Cornavin-Rive du métro. M. Grobet lui-même, en tant que président du département des travaux publics, était venu déposer devant la commission sur ce projet.
Les étapes d'extension Cornavin-Meyrin et les étapes de l'extension de la ligne 13 étaient prévues à l'échéance de 2005. Personnellement, je suis très à l'aise, Monsieur Grobet, par rapport à ce problème, puisque dans un article écrit le 3 juin 1993, je disais ceci : «A propos du métro, le coût des deux étapes est à peu près similaire, malgré les longueurs de dessertes très différentes, tout simplement par le fait que l'étape Cornavin-Rive doit passer sous le lac et sous les rues de Genève. La densité des liaisons transport public au centre-ville nous permet d'imaginer que la liaison Cornavin-Rive puisse être exécutée en deuxième étape. La liaison entre la ville de Meyrin et la gare de Cornavin, passant par l'aéroport de Cointrin, posant moins de difficultés techniques, constituant un segment plus spectaculaire du réseau, devrait sensibiliser plus de monde à utiliser régulièrement les transports publics.». Je concluais en disant que cette liaison, en première étape, constituerait également un service appréciable pour la commune de Meyrin, qui compte plus de vingt mille habitants. Et en cela, je ne suis pas tout à fait d'accord avec le conseiller d'Etat Philippe Joye, quand il estime que la priorité est sur la rive gauche, plutôt bien desservie avec la ligne du tram 12.
La motion, du fait qu'elle reprend des arguments que nous avions à l'époque défendus en commission, mérite d'y être renvoyée, mais je pars du principe que, sur la base du rapport du Conseil d'Etat, on pouvait entamer la discussion sans la porter, ce soir, au niveau du parlement.
M. Chaïm Nissim (Ve). Après avoir lu ce projet de motion, j'ai relu le rapport du mois dernier, le RD 240. En les comparant, j'ai été très frappé par le fait que nous nous apprêtons peut-être à dépenser un milliard pour construire la traversée de la rade. Or, ce milliard pèse de tout son poids sur les décisions que nous prenons en ce moment, concernant les transports publics. Je ne doute pas que le Conseil d'Etat est convaincu que le tronçon Cornavin-Meyrin est tout aussi urgent, sinon plus, que le tronçon qu'il s'apprête à construire en premier. Malheureusement, il est beaucoup plus cher. Il revient à 325 millions au lieu des 125 millions du tronçon Cornavin-Annemasse qui, lui, comporte déjà la voie de la micheline.
Je pense que, par manque d'argent, l'on prend des décisions pas forcément intelligentes, à long terme, pour le développement des transports publics. Il en est de même, à mon avis, pour les développements de la ligne 13. Il est urgent, et tout le monde sera d'accord dans ce Grand Conseil, de la prolonger jusqu'aux Palettes, d'un côté, et jusqu'à la place des Nations, de l'autre. Mais là encore, on manque d'argent, parce que l'on s'apprête à dépenser peut-être un milliard pour la traversée de la rade.
Je voudrais donc lancer un appel pour que cette votation ait lieu le plus vite possible, afin que nous sachions enfin si nous allons dépenser ce milliard ou pas. Dans la négative, et c'est évidemment le souhait des écologistes, nous aurions de l'argent pour prolonger la ligne du tram 13 et pour construire les tronçons les plus urgents du métro transfrontalier léger.
M. Michel Balestra (L). Cette motion est plutôt bien faite, plutôt exhaustive. Je ne dirais pas qu'elle est neutre dans ses objectifs, mais elle présente l'avantage de donner un support cohérent de discussion dans le cadre de la commission des transports, et ce en parallèle avec le rapport du Conseil d'Etat.
Vous vous souviendrez que je n'étais pas favorable au renvoi du rapport du Conseil d'Etat à la commission des transports. En revanche, mon groupe et moi le sommes pour cette motion, pour la bonne et simple raison que nous pourrons discuter d'options plus tranchées et plus fondamentales.
Toutefois, l'on y perçoit un procès d'intention au Conseil d'Etat. C'est dommage, parce qu'il fait bien son travail. Mais c'est la tâche de l'opposition de présenter des propositions différentes de celles du gouvernement en place. Il est regrettable que dans un exposé des motifs si exhaustif sur l'histoire, sur l'aventure, sur le périple du développement des transports publics à Genève, vous ayez oublié, Monsieur Grobet, de signaler qu'en 1975 la priorité aux transports publics avait été refusée par le peuple, suite au vote d'un référendum lancé par le TCS. C'est juste un tout petit oubli mais, malgré tout, je crois que, partis comme nous le sommes, nous pourrons faire un travail très constructif en commission.
M. Jean Spielmann (AdG). Certains font remarquer qu'il y a déjà un rapport et que l'on a déjà débattu des options prises par le Conseil d'Etat, mais je relève, quand même, de nombreuses contradictions.
On a dit que l'on pouvait examiner, en parallèle, le rapport du Conseil d'Etat renvoyé en commission et la motion. Mais les options divergent : il y a celles présentées par le RD 240 et celles préconisées dans la motion déposée aujourd'hui. C'est notamment le cas pour ce qui est du choix des réalisations, et c'est fondamental. Le tram 13 et l'écho très positif qu'il a suscité devraient nous engager pour la réalisation la plus légère et la plus rapide du développement des voies de tram, et nous inciter à déterminer, à la lumière des différents problèmes de la circulation, les tronçons les plus urgents à construire.
Dans son rapport 240, le Conseil d'Etat a clairement opté pour la rive gauche - il l'a confirmé tout à l'heure - avec le tronçon Cornavin-Annemasse. Or, on sait que ce trajet suscitera nombre d'interrogations, de remises en cause, de discussions concernant la voie de la micheline, entre autres avec les Français par rapport à la région transfrontalière, etc. En revanche, sur la rive droite, l'on ne peut plus se permettre d'attendre le départ de la mise en place d'un réseau de transport sur la route de Meyrin. Au passage, je rappelle qu'il était prévu de doter cette route d'une piste cyclable et d'un tram en site propre, lors du vote par ce Grand Conseil de son crédit de construction. Néanmoins, le Conseil d'Etat a construit la route de Meyrin sans respecter le vote du Grand Conseil, ce qui fait qu'aujourd'hui, sur cet axe, des gens ne peuvent pas monter dans le bus, faute de places aux heures de pointe, notamment aux Avanchets et à d'autres arrêts. Aujourd'hui déjà, il n'est plus possible de répondre à la demande de transport, malgré des bus de grandes dimensions et les essais faits avec des méga-bus. Aussi faudra-t-il, dans un avenir très proche, trouver le moyen de transport le plus performant, à savoir le tram, pour la route de Meyrin.
Dans la motion que nous défendons, il est vrai que nous reprenons l'option du Conseil d'Etat de prolonger la ligne 13 en direction de Sécheron et des Palettes, mais nous reprenons également celle qui donne la priorité à l'accélération des processus de réalisation sur la route de Meyrin, et c'est une priorité absolue ! En effet, le RD 240 dit en substance : «Nous allons construire jusqu'à Annemasse, ensuite nous examinerons le reste.». Ce n'est pas raisonnable. Il faut faire ce qui est possible, au moindre coût et le plus rapidement possible, afin d'insuffler une dynamique.
Monsieur Balestra, il est vrai qu'en 1975 la priorité absolue avait été refusée aux transports publics, mais de 1975 à aujourd'hui, les choses ont considérablement évolué et tout le monde se rend compte que si nous voulons créer des conditions-cadre favorables au développement économique, au déplacement des personnes et à des transports répondant aux besoins sociaux, on ne peut le faire, en milieu urbain, qu'en développant les transports publics. Le transport individuel, tout aussi nécessaire, devient complémentaire, parce qu'il a une fonction autre.
Il faut utiliser intelligemment nos deniers publics pour les investir sur les tronçons qui peuvent être rapidement mis en chantier. Les autorisations existent. Il n'y a pas d'opposition du côté des Acacias. De plus, des promesses ont été faites à la communauté carougeoise, lors de la réalisation du prolongement de la ligne 13 et du dépôt. On lui avait promis, en effet, de dégager cette artère en construisant un dédoublement jusqu'aux Palettes, du côté des Acacias. Il s'agit là aussi d'un secteur qui nécessite un développement urgent de transports publics.
Cette motion vient à son heure. Elle permettra à la commission de faire les choix qui s'imposent aujourd'hui. Il y a des contradictions évidentes entre la motion et le rapport 240 et il faudra les trancher. Pour ma part, je suis satisfait de constater que pratiquement sur tous les bancs de ce Grand Conseil, on accueille favorablement nos propositions. Je suis persuadé que la raison l'emportera et que les réalisations seront menées dans l'esprit même de cette motion.
M. Christian Grobet (AdG). Avant de répondre à M. Dessimoz, dont la déclaration ne correspond pas à la réalité, je voudrais revenir aux propos de M. Balestra. A juste titre, il a relevé que l'initiative sur les TPG, concrétisée par la suite, avait été rejetée en 1975, à l'issue d'une votation populaire. Mais elle ne l'avait été que sur un seul point, à savoir celui de «priorité absolue» des transports publics sur le trafic automobile. Cela ne signifiait pas que le peuple était opposé au développement des transports publics.
Le rappel historique des études, depuis 1975, annexé à la motion, n'est que le résumé, Monsieur Balestra, d'une longue saga qui aurait pu faire l'objet de tout un ouvrage. Par ce rappel, nous avons voulu simplement démontrer que c'est depuis 1975 que l'on parle du développement du réseau lourd des TPG et, plus particulièrement, du réseau tramway.
Alors, si l'on en parle depuis vingt ans et que l'on procède à des études - et je remercie M. Joye d'en avoir indiqué le montant élevé - c'est vraiment le moment de passer à la concrétisation et pas celui de reporter, après avoir réalisé avec succès le premier tronçon de la ligne 13, la suite de l'opération à dix ans.
Je suis navré d'apprendre, de la part du Conseil d'Etat, que ce dernier envisage de continuer à n'investir qu'une quinzaine de millions de francs par année pour le développement du réseau des TPG, alors que la loi prévoit que le montant attribué peut atteindre trente millions annuellement, et que cet énoncé était même destiné à induire un effort comparable à celui consacré, ces huit dernières années, à l'autoroute de contournement.
Or, que constate-t-on ? Alors qu'on voulait réduire l'effort pour l'autoroute de contournement, les investissements annuels y relatifs passent de trente à cinquante millions et, pour les TPG, on continue à piétiner avec douze ou quinze millions par année. Si, véritablement, il y a volonté, depuis vingt ans, de développer le réseau des TPG, c'est le moment de réaliser les projets qui sont prêts. Nous avons donc entendu avec satisfaction la déclaration de M. Joye qui diffère du rapport du Conseil d'Etat, puisque vous avez dit, Monsieur Joye, que les cinq sections mises à l'enquête publique seraient réalisées successivement, alors que le rapport du Conseil d'Etat, datant d'un mois, mentionne que trois de ces sections, à savoir les extensions de la ligne 13, seraient reportées à l'achèvement de la deuxième étape du métro léger Annemasse-Meyrin.
Je ne voudrais pas, Monsieur Dessimoz, qu'il y ait malentendu. Il est faux de dire, comme vous l'avez fait, qu'il avait été convenu que l'extension du tram 13 se ferait à partir de 2005. (Protestation de M. Dessimoz.) Alors, je vous ai mal compris. Toujours est-il que le plan du réseau annexé à la loi du 12 février 1995 est un réseau «Horizon 2005», ce qui veut dire qu'il devra être achevé à ce moment-là. L'idée, sans doute trop ambitieuse, était de réaliser simultanément le réseau tram et la ligne de métro automatique léger, avec, comme vous l'avez souligné, une première étape Rive-Cornavin.
Mais vous savez aussi bien que moi, Monsieur Dessimoz, que la mise au point du projet de métro allait prendre plusieurs années. Par conséquent, l'idée était d'avancer avec le réseau tram en attendant que démarre le réseau métro.
Le réseau métro automatique étant aujourd'hui reporté, vous savez comme moi et vous particulièrement, Monsieur Joye, en tant que chef du département des travaux publics, que l'étude d'un nouveau tronçon de tramway, qu'il s'agisse de celui de Cornavin-Meyrin qui, pour nous, est prioritaire, ou de celui Gare des Eaux-Vives-Annemasse, nécessite cinq ans, au minimum.
M. Claude Blanc. De votre temps, peut-être...
M. Christian Grobet. De mon temps, on a souligné la rapidité de la réalisation de la ligne du tram 13 et je souhaite au Conseil d'Etat de garder ce rythme. Je m'en contenterai, Monsieur Blanc !
En disant cinq ans, je suis même optimiste eu égard aux nombreuses difficultés qui surviendront. Par exemple, quand vous parliez de sites réservés, le projet, pour autant qu'il existe, n'a même pas résolu le problème des passages à niveau entre la gare des Eaux-Vives et Annemasse, qui incontestablement doivent disparaître sur une telle ligne.
Si on veut vraiment aller vers la France, il serait plus intelligent de prolonger simplement la ligne 12, à partir de Moillesullaz en direction d'Annemasse, en passant dans les quartiers résidentiels, ou, autre variante que j'avais suggérée en son temps, de remonter, depuis Moillesullaz, le Foron jusqu'à la ligne SNCF.
En revanche, je ne vois aucun sens au doublement de la ligne 12 entre Moillesullaz et la gare des Eaux-Vives et je suis ravi de vous entendre dire, Monsieur Joye, que nous serions sur la même longueur d'onde. (Contestation de M. Joye.) Inutile de froncer les sourcils, Monsieur Joye, on a le droit d'exprimer ses opinions... (Brouhaha.)
La présidente. Mais voyons, comme tout le monde est d'accord de renvoyer la motion en commission...
M. Christian Grobet. Mais cette dénégation est grave. Cela a été dit au caucus du PDC, voilà ! Je disais donc qu'il semblait y avoir un acquiescement du Conseil d'Etat, ce dont je me réjouissais, et qu'il serait plus rapide et efficace de prolonger la ligne du tram 12 de Moillesullaz à Annemasse, et que les Français la paient ! En attendant, que l'on réalise les tronçons programmés !
Dernière observation, Monsieur le conseiller d'Etat, si j'étais heureux de vous voir acquiescer à l'idée de la prolongation de la ligne 12, en revanche, j'ai été déçu d'apprendre que vous ne vouliez pas indiquer, pour le moment, l'état des oppositions à la procédure d'enquête publique de la concession pour les cinq sections d'extension du réseau tramway. Je ne vois pas ce qui vous empêche de dire quelles sont, aujourd'hui, les oppositions qui se sont manifestées pendant l'enquête publique du mois de mars. Il n'y a aucune raison d'attendre que ces oppositions soient traitées pour les connaître.
M. Hervé Dessimoz (R). Très brièvement, j'entends dire à M. Grobet qu'effectivement l'objectif était de réaliser pour 2005, je cite : «une ligne de métro reliant Rive à Meyrin, ainsi que quatre lignes de tramway». Je n'ai pas dit le contraire !
Deuxièmement, si la ligne 13 a été rapidement réalisée, c'est qu'il y avait une volonté politique manifeste de l'ensemble du parlement pour ce faire. Je vous rappelle que le prédécesseur, chargé du département des transports publics, a fait la quasi-unanimité dans ce parlement, sur le sujet ! Son esprit d'ouverture et son souci de traiter équitablement les différentes tendances du parlement ont fait que nous avons voté ce projet de loi consensuellement et dans l'enthousiasme, et que nous avons approuvé la réalisation rapide de la ligne 13.
Je pars du principe que, si tout le monde consacre ses forces à la réalisation de la liaison Cornavin-Meyrin, qui m'apparaît essentielle et prioritaire, elle se concrétisera rapidement. Mais je tiens à rappeler que la prolongation de la ligne 13 était prévue en deuxième étape; qu'elle n'était pas la priorité du moment, qui était reconnue pour le tracé place des Augustins-Cornavin. Je vois, Monsieur Spielmann, que vous m'approuvez, vous étiez à la commission.
M. Philippe Joye. Il va de soi que les tronçons suivants, notamment le tronçon dont parle M. Grobet, seront mis à l'enquête au plus vite, dès que l'on aura terminé la procédure des cinq demandes de concession en cours.
Pour ce qui est de l'état des oppositions à ce jour, nous avions demandé l'autorisation de les publier à l'Office fédéral des transports. Ce dernier s'est opposé à ce que les remarques, les questions et les oppositions formulées dans le cadre de l'enquête publique soient publiées et débattues avant qu'elles ne soient traitées.
En ce qui concerne la densité de charge du processus de construction d'une ligne de tram, hommage peut être rendu aux TPG, au DTPE et aux entreprises. Ils ont effectué un travail impeccable et permis la relative fluidité du trafic. Mais l'on constate que l'on ne peut guère charger plus le réseau. Aussi, un rythme de construction de quinze millions de francs par an n'est pas incorrect. Si faire se peut, on l'augmentera.
Mise aux voix, cette proposition de motion est renvoyée à la commission des transports.